Шопов с/у България

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CINQUIÈME SECTION AFFAIRE SHOPOV c. BULGARIE (Requête n o 11373/04) ARRÊT STRASBOURG 2 septembre 2010

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Нарушение на чл. 5.1, чл. 8 (на френски) (02/09/2010)

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ECHR

CINQUIME SECTIONAFFAIRE SHOPOV c. BULGARIE(Requte no 11373/04)

ARRT

STRASBOURG

2 septembre 2010Cet arrt deviendra dfinitif dans les conditions dfinies larticle44 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.En laffaire Shopov c. Bulgarie,

La Cour europenne des droits de lhomme (cinquime section), sigeant en une chambre compose de:

Peer Lorenzen, prsident,

Renate Jaeger,

Karel Jungwiert,

Mark Villiger,

Mirjana Lazarova Trajkovska,

Ganna Yudkivska, juges,

Pavlina Panova, juge ad hoc,et de Stephen Phillips, greffier adjoint de section,

Aprs en avoir dlibr en chambre du conseil le 6 juillet 2010,

Rend larrt que voici, adopt cette date:

PROCDURE

1.A lorigine de laffaire se trouve une requte (no 11373/04) dirige contre la Rpublique de Bulgarie et dont un ressortissant de cet Etat, M.Ruslan Alexandrov Shopov (le requrant), a saisi la Cour le 19 mars 2004 en vertu de larticle 34 de la Convention de sauvegarde des droits de lhomme et des liberts fondamentales (la Convention).2.Le requrant, qui a t admis au bnfice de lassistance judiciaire, est reprsent par MeS. Razboynikova, avocat Sofia. Le gouvernement bulgare (le Gouvernement) est reprsent par son agent, MmeS.Atanasova, du ministre de la Justice.

3.Le 3 avril 2008, le prsident de la cinquime section a dcid de communiquer le grief tir de larticle 8 au Gouvernement. Le 15 avril 2009, le prsident de la cinquime section a galement dcid de communiquer le grief tir de larticle 5 1 concernant le placement du requrant en hpital psychiatrique du 1er au 29 dcembre 2003. Comme le permet article 29 de la Convention, il a en outre t dcid que seraient examins en mme temps la recevabilit et le fond de laffaire.4.Mme Kalaydjieva, juge lue au titre de la Bulgarie, stant dporte (article 28 du rglement de la Cour), le 30 janvier 2009, le Gouvernement a dsign Mme Pavlina Panova comme juge ad hoc pour siger sa place (anciens articles 27 2 de la Convention et 29 1 du rglement).

EN FAIT

I.LES CIRCONSTANCES DE LESPCE

5.Le requrant est n en 1954 et rside Sofia.6.Avant les faits litigieux, il avait gr pendant quatorze ans une petite entreprise commerciale et ce travail constituait la source de ses revenus.

7.Le 22 septembre 2002, il fut conduit par son frre en consultation psychiatrique. Le mdecin prconisa le placement de lintress en hpital psychiatrique afin de lui faire suivre un traitement. En consquence, le frre du requrant saisit le procureur de district, le 23 septembre 2002, en lui demandant dinitier une procdure de placement en hpital psychiatrique.

8.Le 5 dcembre 2002, le procureur ordonna le placement du requrant en hpital psychiatrique afin deffectuer une expertise destine dterminer la ncessit dun traitement mdical obligatoire en vertu de la loi sur la sant publique. Le 17 dcembre 2002, lintress fut ds lors conduit en hpital psychiatrique et y resta jusquau 10 janvier 2003. Lexpertise mdicale fut envoye au parquet le 22 janvier 2003.

9.Le 29 janvier 2003, le procureur de district proposa au tribunal de district ( ) de Sofia de se prononcer sur le placement du requrant en hpital psychiatrique en vue dun traitement mdical obligatoire selon larticle 36 alina 3, combin avec les articles 59 62 de la loi sur la sant publique de 1973.

