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Mai 2020
ANALYSE DE L’ÉCONOMIE DES MÉNAGES (AEM) EN REPUBLIQUE DU CONGO
Volume 2
Sommaire
1. PROFIL DES MOYENS D’EXISTENCE ZONE CG05 - FORÊT DENSE DU
CHAILLU : arachide, plantain, fruit de safoutier, manioc, petits ruminants7
Introduction ..................................................................................................................................... 10
Contexte et justification ................................................................................................................ 11
Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) ................................................................................. 12
Méthodologie ................................................................................................................................... 13
Profil des moyens d’existence ....................................................................................................... 15
Description de la zone ................................................................................................................ 15
Marchés ........................................................................................................................................ 15
Historique, aléas et année de référence .................................................................................. 16
Calendrier saisonnier pour l’année de référence ................................................................... 17
Découpage socio-économique .................................................................................................. 18
Sources de nourriture ................................................................................................................. 19
Sources de revenus ..................................................................................................................... 20
Postes de dépenses .................................................................................................................... 22
Seuil de survie et de protection des moyens d’existence ...................................................... 23
Aléas .............................................................................................................................................. 25
Stratégies d’adaptation ............................................................................................................... 25
Paramètres clés pour le suivi de la sécurité alimentaire ....................................................... 25
Recommandations ...................................................................................................................... 25
2. PROFIL DES MOYENS D’EXISTENCE ZONE CG09 - PÊCHE ARTISANALE DES
GRANDS FLEUVES ET CULTURES VIVRIÈRES ................................................... 29
Introduction ..................................................................................................................................... 32
Contexte et justification ................................................................................................................ 33
Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) ................................................................................. 34
Méthodologie ................................................................................................................................... 35
Profil des moyens d’existence ....................................................................................................... 37
Description de la zone ................................................................................................................ 37
Marchés ........................................................................................................................................ 37
Calendrier saisonnier pour l’année de référence ................................................................... 38
Découpage socio-économique .................................................................................................. 38
Sources de nourriture ................................................................................................................. 40
Sources de revenus ..................................................................................................................... 42
Postes de dépenses .................................................................................................................... 44
Seuil de survie et de protection des moyens d’existence ...................................................... 46
Risques et chocs .......................................................................................................................... 47
Stratégies d’adaptation ............................................................................................................... 47
Paramètres clés pour le suivi de la sécurité alimentaire ....................................................... 48
Recommandations ...................................................................................................................... 48
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 5
7 Date | Report title
PARTIE 3
PROFIL DES MOYENS D’EXISTENCE
Household Economy Analysis (HEA)
ZONE CG05 – Forêt dense
du Chaillu : arachide, plantain,
fruit de safoutier, manioc,
petits ruminants
Rapport préparé par : Garba Noura, Food Economy Group
(FEG) et David De WILD
Rapport préparé pour : Programme Alimentaire Mondial
(PAM) République du Congo
Equipe de collecte :
• Gautier Josias MASSAMOUNA (PAM)
• Bassonga Kossat Hemervy Gloire Destin
• Kissita Landhou Marina Nupcia
• Wando Georgy Patience
• Matsima Khen
• Garba Noura (Consultant FEG et chef d’équipe zone 9)
• Margaret KIHOULOU
• Félène MABIALA NZOUMBA
• Freddy MAKAYA
• Herman MFOUTOU MATONDO
• Ismaelle NGAKA MATONDO
• David DE WILD (Consultant FEG et chef d’équipe zone
5)
REMERCIEMENTS
L’auteur de ce rapport tient à remercier, en premier lieu,
l’équipe de collecte de données qui a travaillé de façon
consciencieuse et enthousiaste, pour accomplir la tâche de
collecte de données en milieu rural.
Il remercie également les autorités locales des districts et
villages et les agents du Ministère de l'Agriculture, de l’Elevage
et de la Pêche (MAEP) qui ont appuyé la réalisation du travail
et la mobilisation des communautés, ainsi que les
communautés elles-mêmes pour leur accueil, leur temps et
leur patience.
Ces remerciements vont aussi au Bureau du PAM de la
République du Congo pour son intérêt et soutien au projet et
leur appui administratif, logistique et technique. Des
remerciements chaleureux vont en particulier à Josias Gautier
MASSAMOUNA (Assistant senior du programme VAM et
innovation, unité suivi évaluation – PAM République du
Congo) pour son appui continu tout au long de cet exercice.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 9
Le Congo, comme les autres pays de l’Afrique subsaharienne,
traverse une période de difficultés économiques et
financières sérieuses depuis la crise du pétrole en 2014-2015.
C’est dans ce cadre qu’intervient la formulation du nouveau
Programme National de Développement (PND) 2018-2022, à
travers lequel, l’attention de l’État porte sur des secteurs très
sélectifs et restreints, parmi lesquels la diversification de
l’économie pour accélérer la croissance et renforcer sa
résilience.
Le contexte d’insécurité alimentaire et nutritionnelle qui
prévaut au Congo depuis quelques années impose une
compréhension approfondie de la situation socio-
économique des ménages.
L’analyse globale de sécurité alimentaire et de la vulnérabilité
(AGSAV) estime qu’en 2014, au total 14,2% des ménages
congolais étaient en insécurité alimentaire par rapport à la
diversité et à l’équilibre nutritionnel de leur alimentation, par
opposition à son adéquation en termes caloriques. Les
pratiques alimentaires des ménages restent tributaires du
contexte socio-économique et agropastoral national. Selon
l’indice de la faim (GHI), le Congo a un score alarmant qui a
augmenté de 18,4 en 2005 à 20,5 en 2013. Le chômage
touche 7% de la population active. Entre 2005 et 2011, la
population vivant en dessous du seuil de pauvreté est passée
de 50,7% à 46,5%. Il est très probable que la crise ait
engendré une détérioration de la situation avec une
augmentation du taux de chômage et de l’incidence de la
pauvreté.
En effet la convocation et la tenue d’une élection
présidentielle anticipée le 20 mars 2016, aura fini de justifier
l’intrusion dans les quartiers sud et sud-ouest de Brazzaville,
d’une bande armée dans la nuit du 03 au 04 avril 2016. Les
autorités gouvernementales feront immédiatement le lien
avec la milice N’silulu du Pasteur N’toumi en cabale dans le
Département du Pool. Ainsi, se décline le rebondissement de
la crise dite du Pool dans son développement avec sa cohorte
de conséquences sécuritaires, humanitaires, sanitaire, et bien
plus. Pendant cette période plusieurs personnes du
département du Pool se trouvent en situation d’urgence,
obligées de trouver refuge chez des amis, des parents ou
dans une paroisse. Des milliers d’enfants ont été privés de
scolarité, et des milliers de personnes malades ou de femmes
enceintes n’ont pas pu accéder à des soins de base dans leurs
districts respectifs. Des taux de malnutrition bien supérieurs
au seuil d’urgence ont été constatés parmi les enfants
déplacés dans le département du Pool ou le département
voisin de la Bouenza. Ainsi les données de la dernière
enquête nutritionnelle menée en mai 2017, dans les
départements de la Bouenza et du Pool, rapportent une
prévalence de 17% de malnutrition aiguë globale, dont 5,3%
de forme sévère (MAS), chez les enfants de moins de 5 ans
parmi les déplacés et les familles d’accueil. Pour les enfants
des familles d’accueil et ceux de la population des localités
ciblées, une prévalence de MAS 6,4% selon l’enquête MICS
2014-2015 a été retenue dont 1,7% de forme sévère.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 10
Introduction
Dans le but de mieux comprendre l’évolution de la sécurité
alimentaire et des moyens d’existence en période de crise en
République du Congo, le PAM prévoit d’implémenter
l’approche basée sur l’Analyse de l’Economie des Ménages
(AEM – HEA) qui permettrait d’avoir des informations
conséquentes pour renseigner les réponses (ciblage des
ménages, types d’interventions, etc.).
Ainsi, en janvier 2020, le Programme Alimentaire Mondial
(PAM) a chargé le Food Economy Group (FEG) de mener deux
études de référence sur l'Analyse de l'Économie des Ménages
(AEM), l'une dans la zone CG05 – Forêt dense de Chaillu :
arachide, plantain, carthame, manioc, petits ruminants, et
l'autre dans la zone CG09 – Pêche artisanale des grands
fleuves et cultures vivrières. L'objectif était de générer une
meilleure compréhension des moyens d’existence et de la
situation de la sécurité alimentaire des populations vivant
dans ces zones. Les deux études ont été réalisées
simultanément en février 2020.
Ce rapport comprend une brève introduction à l'analyse AEM,
décrit la méthodologie utilisée dans cette étude (page 13) et
présente les résultats de l’étude de référence de l'AEM sous la
forme d’un profil de moyens d'existence, qui fournit une
description détaillée de la zone de moyens d'existence CG05 –
Forêt dense du Chaillu : arachide, plantain, fruit de safoutier,
manioc, petits ruminants (page 15).
Le profil comprend les sections suivantes :
• Description de la zone
• Marchés
• Historique des aléas et de l’année de référence
• Calendrier saisonnier pour l’année de référence
• Découpage socio-économique
• Sources de nourriture
• Sources de revenus
• Postes de dépenses
• Seuil de survie et de protection des moyens
d’existence
• Aléas
• Stratégies d’adaptation
• Paramètres clés pour le suivi de la sécurité
alimentaire
• Recommandations
Le profil fournit une description détaillée des moyens
d'existence dans la zone et peut donner au lecteur une
compréhension approfondie des conditions de sécurité
alimentaire. Il est accompagné d’une base de données qui
contient toutes les variables examinées lors du travail sur le
terrain et l’analyse postérieure.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 11
Contexte et justification
Cette section explique certains des termes clés utilisés dans
l'AEM et dans les profils.
Zone de moyens d'existence : Une zone de moyens
d’existence est une zone dans laquelle les gens partagent à
peu près les mêmes modèles d'accès à la nourriture (c’est-à-
dire qu'ils cultivent en général les mêmes cultures, élèvent les
mêmes types de bétail, etc.). Ils partagent également, dans
l'ensemble, le même accès aux marchés. Les modes
d’existence varient visiblement d'une région à l'autre. Des
facteurs locaux tels que le climat, le sol, l'accès aux marchés
influencent tous les modes d’existence. La première étape
d'une analyse de l'économie des ménages consiste donc à
effectuer un zonage des moyens d’existence. Il délimite des
zones géographiques à l'intérieur desquelles les gens
partagent essentiellement les mêmes schémas d'accès à
l'alimentation et ont le même accès aux marchés.
Découpage socio-économique : Le lieu de vie d'un ménage
est l'un des facteurs qui déterminent ses options pour obtenir
de la nourriture et générer des revenus. Un autre facteur est
la richesse, puisqu'il s'agit du principal facteur déterminant la
capacité d'un ménage à exploiter les options disponibles dans
une zone donnée. Il est évident, par exemple, que les
ménages nantis qui possèdent de plus grandes fermes
produiront plus de récoltes et seront dans une meilleure
sécurité alimentaire que leurs voisins plus pauvres. Toutefois,
la terre n'est qu'un aspect de la richesse, et les groupes de
richesse sont généralement définis en fonction de leurs avoirs
fonciers, de leurs cheptels, de leurs autres actifs productifs,
de leur capital, de leur éducation, de leurs compétences, de la
main-d'œuvre disponible et/ou de leur capital social.
