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Internationaux Magazine du Comité Français de la Chambre de Commerce Internationale Internationaux N° 103 - Juillet 2015 ® DR Le nouveau contrat-modèle ICC d'agence commerciale bientôt disponible Union Européenne : le futur Code des Douanes consacre le statut d'OEA Mise en place du brevet unitaire : un processus en souffrance Changement Climatique « Climat : il est indispensable que les entrepreneurs soient au premier rang » DOSSIER «Nous encourageons les entreprises et les collectivités à s’engager concrètement pour le climat » Laurent Fabius, Ministre des Affaires étrangères et du Développement international et Président de la COP21 Laurence Tubiana Interview exclusive Représentante spéciale pour la Conférence Paris Climat 2015

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InternationauxMagazine du Comité Français de la Chambre de Commerce InternationaleInternationaux

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Le nouveau contrat-modèleICC d'agence commercialebientôt disponible

Union Européenne : lefutur Code des Douanesconsacre le statut d'OEA

Mise en place du brevetunitaire : un processusen souffrance

Changement Climatique

«Climat : il est indispensable que lesentrepreneurs soient au premier rang»

D O S S I E R

«Nous encourageons les entrepriseset les collectivités à s’engagerconcrètement pour le climat»

Laurent Fabius,Ministre des Affaires étrangères et

du Développement internationalet Président de la COP21

Laurence TubianaInterview exclusive

Représentante spéciale pour laConférence Paris Climat 2015

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ÉCHANGES INTERNATIONAUXEST LE SEUL MAGAZINE D’INFORMATION

D’ICC FRANCE, COMITÉ NATIONAL FRANÇAISDE LA CHAMBRE DE COMMERCE

INTERNATIONALE

Éditeur : Comité Français de la Chambrede Commerce Internationale9 rue d’Anjou - 75008 Paris Tél : 01 42 65 12 66 Fax : 01 49 24 06 39www.icc-france.fr

Directeur de la publication : Gérard WORMS

Rédacteur en chef : François GEORGES

Conseillère éditoriale : Marie-Paule VIRARD

Régie publicitaire : Editions OPAS 41, rue Saint-Sébastien - 75011 Paris Tél. : 01 49 29 11 00 Fax : 01 49 29 11 46

Éditeur conseil : Jean-Pierre KALFON

Directeur commercial : David ADAM

Dépôt légal 92892

Imprimeur : PrintCorp

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R

ECHANGES INTERNATIONAUXMagazine du Comité Français de laChambre de Commerce Internationale

Juillet 2015 - N°103

Le mot du Président ………………………………………………2par Gérard WORMS

INTERVIEW EXCLUSIVE DE LAURENCE TUBIANA, Représentante Spéciale pour laConférence Paris Climat 2015 …………………… 3

INTERVENTION DELAURENT FABIUS,Ministre des Affaires étrangèreset du Développement internationalet Président de la COP21,au BUSINESS AND CLIMATE SUMMIT …………… 6

POLITIQUE GÉNÉRALE

■ Union Européenne : le futur Code desDouanes consacre le statut d'OEA …………… 8Jean-Marie SALVA, Avocat associé, DS Avocats,

Président de la Commission Politique Commerciale et

Règlementations Douanières Internationales d'ICC France

■ Mise en place du brevet unitaire : un processus en souffrance …………………… 10Thierry SUEUR, Vice-président propriété intellectuelle

d'Air Liquide

AUTORÉGULATION

■ Le nouveau contrat-modèle ICC d'agencecommerciale bientôt disponible ……………… 11Christoph Martin RADTKE, Président de la

Commission Droit et Pratiques du Commerce

International d’ICC France

RÉSOLUTION DES LITIGES

■ Les nouvelles règles d'expertise d'ICC …… 12José ROSELL, Avocat associé,

Hugues Hubbard & Reed LLP

■ La langue de l’arbitrage : une jurisprudencerassurante ………………………………………………… 13Béatrice CASTELLANE, Avocate, AMCO,

Cabinet Castellane

DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

S O M M A I R E

POINTS DE VUE

■ Autoliquidation de la TVA à l'import : une simplification attendue …………………………… 29Hélène GUILLEMET, Sous-directrice du commerce

international à la Direction générale des douanes

et des droits indirects

■ Prévention de la corruption : vers une évolution du modèle français ? …………………… 30Juliette VANHOVE, Compliance Manager, Cambridge

University Press

ÉVÉNEMENT

■ Le Cercle Montesquieu se penche sur lesenjeux du Traité Transatlantique ……………… 32Eric GARDNER DE BÉVILLE, Avocat à la Cour, Client

Relations Officer

■ L’économie et les territoires au cœur del'action en faveur du climat………………………… 23Gilles BERHAULT, Président du Comité 21

et du Club France Développement durable

■ Le groupe Air France-KLM s'engage pour le climat ……………………………………………………… 25Nathalie SIMMENAUER, Directrice du Développement

durable d'Air France

■ Le Fonds Vert pour le Climat, un financement innovant ……………………………… 26Gabriela G. MERLA, Avocat associé, Cabinet Smith

d’Oria, Observatrice auprès du Climate Investments

Funds représentant le secteur privé

■ Déplacés environnementaux : il est grand temps d'agir……………………………… 27George J. GENDELMAN, Co-fondateur des Ateliers

de la terre,

Yvon MARTINET, Président du Club des avocats

environnementalistes (CDAE),

Patricia SAVIN, Présidente d'Orée

■ Présentation du dossier ………………………………… 15François GEORGES, Délégué Général d'ICC France

■ «Il faut modifier notre modèle de développement en profondeur»………… 16Jean JOUZEL, Directeur de Recherche au CEA,

Vice-président du groupe scientifique du GIEC

■ COP21 : les entreprises se mobilisent … 18Gilles VERMOT DESROCHES, Directeur Développement

durable de Schneider Electric

■ ICC France propose un code de «bonnespratiques climatiques» pour les entreprises …………………………………………………… 20Dominique HÉRON, Président de la Commission

Environnement et Énergie d'ICC France

■ Business and Climate Summit : les gouvernements reconnaissent le rôleessentiel des entreprises …………………………… 21

sur et1

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La présente livraison de notre magazine inclut, à moins de 200 jours de lagrande conférence sur le climat, «COP21», un dossier central consacré à cethème majeur pour l’avenir de tous. Le Ministre Laurent Fabius et MadameLaurence Tubiana, ont bien voulu nous confier l’état de leurs réflexions, et deleur action. Ils contribuent ainsi à notre rapport d’étape, qui rend aussi comptedu grand rendez-vous «Business and Climate Summit» tenu à Paris en pré-sence de près de 1800 participants, et dont l’ICC a été l’un des organisateurs.

Parmi les autres grands sujets d’actualité auxquels le Comité français aconsacré ses efforts depuis le début de l’année, figure bien sûr la négociationentre l’Europe et les Etats-Unis en vue d’un futur traité régissant leurséchanges. Nos discussions avec le Secrétaire d’Etat au Commerce Extérieur

Matthias Fekl, dont je salue les qualités d’écoute, ont contribué à faire adopter par la France une positionplus constructive sur un aspect particulièrement sensible de cette négociation. Celui-ci concerne les procédures de règlement des différends susceptibles d’opposer les investisseurs et les Etats. Le cœur du traitén’est pas là (il est dans les harmonisations règlementaires à convenir, et ce n’est pas une mince affaire),mais le futur dispositif permettant la protection des investisseurs est celui qui, présentement, défraie le plusla chronique. Nous poursuivrons notre combat pour qu’il lui soit apporté une solution positive.

L’actualité pour l’ICC, c’est aussi la ratification du «Trade Facilitation Agreement», dont nous avons rappelé lors de notre récent Conseil à Turin, qu’il était essentiel de l’obtenir rapidement d’une majoritéd’Etats-membres. A l’heure où j’écris ces lignes, cinq pays seulement sur 160 ont officiellement ratifié cetaccord. La France et l’Europe se doivent de figurer bientôt parmi les pays y ayant procédé.

Après ce bref tour d’horizon, nos lecteurs ne s’étonneront pas que je termine le présent éditorial en saluantquelques personnes ayant contribué de façon éminente à l’activité de notre comité, ou s’apprêtant à le faire.En premier lieu, je voudrais rendre un hommage ému à Marie Psimenos de Metz, récemment disparue.Après avoir été une brillante «First Director» de l’ICC, elle a été très longtemps la Déléguée Généraled’ICC France, poste qu’elle a occupé avec une vigueur et un brio dont nous garderons le souvenir.

Du côté de l’arbitrage, trois personnalités sont, en ce mois de juin, en train de quitter leurs fonctions aprèsles avoir assumées à la satisfaction de tous. La première est bien sûr le Président de la Cour, John Beechey,à qui tous les membres du Conseil International tenu à Turin le 9 juin ont adressé une longue et sincèrestanding ovation. Son successeur Alexis Moore, prendra ses fonctions le 1er Juillet, et je ne doute pas deses futurs succès. Les deux autres personnes terminant leurs mandats sont nos représentants français ausein de la Cour, Me Philippe Boivin et Emmanuel Vuillard. Ayant pris leur retraite, ils quittent la Couraprès y avoir été très appréciés. Philippe Boivin cessera aussi, à la fin de l’année, d’exercer la Présidencede notre Comité Consultatif de Sélection et de proposition d’arbitres, qu’il a assurée avec sa souriante autorité. C’est un arbitre international très reconnu, et engagé par ailleurs avec grande efficacité dans nosopérations de formation : Laurent Jaeger, qui lui succèdera à cette présidence. A la Cour, deux juristes d’entreprises très compétentes, Marie-Christine Guerrier et Isabelle Hautot, ont été nommées en remplacement de Philippe Boivin et Emmanuel Vuillard. Enfin, je me réjouis que Gianmarco Monsellato,directeur général de TAJ, ait accepté notre proposition de présider la Commission Fiscale d’ICC France. Il va y apporter sa très grande expérience de la fiscalité internationale, à un moment où ce sujet est parti-culièrement «chaud», écartelé qu’il est entre le perfectionnisme – à nos yeux excessif – des propositionsde l’OCDE et les subtilités d’une optimisation non moins excessive de certaines (mais certaines seulement)multinationales. L’ICC peut et doit incarner des positions de juste milieu, et je ne doute pas que le nouveauPrésident de notre Commission saura y contribuer activement.

Une fois n’est pas coutume, les nouvelles concernant nos divers collègues ont pris autant de place dansmes propos que les sujets de fond. En vérité, ceux-ci ne seraient pas traités avec l’efficacité que nousrecherchons si, comme le montrent les exemples cités ci-dessus, François Georges et moi ne réussissionspas à mobiliser des hommes et des femmes remarquables, auxquels je redis mon estime et ma gratitude.

Le mot du Président

ÉDITORIAL

Gérard WORMS

Président d’ICC FrancePrésident d’honneur de la Chambre de Commerce Internationale

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02 Mot du president - model mag 18/06/15 16:12 Page 2

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INTERVIEW EXCLUSIVE

INTERVIEW EXCLUSIVE DE LAURENCE TUBIANA, REPRÉSENTANTE SPÉCIALE POUR LA CONFÉRENCE PARIS CLIMAT 2015

Représentante Spéciale pour la Conférence Paris Climat 2015, Laurence Tubiana est unespécialiste mondialement reconnue de la question climatique. Elle dessine ici les conditionsd'un succès du rendez-vous de décembre, et précise le rôle que les entreprises, notammentl'ICC, peuvent jouer dans la perspective d'un accord à l'occasion de la COP21.

«Nous encourageons les entrepriseset les collectivités à s’engagerconcrètement pour le climat»

dommage, et d’ailleurs sans douteimpossible, de repartir d’une feuilleblanche. Cela étant, je pense en effetqu’il est temps de marquer un tournant.La conclusion d’un accord universel surle climat constitue en elle-même uneinnovation historique, et nécessaire : ilfaut que tous les États se mettent àavancer dans la même direction, mêmes’ils ne le font pas au même rythme ouen suivant le même chemin. Une autre innovation de la COP21sera, à mes yeux, de rapprocher lesacteurs non-étatiques du centre dujeu. Entreprises, collectivités, ONG etcitoyens ont trop longtemps étéconfinés au rôle de spectateurs de lanégociation sur le climat. Il ne s’agit

pas de décharger sur eux la respon-sabilité des États, qui reste primordia-le, mais de leur permettre d’appuyer,et parfois de stimuler, l’action desgouvernements. C’est pour cela que nous défendons l'idée d'une«Alliance de Paris pour le Climat»,qui transcende les divisions habituelleset rassemble tous ceux qui sont prêtsà prendre leur juste part de ce déficommun. Enfin, il faut en finir avec la vision dudéfi climatique comme une contrainte.Il faut au contraire que tous y voientune opportunité, l’occasion de provoquer et d’accélérer des change-ments, et donc des innovations techniques et sociales : la transitionvers des sociétés et des économiesplus sobres en carbone et plus rési-lientes ; le déploiement massif des énergies renouvelables et des techno-logies bas carbone pour compenser ledéclin prévisible des combustibles fossiles ; la conciliation entre l’aspira-tion légitime de tous à la prospérité etles limites naturelles de notre planète.C’est cet esprit d’opportunités écono-miques et sociales que nous voulonsinsuffler à la COP21.

E.I. Quels sont, pour la présidence

française, les grands objectifs qu'il

s'agit d'atteindre absolument pour

que l'«accord ambitieux et contrai-

gnant» espéré soit réalisé ?

Echanges Internationaux. On

entend parfois que l'accord de

Paris sera (ou devrait être) en

rupture fondamentale avec ce que

fut jusqu'à présent la discussion

mondiale sur le changement clima-

tique. En quoi la 21ème conférence

climat de décembre 2015 sera-t-elle

novatrice ?

Laurence Tubiana. Je ne sais pas si l’ondoit parler de «rupture fondamentale»,car on ne peut pas laisser derrière nousplus de vingt ans de négociations climatiques internationales, qui ont parfois déçu, certes, mais aussi créédes concepts directeurs, des institutions,et une culture de coopération. Il serait

Nous défendons l'idée d'une« Alliance de Paris pour leClimat », qui transcende lesdivisions habituelles et rassemble tous ceux qui sontprêts à prendre leur justepart de ce défi commun.

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INTERVIEW EXCLUSIVE DE LAURENCE TUBIANA, REPRÉSENTANTE SPÉCIALE POUR LA CONFÉRENCE PARIS CLIMAT 2015

INTERVIEW EXCLUSIVE

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système robuste de mesure, rappor-tage et vérification (MRV) : il faut queles actions prises par chaque Étatsoient transparentes et crédibles.C’est à cette condition que les autrespays pourront renforcer leur engage-ment et que les investisseurs pour-ront prendre des décisions éclairées.

E.I. Il ne suffit pas de se mettre

d'accord sur des objectifs ambitieux,

encore faut-il s'en donner les

moyens. Or, nous savons que l'argent

public est nécessaire mais insuffi-

sant. Quelles pistes pour trouver des

modes de financement innovants ?

L.T. L'argent public est nécessaire. Les pays en développement attendent des pays riches des assurances sur le respect de leur engagement deCopenhague de mobiliser pour eux 100milliards de dollars par an (de fondspublics et privés) d'ici à 2020. Ilconviendra de démontrer de manièrecrédible que les pays développés sonten bonne voie de remplir leur engage-ment. J'ajoute que le lancement duFonds vert nous permettra, d'ici à laCOP21, de participer au financementde projets d'adaptation au changementclimatique des pays les plus vulnéra-bles. Au-delà de ces 100 milliards, ce sont plus largement des milliers de milliards d'investissements quidevront, dans les prochaines années,être réorientés vers des procédés ettechnologies sobres en carbone.L’argent public joue en effet un rôledifficilement remplaçable, notam-ment aussi pour partager le risqueavec les investisseurs privés oufinancer des projets d’adaptation,souvent moins rentables que desprojets visant à réduire les émissions(énergie, agriculture, transports...).Le contexte budgétaire actuel obligeà trouver des alternatives. La Franceest en pointe de cette réflexiondepuis plusieurs années. Nousœuvrons au sein de l’Union euro-péenne pour qu’une taxe sur lestransactions financières soit mise enœuvre à l’échelle communautaire, et

affectée en priorité à la solidaritéinternationale et la lutte contre ledérèglement climatique. Afin d’explorer d’autres pistes, lePrésident de la République a confié àPascal Canfin et Alain Grandjean lamission de conseiller le gouvernementsur les financements innovants à mettre en œuvre pour aider les paysdu Sud face au changement clima-tique. Les conclusions de cette missionviendront alimenter le plaidoyer de laFrance en faveur des financementsinnovants dans les différentes encein-tes internationales. Au-delà de laFrance, l’Allemagne, qui préside cetteannée le G7, va jouer un rôle majeurpour mobiliser les financementspublics des pays les plus riches.

E.I. Quels mécanismes de solidarité

faut-il mettre en place pour aider

les pays en développement à

avancer vers l'économie pauvre en

carbone sans passer par l'étape

intensive que les pays développés

ont connue ?

