Sur les strotypes sexistes: articles du MondeQuel fminisme aujourd'hui ? - Egalit professionnelle, sociale ou parentale : la sociologue Dominique Mda et l'crivaine Joy Sorman dbattent de la nouvelle politique des sexes

L'mancipation des femmes passera par celle des hommes appels se dbarrasser de leurs strotypes et refuser les assignations de genre

Article paru dans l'dition du 16.07.11

ans le cadre du Festival d'Avignon, se joue, jusqu'au 26 juillet, une pice d'August Strindberg, Mademoiselle Julie , mise en scne par Frdric Fisbach. Cette oeuvre, qui reprsente une femme - Julie - aux prises avec les conventions de l'poque et son dsir pour Jean, le valet de son pre, se prte-t-elle une lecture fministe ?Dominique Mda : Le texte de Strindberg est porteur d'un message trs dur envers l'mancipation fminine : toute femme leve selon des principes galitaristes est voue la folie et la mort. Pour Strindberg, les femmes doivent s'en tenir leur fonction de maternit. L'mancipation fminine a pour consquences la confusion des genres et le dsordre social.

Joy Sorman : Cette pice traite certes de la guerre de sexes, mais aussi de la lutte des classes : d'un ct Mademoiselle Julie, l'aristocrate, de l'autre Jean, le proltaire. Le rapport entre hommes et femmes est ici dtermin par l'impossible rconciliation des classes sociales. Sur ce point aussi, l'actualit de la pice est frappante : les questions de genres et de classes n'ont pas fini de se croiser. Aujourd'hui, les femmes sont les proltaires de la socit.

Mais de Mademoiselle Julie aujourd'hui, le statut des femmes a pourtant bien chang dans la vie sociale comme dans la sphre artistique et littraire...D. M. Aprs la Rvolution franaise et les tentatives de permettre aux femmes l'accs l'espace public, le code Napolon a donn aux femmes le statut de mineures : l'incapacit juridique des femmes se traduit par le fait qu'elles passent, lorsqu'elles se marient, de la tutelle du pre celle du mari.

La premire guerre mondiale, o elles ont jou un rle fondamental, notamment en occupant des postes gnralement rservs aux hommes, a t suivie d'une longue priode de rgression dans l'entre-deux-guerres et sous Vichy.

La France sera l'un des derniers pays leur accorder le droit de vote, en 1945, et certaines dispositions du code Napolon ne seront abolies qu'en 1938. L'autorisation d'ouvrir et d'utiliser seules un compte en banque, l'autorisation de travailler sans l'accord de leur mari, la dpnalisation de l'avortement, la contraception : toutes ces mesures datent des annes 1960-1970...

Or ces droits, acquis de haute lutte, sont fragiles et toujours susceptibles d'tre remis en cause. Aujourd'hui, la situation des femmes n'est pas la hauteur de ce qu'elle devrait tre, notamment au vu de leur extraordinaire volution en matire d'ducation : les femmes font plus d'annes d'tudes que les hommes et russissent mieux tous les niveaux du cursus scolaire. Pourtant, leur situation dans le monde du travail ne reflte pas ces changements.

J. S. Depuis Madame de Stal, George Sand, Colette et bien d'autres encore, les femmes investissent de plus en plus le champ littraire. L'histoire du fminisme est d'abord l'histoire de l'avnement des femmes la visibilit, de leur irruption sur la scne publique, et la littrature accompagne ce mouvement. Devenir crivaine, c'est publier, c'est--dire se rendre publique, c'est accder un espace longtemps interdit aux femmes, cratures fragiles traditionnellement destines rdiger des lettres d'amour mlancoliques dans l'intimit de leur boudoir.

Aujourd'hui, sur les tables des librairies on trouve une littrature fminine , hrite de cette image d'Epinal qui cantonne la femme l'intriorit, la sentimentalit, l'intimit - sujets qui donnent aussi lieu de magnifiques textes.

Mais ce qui a chang, c'est que de nouvelles figures fminines romanesques ont merg, portes, par exemple, en France par des auteures comme Virginie Despentes, qui s'inscrit dans une esthtique punk et cre des personnages fminins rebours des canons de la littrature : des hrones qui boivent, se frottent tous les excs, revendiquent leur violence, se battent et refusent de se conformer aux strotypes fminins. Aujourd'hui Madame Bovary peut tre punk !