Définir les différents groupes de richesse dans chaque zone
est la deuxième étape d'une analyse de l'économie des
ménages, dont le résultat est un découpage de la richesse.
Aux fins de la présente évaluation, un ménage a été défini
comme des personnes « qui mangent dans la même
marmite » ; ils ne sont pas nécessairement directement liés
mais dépendent financièrement l'un de l'autre.
Base de référence de l'économie des ménages : Après
avoir regroupé les ménages en fonction de leur lieu de
résidence et de leur richesse, l'étape suivante consiste à
produire des données de base sur l'économie des ménages
pour les ménages types de chaque groupe, pour une année
de référence définie. L'accès à la nourriture est déterminé en
examinant la somme des moyens par lesquels les ménages se
procurent de la nourriture – quels aliments ils cultivent,
récoltent ou reçoivent en cadeau, combien de nourriture ils
achètent, combien d'argent ils gagnent en un an, et quels
autres besoins essentiels doivent être satisfaits avec le revenu
gagné.
Stratégies d'adaptation des ménages : Une fois cette base
de référence établie, il est possible d'analyser l'impact
probable d'un choc ou d'un aléa au cours d'une mauvaise
année. Pour ce faire, on évalue comment l'accès à la
nourriture sera affecté par un choc, quelles autres sources de
nourriture peuvent être ajoutées ou étendues pour combler
les pénuries initiales, et quels déficits finaux apparaissent.
Analyse des scénarios : L'approche de l'économie des
ménages repose sur un principe de base : une analyse des
moyens d'existence locaux est essentielle pour bien
comprendre l'impact – au niveau des ménages – des aléas tels
que la sécheresse, les conflits ou la dislocation des marchés.
Une mauvaise récolte totale peut, par exemple, laisser un
groupe de ménages sans ressources parce que la mauvaise
récolte est leur seule source de nourriture de base. Un autre
groupe, par contre, peut être en mesure de s'en sortir parce
qu'il a d'autres sources d'alimentation et de revenus. Ces
sources alternatives – comme le bétail à vendre ou des
parents ailleurs en mesure d’aider – peuvent combler le
déficit de production. Ainsi, pour être efficaces, les
évaluations de l'impact des aléas naturels doivent être
fondées sur une analyse des moyens d'existence, et l'analyse
des moyens d'existence elle-même comporte plusieurs
étapes.
L'objectif est d'étudier les effets d'un aléa sur l'accès futur à la
nourriture et au revenu, afin que des décisions puissent être
prises sur les types d'intervention les plus appropriés à
mettre en œuvre. La raison d'être de cette approche est
qu'une bonne compréhension de la façon dont les gens ont
survécu dans le passé fournit une base solide pour se
projeter dans l'avenir. Trois types d'informations sont
combinés : (i) des informations sur l'accès de base, (ii) des
informations sur les aléas (c’est-à-dire les facteurs affectant
l'accès à la nourriture et/ou au revenu, tels que la production
propre ou les prix du marché) et (iii) des informations sur les
stratégies de réponse (c’est-à-dire les sources de nourriture et
de revenu auxquelles les gens se tournent lorsqu'ils sont
exposés à un aléa). L'approche peut se résumer comme suit :
Base de référence + Aléa + Réponse = Résultat
L'idée est qu'une fois les données de référence compilées,
elles peuvent être utilisées à plusieurs reprises pour ce type
d'analyse des résultats sur un certain nombre d'années –
jusqu'à ce que des changements importants dans l'économie
sous-jacente les rendent invalides. Une bonne base de
référence pour l'économie alimentaire sera généralement
valide pour une période de 5 à 10 ans. Ce qui varie, c'est le
niveau de sécurité alimentaire qui prévaut, mais c'est une
fonction des variations des aléas et non des variations du
niveau de référence. En d'autres termes, le niveau de
production végétale ou animale peut varier d'une année à
l'autre (aléa), mais la structure sous-jacente de la production
(le niveau de référence) ne change généralement pas très
rapidement.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 12
Household Economy Analysis (HEA) ou Analyse de l’Economie des Ménages (AEM)
PROGRAMME DE TRAVAIL
Les chercheurs de terrain sélectionnés pour mener cette
étude d’Analyse de l’Économie des Ménages (AEM) ont
participé à une formation en classe à Brazzaville du 26 janvier
au 1er février 2020. Suite à cette formation, ils ont collecté les
données de base sur l'économie des ménages dans la zone
CG05 du 3 au 15 février 2020. La phase terrain a été suivie
d'une analyse des données de base à Brazzaville du 17 au 21
février 2020, à laquelle tous les membres de l'équipe ont pris
part. Les résultats préliminaires ont été présentés à
Brazzaville le 24 février 2020.
ÉCHANTILLONNAGE
Un échantillon raisonné a été utilisé pour cette étude. Ceci est
décrit plus en détails ci-dessous.
Zone de moyens d’existence
Le premier niveau d'échantillonnage a été effectué par zone
de moyens d'existence : ce sont des zones dans lesquelles les
ménages partagent les mêmes moyens d'existence, c’est-à-
dire qu'ils sont relativement homogènes.
Pour la République du Congo, les zones de moyens
d’existence ont été définies lors d’un exercice de zonage qui a
eu lieu 26 au 30 août 2019 à Brazzaville. Les résultats de cet
exercice peuvent être consultés dans le rapport de l’atelier
(Rapport de l’atelier national de zonage des moyens
d’existence en République du Congo, Analyse de l’Economie
des ménages (AEM) en République du Congo, décembre
2019).
La zone étudiée était la zone CG05 - Forêt dense de Chaillu :
arachide, plantain, fruit de safoutier, manioc, petits
ruminants.
La zone couvre une partie du district de Tsiaki dans le
département de Bouenza ; le district de Zanaga et une partie
du district de Sibiti dans le département de la Lékoumou ;
ainsi que le district de Moutamba, de Divenié et une partie du
district Nyanga dans le département du Niari.
Vérification des caractéristiques de la zone de moyens
d’existence et sélection des sites
L'équipe de terrain dans chaque zone de moyens d'existence
a mené des entretiens avec des informateurs clés au niveau
du district et de la région (les sous-préfets et le personnel
technique du Ministère de l'Agriculture, de l'Élevage et de la
Pêche) pour confirmer les caractéristiques de la zone, telles
que définies lors de l’atelier de zonage susmentionné. En
discussion avec ces personnes, les équipes ont aussi
sélectionné huit villages qu’ils ont visité pour collecter les
données AEM.
Ces villages ont été sélectionnés sur la base des critères
suivants :
1. Ils avaient besoin d’être « typiques » de la zone, c'est-
à-dire que les moyens d’existence dans ces villages
suivent le même schéma que dans la grande majorité
des autres villages de la zone ;
2. Ils avaient besoin d’être accessibles. En raison du
mauvais état des routes et du temps limité, les
équipes ont choisi des villages qui étaient
physiquement accessibles en voiture.
Dû au deuxième critère, tous les villages visités se trouvent le
long des axes principaux des départements de la Lékoumou
et du Niari. Généralement, les villages situés le long des axes
principaux ont un meilleur accès au marché et sont plus
fréquentés par les commerçants que les villages éloignés des
axes. Comme la plupart des habitants de cette zone semblent
vivre dans des villages situés le long de ses différents axes, la
sélection est toujours présumée être représentative. Le point
à souligner ici est que ce biais de localisation doit être gardé à
l'esprit lorsque l'on considère des villages plus éloignés.
Dans le département de la Lékoumou, les villages
sélectionnés sont Mapati et Ouandzi dans le district de Sibiti,
ainsi que Kengue et Mbomo dans le district de Zanaga. Dans
le département du Niari, les villages sélectionnés sont
Mingaya et Ngonaka dans le district de Yaya, et Itsotso et Titi
dans le district de Moutamba.
La faiblesse de cette sélection est qu'elle ne comprend aucun
village proche de la frontière avec le Gabon. Par conséquence,
il est possible que le commerce transfrontalier, qui se dit
typique pour cette zone, soit sous-représenté.
ENTRETIENS
Des entretiens ont été menés à quatre niveaux différents lors
de la collecte des données dans la zone :
1. Services techniques gouvernementaux au niveau
départemental (1 entretien par département)
2. Commerçants sur les marchés (1 marché visité)
3. Groupes de discussion avec des informateurs clés
communautaires (8 entrevues)
4. Groupes de discussion avec des représentants de
ménages (32 entrevues)
Lors des entretiens avec les informateurs clés de la
communauté, il a été demandé aux dirigeants
communautaires de diviser la population en quatre groupes
de richesse différents (très pauvres, pauvres, moyens, nantis)
et de produire un profil des moyens d’existence pour chacun.
Des groupes de discussion représentants des ménages ont
ensuite été organisés avec 4 à 8 représentants de chacun de
ces quatre groupes socio-économiques. Les équipes ont
essayé de s'assurer qu'elles interrogeaient à la fois des
hommes et des femmes. Ils ont interrogé 98 informateurs
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 13
Méthodologie
clés communautaires (71 hommes, 27 femmes) et 245
représentants de ménages (138 hommes, 107 femmes). Pour
une description plus détaillée de la méthodologie de terrain
de l'AEM, veuillez consulter le chapitre 3 du Guide à l'intention
des praticiens sur l'approche de l'économie des ménages.1
ANNÉE DE RÉFÉRENCE
L'année de référence et l'année de consommation sont deux
concepts clés dans les études sur les moyens d’existence en
milieu rural, en particulier dans l'AEM. Dans les zones
essentiellement agricoles – comme c'est le cas pour la zone
étudiée – l'année de consommation commence avec la
récolte principale et se poursuit pendant 12 mois jusqu’à
avant le début de la prochaine récolte. Les mois pendant et
après la récolte sont des mois d'abondance relative au cours
desquels les ménages consomment et vendent leurs propres
récoltes ; en revanche, les mois précédant la récolte sont
généralement des mois difficiles, surtout pour les plus
pauvres, car les récoltes sont épuisées et les prix des denrées
de base sont élevés. Une année de consommation prend en
compte toutes ces variations sur une période de douze mois.
Dans un contexte où le principal aliment de base est le
manioc, il n'est pas possible de déterminer la récolte
principale car le manioc ne présente aucune saisonnalité et
peut être planté et récolté toute l'année. Les ménages le
récoltent au besoin. La saison de récolte principale a donc été
déterminée sur la base de l'arachide, l'une des principales
cultures secondaires, qui est récoltée en mai. L’année de
référence pour cette zone s'étend donc du mois de mars de
chaque année civile au mois de février de l'année civile
suivante.
Toutes les données d'une étude de référence de l'AEM se
réfèrent à une année de référence, qui est une année de
consommation récente au cours de laquelle la sécurité
alimentaire et des moyens d’existence étaient « normale » ou
« typique ». Il s'agit d'une année au cours de laquelle la
production végétale et animale n'a pas été sensiblement plus
élevée ou plus faible que d'habitude, et au cours de laquelle il
n'y a pas eu d'événements importants (tels qu'un cyclone ou
une grave perturbation du marché) qui pourraient entraîner
un changement important dans les moyens d’existence des
ménages.