L.T. Le premier de ces mécanismes,c’est le volet «financements», quenous venons d’évoquer. Le deuxième,c’est le transfert de technologies. LaConvention climat dispose déjà d’unCentre des Technologies Climatiques,opérationnel depuis octobre 2013 etappuyé par un réseau, qui déploie àtitre gracieux – et sous réserve d’unedemande des pays en développement –des missions d’expertise techniquepermettant de structurer des projetsd’atténuation ou d’adaptation cohé-rents avec les contextes locaux.Toutefois, la grande majorité desactions impliquant des technologiesrésilientes et/ou bas carbone se situehors du cadre de la Convention, etimplique au premier plan les entre-prises, en qualité de détentrices destechnologies. Via l’«Agenda des solu-tions», nous cherchons à mettre l’accent sur les technologies dedemain et à les rendre accessiblespour le plus grand nombre : énergiesolaire concentrée, stockage de l’électricité, capture et stockage ducarbone… Nous souhaitons faire à Parisla démonstration d'une mobilisation

L.T. On attend d’une présidence de«COP» une neutralité stricte. Ce n’estpas notre rôle de dicter à l’avance lecontenu de l’accord, qui devra êtreécrit et conclu par l’ensemble desÉtats parties à la Convention climat.Mais il est vrai que nous avonsquelques propositions de solutions,voire de consensus, que nous évo-quons avec nos interlocuteurs, sanstoutefois outrepasser notre rôle ettenter de les imposer contre leurvolonté. Nous devons garder le cap etramener les négociateurs à l’objectifqu’ils doivent poursuivre : l’obtentiond’un accord qui nous place sur une trajectoire de développement compatible avec la stabilisation del’accroissement des températuresmoyennes à moins de 2°C.Le rôle des contributions nationalessera, comme vous le notez, détermi-nant. Des divergences existent surl’opportunité de les inclure dans l’ac-cord, ou plutôt en annexe. Quoi qu’ilen soit, l’essentiel est que ces contribu-tions soient ambitieuses et dévoiléessuffisamment en amont de la COP21pour créer un effet d’entraînement. Etsi ces contributions ne suffisaient pas,à elles seules, à nous mettre sur lavoie des deux degrés, il faut dès maintenant prévoir les moyens derespecter ce mandat qui nous a étédonné : en incluant dans l'accord, parexemple, une clause de revue quienjoigne les États à mettre de nou-veaux engagements sur la table tousles cinq ou dix ans ; en y inscrivant un objectif de long-terme qui soit la traduction opérationnelle des deuxdegrés (par exemple, un objectif deneutralité carbone dans la deuxièmemoitié du siècle et des trajectoiresnationales de «décarbonation» deséconomies profondes à long terme). Enfin, il est essentiel que l’accordcrée de la confiance entre les pays.Par exemple, via le principe de «no backsliding» (pas de retour enarrière) : les engagements nouveauxne peuvent que constituer un progrèspar rapport aux précédents. Maisaussi, de façon plus générale, par un

Bio express. Laurence Tubiana.

Représentante Spéciale de Laurent Fabius pour la Conférence ParisClimat 2015/COP21, Laurence Tubiana est une spécialiste mondialement

reconnue des questions climatiques. Diplômée de l'IEP Paris et docteure ensciences économiques, elle a fondé l'Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) et préside notamment le conseild'administration de l'Agence française de développement.

Il faut voir dans le défi climatique une série d’opportunités économiques et sociales.

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INTERVIEW EXCLUSIVE

INTERVIEW EXCLUSIVE DE LAURENCE TUBIANA, REPRÉSENTANTE SPÉCIALE POUR LA CONFÉRENCE PARIS CLIMAT 2015

accrue des programmes de rechercheet développement, publics et privés,dans ces secteurs.J’ajouterai enfin qu’il faut fournir unappui particulier aux pays en dévelop-pement sur le volet adaptation : c’estune demande politique forte de leurpart, car ils considèrent que l’enjeuclimatique est autant un enjeu d’adaptation des sociétés aux dérè-glements existants ou futurs, que deréduction des émissions. Par exem-ple, la France a proposé - lors de laconférence de Sendai - le renforce-ment des systèmes d’alertes auxcatastrophes climatiques, avec l’objectif de fournir à tous les paysconcernés des données que plusieursÉtats tirent de leur réseau mondial desurveillance météorologique et ainsid’avertir à temps les populations del’imminence d’une catastrophe,notamment par l’envoi de SMS.

E.I. Un des enjeux de Paris Climat

2015 est que l'accord entre gouver-

nements se fasse en synergie avec

la société civile. Concrètement,

comment allez-vous l'associer -

notamment les entreprises - à sa

préparation ?

L.T. La France prévoit plusieursmoyens, très complémentaires, d’associer la société civile. Tout d'abord, à l’occasion de nos déplace-ments à l’étranger, nous prévoyonspresque systématiquement des ren-contres avec des représentants de lasociété civile afin de partager avec euxnotre vision de la COP21, mais surtoutde recueillir la leur. Nous rencontronsaussi fréquemment les organisationsfrançaises : la Ministre de l’Écologie,du Développement durable et de l’Énergie a joué un rôle particulière-ment important à cet égard. Nous avons également ressenti lebesoin de structurer davantage le dialogue avec la société civile. Pour lesONG, cela prendra la forme de sessionsd’échanges avec nous-mêmes et noscollègues péruviens à l’occasion desréunions informelles que nous organisons jusqu’à la COP21. Pour les

entreprises, il s’agira d’un «Businessdialogue» à part, inspiré par ce qui aété fait par le Mexique en amont de laCOP16 de Cancun. Ce dialogue réuni-ra un panel représentatif de chefsd’entreprises internationaux et denégociateurs et décideurs politiques.Il permettra de recueillir les proposi-tions et les attentes du secteur privévis-à-vis des résultats de la COP21,ainsi que de renforcer l’appropriationpar les acteurs économiques desenjeux liés au climat. Enfin, et c’est là une innovation impor-tante, nous encourageons égalementles entreprises et les collectivités às’engager concrètement pour le climat.Le dialogue est essentiel, mais il nefaut pas se contenter de déclarations :ces acteurs ont également des leviersqui leur sont propres, et qu’ils doiventactionner sans forcément attendrel’impulsion des États. On estime ainsi,par exemple, que plus de la moitié desdécisions qui affectent notre climatsont prises au niveau local. Nous nousefforçons donc de renforcer la visibilitépolitique des nombreuses initiatives,volontaires et sectorielles, qui existenten faveur du climat : campagnes «100 % renouvelables» ou «zéro défo-restation», coalition pour un prix sur lecarbone (Carbon Pricing LeadershipCoalition), partenariats technologiquespublic-privé…

E.I. Quel rôle la Chambre de

Commerce internationale, l’Organi-

sation Mondiale des Entreprises, déjà

fortement engagée dans le processus

COP21, peut-elle jouer dans ce travail

de préparation ? Quel message sou-

haitez-vous adresser à nos membres

sur ce point ?

L.T. Il est vrai que l'ICC est déjà trèsimpliquée dans la préparation de ParisClimat 2015, notamment du fait de sonrôle de point focal pour les entreprisesau sein des négociations climatiques,mais aussi de son implication dansl’organisation du «Business andClimate Summit», fin mai à Paris. Peut-être pourrait-elle faire encoredavantage au niveau de la prépara-tion des contributions car, au-delàdes deux semaines de «COP» et desévénements ponctuels, c’est là quebeaucoup de choses vont se jouer.L'ICC a un réseau extrêmement éten-du : elle pourrait le mobiliser pourfaire entendre, auprès des gouverne-ments nationaux, l’appétit des com-munautés locales d’affaires pour une

réglementation plus forte en faveurdu climat. Elle pourrait aussi, jepense, faire un effort particulier endirection de certains secteurs straté-giques (les énergies fossiles, la construction, …) qui ne paraissentpas toujours les plus enthousiastesvis-à-vis d’une transformation de noséconomies. Il est plus facile de prê-cher les convaincus, mais plus utiled’aller discuter avec ceux qui neregardent les négociations climat quecomme un frein à leur activité. Quant aux entreprises qui ont adhéré àvotre réseau, je ne peux que leurrecommander deux choses : la cohé-rence et la lucidité. La cohérence,parce qu’il y a encore trop d’entrepri-ses qui affichent publiquement leurvolontarisme écologique, sans quecela ne soit suivi de faits concrets, ouqui confinent la responsabilité socialeet environnementale à l’annexe de leurrapport financier plutôt que d’en fairele cœur de leur stratégie. Et la lucidité,parce que la réussite d’une entreprisedépend souvent de sa capacité à anti-ciper les bouleversements à venir :celui du climat en est un, et par biendes aspects, il a déjà commencé. Il estimportant que le secteur privé intègrecette nouvelle dimension, et compren-ne à quel point elle change la donne.Plus une entreprise entame tôt satransition vers un modèle économiquesobre en ressources et résilient auxeffets du dérèglement climatique, pluselle pourra tirer son épingle du jeu faceà la concurrence. La COP21 est un enjeu difficile, maisenthousiasmant, car cette conférencenous donne l'opportunité de construireensemble le monde que nous voulonsdemain. Nous avons besoin de l'aide detous et je vous demande la vôtre.

Au-delà des 100 milliards duFonds vert, des milliers demilliards d'investissementsdevront, dans les prochainesannées, être réorientés versdes procédés et technologiessobres en carbone.

L'ICC pourrait mobiliser sonréseau pour faire entendre,auprès des gouvernementsnationaux, l’appétit des communautés locales d’affairespour une réglementation plusforte en faveur du climat.

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LAURENT FABIUS AU BUSINESS & CLIMATE SUMMIT

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«Climat : il est indispensable que les entrepreneurs soient au premier rang»

En clôture des débats du Business & Climate Summit organisé fin mai à Paris, LaurentFabius, Ministre des Affaires étrangères et Président de la COP21, est venu dire aux chefsd'entreprises réunis au siège de l'Unesco pourquoi et comment il espérait voir le rendez-vous de décembre couronné de succès. Voici les extraits marquants de son intervention.

Laurent FABIUS, Ministre des Affaires étrangères et du Développement international et Président de la COP21

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l'une des raisons pour lesquelles nos prédécesseurs ont eu tant de difficultés, c'est qu'à l'époque, le phé-nomène scientifique lui-même étaitcontesté et son origine humaine l'étaitégalement. Je sais bien qu'il existe despersonnes - qui voudraient bien êtredes personnalités - qui continuentcette contestation, mais cela n'a rien àvoir avec ce que c'était avant. (…). Un troisième élément a changé, et onn'a cessé de le rappeler au cours deces deux journées, c'est que les technologies ont changé, elles sontdevenues beaucoup plus accessibles.Hier, l'une des personnalités présen-tes disait qu'en ce qui concerne lesolaire, le coût des technologies avaitété divisé par cent depuis 25 ans.C'est la même chose dans l'éolien eton peut anticiper qu'il y aura de nou-veaux sauts technologiques. Cet accèsà la technologie est donc beaucoupplus fort, beaucoup plus simple etbeaucoup moins cher qu'auparavantet, j'y reviendrai dans un instant, c'estégalement vrai pour les finances.Et puis, il y a la politique qui a changé. (…). L'accord entre le

président Obama et le président chinois est une très grande décisionqui était absolument inconcevable il ya quelques années et qui a levé lesréserves de beaucoup de pays parceque si les deux premières puissanceséconomiques du monde et les deuxpremiers émetteurs de gaz à effet deserre du monde se mettent d'accordpour aller dans la bonne direction,cela devient de plus en plus difficiled'aller dans la mauvaise.Le dernier élément qui, à mon avis, achangé, c'est vous. Pas vous person-nellement, mais la communauté des entreprises qui maintenant, non seulement est d'accord, parfoismême enthousiaste et aux premièresloges pour aller vers une action contrele dérèglement climatique. (…).Ce qui m'a frappé dans ces deux jours,c'est que chacun doit faire sa part duchemin, nous les gouvernements, collectivement puisque c'est un accordinternational, nous devons faire notrepart du chemin et donner le signal ; onn'a cessé de le rappeler, en particulierles responsables d'entreprises.Lorsque l'on est chef d'entreprise, ona la responsabilité d'une collectivité et,bien sûr, on peut avancer au nom demotifs généreux, humanistes, mais ilfaut aussi qu'au moment où l'on publieles résultats, ils soient là. Nous avonsdonc à donner ce signal et ce sera lesens de la COP21.Je remercie Christiana(1) et je remercied'une façon générale les Nationsunies qui se mobilisent formidable-ment dans le bon sens.

Quatre objectifs simples pour la

COP21

Nous nous fixons quatre objectifssimples. D'abord, ce qu'il y a de plus

Je voudrais remercier celles etceux qui ont permis ces deuxjours qui, je crois, ont été extrê-

mement utiles et en même tempschaleureux. Il y a eu un momentumqui est fort. J'imagine, et j'en suissûr, que l'on souhaite tous que laCOP21 soit un succès. Je ne suis pasle dernier à le souhaiter pour des raisons évidentes mais avant d'êtreenthousiaste - et nous le sommestous -, il faut se demander pourquoi,à Paris, il y aurait plus de chance desuccès qu'avant (…).

Des raisons objectives d'être

optimistes

D'abord, il y a une différence qui estregrettable, c'est que le dérèglementclimatique a augmenté, cela se voitdans les chiffres ; vous les connaisseztous. Cette situation regrettable etmême dramatique fait que la pression pour trouver des solutionsest plus forte. C'est un premier élément objectif.Le deuxième élément objectif, c'estqu'il ne faut jamais perdre de vue que

«

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complexe à atteindre, il faut que nousarrivions à un accord universel. Celan'a jamais été possible, maintenantc'est nécessaire. Vous connaissez lestermes, deux degrés, «legally bin-ding», différenciés et, en mêmetemps, j'ajouterai pour ma part durables, car il ne s'agit pas que leschoses s'arrêtent en 2030, il fauttrouver des mécanismes qui nouspermettent de continuer. Nous tra-vaillons d'arrache-pied à ce premierobjectif et si nous y arrivons, ce seraévidemment le signal majeur, nousn'y sommes jamais parvenus.Le deuxième signal, le deuxièmeobjectif, ce sont les fameux INDCs,les contributions que chacun est entrain de publier. À ce jour, j'ai fait lepoint, il y a 38 pays qui ont publié leurcontribution. Elles sont d'ambitioninégale mais c'est déjà une choseimportante et cela représente environun tiers des émissions. Il faut arriverà 100%, ce sera peut-être difficilepour certains pays parce qu'il y a desdifficultés techniques mais aumoment de la COP de Paris ou mêmeavant, fin octobre, nous devrions êtreà 90% des émissions. (…). La COP21 se penchera sur la questiondu prix du carbone qui a été sans cesseévoqué ici avec juste raison. Peut-ondire que l'on parviendra, dès la COP21à quelque chose ? Je n'en suis pas sûrmais il faut redoubler d'efforts parcequ'au-delà de l'accord universel, il faut qu'il y ait des engagements desgouvernements et si beaucoup de gou-vernements s'engagent dans cettedirection, ce sera un signal majeur.Le troisième signal, le troisièmeobjectif, concerne la technologie, lefinancement, l'investissement. LeFonds vert est là. On nous dira que cen'est qu'un peu plus de 10 milliardsde dollars, mais il y a l'effet de levieret il va commencer, j'en suis sûr, àopérer dès avant la COP21.Et puis, il y a une réaffirmation, nousnous sommes engagés à aller versles 100 milliards de dollars par an àpartir de 2020 et ce n'est pas du touthors d'atteinte. (…).

Associer tous les acteurs de la

société civile

Enfin, le quatrième objectif, c'est toutsimplement vous. (…). Il s'agit d'asso-cier pas simplement les gouverne-ments - c'est évident - mais aussi lesgrandes communes, les régions, les

organisations, la société civile et lesentreprises. Il est en effet indispen-sable que les entrepreneurs soient aupremier rang. Voilà les objectifs de la COP21, ilssont au nombre de quatre. C'est clair, je crois que tout le monde estd'accord sur cette répartition. Si nousarrivons à cela, évidemment le signalpour les entreprises sera majeur. (…).Dernier point. Je veux formuler dessouhaits en ce qui concerne lesentrepreneurs. Vous, vous pouvez àjuste titre - vous l'avez fait au coursde ces deux jours - formuler des sou-haits pour la COP21 et puis, singuliè-rement, auprès de chacun de vosgouvernements. La COP21 n'a pas lepouvoir d'obliger tel ou tel gouverne-ment à faire cela. Il y a donc l'actioncollective et puis il y a l'action danschaque pays.Ayant écouté ce qui s'est dit, je pensequ'il y a cinq souhaits ou propositionsque l'on peut, je l'espère, légitime-ment formuler.