10.Dans la procdure judiciaire, le requrant fut reprsent par un avocat et entendu par les tribunaux.

11.Par un jugement du 3 avril 2003, le tribunal de district dcida de placer le requrant dans lhpital psychiatrique de Novi Iskar afin quil soit soumis un traitement mdical. Le tribunal constata en particulier que selon lexpertise psychiatrique du 10 janvier 2003, le requrant souffrait depuis environ douze ans dune schizophrnie paranode et quil navait suivi jusqualors aucun traitement mdical, mais quil avait en principe accept de prendre certains mdicaments. De lavis des experts, lintress tait une personne calme qui ne manifestait pas dagressivit et ne prsentait de danger ni pour lui-mme ni pour autrui. Toutefois, compte tenu de la nature de sa maladie, celle-ci risquait dvoluer vers une paraphrnie et si tel tait le cas, il existait une probabilit hypothtique que le requrant subisse une baisse des capacits de comprendre ses actes. Dans la mesure o il refusait de se soumettre un traitement mdical, il exposait sa sant de srieux risques et ds lors, les conditions dun placement taient runies.

12.Le requrant interjeta appel de ce jugement en contestant lquit de la procdure devant la juridiction de premire instance et la ncessit du traitement psychiatrique.

13.Par un jugement en date du 9 octobre 2003, le tribunal de la ville de Sofia ( ), remplaa la mesure de placement par un traitement mdical obligatoire en hpital de jour psychiatrique sans dterminer la dure du traitement. La juridiction de deuxime instance tint compte que le requrant ne prsentait aucun danger pour autrui et que le risque quil encourait pour lui-mme ne sexprimait que par le refus dadmettre quil tait malade et donc daccepter de se soigner. Le traitement mdical obligatoire, comprenant ladministration de mdicaments, pouvait ds lors se poursuivre sans quil y ait lieu de maintenir lintress en hpital.

14.Le requrant refusa de se soumettre au traitement en hpital de jour. Il apparat que le 1er dcembre 2003, il fut apprhend son domicile par la police, sur ordre dun procureur, puis menott et conduit de force lhpital psychiatrique. Un traitement mdical lui fut administr. Il quitta lhpital le 29 dcembre 2003.15.Depuis lors et jusqu la date des derniers lments verss au dossier en septembre 2009, le requrant sest rendu priodiquement lhpital de jour pour lapplication du traitement psychiatrique obligatoire, en excution du jugement du 9 octobre 2003.

II.LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

A.La loi sur la sant publique de 1973 ( )

16.En vertu de larticle 25 alina 2 de cette loi, telle quapplicable lpoque des faits, un traitement mdical tait administr avec le consentement du malade, sauf dans les cas o la loi prvoyait des soins obligatoires. Un tel cas tait prvu par larticle 36 alinas 3 et 6, combin avec les articles 59 62 de cette loi, qui indiquait quune personne souffrant de troubles mentaux pouvait tre soumise un traitement psychiatrique obligatoire en vertu de la dcision du tribunal de district lorsque, en raison de sa maladie, elle pouvait commettre des infractions significatives lordre public ou reprsentait un danger pour ses proches ou pour lautrui, ou lorsque son tat de sant risquait de saggraver srieusement.17.La procdure judiciaire tait engage sur proposition du procureur de district, qui tait tenu deffectuer au pralable une enqute destine valuer la ncessit dune telle procdure. A cet effet, le procureur invitait en principe la personne concerne se soumettre un examen psychiatrique.

18.En cas de refus de lintress, le procureur pouvait ordonner quil soit hospitalis de force dans un tablissement psychiatrique pour permettre la ralisation dune expertise (article 61 de la loi). La dure maximale de ce placement tait de trente jours, pouvant tre prolonge jusqu trois mois dans des cas exceptionnels. La loi ne prvoyait pas lobligation dobtenir un avis mdical avant dordonner une telle mesure.