Pour sélectionner l’année de référence pour la zone de
moyens d'existence étudiée, l'équipe a analysé les données
sur la production agricole et les précipitations au niveau du
district. Une première sélection a ensuite été confirmée ou
modifiée au besoin au cours d'entrevues avec des
représentants du gouvernement au niveau du district et des
informateurs clés au niveau de la commune. L’année de
référence pour la zone est mars 2018 – février 2019, la
dernière année de consommation entièrement achevée.
14 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
1 The Practitioners’ Guide to the Household Economy Approach, The Food Economy Group (FEG) and Save the Children UK, 2008. Le guide est disponible à
l'adresse : http://foodeconomy.com/resources/
DESCRIPTION DE LA ZONE
La zone de moyens d’existence Forêt Dense De Chaillu (CG05)
est principalement située dans les départements de la
Lékoumou et du Niari mais s'étend également un peu dans le
département de la Bouenza. Elle se caractérise par les zones
cultivées les plus élevées du pays, qui se situent entre 600 et
800 mètres d’altitude, et par une faible densité de population.
Le climat est tropical avec des températures entre 19 et 30
degrés Celsius, les précipitations varient du sud au nord de
1 400 à 1 800 millimètres par an et les sols sablo-argileux sont
modérément fertiles. La population vit d’une agriculture de
subsistance. Elle cultive des cultures vivrières et des cultures
de rente spécialisées, élève du bétail et exploite des
ressources sauvages de la forêt.
La principale culture de base est le manioc. L’arachide, la
banane douce et le plantain, produits en volume important,
peuvent être considérés à la fois comme culture de
consommation et de rente. En outre, on produit du maïs, du
taro, des fruits du safoutier, et des cultures maraichères. Les
agriculteurs n'utilisent ni machines agricoles, ni engrais ou
pesticides. En conséquence, les surfaces cultivées et les
rendements sont relativement modestes. Des ménages
pauvres cultivent entre un quart et un demi-hectare et les
ménages plus aisées entre un et deux hectares.
L’accès à la terre est libre et les ménages peuvent cultiver
autant de terre qu'ils veulent. La production des ménages est
donc déterminée par la main d'œuvre au sein du ménage et
des moyens dont ils disposent pour employer de la main
d'œuvre additionnelle.
Ce sont les ménages moyens et aisés qui emploient des
membres de ménages plus pauvres pour travailler dans leurs
champs. Cela leur permet de cultiver des champs plus vastes.
La rémunération pour les travaux agricoles se situe entre 500
et 2 500 FCFA par jour, selon le lieu et le travail à effectuer.
Les travaux typiques comprennent la préparation de la terre,
le semis, le sarclage et la récolte.
La forêt offre, entre autres, des feuilles de gnétum, des
champignons, des fruits sauvages, des lianes et des feuilles
utilisées dans l'artisanat, et du gibier. Tous ces produits sont
commercialisés. Bien que la région bénéficie d'un bon réseau
d'eau qui permet la pêche, cette activité reste modeste.
Dans les villages visités, la propriété du bétail était modeste et
se composait principalement de petits ruminants. Seuls les
ménages riches ont déclaré des ventes de bétail, mais ils ne
semblent pas les considérer comme une source de revenus
significative. Ils semblent manquer de relations commerciales
établies pour faire de l'élevage une source de revenus fiable
et importante. De ce fait, le temps et l'argent qu'ils consacrent
à l'élevage sont limités.
Outre l’agriculture et l’élevage, la population de la zone exerce
également des activités génératrices de revenus. Les
ménages aisés font du commerce et les ménages pauvres
travaillent comme main d’œuvre agricoles dans les champs
des ménages aisés. Des ménages individuels s'engagent
également dans des activités artisanales, mais celles-ci ne
sont pas caractéristiques de la majorité de la population.
La région est éloignée des principaux marchés (Pointe Noire,
Dolisie et Nkayi) et la plupart des routes de liaison sont en
mauvais état. Ceci limite les possibilités de commercialisation
des cultures, du bétail, et des ressources sauvages, bien que
la plupart des villages dans la zone se trouve proche des axes
principaux.
Les dirigeants communautaires n'ont pas été
systématiquement interrogés sur les priorités de
développement au cours du travail sur le terrain ; cependant,
lorsqu'ils en ont discuté, les informateurs ont parlé d'un
besoin de soutien agricole (technique, infrastructurel et
commercial – sous la forme, par exemple, de la distribution et
multiplication de boutures de manioc qui ne sont pas
attaquées par la mosaïque) et d'un besoin de réhabilitation
des routes.
MARCHÉS
Brazzaville et Pointe Noire abritent plus de la moitié de la
population du pays et sont les deux principaux marchés du
pays. Les deux villes sont reliées par une autoroute moderne
de 535 kilomètres, qui a été inaugurée en février 2016, et par
une ancienne ligne de chemin de fer qui date de 1934.
Aucune des deux connexions ne passe par la zone de moyens
d’existence Forêt dense du Chaillu.
Dans l'ensemble, l'accès aux marchés dans la zone est
médiocre en raison du mauvais état des routes principales et
du manque de routes secondaires pavées qui relient les
villages aux routes principales. La situation s'aggrave pendant
la saison des pluies, lorsque les routes non pavées
deviennent difficiles à emprunter.
Les ménages s'approvisionnent principalement sur les
marchés mensuels appelés "marchés forêt". Ces marchés se
déplacent d'un endroit à l'autre selon un cycle mensuel –
dans de nombreux cas, les lieux sont les capitales de district.
À une date fixe, les commerçants se rendent à un certain
endroit pour vendre diverses marchandises, et les ménages
des villages environnants viennent acheter. Pour le village de
Kengue, par exemple, la date du marché forestier est le 18 de
chaque mois. Les centres d'approvisionnement sont souvent
éloignés des villages et de nombreux ménages doivent
marcher pour s'y rendre car les principaux moyens de
transport disponibles - motos et taxis de brousse - sont
coûteux.
Pour obtenir un revenu, la plupart des ménages vendent des
produits agricoles comme le manioc, le chikwangue, les
arachides, les bananes douce et plantain et les fruits du
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 15
Profil des moyens d’existence
safoutier et quelques ménages vendent des petits ruminants.
La plupart de ces produits sont vendus localement aux
commerçants des grands centres comme Sibiti, Dolisie, Nkayi
et Pointe Noire, qui viennent dans les villages pour les
acheter. Plus rarement, des producteurs, ou des groupes de
producteurs, qui ont des moyens se réunissent pour louer un
camion pour transporter leurs produits vers l'un des centres
où des parents ou des membres de la famille élargie les
vendent. Les ménages ne semblent pas avoir de relations
commerciales établies et une grande partie des échanges
commerciaux semble se faire sur une base ad hoc. Les
commerçants se présentent et ils achètent, ou ils ne se
présentent pas.
Le rapport de zonage susmentionné note qu'une partie de la
production agricole de la zone est exportée vers le Gabon.
Cependant, lors des entretiens réalisés dans le cadre de cette
étude, les personnes interrogées n'ont pas explicitement
mentionné des relations commerciales avec des
commerçants gabonais. Cela pourrait être dû au fait que les
villages enquêtés n'étaient pas proches de la frontière ou que
les produits sont exportés par les différents marchés
mentionnés plus haut. Si nous n'avons aucune raison de
croire que les exportations vers le Gabon n'ont pas lieu, nous
ne savons pas quelle est leur importance pour les ménages
de la zone.
Enfin, une petite quantité de produits agricoles est vendue
sur les marchés locaux à la population locale.
La plupart des ménages ont fait état de difficultés à
commercialiser leurs produits avec succès. Il est très probable
que la principale raison en soit le mauvais état du réseau
routier reliant les zones rurales aux principaux marchés de la
région et que l'absence de relations commerciales stables et
bien établies soit une conséquence de la mauvaise
connectivité.
La demande de main d'œuvre locale est relativement élevée
au cours d'une année de production normale. Comme
susmentionné, les ménages moyens et aisés engagent les
ménages plus pauvres pour la préparation de la terre, le
semis, le sarclage, et la récolte. Les ménages plus pauvres
sont principalement des ménages qui ne peuvent, ou ne
veulent, pas cultiver leurs propres champs, et des ménages
autochtones qui ne sont pas habitués à cultiver pour vendre.
La migration de travail est quasiment inconnue.
HISTORIQUE, ALÉAS ET ANNÉE DE RÉFÉRENCE
L'évaluation de base se réfère à une période très spécifique
appelée « année de référence ». Dans la zone de moyens
d'existence CG05, l'année de référence couvrait la période de
consommation allant de mars 2018 à février 2019. Au cours
des entrevues avec les dirigeants communautaires, on a
demandé aux informateurs de classer les cinq dernières
années de consommation en fonction de leur sécurité
alimentaire et de leurs moyens d’existence : « 1 » indique une
mauvaise année et « 5 » une excellente année (voir le tableau
ci-contre). Le rendement de chaque année de consommation
est largement déterminé par la mesure dans laquelle le
manioc a été affecté par la mosaïque ou la pourriture des
cultures, ou par la mesure dans laquelle les champs ont été
ravagés par des animaux sauvages. Comme il s'agit
d'événements locaux, il n'est pas surprenant que la qualité de
l'année de consommation puisse varier considérablement
d'un village à l'autre.
Il est à noter que l'année de consommation 2019-2020 était
toujours en cours pendant les travaux sur le terrain. Il était
donc pas possible de la choisir comme année de référence
parce que les résultats des récoltes n’étaient pas encore
connus. Cependant, les ménages s'attendaient à une bonne
année.
L'année 2018-2019 étant en moyenne qualifiée d'année de
consommation normale, elle a été choisie comme année de
référence. Le principal avantage de choisir la dernière année
de consommation achevée est qu'il est plus facile pour les
ménages de se souvenir de la qualité de leur production, de
leurs revenus et de leurs dépenses.
Le responsable du secteur agricole de Sibiti a confirmé que
l'année 2018-2019 était une année qui peut être qualifiée
d'année « typique » ou « normale » et a ajouté qu'en général,
il n'y avait pas tant de variation dans la production moyenne
16 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Année de consom-
mation Score Évènements
2018-19 3
Certains villages ont fait état d'une
excellente année, d'autres d'une
moyenne année et d'autres encore
d'une année très mauvaise en raison de la mosaïque.
2017-18 3
Certains villages ont fait état d'une
bonne ou excellente année, d'autres d'une année moyenne et d'autres
encore d'une mauvaise année mau-
vaise en raison de la mosaïque ou de
la destruction des champs par des
2016-17 3
Certains villages ont fait état d'une
bonne ou excellente année, d'autres d'une année moyenne et d'autres
encore d'une mauvaise année mau-
vaise en raison de la mosaïque ou de
la destruction des champs par des
2015-16 3
Certains villages ont fait état d'une
bonne ou excellente année, d'autres d'une année moyenne et d'autres
encore d'une mauvaise année mau-
vaise en raison de la mosaïque ou de
la destruction des champs par des
2014-15 4
La plupart des villages ont fait état
d'une bonne ou excellente année. Il a
été mentionné que la mosaïque
n’était pas encore très présente dans ce temps
5 : une excellente saison pour la sécurité alimentaire des ménages
(P.ex. en raison de bonnes pluies, de bons prix, de bons rende-
ments agricoles, etc.)
