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LE MAGAZINE DE L’UNIVERSITÉ STENDHAL - GRENOBLE 3 - N° 15 L'université Stendhal honore deux écrivains étrangers Hommage à l'écrivaine et cinéaste algérienne Assia Djebar Des fresques de Perceval, chevalier du roi Arthur en Dauphiné

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Magazine de l'université Stendhal-Grenoble 3.

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LE MAGAZINE DE L’UNIVERSITÉ STENDHAL - GRENOBLE 3 - N° 15

L'université Stendhal honore deux écrivains étrangers

Hommage à l'écrivaine et cinéaste algérienne Assia Djebar

Des fresques de Perceval, chevalier du roi Arthur en Dauphiné

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SommaireÉdito

AlphabetsLe magazine semestriel de l’université Stendhal - Grenoble 3 - N° 15 - Tirage : 6 000 exemplaires - Parution : octobre 2015.Dépôt légal à parution - ISSN : 1772-1873. Directrice de la publication : Lise Dumasy. Rédactrice en chef : Dominique Abry. Responsable éditoriale : Nadia Samba Robin. Ont collaboré à ce numéro : École doctorale, ELLUG, GRESEC, Litt & Arts, Maison de l'image, Présidence.Graphisme et mise en page : service communication / Camille Bartoli. Fabrication : Coquand Imprimeur.Crédits photos : © Bérangère Haëgy (p.4 et 5). © Creative Commons / Maverich003 (p.7). © Marion Ettlinger (p.3). © Freepik (p.3). © Gallimard / Catherine Hélie (p.3). © iStock (p.19). © Maison de l'image / Vivian Maier (p.19). © Reda Kerbouche / Wikimedia Commons (p.6). © Theys Patrimoine / P. Avavian (p.10), Denis Vedelago (p.11). © Thinstock (p.8).

Contact : Université Stendhal - Grenoble 3 - Service communicationBP 25 - 38040 Grenoble cedex 9 - France. Tél. : 04 76 82 43 49 - Courriel : [email protected]

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Aller vers l’autre

Au 1er janvier 2016, les trois universités grenobloises – Joseph Fourier, Pierre-Mendès-France et Stendhal – fusionnent pour créer l’université Grenoble Alpes. L’objectif visé est de construire une université de rang mondial, développant des synergies entre ses disciplines et renforçant la position et l’impact des sciences humaines et sociales.

Dans ce contexte, ce dernier numéro d’Alphabets réalise un panorama des actions menées par l’université Stendhal tant pour renouveler son offre de formation que pour orien-ter ses activités de recherche en fonction de ces nouvelles perspectives.

Porteuse de valeurs humanistes, dans le sens le plus actuel et le plus vivant du terme, l’université Stendhal a vocation à affirmer, aujourd’hui et demain, la conviction que les frontières, anciennes ou récentes, reconnues ou litigieuses, sont faites pour être traversées voire transcen-dées. La connaissance des langues, l’étude des cultures, la compréhension de l’altérité sont des clés qui permettent d’aller au-delà des clivages et des frontières vers l’enri-chissement qui naît de l’échange fécond. En témoignent les œuvres et les parcours de Siri Hustvedt, Akira Mizubayashi ou encore Assia Djebar, à l’honneur dans ce dernier numéro.

Usant de la littérature ou d’autres arts, ces figures connues ou d’autres plus anonymes, nous interrogent sur les effets de sens produits par le processus artistique et les imaginaires associés. Des fresques de Perceval datant du XIVe siècle aux photographies de Vivian Maier, l’image aussi est porteuse d’histoire, de sens et de questionne-ments sur nous-mêmes et sur les autres. Gageons qu’elle nous aide à les comprendre et aller vers eux.

Actualités

L'université Stendhal honore deux écrivains étrangers

Formation

Une offre de formation en arts, lettres et langues renouvelée

Recherche

Hommage à l'académicienne Assia Djebar, figure de proue de la littérature francophone

Une recherche diversifiée et tournée vers l'avenir

Thèses

Perspectives

Perceval au bois dormant : des fresques d'une valeur inestimable dans une bâtisse perdue en Isère

Livres

Coup d'œil

L’auto-portrait : réflexions sur la représentation de l’intime dans le cadre public

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Actualités

L’université Stendhal honore deux écrivains étrangers

Lorsqu’elle a créé en 2014 la Fondation Stendhal « Plurilin-guisme et Francophonie », l’université Stendhal souhaitait mettre en avant les spécificités de ses enseignements et de sa recherche, et notamment soutenir le rayonnement de la langue française à l’international.

L’écrivain japonais Akira Mizubayashi s’inscrit pleinement dans cette perspective : bien que n’appartenant pas à une aire géo-graphique francophone, il sert depuis plus de trente ans la cause de la langue française, qu’il appelle sa « langue paternelle » et enseigne à Tokyo depuis 1983. Il la célèbre également dans son essai Une langue venue d’ailleurs (Gallimard 2011), récit de son histoire d’amour avec une langue découverte dans son pays natal puis longuement cultivée dans la France des années 1970.

Pour lui, le français est « un instrument de musique », dont il joue avec virtuosité dans deux autres essais, Mélodie. Chronique d’une passion (2013) et Petit éloge de l’errance (2014). Fin connaisseur de la littérature française des XVIIIe et XIXe siècles, il a publié en japonais des ouvrages sur Jean-Jacques Rousseau et sur Voltaire. Son activité infatigable de chercheur et d’enseignant lui a valu de la part de l’Académie française le Prix du rayonnement de la langue et de la littéra-ture françaises.

Même si ses origines à la fois américaine et norvégienne la rattachent à la thématique du plurilinguisme, c’est dans un autre axe stratégique de l’université Stendhal que s’inscrit la romancière, poète et essayiste américaine Siri Hustvedt, celui de la création artistique et littéraire, tel qu’il s’exprime dans le projet de la Maison de la création, qui vise à coordonner les activités de recherche autour des pratiques et processus de

création pluridisciplinaire en arts, lettres, langues et sciences humaines et sociales. Siri Hustvedt est à ce jour l’auteur de six romans, d’un recueil de poésies et de quatre essais, ainsi que d’un « mémoire neurologique ».

De son premier roman The Blindfold (1992) au dernier en date The Blazing World (2014), elle explore dans sa fiction les mystères de l’identité (notamment féminine) et de la créa-tion, avec, dans ce dernier roman, un personnage d’artiste peintre aux multiples masques. Mais c’est dans ses essais qu’elle développe une pensée pluridisci-plinaire qui mêle les apports de la littérature, de la philosophie, de la psychologie, de la psychanalyse et des neurosciences. Le Gabarron International Award for Thought and Humanities (Prix de la fondation Gabarron pour la pensée et les humanités), qui lui a été décerné en 2012, a ainsi voulu récom-penser «  l’originalité de sa pensée et sa contribution à notre compréhension des beaux-arts ».

En honorant ces deux écrivains, l’uni-versité Stendhal affirme sa position comme fer de lance de l’université Grenoble Alpes dans le domaine de la francophonie, des langues et des recherches pluridisciplinaires sur la création artistique.

Avant son intégration dans l’université Grenoble Alpes, l’université Stendhal a tenu à réaffirmer fortement les valeurs humanistes qu’elle défend en décernant le doctorat Honoris Causa à deux personnalités étrangères, Siri Hustvedt et Akira Mizubayashi.

« La perception n’est jamais passive. Nous ne faisons pas que recevoir le monde ; nous en sommes aussi les créateurs actifs. » Un été sans les hommes

« La musique m'accompagnera toujours, me disais-je, tant que je ne sortirai pas de cette langue, tant que je ne cesserai pas de respirer dans cette langue et par cette langue. C'était là une certitude. Le français était un instrument de musique - et il l'est toujours - que j'essayais de faire chanter et résonner au gré de mes émotions quotidiennes. »

Une langue venue d'ailleurs

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Formation

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Une offre de formation en arts, lettres et langues renouvelée

Une offre de formation construite dans un nouveau cadre réglementaire nationalLa construction du projet de formation de l’établissement s’ins-crit dans la mise en conformité avec trois nouveaux textes : la loi ESR (Enseignement supérieur et recherche) du 22 juillet 2013, qui introduit notamment une obligation de coordination de l’offre de formation à l’échelle des sites universitaires (le site Grenoble Alpes en l’occurrence), une procédure d’accrédi-tation des formations ainsi qu’un nouveau cadre national pour celles-ci.Avec le passage de l’« habilitation des formations » à l’« accré-ditation » d’un établissement pour délivrer un ensemble de formations, la responsabilité propre de l’université Stendhal est désormais engagée sur une politique globale incluant des dispositifs et modalités d’appui généralisés à l’ensemble des formations de licence et master et mobilisant fortement des équipes pédagogiques pluridisciplinaires.C’est pour répondre à ces nouvelles exigences que la construc-tion de l’offre pour la période 2016-2020 a été conçue, au sein de l’université Stendhal, comme un processus global qui a impliqué l’ensemble des forces pédagogiques et qui s’est étalé sur plus de deux ans. Ainsi, ce chantier a été mené de façon transversale au sein de l’établissement, avec mise en commun régulière par niveau de formation, réflexion par mention de formation et coor-dination étroite avec les établissements du site, notamment avec les universités Joseph Fourier et Pierre-Mendès-France.