19.Le tribunal se prononait sur la proposition du procureur et en cas de ncessit de procder un traitement obligatoire, il devait dterminer la forme du traitement - soins ambulatoires ( ), soins en hpital de jour psychiatrique ( ) ou placement de la personne dans un hpital psychiatrique ( ), ainsi que le type de lhpital pour le traitement impos. La loi ne contenait pas de dispositions sur lexcution de ces dcisions. Il apparat quen cas de refus de la personne concerne de se soumettre des mesures de traitement obligatoire sans internement, il convenait de saisir le tribunal nouveau afin quil se prononce, le cas chant, sur lapplication dautres mesures plus restrictives, y compris sur la ncessit du placement dans un hpital psychiatrique.20.Larticle 36 alina 9 disposait que le tribunal se prononait doffice, tous les six mois, sur larrt ou la prolongation du traitement obligatoire, en tenant compte de lexpertise prsente par ltablissement psychiatrique concern.

21.Selon larticle 64 de cette loi, lorsqu lexpiration du dlai du traitement fix par le tribunal lintress ntait pas guri, le tribunal pouvait statuer nouveau sur un traitement obligatoire, sur proposition du procureur de district et aprs avoir entendu un rapport psychiatrique. La loi ne prvoyait pas que la personne concerne pouvait demander au tribunal de mettre fin au traitement mdical obligatoire.B.La loi sur la sant de 2004 ( )

22.Cette loi, entre en vigueur le 1er janvier 2005, a abrog la loi sur la sant publique de 1973. En vertu de ses articles 146 164, le placement et le traitement obligatoire en tablissement psychiatrique des personnes atteintes de troubles mentaux seffectuent sur dcision dun tribunal de district. Les motifs autorisant un tel placement sont rests inchangs. Dsormais, toutefois, seul le tribunal est comptent pour ordonner la ralisation dune expertise et, si ncessaire, linternement de lintress pour les besoins de lexpertise, et ce aprs avoir entendu en audience publique la personne concerne, assiste par un conseil, et un psychiatre.

23.Selon larticle 162 de la loi, le tribunal se prononce sur la capacit de lintress de formuler ou non un consentement clair sur la ncessit des soins. Le tribunal fixe aussi un dlai pour le traitement. Cette disposition prvoit que le traitement peut tre effectu en soins ambulatoires ou avec placement en hpital psychiatrique.

24.En cas de constat dincapacit de lintress dexprimer un avis valable sur le traitement, le tribunal dsigne les personnes qui peuvent exprimer un tel avis sa place.

25.Aux termes de larticle 164 de cette loi, le traitement obligatoire se termine lexpiration du dlai fix par le tribunal. Celui-ci est tenu de se prononcer doffice tous les trois mois, et sur la base dune expertise mdicale, quant la ncessit de maintenir le traitement. Enfin, la personne concerne peut demander quil soit mis fin au traitement avant lexpiration du dlai dtermin par le tribunal lorsque les conditions justifiant le traitement obligatoire ne sont plus runies.

EN DROIT

I.SUR LA VIOLATION ALLGUE DE LARTICLE 5 1 DE LA CONVENTION

26.Le requrant se plaint davoir t priv de sa libert de manire irrgulire et arbitraire loccasion de son placement en hpital psychiatrique, du 1er au 29 dcembre 2003. Il invoque larticle 5 1 e), ainsi que larticle 8 de la Convention.

27.La Cour estime que ce grief doit tre examin sous langle de larticle 5 1 e) qui dispose:

Toute personne a droit la libert et la sret. Nul ne peut tre priv de sa libert, sauf dans les cas suivants et selon les voies lgales:

(...)

e)sil sagit de la dtention rgulire (...) dun alin (...);

28.Le Gouvernement estime que le placement de lintress correspondait son tat de sant, tel quvalu dans lexpertise mdicale du 10 janvier 2003, et a t ordonn par un procureur conformment la loi en vigueur.