4 : une bonne saison ou une saison supérieure à la moyenne pour la sécurité alimentaire des ménages
3 : une saison moyenne en termes de sécurité alimentaire des mé-
nages
2 : une saison inférieure à la moyenne pour la sécurité alimentaire
des ménages
1 : une mauvaise saison pour la sécurité alimentaire des ménages
(P.ex. en raison de la sécheresse, des inondations, des maladies
du bétail, des attaques de ravageurs)
d'une année à l'autre.
CALENDRIER SAISONNIER POUR L’ANNÉE DE
RÉFÉRENCE
Le calendrier saisonnier ci-dessous présente les principales
activités agricoles et évènements qui déterminent la vie des
ménages de la zone de moyens d'existence au cours d'une
année de consommation typique. Il commence avec la récolte
des arachides et du maïs en mars.
Il y a deux saisons des pluies dans la zone : une qui dure de
mars à mai et une autre qui dure d'octobre à décembre.
Néanmoins il n'y a qu'une seule saison agricole. Elle
commence par la préparation de la terre, qui débute à la mi-
juillet pendant la période sèche. Les ménages défrichent la
terre à la main – un travail difficile qui prend du temps et peut
durer jusqu’à octobre. Une fois que la saison des pluies a
commencé, les ménages commencent à planter, typiquement
en novembre. Les arachides et le maïs sont récoltés en mars
et avril. Le manioc est récolté toute l'année.
Le manioc est la principale culture. Bien que les gens le
plantent en même temps que leurs autres cultures, il n'est
idéalement récolté qu'après un cycle de 14 à 18 mois en
général. Si les ménages ont les moyens physiques et/ou
financiers de planter des quantités suffisantes, ils le feront de
manière à garantir un approvisionnement continu tout au
long de l'année. Les ménages non seulement consomment
leur propre récolte, mais en vendent aussi une partie pour
satisfaire leurs besoins de base. La quantité vendue dépend
de l'importance de la production.
Le manioc est vendu soit frais, soit sous forme de
chikwangue. Le chikwangue est un plat traditionnel qui se
prépare en faisant tremper les tubercules dans de l'eau et en
les émiettant à la main, en les tamisant et en enlevant les
fibres avec un couteau, en égouttant la pâte obtenue pendant
deux jours dans un sac, en travaillant la pâte à la main sur
une planche de bois avec un rouleau, en faisant cuire la pâte
à la vapeur et en enveloppant le produit final dans des
feuilles. L'ensemble du processus dure une ou deux
semaines. Le chikwangue est consommé quotidiennement
avec plusieurs types de feuilles notamment celles du gnétum
ou du manioc.
La récolte d'arachides est également consommée et vendue.
En général, les ménages conservent une partie de leur
production pour la consommation et en vendent la majeure
partie. En ce qui concerne le maïs, la production dans les
villages visités était plutôt faible et les ménages le
consommaient directement après la récolte en épis. Les
ventes étaient rares.
Les bananes douces et plantains sont également consommés
et vendus durant toute l’année. Les bananiers produisent
après 8 à 12 mois. Ils peuvent produire toute l’année, mais la
grande production intervient de juin à août. Comme c’est le
cas pour les arachides les ménages conservent une partie de
leur production pour la consommation et en vendent la
majeure partie.
La vente de bétail est limitée aux petits ruminants. Les
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 17
animaux sont vendus tout au long de l'année, mais seulement
occasionnellement et en petites quantités. Il peut y avoir un
pic pendant les festivités de la fin décembre et du début
janvier, ainsi que peu avant la tabaski. L'élevage est
clairement une activité secondaire et si la plupart des
ménages élèvent des animaux, ils ne semblent pas y
consacrer beaucoup d'efforts. En général, les animaux
parcourent les villages et mangent ce qu'ils trouvent sur leur
chemin et, de temps en temps, si un acheteur se présente, les
ménages peuvent décider de vendre un ou deux animaux.
Les maladies du bétail sont les plus fréquentes de juillet à
septembre. Toutefois, la plupart des décès de bétail
surviennent lorsque les animaux sont heurtés par des
véhicules.
Le travail agricole, qui est l'une des principales sources de
revenus des ménages pauvres, s'effectue pendant la période
de préparation des terres, de semis, de désherbage et de
récolte, entre la mi-juillet et la fin avril. En général, le travail
est effectué par un ou deux membres du ménage -
typiquement l'homme et la femme qui gèrent le ménage.
Les principales fêtes se déroulent en décembre et janvier
(Noël et nouvel an). Il s'agit de périodes de dépenses accrues
pour les ménages. Il en va de même pour le début de la
nouvelle année scolaire, qui a eu lieu en septembre. La
principale maladie humaine est le paludisme (le plus répandu
de décembre à février).
DÉCOUPAGE SOCIO-ÉCONOMIQUE
Le tableau ci-dessous démontre le découpage socio-
économique moyen rapporté par les informateurs clés
communautaires. Les ménages très pauvres, pauvres et de
classe moyenne comptent 6 à 8 membres, les ménages riches
8 à 10. Un ménage typique est constitué d'un couple marié,
de ses enfants et éventuellement des parents.
Tous les groupes socio-économiques ont libre accès à la terre
et produisent les mêmes cultures. Comme ils n'ont
généralement pas ou peu accès aux services techniques du
gouvernement, ils n'utilisent pas d'intrants et produisent
exclusivement à la main, leurs rendements restent inférieurs
à ce qui est possible.
Le principal déterminant de la richesse est l’accès à la main
d’œuvre pour cultiver des champs. La main d'œuvre peut
provenir des ménages eux-mêmes ou être embauchées.
Comme seuls les ménages aisés et moyens ont les moyens
financiers d'embaucher de la main d’œuvre agricole, ils sont
les seuls à pouvoir cultiver des champs suffisamment grands
pour satisfaire leurs besoins annuels en nourriture et en
revenus à partir de la production végétale.
Les ménages très pauvres et pauvres n'ont pas les moyens
financiers pour engager de la main d’œuvre et ils ne peuvent
pas produire suffisamment pour satisfaire leurs besoins
annuels en nourriture et en revenus. Ils sont obligés de
travailler dans les champs des ménages aisés et moyens pour
gagner un revenu et une nourriture supplémentaires (ils sont
payés en argent et/ou en nourriture). Il va sans dire que ce
fait réduit la quantité de terres qu'ils peuvent cultiver pour
leur propre bénéfice.
La richesse se manifeste également dans la propriété du
bétail. Seuls les ménages aisées et moyens possèdent des
petits ruminants. A noter que les ménages moyens possèdent
plus d’animaux que les ménages aisés. Le bétail est
nettement moins important en termes de nourriture et de
revenu que la production végétale.
La possession de volaille est un déterminant secondaire de la
richesse des ménages, mais son importance en tant que
source de nourriture et de revenus est très limitée.
Dans les villages avec une population autochtone, les
ménages autochtones sont principalement concentrés dans
le groupe de richesse des ménages très pauvres. Ces
ménages sont moins enclins à s'engager dans une production
agricole importante et plus intéressés par le travail dans les
champs des ménages moyens et aisés contre paiement en
espèces et/ou en nature. Ils sont également souvent
impliqués dans la cueillette de fruits sauvages.
Lors des discussions avec les informateurs clés des villages
visités, il est apparu clairement qu’au sein d’une même zone
de moyens d’existence, il existe de grandes différences
économiques entre les ménages en termes de leur capacité
physique et financière de cultiver et donc leurs capacités de
couvrir leurs besoins en nourriture et autres besoins de base.
Afin de comprendre pleinement la dynamique économique
d'une communauté, il est donc important de classer les
ménages en groupes d'actifs en fonction de leurs différences
économiques locales.
18 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
SOURCES DE NOURRITURE
Le graphique ci-dessous présente les sources de nourriture
pour les ménages des différents groupes de richesse dans la
zone de moyens d’existence entre mars 2018 et février 2019.
Les aliments sont présentés en pourcentage de 2 100 kcal par
personne et par jour pour une période de 12 mois. Le groupe
des ménages pauvres, le groupe des ménages moyens et
celui des ménages aisés ont pu accéder à 100 pour cent de
leurs besoins alimentaires minimaux au cours de l'année de
référence. Cependant, le groupe des ménages très pauvres
ne couvre que 93 pour cent de leurs besoins. Cela montre
que les ménages très pauvres ont des difficultés à couvrir
leurs besoins de base.
Il existe deux sources principales de nourriture dans cette
zone de subsistance : l'autoproduction et les achats. Ces
sources constituent entre 92 et 100 pour cent de la nourriture
consommée, selon le groupe de richesse.
La collecte et le paiement en nature ne sont une source de
revenus que pour le groupe des ménages très pauvres qui
démontre souvent une forte concentration de ménages
autochtones. La cueillette est une des activités principales des
ménages autochtones.
Les produits de l'élevage (c’est-à-dire lait, viande et œufs), les
cantines scolaires et l'aide alimentaire ne sont pas des
sources de nourriture dans cette zone de moyens d’existence.
Le manioc est la culture principale produite dans tous les
groupes socio-économiques. Le reste des calories provenant
de la propre production agricole provient surtout des
bananes, des arachides et des « autres cultures ». Pour le
groupe des très pauvres et le groupe des pauvres, la
contribution des « autres cultures » parvient principalement
de l'huile de palme. En revanche, le groupe des moyens et le
groupe des aisés ne produisent pas d'huile de palme. Pour
eux, la contribution des « autres cultures » provient
principalement du maïs et du fruit du safoutier.
La contribution de la propre production agricole aux besoins
alimentaires totaux augmente avec la richesse : pour le
groupe de richesse des très pauvres la contribution n’est que
52 pour cent tandis que pour les groupes de richesses des
pauvres, moyens et aisés la contribution est autour de 75
pour cent. Cela signifie que tous les groupes de richesses ont
besoin de compter sur le marché pour acheter des aliments.
Cependant, alors que le groupe des très pauvres et le groupe
des pauvres achètent principalement des aliments de base, le
groupe des moyens et le groupe des aisés achètent
principalement des aliments pour enrichir leur
consommation.
La contribution des aliments achetés autres que les aliments
de base aux besoins alimentaires dépend clairement de la
richesse : pour le groupe des très pauvres et pour celui des
pauvres, on parle de 6 et 5 pour cent et pour le groupe des
moyens et celui des aisés de 24 et 18 pour cent. Les ménages
moyens et nantis peuvent acheter une plus grande diversité
d'aliments non-alimentaires de base sur le marché étant
donné qu'ils couvrent un pourcentage élevé de leurs besoins
alimentaires de base par leur propre production. Les achats
non-essentiels comprennent les haricots, la viande, le poisson
séché et frais et des légumes. Les produits alimentaires sont
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 19
Dans ce graphique, l'accès à la nourriture est exprimé en pourcentage des besoins alimentaires minimums, pris comme un apport énergétique alimentaire moyen de 2 100
kcal par personne et par jour. Il est à noter que les aliments sont présentés en pourcentage de 2 100 kcal par personne et par jour pour une période de 12 mois.
principalement achetés au niveau du village ou sur les
« marchés forêt » hebdomadaires susmentionnés.
SOURCES DE REVENUS
Les graphiques ci-dessus et ci-contre montrent le revenu en
espèces d'un ménage type de chaque groupe socio-
économique, tant en termes absolus que proportionnels.
Dans l'ensemble, les ménages aisés gagnent généralement 2
fois plus que les ménages moyens, 5,7 fois plus que les
ménages pauvres et 6,4 fois plus que les ménages très
pauvres. A noter que la différence de revenus entre les
ménages très pauvres et pauvres n’est pas très grande.