Une offre de formation construite pour la nouvelle université Grenoble AlpesLe lancement de l’offre de formation 2016-2020 coïncide avec la création de l’université Grenoble Alpes. Les premières cohortes d’étudiants inscrits à la rentrée 2016 (environ 45 000) bénéficieront d’une offre unifiée couvrant les grands domaines disciplinaires. Cette unification est facilitée par une absence de recouvrement des formations existantes au sein des trois universités grenobloises. Cela se concrétise déjà par l’adoption d’une cartographie générale de l’offre de formation du site Gre-noble Alpes, organisée autour de huit champs. Pour le domaine des sciences humaines et sociales, deux champs ressortent, en l’occurrence « Langues, littératures, culture, création » et « Sciences de l’homme, territoires, sociétés ».

L’ambition collective de l’université Grenoble Alpes, telle qu’elle a été pensée dans son projet stratégique, est entièrement tournée vers une meilleure visibilité et attractivité de l’offre de formation. Celle-ci se veut de haut niveau, ancrée dans ses atouts en matière de recherche, et déployée avec le souci d’une rénovation pédagogique permettant de favoriser les apprentis-sages et l’élaboration du projet personnel et professionnel de l’étudiant. L’augmentation de l’attractivité pour les étudiants internationaux, la généralisation des innovations pédagogiques, la réussite universitaire et l’insertion professionnelle sont les marqueurs essentiels de cette ambition.

L’année 2015 voit arriver à maturité le processus de construction de la nouvelle offre de formation du contrat quinquennal 2016-2020. Ce chantier, les équipes pédagogiques de l’université Stendhal l’ont mené dans un contexte particulier caractérisé par deux changements majeurs de paradigme et par une ambition pédagogique partagée.

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Une offre de formation attractive et pertinente pour le domaine « Arts - Lettres - Langues » Au-delà de la mise en conformité avec le cadre national et dans le respect des objectifs stratégiques de l’université Grenoble Alpes, les équipes pédagogiques de l’université Stendhal devaient répondre au défi de construire une offre sus-ceptible de contrer la désaffection générale des disciplines du domaine « Arts - Lettres - Langues » et d’inverser la tendance à la baisse des effectifs dans certaines disciplines.

L’offre de formation, élaborée autour des trois axes communs à la recherche et à la formation, favorise l’inter- et la pluridis-ciplinarité, l’architecture des mentions et des parcours étant globalement reconduite. • En licence, la spécialisation progressive est privilégiée à

travers la mise en place de « majeures - mineures » entre les différentes mentions et le renforcement de la préparation aux licences professionnelles.

• En master, les spécificités participant du lien formation - recherche - professionnalisation sont désormais mieux affichées notamment grâce à la création de deux nouvelles mentions, «  Création artistique » et « Didactique des lan-gues  » et l’autonomisation de certains parcours comme « Sciences de l’Antiquité », en collaboration avec les filières correspondantes de l’université Pierre-Mendès-France, et « Médiation langagière et culturelle Sourds-Entendants ».

En articulant orientation professionnelle et adossement recherche, cette offre doit permettre la construction fluide des projets professionnels et personnels de nos publics dans une perspective de formation tout au long de la vie et d’ouverture à l’international. Dans ce contexte, les formations sont dévelop-pées en lien avec les secteurs professionnels prioritaires pour nos disciplines : formation et enseignement ; culture, création, patrimoine ; humanités numériques ; édition, bibliothèques, documentation ; communication et médias ; traduction, négocia-tion et échanges internationaux.

La mise en œuvre de cette politique ambitieuse nécessite d’accorder une attention particulière aux approches péda-gogiques afin d’adapter les méthodes et les modalités d’enseignement au profil et aux besoins de nos publics. Ainsi, l’articulation formation -recherche - professionnalisation a vocation à se traduire dans la rénovation des enseignements eux-mêmes, en favorisant à la fois la formation à la recherche et par la recherche, en mettant les étudiants au cœur de leur apprentissage. Les formations pourront compter sur deux structures d'appui, la Maison de la création et de l'innovation ainsi que les ELLUG, structure propice au montage de projets tutorés pour la formation à l'édition numérique en particulier, et à la publication. Cela suppose de continuer à encourager et soutenir, à travers le service universitaire à la pédagogie, les projets des enseignants en matière de pédagogie innovante avec l'aide notamment du numérique.

Cette offre de formation attractive, répondant aux enjeux pédagogiques et professionnels actuels, que les équipes de l’université Stendhal se sont attachées à construire avec enthousiasme et engagement, pourra ainsi trouver toute sa place dans l’université Grenoble Alpes.

Formation

Lynne Franjié, vice-présidente en charge de la formation et de la vie universitaire

Et des nouveautés dès 2015

Pour cette dernière rentrée avant la fusion des universités grenobloises, l’université Stendhal propose quelques nou-veautés dans son offre de formation :

Deux nouveaux couples de langues en licence LLCERLa licence Langues, littératures et civilisations étrangères et régionales (LLCER) propose des parcours mono-langues et bi-langues.À partir de cette rentrée, les parcours bi-langues passent au nombre de 5 avec l’ouverture de deux nouveaux couples de langues : anglais – espagnol et anglais – italien. La licence LLCER prépare aux métiers de l’enseignement (professeur des écoles, professeur des lycées et collèges) et débouche également sur d’autres secteurs professionnels : traduction, interprétariat, culture, communication, fonction publique, documentation…

La licence professionnelle Écritures en ligne - Webmestre éditorial ouvre en contrat d’apprentissageL’université Stendhal poursuit le développement de ses formations accessibles en alternance. Après avoir ouvert, depuis 2010, 4 licences et masters en contrat de profes-sionnalisation, elle continue désormais sa progression du côté de l’apprentissage avec une troisième formation mise en place dans ce cadre. En effet la Région Rhône-Alpes via Forma-Sup, le centre de formation interprofessionnel des apprentis pour l’ensei-gnement supérieur, a délivré un avis favorable à l’ouverture en contrat d’apprentissage de la licence professionnelle Écritures en ligne - Webmestre éditorial qui débutera cette rentrée avec 6 alternants.

Un nouveau parcours international au sein de la mention de master Sciences du langage spécialité LinguistiqueEn 2e année de master, ce nouveau parcours accueillera des étudiants polonais de l’université de pédagogie de Cracovie et des étudiants de l’université Stendhal pour une formation centrée sur la linguistique française, contras-tive et appliquée. La moitié des cours est dispensée en présentiel à l’université de Cracovie, l’autre moitié est assurée à distance par l’université Stendhal. À l’issue de ce cursus, les étudiants obtiendront un double diplôme : le master de Linguistique romane appliquée de l’université de pédagogie de Cracovie et le master de Linguistique de l’université Stendhal.

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Recherche

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Hommage à l’académicienne Assia Djebar, figure de proue de la littérature francophone

Écrivaine et cinéaste algérienne, professeur d’université et membre de l’Académie française, Assia Djebar est décédée à Paris en février dernier. Ayant touché un public nombreux dans bien des pays du monde, son œuvre, aux accents parfois autobiographiques, est imprégnée des questions féministes, des rapports entre les langues et entre cultures, d’histoire. Auteur célèbre et influente, Assia Djebar reste un des phares de la littérature francophone.