Quand on voit des femmes comme Laurence Parisot, Martine Aubry ou Christine Lagarde occuper de hautes fonctions, on pourrait penser que l'galit est acquise. Y aurait-il un dcalage entre l'affichage politico-mdiatique et la ralit ?D. M. Jusque dans les annes 1990, il y a eu en effet un mouvement de rduction des ingalits salariales et une amlioration de la position des femmes dans l'emploi.

Cette dynamique s'est enraye pour des raisons conjoncturelles : le taux de chmage tait alors extrmement haut et on a encourag le travail temps partiel et le retrait d'une partie des femmes du march du travail avec l'ouverture de l'allocation parentale au deuxime enfant.

Mais aussi pour des raisons structurelles : tout se passe comme si on avait t au bout du bricolage et qu'il fallait vraiment maintenant reprendre les choses de fond en comble.

Car la socit ne s'est pas adapte cette vritable rvolution qu'a constitue, partir des annes 1960, l'arrive massive des femmes dans le salariat.

Il aurait fallu tout repenser ds lors que ces rservoirs de temps qu'taient les femmes devenaient plus rares. Il aurait fallu dbattre, renouveler les politiques publiques, dvelopper des modes d'accueil des jeunes enfants, en qualit et quantit, revoir radicalement l'organisation du temps de travail (raccourcir la norme de travail temps complet), impliquer les pres dans la vie familiale...

Comme tout cela s'est fait sans dbat, les femmes sont rentres dans ce monde du travail-l et c'est sur elles que s'est fait l'ajustement : l'arrive d'un enfant continue de constituer un trs fort choc sur l'activit fminine, pas du tout sur l'activit masculine.

La France est trs fire de son taux de natalit, mais ce que certains considrent comme un bienfait public est support par les seules femmes en termes de qualit de l'emploi. Et on ne demande qu' elles qui va garder les enfants...

Pour librer les femmes, il conviendrait, selon vous, de librer les hommes d'un modle viril et patriarcal tout aussi sclrosant. L'horizon serait-il celui d'une double mancipation identitaire ?J. S. Nous sommes arrives un moment historique dcisif : le combat fministe n'est plus un combat des femmes contre les hommes ou des domins contre les dominants, mais un combat pour unir nos forces contre cet ennemi commun, les assignations de genre.

Face cette dconstruction de la fminit, certains hommes commencent s'interroger sur leur propre virilit et sur la ncessit de dconstruire et d'interroger galement la masculinit. Si les femmes ne sont pas naturellement voues confectionner des tartes aux pommes, alors les hommes ne sont pas naturellement vous faire la guerre.

De plus en plus d'hommes refusent d'tre assigns cette virilit fictive et autoritaire. Le contexte conomique des annes 2000 n'est plus celui du golden boy des annes 1980. La crise conomique aura peut-tre au moins eu cette vertu de mettre mal le modle unique de l'homme fort, ambitieux et arrogant.

Les femmes doivent aider les hommes se librer de ces injonctions d'abord parce qu'elles ont tout y gagner : ainsi, un homme qui prfre tre pre au foyer et a la possibilit d'assumer cette prfrence permettra, de fait, la mre de ne pas sacrifier sa carrire professionnelle et d'oeuvrer pour l'galit des salaires et des responsabilits. C'est mcanique.

Il ne s'agit pas tant de se dbarrasser des strotypes que de les faire jouer. De ce point de vue, la vie amoureuse, sentimentale et sexuelle, est une question politique. La question du dsir dans un couple et la faon dont il se structure est politique parce que les enjeux de dsir sont aussi des enjeux de pouvoir.

D. M. D'aprs toutes les enqutes, les activits familiales et domestiques sont trs mal rparties et contribuent arrimer les femmes leur foyer. C'est donc bien sur les hommes qu'il faut jouer. Prendre au srieux cette ide consisterait dspcialiser les rles, faire en sorte que les femmes puissent accder tous les mtiers et tous les emplois et cessent d'tre masses dans des emplois dits non qualifis et mal pays et trop souvent temps partiel subi.