A.Sur la recevabilit

29.La Cour constate que cette partie de la requte nest pas manifestement mal fonde au sens de larticle 35 3 de la Convention. Elle relve de plus quelle ne se heurte aucun autre motif dirrecevabilit. Il convient donc de la dclarer recevable.

B.Sur le fond

30.La Cour relve que le requrant a t plac dans un tablissement psychiatrique contre son gr du 1er au 29 dcembre 2003, sur dcision dun procureur. De lavis de la Cour, cette situation sanalyse en une privation de libert au sens de larticle 5 1 de la Convention, ce qui nest dailleurs pas contest par les parties.

31.La Cour rappelle que pour respecter larticle 5 1, une privation de libert doit tre rgulire et effectue selon les voies lgales. En la matire, la Convention renvoie pour lessentiel la lgislation nationale et consacre lobligation den respecter les normes de fond comme de procdure, mais elle exige de surcrot la conformit de toute privation de libert au but de larticle 5: protger lindividu contre larbitraire (Winterwerp c. Pays-Bas, 24 octobre 1979, 39, srie A no 33; Aertsc.Belgique, 30 juillet 1998, 46; Hutchison Reid c. Royaume-Uni, no50272/99, 47, CEDH 2003IV).

32.La Cour constate en lespce que le procureur avait ordonn lhospitalisation du requrant en vue dun traitement mdical obligatoire, alors que, dans le jugement du 9 octobre 2003, le tribunal de la ville de Sofia avait dcid que ce traitement serait effectu en hpital de jour. Dans ces circonstances, le procureur et la police ont outrepass les limites de ce jugement et le placement de lintress en hpital psychiatrique a t irrgulier au regard du droit interne.

33.Il sensuit quil y a eu violation de larticle 5 1. Il ny a ds lors pas lieu de dexaminer la question de savoir si la privation de libert litigieuse entre dans le champ de lalina e) de cette disposition.II.SUR LA VIOLATION ALLGUE DE LARTICLE 8 DE LA CONVENTION

34.Le requrant se plaint que les tribunaux lui ont impos un traitement psychiatrique en hpital de jour contre sa volont pendant plus de cinq ans. Il invoque cet gard larticle 8, dont les parties pertinentes se lisent ainsi:1.Toute personne a droit au respect de sa vie prive (...).

2.Il ne peut y avoir ingrence dune autorit publique dans lexercice de ce droit que pour autant que cette ingrence est prvue par la loi et quelle constitue une mesure qui, dans une socit dmocratique, est ncessaire la scurit nationale, la sret publique, au bientre conomique du pays, la dfense de lordre et la prvention des infractions pnales, la protection de la sant ou de la morale, ou la protection des droits et liberts dautrui.

A.Thses des parties

1.Le Gouvernement

35.Le Gouvernement estime que les dcisions des juridictions, ainsi que les actes accomplis en excution de celles-ci, ont entirement respect les exigences de larticle 8. La dcision concernant le traitement mdical obligatoire a t prise conformment la loi nationale et avait pour but de protger la sant du requrant. Le Gouvernement attire lattention sur le fait que la juridiction de deuxime instance a tenu compte du comportement non dangereux du requrant pour remplacer la mesure dinternement par une autre mesure moins contraignante, savoir ladministration des soins mdicaux obligatoires en hpital de jour. Le Gouvernement prcise que ce qui a t dterminant, aussi bien lors du jugement du 9 octobre 2003 quau moment du placement du requrant en hpital psychiatrique en dcembre2003, est le fait que ce dernier nadmettait pas le diagnostic mdical pos son gard et quil refusait le traitement. Cest notamment labsence de conscience chez le requrant de la ncessit de suivre un traitement mdical qui a justifi la mesure en cause, compte tenu du danger potentiel pour lui-mme, ses proches et la socit en gnral.