Née en 1936 à Cherchell, dans une Algérie déchirée entre colonialisme et résistance d'un côté, entre modernisme et conservatisme de l'autre, Assia Djebar compte parmi les rares femmes de son époque à avoir bénéficié d'une éducation pous-sée. Elle a non seulement intégré tôt l'école française mais a surtout gravi tous les échelons pour finir élève à l'École normale supérieure de Sèvres en 1956. Cette réussite exceptionnelle pour une jeune fille destinée traditionnellement au voile et aux tâches ménagères, Assia Djebar la doit essentiellement à son père, « instituteur, homme de rupture et de modernité face au conformisme musulman » (2) . Il s'agit pour l'historienne qu'elle deviendra d'un « petit miracle » selon ses dires : en 1959, elle est recrutée à la faculté des lettres de Rabat en tant qu'ensei-gnante puis en 1962 à l'université d'Alger. Toutefois, ce « petit miracle » a un prix : l'intégration de l'école française est très souvent associée à une série de ruptures : Assia Djebar évoque régulièrement son éloignement précoce du monde féminin, de sa douceur, de son mystère et surtout de ses langages, en arabe et en berbère. Son parcours est d'emblée placée sous le signe des langues : l'adoption du fran-çais comme langue d’expression pour une nouvelle identité est vécue non seulement comme un exil mais aussi comme une déchirure : la langue – liée au projet colonial – incarne tout un imaginaire de supériorité exercée contre les cultures locales.

C'est donc par la littérature, le théâtre et le cinéma qu'Assia Djebar tente dans toute son œuvre de colmater les brèches en faisant dialoguer sa quête personnelle avec celle des femmes de son pays. Le roman est choisi comme la forme privilégiée pour reconstituer des mémoires en bribes, restituer des his-toires oubliées. La langue française, devenue la sienne, sert désormais de creuset où toutes les blessures s'expriment, se confrontent et se pansent entre elles.

Tout commence, il faut le rappeler, par un pseudonyme que l'on peut qualifier aisément de nom manifeste : Fatma Zohra Imalayane, – c’est là son vrai nom –, propose en 1957 à Julliard La Soif, un roman à l'allure autobiographique, sans indication générique explicite. Au moment de la signature du contrat,

son fiancé, Ahmed Ould-Ruis, un nationaliste vivant clandes-tinement, lui récite les quatre-vingt-dix-neuf noms de Dieu. Le choix s’est arrêté sur « Al-jabbar » signifiant « l'intransigeant » et qui donnera par contraction « Djebar ». Quant au prénom « Assia », il renvoie à toutes formes d'affection consolatrice. Ainsi, avec un nom si symbolique, Assia Djebar devient la voix intransigeante et réconfortante d'une femme écrivain qui a choisi de défendre la cause féminine en Algérie et de se battre contre les injustices liées à la colonisation, à la religion et aux traditions.

(1) Discours de l'Académie française, juin 2006. (2) Discours de Francfort, 2000

« "J’écris pour me parcourir" disait le poète Henri Michaux. J’ai adopté, en silence, cette devise... » (1)

Dans la presse française, l'œuvre est annoncée fièrement comme le premier roman d’une « jeune musulmane » : l’adjectif désignait autrefois en Algérie tous ceux qui n’étaient pas de souche européenne. L'accueil très favorable insiste sur la réussite du système scolaire français, un système capable d'assimiler des femmes « indigènes » et de les promouvoir. En revanche, du côté algérien, le roman a été tout de suite qua-lifié de « produit d'acculturation » servant, bon gré mal gré, la propagande coloniale. La Soif raconte l’histoire une héroïne occidentalisée, insouciante, déchirée entre deux cultures et vivant en marge de la guerre qui sévit dans le pays. En France, Assia Djebar est comparée à Françoise Sagan. La réponse de l'écrivaine est tout autre : l'occidentalisation de l'héroïne doit être lue plutôt comme une parodie. Plus important encore pour elle, il s'agit d'un roman sur le mouvement et le déplacement d'un corps féminin assoiffé de liberté et qui revendique sa place dans le monde. Le roman relate d'abord et avant tout la découverte d'un espace public longtemps interdit aux femmes. Malgré les critiques, La Soif est traduit très vite en anglais, en portugais, en allemand et en néerlandais. Dans la plupart des romans qui vont suivre, le fil d'Ariane est le même. En effet, ce qui réunit Les Impatients (Julliard, 1958),

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Recherche

Ridha Boulaâbi, maître de conférences spécialiste des littératures francophones

Les Enfants du Nouveau monde (Julliard, 1962) et Les Alouettes naïves (Julliard, 1967), c'est une même confrontation avec les langues, avec les cultures, oscillant entre fascination et atta-chement, résistance et refus.

Assia Djebar a été élevée dans la foi musulmane, bercée par le chant de l'arabe coranique, tout en bravant les contraintes et les interdits. L'arabe constitue pour elle la langue de l'affect, des émotions, le français, acquis dans un contexte colonial, devient la langue de la distance critique et de la discussion. La langue berbère, quant à elle, renvoie à l'enracinement et au refus : le berbère est associé en Algérie à la résistance contre toutes les formes de soumission, qu'elles soient romaine, arabe, turque ou française. En conflit permanent avec l'arabe (et le français pendant la période coloniale), le berbère se définit pour l'écri-vaine comme la langue du « non ». Djebar retient non seulement le rythme et la scansion d'un idiome non reconnu officiellement, mais surtout toute l'histoire des Berbères encore vivante dans les récits oraux, longtemps méprisés par les civilisations de l'écrit. Ces racines multiples ont fait l'objet d'un long dévelop-pement dans ses différents discours notamment son discours de réception à l'Académie française en 2006.

Les années soixante-dix sont marquées par le silence et par une absence éditoriale. Assia Djebar quitte Paris pour arpen-ter l'Algérie à la quête d'une parole vivante, fragile et vouée à l'oubli. Elle s'est fixée comme but d'archiver ce patrimoine et de le sauvegarder par l'art : par la littérature d'abord mais aussi par le cinéma. En effet, en 1978, elle présente à Carthage La Nouba des Femmes du Mont Chenoua, un long-métrage de deux heures fortement critiqué par les milieux cinéphiles d'Alger. En 1979, à la Biennale de Venise, il obtient le Prix de la critique internationale. Assia Djebar poursuit malgré tout son activité cinématographique avec un documentaire La Zerda ou les Chants de l’oubli présenté en 1982 par la télévision algé-rienne. Ce film obtient l’année suivante le Prix du meilleur film historique à Berlin.

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Lors de la remise du Prix de la paix en 2000 à Francfort, Assia Djebar revient sur cette œuvre en ces termes : « J’écrivis donc Loin de Médine pour me rapprocher de ce “vieux temps remis debout”, mais aussi des passions, de la parole libre et multiple des femmes de Médine, humbles ou connues, mais transmet-trices et actrices de cette histoire islamique ».

Quatre ans plus tard, sort en 1995 Vaste est la prison. Le roman s'inspire en grande partie de l'histoire de sa mère voyageant pour la première fois à la recherche de son fils emprisonné. Entre-temps, l'écrivaine recueille les récits de peur et d'horreur vécus par de nombreux Algériens exilés, des récits qui donne-ront, en 1997, Oran, langue morte chez Actes Sud. La même année, elle publie Les Nuits de Strasbourg, suivi de Ces voix qui m'assiègent en 1999, puis La Femme sans sépulture en 2002. En parallèle, Assia Djebar accepte un poste à la New York University en 2001, après un passage par la Louisiana State University, dès 1995.

Pendant ce temps elle écrit aussi une thèse qu’elle soutient en 1999 à l'université Paul-Valéry Montpellier 3 consacrée à son oeuvre et intitulée « Le roman maghrébin francophone entre les langues et les cultures : quarante ans d’un parcours - Assia Djebar 1957-1997 ».

En 2005, Assia Djebar est élue à l'Académie française. Succédant à Georges Vedel, c’est la cinquième femme à y être admise. Son élection, peu appréciée en Algérie, témoigne de la reconnaissance d'une œuvre féminine francophone exception-nelle par sa variété et sa richesse, une œuvre qui s'interrompt brutalement en 2007 avec la publication de Nulle part dans la maison de mon père qui paraît chez Fayard… Il lui faut attendre 2014 pour qu’il soit publié en arabe.

Le 6 février 2015, Assia Djebar s'éteint à Paris à 78 ans. L'Algérie lui a rendu hommage lors de ses funérailles qui se sont déroulées le 13 février, juste avant son inhumation dans son village natal. Le 20 mai, l'université Stendhal - Grenoble 3 lui a également rendu hommage sous la forme d'une journée d'étude.