Cela passe videmment par un dbat de socit et sans doute par une reconstruction des normes de genre : les hommes doivent pouvoir s'occuper des enfants autant que les femmes, les femmes doivent pouvoir exercer tous les mtiers et accder tous les postes.

Cela n'ira pas sans rsistances de la part de certains hommes et de certaines femmes et sans une rflexion de fond, plus engage outre-Atlantique qu'en France - je pense notamment la philosophe Judith Butler - sur la force des normes qui s'exercent sur nous, ds le plus jeune ge, pour devenir un homme ou une femme.

L'affaire Strauss-Kahn, quelle que soit son issue, a-t-elle permis de faire avancer la cause des femmes ?J. S. On a en effet pu entendre des voix fministes s'lever et c'est une bonne nouvelle. Mais cela m'inspire aussi une forme de regret : pourquoi ne les entendons-nous pas autant pour soutenir les caissires de Lidl qui tiennent le piquet de grve tous les dimanches depuis trois ans devant leur supermarch ?

Pourquoi les fministes ne rejoignent-elles pas ces manifestantes alors qu'on sait que la quasi-totalit des emplois prcaires et temps partiel en France sont occups par des femmes ? Sur cette question du travail, fministes et syndicats devraient unir leurs forces.

J'aimerais qu'on ragisse avec autant de ferveur pour soutenir ces femmes qui mettent en lumire la prcarit fminine. Il faut se mfier de la valeur ajoute mdiatique des combats.

D. M. Cette affaire a mis en lumire la vigueur du fminisme franais, la diversit et le renouvellement de ses leaders (en particulier la forte prsence des jeunes gnrations) mais aussi de ses combats et de ses modes d'action. Elle a permis de mettre le projecteur sur des sujets et des associations qui font un travail trs important, habituellement trop peu relay par les mdias.

L'association La Barbe existe depuis 2008, Osez le fminisme depuis 2009, le Laboratoire de l'galit depuis 2010, et on ne les avait pas entendues sur les grands mdias jusqu' prsent !

La Barbe dnonce la prsence exclusivement masculine dans de nombreux lieux de pouvoir et de dbat ; Osez le fminisme aborde des sujets qui vont de l'galit professionnelle aux violences faites aux femmes ; le Laboratoire de l'galit, auquel je participe, attire l'attention sur l'galit professionnelle et est intervenu sur tous les sujets susceptibles d'avoir une influence sur cette question : rforme des retraites, cong parental, temps partiel, service public de la petite enfance, rythmes scolaires... Ces mouvements s'occupent des vrais sujets et ne font pas que ragir des coups mdiatiques comme l'affaire Strauss-Kahn.

Le Laboratoire de l'galit a soumis aux candidats l'lection prsidentielle de 2012 une charte de l'galit. Quelles en sont les mesures concrtes ?D. M. Le Laboratoire de l'galit dfend l'ide que seule une politique systmatique qui se dploie sur le long terme et dans plusieurs domaines la fois sera efficace. En 2006, Jacques Chirac s'tait engag ce que l'galit salariale soit ralise en 2010. On attend toujours... La dernire loi sur les retraites a intgr un article imposant une sanction financire aux entreprises qui n'auraient pas sign d'accord ou de plan d'action concernant l'galit salariale. Mais les dcrets d'application seront probablement moins stricts.

Depuis vingt ans, les lois ne sont pas appliques, ou leurs dcrets d'application les vident de leur substance. Le Laboratoire propose la suppression des financements des partis politiques qui ne prsentent pas 50 % de femmes aux lections, la cration sur cinq ans de 500 000 places d'accueil pour les jeunes enfants, la pnalisation du temps partiel subi, le dveloppement de mesures permettant d'impliquer les pres dans la vie familiale, comme un cong paternit obligatoire, et une campagne nationale contre les strotypes.

J. S. Je suis en phase avec la radicalit et le volontarisme de ces propositions. L'avenir du fminisme passe par les hommes, mais surtout par la mixit : s'il faut de la parit l'Assemble nationale, il en faut aussi dans les mouvements fministes.