Le tableau page suivante présente les fourchettes des
liquidités gagnées par chaque groupe.
Le point de départ pour comprendre ces différences dans les
niveaux de revenus en espèce est d'examiner les ventes de
cultures. Les ménages de tous les groupes vendent du
manioc, qui est de loin la culture la plus vendue. Ils vendent
aussi des quantités importantes de bananes, d’arachides et
d'autres cultures comme les fruits du safoutier, les courges.
Les ménage très pauvres et pauvres vendent en plus des
petites quantités d’huile de palme.
Comme mentionné ci-dessus les ménages très pauvres n’ont
pas la capacité physique et financière pour cultiver des
grands champs et peuvent donc pas générer des grands
surplus de cultures qu’ils peuvent vendre. Ceci explique la
grande différence de revenu entre ces deux groupes et les
groupes des ménages moyens et aisés.
Seuls les ménages moyens et les ménages aisés possèdent et
vendent du bétail. Il s’agit exclusivement de petits ruminants.
Pourtant, la vente de bétail n’a pas une grosse importance en
20 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Le graphique présente le revenu annuel total par ménage en espèces de francs CFA (XAF) selon la source de revenu. Le tableau ci-dessous fournit les détails pour chaque source.
Très
pauvres Pauvres Moyens Aisés
Vente de manioc 91 475 103 165 795 735 1 032 696
Vente bananes 28 200 48 690 168 455 312 745
Vente arachides 28 560 80 920 201 824 343 196
Vente autres ré-coltes
46 629 78 239 161 380 353 045
Vente bétail 0 0 230 000 168 000
Vente cueillette/chasse
179 168 39 000 0 628 065
Travail agricole 106 000 190 000 0 0
Travail non-agricole 0 0 0 72 000
Petit commerce 0 0 0 160 200
Total 505 799 538 764 1 553 386 3 069 947
Note: Les chiffres représentent le point médian de la fourchette des réponses issues des entretiens dans 8 communautés et sont le
résultant d’une analyse raisonné approfondie des données.
termes de revenus. Les ménages semblent voir leur petit
stock de bétail comme un compte d’épargne qui peut être
utilisé en temps de besoin.
En termes proportionnels, les ménages aisés tirent 67 pour
cent de leur revenu total de la vente de leurs récoltes, les
ménages moyens 85 pour cent, les ménages pauvres 58 pour
cent et les ménages très pauvres en tirent 41 pour cent. Le
moins un ménage gagne sur les ventes de cultures, plus il doit
dépendre d'autres sources de revenus en espèces, comme le
travail agricole, la cueillette, la vente de bétail, le petit
commerce et le travail non-agricole.
Les ménages très pauvres qui ne tirent que 41 pour cent de
leur revenu de la production agricole dépendent surtout de la
cueillette et du travail agricole. Ils tirent 37 pour cent de leur
revenu de la cueillette et 22 pour cent du travail agricole. La
cueillette est principalement pratiquée par les ménages
autochtones qui sont fortement représentés dans ce groupe
socio-économique. Ils cueillent des asperges sauvages, des
champignons et de feuilles de gnétum.
Les ménages pauvres tirent 58 pour cent de leur revenu de la
production agricole. En outre, ils dépendent principalement
du revenu du travail agricole – dans une plus large mesure
que les ménages très pauvres. Les ménages pauvres y tirent
35 pour cent de leur revenu. Bien qu’ils pratiquent aussi la
cueillette, cette activité ne produit que 7 pour cent de leur
revenu.
Les ménages moyens et aisés se lancent également dans la
vente de bétail pour générer des revenus. Cependant cette
activité n’est pas très importante. Les ménages ne vendent
que quelques animaux par année. Les ménages moyens y
tirent 15 pour cent de leur revenu et les ménages aisés
uniquement 5 pour cent. Les ménages pauvres et très
pauvres ne possèdent pas de bétail.
La chasse est une source de revenu importante pour les
ménages aisés (figurant sous cueillette). Bien que les
ménages aisés ne chassent pas dans tous les villages,
lorsqu'ils le font, cette activité génère un revenu important.
On parle d’une activité qui n’est pas typique pour le groupe
socio-économique mais néanmoins significative dans la zone
de moyens d’existence.
Dans certains villages, les ménages aisés pratiquent le petit
commerce. Comme pour la chasse, les ménages aisés ne
pratiquent pas cette activité dans tous les villages, mais
lorsqu'ils le font, ils en tirent un revenu important. Là encore,
l'activité n'est pas typique mais significative dans la zone
d’existence.
Contrairement à la différence entre les ménages très pauvres
et les ménages pauvres en terme du revenu total en espèces,
l'écart entre les ménages moyens et les ménages aisés est
important. En effet, les aisés gagnent plus d'argent de la vente
de leur propre production agricole que gagnent les moyens
de toutes leurs sources de revenus combinées.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 21
Le graphique présente le revenu annuel total en espèces par ménage en pourcentage du revenu annuel en espèces
POSTES DE DÉPENSES
Le graphique ci-dessus présente les tendances des dépenses
pour l'année de référence mars 2018 à février 2019. Alors que
les dépenses absolues augmentent avec la richesse en
fonction des recettes totales en espèces, la ventilation des
dépenses par pourcentage dans ce graphique montre le
montant relatif des recettes consacrées aux différentes
catégories.
Les ménages de tous les groupes doivent couvrir une série de
dépenses essentielles tout au long de l'année, y compris les
aliments de base, autres aliments, articles ménagers (sel,
savon, café, etc.), intrants productifs, santé et éducation,
vêtements et autres articles divers.
Bien que les ménages des quatre groupes socio-économiques
dépensent de l'argent dans presque toutes ces catégories, il
existe de grandes différences – tant en termes proportionnels
qu'absolus – quant au montant que chaque groupe socio-
économique dépense dans chaque catégorie. Les dépenses
consacrées à l'alimentation de base en sont l'exemple le plus
frappant : les ménages très pauvres y consacrent 33 pour
cent de leur revenu monétaire total, contre 20 pour cent pour
les pauvres, 3 pour cent pour les moyens et 1 pour cent pour
les aisés. Cela signifie qu'en plus de gagner moins que les
deux groupes supérieurs, les très pauvres et les pauvres
dépensent une majeure partie de leur argent pour
l'alimentation de base et disposent donc proportionnellement
de beaucoup moins d'argent pour acheter d'autres produits
alimentaires, afin d'enrichir leur alimentation ,et des produits
non-alimentaires. La denrée de base principale est le manioc
(sous forme de chikwangue et, dans une moindre mesure, la
farine de manioc), suivi du riz.
Les ménages très pauvres dépensent environ 21 pour cent de
leur revenu monétaire sur les aliments autre que les aliments
de base, les ménages pauvres 18 pour cent et les ménages
aisés 19 pour cent. Le pourcentage est légèrement plus élevé
pour les ménages moyens, soit 27 pour cent. La catégorie
« autre nourriture » comprend les haricots, l'huile, le sucre, la
viande, le poisson frais et fumé ainsi que les légumes.
Si l’on regarde les dépenses en termes réels par personne
dans les quatre différents groupes socio-économiques, on
constate que les ménages aisés dépensent autour de 40 pour
cent de plus que les ménages moyens pour des aliments non
essentiels, et autour de 6 fois plus que les ménages pauvres
et très pauvres. En d'autres termes, plus un ménage est riche,
plus il peut dépenser pour des aliments autres que les
aliments de base et plus son alimentation est diversifiée. Il est
important de noter ici que les très pauvres et les pauvres
n'achètent généralement pas de viande ou de légumes et –
comme prévu – tous les autres articles en plus petites
quantités que les deux autres groupes. Être très pauvre ou
pauvre, c'est avoir une alimentation pauvre.
Si l'on examine les dépenses alimentaires totales (de base +
autres), on constate que les ménages très pauvres consacrent
54 pour cent de leur budget à l'achat de nourriture, les
22 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Le graphique présente le revenu annuel total par ménage en espèces de francs CFA (XAF) selon la source de revenu.
ménages pauvres 38 pour cent, les ménages moyens 28 pour
cent et les ménages aisés 20 pour cent.
Tous les groupes de ménages dépensent de l'argent pour des
produits ménagers. Ces produits incluent le café, les
condiments (comme le sel et des cubes Maggi), le savon et les
ustensiles. La part du revenu consacrée à ces produits
diminue à mesure que le revenu augmente. Alors que les
ménages très pauvres et pauvres dépensent environ 10 pour
cent de leur revenu pour les articles ménagers, les ménages
moyens dépensent environ 7 pour cent et les ménages aisés
environ 4 pour cent.
Les intrants ne sont achetés que par les ménages moyens et
aisés. Dans la zone de subsistance, ces intrants ne sont
constitués que par le travail agricole et les animaux. Les
ménages n’achètent pas d’intrants agricoles comme l’engrais,
les pesticides, les semences, ou des vaccins pour le bétail.
Tous les ménages procurent aussi des « services sociaux » –
c’est-à-dire des services de santé et des services d’éducation.
Les dépenses de santé et d’éducation représentent 14 pour
cent pour les ménages très pauvres, 27 pour cent pour les
ménages pauvres, 22 pour cent pour les ménages moyens et
14 pour cent pour les ménages aisés. Il n'y a pas de tendance
proportionnelle claire entre les groupes socio-économiques
dans ce cas-ci. Toutefois, si l'on examine les montants absolus
dépensés pour ces services, on constate que les ménages
aisés dépensent 28 pour cent de plus que les ménages
moyens, environ 3 fois plus que les ménages pauvres et
presque 7 fois plus que les ménages très pauvres. Une partie
de cette énorme différence entre les ménages aisés et
moyens, d'une part, et les ménages pauvres et très pauvres,
d'autre part, est due au fait que les ménages aisés et moyens
envoient généralement certains enfants à l'école dans les
villes, ce que les ménages pauvres et très pauvres ne font
généralement pas.
Les dépenses d'habillement représentent 5 pour cent du
revenu total gagné par les ménages très pauvres, 7 pour cent
pour les ménages pauvres, 8 pour cent pour les ménages
moyens et 7 pour cent pour les ménages aisés. Si les parts
des dépenses sont assez similaires, les montants absolus
consacrés à l'habillement varient bien sûr de manière
significative. Les ménages aisés dépensent près de 70 pour
cent plus que les ménages moyens, près de 6 fois plus que les
ménages pauvres et près de 9 fois plus que les très pauvres.
Enfin, la catégorie « autres » comprend les dépenses de
transport, de communication (crédit téléphone), pour les
fêtes, des obligations communautaires et autres dépenses
non-essentielles. Comme on pouvait s'y attendre, les
liquidités restantes pour ce type de dépenses augmentent
proportionnellement et absolument avec la richesse. Ainsi, les
ménages aisés dépensent près de 3 fois plus que les ménages
moyens, plus de 9 fois plus que les pauvres et plus de 10 fois
plus que les très pauvres.