La publication de Femmes d’Alger dans leur appartement aux Éditions des femmes en 1980 annonce le retour d'Assia Djebar sur la scène littéraire parisienne. Ce retour à la littérature se confirme avec la sortie de L'Amour la Fantasia en 1985 et Ombre sultane en 1987, des œuvres qui mêlent à la fois l'intime et le collectif, la dimension autobiographique étant de plus en plus assumée.Néanmoins, le début de la guerre civile en Algérie dans les années quatre-vingt-dix marque un tournant dans l'écriture de Djebar : c'est alors en historienne qu'elle revisite les temps premiers de l'islam non seulement pour dénoncer l'instru-mentalisation de la religion par une idéologie barbare mais aussi pour exhumer des ténèbres un islam féminin que l'histoire officielle n'a pas retenu. Cet engagement se donne à lire dans Loin de Médine publié en 1991 chez Albin Michel.

« La langue française, la vôtre, […] devenue la mienne, tout au moins en écriture, le français donc est lieu de creusement de mon travail, espace de ma méditation ou de ma rêverie, cible de mon utopie peut-être, je dirai même ; tempo de ma respiration, au jour le jour. »

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Recherche

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Une recherche diversifiée et tournée vers l’avenir

En matière de recherche, l’université Stendhal conjugue approches éprouvées et innovantes dans une dynamique d’ouverture et de créativité. En son sein, les unités de recherche, l’École doctorale et les éditions ELLUG ont développé des liens étroits et mobilisent leurs énergies autour de trois axes scientifiques majeurs : « création, arts, cultures », « langues, langage, sociétés », « apprentissage, médiation, technologie ».

L’établissement de corpus (linguistiques, littéraires, information-nels) et d’éditions critiques multi-supports restent des pratiques privilégiées, dans la continuité du quinquennat précédent. Quant aux études cinématographiques, théâtrales et d’intermédialité, elles trouvent une nouvelle dynamique par la mise en commun des projets menés par nos chercheurs.

Les unités de recherche participent aussi à l'insertion de l’usage de technologies innovantes adaptées aux disciplines des humanités. Ainsi, l’université développe sa participation aux réseaux documentaires, par exemple avec « Fonte Gaia », consortium européen pour une bibliothèque numérique en études italiennes, dont Grenoble est un pôle moteur. Rassemblant entre trente et soixante-dix membres, ces unités de recherche développent des projets en partenariat avec les collectivités, institutions culturelles, acteurs économiques, réseaux et sociétés savantes, structures spécifiques comme l’Agence universitaire de la francophonie, ou encore la Chaire UNESCO. La Fondation Stendhal Plurilinguisme et Franco-phonie, créée en juin 2014, soutiendra ces projets par le biais d’appels au mécénat.

L’activité d’ensemble sera fédérée au sein du pôle de recherche « Arts, lettres, langues, sciences humaines, cognitives et sociales », formalisant sur le site des échanges pluri- et inter-disciplinaires entre humanités, sciences humaines, sociales et expérimentales au sein de trois axes internes : « Cogni-tion humaine et sociale, études des langues et du langage », « Espaces sociaux et culturels : mémoire, histoire, écritures », « Création, cultures, imaginaires. » Certaines équipes internes aux unités auront également une forte implication dans le pôle « Sciences juridiques, politiques, économiques et du territoire, sociologie, gestion ». Une concertation suivie se développera avec les organismes de recherche, en particulier le CNRS.

Les interactions entre les thématiques spécifiques de la recherche et les champs de formation de l’université seront systématiquement soutenues afin de promouvoir l’innovation interdisciplinaire en master et doctorat en lien avec la Maison de la création et de l’innovation, qui sera construite en 2017. Cet espace sera fédérateur de nouvelles dynamiques associant les recherches et les formations consacrées à l’histoire, aux formes contemporaines et à l’inscription sociale de la création dans toutes ses potentialités innovantes (artistique, scienti-fique, sociale, technologique voire économique et industrielle). La Maison de la création et de l’innovation mettra à disposi-tion des étudiants et des professionnels, des chercheurs et des artistes invités, plusieurs espaces adaptés à l’expérimentation créative. Elle permettra une mise en cohérence des équipements culturels sur le campus, notamment la salle de spectacles qu’est l’Amphidice et l’Espace scénique transdiciplinaire.

Les ELLUG, dont les publications scientifiques de grande qualité sont issues à plus de 80 % d’apports scientifiques externes, joue-ront un rôle moteur au sein du nouveau Pôle éditorial. Celui-ci va rassembler toutes les éditions universitaires de la région Rhône-Alpes et sera reconnu par l’excellence scientifique de ses publications, son professionnalisme dans le paysage édi-torial français et international, grâce à sa couverture d’un large champ de disciplines.

Enfin, une plus grande visibilité aux résultats de la recherche sera donnée grâce à une gestion informatisée des publications : référencement bibliographique, mise en ligne d’articles sur la plateforme d’archives ouvertes HAL, données structurées en collections complètes sur les sites internet.

Daniel Lançon, vice-président en charge de la recherche

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Thèses

Lettres et arts du spectacleLe tout et l'infini dans le "De rerum natura" de LucrèceAlexandra Morenval, sous la direction de Sabine LucianiRARE, 07/05/2015

Le chant de la violence collective. Étude de l'imaginaire persécuteur dans les versions françaises de la Chanson de RolandMathieu Dijoux, sous la direction de Philippe WalterLitt & Arts, 04/06/2015

Monstres et monstrueux dans l'œuvre d'Alexandre VialatteAnne-Laure Milcent, sous la direction de Pierre Jourde-RougholLitt & Arts, 16/06/2015

La voix-son des personnages à l'aube de la communication de masse : l'exemple des romans de Hugo et de Dickens, et des opéras de Giuseppe VerdiSonia Arienta, sous la direction de Lise DumasyLitt & Arts, 01/07/2015

L'œuvre d'art comme outil de lecture de la sociologie. Relire Goffman à partir de quelques pièces de Pina BauschCécile Léonardi, sous la co-direction de Florent GaudezLitt & Arts, 10/09/2015

Pour une "dé-scription" des sens : l’œuvre de Jean-Marie Gustave Le ClézioJustine Feyereisen, sous la direction de Claude CavalleroLLS, 11/09/2015

Les figures de l'altérité dans le théâtre de Tayeb SeddikiYounès Hamidache, sous la direction de Luc BoucrisLitt & Arts, 02/10/2015

La « Religion civile » chez Rousseau comme art de  faire penserYoshiho Iida, sous la direction d’Yves CittonLitt & Arts, 09/10/2015

Sciences du langage et FLEÉtude contrastive de la prosodie audio-visuelle des affects sociaux en chinois mandarin vs. français : vers une applica-tion pour l'apprentissage de la langue étrangère ou secondeYan Lu, sous la direction de Didier DemolinGIPSA-Lab, 22/01/2015

Construire la compétence lexicale : quelle place en didac-tique pour le co-texte ?Anne Sardier, sous la direction de Francis GrossmannLIDILEM, 03/07/2015

Langues étrangèresIdentités et stratégies politiques du PCI et du PCF : une comparaison entre le Triangolo Industriale en Italie et la région industrielle de Rhône – Alpes en FranceCécilia Bergaglio, sous la direction de Christian Del VentoGERCI, 30/03/2015

Le  théâtre en ses dehors. La poétique des  intercesseurs dans l'oeuvre de José Sanchis SinisterraLaurent Gallardo, sous la direction de Georges TyrasILCEA4, 19/06/2014

La  conquête  scientifique  du Nouveau-Mexique  :  héritage local du projet Manhattan 1942-2015Lucie Genay, sous la direction de Susanne Berthier-FolgarILCEA4, 18/09/2015

CommunicationL'information-communication au LibanAli El Takach, sous la direction d’Isabelle PailliartGRESEC, 27/02/2015

La presse iranienne depuis la révolution islamiqueLes deux âges d'or 1978-1979 et 1997-1998Nahid Pilvar, sous la direction de Philippe BouquillonGRESEC, 09/03/2015

Communication, territoires et environnement : le cas du parc national des CalanquesFerielle Podgorski, sous la direction d’Isabelle PailliartGRESEC, 27/03/2015

Femme, mulâtre et migrante : les modalités représenta-tives d’une triple altérité dans les journaux de l’EuropeDanubia De Andrade Fernandes, sous la direction de Bertrand CabedocheGRESEC, 28/04/2015