La France est gouverne par une meute de vieux mles blancs htrosexuels. Et je constate que les dputs veulent bien s'intresser au fminisme et dfendre les droits des femmes, mais dans certains cas bien prcis et pour des motifs douteux, par exemple lors du dbat sur la burqa, quand il s'agit de dmontrer qu'eux, hommes blancs occidentaux, savent bien traiter leurs femmes, alors que les hommes arabes ne savent que les asservir. Bref, quand il s'agit de se donner le beau rle.

L'affaire Strauss-Kahn a fait apparatre un dbat au sein mme du fminisme. Y aurait-il un fminisme la franaise, qui permettrait l'asymtrie entre les genres et le jeu de la sduction, et un fminisme outre-Atlantique, qui voudrait dconstruire le genre au point de neutraliser la sduction, l'altrit et l'amour entre hommes et femmes ?D. M. Les mouvements fministes sont trs divers en France et je ne suis pas sre que le fminisme la franaise existe. La principale question qui se pose mes yeux aux fministes aujourd'hui est de savoir comment viter qu'au nom de l'galit et de la russite des femmes on ne pousse tous les membres de nos socits devenir exclusivement des travailleurs et des producteurs, oublieux du fait que d'autres activits existent, galement trs importantes, comme les activits de care, de soins ?

Comment faire pour promouvoir un modle deux apporteurs de revenus et deux apporteurs de soins dans lequel hommes et femmes accderaient la gamme diversifie des activits humaines : productives, politiques, amoureuses, familiales, au-del d'une spcialisation anachronique ? Comment viter que la mise au travail des femmes ne se transforme en seul instrument au service du capitalisme ?

J. S. On parle beaucoup de sduction htrosexuelle mais il y a une sduction homosexuelle ! Rduire l'altrit la diffrence sexuelle me semble donc une fausse piste. La sduction implique du jeu : jeu au sens de jouer un rle, mais aussi au sens de marge de manoeuvre.

Il ne s'agit videmment pas de rglementer ce qui se passe dans les chambres coucher, mais d'avoir une forme de distance et d'ironie vis--vis de son propre genre, pour ddramatiser aussi, ne pas trop prendre au srieux le fait d'tre une femme ou un homme. C'est l que la sduction peut tre galitaire, ou dmocratique , pour reprendre la formule du sociologue Eric Fassin ; c'est une sduction qui respecte l'autre, qui l'entend.

Le vritable enjeu consiste rinvestir les archtypes et en jouer. Mon premier mouvement est un mouvement de rejet, qui m'amne refuser ce que je perois comme une assignation identitaire, mais dans un deuxime temps, je peux la rinvestir sur un mode ludique, libre, joyeux, conscient.

Faut-il changer le mot de fminisme pour inventer ce nouvel ge de l'mancipation ?D. M. La philosophe Genevive Fraisse rappelle que le mot fminisme a t utilis au dpart pour dsigner la maladie du jeune garon atteint de tuberculose et ne parvenant pas atteindre un stade de dveloppement normal... Le sens du mot a chang...

Je pense qu'il faut conserver ce mot, charg d'histoire, mais que nous devons parvenir une nouvelle fois, ensemble, hommes et femmes, lui donner une nouvelle signification, plus partage.

J. S. Il est en effet triste de constater que le mot fminisme sent dsormais la naphtaline ou qu'il est assimil un mot d'ordre agressif, alors que c'est la ralit impose aux femmes qui est agressive ! Il me semble pourtant que le fminisme est une cause populaire, qui s'adresse au plus grand nombre.

Des mouvements comme La Barbe ont su faire voluer l'image des fministes : ces collectifs tmoignent du renouveau du militantisme politique dans la jeune gnration. Un militantisme affranchi des fonctionnements sclrosants des vieux partis politiques.

Mme si je suis convaincue que l'avenir du fminisme tient la mixit, je reste attache ce terme, parce que, malheureusement, les femmes auront toujours besoin du fminisme, elles seront toujours l'objet d'une menace qui tient simplement leur infriorit physique : ce sont toujours les hommes qui violeront les femmes.

Mais par ailleurs, je suis aussi tente de me dbarrasser de ce mot qui renvoie au temps rvolu de la guerre des sexes et qui n'attire plus les foules. Demandons une bote de communication de nous trouver un nouveau mot ! Mais surtout, faisons en sorte que le fminisme soit si vident et naturel que le mot mme ne s'entendra plus.