Les entreprises invitées à publier

leurs contributions

Mon premier souhait, c'est quedavantage d'entreprises rejoignentles structures de coordination quiagissent contre le dérèglement cli-matique. Vous, vous êtes l'avant-garde large, éclairée mais il fautentraîner autour de vous, beaucoup.Donc, utilisons cette tribune - lapresse est présente - pour souhaiterque davantage d'entreprises rejoi-gnent les structures de coordinationexcellentes - que je veux vraimentremercier - qui existent déjà.Le deuxième souhait, c'est que vous-mêmes, mesdames et messieurs les responsables d'entreprise, vouspubliiez vos contributions. Dans lecadre de la plate-forme NAZCA, quiveut dire «Non-state Actor Zone forClimate Action». Une plate-forme vaêtre organisée de façon à ce que lesentreprises puissent publier leurscontributions et que l'on obtienneainsi des sortes de feuilles de routedes plate-formes d'entreprise ou desplate-formes sectorielles qui vontvenir compléter, renforcer les contri-butions nationales que nous-mêmesnous allons collecter. Ceci est trèsimportant, c'est l'objectif précisconcret avant la COP21.Le troisième souhait, c'est que soitrenforcée la diffusion des technologies

innovantes bas-carbone en une espècede partenariat. Ce partenariat sera lepartenariat en particulier organisé parWorld Business Council et l'AIE, l'agence internationale de l'énergie.C'est différent des publications, desplate-formes sectorielles, c'est l'échange des technologies innovantes.L'avant-dernier souhait, c'est que secrée - et il est à l'oeuvre évidemmentchez tous ceux qui sont ici - une sortede réflexe climat dans les décisions desentreprises, en particulier dans lesdécisions d'investissement. On vaassister, j'en suis persuadé, dans lesannées qui viennent, et cela risqued'aller très vite car il y a un effet d'imi-tation, à une décarbonisation des por-tefeuilles. Quand l'on voit un certainnombre de décisions significatives,lorsque Standard and Poor's décided'inclure dans son mécanisme de nota-tion la plus ou moins grande résistanceet le plus grand ou moins grand degréd'avancement par rapport à l'actioncontre le dérèglement climatique,lorsque l'on voit que telle ou telle gran-de banque nationale ou internationaledécide de ne plus financer tel ou telinvestissement en haute teneur de CO2,lorsque l'on voit aussi que des fonds quisont investis dans la green growth sontextrêmement rentables, il y a une incitation extrêmement forte à cettecréation d'un réflexe climat au sein desentreprises, que vont certainementencourager à la fois les salariés et lesconsommateurs qui sont des élémentstrès importants à prendre en compte.

Le climato-volontarisme est devenu

incontournable

Enfin, le dernier point, c'est que cedialogue qui a été engagé entre nous(…) ne s'arrête pas à la COP21 maisqu'il ait lieu avant la COP21 et aprèsla COP21. (…). c'est une initiative quepourraient peut-être prendre les pré-sidents de COP successifs pour êtresûr que ce dialogue soit entretenu.Voilà. J'ai voulu profiter de cette nobleassemblée pour faire le tour du sujetau moment où nous sommes. LesFrançais sont indécrottables, ils terminent toujours leurs propos parune formule, alors je ne vais pas m'enpriver : je pense que le climato-fatalismeest de plus en plus injustifiable et quele climato-volontarisme est de plus enplus incontournable et c'est pour celaque j'ai confiance dans le succès, grâceà vous, de la COP21 ».

(1) Christiana Figueres, secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

LAURENT FABIUS AU BUSINESS & CLIMATE SUMMIT

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POLITIQUE GÉNÉRALE

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Union Européenne : le futur Code des Douanes consacre le statut d'OEA

1. Un code issu d'une nouvelle

catégorie de textes européens :

les actes délégués

La nouvelle hiérarchie des normesau sein du droit dérivé introduite parle traité de Lisbonne crée une nou-velle catégorie d'actes, les actesdélégués, qui prennent place entreles actes législatifs et les actesd’exécution. Ce sont des actes nonlégislatifs de portée générale quicomplètent ou modifient certainséléments non essentiels de l’actelégislatif. Or, cette notion n'est pas définie dansles traités et très imparfaitement parla jurisprudence qui précise seule-ment que les dispositions «dont l'adoption nécessite d'effectuer deschoix politiques relevant des respon-sabilités propres du législateur del'Union» doivent être considéréescomme des éléments essentiels, demême que celles qui ont pour objetde «traduire les orientations fonda-mentales de la politique communau-taire». La procédure octroie en outre unlarge pouvoir de contrôle auParlement et au Conseil qui dispo-sent d'un délai de deux mois pourétudier le texte de la Commission. Àl'issue de ce délai, l'une ou l'autre deces instances peut révoquer pure-ment et simplement la délégation depouvoir, ou s'opposer à l'entrée envigueur du projet de la Commission.

2. Un nouveau code pour renforcer

la sécurité et améliorer le

fonctionnement d'une Europe

douanière à 28

L'objectif de la Commission et des États-membres était d'améliorerle fonctionnement d'une union douanière à 28 et de renforcer lasécurité de la chaîne logistique internationale.Ces objectifs devraient être atteints àterme grâce à : • l'interopérabilité des systèmes

douaniers d'information prévuepour 2020 ;

• au renforcement du statut d'opéra-teur économique agréé (OEA), sorted'ISO douanier issu du cadre denormes SAFE de l'OMD de juin 2005et transposé en droit douaniereuropéen avec le code des douanesmodernisées de 20081.

3. L'OEA, nouveau sésame de la

simplification douanière

Depuis longtemps, les opérateurs seplaignaient des faibles contrepartiesd'un statut lourd et coûteux. Ainsi, lesentreprises françaises ne comptaientque 1214 OEA en 2014, plaçant laFrance au 3ème rang de l'UE, loin derrière l'Allemagne (5603), sur untotal européen de 13 029.Les accords de reconnaissancemutuelle conclus par l'UE avec despays dotés des mêmes statuts (laSuisse, la Norvège, Andorre, le Japonet les USA ; des négociations sont encours avec l'Andorre, le Canada, laCorée du Sud, la Chine) intéressentles grands groupes multinationauxmais pas les PME/PMI. Avec le CDU, l'attractivité du statutd'OEA est fortement renforcée carseuls les OEA pourront bénéficierdes principales innovations :

• le dédouanement centralisé (DC)est la mesure phare du nouveaucode. Elle permet une dissociationentre le lieu où la personne déclareses marchandises et celui où celles-ci arrivent. Prévu par l’article 179 du CDU, le DC s’inscrit dans la continuité de l'actuelleProcédure de dédouanementunique communautaire (PDUC)prévue à l’article 76 du Code desDouanes Communautaire (CDC) et encore assez peu utilisée. Ennovembre 2014, seules 89 procédu-res avaient été engagées et unevingtaine d’autres étaient encoreen consultation. Dans le cadre du DC, un seul bureau de douane centralise l’ensemble des déclara-tions (on parle de bureau de super-vision ou de domiciliation) alorsmême que d’autres marchandisesarrivent dans d’autres bureaux(bureaux de rat tachement ) .Toutefois, le DC se veut plus complet que la PDUC qui ne porteque sur les procédures de dédoua-nement simplifiées (déclarationsimplifiée et dédouanement àdomicile). En outre, elle reste spé-cifique à chaque utilisateur alorsque le DC est unique et harmoniséà l’ensemble des États-membres.Mais la différence majeure résidedans le fait qu’il sera nécessaired’avoir le statut d’OEA simplifica-tions douanières pour bénéficier duDC alors qu'il faut simplement enremplir les critères pour bénéficierde la PDUC actuelle ;

• l'auto-évaluation permettra à unopérateur de déterminer lui-même

La réforme du premier Code des Douanes européen de 1992 initiée voilà près desept ans va enfin voir le jour avec l'entrée en vigueur du Code des Douanes de l'Union(CDU) le 1er mai 2016. Un texte qui présente autant d'intérêt pour sa procédured'adoption que pour son contenu.

Jean-Marie SALVA, Avocat associé, DS Avocats, Président de la Commission Politique Commerciale etRèglementations Douanières Internationales d'ICC France

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le montant des droits et taxes exigi-bles à l'importation et de réaliser certains contrôles sous surveillan-ce douanière ;

• le principe du guichet unique permet de réaliser tous les contrô-les y compris non douaniers en unseul endroit ;

• la garantie globale permet quant àelle de regrouper les diversesgaranties exigées pour l'accom-p l i s s e m e n t d e s f o r m a l i t é s douanières et d'en réduire le coût.

On ne peut que saluer ces avancéestout en faisant observer que : • les modalités pratiques de l'auto-

évaluation et du guichet uniquerestent encore à définir ;

• la garantie globale est assortie d'un renforcement des garanties individuelles ;

• les conditions d'octroi du statutd'OEA sont renforcées puisquel'entreprise candidate devra désor-mais justifier d'une compétencedouanière interne. Or, les critèresd'évaluation de cette compétencerestent à définir.

4. De trop rares simplifications

erga omnes

• La réforme du perfectionnementactif (art. 256 CDU) consistera dansl'abandon de l'obligation de réex-portation. Par anticipation sur leCDU, le secteur aéronautique enbénéficie déjà (art. 544 DAC), ycompris les aéronefs militaires(Règlement d’exécution (UE) No1223/2014 de la Commission du 14 novembre 2014).

• La référence unique de l'envoi(RUE) vise à faciliter le commerceinternational tout en mettant enplace des instruments de sur-veillance et d’audit ininterrompuspermettant aux administrationsdouanières d’effectuer des contrô-les loin des frontières. Elle permetune utilisation maximale des références existantes concernantle fournisseur, le client et letransport. La RUE permet aux différentes administrations doua-nières et aux partenaires commer-ciaux de travailler ensemble le plusefficacement possible : renforce-ment de la sécurité aux frontièrespar un meilleur accès aux informa-

tions, meilleure coopération entreles administrations des douanes(pays d’import et d’export), facilita-tion de la gestion de la chaînelogistique, allègement des donnéescommuniquées par le transporteuret l’importateur, amélioration descontacts commerciaux en touspoints de la chaîne logistique,menant également à une réductiondes frais liés aux contrôles.

Le futur CDU assortit ces simplifica-tions de mesures visant à assurerune meilleure défense des intérêtsfinanciers de l'Union Européenne.

5. Un nouveau code plus attentif aux

intérêts financiers européens

Le nouveau code a suscité de nombreux débats sur les change-ments annoncés en matière devaleur en douane dont chacun saitqu'ils sont cruciaux dans tous lesbusiness models des entreprisesmultinationales. • la disparition de la règle dite de la

première vente. Introduite en 1992dans le code des douanes commu-nautaire (article 147.1 des DAC) etmise en œuvre dans divers paysdont les USA, cette règle autorise lerecours non pas à la dernière venteen vue de l'exportation à destina-tion du territoire douanier de lacommunauté européenne mais,dans un schéma de ventes succes-sives devenu très fréquent dansune économie globalisée, à la première vente répondant à cettedéfinition. Il prend la forme d'uneautorisation délivrée par la douanesur présentation d'éléments factuels précis attestant de cette destination finale du produitconcerné. Le CDU supprime cettedérogation tout en octroyant undélai de grâce de deux ans aux titulaires.

• le renforcement des conditionsd'intégration des redevances demarque à la valeur en douane desmarchandises importées. L'actuelarticle 159 des DAC prévoit que cesredevances ne doivent pas êtreintégrées si l'une au moins destrois conditions suivantes n'est pasremplie : la revente en l'état, l'ap-position de la marque pour laquellela redevance est payée et l’absence

de liberté d'approvisionnement del’acheteur auprès d'autres four-nisseurs non liés au vendeur.

Le futur article des actes d'exécutionqui remplacera le précédent ne per-mettra plus de telles dérogations. Ilprévoit seulement que la condition dela vente est remplie dès lors quel'une des conditions suivantes l'est :• le vendeur ou une personne

connexe exige que l’acheteur pro-cède à ce paiement,

• le paiement de l’acheteur satisfait à une obligation contractuelleincombant au vendeur,

• les biens ne peuvent être vendus ou achetés par l’acheteur sanspaiement des redevances ou droitsde licence au titulaire de la marqueou licence.

6. La fin du monopole de la repré-

sentation directe pour les com-

missionnaires en douane agréés

Le CDU met fin au monopole de lareprésentation directe des commis-sionnaires selon laquelle il agit enson nom et pour le compte de sonclient, par opposition à la représen-tation indirecte selon laquelle il agitau nom et pour le compte de celui-ci.En outre, le CDU consacre aussi la finde l'agrément des commissionnairesen douane en ce sens que le repré-sentant certifié OEA pourra, de ceseul fait, exercer dans tous les États-membres sans devoir passer par desprocédures d'agrément nationales.La concurrence s'annonce rude pourles commissionnaires français face àleurs collègues allemands, néerlan-dais et belges, notamment. Les futurs actes délégués et d'exécu-tion devraient réserver peu de surpri-ses car tout a déjà été annoncé etcommenté. Cependant, l'examendevant le Parlement permettra peut-être d'ultimes ajustements. Pourpouvoir profiter des nombreusesinnovations de ce nouveau code, lesentreprises devront bien entenduremplir les conditions requises maisaussi et surtout faire évoluer leurssystèmes d'information. Or, ces évo-lutions sont lourdes. Il leur appartientdonc de ne pas attendre le 1er mai2016 pour initier ces changementsmais de mettre au contraire à profitles quelques mois qui viennent.

1. Règlement 450/2008 du Parlement et du Conseil du 23 avril 20082. Vérification faite sur la base de données OEA de la commission européenne

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POLITIQUE GÉNÉRALE

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POLITIQUE GÉNÉRALE

Mise en place du brevet unitaire : un processus en souffrance

Il y a déjà deux ans et demi que 25 États-membres de l’UnionEuropéenne décidaient de mettre

fin à quarante ans de tergiversationset adoptaient, par le mécanisme de lacoopération renforcée, un règlementcréant un brevet unitaire pour laquasi-totalité du territoire de l’Union.Dans le même temps, ces Étatsconcluaient un accord sur la créationd’une juridiction commune pour traiter des litiges en matière de bre-vets unitaires ainsi qu’en matière debrevets européens classiques. Enouvrant la voie à l’édification d’unejurisprudence unifiée à traversl’Europe qui a vocat ion à se substituer à la mosaïque disparatedes jurisprudences nationales, cetaccord complète la mise en placed’une véritable protection européen-ne uniforme pour les innovationstechniques, comblant ainsi uneinsuffisance criante du marchéunique. Un événement salué parl'ensemble de la sphère économiquecar il ne peut que favoriser compéti-tivité et croissance européennes.

Un élan politique émoussé

Mais si tôt le Règlement sur le brevetunitaire adopté et l’Accord sur la juridiction unifiée signé, les poli-tiques ont passé la main aux admi-nistrations chargées de préparer lamise en place effective du nouveausystème. On ne peut nier que la tâchesoit immense, surtout pour la juridic-tion unifiée avec son organisationdécentralisée, ses formations dejugement multinationales et ses propres règles de procédure. Il n’en

demeure pas moins que le temps quipasse tend à émousser l’élan politique. Cet effet, conjugué à unemoindre sensibilité des administra-tions nationales aux objectifs fixéspar les textes, provoque un certainflottement dans la prise de décisionsimportantes pour l’efficacité et laqualité du nouveau système. Des éléments alarmants se font jour quiremettent en cause les objectifs-mêmes de la création de la protec-tion unitaire et de la juridiction commune. En ce qui concerne le brevet unitaire,c’est le projet de fixation des taxesannuelles de maintien en vigueur dece titre qui suscite de graves inquié-tudes. Le niveau proposé est tel quele brevet unitaire serait inaccessibleà la grande majorité des entrepriseseuropéennes innovantes. Le soucides Offices nationaux de brevet demaintenir, sinon d’accroître le niveaudes revenus qu’ils tirent du systèmesemble progressivement prendre lepas sur les objectifs de croissance del’économie et de compétitivité desentreprises.

Une ratification en panne

Quant à l’Accord sur la juridiction unifiée, le manque d’empressementde nombreux États-membres à ratifier est préoccupant. À ce jour,sept seulement l’ont fait alors que lenouveau système n’a réellement desens que si les vingt-cinq ayant déci-dé ensemble de leur coopérationparticipent ensemble à son lance-ment. On pourrait penser que c’est làsimple négligence, mais l’apparitionde crispations sur des sujets

importants fait craindre que le malne soit plus profond. Un exemple ponctuel concerne les discussions sur la rémunération desjuges appelés à siéger au sein de lajuridiction unifiée. Il est clair que le succès de la juridiction dépendraessentiellement de sa capacité àaccueillir les juges ayant la plushaute compétence et la plus vasteexpérience en matière de litige debrevets en Europe. Il leur serademandé d’exercer leur magistèredans des conditions plus exigeantesencore qu’au niveau national, quecela tienne à l’environnement inter-national et multilingue, aux règlesde procédure spécifiques, notam-ment des délais très stricts, maisaussi et surtout à leurs responsabi-lités paneuropéennes sur des litigesd’une importance économique sou-vent primordiale. Pour atteindre lesobjectifs d’efficacité économiquequ’elle s’est fixés, l’Europe doit sedonner les moyens de disposer d’unorgane juridictionnel de très hautniveau, comme l’ont déjà fait sesprincipaux partenaires commer-ciaux. Ces considérat ions appel lent clairement une reprise en main du processus par le niveau politique. Au moment où ces lignes sont écrites, il est envisagé que le sujetsoit mis à l’ordre du jour d’unConseil Compétitivité prévu à la findu mois de mai. Une occasion à nepas manquer de remettre sur lesbons rails un projet essentiel pourl’innovation et la croissance enEurope.

La création d'un brevet unitaire et d'une juridiction commune pour traiter les litigessur les brevets vient compléter la mise en place d'une protection européenneuniforme en matière d'innovation technique. Mais il reste encore à transformerl'élan politique en un dispositif opérationnel.