La pénétration du marché de l’information médiatique français  par Al  Jazzera  :  d’un  soft  power  régional  à  une stratégie globale du Qatar ? L’exemple de la couverture des élections présidentielles françaises de 2007Karima Amri, sous la direction de Bertrand CabedocheGRESEC, 18/06/2015

Communication publique. Ancrage des technologies de l’information et de la communication dans une organisation. Le cas de l'administration tunisienneSameh Ben Jeddou, sous la direction de Fabienne Martin-JuchatGRESEC, 07/09/2015

Enjeux communicationnels et injonctions à la créativité dans des dispositifs participatifsCaroline Didier, sous la direction d’Isabelle PailliartGRESEC, 30/09/2015

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Habilitation à diriger des recherches

Didactique des langues et éducation plurilingue et interculturelle : l'approche plurielleDiana-Lee Simon28/05/2015

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Perspectives

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Perceval au bois dormant : des fresques inestimables dans une bâtisse perdue en Isère

Petit village au cœur de la chaîne de montagne Belledonne, non loin de Grenoble, Theys abrite un trésor resté longtemps méconnu : des peintures de Perceval, chevalier du roi Arthur, sur les murs d’une bâtisse inhabitée, à l’abandon au milieu des bois. Si cette œuvre fut redécouverte par le Centre d’archéologie du département de l’Isère, l’identification du personnage et des scènes historiées fut réalisée par un spécialiste de l’époque médiévale, Philippe Walter. Aujourd’hui professeur émérite à l’université Stendhal, il évoque cette rencontre fortuite avec ce personnage mythique longtemps au cœur de ses recherches et nous donne ainsi l’occasion de réfléchir à la problématique de la valorisation du patrimoine culturel.

Les Tarins, habitants de Theys, connaissaient l’existence des peintures du Châtel, cette mystérieuse bâtisse au fond des bois où jouent parfois leurs enfants, mais nul parmi eux ne se doutait de la valeur et du caractère exceptionnel de ces décors orne-mentaux aux couleurs vives. Il fallait un œil d’expert pour déceler qu’il s’agissait de l’histoire de Perceval le Gallois, figure centrale du roman de chevalerie Le Conte du Graal de Chrétien de Troyes.

Grâce au travail de Philippe Walter, du Centre d’archéologie du département de l’Isère et de la commune de Theys, le Châtel est aujourd’hui classé monument historique. Ainsi, les premiers travaux de sauvegarde et de mise en sécurité ont pu être réalisés. Cela étant, pour valoriser intelligemment ce lieu, l’ouvrir au public, en aménager les abords sans gêner la vie locale des paysans, en faciliter l’accès tout en préservant la nature envi-

ronnante, penser son lien avec les activités de tourisme d’été et d’hiver… c’est un projet d’ingénierie culturelle d’envergure qu’il faut monter. « L’intérêt de ce site unique au monde, qui intéresse l'histoire de l'art comme celle de la littérature, est pleinement admis. Mais une fois reconnue la nécessité de sauver ce joyau du patri-moine pour nous-mêmes et pour les générations à venir, bien des réflexions doivent être menées », déclare Annick Clavier, archéologue et conservatrice du patrimoine au Conseil général de l’Isère. Et de poursuivre « Car pour atteindre l'objectif de mise en valeur de cet ensemble en tous points exceptionnel, il faut certes des moyens, mais surtout une volonté opiniâtre et un por-teur de projet. Souhaitons que la parution de cette publication permette de le trouver ! »

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Perspectives

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Philippe Walter, professeur émérite de littérature française

Pour en savoir plus sur ce lieu, son histoire, et suivre les aventures du héros Perceval dans une bande dessinée du XIVe siècle : • theyspatrimoine.blogspot.com• publication du Conseil général de l'Isère sous la direction

d’Annick Clavier : Perceval en montagne. Le Châtel de Theys

sures de sa longue histoire. À l’intérieur de la grande salle, le sol était comme invisible. On marchait sur un échafaudage d’une solidité problématique mais qu’importe. Le regard était captivé par une impressionnante série de petits médaillons peints où je finis par reconnaître « mon » petit homme. Il était là, malgré ses couleurs défraîchies. Il fixait le visiteur de son visage un peu naïf mais avec un petit air triomphant. Il avait survécu à plus de six siècles. Il avait résisté à tout : aux guerres, aux tempêtes, aux incendies, aux destructions. Comment un tel miracle de conservation est-il possible ? Cet exemple, unique en France, de fresques murales du XIVe siècle consacrées exclusivement à un roman de Chrétien de Troyes nous interpelle désormais. Il faut maintenant sauver ce Perceval. Il faut lui donner la chance de rencontrer tous ses amis qui, par le monde, connaissent, pour l’avoir lue chez Chrétien de Troyes, sa grande histoire de rencontre inédite avec le graal. »

Récit d’une découverte inattendue« C’était en 1991. Je venais d’être nommé professeur de lit-térature française du Moyen Âge à Grenoble et le lorrain que j’étais découvrait le Dauphiné. Le Centre d'archéologie du département de l'Isère organisait cette année-là une exposition intitulée « Archéologie chez vous. Grésivaudan, Pays d’Allevard et Goncelin ». Parmi quelques objets antiques ou médiévaux, entre des cartes et des photographies, mon attention fut immédiatement attirée par une image. Elle représentait un jeune personnage à cheval avec un curieux bonnet. Il avait l’air étrange, un peu narquois. Très énigmatique sous des allures pourtant familières. Il m’intrigua d’emblée.

Peu après, je fus élu directeur de ce qui était alors « l’Unité de formation et de recherche (UFR) de lettres classiques et modernes » et il fallut proposer le nom de personnalités exté-rieures pour compléter le conseil de l’UFR. Ce dernier coopta un représentant du Musée Dauphinois. Le hasard fit très bien les choses puisque le musée délégua à notre conseil Annick Clavier, la conservatrice qui avait organisé l’exposition que je venais de visiter. Le petit bonhomme de mes souvenirs redevint alors d’actualité.

J’engageai très vite la conversation sur la curieuse image. Annick Clavier me confia qu’elle ignorait qui était ce personnage qui m’obsédait, personne n’ayant jamais proposé la moindre identification. Elle me précisa que cette image s’insérait dans une série d’autres (près d’une cinquantaine !) qui racontait visi-blement une histoire. Une fête dans un château, peut-être ? Il était assez facile de les dater : le XIVe siècle au plus tard. Le médiéviste que j’étais fut comblé. Le XIVe siècle venait soudain à moi ! Peu à peu, cheminait en mon for intérieur une conviction et une impatience diffuses : ces fresques attendaient quelqu’un pour leur porter témoignage. Allais-je être leur amical complice ?

Annick Clavier me présenta ensuite tout le dossier archéologique et je lui promis assez vite d’identifier le petit homme à cheval que j’avais pris désormais sous ma protection. Il était bien tombé (si je puis dire) puisque je terminais avec Daniel Poirion et trois autres collègues le premier volume de la nouvelle collection médiévale de la Pléiade : les Œuvres complètes de Chrétien de Troyes. Mon enquête ne fut pas bien longue. Elle fut même très courte, tant l’évidence me parut aveuglante. La série des images s’éclairait parfaitement : ce cheval qui broute dans une prairie, ce gamin tenant trois javelots qu’il s’amusait à lancer n’importe comment, le même gamin questionnant un cheva-lier en lui montrant sa lance, etc. Plus de doute : ce garçon déluré, c’était Perceval, le héros du Conte du Graal de Chrétien de Troyes composé vers 1182.

La série des images peintes déroulait avec précision le début du célèbre roman où le graal fait sa première apparition. Une nouvelle impatience grandit en moi. Il me fallait désormais visiter les lieux, voir de mes propres yeux ces fresques dont tout le monde ignorait encore le message et partager le secret de ce lieu magique. Il fallut cependant attendre : l’accès du château qui n’était pas sécurisé interdisait toute visite. Un jour, heureusement, il me fut possible d’y pénétrer.

On aurait dit le château de la Belle au bois dormant. Des abords envahis de ronces, une bâtisse bien détériorée portant les bles-

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L’enseignement de l’italien en France (1880-1940)Une discipline au cœur des relations franco-italiennesJérémie DuboisCollection Italie plurielle2014 - 458 pagesISBN 978-2-84310-299-8Prix : 26 €

L’Italie exerce en France une fascination culturelle ancienne, mais l’enseignement de l’italien s’y est structuré tardivement. À la fin du XIXe siècle, des militants créent une discipline entretenant un rapport complexe à l’immigration italienne et à la diplomatie de l’Italie libérale puis fasciste.