Quel fminisme aujourd'hui ?

Article paru dans l'dition du 16.07.11

Egalit professionnelle, sociale ou parentale : la sociologue Dominique Mda et l'crivaine Joy Sorman dbattent de la nouvelle politique des sexes

i l'galit entre les hommes et les femmes reste un combat largement partag, les grandes proclamations et mme les nouvelles lgislations peinent faire changer les mentalits ou inscrire leur changement dans la ralit. Les faits, pourtant, sont la fois connus et ttus. Les femmes continuent de gagner 27 % de moins que les hommes, un tiers d'entre elles travaillent temps partiel, dont plus d'un million temps partiel subi. Les femmes n'accdent toujours pas aux postes de responsabilit dans la mme proportion que les hommes, et surtout pas dans les proportions qu'aurait d entraner leur niveau d'ducation.

Car les filles russissent mieux scolairement que les garons mais sont, surtout lors de la venue du premier enfant, bien souvent pnalises dans leur ascension. Les tudes, notamment de l'Institut national d'tudes dmographiques (INED), le dmontrent : les hommes rduisent vingt fois moins que les femmes leur activit la naissance d'un enfant. Selon la sociologue Dominique Mda, un coup d'arrt proccupant a ainsi bris la dynamique qui s'tait dveloppe des annes 1970 aux annes 1990.

La crise est passe par l et surtout la massive entre des femmes dans le salariat qui n'a t accompagne d'aucun vritable dbat, d'aucune mise plat de la division sexue des rles et des tches. L'galit de genre ne sera atteinte que lorsque les femmes et les hommes partageront les responsabilits professionnelles et familiales, explique-t-elle. Un peu l'image de l'Islande, qui a rcemment mis en place un cong parental dont un tiers est rserv la mre, un tiers au pre et un autre tiers partageable entre les deux. Car l'mancipation des femmes passera par celle des hommes, soutient l'crivaine Joy Sorman, invite dbattre avec Dominique Mda, le 10 juillet, au Thtre des ides , cycle de rencontres intellectuelles du Festival d'Avignon. La libration des dominants sera, selon elle, un puissant levier de l'mancipation des domines. Car un homme libr des strotypes de la virilit, des images d'Epinal de l'incarnation de l'autorit comme de nombreux rflexes sexus sera moins violent, plus respectueux des choix et dcisions de sa compagne, assure Joy Sorman.

Personne n'a oubli la fameuse assertion de Simone de Beauvoir : On ne nat pas femme, on le devient . Une phrase qui reste aujourd'hui d'une grande actualit. Car, sans vouloir en finir avec l'irrductible diffrence des sexes, les fminismes des annes 2010 rcusent les assignations identitaires et introduisent le trouble dans le genre. Dominique Mda et Joy Sorman insistent sur l'accablante persistance des assignations identitaires encore trs prsentes dans l'ducation, l'entreprise ou la famille. A quoi bon promulguer des lois pour la parit si l'on continue proposer aux petites filles de jouer exclusivement la poupe et d'offrir uniquement aux petits garons des camions de pompier ? , s'emporte Joy Sorman, alors que Dominique Mda propose de dconstruire notre vision et nos catgories d'interprtation androcentriques du monde. Ce dbat a lieu en plein coeur de l'affaire DSK qui, quelle qu'en soit l'issue, a, selon elle, mis en lumire la vigueur du fminisme franais, la diversit et le renouvellement de ses leaders (en particulier la forte prsence des jeunes gnrations) mais aussi de ses combats et de ses modes d'action .

Cette discussion a lieu galement un an avant l'lection prsidentielle. Et de rappeler qu'en 2006, Jacques Chirac s'tait engag ce que l'galit salariale soit ralise en 2010... Ainsi, pour Joy Sorman, la France n'est-elle gouverne que par une meute de vieux mles blancs htrosexuels . Mais les deux auteures refusent cependant de cder la rhtorique de la dploration. Et appellent une nouvelle alliance entre les sexes contre les prjugs et conventions. Car les hommes ont autant intrt que les femmes se librer des identits figes. Contre les assignations identitaires, un dbat pour aider entrer dans un nouvel ge de l'mancipation.

N. T.

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