Thierry SUEUR, Vice-président propriété intellectuelle d'Air Liquide

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AUTORÉGULATION

Le nouveau contrat-modèleICC d'agence commercialebientôt disponible

Dans la stra-tégie d’undéveloppe-

ment commercialà l’international,le recours à unagent commer-cial est un moyenéprouvé et effica-ce. Il permet depénétrer un mar-ché nouveau oude se développersur un territoire à

travers des mandataires locauxexpérimentés et indépendants sansavoir à créer localement une structu-re lourde. Avec le mouvement de globalisation, beaucoup d’entrepri-ses, y compris des PME, utilisent desagents commerciaux dans de nombreux pays sur la planète. Desurcroît, nombre de marchés ne sont accessibles pour les sociétés étrangères qu’à travers de tels intermédiaires locaux.Bien que l’agent commercial soitindépendant, il est essentiel pourl’entreprise de maîtriser la relationavec lui et seul un contrat adapté àcette situation peut garantir sécuritéet prévisibilité pour les deux parties.De nombreuses entreprises ont faitles frais du (mauvais) choix de ne rienécrire pour ne pas être lié. D’autantque, dans la plupart des pays, l’absence de contrat écrit ne veut pasdire qu’il n’y a pas contrat de fait.Le besoin de disposer d’un contratmodèle d’agence commerciale à l'international a été ressenti très tôtdans le monde des affaires, c’est la

raison pour laquelle ce contrat inaugura, en 1991, la série descontrats-modèles, élaborés par l’ICC.En effet, dans le domaine des agentscommerciaux, il n’existait pas et iln’existe toujours pas d’harmonisa-tion internationale des règles (à l’exception de l’Union Européenne),mais la cohabitation d'une multitudede règles nationales, très différentesles unes des autres.

Le reflet de la pratique commerciale

mondiale

Comme pour les contrats modèlesICC qui ont suivi, le contrat-modèleagence commerciale est équilibré ettient compte des intérêts des deuxparties pour aboutir à des solutionsjustes. Plutôt que de s’appuyer surune législation nationale, il reflète cequi se fait dans la pratique commer-ciale au niveau mondial. Il est fondésur la pratique des affaires, le bonsens et l’équité plutôt que sur desprincipes juridiques nationaux. Pourpermettre une telle solution, l’ICCrenvoie les parties aux principes etusages du commerce international,la Lex Mercatoria, qui concernent l’agence commerciale.Comme tous les contrats-modèlesICC, le contrat-modèle d'agencecommerciale est un contrat completqui contient des clauses détailléessur toutes les situations les plus fréquentes à régler ainsi que desmodèles d’annexes. Il est conçu pourla situation la plus fréquente, l’agentindépendant et autonome qui tra-vaille de façon permanente pour uneou plusieurs entreprises, sans être

salarié, et qui prospecte des clientspour préparer et négocier descontrats de vente pour des produitsindustriels. Comme tous les contrats-modèlesICC, une introduction détailléeexplique le contexte, les clauses ducontrat, et dispense de précieuxconseils pour son utilisation. Il estnotamment conseillé de vérifier sides règles nationales d’ordre publiclimitent l’autonomie des parties. Telest le cas dans de nombreux pays.Pour l’Union Européenne, la directivede 1986 s’impose à toute relation d’agence commerciale exécutée àl’intérieur de l’Union. Les arrêts INGMAR et UNABAR de la Cour del’Union Européenne l’ont confirmé.

Une version 2015 disponible en

français et en anglais

Une attention particulière est portéedans le contrat-modèle à la situa-tion de l’indemnité de fin de contratqui, dans de nombreux cas, est d’ordre public et aux clauses relati-ves au règlement des litiges, notam-ment par voie d’arbitrage. La mise àjour 2015 du contrat-modèle ICCtient compte des dernières évolu-tions de la pratique mondiale, de l’utilisation d’Internet qui a créé unnouveau marché et de l’évolution dudroit de la concurrence. Ce contrat-modèle, disponible pour l’instant enlangues anglaise et française, seraextrêmement utile pour toutes lesentreprises qui poursuivent leurdéveloppement commercia l à l’international par le biais desagents commerciaux.

Le contrat modèle ICC Agence Commerciale version 2015 met à jour le premiercontrat modèle ICC, un des plus utilisés dans la pratique internationale des entreprises.Cette version tient compte des dernières évolutions de la pratique mondiale, del’utilisation de l’Internet et de l’évolution du droit de la concurrence.

Christoph Martin RADTKE, Avocat, Rechtsanwalt, Associé LAMY & ASSOCIES, Président de la CommissionDroit et Pratiques du Commerce International d’ICC France

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Les nouvelles règles d'expertised'ICC

Les trois nouveaux Règlementsdes experts ont remplacé leRèglement d’expertise en

vigueur depuis le 1er janvier 2003.Cette réforme a notamment permisde mettre ces trois nouveaux règle-ments en cohérence avec leRèglement d’arbitrage ICC de 2012.Après l'arbitrage, la médiation etl'expertise, le seul règlement quireste à adopter est celui des«Disputes Boards», qui devrait êtresoumis, très prochainement, à l’ap-probation du comité exécutif de l'ICC.Parmi les changements les plusnotables par rapport à 2003 figurentla mise à disposition des utilisateursde trois règlements distincts au lieud’un seul règlement consolidé et lapossibilité de recourir au CentreInternat ional d’ADR d' ICC (le«Centre») pour la nomination nonseulement d’experts, mais aussi de«tiers».

Une meilleure accessibilité

La principale raison qui a fondé ladécision d’opter pour trois règle-ments p lu tô t qu 'un seul est l'accessibilité pour les utilisateurs.En effet, les trois services relatifs àl’expertise rendus par le Centre sont désormais autonomes entre eux.C’est ainsi que les Règlements desexperts de 2015 ont été divisés de lamanière suivante : le «Règlementd' ICC relat i f à la proposit ion d’experts et de tiers», le «Règlementd' ICC relat i f à la nominat ion d ’ ex p e r t s e t d e t i e rs » e t le«Règlement d'ICC relatif à l’adminis-tration de procédures d’expertise».

La particularité qui consiste à per-mettre aux utilisateurs de demanderau Centre de proposer le nom d’un ouplusieurs «tiers», ou d’en nommerun, présente l’avantage de pouvoirs’adresser au Centre dans le cas deprocédures ad hoc, autres que l’arbi-trage, non-administrées par l'ICC.Ainsi par exemple, les parties vontpouvoir solliciter le Centre pour qu’ilpropose ou nomme des médiateurs,adjudicateurs, «neutral advisers» oudes membres de «dispute boards».Une autre innovation importante desRèglements d’expertise est celle dedonner la possibilité aux parties dedéposer des objections à l’égard desexperts et des «tiers» nommés parle Centre et de lui demander de lesremplacer si la personne nomméene possède pas les qual i tés nécessaires, ne remplit pas sesfonctions ou n’est pas indépendanteou impartiale.

Des rapports motivés

Désormais, les rapports des expertsqui seront rendus dans le cadre d’uneexpertise administrée par l'ICCdevront être motivés, à moins que lesparties n’en décident autrement. Demême, si l’expert estime que lesquestions qui lui sont soumises parl’une des parties ne correspondentpas à la mission qui lui a été confiée,il a la faculté de refuser de les traiteraprès avoir motivé sa décision, saufaccord contraire des parties. Selon l’article 8 (2) du Règlement del'ICC relatif à l’administration de laprocédure d’expertise, les partiespeuvent convenir que les constata-tions contenues dans le rapport de

l’expert les lient contractuellement,afin que les conclusions de l’expertpuissent devenir définitives si lesparties le souhaitent. Bien entendu,celles-ci disposent toujours de cettefaculté dans toute expertise, maiscette précision expresse du nouveauRèglement en fait une règle pardéfaut dans les expertises adminis-trées par l'ICC. Comme par le passé, le Centre peutintervenir pour proposer des expertssi des arbitres lui en font la demande,conformément aux règles d’arbitrageapplicables. La différence reste lamême qu’auparavant au regard desfrais administratifs du Centre, àsavoir que si la demande de proposi-tion d’un expert émane d’un tribunalarbitral agissant dans le cadre d’unarbitrage ICC, les services du Centresont gratuits, ce qui n'est pas le casdes autres arbitrages institutionnelsou ad hoc. Dans ces cas, en effet, desfrais relatifs à la proposition d’un ouplusieurs experts seront réclaméspar le Centre.Il est intéressant de souligner queconformément au Règlement del'ICC relatif à la proposition d’expertset de «tiers», les parties à un arbitra-ge ICC, qui serait en cours, pourrontdemander conjointement au Centrede leur proposer le nom d’un média-teur gratuitement.Il y a tout lieu d’espérer que ces inno-vations répondront aux attentes desentreprises qui sont à la recherched’outils modernes et adaptés leurpermettant de résoudre à l’amiableles différends qui les opposent àleurs co-contractants.

Après les règlements relatifs à l'arbitrage et à la médiation, l'ICC vient de franchirune nouvelle étape dans la modernisation de ses règlements les plus utilisés enadoptant trois nouveaux règlements d’expertise intitulés «Règlements des experts».Ils sont entrés en vigueur le 1er février 2015.

José ROSELL, Avocat associé, Hugues Hubbard & Reed LLP

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RÉSOLUTION DES LITIGES

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La langue de l’arbitrage :une jurisprudence rassurante

Il n'est pas rare que les partiesconviennent de la langue de l'arbi-trage. Toutefois, lorsque ce point

fait l’objet de désaccords entre lesparties, il incombe alors aux arbitresde régler la question[1]. Un arrêt du 2 avril 2013[2] de la Courd’appel de Paris a semé le trouble enannulant une sentence au titre de laviolation du principe du contradictoire.Il était reproché au tribunal arbitrald’avoir autorisé la transmissiond’une pièce du défendeur, partielle-ment traduite à sa discrétion en fran-çais, la langue de l’arbitrage, alorsmême qu'il avait invité la demande-resse à faire traduire à son tour lapièce dans son intégralité, si ellel’estimait nécessaire. Fut égalementsanctionné le fait que le tribunal arbi-tral se soit appuyé, pour asseoir sasolution, sur des annexes au rapportd’expertise rédigées en allemand, etnon traduites entièrement dans lalangue de l’arbitrage, à l’exception decertains passages pour lesquels lesarbitres avaient pris l’initiative deprocéder eux-mêmes à la traduction.Fallait-il déduire de cette annulationque, pour assurer la validité d’unesentence à Paris, il faudrait traduirel’intégralité des documents commu-niqués rédigés dans une autre langueque celle de l’arbitrage ? Par un arrêt

du 18 mars 2015[3], la Cour de cassa-tion maintient la décision d’annula-tion de la Cour d’appel mais proposeune just i f icat ion plus fondée.Autoriser une partie à produire unepièce partiellement traduite par sessoins n’est pas une circonstance justifiant l’annulation, dès lors qu’elle ne peut utiliser cette pièceque dans la mesure des passagestraduits. La charge importante quereprésenteraient des coûts de tra-duction superfétatoires[4] illustre àquel point cette position mesurée estbienvenue. En réalité, la sanctionmaintenue par la Cour de cassations’explique uniquement par la condui-te de la procédure par les arbitres, lalangue de l’arbitrage n’étant que leprétexte de la violation du contradic-toire. L’initiative malheureuse prisepar le tribunal arbitral de traduirelui-même ce qui lui paraissait impor-tant dans les annexes au rapport del’expert a abouti à la confiscation dudébat contradictoire en limitant arbitrairement l’étendue du débatentre les parties.Cette jurisprudence renoue avec l’attention accordée à la pratique del’arbitrage qui inspirait les décisionsantérieures. Par arrêt du 23 juin2005[5], la Cour d’appel de Paris avaitjugé valable l’autorisation donnée

par l’arbitre à la production de docu-ments dans des langues autres quecelles de l’arbitrage. Le tribunal arbitral s’était appuyé sur le fait queles parties avaient versé aux débatsdes documents issus de leurs relationscontractuelles antérieures rédigésdans ces autres langues, tout en seréservant la faculté de les faire tra-duire. Il avait aussi été jugé[6] que lerefus du tribunal arbitral de faire traduire un mémoire, alors que lerèglement de procédure ne l’imposaitpas, ne constituait pas une violationdu principe du contradictoire en raison inter alia de l’usage familier ethabituel de la langue en questionentre les parties, y compris au coursde l’arbitrage. En définitive, les implications procé-durales soulevées par la langue del’arbitrage ne suscitent guère de difficulté dès lors que les arbitresrestent attentifs au respect du débatcontradictoire. L’inquiétude qui pouvait naître de la décision de laCour d’appel de Paris est dissipée, latraduction intégrale des documentsd’un dossier d’arbitrage ne condi-tionne pas la validité de la sentence,ce qui aurait rendue quasi impossiblela tâche de la cour internationaled’arbitrage, de son secrétariat et desarbitres[7].

Un récent arrêt de la Cour de cassation confirme que les implications procéduralessoulevées par la langue de l’arbitrage ne suscitent guère de difficulté dès lors queles arbitres restent attentifs au respect du débat contradictoire. Une jurisprudencebienvenue.

Béatrice CASTELLANE, Avocate, AMCO, Cabinet Castellane

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[1] S. Lazareff, «La langue de l’arbitrage institutionnel», Bulletin de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI, 1997, vol. 8/1 Pour un exemple voir article 20 du règlement d’arbitrage de la CCI

[2] CA Paris, 1ère Ch. Civ. 2 avril 2013, Sarl Blow Pack c/ Société Windmoller et Holscher KG[3] Cour de cassation, 1ère Ch. Civ., 18 mars 2015, n°13-22.391[4] Article 4 de l’Appendice III du Règlement d’arbitrage CCI : «Une maîtrise adéquate des délais et des coûts est importante dans toutes les affaires»[5] CA Paris, 1ère Ch. Civ. 23 juin 2005, Bombardier Transportation Switzerland c/ Siemens AC[6] CA Paris, 1ère Ch. Civ. 27 juin 2002, Société Comecim c/ Theobroma[7] Article 41 du Règlement d’arbitrage de la CCI dans sa version en vigueur à compter du 1er janvier 2012

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RÉSOLUTION DES LITIGES

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Du 30 novembre au 11 décembre prochains, Paris accueillera la COP21, la 21ème conférence inter-

nationale des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

(CCNUCC). La France, qui accueille et préside cette conférence, a tout mis en œuvre afin qu'un

nouvel accord puisse être conclu en associant l’ensemble des parties prenantes, à savoir la société

civile, les collectivités territoriales et surtout les entreprises. A l’occasion du récent Business &

Climate Summit qui s’est tenu à Paris les 20 et 21 Mai, le président français François Hollande a

d'ailleurs tenu à confirmer qu’il comptait beaucoup sur l'engagement des entreprises à travailler avec

les gouvernements pour «gagner la bataille du climat». Il a notamment souligné l’importance d’un

accord à la fois «contraignant, universel, et différencié».

Depuis plusieurs mois, le comité français de la Chambre de Commerce Internationale (ICC France)

s’est fortement impliqué afin que la Chambre de Commerce Internationale joue un rôle-clef dans le

cadre de ce dialogue avec les pouvoirs publics et s’engage au nom des entreprises du monde entier à

jouer un rôle constructif dans la mise au point de cet accord et surtout dans sa mise en œuvre. C’est

pourquoi ICC France a décidé de consacrer le dossier de ce numéro du magazine Echanges

Internationaux à la question climatique.

Vous trouverez ci-après la liste des articles qui le composent. Nous publions également au début du

magazine une interview exclusive de Laurence Tubiana, Représentante Spéciale pour la Conférence

Paris Climat 2015, pour Echanges Internationaux, ainsi que le texte de l'intervention que Laurent

Fabius, Ministre des Affaires étrangères et du Développement international, a prononcé lors du

Business & Climate Summit.

Nous remercions les auteurs pour leur contribution à ce dossier.

François GEORGES, Délégué Général, ICC France

DOSSIER DOSSIER

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

«Il faut modifier notre modèlede développement en profondeur»

Éc h a n g e s I n t e r n a t i o n a u x .

Pouvez-vous nous rappeler les

principaux faits et chiffres qui,

à vos yeux, justifient l'urgence d'un

accord international sur le climat ?

Jean Jouzel. Nos observations, qui sesont enrichies au fil des rapports, fontaujourd'hui état de deux certitudes :l'effet de serre associé aux activitéshumaines augmente avec 32,3milliards de tonnes de CO2 émises en20141 (ce composé ayant contribuépour les deux-tiers aux émissions totales de gaz à effet de serre) et le réchauffement climatique est désormais sans équivoque. Il affecte l'atmosphère mais aussi la cryosphère(neige, glaces, glaciers et sols gelés) etl'océan, comme en témoigne l'élévationdu niveau de la mer. Ce phénomène deréchauffement est sans précédentdepuis 1400 ans, les 30 dernières

années constituant probablement lapériode la plus chaude qu'ait connul'hémisphère Nord. Surtout, nos tra-vaux les plus récents nous ont permisde répondre à «la» question qui nousest posée de manière récurrente : lesactivités humaines sont bel et bien (àplus de 95 chances sur 100) à l'originedu réchauffement des dernièresdécennies. Dans un monde où les pro-blèmes environnementaux et sociauxposés par le changement climatiquene peuvent que s'accroître, il y a urgen-ce à faire la pédagogie de la sobriétéénergétique et à organiser la transitionénergétique comme réponse aux défisprésents et à venir.

E.I. Que se passera-t-il si nous ne

faisons rien ?