Les Misères des gens de courLe Songe de FortuneEnea Silvio Piccolomini Textes traduits et annotés par Serge StolfCollection Paroles d’ailleurs2015 - 142 pagesISBN : 978-2-84310-304-9Prix : 12 €

Le volume réunit deux textes écrits par l’humaniste Enea Silvio Picccolomini, de-venu plus tard pape Pie II. Dans l’un, il fait le tableau satirique des contraintes et des désillusions de la vie de cour. Dans l’autre, il s’interroge sur le pouvoir réel de la For-tune sur la vie des hommes et des empires.

Les Musées blessés - Le Muse ferite 1914-1918Photographies historiques et per-ception du patrimoine - Fotografia storica e percezione del patrimonioSous la direction de Sandra Costa et Marco PizzoCollection Iconographie en débat2014 - 312 pagesISBN 978-2-84310-283-7Prix : 34 €

Pendant la Première Guerre mondiale les bombardements aériens brisent la fragile illusion de sûreté des villes d’art, de leurs monuments et de leurs musées.

Histoire du FuturLivre antépremier - Clavis ProphetarumTraduction, introduction et notes de Bernard Emery, avec la collaboration de Brigitte PereiraCollection Paroles d’ailleurs2015 - 394 pagesISBN 978-2-84310-278-3Prix : 15 €

Le Père Vieyra est le théoricien de la conversion totale de l’humanité au chris-tianisme, qu’il appelle le Quint Empire du Christ. Nous avons traduit en français les principaux textes de cette stupéfiante aventure spirituelle.

Itinéraires de Roberto RosselliniTextes réunis et présentés par Robert BonamyCollection La Fabrique de l'œuvre2014 - 178 pagesISBN 978-2-84310-288-2Prix : 24 €

Le livre suit les multiples itinéraires (autant de « voyages » en Italie, en Allemagne, en France, en Inde) et les démarches filmiques (au cinéma, à la télévision) du réalisateur italien. Aux côtés de films réputés, plu-sieurs films méconnus sont étudiés.

Le Roman de TorecTexte présenté, traduit et annoté par Baukje Finet - Van der SchaafMoyen Âge européen2015 - 256 pagesISBN 978-2-84310-300-1Prix : 23 €

Édition bilingue d’un roman arthurien en moyen néerlandais narrant la quête d’un jeune homme, Torec, pour retrouver la couronne d’or volée à sa grand-mère long-temps avant sa naissance et son mariage avec la jeune fille qui possède ce diadème.

Ouvrages des Ellug

Livres

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Mark TwainTourisme et vanitéFrédéric DumasCollection Esthétique et représentation : monde anglophone (1750-1900)2015 - 348 pagesISBN 978-2-84310-301-8Prix : 25 €

Quatre récits de voyage relatent les aven-tures d’un Mark Twain haut en couleur, qui s’affiche comme touriste, critique et artiste. Sous des apparences burlesques, ses œuvres dénotent une obsession pour la mort qui offre de nombreuses analogies avec la peinture de Vanité.

Technologies de l'enchantementPour une histoire multidisciplinaire de l'illusionSous la direction d'Angela Braito et Yves CittonCollection Savoirs littéraires et imaginaires scientifiques2014 - 384 pagesISBN 978-2-84310-277-6Prix : 27 €

Cet ouvrage rassemble des études consa-crées à l’histoire des illusions produites par les technologies médiatiques imaginées dès l’aube de la modernité, depuis la pein-ture jusqu’aux jeux vidéo, en passant par les sciences, la littérature et l’art des jardins.

Wordsworth et ses miroirsRésonances des mythes d'Echo et de NarcisseAurélie Thiria-MeulemansCollection Esthétique et représentation : monde anglophone (1750-1900)2014 – 426 pagesISBN 978-2-84310-279-0Prix : 26 €

Le double mythe ovidien est omniprésent chez Wordsworth. Un paradoxe dans les vers du grand poète romantique anglais qui voulait ne plus écrire comme les Anciens, mais produire des vers où la Nature et l’émotion se liraient directement.

L'événement indien de la littéra-ture françaiseGuillaume BridetCollection Vers l’Orient2014 - 302 pagesISBN 978-2-84310-276-9Prix : 24 €

Ce livre se propose d'étudier un événe-ment littéraire et intellectuel de première importance qui eut lieu dans la France des années 1920 : pour la première fois, la littérature et la pensée contemporaines d’un pays non occidental – l’Inde –, sont considérées comme une ressource majeure pour penser au présent.

L'Orient des revues(XIXe et XXe siècles)Sous la direction de Daniel LançonVers l’Orient2014 - 198 pagesISBN 978-2-84310-286-8Prix : 24 €

Étude sur l’évolution des représenta-tions de l’Orient dans de grandes revues généralistes françaises et francophones emblématiques des années 1830 aux années 1960, des imaginaires orientalistes en situation coloniale aux prises de parole des lettrés orientaux.

Lumières de BohèmeCarnaval de Mars Ramon del Valle-Inclàn – Traduction, introduction et notes de Serge SalaünCollection Paroles d’ailleurs2015 - 380 pagesISBN 978-2-84310-293-6Prix : 15 €

Traduction en français de toutes les tragédies grotesques (esperpentos) du dramaturge espagnol Ramón del Valle-Inclán, écrites pendant les années 1920. Lumières de Bohème et Carnaval de Mars, font désormais partie du grand répertoire espagnol contemporain.

Ouvrages des Ellug

Livres

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Livres

Pour plus d’informations : www.u-grenoble3.fr/ellug

Cahiers d'études italiennes, n° 20, 2015, 318 p.Foscolo e la cultura europeaISBN 978-2-84310-291-2

Cahiers d'études italiennes, n° 19, 2014, 248 p.Idées et formes du tragique dans la société et la culture italiennes. De l'Humanisme à la fin de l'époque moderneISBN 978-2-84310- 285-1

Études écossaises, n° 17, 2015, 206 p.La poésie écossaiseISBN 978-2-84310-296-7

Exercices de rhétorique, revue en ligne, n° 4, 2014.Sur l’amplificationISBN 978-2-84310-292-9 – ISSN électronique 2270-6909

Féeries, n° 12, 2015, 212 p.À la croisée des genres : intergénéricité du merveilleux au XIXe siècleISBN 978-2-84310-281-3

Féeries, n° 11, 2014, 310 p.L’illustration des contesISBN 978-2-84310-281-3

Gaïa, n° 17, 2014, 284 p.Les objets de la mythologie grecque (2e volet)ISBN 978-2-84310-284-4

LIDIL, n° 51, 2015, 254 p.Acquisition du langage et phonologieISBN 978-2-84310-297-4

LIDIL, n° 50, 2014, 230 p.Variation stylistique et diversité des contextes de socialisation ISBN 978-2-74310-287-5

Revues des Ellug

Recherches & Travaux, n° 86, 2015, 162 p.Jouer (avec) la vieillesseISBN 978-2-84310-298-1

Recherches & Travaux, n° 85, 2014, 226 p.La verveISBN 978-2-84310-291-2

Recherches & Travaux, n° 84, 2014, 160 p.Un cinéma de poésieISBN 978-2-84310-286-2

ILCEA, revue en ligne, n° 23, 2015.Le national-socialisme dans son cinéma ISBN 978-2-84310-305-6 – ISSN électronique 2101-0609

ILCEA, revue en ligne, n° 22, 2015.La révolution théâtrale dans le Río de la PlataISBN 978-2-84310-295-0 – ISSN électronique 2101-0609

ILCEA, revue en ligne, n° 21, 2015.Discours politique et culturel dans la Russie contemporaineISBN 978-2-84310-294-3 – ISSN électronique 2101-0609

ILCEA, revue en ligne, n° 20, 2014.Le conte : d’un art à l’autreISBN 978-2-84310-290-5 – ISSN électronique 2101-0609

IRIS, n° 36, 2015, 262 p.Les imaginaires du cerveau (2e volet)ISBN 978-2-84310-302-5

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Véritable base de données des collections et des revues portées par les structures éditoriales du site Grenoble Savoie, ce portail se fait également le relais de leurs nouvelles parutions et événements ainsi que de leurs projets communs et perspectives de rapprochement.Éditions de l'université Savoie Mont Blanc, Éditions littéraires et linguistiques de l'université de Grenoble (ELLUG), Grenoble Sciences et Presses universitaires de Grenoble (PUG) offrent au travers de ce site une vision d’ensemble de la richesse et de la diversité de leurs catalogues qui couvrent de nombreux champs disciplinaires allant des sciences à la littérature.