2.Le requrant

36.Le requrant affirme, pour sa part, que le fait davoir d se soumettre au traitement en cause contre sa volont a port atteinte son droit au respect de la vie prive consacr par larticle 8. Il a suivi ce traitement pendant plusieurs annes tant donn quil a t li par la dcision du tribunal et par crainte de se faire interner en cas de refus comme stait dj le cas en dcembre 2003. Cette atteinte naurait pas t prvue par la loi. Selon lexpertise psychiatrique, il ne reprsentait aucun danger pour la sant ou la vie dautrui, ni pour sa propre sant. Les mdecins avaient soulign le caractre totalement hypothtique du pronostic selon lequel lvolution de la maladie pourrait devenir source de danger, et les tribunaux avaient admis cette position. Ainsi, le constat que le requrant souffrait de schizophrnie et labsence de consentement au traitement auraient suffit aux autorits pour ordonner le traitement obligatoire.37.Sagissant du but lgitime poursuivi, le requrant soutient que le but avanc par les autorits pour justifier lingrence en cause, notamment protger sa propre sant, nest pas prvu dans larticle 8 2.

38.A titre subsidiaire, il considre que les mesures prises ont t excessives et disproportionnes au regard des circonstances. Il expose que tout au long de la procdure sur le traitement mdical obligatoire, les autorits nont pas examin la possibilit dune mesure moins restrictive, telle que par exemple un traitement volontaire.

39.Enfin, selon le requrant, les restrictions qui lui ont t imposes souffraient dabsence de garanties procdurales dans la mesure o les tribunaux ntaient pas tenus par la loi de dterminer la dure du traitement et o il ne disposait pas dun recours judiciaire permettant de faire examiner, des intervalles rguliers, la ncessit de poursuivre le traitement.

B.Lapprciation de la Cour1.Sur la recevabilit

40.La Cour observe que le Gouvernement na pas soulev dexception de non-puisement des voies de recours internes.

41.Par ailleurs, elle rappelle que la notion de vie prive recouvre lintgrit physique et morale de la personne (X. et Y. c. Pays-Bas, 26mars 1985, 22-27, srie A no 91 et Costello-Roberts c. Royaume-Uni, 25 mars 1993, 34, srie A no 247). En consquence, une atteinte mme minime lintgrit physique dun individu doit passer pour une ingrence dans le droit de celui-ci au respect de la vie prive nonc larticle 8 si elle a eu lieu contre la volont de cet individu (voir parmi dautres Storckc.Allemagne, no 61603/00, 143, CEDH 2005V et Juhnkec.Turquie, no 52515/99, 76, 13 mai 2008). Il nest pas contest en lespce quil y a eu ingrence dans le droit du requrant protg par cette disposition car le jugement du tribunal de la ville de Sofia du 9 octobre 2003 lui a impos un traitement mdical contre son gr. De plus, ce jugement a t excut par ladministration lintress de soins mdicaux rguliers, tout le moins jusquau mois de septembre 2009. La Cour conclut donc quil existe en lespce une ingrence continue dans le droit au respect de la vie prive du requrant.42.La Cour observe galement que ce grief nest pas manifestement mal fond au sens de larticle 35 3 de la Convention, et quil nest pas non plus irrecevable pour dautres motifs. Il doit ds lors tre dclar recevable.2.Sur le fond