SEUIL DE SURVIE ET DE PROTECTION DES
MOYENS D’EXISTENCE
L'établissement de seuils est essentiel pour savoir si les
ménages produisent suffisamment de nourriture et d'argent
pour satisfaire leurs besoins de base et pour déterminer
quand intervenir et comment mesurer le succès d'une
intervention. Dans l'AEM, deux seuils communs sont utilisés :
• Le seuil de survie (ligne rouge dans le graphique ci-
après) : les coûts pour qu'un ménage puisse subvenir
à ses besoins de survie les plus élémentaires, y
compris 100% de ses besoins caloriques minimaux,
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 23
ses besoins en eau (si de l'eau est achetée), ses
moyens de préparation des aliments (ustensiles de
base, kérosène ou bois de chauffage, et savon). Un
déficit de survie devrait déclencher une intervention
pour sauver des vies.
• Le seuil de protection des moyens d’existence (ligne
bleue dans le graphique ci-dessous) : les coûts pour
un ménage pour satisfaire ses besoins de survie les
plus élémentaires ainsi que pour maintenir ses
moyens d’existence et répondre aux standards de vie
dans le contexte local, y compris les intrants
productifs, la santé, la scolarité et les articles
ménagers essentiels. Un déficit de protection des
moyens d'existence devrait déclencher une
intervention pour soutenir les moyens d'existence.
Les informations pour générer les seuils proviennent des
données de la ligne de base sur les patrons de dépenses.
Pour la plupart des produits alimentaires, articles et services
de base, c’est le schéma de dépenses de ménages pauvres
durant l’année de référence qui est utilisé comme seuil ;
représentant la dépense minimale adéquate dans le contexte
local. Néanmoins, toutes les valeurs peuvent être révisées
facilement dans l’outil AEM. Les détails peuvent être trouvés
dans la base de données qui accompagne ce rapport ; le
tableau de synthèse (page précédente) indique la
composition des seuils par groupe socio-économique (en
Franc CFA).
En AEM, le concept de « revenu total (nourriture + cash) » est
utilisé pour analyser la contribution des sources de nourriture
et les sources de revenus combinées utilisant une seule unité
de mesure : la contribution des différentes sources sous
forme de pourcentage des besoins énergétiques minimaux
pour un ménage (sur la base de 2 100 kcal par personne par
jour) ; ou bien, sous forme de la valeur économique des
différentes sources utilisant la devise locale. Pour effectuer le
calcul, soit les apports calorifiques sont transformés en
valeurs économiques, soit les revenus sont transformés en
apports calorifiques. Les deux calculs utilisent un panier
alimentaire adapté au contexte local pour calculer son coût.
Dans le graphique ci-dessous, nous pouvons voir la valeur du
panier de survie, qui est le même pour tous les ménages
puisqu'il est basé sur le même panier de produits de
première nécessité. Le seuil de protection des moyens
d'existence par contre est différent dans chaque zone de
moyens d'existence et pour chaque groupe, car les coûts du
maintien des moyens d'existence diffèrent selon le système
de production et le groupe socio-économique.
Le seuil de protection des moyens d'existence et le revenu
total peuvent être utilisés pour calculer une mesure de la
sécurité des moyens d'existence.
En divisant le « revenu total » par le seuil de protection des
moyens d’existence, on obtient une mesure de la sécurité des
moyens d’existence des ménages, le « score de protection des
moyens de existence des ménages ».
24 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Le graphique présente le « revenu total » exprimé en kilocalories (100% = 2 100 kcal par jour par personne) et les deux seuils utilisés en AEM.
Ce score est de 1.15 pour les ménages très pauvres, 1.23 pour
les ménages pauvres, 1.64 pour les ménages moyens et 1.85
pour les ménages aisés. Le score peut être interprété comme
suit : dans l'année de référence, le revenu des ménages très
pauvres, par exemple, était de 15 pour cent supérieur à ce
dont ils ont besoin pour assurer leur survie et maintenir leurs
moyens d’existence selon les normes locales.
ALÉAS
Les principaux aléas chroniques (c'est-à-dire ceux qui
surviennent chaque année) sont les maladies des cultures
(surtout la mosaïque, mais aussi la pourriture), des ravageurs
et la destruction des champs par des animaux sauvages (par
exemple éléphants, porc-épic). Les ravageurs et les maladies
des cultures sont les plaintes les plus fréquentes dans tous
les villages – toutes les récoltes peuvent être affectées et
endommagées et les ménages n'ont pas de moyens pour
intervenir.
Les principaux aléas périodiques sont les suivants :
• L’insuffisance ou mauvaise répartition de la
pluviométrie ce qui nuit à la croissance des cultures.
Le phénomène peut être très local.
• Une pluviométrie trop forte et mal repartitionnée qui
prévient la préparation des terres. Le phénomène
s’est produit dans quelques-uns des villages visités et
était très local.
• Des feux de brousse peuvent détruire des champs de
manioc en saison sèche.
STRATÉGIES D’ADAPTATION
En réponse aux aléas et aux années de mauvaise production,
les ménages tentent de répondre à leurs besoins alimentaires
minimaux et à leurs besoins en liquidités par le biais d'un
certain nombre de stratégies. Ces stratégies sont détaillées ci-
dessous pour cette zone de moyens d’existence :
• Tous les ménages réduisent leurs dépenses en
articles non-essentiels ou « de luxe », comme la
viande, le sucre, l'huile, le café, les vêtements et
même les transports. Les ménages les plus pauvres
peuvent remplacer leurs achats de riz et d’autre
nourriture par des achats de manioc, qui est moins
cher.
• Les ménages très pauvres et pauvres tentent
d'augmenter leurs revenus en intensifiant la
recherche de la main-d'œuvre agricole dans les
champs des ménages moyens et aisés. Cependant, il
n’est pas toujours possible de trouver plus de travail.
Ceci peut notamment être le cas si les ménages
moyens et aisés sont aussi affectés par la crise.
• L'une des stratégies adoptées par certains ménages
pour faire face à la mosaïque et au délabrement
consiste à augmenter la superficie cultivée pour
compenser les pertes de récoltes et maintenir leur
récolte totale stable. Il va sans dire que seuls les
ménages qui ont les moyens physiques et financiers
d'augmenter la surface cultivée peuvent adopter cette
stratégie.
PARAMÈTRES CLÉS POUR LE SUIVI DE LA
SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
Les principaux paramètres énumérés dans le tableau ci-
dessous sont les sources de nourriture et de revenus qui
contribuent de manière substantielle2 à l'économie des
ménages dans la zone d’existence CG05. Celles-ci devraient
faire l'objet d'un suivi afin d'indiquer les pertes ou les gains
potentiels pour les économies locales des ménages, soit par
le biais de systèmes de suivi permanent, soit par des
évaluations périodiques. Il est également important de
surveiller les prix des principaux postes de dépenses, y
compris les denrées alimentaires de base.
RECOMMANDATIONS
Les recommandations suggérées ci-après, comprennent
celles qui ont été mises en évidence par les personnes
interrogées elles-mêmes et celles qui ont été faites par
l'équipe d'évaluation à la suite de discussions détaillées et
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 25
Paramètre clé -
Quantité
Paramètre clé - Prix
au producteur
Cultures
Manioc - production totale
Arachides – production totale
Bananes douce – pro-duction totale
Bananes plantain – pro-duction totale
Fruit du safoutier – pro-duction totale
Huile de palme – pro-duction totale
Prix manioc
Prix maïs
Prix arachides
Prix bananes
Prix produits marai-chage
Prix autres cultures de rente
Production animale
Petit ruminants – nombre vendu
Prix petit ruminants
Autres sources de nourriture et revenu
Main-d'œuvre agricole locale (pré-récolte) –demande locale
Main-d'œuvre agricole locale (récolte) - de-mande locale
Main-d'œuvre agri-cole locale (pré-récolte) - taux de rémunération
Main-d'œuvre agri-cole locale (récolte) - taux de rémunération
Dépenses (denrée de base)
Manioc (chikwangue)
2 En AEM un paramètre clé est une source de nourriture ou de revenu qui contribue un minimum de 10% du « revenu total » pour un seul groupe socio-
économique ou un minimum de 5% du « revenu total » pour au moins deux groupes socio-économiques.
d'observations sur le terrain. Toutes ces suggestions
nécessitent d'autres études de faisabilité détaillées. Il est à
noter que les dirigeants communautaires n'ont pas été
systématiquement interrogés sur les priorités de
développement au cours du travail sur le terrain ; ainsi, les
recommandations présentées ne sont donc pas le résultat
d’une étude systématique.
• Réhabilitation et aménagement des routes principales
pour faciliter l’accessibilité aux marchés et accroitre le
développement économique de la zone ;
• Soutien du service technique pour trouver des
solutions pour faire face à la mosaïque et à la
dégradation. Dans différents villages, les ménages ont
suggéré la poursuite des programmes visant à fournir
des boutures saines.
26 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
29 Date | Report title
PARTIE 4
PROFIL DES MOYENS D’EXISTENCE
Household Economy Analysis (HEA)
ZONE CG09 - Pêche artisanale des
grands fleuves et cultures vivrières
Rapport préparé par : Garba Noura, Food Economy Group
(FEG)
Rapport préparé pour : Programme Alimentaire Mondial
(PAM) République du Congo
Equipe de collecte :
• Gautier Josias MASSAMOUNA (PAM)
• Bassonga Kossat Hemervy Gloire Destin
• Kissita Landhou Marina Nupcia
• Wando Georgy Patience
• Matsima Khen
• Garba Noura (Consultant FEG et chef d’équipe)
REMERCIEMENTS
Nous remercions vivement de manière générale les staffs du
Programme Alimentaire Mondial de la République du Congo à
tous les niveaux pour la bonne et constante collaboration
pendant notre séjour. Nos remerciements vont
particulièrement à l’équipe VAM et Innovation du PAM ainsi
que l’équipe de collecte pour son dynamisme et son
abnégation mais aussi à Josias Gautier MASSAMOUNA
(Assistant senior du programme VAM et innovation, unité
suivi évaluation – PAM Congo Brazzaville) pour son appui
continu tout au long de cet exercice. Nos remerciements
s’étendent aussi aux agents du Ministère de l'Agriculture, de
l’Elevage et de la Pêche (MAEP) pour leur savoir-faire ainsi que
leur contribution tout au long de cet exercice.
Nous ne saurions terminer sans adresser nos remerciements
les plus sincères aux autorités administratives et coutumières
des districts et villages pour leurs soutiens, mais aussi et
surtout aux populations des villages visités pour leur
collaboration et le partage de leurs vies économiques sans
ambages. Qu’elles trouvent toute notre profonde
reconnaissance.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 31
Dans cette zone de pêche artisanale des grands fleuves avec
cultures vivrières, la production agricole est le pilier des
moyens d’existence de tous les groupes socio-économiques -
des nantis aux très pauvres - bien qu’il existe d’autres activités
économiques. La production des tubercules notamment le
manioc mais aussi des légumineuses (dont l’arachide et le
haricot), des bananes, constituent non seulement les
principales sources de nourriture mais aussi de revenus.
Malgré de nombreuses similitudes dans les moyens
d’existence, il existe de grandes différences de niveau de vie
au sein de ces populations rurales. Tous les groupes étudiés
vivent avec des revenus très modestes mais entre les nantis
et les très pauvres, il existe une différence remarquable de
revenu en argent liquide, ce qui se traduit par des capacités
très diverses à accéder à une alimentation plus ou moins
appropriée, aux soins de santé, à l’éducation et à faire face
aux situations de stress notamment la période d’inondation
qui affectent la zone.