Lancement du site http://editions.univ-grenoble-alpes.fr

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Accueillir l’enfant et ses langues : rencontres pluridisciplinaires sur le terrain de l’écoleDiana-Lee Simon, Chantal Dompmartin-Normand, Stéphanie Galligani, Marie-Odile Maire SandozRiveneuve éditions2015 - 276 pagesISBN 978-2-36013-292-8Prix : 24 €

La problématique de l’École comme espace plurilingue, lieu d’accueil et de développement individuel et social, est au cœur des préoccupations d’enseignants et de spécialistes. Ceux-ci se heurtent à des situations complexes marquées par la pluralité des langues, des cultures et des identités de leurs apprenants. Cet ouvrage débouche sur des propositions novatrices suscep-tibles de favoriser une éducation socialement et scolairement inclusive.

Les âges de la vie dans la pensée politique florentineCécile Terreaux-ScottoDrozCahiers d'humanisme et Renaissance2015 - 461 pagesISBN 978-2-600-01819-7Prix : 45 €

Après la révolte des Ciompi en 1378, la société florentine a élaboré un ordre des générations qui exalte la sagesse des vieillards et écarte les jeunes gens de la vie politique. À la fin du siècle suivant, Savonarole explique aux Florentins qu'ils doivent se détourner du modèle constitué par leurs ancêtres et imiter leurs enfants. Sa prédication bouleverse suffisamment la hiérarchie des âges de la vie pour que la génération de la guerre voie dans les jeunes gens les médecins d'une cité que leurs aînés ont rendue malade.

Ouvrages parus chez d'autres éditeurs

L’Art du folkloreEurope - Afrique - AmériquesMélina Cariz, Alice Delmotte-Halter, Salomé Roth et Vinciane TrancartÉditions universitaires de LorraineCollection Ethnocritiques2014 – 330 pagesISBN 978-2-8143-0181-8Prix : 15 €

Ce livre donne un aperçu des rapports entre arts et folklores à travers différents prismes (géo-politique, économique, social, religieux et esthétique). Il cerne la question de l’émergence du folklore et de ses usages politiques dans le contexte postcolo-nial et globalisé contemporain, à travers des études de cas, de Pablo Neruda au Folk Art, de la peinture sous-verre au boléro, du rap aux cartoons, de Gramsci aux musées virtuels…

Cinéma, mode d’emploiDe l’argentique au numériqueJean-Louis Comolli, Vincent SorrelVerdier2015 - 448 pagesISBN : 978-2-86432-789-9Prix : 28 €

La numérisation du cinéma, de la prise de vues à la projec-tion, menace de l’entraîner dans l’accélération générale du monde. Or, le spectateur de cinéma résiste à être traité comme un consommateur de spectacles. C’est une chance. Dans un monde saturé d’images, le hors-champ qui s’ouvre dans les salles de cinéma est l’aventure d’une liberté de nos imaginaires. Le lecteur trouvera dans les quelque deux cents entrées de cet abécédaire une approche pratique, technique et théorique des gestes, des pensées et des outils qui font le cinéma.

Livres

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Devenir écrivain. L’enfance de StendhalSous la direction d’Olivier Tomasini et Christine Carrier PUG2014 - 128 pagesISBN 978-2-7041-1851-7Prix : 17,90 €

Cet ouvrage très illustré permet de comprendre comment l’imaginaire de l’écrivain s’est nourri du terreau de l’enfance. Grandissant à Grenoble, ville à l’esprit révolutionnaire, le jeune Henri Beyle y fera ses premières expériences qui le marqueront à jamais. De l’éducation auprès de son grand-père qui l’initie à l’esprit des Lumières aux premiers émois amoureux, la perte soudaine de sa mère à l’âge de sept ans, des élans romantiques au ressentiment qu’il nourrira pour son père et sa ville natale, on voit se dessiner peu à peu celui qui deviendra l’auteur de La Chartreuse de Parme et du Rouge et le Noir.

Dictionnaire de mythologie arthuriennePhilippe WalterImago2014 - 441 pagesISBN 978-2-84952-709-2Prix : 25 €

Novateur dans sa démarche pluridisciplinaire entrecroisant littérature, histoire, anthropologie, archéologie et philologie, ce dictionnaire offre avec ses 600 entrées, un panorama euro-péen complet de la littérature consacrée au roi Arthur et aux Chevaliers de la Table Ronde, du VIIIe au XVe siècle avec un accent particulier sur ses origines celtiques.

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Il dialogo dei tre massimi sistemiLe Ultime lettere di Jacopo Ortis fra il Werther e la Nuova Eloisa Enzo NeppiLiguori editoreLetterature2015 - 386 pagesISBN 978-88-207-6419-7 Prix : 32,99 €

Recherche sur l’intertextualité et contribution à l’histoire du roman moderne, du roman épistolaire en particulier, l'ouvrage explore Les souffrances du jeune Werther de Goethe (1774) et La nouvelle Héloïse de Rousseau (1761) en tant qu'hypotextes dans Les dernières lettres de Jacopo Ortis de Ugo Foscolo, l’un des plus grands écrivains italiens du XIXe siècle. Trois différentes conceptions de l’homme, et de son rapport à l’amour, sont ainsi explorées.

La grammaire des premiers temps A1A2Dominique Abry et Marie-Laure ChalaronPUGCollection Français langue étrangère2014 - 288 pages avec inclus un CD MP3 de 140 minutesISBN : 978-2-7061-1813-5Prix : 22 €

Cette nouvelle édition s’adresse à des apprenants débutants et faux débutants en français, et propose un apprentissage des structures du référentiel A1-A2 du CECRL (Cadre européen commun de référence pour les langues). L’apprenant progresse grâce à l’observation et la pratique des règles du code oral et du code écrit. Ce livre contient des corpus contextualisés, des exercices de discrimination auditive, d’entraînement et d’évalua-tion ainsi que des activités interactives et créatives. Un livret des corrigés et transcriptions des enregistrements est disponible.

Les Français en ÉgypteDe l'Orient romantique aux modernités arabesDaniel LançonPresses universitaires de Vincennes2015 - 360 pagesISBN 978-2-84292-425-6Prix : 22 €

Cet ouvrage d'histoire littéraire et culturelle donne une idée précise de l'ampleur des déplacements et installations en Égypte, d'intellectuels français, connus ou méconnus, de Gérard de Nerval à Michel Butor, entre le XVIIIe et le XXe siècle. Parmi eux, on trouve des écrivains de vocation, de jeunes pro-fesseurs et penseurs, des artistes, des diplomates érudits, des ingénieurs, des médecins. Si certains ont tenu le discours du « rayonnement » culturel de leur pays d’origine, d’autres ont joué un rôle non négligeable dans un champ intellectuel et artistique plurilingue, en lien avec des acteurs égyptiens.

La grammaire des premiers temps B1B2Dominique Abry et Marie-Laure ChalaronPUGCollection Français langue étrangèreseptembre 2015 - 318 pages avec inclus un CD MP3 de 3 h 30 ISBN 978-2-7061-2284-2Prix : 22 €

Cette nouvelle édition (506  exercices dont 163 enregistrés), se propose de faire acquérir aux apprenants les contenus grammaticaux des niveaux B1-B2 du CECRL s’appuyant sur des supports variés : articles de presse, textes littéraires, dessins humoristiques, dialogues, témoignages… Les exercices (observation, analyse, discrimination, entraîne-ment) et les activités interactives font appel à la perception des apprenants, à leur réflexion, à leur créativité ainsi qu’à leurs facultés communicatives. À la fin de chaque chapitre, les enseignants trouveront des exercices d’évaluation. Un livret des corrigés et transcriptions des enregistrements est disponible.

Guide pour la recherche en didac-tique des langues et des culturesApproches contextualisées Sous la direction de Philippe Blanchet et Patrick ChardenetÉditions des archives contemporaines2015 - 610 pagesISBN 978-2-81300-048-4 Prix : 65 €

Cette 2e édition du guide s’adresse avant tout aux étudiants apprentis-chercheurs. Il leur présente l’ensemble des repères fondamentaux pour élaborer, réaliser, diffuser des connais-sances par un processus de recherche scientifique en didactique des langues et des cultures : repères épistémologiques et théoriques, méthodologiques, disciplinaires et expérienciels. Cet ouvrage apportera aussi aux chercheurs confirmés, spé-cialisés dans d’autres domaines, une information sur ce champ de la recherche et sur l’état des connaissances en didactique des langues et des cultures.