43.Pour se concilier avec le paragraphe 2 de larticle 8, une ingrence dans lexercice dun droit garantit par celui-ci doit tre prvue par la loi, inspire par un ou plusieurs buts lgitimes daprs ce paragraphe et ncessaire, dans une socit dmocratique, la poursuite de ce ou ces buts (voir, parmi beaucoup dautres, Glass c. Royaume-Uni, no 61827/00, 73, CEDH 2004II).44.Selon la jurisprudence constante de la Cour, lexpression prvue par la loi impose non seulement le respect du droit interne, mais concerne aussi la qualite de la loi, qui doit etre compatible avec la preeminence du droit (voir, parmi beaucoup dautres, Halford c. Royaume-Uni, 25 juin 1997, 49, Recueil des arrts et dcisions 1997III et Rotaru c. Roumanie [GC], no 28341/95, 52, CEDH 2000V).45.Se tournant vers la prsente espce, la Cour observe que la dcision du tribunal du 9 octobre 2003 sur le traitement obligatoire a t prise sur le fondement de la loi sur la sant publique de 1973 prvoyant la possibilit de procder des soins psychiatriques contre la volont de la personne intresse lorsque son tat de sant risquait de saggraver srieusement (voir paragraphe 16). Ds lors, la dcision initiale des autorits judiciaires remplit lexigence de lgalit de la mesure.46.Par ailleurs, la Cour relve que le traitement obligatoire a t dcid pour une dure indtermine et a t effectu pendant une dure de plus de cinq ans. La Cour estime ds lors ncessaire de vrifier galement si la mise en uvre de la dcision initiale sur le traitement a galement tait prvue par la loi au sens de larticle 8. A cet gard, la Cour observe que la loi de 1973 et par la suite la loi de 2005 prvoient un mcanisme de contrle judiciaire automatique des intervalles rguliers sur la ncessit de poursuivre le traitement (voir paragraphes 20 et 25). Toutefois, il apparat clairement en lespce que depuis le dbut du traitement du requrant, les autorits judiciaires nont jamais engag un tel contrle, et le Gouvernement na dailleurs pas soumis dexplications cet gard.47.Dans ces conditions, la Cour considre que le maintien des soins psychiatriques obligatoires lgard de lintress pendant plus de cinq ans na pas eu lieu en conformit avec le droit interne, notamment en raison du fait que les valuations priodiques prvues par la loi nont jamais t appliques, et en labsence de tout lment suggrant que le requrant aurait pu contester la poursuite du traitement, tout le moins pour la priode antrieure lentre en vigueur de la loi de 2005.48.Il y a eu ds lors violation de larticle 8 sur ce point.

49.Eu gard la conclusion qui prcde, la Cour nestime pas ncessaire de vrifier dans le prsent cas le respect des autres exigences du paragraphe 2 de larticle 8.

III.SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLGUES

50.Invoquant larticle 3 de la Convention, le requrant prtend avoir subi des mauvais traitements de la part des policiers le 1er dcembre 2003. Au regard de larticle 5 1 e), il conteste la lgalit de son placement en hpital psychiatrique du 17 dcembre 2002 au 10 janvier 2003. Par ailleurs, lors de la prsentation des observations de la partie requrante en rponse celles du Gouvernement sur la recevabilit et le bien-fond de laffaire en cause, le 2 dcembre 2008, le requrant a tir un grief de larticle 5 4 concernant labsence dun recours interne permettant de contester la lgalit de son placement en hpital psychiatrique du 1er au 29 dcembre 2003. Sur le terrain de larticle 6, il se plaint enfin de labsence daccs linstance de cassation dans la procdure judiciaire sur le traitement psychiatrique obligatoire.51.En ce qui concerne cette partie de la requte, compte tenu de lensemble des lments en sa possession et dans la mesure o elle est comptente pour connatre des allgations formules, la Cour ne relve aucune apparence de violation des droits et liberts garantis par la Convention ou ses Protocoles. Il sensuit que ces griefs sont manifestement mal fonds et doivent tre rejets en application de larticle 35 3 et 4 de la Convention.IV.SUR LARTICLE 41 DE LA CONVENTION52.Aux termes de larticle 41 de la Convention,

Si la Cour dclare quil y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet deffacer quimparfaitement les consquences de cette violation, la Cour accorde la partie lse, sil y a lieu, une satisfaction quitable.