J.J. Nous savons qu'en l'absence detoute action pour maîtriser l'aug-mentation de l'effet de serre liée auxactivités humaines, nous nous acheminerons inéluctablement versun réchauffement moyen supérieur à4° C par rapport à l'ère pré-indus-trielle et vers une élévation de prèsd'un mètre du niveau des mers d'ici à

la fin du siècle. Avec les conséquen-ces que l'on imagine : difficultésd'accès à l'eau, perte de biodiversité,rendements agricoles amoindris,sécurité alimentaire menacée, pollu-tion urbaine difficile à supporter,impact sur la santé des êtreshumains mais aussi des animauxsauvages et domestiques, sansoublier les risques de catastrophesnaturelles, de famines ou les centaines de millions de réfugiés climatiques que cela entraînerait. À des degrés divers, tous les paysseraient touchés, certains pays endéveloppement étant parmi les plusvulnérables. Il faut absolument limiter l'augmentation de la tempé-rature moyenne à 2 degrés par rapport au début de l'ère industrielle,soit environ 1,5° C par rapport au climat d'aujourd'hui. Et cela ne sefera pas sans modifier notre modèlede développement en profondeur.

E.I. Quels sont les grands objectifs

qu'il faut absolument atteindre en

décembre prochain ?

Jean Jouzel. A Paris, il faudra desactes. Des engagements précis. Jene dirai pas que Paris est le rendez-vous de la dernière chance mais il estclair que si rien de sérieux n'est misen œuvre très rapidement, c'est-à-dire d'ici à 2020, l'objectif de limiter àlong terme le réchauffement à 2°C nepourra être tenu. Par rapport aux trajectoires actuelles, les avisconvergent sur la nécessité d'uneinflexion de 15 % par rapport à la tendance haussière des émissions degaz à effet de serre au cœurs descinq prochaines années et d'une

Vice-président du groupe scientifique du GIEC et l'un des plus grands chercheursfrançais spécialiste de l'évolution du climat, Jean Jouzel n'a de cesse de faire lapédagogie du risque climatique afin d'éclairer les décideurs et les citoyens sur leschoix à venir. Il explique ici pourquoi il est urgent de repenser notre modèle dedéveloppement.

Jean JOUZEL, Directeur de Recherche au CEA, Vice-président du groupe scientifique du GIEC

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Songeons aux risques que nous ferions courir auxjeunes d'aujourd'hui si l'action n'était pas au rendez-vous de la COP de Paris !

Bio express. Jean Jouzel.

Directeur de Recherches au CEA, il a fait dans cet organisme l'essen-tiel d'une carrière scientifique de près d'un demi-siècle largement

consacrée à l'évolution du climat. Ses travaux ont été récompensés par desprix et distinctions dont la Médaille d’or du CNRS en 2002 et le Prix Vetlesenen 2012, considéré comme le «Nobel des Sciences de la Terre et del’Univers». Depuis 2001, il est vice-président du groupe de travail scientifiquedu GIEC (co-lauréat du Prix Nobel de la Paix en 2007). (A lire : «Le défi climatique – Objectif : 2°C !», avec Anne Debroise, Dunod,2014 ; «Planète blanche, les glaces, le climat et l'environnement», avecClaude Lorius et Dominique Raynaud, Odile Jacob, 2008).

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

diminution de 40 % à 70 % à l'horizon2050 (par rapport à 2010). Or, noussavons que l'utilisation croissante decombustibles fossiles est à l'origined'environ deux-tiers de ces émissions.C'est sur ce terrain qu'il faut faireporter en priorité nos efforts,sachant que -de toute manière- lararéfaction progressive des ressour-ces naturelles nous contraindra àopérer une transition énergétique.Les scénarios compatibles avec l'objectif de 2°C supposent que nouslaissions 80 % des réserves d'éner-gies fossiles accessibles (pétrole, gaznaturel, charbon, gaz et pétrole nonconventionnels) là où elles sont. Cesera difficile, mais ce n'est pas horsde portée. Songeons aux risques quenous ferions courir aux jeunes d'aujourd'hui si l'action n'était pas au rendez-vous de la COP de Paris !

E.I. On associe souvent, notamment

en France, la lutte pour le climat

à la nécessité d'arrêter de courir

derrière un taux de croissance.

Qu'en pensez-vous ?

J.J. La lutte contre le réchauffementn'est pas l'ennemie de la croissance.Plutôt que d'organiser la décroissan-ce, il serait à mon sens plus fécondde stimuler la croissance de manièrevertueuse et de mieux utiliser lesrichesses créées. Ainsi, dans un payscomme la France, une transitionénergétique bien conçue pourraitrévéler de véritables gisementsd'emplois. Songez qu'en 2013quelque 550 milliards de dollars desubventions ont été consacrés dansle monde à des programmes d'explo-ration et de production d'énergiesfossiles, soit plus de quatre fois lessubventions allouées aux énergiesrenouvelables2. On pourrait utilisercette manne tout à fait différemment.Par exemple, en matière d'innovationtechnologique, en s'intéressantdavantage au piégeage et au stockagedu gaz carbonique plutôt qu'à

l'extraction d'hydrocarbures en eauxtoujours plus profondes. Le champd'intervention prioritaire concernel'efficacité énergétique et les écono-mies d'énergie dans tous les domai-nes : industrie, transport, bâtiment,urbanisme, utilisations domestiques,agriculture.

E.I. Concrètement, comment faut-il

associer la société civile à la lutte

contre le réchauffement ?

J.J. Chacun a son rôle à jouer dans lalutte contre le réchauffement. Biensûr, le rôle des États est d'aboutir àune série d'accords ambitieux àParis, mais leur mise en œuvre exigera l'engagement de tous lesacteurs : la communauté scienti-fique, le monde éducatif, les médias,les ONG et surtout les collectivitéslocales et les entreprises. On a forcé-ment une vision différente duréchauffement et des mesures d'a-daptation nécessaires si on vit dansles Alpes ou au bord de la mer. Lesproblèmes sont très divers, les solutions aussi et, de la région à lacommune, les collectivités ont doncun rôle fondamental à jouer. C'est lecas également des entreprises quidoivent s'engager résolument dansun processus d'adaptation de leurscomportements et de leur stratégie.

E.I. A l'occasion de vos nombreux

contacts avec des chefs d'entrepri-

se, avez-vous le sentiment que,

dans les entreprises, le climat a

changé ?

J.J. Toutes les entreprises ne sontpas logées à la même enseigne faceà la problématique du réchauffementc l i m a t i q u e . L ' a d a p t a t i o n e stincontestablement plus aisée pourSaint-Gobain, Schneider ou mêmeAlstom que pour Total ou Suez ! Maisje rencontre de nombreux chefs d'en-treprise de toutes tailles et de tous

secteurs et ce qui me frappe, c'esteffectivement un progrès dans laprise de conscience collective. Il y anotamment de nombreuses PME quis'intéressent à la question climatiqueet essaient d'imaginer des niches enpartant du principe que les habitudesvont changer et que de nombreuxmarchés nouveaux vont s'ouvrir. Jem'exprime souvent devant des étudiants et j'aime leur dire que lemonde vers lequel nous allons estenthousiasmant car leur générationdevra être très inventive, très créati-ve afin de trouver des solutions à toutes ces questions. Par ailleurs, et je voudrais insistersur ce point, le secteur financiercommence à bouger. C'est la premiè-re fois cette année que j'entends parler de désinvestissements dans lesecteur des fossiles. Des fonds bascarbone commencent à se créer. Lamise en mouvement de l'industriefinancière sera décisive pour passerà la vitesse supérieure.

E.I. Quel message souhaitez-vous

adresser à nos adhérents ?

J.J. Je leur dirai de s'informer, d'accorder de la crédibilité au message délivré par les scientifiqueset de l'intégrer dans leur plan dedéveloppement. Le réchauffementouvre de nombreuses opportunités,en ferme d'autres... Il s'agit de ne pas«parquer» le responsable développe-ment durable dans un petit coin,mais au contraire de lui donner toutesa place, d'anticiper et de s'adapter.

E.I. Si vous aviez un seul vœu à

formuler pour l'issue de la COP 21,

quel serait-il ?

J.J. Parvenir à donner un prix au carbone à la hauteur des enjeux cons-tituerait un signal très fort. Un proces-sus vertueux pourrait s'engager et ladynamique serait vraiment lancée.

1. Selon les données provisoires publiées par l'Agence internationale de l'énergie (AIE) en mars 2015 2. Chiffre publié par l'Agence internationale de l'énergie dans son rapport 2014 sur les perspectives énergétiques mondiales

Les entreprises doivent s'engager résolument dans un processus d'adaptation de leurs comportements et de leur stratégie.

Qu'est-ce que le GIEC ?

Le Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat(GIEC) a été créé en 1988 et placé sous l'égide des Nations Unies.

Grâce à une démarche d'expertise collective, ce groupe de scientifiquesvenus du monde entier affiche depuis le départ l'ambition d'alerter lesresponsables politiques et économiques mais aussi les opinions publiquessur les enjeux associés au changement climatique. En 2007, le GIEC a étélauréat du prix Nobel de la Paix conjointement avec Al Gore.

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

COP21 : les entreprises se mobilisent

Tout le monde espère le succèsdu grand rendez-vous climat deParis en décembre 2015 (COP21),

mais toutes les conditions à réunirpour que l'on puisse parler de ce ren-dez-vous comme d’un succès ne sontpas à ce jour exprimées. Je voudraisrevenir ici sur les enjeux de la COP21en abordant tant le point de vue aca-démique que celui des négociateursavant d'évoquer comment le mondeéconomique, les entreprises engénéral, et ICC en particulier, peu-vent jouer un rôle majeur dans leséchéances à venir.

1. Les enjeux de la COP21

Commençons par rappeler quel estl'enjeu de la COP21 tel qu'il est défi-ni par les experts. Pour qu'à la fin duXXIème siècle, la température moyen-ne n'ait pas augmenté de plus de 2°dans ce siècle, il faut qu'entre 1800 et2100, l'humanité n'ait pas émis plusde 3 000 milliards de tonnes de gaz àeffet de serre. Si l'on divise cettequantité en trois tiers, il apparaît qu'àce jour les deux tiers ont déjà étéémis. Un premier tiers entre 1800 et1970 (il est en général considéréqu'avant 1800 l'activité humaine surla planète n'avait pas d'impact parti-culier sur l'environnement avec uneactivité peu émettrice et une autoré-gulation qui s'opère via les mers, lesforêts, etc.) et un deuxième entre1970 et 2012. Des chiffres qui indiquent une terrible accélérationpuisqu'il aura fallu 170 ans pour l'émission du premier tiers et 42 ansseulement pour le deuxième. L'enjeu est donc clairement posé :comment faire pour mettre en placedes mécanismes qui éviteront que

plus de 1 000 milliards de tonnes deCO2 ne soient émises dans les 80 ansqui viennent ; sachant que si l'on s'entenait à l'hypothèse d'un niveau d'émission en ligne avec celui de ladernière année de référence, c'est-à-dire 2014, dans les années qui viennent, le quota de 1 000 milliardsserait atteint en 25 ans. Autrementdit dès l'année 2040, puisque près de40 milliards de tonnes de CO2 ont étéémis pour la seule année 2014. C'est dire l'ampleur des efforts àaccomplir.Parallèlement, on observe une évolu-tion dans la prise de conscience dechacun. Les entreprises commen-cent à se mobiliser autour du conceptd'économie circulaire, autrement dit,d'une économie écologiquement vertueuse, sobre en carbone et enconsommation de ressources natu-relles). Une nouvelle approche émerge également, si l'on en croit le message adressé par les participantsde la conférence de Lima, fin 2014 : laisser sous la terre les trois-quartsdes réserves connues à ce jour,c'est-à-dire les trois-quarts des 5 000 milliards de tonnes de CO2 quireprésentent les réserves des industries fossiles ce qui ne seraitpas sans conséquences sur le planéconomique et financier. En outre, l'approche académiquedébouche sur une controverse mondiale (« controverse de la diffé-renciation ») qui est au cœur de lanégociation et oppose deux logiques :celle des pays en développement quiconsidèrent que les pays les plusmatures étant à l'origine des 2 000milliards de tonnes déjà émises, ilsleur revient d'assumer 2/3 du coût de

la solution ; celle des pays maturesqui, tout en admettant les erreurs dupassé, estiment que ces émissionsont contribué au développement del'ensemble de la planète. Etantentendu que lutte contre le change-ment climatique et développementne peuvent être dissociés.Pour les négociateurs, il s'agit là d'unpremier sujet de discussion : doit-onimposer à l’ensemble des pays lesmêmes contraintes pour le futur ouopte-t-on pour une approche différen-ciée en fonction des niveaux de déve-loppement respectifs et des rattrapa-ges nécessaires ? Et, quelle que soitl'option retenue, faut-il parvenir à unaccord qui soit contraignant au niveaumondial ? A l'origine, tel était - vu deParis - l'objectif de la COP21. D'autrespays, anglo-saxons en particulier,considèrent que la COP21 peut êtreune réussite sans être parvenue pourautant à un accord contraignant. Uneautre difficulté potentielle tient au faitque certains pays ne souhaitent pasnécessairement que des instancesinternationales puissent venir contrôlerce qu'ils font.Compte-tenu de ce contexte, il semble que - depuis Lima - les négo-ciateurs soient amenés à privilégier l'idée qu'à Paris le succès ne semesurera pas à l'obtention d'unaccord contraignant mais au fait quechaque pays acceptera de préciseroù il en est, où il veut aller en termed’objectifs et définira les moyens decontrôle dont il serait prêt à se doterpour vérifier le respect de ses objec-tifs. On devrait le vérifier dans lessemaines et les mois qui viennent, uncertain nombre de pays mettant surla table ces différents éléments.

Jamais sans doute les entreprises ne se sont senties aussi concernées par les enjeuxassociés au changement climatique et à la transition énergétique. Un des acteursde cette mobilisation revient ici sur les défis lancés au monde économique par laquestion climatique et sur le rôle que l'ICC peut et doit jouer dans cette aventurecollective.

Gilles VERMOT DESROCHES, Directeur Développement durable de Schneider Electric

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

2. La COP21 et les entreprises

L’événement qui se déroulera à Parisen décembre prochain devrait toutd'abord attirer quelque 40 000 per-sonnes et constitue donc un enjeuconsidérable pour l'image de laFrance et des entreprises françaisesdans le monde. Au-delà de cet aspect, il semble quele monde de l'entreprise se mobilisedésormais sur la question climatiquedans une démarche globale qui ne selimite pas à la négociation de laCOP21. L'importance des enjeux estlargement perçue et partagée par unmonde économique conscient qu'ildoit s'emparer de la question clima-tique sans attendre les contraintesqui seraient imposées par les pou-voirs publics. Plus généralement, lesenjeux de développement durable nesont plus perçus comme un poids ouun fardeau, mais comme une sourced'innovation, avec la conviction queles entreprises qui s'en préoccupentle plus seront payées de retour parun avantage compétitif considérableà moyen terme. J'en veux pour preuves différentsévénements ou manifestations quiexpriment l'intérêt accru des entre-prises pour ces questions : à Davos,ces sujets ont constitué l'essentiel duprogramme des réunions plénières,sans être relégués au sein de réuni-ons annexes ; l'ICC, l'organisationmondiale des entreprises, est de plusen plus sollicitée et impliquée surces questions qui, loin d'être l'apanagedes industriels de l'énergie, mobili-sent désormais tous les secteursd'activité. Le secteur banques-assu-rances, en particulier, est beaucoupplus présent dans la préparation dela COP21 qu'il ne l'avait été pour lesCOP précédentes, en raison de l'importance des enjeux de développe-ment durable associés notamment àla capacité des compagnies d'assu-rance d'assurer certains risquesdans les zones où les perturbationsclimatiques sont considérables. Un autre point qui mérite d'être notétient à l'évolution de la position dumonde de l'entreprise sur la questiondu prix du carbone. Il y a deux ansencore, nombre d'entreprises «énergo-intensives» étaient plutôtopposées à l'idée de la mise en placed'un mécanisme mondial qui permettra

de donner un prix au carbone.Aujourd'hui, un consensus sans pré-cédent s’est dégagé lors du Businessand Climate Summit en mai dernier àParis. En Europe par exemple, mêmesi le marché carbone européen n'apas atteint les objectifs assignés lorsde sa création (à environ 7 eurosaujourd'hui, il est loin des niveaux de20 à 30 euros pour 2015 imaginés àl'origine par ses concepteurs), peu devoix s'opposent désormais à la miseen place d'un mécanisme mondial. Iln'est même pas exclu que certainesentreprises soit prêtes à s'engagersur le zéro carbone à l'horizon 2050.Déjà, Ikéa a pris un tel engagementpour 2030, les constructeurs auto-mobiles français visent une consom-mation moyenne de 2 litres/km dès2020 et l'industrie automobile euro-péenne s'est engagée sur un niveaud’émission moyen de 95g/CO2 en2021.