Concernant leur alimentation, la population très pauvre,
estimée à 33% des ménages, ne couvre que 99% de leurs
besoins alimentaires de base (énergétiques) malgré le
potentiel agricole de la zone. Pour les Pauvres qui
représentent 27% des ménages de la zone, l’ensemble de
leurs revenus serait tout juste suffisant pour accéder à une
alimentation permettant de couvrir leurs besoins
énergétiques. Ces ménages seraient en difficulté encore plus
grande pour couvrir leurs autres besoins nutritionnels. Alors
comment la vulnérabilité et la résilience changeraient-elles
dans ces ménages après un choc, notamment la réduction de
la production agricole due à l’inondation ?
L’écrasante majorité des ménages (60%) est dans les
catégories très pauvres et pauvres. Ces ménages se
caractérisent pour l’essentiel par une taille de ménage assez
réduite (6 et 8 personnes), disposant de faibles capacités de
production (1 ha de superficie exploitée en saison des pluies)
et un troupeau de taille très réduite constitué essentiellement
de petits ruminants et de volailles. Les nantis et les moyens
(40% des ménages avec respectivement 11 à 9 personnes)
mettent en valeur respectivement 6,5 et 4 ha. Ils disposent
d’un troupeau de plus grande taille composé aussi de petits
ruminants. Les nantis et les moyens font également la
différence avec la possession de moyens de production
notamment l’emploi de la main d’œuvre agricole.
L’analyse des revenus montre une nette disparité entre les
différentes catégories socio-économiques. Les ménages
nantis ont gagné plus de 6 fois plus de revenu monétaire que
les ménages très pauvres et 5 fois plus que les ménages
pauvres. Rapporté à la taille du ménage le revenu annuel par
personne selon les groupes socio-économiques est de 191
981 FCFA chez les très pauvres, 173 960 FCFA chez les
pauvres, 518 454 FCFA chez les moyens et 689 144 FCFA chez
les nantis. Cette situation illustre parfaitement la fragilité
économique des ménages très pauvres et pauvres de cette
communauté. Ce niveau de pauvreté ambiant limite
fortement l’écrasante majorité des ménages notamment les
très pauvres et pauvres à faire des investissements
importants dans des activités économiques qui leur
permettent de générer plus de bénéfice, à diversifier leur
alimentation et à investir davantage dans la santé ainsi que
l’éducation. En effet, les dépenses de santé demeurent
relativement faibles, quelque soit le niveau de revenu du
ménage, en raison de l’éloignement des centres de santé et
de la pauvre qualité des soins qui y sont dispensés. Les
dépenses liées à l’éducation sont elles particulièrement
élevées, même pour les ménages les plus pauvres, qui
envoient leurs enfants à l’école, au prix de privations,
notamment alimentaires. Cet élément est bien entendu
positif pour l’avenir des enfants de la zone et les ménages les
plus en difficultés nécessiteraient un support pour que leurs
enfants puissent accéder à de meilleures conditions à un
niveau supérieur de scolarisation.
La période la plus difficile pour la sécurité alimentaire et la
nutrition des ménages, principalement des ménages très
pauvres et pauvres dans la région est de septembre à
novembre mais aussi de mars à mai qui coïncide avec la
période de pluie et la hausse des prix sur les marchés ainsi
que l’épuisement des stocks de la production.
Il est à noter que la zone d’étude, bien qu’étant considérée
comme une zone à fort potentiel agricole, est
particulièrement affectée par des inondations périodiques
provoquant le déplacement des populations. Les habitants de
la zone essaient toujours de réinvestir pour reconstruire leurs
moyens d’existence fortement affectés par les inondations
tout en faisant face aux difficultés quotidiennes pour assurer
leur survie et celle de leur famille. La situation résiduelle peut
se résumer dans les mots d'un chef du village, qui fait écho à
de nombreux commentaires similaires : « La terre est très
fertile chez nous, il suffit seulement de travailler pour avoir
une bonne production, mais notre grande préoccupation,
c’est l’inondation parce que quand elle arrive, nous devons
partir et nous cacher soit dans la forêt, soit dans les villages
ou les districts environnants. Et avec cette situation, toutes
nos activités commerciales sont arrêtées. »
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 32
Introduction
Le Congo, comme les autres pays de l’Afrique subsaharienne
traverse une période de difficultés économiques et
financières sérieuses depuis la crise du pétrole en 2014-2015.
C’est dans ce cadre qu’intervient la formulation du nouveau
Programme National de Développement (PND) 2018-2022, à
travers lequel, l’attention de l’État porte sur des secteurs très
sélectifs et restreints, parmi lesquels la diversification de
l’économie pour accélérer la croissance et renforcer sa
résilience.
Le contexte d’insécurité alimentaire et nutritionnelle qui
prévaut au Congo depuis quelques années impose une
compréhension approfondie de la situation socio-
économique des ménages.
L’analyse globale de sécurité alimentaire et de la vulnérabilité
(AGSAV) estime qu’en 2014, au total, 14,2% des ménages
congolais étaient en insécurité alimentaire par rapport à la
diversité et à l’équilibre nutritionnel de leur alimentation par
opposition à son adéquation en termes caloriques. Les
pratiques alimentaires des ménages restent tributaires du
contexte socio-économique et agropastoral national. Selon
l’indice de la faim (GHI), le Congo a un score alarmant qui a
augmenté de 18,4 en 2005 à 20,5 en 2013. Le chômage
touche 7% de la population active. Entre 2005 et 2011, la
population vivant en dessous du seuil de pauvreté est passée
de 50,7% à 46,5%. Il est très probable que la crise ait
engendré une détérioration de la situation avec une
augmentation du taux de chômage et de l’incidence de la
pauvreté.
En effet la convocation et la tenue d’une élection
présidentielle anticipée le 20 mars 2016, aura fini de justifier
l’intrusion dans les quartiers sud et sud-ouest de Brazzaville,
d’une bande armée dans la nuit du 03 au 04 avril 2016. Les
autorités gouvernementales feront immédiatement le lien
avec la milice N’silulu du Pasteur N’toumi en cabale dans le
Département du Pool. Ainsi, se décline le rebondissement de
la crise dite du Pool dans son développement avec sa cohorte
de conséquences sécuritaires, humanitaires, sanitaire, et bien
plus. Pendant cette période, plusieurs personnes du
département du Pool se sont trouvées en situation d’urgence,
obligée de trouver refuge chez des amis, des parents ou dans
une paroisse. Des milliers d’enfants ont été privés de
scolarité, et des milliers de personnes malades ou de femmes
enceintes n’ont pas pu accéder à des soins de base dans leurs
districts respectifs. Des taux de malnutrition bien supérieurs
au seuil d’urgence ont été constatés parmi les enfants
déplacés dans le département du Pool ou le département
voisin de la Bouenza. Ainsi les données de la dernière
enquête nutritionnelle menée en mai 2017 dans les
départements de la Bouenza et du Pool rapportent une
prévalence de 17% de malnutrition aiguë globale, dont 5,3%
de forme sévère (MAS), chez les enfants de moins de 5 ans
parmi les déplacés et les familles d’accueil. Pour les enfants
des familles d’accueil et ceux de la population des localités
ciblées, une prévalence de MAS 6,4% selon l’enquête MICS
2014-2015 a été retenue dont 1,7% de forme sévère.
Dans le but de mieux comprendre l’évolution de la sécurité
alimentaire et des moyens d’existence en période de conflit
en République du Congo, le PAM prévoit d’implémenter
l’approche basée sur l’Analyse de l’Economie des Ménages
(AEM – HEA) qui permettrait d’avoir des informations
conséquentes pour renseigner les réponses (ciblage des
ménages, types d’interventions, etc.). C’est pourquoi la
présente base de référence au niveau de la zone de moyens
d’existence CG09 appelée « Pêche artisanale des grands
fleuves, cultures vivrières » a été organisée. Les données
fournies dans le présent rapport portent sur la période allant
de juin 2018 à mai 2019, qui est une période avant-inondation
qui a beaucoup affectée les populations résidentes. Nous ne
disposons d'aucune étude de référence équivalente dans la
zone qui nous permettrait d'évaluer correctement les
différences au sein de cette communauté, par exemple en ce
qui concerne la richesse absolue des villageois, ou les
proportions appartenant aux quatre classes de richesse
définies, ou les niveaux de production agricole ou les types et
valeurs des activités commerciales. En même temps, si l'on
veut considérer la situation décrite dans le présent rapport de
manière générale comme une nouvelle « normalité », il est
trop tôt pour évaluer dans quelle mesure elle peut encore
évoluer. Ce que la base de référence donne, c'est une mesure
solide par rapport à laquelle on pourrait évaluer des
changements éventuels à court ou à long terme.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 33
Contexte et justification
34
Cette section explique certains des termes clés utilisés dans
l'AEM et dans les profils.
Zone de moyens d'existence : Une zone de moyens
d’existence est un environnement géographique dans lequel
les communautés qui y vivent partagent à peu près les
mêmes modèles d'accès à la nourriture (c'est-à-dire qu'elles
cultivent en général les mêmes cultures, élèvent les mêmes
types de bétail, etc.). Elles partagent également, dans
l'ensemble, le même accès aux marchés. Les modes
d’existence varient clairement d'une région à l'autre. Des
facteurs locaux tels que le climat, le sol, l'accès aux marchés,
etc. influencent tous les modes d’existence. La première
étape d'une Analyse de l'Economie des Ménages consiste
donc à effectuer un zonage des moyens d’existence. Il
délimite des zones géographiques à l'intérieur desquelles les
gens partagent essentiellement les mêmes schémas d'accès à
l'alimentation et il offre donc une division géographique
rationnelle pour les enquêtes de base sur les moyens
d’existence et sur la sécurité alimentaire en milieu rural.
Découpage socio-économique : Le lieu de vie d'un ménage
est l'un des facteurs qui détermine ses options pour obtenir
de la nourriture et générer des revenus. Un autre facteur est
la richesse, puisqu'il s'agit du principal facteur déterminant la
capacité d'un ménage à exploiter les options disponibles dans
une zone donnée. Il est évident, par exemple, que les
ménages nantis qui possèdent de plus grandes fermes
produiront en général plus de récoltes et seront plus en
sécurité alimentaire que leurs voisins plus pauvres. Toutefois,
les groupes de richesse sont généralement définis non
seulement en fonction de leurs avoirs fonciers mais aussi par
rapport à leur cheptel, leurs autres actifs productifs, leur
niveau d’éducation, leurs autres compétences et à la main
d’œuvre disponible au sein du ménage et/ou à leur capacité
d’en embaucher. Et finalement leur capital social peut y jouer
aussi.
Définir les différents groupes de richesse dans chaque zone
est la deuxième étape d'une analyse de l'économie des
ménages, dont le résultat est un découpage de la richesse.
Aux fins de la présente évaluation, un ménage a été défini
comme des personnes « qui mangent dans la même
marmite » ; ils ne sont pas nécessairement directement liés
mais dépendent financièrement l'un de l'autre.
Base de référence de l'économie des ménages : Après
avoir regroupé les ménages en fonction de leur lieu de
résidence et de leur richesse, l'étape suivante consiste à
produire des données de base sur l'économie des ménages
types de chaque groupe de richesse, pour une année de
référence. L'accès à la nourriture est déterminé en examinant
la somme des moyens par lesquels les ménages se procurent
de la nourriture - quels aliments ils cultivent, récoltent ou
reçoivent en cadeau, combien de nourriture ils achètent,
combien d'argent ils gagnent en un an, et quels autres
besoins essentiels doivent être satisfaits avec le revenu
gagné.