A.Dommage

53.Le requrant rclame 4 millions deuros (EUR) au titre du dommage moral quil aurait subi en raison du traitement mdical impos pendant plus de cinq ans, des traitements dgradants auxquels la police laurait soumis le 1er dcembre 2003, ainsi que de son placement en hpital psychiatrique deux reprises.54.Le Gouvernement conteste ces prtentions.

55.La Cour observe que les demandes du requrant au regard du prjudice moral subi en relation avec son placement en hpital psychiatrique du 17 dcembre 2002 au 10 janvier 2003 et les mauvais traitements allgus sont relatives aux griefs dclars irrecevables et les rejette.

56.Elle estime, en revanche, que le placement du requrant en hpital psychiatrique contre sa volont du 1er au 29 dcembre 2003, effectu en violation de larticle 5 1 (voir paragraphe 33), ainsi que le traitement mdical obligatoire auquel il a t soumis contrairement larticle 8 (voir paragraphe 48), lui ont caus un tort moral justifiant loctroi dune indemnit. Statuant en quit, comme le veut larticle 41 de la Convention, elle estime quil y a lieu doctroyer au requrant 5 200 EUR ce titre.

B.Frais et dpens

57.Le requrant demande galement 1 535 EUR pour les frais et dpens engags devant la Cour. Il prsente une convention dhonoraires conclue avec son avocate et un dcompte du travail effectu pour 18 heures au taux horaire de 80 EUR, soit un total de 1 440 EUR. Il produit galement un justificatif de frais de traduction hauteur de 85 EUR et demande 10 EUR au titre de frais postaux.

58.Le Gouvernement conteste ces prtentions.

59.Selon la jurisprudence de la Cour, un requrant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dpens que dans la mesure o se trouvent tablis leur ralit, leur ncessit et le caractre raisonnable de leur taux. Compte tenu de la complexit de la prsente affaire, mais aussi du fait quune partie des griefs ont t dclars irrecevables, et des critres susmentionns, la Cour estime raisonnable la somme forfaitaire de 1000EUR, tous frais confondus, dont il convient de dduire lassistance judiciaire verse par le Conseil de lEurope, soit 850 EUR. Elle accorde en consquence 150 EUR au requrant ce titre.C.Intrts moratoires

60.La Cour juge appropri de calquer le taux des intrts moratoires sur le taux dintrt de la facilit de prt marginal de la Banque centrale europenne major de trois points de pourcentage.PAR CES MOTIFS, LA COUR, LUNANIMIT,

1.Dclare, la requte recevable quant au grief tir de larticle 5 1 concernant le placement du requrant en hpital psychiatrique du 1er au 29 dcembre 2003, ainsi quau grief tir de larticle 8 de la Convention relatif la mesure de traitement mdical obligatoire en hpital psychiatrique de jour, et irrecevable pour le surplus;

2.Dit quil y a eu violation de larticle 5 1 de la Convention;

3.Dit quil y a eu violation de larticle 8 de la Convention;

4.Dita)que lEtat dfendeur doit verser au requrant, dans les trois mois compter du jour o larrt sera devenu dfinitif conformment larticle44 2 de la Convention, convertir en levs bulgares au taux applicable la date du rglement:

i.5 200 EUR (cinq mille deux cents euros) plus tout montant pouvant tre d titre dimpt, pour dommage moral;

ii.150 EUR (cent cinquante euros) plus tout montant pouvant tre d titre dimpt par le requrant, pour frais et dpens;

b)qu compter de lexpiration dudit dlai et jusquau versement, ces montants seront majorer dun intrt simple un taux gal celui de la facilit de prt marginal de la Banque centrale europenne applicable pendant cette priode, augment de trois points de pourcentage;

5.Rejette la demande de satisfaction quitable pour le surplus.Fait en franais, puis communiqu par crit le 2 septembre 2010, en application de larticle 77 2 et 3 du rglement.

Stephen PhillipsPeer Lorenzen

Greffier adjointPrsident