3. Le rôle d'ICC

Alors que les entreprises ne sontassociées aux négociations quedepuis Johannesburg (2002), leurplace s'annonce prépondérante dansles négociations à venir. Et le succèsde la COP21 sera notamment mesu-ré, entre autres facteurs, à l’aune desengagements concrets que les entre-prises auront pris dans l'accord final. Même s'il existe des nuances selonles pays (les entreprises européen-nes, par exemple, peuvent avoir plustendance que d'autres à attendre desrégulations contraignantes), l'auto-

mobilisation des entreprises marqueune évolution sans précédent. Avecprès de 2000 participants le BusinessClimate Summit a réuni 125 réseauxd’entreprises mondiaux représentantplus de 6,5 millions d’entreprises deplus de 130 pays. Les engagementspris par les entreprises, et notam-ment la demande unanime d’un prixdonné au carbone, se manifestent ausein de tous les pays, comme l'aattesté la présence de nombreusesentreprises originaires du Brésil, del'Inde ou de la Chine. Après unepériode durant laquelle la mobilisa-tion générale du monde de l'entrepri-se, était assez faible, on a vu se créerdes structures ad hoc, telles que le World Business Council forSustainable Development (WBCSD)qui témoigne de l'intérêt porté parles structures généralistes représen-tant les entreprises à ces questionset leur donne relief et visibilitéaccrus. Le moment est sans doute venu pourICC d'élaborer sur ces sujets un codede bonne pratique qui ne contiendraitpas de dispositions contraignantes,mais exprimerait un ensemble devolontés et de bonnes pratiquesqu'ICC pourrait veiller à faire respec-ter. Pour le monde de l'entreprise, laCOP21 s’annonce comme une oppor-tunité privilégiée de montrer leurniveau d'engagement dans la luttecontre le changement climatique etpour la transition énergétique, uneaventure collective dans laquelle ICCdoit jouer un rôle majeur dans leséchéances à venir.

Les entreprises «pas assez mobilisées»

Interrogés par Ipsos pour l'agence Havas-Paris, deux Français surtrois (65%) considèrent que les entreprises françaises ne sont pas

encore assez mobilisées contre le changement climatique et souhaitentqu'elles agissent en priorité :➢ pour lutter contre le gaspillage des matières premières (63 %)➢ pour réduire leur consommation d'énergie ou d'eau (44 %)➢ pour concevoir des produits et solutions innovantes ayant moins d'impact

sur le climat (44 %)➢ pour améliorer leurs politiques de transport (25 %)➢ pour concevoir des produits et services qui permettent aux consomma-

teurs de faire face aux conséquences du changement climatique (15 %)➢ pour sensibiliser et accompagner leurs salariés et leurs clients (9 %)

Source. Sondage réalisé par Ipsos pour Havas-Paris entre le 19 et le 26 janvier 2015auprès d'un échantillon représentatif de 995 personnes de 15 ans et plus interro-gées online.

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

ICC France propose un code de« bonnes pratiques climatiques »pour les entreprises

Un des points majeurs de laconférence climatique prévue àParis fin 2015 sera, outre la

négociation par les gouvernementsd’un éventuel accord sur le climat, lamobilisation de l'ensemble de la socié-té civile dont les entreprises font par-tie. Tout le monde s'accorde sur le faitque les engagements des entreprisesseront essentiels pour la mise en oeu-vre des mesures permettant de luttercontre le dérèglement climatique.Grâce à des stratégies innovantesd'atténuation ou d'adaptation, lesentreprises ont déjà permis de réaliserdes progrès sensibles et reconnusdans la réduction des émissions degaz à effet de serre : développementdes énergies renouvelables, promotionde technologies bas carbone, recherche de l'efficacité et de la per-formance énergétique avec différen-tes formes de récupération de cha-leur et d'eau, expérimentation desolutions de financement innovantes... Face aux enjeux actuels (notam-ment le plafond des +2°C en 2100),les entreprises veulent accélérer cesactions et en imaginer d'autres.C'est pourquoi dans le cadre de "l'agenda des solutions", la Chambrede Commerce Internationale, championmondial de l’autodiscipline, va encou-rager les entreprises à prendre desengagements qui pourraient prendrela forme d’un code des "bonnes pratiques climatiques" :

1 – Donner la priorité aux solutions

bas-carbone :

- en développant des technologiesles plus performantes dans les

processus de décarbonisation,aussi bien pour la production d’énergie/ Chaleur que pour la maî-trise de la demande, en s’appuyantsur des réseaux d'énergie intelli-gents et des applications connec-tées à internet ;

- en développant des infrastructuresvertes dans le cadre de partenariatspublic/privé ;

- en favorisant les transferts de technologies dans le respect desdroits de propriété intellectuelle etau travers d’échanges de chercheurset de partenariats académiques.

2 - S'investir dans l'éco-mobilité :

- en s'impliquant dans les politiquespubliques réorganisant les mobilitésde personnes, de biens ou de serviceset en demandant qu'elles soientinclusives et multimodales ;

- en facilitant aussi la mobilité propredes salariés (covoiturage), ainsi que celle des circuits d'approvision-nement et de distribution des fournisseurs et sous-traitants.

3 – Définir un nouveau modèle éco-

nomique :

- en intégrant le risque climatiquedans l’évaluation financière des pro-jets d'investissement, et en deman-dant que la performance climatiquesoit clairement identifiée commecritère d'éligibilité au financementpar les bailleurs internationaux (climato-conditionnalité) ;

- en s’appuyant sur un prix du carbo-ne robuste, incitatif, et bien conçupour donner les bons signaux au

marché tout en évitant les distor-sions de concurrence ;

- en participant à des cofinancementsfondés sur des approches innovan-tes (crowdfunding, green bonds, …).

4 - Favoriser la transparence :

- en procédant à des déclarations sincères et exhaustives en matièred'émissions de gaz à effet de serreétendues à l'ensemble du cycle devie des biens et services ainsi qu'àla totalité de la "supply chain".

5 - Sensibiliser toutes les parties

prenantes :

- en s'engageant à agir sur l'ensem-ble de leurs parties prenantes (salariés, clients, fournisseurs etsous-traitants, investisseurs etfinanceurs, ...) ;

- en s'engageant aussi à s'associer, àtravers leurs politiques de respon-sabilité sociétale, aux actions desONG, des groupes de jeunes et desterritoires, qui agissent pour préve-nir et s'adapter aux changementsclimatiques.

L a C h a m b r e d e C o m m e r c eInternationale tient à rappeler queces engagements n'ont de sens quedans un contexte de libre échangenon entravé par des mesures protec-tionnistes. Elle préconise que lesentreprises puissent alimenter unhub des bonnes pratiques placéauprès de la Convention Cadre desNations-Unies sur les ChangementsClimatiques (UNFCCC), avec des projets ayant valeur d’exemple etpouvant être reproduits.

La COP21, qui se tiendra à Paris en décembre prochain, devrait associer étroitementla société civile - notamment les entreprises – à la mise en œuvre des engagementspris. En contribution à la COP21, ICC France a élaboré un code de «bonnes pratiquesclimatiques» afin d’aider les entreprises à mettre en œuvre une stratégie climatcohérente. Il est en cours d’examen par la commission Environnement et Energiede la Chambre de Commerce Internationale.

Dominique HÉRON, Président de la Commission Environnement et Énergie d'ICC France

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

Business and Climate Summit :les gouvernements reconnaissent le rôle essentiel des entreprises

Dans les entreprises, le climata changé». D'emblée, BriceLalonde, conseiller spécial de

l'ONU pour le développement dura-ble, plaçait le Business & ClimateSummit organisé les 20 et 21 mai2015 au siège de l'Unesco à Parissous le signe d'une belle météo. Àquelque 200 jours de la COP21, unmillier de dirigeants réunis pendantdeux jours en compagnie dere s p o n s a b le s p o l i t i q u e s e t d'experts de haut niveau étaient eneffet venus dire leur mobilisationpour lutter contre le réchauffementde la planète et pour œuvrer, auxcôtés des gouvernements et desdifférents acteurs de la société civile, en faveur d'une économiebas carbone. En ouvrant le sommet consacré àl'état des lieux et à l'évolution desesprits sur la question climatique,Angel Gurria, le secrétaire généralde l'OCDE, a insisté sur le rôle cléque les entreprises ont à jouerdans la mise en œuvre d'une transi-tion vers une économie décarbonéeet durable : «chaque secteur doitdésormais évaluer sa stratégie etses investissements à l'aune durisque climatique. Mais la bonnenouvelle est que bien des entrepri-ses ont déjà commencé». Il a également souligné l'importance dusoutien que les entreprises doiventapporter aux gouvernements «afinde bâtir des écosystèmes innovantsen matière de solutions décarbo-nées où le business travaillerait enpartenariat étroit avec la recherche,le régulateur et la finance». Jean-Pascal Tricoire, PDG deSchneider Electric, signataire avec43 autres grands patrons, d'unelettre ouverte les engageant à

prendre des mesures urgentescontre le réchauffement clima-tique, a lancé les débats en soulignant que les entreprises ontcompris désormais qu' «écologierime avec économie», avant d'ex-horter l'assistance à l'action : «cedéfi de penser une nouvelle sociétéest celui de notre génération.Mettons nous au travail». Commelui, Eldar Saetre, le PDG de Statoil,a appelé à la mobilisation générale,soulignant qu' «il est désormaishors de question de rester sur lebusiness as usual». Dans son intervention, temps fortde la première journée, FrançoisHollande, le Président de laRépublique, s'adressant aux chefsd'entreprise, a insisté sur l'impor-tance de leur rôle dans la transitionénergétique : «ce que nous attendonsde vous, c'est que vous participiezpleinement à la mobilisation desfinancements, que vous anticipiezdans vos décisions d'investisse-ment ce que devra être la mise enœuvre de l'accord de Paris et quevous apportiez par votre savoir-faire tout ce qui peut contribuer à lamutation». Dans la perspective de la COP21 de décembre prochain, le chef del’État leur a également demandé dedéfinir des objectifs de réductiond'émissions de gaz à effet de serrepar grands secteurs : «commentrecourir moins au charbon etdavantage aux technologies propres ? Comment réduire lesconsommations en eau ? C'est à tout cela que les entreprises doivent réfléchir». Il a égalementexprimé son souhait de «faire travailler chaque euro public pourinvestir massivement dans le

financement de la transition éner-gétique» avant de s'adresser plusparticulièrement aux acteurs dusecteur financier pour plaider enfaveur de la «décarbonation» desportefeuilles d'investissement, dudéveloppement des obligationsvertes (green bonds) et de la priseen compte du risque climat dansles décisions d'investissement. Évoquant le rendez-vous dedécembre prochain, FrançoisHollande a enfin lancé un appel auxchefs d'entreprises : «vous devez, àParis, nous apporter des engage-ments, nous apporter des réponseset le succès sera aussi le vôtre carsi nous prenons les décisions quisont attendues, si nous faisons leschoix qui sont espérés, je suis sûrque cela aura des conséquencesextrêmement positives sur lesacteurs économiques, sur les tech-nologies d'avenir, sur l'emploi etsur la croissance». Et, reprenant leterme utilisé quelques minutesplus tôt par Pierre-André deChalendar (Saint-Gobain) et Jean-Pascal Tricoire (SchneiderElectric), il a conclu son discourspar un «vous êtes des activistes, etbien il faut passer à l'action !»Tout au long du sommet, chefsd'entreprise, politiques et expertsvenus du monde entier ont échangésur leurs expériences et sur lesconditions optimales d'une mise en œuvre de la feuille de route quipermettrait de limiter à 2°C leréchauffement d'ici à la fin du siècle. Jean-Paul Agon, PDG deL'Oréal, a souligné que son groupe«s'est engagé à être un contribu-teur significatif de l'économie bascarbone et à démontrer que perfor-mance et responsabilité peuvent

Quelque 1 800 représentants des entreprises du monde entier se sont retrouvés au siègede l'Unesco à Paris pour débattre, lors du sommet Business et Climat, des conditionsd'une transition vers une économie à la fois décarbonée et prospère. Voici les tempsforts de ces deux journées.

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marcher main dans la main».Patrick Pouyanné, directeur géné-ral de Total, a pour sa part reconnuque les pétroliers étaient «en par-tie responsable du problème» maisaussi «une partie de la solution»,avant de souligner que son groupecompte bien jouer son rôle dans lalutte contre le changement clima-tique. Pierre-André de Chalendar aexpliqué comment Saint-Gobaininvestit dans la R&D pour réduiresa consommation d'énergie et limi-ter ses émissions de gaz à effet deserre ; Marie-Claire Daveu, CSOand Public Affairs de Kering, com-ment son groupe partage ses pra-tiques pro-environnementales avecplus de 90 % de ses fournisseurs.Henri de Castries, PDG d'Axa apour sa part souligné que l'indus-trie financière souhaite apporter sapierre à la lutte contre le réchauffe-ment : «AXA va cesser d'investirdans les entreprises dont la majeurepartie de l'activité est liée au charbon. Cela représente un désinvestissement de quelque 500millions d'euros. Nous allons parailleurs tripler nos investissementsverts à l'horizon 2020». De Michelin à RWE, de SchneiderElectric à EDF, de Engie à Lafarge,de State Grid Corporation of Chinaà Solvay, de Renault à Bouygues,tous les dirigeants présents à la tri-bune, qu'ils soient européens,américains, indiens ou chinois ontdit leur engagement à lutter contrele réchauffement (et les progrèsdéjà accomplis). Mais les entrepri-ses ne font pas que donner desgages. Elles attendent aussi desÉtats qu'ils sécurisent leur straté-

gie d'investissement dans l'écono-mie bas carbone en définissant desrègles stables et claires et en semettant d'accord sur les mécanis-mes qui permettront aux pays en développement de prendre leur part dans la lutte contre leréchauffement sans que celaentrave leur croissance. Tous, sans exception, ont notam-ment mis l'accent sur une priorité :la nécessité de donner un prixaussi juste et prévisible que possi-ble au carbone afin de faciliter les investissements en faveur des énergies renouvelables et destechnologies décarbonées, d'amé-liorer l'efficacité énergétique, defavoriser des comportements deconsommation en faveur de solu-tions bas carbone et de réussir uneréduction des émissions de CO2 àun moindre coût économique. PourJean-Pierre Clamadieu, patron deSolvay, l'existence d'un tel prixconstituerait un élément important«dans la prise de décision desentreprises» pour opérer la transi-tion vers une économie bas carbo-ne. Un avis largement partagé. «Unmécanisme de fixation des prixcohérent est crucial si nous voulons avancer dans la bonnedirection avec les bons investisse-m e n t s » a s o u l i g n é G é r a rdMestrallet, le patron d'Engie. Unoutil indispensable à la fois pourles gouvernements et pour lesentreprises, mais qui suscite enco-re de nombreuses dissensionsquant aux conditions de sa mise enœuvre (taxes ou système d'échan-ges de quotas, prix efficace etjuste...), notamment entre les

industriels du fossile et ceux desénergies renouvelables, comme l'amontré une des tables rondesconsacrée à la question. «Ce n'est pas par la confrontationmais par la coopération qu'on yarrivera» avait plaidé dès la séanced ' o u ve r t u re l a co sta r i ca i n eChristiana Figueiras, la «MadameClimat» de l'ONU, tandis queSégolène Royal appelait à définir«des règles stables, fixes et irréver-sibles en donnant un prix au carbo-ne» avant d'inviter tous les acteursà saisir cette chance unique de«poser autrement les fondamen-taux de notre développement com-mun sur cette terre», persuadéeque dans les mois et les années à venir on allait voir «converger les intérêts des entreprises, lesintérêts du secteur financier et lesintérêts de la planète». Si, dans la perspective de la COP21,tous les blocages, toutes les réticences, sont loin d'être levés, ledialogue est noué et la coopérationamorcée, comme l'a souligné lorsde la «plénière» de conclusionTerry McGraw, chairman éméritede McGraw Hill Financial et prési-dent d'ICC : «nous espérons que cesommet sera perçu comme untournant pour le business dansl'installation d'un dialogue avec lesresponsables politiques, nationauxet internationaux dans la perspec-tive de la COP21. Nous plaidonspour un accord global ambitieux en décembre afin d'accélérer laréduction des émissions et de bâtirune économie capable de résisterau changement climatique». Invité à clôturer ces deux journéestrès denses, Laurent Fabius, leMinistre français des Affairesétrangères, a estimé que «le clima-tofatalisme est de plus en plusinjustifié et le climatovolontarismede plus en plus indispensable»avant de se déclarer «raisonnable-ment optimiste» sur les chances desuccès de la COP21 en décembre à Paris. Il a conclu les débats enrappelant qu'il compte sur lesentreprises pour «créer un réflexeclimat dans les décisions d'inves-tissement» et en souhaitant qu'ellesrendent publiques leurs contribu-tions à la lutte contre le réchauffe-ment climatique et rejoignent les structures de coordination quiœuvrent contre le réchauffementglobal.

