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1 Histologie - Techniques . 1 . Chapitre 1 : Colorations de routine Image : Saphène, colorée à l’hématoxyline et éosine. Les saphènes sont des veines de la jambe qui peuvent être retirées soit pour éliminer des varices, soit pour remplacer une section d’artère coronaire lors d’un pontage.

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1 Histologie - Techniques

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Chapitre 1 :

Colorations de routine

Image : Saphène, colorée à l’hématoxyline et éosine. Les saphènes sont des veines de la jambe qui peuvent être retirées soit pour éliminer des varices, soit pour remplacer une section d’artère coronaire lors d’un pontage.

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Colorations de routine 1

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La coloration de routine

Une coloration de routine permet d’apprécier la structure d’un tissu. Elle permet de distinguer clairement les noyaux, le cytoplasme des cellules et les fibres, des points de repère importants et généralement suffisants, soit pour mieux situer les éléments mis en évidence par les colorations spéciales réalisées à partir du même spécimen, soit pour identifier des lésions affectant la morphologie du tissu. Les colorations de routine sont de plus conçues pour être simples et rapides à réaliser, et tout aussi aisées à lire. Bien que les colorations spéciales demeurent essentielles lorsqu’on soupçonne la présence de substances particulières, les colorations ci-dessous demeurent un incontournable en histologie.

Hématéine – Éosine (H&E) ��������

La coloration H&E offre un excellent équilibre entre la lisibilité, le coût et la rapidité d’exécution. De plus, elle se prête bien à l’usage sur coupes extemporanées. Pour ces raisons, elle est la coloration histologique la plus utilisée de par le monde. L’hématéine de Harris, une laque aluminique cationique, indirecte et utilisée de manière régressive, est un colorant nucléaire largement utilisé dans diverses colorations. Elle colore d’abord les noyaux en rouge, puis un virage par un passage dans une solution alcaline lui donne une coloration bleue. Il est important de ne pas exposer les coupes à l’acide après le virage, ou l’hématéine reprendra sa couleur rouge, qui aurait un faible contraste avec l’éosine de l’H&E. L’éosine a la propriété intéressante de colorer différemment les éléments tissulaires acidophiles selon leur densité. Ce seul colorant présente une palette de roses et de rouges qui, complétée par la coloration bleue des noyaux par l’hématéine, produit une image complète des éléments présents sur la coupe. Utilisée de manière régressive, l’éosine est différenciée par l’alcool, le même solvant qui entre dans sa composition. Il est donc très important d’effectuer rapidement la déshydratation, car un séjour trop long dans l’alcool donnerait une couleur trop pâle. Technique : 1) Déparaffinage et hydratation 2) Postmordançage et blanchiment (facultatif) 3) Eau distillée Bain de transfert 4) Hématéine de Harris Colorant nucléaire 5) Eau courante Rinçage 6) Eau acétique Différenciateur 7) Eau courante Arrêt de la différenciation 8) Carbonate de lithium (ou toute eau alcaline) Bleuissement (virage) 9) Eau courante Achèvement du bleuissement 10) Éthanol 70% Bain de transfert 11) Éosine Contrecoloration 12) Déshydratation rapide, éclaircissement, montage Résultats : Noyaux : bleus Globules rouges, colloïde, éosinophiles : rouge intense Muscle, cytoplasmes : rouge-rosé Fibres : rose

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Coupe de colon sigmoïde grêle à l’H&E L’épithélium simple prismatique bordant la muqueuse forme une ligne bien nette, avec les noyaux rassemblés au pôle basal des cellules. Les mucines des cellules caliciformes ne sont pas colorées et laissent des trous blancs ou pâles dans l’épithélium. La structure fibreuse du tissu conjonctif lâche, et une couche de cellules musculaires lisses, s’observent toutes deux en rose. Les vaisseaux sanguins contiennent des globules rouges vivement colorés. La sous-muqueuse contient du tissu lymphoïde riche en cellules dont les noyaux denses forment des plages foncées bien nettes. Il est facile de repérer les principales structures composant ce tissu, et donc de repérer toute anomalie, si elle est présente. Cette lame, toutefois, montre une section d’intestin parfaitement normale. Détail à noter, les cellules les plus exposées, hors des cryptes typiques de la muqueuse du colon, ont été endommagées par les manipulations précédant la circulation. En présence d’une biopsie de système digestif, on doit éviter de toucher la muqueuse autant que possible, pour éviter la desquamation de l’épithélium.

Tumeur cervicale à l’H&E L’épithélium stratifié pavimenteux ne borde pas la muqueuse comme il l’aurait dû, mais envahit le tissu sous-jacent. Les cellules malignes ont conservé certaines de leurs propriétés, on observe donc une structure stratifiée concentrique où les cellules finissent par se kératiniser et former ces amas rosés denses. Les infiltrations malignes sont bordées d’abondantes petites cellules au noyau foncé : des lymphocytes. Leur présence indique une réaction inflammatoire. La différenciation des cellules tumorales donne un indice sur la malignité d’une tumeur : les néoplasmes reproduisant les structures de leur tissu d’origine sont ordinairement moins agressifs que ceux qui ont perdu toute spécificité. L’apparence de cellules souches serait d’un très mauvais augure.

Embolie d’une artère rénale à l’H&E De nombreux tubules rénaux et un glomérule peuvent être observés, mais on remarquera surtout l’artère obstruée et les dommages ischémiques l’entourant. L’embolie provient d’une plaque d’athérome et contient de grands cristaux incolores de cholestérol. Le tissu rénal est engorgé de sang, et dans la zone privée d’oxygène, les cellules mortes, dont la forme est encore reconnaissable, montrent des signes d’autolyse; elles sont pâles et leur noyau n’est plus visible. On remarquera la texture ondulée de la paroi de l’artère. Ceci est normal et dû à sa grande richesse en fibres élastiques.