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Livres

Les objets hypertextuels. Pratiques et usages hypermédiatiques Caroline AngéISTE ÉditionsCollection systèmes d’information, web et information ubiquitaire2015 - 233 pagesISBN 978-1-78405-096-2Prix : 39 €

Cet ouvrage pluridisciplinaire (sciences de l’information- communication, sociologie, littérature, sciences du langage, etc.) propose une réflexion sur les évolutions du livre, de la fiction, du récit interactif, de l’objet sonore, mais également des jeux vidéo, des mobiles, des réseaux sociaux ou des cours en ligne. Au-delà d’un simple enjeu, il s’agit de proposer une éthique scientifique qui doit guider les recherches contemporaines.

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Ce village si paisible…Chronique des années 40 en ArdècheChristian ChapusPlumes d’Ardèche-Pollen SCOP2014 - 218 pagesISBN 979-1-093-856018Prix : 20 €

1939 : l’entrée en guerre de la France va venir troubler la tranquillité de St-Michel-de-Chabrillanoux, ce paisible village ardéchois accroché à flanc de montagne. C’est ainsi que Philé-mon, le maire, sa famille et tous les habitants devront faire face à des évènements qu’ils n’auraient jamais imaginés quelques mois auparavant. Au fil des pages, à travers maintes aventures et anecdotes, vous découvrirez une communauté villageoise qui a surmonté l’adversité.

Les chemins de retourAlfons CerveraTraduit en français par Georges TyrasLa contre alléeCollection Les périphéries2015 - 89 pagesISBN 978-2-917817-40-7Prix : 8,50 €

Dans ce livre, Alfons Cervera revient sur les lieux qui sont à la fois scènes et personnages de ses romans. En introduisant chaque chapitre par une photo d'un de ces lieux, l'auteur confronte réa-lité et fiction, passé et présent, "vérité" et souvenirs, poursuivant par là-même sa réflexion sur la mémoire, ses distorsions et ses pièges. Bien plus que le témoignage d'un écrivain sur le proces-sus de la création littéraire, c'est d'humain et d'humanité que nous parle Alfons Cervera.

Pour un droit à l’éducation artistique. Un plaidoyer franco-allemand Wolfgang Schneider, Jean-Pierre Saez, Marie-Christine Bordeaux, Christele Hartmann-FritschB & S Siebenhaar Verlag OHG2014 - 429 pagesISBN 978-2-918021-05-6Prix : 28,90 €

La théorie et la pratique de l'éducation artistique et culturelle en France et en Allemagne font l'objet de cet ouvrage bilingue et transnational auquel ont contribué une trentaine d'auteurs. Il présente les structures politiques et administratives sur lesquelles se fonde l'éducation artistique et culturelle dans les deux pays, et les soumet à l'observation critique. Une série d'études de cas témoigne de la variété des approches de l'éducation artistique et culturelle dans chaque pays.

Slam. Des origines aux horizonsSous la direction de Camille VorgerÉditions d’en bas / La passe du vent2015 - 285 pagesISBN 978-2-8290-0492-6 (Éditions d’en bas) ISBN 978-2-84562-262-3 (La passe du vent)Prix : 18 €

Le slam est un espace ouvert et sans frontières, une maison animée par le souffle de ces poètes nomades du monde moderne. Cet ouvrage rassemble 15 entretiens avec le créateur américain Marc Smith et plusieurs auteurs emblématiques du slam et de la poésie sonore franco-suisse ainsi que des articles d’universitaires – notamment grenoblois – qu’ils soient spé-cialistes de littérature ou didacticiens. Autant de points de vue croisés abordant le slam sous différents angles phonétique, lexical, sociologique et cinématographique.

Vestiges du Proche-Orient et de la Méditerranée Sous la direction de Catherine Delmas et Daniel LançonGeuthner2015 - 258 pagesISBN 978-2-7053-3923-4Prix : 35 €

Cet ouvrage examine la manière dont certains écrivains, voya-geurs ou archéologues britanniques, italiens, français et francophones d’Afrique du nord, ont perçu et représenté, revisité ou recyclé les vestiges du Proche-Orient et de la Méditerranée, dans leurs récits de voyage, d’archéologie, leurs romans ou leur œuvre poétique, et dans les arts visuels, du XVIIIe au XXe siècle. Les auteurs s’interrogent sur le regard et les discours que laissent transparaître les textes, sur les modes de représen-tation, sur les regards croisés et les échanges culturels qu’ils génèrent ou ont générés, sur l’approche orientaliste et son évolution.

Livres

18 / Alphabets

Poèmes et récitsMichel MassitÉditions Baudelaire2015 - 114 pagesISBN 979-10-203-0628-9Prix : 13,50 €

Écrits au fil des ans, ces textes sont nés spontanément de sou-venirs, de rencontres, d’émotions et de réflexions. Mais aussi du côtoiement de la littérature allemande, comme le prouve le conte « La Beauté du Virtuel », une adaptation de la légende de Faust à l’ère de l’informatique.Les poésies, de facture classique, renouvellent des thèmes tra-ditionnels tels la nature, l’amour, la condition humaine, le sens de la vie et de la mort. Poétique ou romanesque, l’imagination est ici au service de l’humain.

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Coup d'œil

Alphabets / 19

L’auto-portrait : réflexions sur la représentation de l’intime dans le cadre publicDu 29 octobre au 22 novembre 2015, la Maison de l’image organise une série d’événements autour de la thématique de l’auto-portrait. Entre une exposition de clichés de Vivian Maier et les résultats des travaux collaboratifs menés par l’artiste en résidence Cristina Nuñez, des chercheurs du GRESEC (Groupe d’études sur les enjeux de la communication) et de Litt&Arts présenteront certains résultats de leur projet de recherche intitulé Selfies. Ce projet, soutenu par la Maison de la création, s’intéresse aux enjeux de la représentation de l’intime dans le cadre public.

Les chercheurs feront, lors d’une table ronde, une restitution des ateliers animés par la photographe Cristina Nuñez dans lesquels se sont impliqués des étudiants de différentes filières de l’université Stendhal mais aussi des autres universités grenobloises. Il est à noter qu’il s’agissait lors des séances de réaliser des auto-portraits et des analyses d’images portant sur les émotions, leurs résonances sociales dans un espace intime, en particulier celui de la chambre noire d’un atelier photographique.

Pour explorer les relations entre image de soi et soi, comprendre les effets de sens produits par le processus artistique et les imaginaires qui lui sont associés ou encore se questionner sur

les pratiques expressives digitales comme le selfie, n’hésitez pas à venir rencontrer les chercheurs qui se sont engagés, avec la Maison de l’image, dans des expérimentations autour de l’auto-portrait. À ce sujet, la photographe Cristina Nuñez déclare qu’il possède une multiplicité de significations, souvent contradictoires, à l’image de chaque être humain. Et de continuer « L’auto-portait nous aide à comprendre que nous pouvons être tout et n’importe qui, que nous possédons le potentiel pour être ce que nous pouvons imaginer de pire et de meilleur, et tout ce qui existe entre ces deux extrêmes. C’est ainsi que les œuvres d’art guérissent vos blessures. »

Que l’on adhère ou pas à cette thèse, il est certain que la représentation de l’intime a été longtemps cachée, limitée en public à une posture de retrait à l’exception de représentations artistiques. Et l’on observe aujourd’hui indéniablement une exposition nouvelle, parfois exubérante de l’intime notamment via la publication foisonnante de selfies sur les réseaux sociaux. Peut-être est-ce là aussi pour l’individu une manière de marquer son passage, d’affirmer son existence, dans un monde où il se sent de plus en plus anonyme.

Pour en savoir plus : www.maison-image.fr

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U comme... Université

« L'Université conserve, mémorise, intègre, ritualise un héritage culturel de savoirs, idées, valeurs ; elle le régénère en le réexa-minant, l'actualisant, le transmettant [...]. À ce titre, l'Université a une mission et une fonction trans-séculaires, qui, via le présent, vont du passé vers le futur. »

Edgar Morin

En 2016, les universités grenobloises fusionnent en un seul établissement dont voici le logotype :