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

L’économie et les territoires au cœur de l'action en faveurdu climat

Les questions climatiques s’im-posent de plus en plus commeun des grands enjeux de notre

société au XXIe siècle, des questionsqui pourraient aller jusqu'à remettreen cause – si rien n'est fait – lapérennité de certaines activitéshumaines : alimentation, mobilité,habitation, loisirs, travail… Ellesreprésentent aussi une source decraintes pour nos conditions de vie,notamment avec les problèmes desanté qui, telles les allergies respira-toires, peuvent se développer avec larupture des équilibres climatiques. L’accès aux ressources et la viabilitétechnologique de telle ou telle solu-tion constituent également des pré-occupations majeures. On sait que,dans l'avenir, le développement desentreprises ne pourra plus se fonder

sur l’énergie peu chère, facile àtransporter et très polluante quesont les hydrocarbures. Plus globale-ment, la croissance économique ne pourra être durable qu’en désoli-darisant sa courbe de celle des émissions de gaz à effets de serre.De quoi engendrer dans l'économiedes ruptures aussi importantes quel’arrivée du numérique.Pour les dirigeants d'entreprise, laquestion climatique représente uneprise de responsabilités mais aussiune exceptionnelle opportunité debusiness. Responsabilité dans lamesure où chaque organisation doitdiminuer drastiquement l'impactenvironnemental de ses activités etinstaurer un dialogue à la fois struc-turé et permanent avec l’ensemble

de ses parties prenantes. Les gou-vernements et l'ONU n'ont pas eneffet à eux seuls la responsabilité de la baisse à court terme des émissions de carbone. Pour êtrepérenne, chaque organisation devramettre le climat au cœur de sa stratégie, d’autant qu'au siècle desréseaux sociaux la pression des parties prenantes est appelée à serenforcer.Mais le rendez-vous climatique constitue aussi pour l’entreprise etles entrepreneurs une opportunitéd’innovation autour de la recherchede solutions décarbonées, et donc decréation d’emplois et de richesses.Tous les territoires ont besoin de cessolutions pour continuer à améliorerles conditions de vie des populationset pour faciliter l'adaptation auxdérèglements climatiques déjà encours. La 21e conférence des parties desNations Unies, la COP21, réunira ses196 membres en décembre 2015 àParis. Chaque année, ces réunions se traduisent par des avancées,

Créée dans la perspective de Paris Climat 2015, Solutions COP21 est une initiativeunique qui a pour but de faire connaître les «solutions climat» développées par lesorganisations non étatiques, en particulier les entreprises, les associations et lesterritoires. Gilles Berhault, le président de son comité de programme, présente icisa philosophie et son programme d'action.

Gilles BERHAULT, Président du Comité 21 et du Club France Développement durable

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Solutions COP21, un agenda riche et varié jusqu'à décembre 2015.

Solutions COP21 comporte plusieurs volets qui se dérouleront toutau long de l’année 2015 jusqu’à la COP21 :

• Le Hub des Solutions Climat : une plateforme web contributive dédiéeaux solutions climat alimentée par une pluralité d’acteurs.• Des conférences/débats : pour faire connaître les Solutions climat,échanger et créer des synergies entre acteurs.• Des visites en régions : pour découvrir les innovations et les bonnes pratiques.• Un Pavillon au Bourget du 30 novembre au 12 décembre 2015 pendanttoute la durée de la COP21, à proximité de la conférence officielle.• Une grande Expo au Grand Palais à Paris du 4 au 10 décembre 2015 lors

de la COP21 : plus de 10 000 m2 d’exposition et d'espaces événementielsd'une capacité de 70 000 personnes pour accueillir des projections, desconférences, des débats, des animations et des pavillons thématiques afinde rassembler tous les acteurs (recherche, éco-mobilité, fleuve-mer, villesdurables, territoires, commerces, numérique...) et de donner à voir lessolutions et innovations en faveur du climat au plus large public, avec unaccès gratuit. Des œuvres des plus grands artistes contemporains serontégalement exposées.

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

certaines importantes comme cellequi a permis la signature du protoco-le de Kyoto en 1997, d'autres pluscontrastées comme Copenhague2009 ou Lima 2014. Correspondant àla fin d’un cycle de négociation, ParisClimat 2015 sera notamment mar-quée par la présentation par chaquepays de ses objectifs concrets. Ainsi,l’Europe a annoncé une ambition debaisse de ses émissions de CO2 de 40 % à l'horizon 2030.À Paris, en décembre 2015, des«solutions climat» seront présen-tées en provenance du monde entierafin de répondre concrètement à tousles besoins de produits et servicesd'une société «décarbonée». C'est la raison pour laquelle le Comité 21et le Club France Développement durable ont lancé Solutions COP21(en co-production avec les spécialis-tes de la communication, Alliantis etHopscotch). Le rendez-vous dedécembre 2015 sera aussi l'occasiond'un débat de portée internationalesur des questions aussi importantesque celles du financement, de la faisabilité et de l’acceptabilité dessolutions proposées.Solutions COP21 est une initiativeinédite qui a pour but de faire connaî-tre à tous et de valoriser les solutionsclimat développées par toutes lesorgan isa t ions non éta t iques .Entreprises, institutions, territoires,centres de recherche et associa-tions/ONG mettent leurs efforts encommun pour démontrer qu’unepartie de la réponse aux problèmesclimatiques réside dans la générali-sation de solutions destinées à la foisà atténuer les effets du dérèglement

climatique et à favoriser l'adaptationdes comportements des différentsacteurs. À l'occasion du grand rendez-vous de décembre 2015, ilssouhaitent présenter à un largepublic les multiples produits, services,process et innovations qui existent ou sont en projet à travers le mondepour lutter contre le dérèglement climatique et ses conséquences. Ainsi Solutions COP21 a pour ambi-tion de montrer que l’humanité peutcontinuer à se développer non pasdans un monde fait uniquement decontraintes et de restrictions, maisaussi à travers une approche positi-ve, optimiste, dans une démarcheglobale de développement durable,qui place la préservation des bienscommuns au cœur des priorités. Ladémarche est placée sous le signed'un retour à l’esprit des expositionsuniverselles du début du XXe siècle,celui d’une société qui a envie

d’avenir, rêve d’innovation et souhaiteaccélérer les mutations. Situé au cœur de Paris et édifié à la fin du XIXe siècle dans l'optique del'exposition universelle de 1900, leGrand Palais a été choisi comme pointnodal d'un dispositif destiné à mettrenos solutions en valeur. Du 4 au 10 décembre 2015, Solutions COP21et ses partenaires y donnent rendez-vous à tous les publics dans le cadred’une exposition-débat sur le climat(voir ci-contre l'agenda de SolutionsCOP21). Tous profiteront de ce siteexceptionnel pour donner à voir denombreuses «Solutions climat» defaçon à la fois ludique, pédagogique etcréative. Plus de 70 000 représentantsdes pays, des ONG, des collectivitéslocales, du monde associatif et de larecherche et aussi le grand publicseront présents pour partager etinventer leurs solutions. C’est lemoment de rejoindre le projet !

Comité 21, un réseau multiacteurs dédié à l'action concrète.

Le Comité 21 est le principal réseau français d’acteurs engagés dans lamise en œuvre opérationnelle du développement durable et de la RSE.

Il a pour mission de créer les conditions d’échange et de partenariat entre sesadhérents issus de tous les secteurs afin qu’ils s’approprient et mettent enœuvre, ensemble, le développement durable à l’échelle d’un territoire.Composé de quatre collèges, il réunit les parties prenantes concernées enFrance : entreprises (multinationales et PME), collectivités (des communesaux régions) et institutions publiques, associations (d’environnement, de déve-loppement, de solidarité locale, de défense des droits humains…), institutionset établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Ce réseau deprès de 500 adhérents fonde son action sur la vision prospective, les partena-riats pluri-acteurs et sur l'action concrète. Le Comité 21 anime le Club FranceDéveloppement durable, une plate-forme française qui regroupe plus de 100 réseaux d’élus, d’entreprises, de grandes associations et de centres d’enseignement et de recherche à l'international.

Les adresses utiles : www.clubfrancedeveloppementdurable.org ; www.comite21.org ; www.solutionscop21.org ;

www.plateformesolutionsclimat.org ; Twitter @SolutionsCOP21 et @gillesberhault

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

Le groupe Air France-KLM s'engage pour le climat

Notre mission est de relier leshommes et de répondre à leurdemande croissante de se

déplacer partout dans le monde.Conscient des implications de notreactivité, le groupe s'engage en mettant en place des actions concrè-tes pour assurer durablement cettemission tout en préservant l’environ-nement et en favorisant le progrèssocial.L’aviation ne représente que 2 % à 3% des émissions de CO2 d’originehumaine. Cependant, compte tenudes prévisions de croissance, cettepart augmentera dans les vingt pro-chaines années.Conscient de l'enjeu, le transportaérien est le premier secteur à s'organiser au niveau mondial.Dès 2009, les compagnies del’ I n te r n a t i o n a l A i r Tra n s p o r tAssociation (IATA) se sont engagéessur trois objectifs volontaristes :• Améliorer l’efficacité énergétique

de 1,5 % par an d'ici à 2020.• Assurer une croissance neutre en

émissions de CO2 à partir de 2020.• Réduire de 50 % les émissions de

CO2 en 2050 par rapport au niveaude 2005.

Afin de réduire notre propre impact,nous activons l'ensemble des leviersqui relèvent de notre responsabilitédans le cadre d'un « plan climat »pluriannuel qui mobilise nos collabo-rateurs et l'industrie autour de plansd'action ambitieux :• moderniser notre flotte et contri-

buer à la recherche aéronautique,• rechercher les économies de carbu-

rant dans nos opérations vol et sol, • participer à la recherche sur les

énergies alternatives,

• financer des programmes de pro-tection de l’environnement, notam-ment avec notre programme dereforestation,

• permettre à nos cl ients de compenser les émissions de CO2

liées à leur voyage,A u n i v e a u r é g l e m e n t a i r e ,l'Organisation de l'Aviation CivileInternationale a la responsabilité detrouver un accord mondial pour letransport aérien pour fin 2016. AirFrance-KLM participe activement àces travaux et soutient le principe d'unmécanisme de mesures de marché,plus efficace qu'une simple taxationsous réserve qu'il soit simple, équita-ble, et que les fonds soient employés àla recherche et à la mise en œuvre detechnologies bas carbone. Depuis2012, le transport aérien participe ausystème de permis d'émissions EUETS pour le périmètre des vols inter-nationaux intra-européens.En 2014, la consommation du GroupeAir France-KLM s'est élevée à 27,6 millions de tonnes de CO2, enbaisse de 38 % par rapport à 2000 etde 3,9 % par rapport à 2013 (eng/passager/km) et nos avions ontconsommé en moyenne 3,45 litresaux 100 km/passager, soit -20 % parrapport à 2002 et notre objectif d'ici à2020 est de réduire nos émissions deCO2 de 20 % par rapport à 2011. Malgré ces contributions et commeaucune rupture technologique n’estenvisagée avant la fin du siècle, l’utilisation de biocarburants aviationdevra faire partie des solutions.Néanmoins, les filières de productiondu biocarburant sont encore rares etsous dimensionnées. Aussi notreambition est de contribuer à la miseen place d'une filière de biocarburants

durables pour l'aviation en Europe eten France respectant des critèresenvironnementaux, sociaux et écono-miques exigeants. Pionnier dans l'utilisation de biocar-burant, KLM a réalisé en 2014 20 volsvers Aruba et Bonnaire. En septembre2014, Air France a lancé, avec le sou-tien de 14 partenaires, la «Lab'line forthe future» : un vol hebdomadaireentre Toulouse et Paris-Orly alimentéen biocarburant dont l'utilisation permet de réduire les émissions deCO2 jusqu'à 80 % par rapport à un carburant classique. Par ailleurs, le Groupe Air France-KLM est engagé dans de nombreuxprojets destinés à faire avancer lesrecherches dans le domaine duDéveloppement Durable, comme parexemple, le programme IAGOS quipermet d’assurer une surveillance duclimat et de la pollution atmosphé-rique à l’échelle mondiale, grâce àdes instruments de mesure de l’atmosphère placés à bord d’unAirbus A340. Mis à la disposition desscientifiques du monde entier, lesrelevés servent notamment à l'étudedu cycle du carbone et à la vérificationdes émissions de CO2.Nous sommes classés, depuis plu-sieurs années, leader de la catégorie«Transport aérien» ainsi que du sec-teur élargi «Transport» par le DJSI(Dow Jones Sustainability Index) pournotre engagement et notre stratégiede développement durable résumépar Alexandre de Juniac, le prési-dent-directeur général du groupe :«Air France – KLM se mobilise pourconstruire le voyage de demain, unvoyage que nous voulons attentionné,innovant et responsable. C’est un défipassionnant à relever pour chacund’entre nous».

Mobilisé sur la question climatique, le Groupe Air France-KLM s'est donné commeobjectif de réduire en 2020 ses émissions de CO2 de 20% par rapport à 2011. Unplan climat pluriannuel est mis en place autour d'une série d'actions ambitieuseset mobilisatrices pour l'ensemble des personnels de la compagnie.

Nathalie SIMMENAUER, Directrice du Développement durable d'Air France

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

Le Fonds Vert pour le Climat,un financement innovant

Selon les estimations du Grouped'experts intergouvernementalsur l'évolution du climat (IPCC),

450 milliards de dollars d’investisse-ment sont nécessaires pour la période 2010-2029, soit l’équivalentde 0.5 % du PIB mondial (2013). Pourfaire face à ce défi, la communautéinternationale a créé le Fonds Vertpour le Climat (FVC), générant ainsides opportunités pour le secteurprivé.

I. Quels objectifs pour le FVC ?

Créé lors de la Conférence deCancun sur le climat (COP16), le FVCa pour objet le financement de projets destinés à lutter contre leréchauffement climatique, et la promotion de mesures d'adaptationaux conséquences du réchauffement.En 2014, à la COP20 de Lima, leFonds a franchi le cap des 10milliards de dollars (10,2 milliards dedollars à fin mars 2015), son seuil depleine efficacité à court terme. L’objectif du Fonds est de devenir leprincipal canal de distribution desfinancements publics pour le climat,et de catalyser «le financement desource tant publique que privée dansce domaine». Dans un premiertemps, il acceptera les donations dusecteur public et du secteur privé, les apports en capital et les prêtsconfessionnels publics. À l’avenir, ilpourrait attirer d’autres types decontributions financières privées,hormis les donations.

II. Qui peut demander un finance-

ment ?

Tous les pays en développementsignataires de la Convention peuvent

avoir accès aux ressources du Fondsafin de financer des projets d’adapta-tion et d’atténuation des effets duchangement climatique. Le conseil du Fonds met au point,gère et supervise une procédured’accréditation pour toutes les entités nationales, régionales etinternationales chargées de la miseen œuvre de ces projets, que celles-ci relèvent des secteurs public ouprivé. Il opère selon des critères pré-cis qui tiennent compte des principeset normes fiduciaires et des garan-ties environnementales et sociales.L’accès direct aux ressources se faitpar l’intermédiaire de ces entités, cequi garantit une plus grande efficaci-té dans l’affectation des crédits.Ainsi, une entreprise qui développedes panneaux solaires dans un paysen développement pourra, aprèsavoir obtenu une accréditation de lapart du Fonds et du pays bénéficiaire,accéder aux ressources nécessairesau financement de son projet.

III. Quelle procédure et quelle offre

d’instruments financiers par le

FVC ?

Chargé de lancer les appels à projets, le secrétariat du FVC vérifieque les propositions qui lui sont soumises respectent ses critères«sauvegarde environnementale etsociale». En outre, chaque propositions’accompagne d’une lettre formellede «non-objection» émanant du paysbénéficiaire du projet, confirmant l’adéquation entre les propositions definancement et les priorités nationa-les sur les questions climatiques. Les modalités de financements sontvariées. Le Fonds propose des

«subventions et [des] prêts» à desconditions extrêmement favorables,ainsi que tous «modalités, instru-ments ou dispositifs approuvés» parlui (paragraphe 54 du texte). L'objectifest de permettre aux intermédiairesaccrédités d’utiliser les financementspour proposer des garanties de risqueet des prises de participation, en susdes prêts et des dons.

IV. Quelles mesures attractives spé-

cifiquement destinées au secteur

privé ?

Pour faciliter et promouvoir la participation du secteur privé danscette lutte, le FVC a créé un Fondsd’assistance au secteur privé (PSF). Le dispositif entend favoriser lefinancement direct et indirect desacteurs du secteur privé dans lespays en développement, en particu-lier au niveau local, afin d’impliquerles PME et les intermédiaires finan-ciers locaux. Il soutient égalementles activités permettant au secteurprivé de jouer un rôle dans les petitsÉtats insulaires en développement etles pays les moins avancés. A terme,le PSF envisage d’élargir la gammedes instruments proposés (dans unpremier temps, prêts et subventions)afin de financer directement lesacteurs du secteur privé. Le FVC offre donc des perspectivesde financement pour les acteurs dusecteur privé des pays développés,qu’ils soient déjà établis dans lespays en développement bénéficiai-res ou qu'ils entendent développerdes partenariats avec des acteursprivés de ces pays, dans le cadre desprojets relatifs aux questions clima-tiques.

Lutter contre le changement climatique soulève des problèmes majeurs de financement.Le Fonds Vert pour le Climat a vocation à être le bras financier des pays en développementdans cette lutte contre le réchauffement. Il est désormais doté de plus de 10 milliardsde dollars.

Gabriela G. MERLA1, Avocat associé, Cabinet Smith d’Oria, Observatrice auprès du Climate InvestmentsFunds représentant le secteur privé

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1 Cet article reflète l'opinion de l'auteur à titre personnel.