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Hématéine Phloxine Safran (HPS) ������������

Cette coloration trichrome est d’usage moins courant que l’H&E, principalement à cause de son coût. Le safran est en effet un colorant naturel dont la production est plutôt onéreuse. De plus, son exécution est relativement longue. Elle n’est pas pour autant sans avantages. En teintant le collagène d’une troisième couleur, on distingue d’un coup d’œil les fibres des cellules, ce qui facilite et accélère la lecture des lames. Il est à noter que pour cette raison, l’HPS est l’une des colorations employées pour la mise en évidence des fibres de collagène. Tout comme l’H&E, elle emploie l’hématéine de Harris pour colorer les noyaux. La couleur rouge des cytoplasmes sera assurée par la phloxine. Celle-ci est une solution aqueuse, qui diffuse rapidement dans les tissus, les colorant d’une manière directe et régressive. Elle ne colorera bien les éléments acidophiles du tissu que si l’alcalinité laissée par le bleuissement de l’hématéine est suffisamment neutralisée. Un bon rinçage est donc essentiel! La différenciation se fait à l’alcool, qui retire rapidement la phloxine des tissus moins denses et la prépare au transfert dans le milieu alcoolique qui sera nécessaire à la coloration par le safran. Ces bains doivent être changés très régulièrement, car toute contamination du safran par de l’eau diminuera son efficacité. Ce dernier est lui aussi direct et régressif, et il contribue à déplacer la phloxine demeurée dans le collagène. Étant une grosse molécule, le safran pénètre très peu dans les structures plus denses. Il est différencié et déshydraté par un mélange éthanol-méthanol, étant beaucoup trop soluble dans l’éthanol pur pour supporter les bains d’alcool de la déshydratation. Technique : 1) Déparaffinage et hydratation 2) Postmordançage et blanchiment (facultatif) 3) Eau distillée Bain de transfert 4) Hématéine de Harris Colorant nucléaire 5) Eau courante Rinçage 6) Eau acétique Différenciateur 7) Eau courante Arrêt de la différenciation 8) Carbonate de lithium (ou toute eau alcaline) Bleuissement (virage) 9) Eau courante Achèvement du bleuissement 10) Phloxine 1,5% Coloration des cellules 11) Éthanol 95% Rinçage 12) Éthanol 100% (X2) Bains de transfert 13) Safran alcoolique Coloration des fibres 14) Éthanol-Méthanol Rinçage 15) Déshydratation, éclaircissement, montage Résultats : Noyaux : bleus Globules rouges : mauve Muscle, cytoplasmes : rose Fibres de collagène : jaune Fibres élastiques : rose

Décoloration :

En cas de mauvais résultat, ou sur demande du pathologiste, une coloration de routine peut être décolorée et recolorée. La décoloration s’effectue à l’alcool acide en 30 minutes. Il est impossible de décolorer les colorations

spéciales comprenant une imprégnation ou une

réaction chimique.

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Peau à l’HPS L’hématéine-phloxine-safran fournit un contraste impressionnant entre les couches de la peau. De la surface vers la profondeur, on observe d’abord la couche de kératine rose vif, l’épiderme principalement composé de cellules, où les cytoplasmes rosés et les noyaux bleus forment une couche bien nette, dont la limite avec le derme ne laisse aucun doute. Cette peau contient peu de mélanine, mais si elle avait été plus foncée, ou en présence d’un naevus, des grains bruns ou noirs auraient été surtout concentrés dans et près de la couche basale, parfois au point d’en rendre l’observation difficile. Dans un tel cas, un blanchiment au peroxyde ou autre agent oxydant aurait été nécessaire pour s’assurer que l’épiderme est bel et bien normal. La couche papillaire du derme est constituée de tissu conjonctif lâche aréolaire, dont les fibres sont fines et les vaisseaux sanguins abondants. Sa limite avec l’épiderme montre la forme crénelée qui lui donne son nom, et celle avec la couche réticulaire du derme, moins évidente, se reconnaît par un accroissement de la taille des fibres alors que le tissu conjonctif devient dense non orienté. La peau étant un tissu robuste, la quantité de collagène qu’elle contient est impressionnante. Elle est parsemée de fibroblastes, difficiles à observer mais dont on voit çà et là les noyaux. Cette lame comprend une glande sudoripare, dont le canal unique traverse la coupe à de nombreuses reprises, à cause de sa forme contournée, et plus en profondeur, un muscle arrecteur dont le poil ne se trouve pas dans ce champ. Le tissu musculaire est d’un rose plutôt franc, impossible à confondre avec les fibres. Cela peut sembler surprenant, mais le muscle lisse est parfois très semblable au tissu conjonctif dense, aussi une coloration trichrome comme celle-ci peut éviter d’embarrassantes confusions. Le derme se poursuit plus loin sous la limite de cette image; dans sa couche la plus profonde, de nombreux adipocytes forment une couche graisseuse généralement encore plus épaisse que le reste de la peau.

Pancréas à l’HPS Une bonne visibilité du collagène est aussi utile pour les tissus qui en contiennent peu. Le stroma de ce pancréas aurait été difficile à observer sans cela. Le tissu cicatriciel étant formé de collagène, en trouver un amas important dans n’importe quel organe aurait indiqué une lésion ancienne.