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DOSSIER : CHANGEMENT CLIMATIQUE

Déplacés environnementaux :il est grand temps d'agir

L’émergence, depuis la fin desannées 1980, des difficultés etquestions liées au dérègle-

ment climatique et l'augmentationdu nombre de déplacements depopulation qui leur sont associésont fait prendre conscience de lanécessité d’élaborer un projet deConvention ayant pour objet d’éta-blir un cadre juridique stable auplan international afin de régir lesconséquences de ces événementsclimatiques sur les populations dedifférentes régions du monde. Les discussions autour de l’élabo-ration du projet de convention ontfait apparaître que la notion de«déplacés environnementaux» estplus adaptée pour désigner avecpertinence les populations ayantsubi les conséquences d’un boule-versement environnemental (I), lanotion de «bouleversement envi-ronnemental» ayant par ailleursété choisie afin de permettre uneappréhension juste et complète dessituations en cause (II).

I. Sur le choix du terme de «dépla-

cés environnementaux»

Différents termes sont générale-ment utilisés pour désigner lespopulations ayant subi les consé-quences d’un événement climatique.Ainsi, les termes de «réfugiés climatiques», «réfugiés écolo-giques», «réfugiés environnemen-

taux» ou encore de «migrants del’environnement», ont été diverse-ment employés pour décrire lasituation des populations victimesd’événements climatiques.Toutefois, ces termes sont apparusinsuffisants pour recouvrir l’inté-gralité des enjeux auxquels cespopulations sont confrontées. Eneffet, le terme de «réfugié» ne permet pas de prendre en compteles populations dont l’exil a pourcause des événements climatiques,dès lors qu’il exclut les populationsdéplacées au sein d’un même État.En outre, la confusion est possibleavec le terme de «réfugié» inscritdans la Convention de Genève de 1951, lequel ne fait nullementréférence à des considérationsenvironnementales au profit deconsidérations politiques.En définitive, il semble que l’ex-pression «déplacés environnemen-taux» soit la mieux adaptée. Nonseulement ce terme écarte toutepossibilité de confusion mais ilimpose une distance par rapport àla problématique du réchauffementclimatique, pour laquelle les solutions à envisager sont différen-tes, dès lors qu’il s’agit ici d’envisa-ger le déplacement de populationsvictimes d’événements ponctuels,sans inscription dans la durée, si ce n’est pour les conséquencesdurables qui en résultent. Enfin, il

permet d’élargir les débats de lagouvernance mondiale relative auxmigrations, afin d’y intégrer lesdéplacés environnementaux qui nefranchissent pas nécessairementune frontière étatique.

II. Sur la notion de «bouleversement

environnemental»

Dans le cadre de l’élaborationd’une Convention relative aux«déplacés environnementaux», ilest apparu indispensable de tenircompte de l’hétérogénéité destypes d’événements climatiques.Dans l’optique d’une mise enœuvre efficace de la Convention,afin d'en favoriser une applicationopérationnelle et sans qu’il y aitbesoin d’interpréter ses disposi-tions, la notion de «bouleverse-ment environnemental» a été définie comme étant un événementà la fois «brutal et insidieux»,incluant les catastrophes d’originenaturelle et celles issues des acti-vités humaines. En intégrant, dansla définition du «bouleversementenvironnemental», les catastrophesliées aux activités humaines, il s’agissait de n’exclure aucunehypothèse de nature à faire obsta-cle à l’application des dispositionsd’une telle convention, le caractèreenvironnemental d’une catastrophen’étant pas incompatible avec sacause humaine.

Le réchauffement climatique est et sera, dans les années à venir, à l'origine de nombreux déplacementsde population. La communauté internationale doit se doter d'un cadre juridique adapté au traitementde ce nouveau fléau. Un projet de Convention est en cours de discussion.

George J. GENDELMAN,Associé Co-fondateur des Ateliers

de la terre,

Yvon MARTINET, Avocat à la Cour, Président du Club desavocats environnementalistes (CDAE),

Patricia SAVIN, Avocate à la Cour, Présidente d'Orée

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POINTS DE VUE

Depuis le 1er janvier 2015, une entreprise, assujettie à la TVA et titulaire d'uneprocédure de domiciliation unique (PDU), a la possibilité d'opter pour l'autoliquidationde la TVA à l'import. Une facilitation fiscale ambitieuse dans son principe et évolutivedans son contenu.

Hélène GUILLEMET, Sous-directrice du commerce international à la Direction générale des douanes et desdroits indirects

Autoliquidation de la TVA àl'import : une simplificationattendue

La question de l’autoliquidation dela TVA à l’importation est inscritedans la loi de finances rectificative

votée le 29 décembre 2014.

Une mesure ambitieuse destinée à

ancrer le dédouanement en France

L’autoliquidation de la TVA à l’impor-tation exprime une double ambition.D’une part, elle vise à accroître l’attractivité des plates-formes logis-tiques françaises pour les importa-teurs en simplifiant les modalités depaiement de la TVA. D'autre part, ellea pour objectif d'alléger les chargesde trésorerie pesant sur les entrepri-ses importatrices, notamment lesPME/ETI et les opérateurs tiers, cesderniers étant systématiquementplacés dans une situation créditricequi engendre des délais de rembour-sement plus ou moins importants. Afin de répondre aux contraintes duplus grand nombre d’opérateurs,tout assujetti à la TVA, - qu’il soit établi sur le territoire français, com-munautaire ou même tiers - pourrasolliciter le bénéfice de l’autoliquida-tion de la TVA à l’importation sur sa déclaration de chiffre d’affaires àcondition d’être titulaire d’une procédure de domiciliation uniquecommunautaire (PDU).

Un périmètre adapté aux flux

d’opérations réalisées

La mise en œuvre de l'autoliquidationde la TVA s’accompagne d’un suivirigoureux et de garanties permettant

de s’assurer que les recettes fiscalesne seront en aucun cas compromises1.Pour cette raison, son périmètre estréservé aux bénéficiaires des PDU.Cette simplification douanière estaccordée aux opérateurs fiables,connus de l’administration, préalable-ment audités selon des critères définispar le Code des Douanes communau-taire, qui par la nature de leurs fluxtireront avantage du dispositif proposé.Ce périmètre permet de prendre encompte la vulnérabilité du système dela TVA intracommunautaire (risques defraude) et garantit une parfaite maîtri-se des opérations par les opérateurs.

Un schéma de fonctionnement

rationalisé qui préfigure l’entrée en

application du CDU

La PDU préfigure le futur dédouane-ment centralisé prévu par le Code desDouanes de l’Union qui entrera enapplication le 1er mai 2016. Les béné-ficiaires de PDU seront les premiers àpasser en dédouanement centralisénational qui permettra d'ancrer ledédouanement en France dans uncontexte de concurrence accrue entreles grandes plate-formes.

Les représentants en douane ne

sont pas oubliés

Si les représentants en douane nepeuvent en tant que tels bénéficier dudispositif, n’étant pas assujettis fiscaux en matière de TVA à l’impor-tation, celui-ci leur permet d’accom-pagner au mieux leurs clients :

- En renforçant le rôle d’attractivitévis-à-vis des opérateurs tiers :ainsi, un représentant en douanepeut être titulaire de l’autorisationde PDU pour le compte de sonclient tiers afin que celui-ci bénéfi-cie de l’autoliquidation.

- En facilitant son rôle de conseil etd’intermédiaire vis-à-vis des PME :ces entreprises doivent certes êtretitulaires de l’autorisation de PDUmais peuvent continuer à confierl’organisation et la gestion de leursschémas de dédouanement à leursreprésentants.

La douane accompagne efficace-

ment les opérateurs

L’entrée en application de l’autoliqui-dation de la TVA à l’importation faitnaître de nouvelles attentes de lapart des opérateurs et de leursreprésentants en douane. La douaneentend l’utiliser comme levier d’attractivité en facilitant l’accès à laPDU à des opérateurs communautai-res ou nationaux nouveaux. Afin deles accompagner au mieux dans l’obtention de la PDU, condition pourbénéficier du dispositif, elle disposed’un réseau efficace de conseil économique avec les pôles d’actionéconomique régionaux et les gestionnaires de procédures desbureaux principaux.L’adresse [email protected], a été créée afin de traiterles interrogations soulevées par ledispositif.

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1. Dans le respect de la directive TVA qui permet aux États membres de prévoir que, pour les importations de biens effectuées par les assujettis ou les redevablesou par certaines catégories d'entre eux, la TVA due en raison de l'importation ne soit pas payée au moment de l'importation, à condition qu'elle soit mentionnéecomme telle dans la déclaration de TVA

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POINTS DE VUE

Les questions de conformité aux normes de lutte contre la corruption internationalesont stratégiques pour les grands groupes français et le droit a connu de récentesavancées en la matière. Pour autant, le cadre juridique français demeure perfectible.

Juliette VANHOVE, Compliance Manager, Cambridge University Press

Prévention de la corruption :vers une évolution du modèlefrançais ?

Historiquement, la prise encompte des exigences deconformité s’est faite en France

de manière volontariste, proactive,mais sans cadre juridique précis.Sans principes directeurs en lamatière, les entreprises ont construitleurs programmes d’intégrité enfonction des meilleures pratiquesinternationales et/ou des indicationsissues de textes de loi étrangers(Foreign Corrupt Practices Act, UKBribery Act). Depuis quelques annéesdéjà, de nombreuses voix insistaientsur la nécessité d’harmoniser despratiques qualifiées d’hétérogènes etde créer un environnement juridique«vecteur de compliance», à la foissynonyme d’équivalence fonctionnellesur le plan du droit international et deconcurrence équitable.S’inspirant du UK Bribery Act, leService Central de Prévention de laCorruption (SCPC) plaidait dès 2013pour la création d’une obligation deconformité basée sur le modèle du«failure to prevent» britannique etaccompagnée de principes directeursdéfinissant les caractéristiques d’unprogramme de compliance1. En cesens, une étape importante a étéfranchie en mars 2015 avec la publication par le SCPC des «Lignesdirectrices françaises visant à renforcerla lutte contre la corruption dans lestransactions commerciales»2.

Aligner la pratique sur les stan-

dards internationaux

Fruit d’une concertation entre diffé-rents ministères (Justice, AffairesÉtrangères, Finances) et les princi-

paux acteurs du secteur privé, dontles entreprises du CAC 40, ces lignesdirectrices proposent aux firmesfrançaises un cadre de référence enmatière de conformité anti-corrup-tion et permettent d’aligner la pra-tique de la compliance sur les grandsstandards internationaux. En effet,les principales composantes des programmes de compliance, de l’en-gagement des dirigeants à la nécessi-té d’identifier les risques, de formerles collaborateurs et de leur offrir lesoutils adaptés, y sont reprises.Sur le terrain de l’obligation deconformité, le droit français évolueégalement : la proposition de loi relative au devoir de vigilance dessociétés mères et des entreprisesdonneuses d’ordre a été élargie afind'intégrer un dispositif de préventionde la corruption à la charge desentreprises3. Reste à déterminer sices avancées évolueront vers uncadre juridique homogène, donc plussûr, ou resteront un patchwork demesures existant de facto, mais sansvéritable cohérence. La question de la valorisation de cesinitiatives par le juge reste égalementen suspens. En ce sens, certainesvoix, dont celle de TransparencyInternational, se sont levées pourdéfendre l’utilisation de procéduresconcertées dans les affaires de corruption internationale. Les spéci-ficités de la justice transactionnellereprésenteraient en effet un moyende faire valoir les best efforts desentreprises en cas de dysfonctionne-ment, tout en offrant une opportunitéde mettre en œuvre des méthodes

pérennes et efficaces de prévention. Efficace dans les pays anglo-saxons,le système de justice négociée peinecependant à s’installer en France :d’une part, les procédures ne cor-respondent pas à la tradition inquisi-toire française ; d’autre part, elles nes’inscrivent pas dans un cadre juri-dique propice au développementd’une démarche de conformité.

Créer les conditions d'une équiva-

lence fonctionnelle

L’exemple des accords de poursuitesdifférées britanniques («DeferredProsecution Agreements») pourraitnéanmoins représenter une sourced’inspiration pour les juristes français :à la différence de leur équivalentaméricain, ces accords garantissentun équilibre des pouvoirs entre lejuge judiciaire et les autorités depoursuites. Dans le contexte du UKBribery Act, leur utilisation apparaîtjustifiée dans le cadre d’une logiqueglobale de lutte contre la corruptionet de valorisation des programmesd’intégrité.L’enjeu pour le législateur est désormais de concrétiser les récentsefforts entrepris, en incluant notam-ment la possibilité pour les entrepri-ses de valoriser leurs programmesde compliance par le biais des procé-dures concertées. Ceci créerait enfinles conditions d’une équivalencefonctionnelle, fidèle à l’esprit initialde la Convention OCDE, et permettraitaux acteurs d’évoluer dans un cadrejuridique global plus sûr.

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1. Service Central de Prévention de la corruption, Rapport 2012, Chapitre IV, p. 169.2. Voir http://www.justice.gouv.fr/include_htm/pub/lignes_directrices.pdf 3. Voir http://www.nortonrosefulbright.com/knowledge/publications/127110/vers-une-obligation-legale-de-mise-en-place-dun-dispositif-de-prevention-de-la-

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Négocié depuis 2013, le Traité Transatlantique entre l'Europe et les États-Unissuscite à la fois inquiétudes et fantasmes. Le Cercle Montesquieu, en partenariatavec Clifford Chance Paris, lui a consacré une conférence organisée autour dutriptyque démocratie/business/justice. Compte-rendu des débats.

Eric GARDNER DE BÉVILLE, Avocat à la Cour, Client Relations Officer

Le Cercle Montesquieu se penche sur les enjeux du TraitéTransatlantique

En préambule, Patrick Messerlin,professeur à l'Institut d’ÉtudesPolitiques de Paris, a remis en

perspectives les motivations desacteurs et dessiné le cadre généraldu Traité Transatlantique (TT) tout enévoquant les sujets sensibles. Il arappelé que «tout traité de libre-échange vise à accroître le bien-êtredes citoyens» et estimé qu'il «doit enpriorité se concevoir comme un sou-tien aux réformes internes lesquellessont la vraie source de croissanced'un pays». Dans la première table ronde, organi-sée autour du thème «secrets, infor-mation et droits des citoyens», Laurede La Raudière, députée d'Eure-et-Loir, s'est étonnée d'être «très peusollicitée à propos du Traité transat-lantique en tant que parlementaire»même si elle a noté une recrudes-cence d'inquiétude sur le sujet auprintemps 2014 «notamment en raison du manque d'information et decommunication». Tout en se réjouis-sant que le débat soit désormais sur

la place publique, gage de transpa-rence démocratique, elle a estiméque «les citoyens n'ont plus confian-ce dans les institutions» avant desouligner le flou qui persiste dans lesesprits : «le TT traite-t-il uniquementde questions commerciales ou va-t-ilplus loin en touchant à des thèmescomme le respect de la vie privée oul'éthique en matière de génome ?». Pour sa part, Denis Musson, direc-teur juridique d'Imerys et présidentdu Cercle Montesquieu, a regretté le«manque d'engagement des citoyensfrançais dans la consultation menéepar la Commission européenne : la France ne représente que 6,5 %des réponses contre 24 % pourl'Allemagne et 34 % pour la Grande-Bretagne». Quant à Michel Petite,ancien Directeur général des servi-ces juridiques de la Commissioneuropéenne, il a souligné que «lagrande nouveauté du TT est de proposer une négociation sur lesréglementations et la mise en placed'une coopération normative». Selon lui, «nous évoluons vers un droit négocié, c'est-à-dire une conventionacceptée par les parties prenantes». Sur le thème «Traité Transatlantique,quel avenir pour les entreprises etles tribunaux ?», Nicolas Guérin,directeur juridique d'Orange, a souli-gné dans la seconde table ronde que«le TT ouvrira le marché américainaux entreprises françaises» mais sepréoccupe de la différence de tailleentre les entreprises : «les françaises

contre Google, par exemple, com-ment faire ?». Bertrand Mabille, président de la Task Force sur leTraité de la Chambre de commerceaméricaine en France a insisté sur lefait qu'«il ne peut y avoir que desgagnants» mais que le Traité «per-mettra un accès élargi aux marchéspublics, notamment pour les PME».Un point de vue partagé par FrançoisGeorges, délégué général d'ICCFrance : «les entreprises européen-nes ont tout à gagner dans ce traité»,notamment les PME qui pourrontaccéder plus facilement au marchéaméricain. Enfin, sur la question desavoir si le Traité va trop loin en pré-voyant un mécanisme de règlementdes différends entre investisseurs etEtats (l’ISDS), Thomas Baudesson,associé du cabinet Clifford Chance, arappelé que «les mécanismes derèglement des litiges existent depuiscinquante ans et personne ne s'enest plaint». Alors faut-il craindre de voir le pouletlavé à la javel faire irruption dans nosassiettes ou l'interdiction françaisedes OGM annulée par une cour arbitrale américaine ? Nous devonsêtre à la fois vigilants pour préservernotre mode de vie et pro-actifs pourbénéficier pleinement des opportuni-tés offertes par le TT tout en posantles fondations à partir desquellesnous négocierons demain avec laChine, le prochain grand enjeu de la négociation commerciale interna-tionale.

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Le TT en chiffres.

800 millions de consommateurs3 300 entreprises européennes présentes

aux États-Unis via 24 000 filiales14 000 entreprises américaines dans l'UnionEuropéenne via 50 500 filialesUn surcroît de croissance attendu de 120 milliardsd'euros (0,4 % de PIB) dans l'UE, de 95 milliardsd'euros (0,5 % de PIB) aux États-Unis.

ÉVÉNEMENT

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