Stratégies d'adaptation des ménages : Une fois cette base
de référence établie, il est possible d'analyser l'impact
probable d'un choc ou d'un aléa au cours d'une mauvaise
année. Pour ce faire, on évalue comment l'accès à la
nourriture sera affecté par un choc, quelles autres sources de
nourriture peuvent être ajoutées ou étendues pour combler
les pénuries initiales, et quels déficits finaux apparaissent.
Analyse des scénarios : L'approche de l'économie des
ménages repose sur un principe de base : une analyse des
moyens d'existence locaux est essentielle pour bien
comprendre l'impact - au niveau des ménages - des aléas tels
que la sécheresse, les conflits ou la dislocation des marchés.
Une mauvaise récolte totale peut, par exemple, laisser un
groupe de ménages sans ressources parce que la récolte est
leur seule source de nourriture de base. Un autre groupe, par
contre, peut être en mesure de s'en sortir parce qu'il a
d'autres sources d'alimentation et de revenus. Ces sources
alternatives - comme le bétail à vendre ou des parents ailleurs
qui peuvent aider - peuvent combler le déficit de production.
Ainsi, pour être efficaces, les évaluations de l'impact des aléas
naturels et ceux liés aux conflits doivent être fondées sur une
analyse des moyens d'existence, et l'analyse des moyens
d'existence elle-même comporte plusieurs étapes.
L'objectif est d'étudier les effets d'un aléa sur l'accès futur à la
nourriture et au revenu, afin que des décisions puissent être
prises sur les types d'intervention les plus appropriés à
mettre en œuvre. La raison d'être de cette approche est
qu'une bonne compréhension de la façon dont les gens ont
survécu dans le passé fournit une base solide pour se
projeter dans l'avenir. Trois types d'informations sont
combinés : (i) des informations sur l'accès de base, (ii) des
informations sur les aléas (c'est-à-dire les facteurs affectant
l'accès à la nourriture/au revenu, tels que la production
propre ou les prix du marché) et (iii) des informations sur les
stratégies de réponse (c'est-à-dire les sources de nourriture et
de revenu auxquelles les gens se tournent lorsqu'ils sont
exposés à un aléa). L'approche peut se résumer comme suit :
Base de référence + Aléa + Réponse = Résultat
L'idée est qu'une fois les données de référence compilées,
elles peuvent être utilisées à plusieurs reprises pour ce type
d'analyse des résultats sur un certain nombre d'années -
jusqu'à ce que des changements importants dans l'économie
sous-jacente les rendent invalides. Une bonne base de
référence pour l'économie alimentaire sera généralement
valide pour une période de 5 à 10 ans. Ce qui varie, c'est le
niveau de sécurité alimentaire qui prévaut, mais c'est une
fonction des variations des aléas et non des variations du
niveau de référence. En d'autres termes, le niveau de
production végétale ou animale peut varier d'une année à
l'autre (aléa), mais la structure sous-jacente de la production
(le niveau de référence) ne change généralement pas très
rapidement.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Household Economy Analysis (HEA) ou Analyse de l’Economie des Ménages (AEM)
35
PROGRAMME DE TRAVAIL
Les enquêteurs pendant cette base de référence de l'AEM ont
reçu une formation à Brazzaville du 26 janvier au 01 février
2020. Des travaux sur le terrain ont été effectués au niveau de
la zone de collecte du 03 au 17 février 2020. La phase terrain
a été suivie d'une analyse des données de base à Brazzaville
du 19 au 21 février 2020, à laquelle tous les membres de
l'équipe ont pris part. Le consultant principal a présenté les
résultats préliminaires à Brazzaville le 24 février 2020 dans les
locaux du PAM.
ÉCHANTILLONNAGE
Un échantillon raisonné a été utilisé pour cette étude. Ceci est
décrit plus en détails ci-dessous.
Vérification des caractéristiques de la zone de moyens
d’existence et sélection des sites
L'équipe de terrain au niveau de la zone de collecte a mené
des entretiens avec des informateurs clés au niveau des
départements avec le personnel technique du Ministère de
l'Agriculture, de l'Élevage et de la Pêche afin de confirmer les
caractéristiques de la zone mais aussi confirmer le choix des
villages de travail sélectionnés. Ainsi les entretiens d'AEM ont
été réalisés dans huit villages.
Ces villages ont été sélectionnés sur la base des critères
suivants :
1. Leur dépendance à l'agriculture pluviale mais aussi à
la pêche qui constituent les moyens d’existence de la
communauté ;
2. S'ils étaient « typiques » de la zone, c'est-à-dire que
les moyens d’existence dans ces villages suivent le
même schéma que dans la grande majorité des
autres villages de la zone.
ENTRETIENS
Des entretiens ont été menés à quatre niveaux différents lors
de la collecte des données dans la zone :
1. Services techniques gouvernementaux au niveau
départemental (1 entretien par département) ;
2. Commerçants sur les marchés (3 marchés visités) ;
3. Groupes de discussion d'informateurs clés
communautaires (8 entrevues) ;
4. Groupes de discussion représentants des ménages
(32 entrevues).
Il est à noter que les entretiens avec les informateurs clés
(c'est-à-dire les personnes qui pouvaient fournir une vue
d’ensemble du village) ont porté sur les systèmes culturaux,
l’élevage, la pêche ainsi que les diverses autres moyens
d’existence. Ils ont aussi porté sur la saisonnalité, les marchés
et encore sur les risques chroniques et leurs conséquences
sur l’économie de la zone. Ces informateurs clés ont ensuite
classé les ménages par niveau de richesse en utilisant des
facteurs discriminants au niveau local pour définir les
groupes socio-économiques. Enfin, ils ont estimé la
proportion relative de ménages dans chaque groupe de
richesse lors d’un exercice de tas proportionnels.
En utilisant les caractéristiques du groupe telles qu’elles ont
été décrites au cours de l’entretien avec les informateurs clés,
il a été demandé à ces derniers d’identifier les personnes
représentatives appartenant à des ménages de chaque
groupe socio-économique composé de huit personnes
(quatre hommes et quatre femmes). L’équipe a ensuite mené
des entretiens (focus group) avec chacun des groupes socio-
économiques. Les données collectées pendant ces entretiens
ont permis de quantifier les différentes sources de nourriture
et de revenu ainsi que le modèle de dépenses typiques pour
les ménages de chaque groupe socio-économique pendant la
période de référence.
Les entrevues par focus group étaient détaillées et duraient,
en général, deux à trois heures. L’enquêteur explorait de
manière systématique toutes les sources d’alimentation et de
revenu et inscrivait les réponses dans un questionnaire conçu
à cet effet. Pour commencer, il demandait aux personnes
interrogées de décrire un ménage typique de leur groupe de
richesse en termes de taille et de possessions de bétail sur
l’année de référence préalablement définie. L’une des
caractéristiques de la collecte des données en AEM est que
l’enquêteur cherche toujours à recouper les informations sur
place afin qu’elles soient cohérentes, en faisant une série de
calculs rapides permettant de trianguler et sonder (au-delà de
ce qui est évident) en se basant sur des références
notamment :
• Les nécessités alimentaires de base d’un ménage
typique sur une année en quantifiant les sources de
nourriture avec les besoins caloriques annuels des
ménages (à base de la norme de la moyenne de 2 100
kilocalories par personne et par jour tout au long de
l’année) ;
• La suffisance des revenus pour couvrir les achats de
nourriture ainsi que d’autres besoins du ménage ;
• Les dépenses correspondant au revenu gagné.
ANNÉE DE RÉFÉRENCE
Dans les études AEM menées dans les zones agricoles rurales,
les informations de terrain sont prises pour une « année de
consommation » qui est la période de douze mois qui
commence avec la récolte principale et se termine juste avant
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Méthodologie
la récolte suivante. Cette période appelée aussi année de
référence est le socle où toutes les données collectées se
réfèrent. Généralement, nous cherchons l’année normale
(année où il n’y avait pas trop de production, ni de sécheresse
ou inondation ou trop d’aide alimentaire) la plus récente pour
l’information de base. Alors, sur la base des discussions avec
le staff du PAM ainsi que ceux des services techniques
agricoles et compte tenu des problèmes financiers et des
inondations qui affectent la zone, il est paru évident de
considérer l’année la plus récente comme base de référence.
La période de référence pour cette étude s’étale donc du
début de la récolte principale - juin 2018 à la fin de la
deuxième saison des pluies à mai 2019.
Le tableau ci-contre fournit un bref aperçu des cinq années
précédant l'année de référence, illustrant les variations de la
sécurité alimentaire et les principaux événements qui
l'affectent. Il est clair que les périodes d’inondation ainsi que
des problèmes financiers affectent sensiblement la stabilité
des moyens de subsistance de la zone.
36 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
1 The Practitioners’ Guide to the Household Economy Approach, The Food Economy Group (FEG) and Save the Children UK, 2008. Le guide est disponible à
l'adresse : http://foodeconomy.com/resources/
Année de consom-mation
Score Évènements
2018-19 3
Une année moyenne en termes de
rendements agricoles toutefois le bétail était affecté par les maladies à
la fin de l’année.
2017-18 5
Bonne pluviométrie qui coïncide avec
la fertilisation du sol due à l’inonda-
tion de 2014.
2016-17 4 Fertilisation du sol suite à l’inondation
antérieure.
2015-16 4 Fertilisation du sol suite à l’inondation
antérieure.
2014-15 3 Hausse de températures suivie
d’inondation.
5 : Une excellente saison pour la sécurité alimentaire des ménages
(par exemple en raison de bonnes pluies, de bons prix, de bons
rendements agricoles, etc.)
4 : Une bonne saison ou une saison supérieure à la moyenne pour la sécurité alimentaire des ménages
3 : Une saison moyenne en termes de sécurité alimentaire des mé-
nages
2 : Une saison inférieure à la moyenne pour la sécurité alimentaire
des ménages
1 : Une mauvaise saison (par exemple en raison de la sécheresse,
des inondations, des maladies du bétail, des attaques de rava-
geurs) pour la sécurité alimentaire des ménages
DESCRIPTION DE LA ZONE
La zone de moyens d’existence de « Pêche artisanale des
grandes rivières avec cultures vivrières » CG09 comprend les
fleuves Oubangui et Congo et leurs plus grands affluents
comme le Nkeni, la Sangha ou Alima, ainsi que le fleuve
Kouilou. A ce titre, elle s'étend en bordure ou à travers de
nombreux districts dans la quasi-totalité des départements. Il
y a plusieurs zones dans le pays où la pêche est une activité
importante. La présente zone représente cependant des
villages de pêcheurs le long des grands fleuves où les
ménages dépendent de l’agriculture et de la vente du
poisson.
La zone s'étend le long de toute la frontière orientale du pays,
de l'extrême nord à l'extrême sud. Si l'on y ajoute la
concentration de villages de pêcheurs sur la rivière Kouilou au
sud-ouest au moins jusqu'au Pont de Niari au nord, la zone
s'étend sur plus de 1 500 km et contient des centaines de
villages, petits et grands. L'arrière-pays de ces villages passe
de la forêt au nord à la savane au sud, mais cela n'altère pas
la logique essentielle de leur subsistance : où qu'ils soient le
long de la zone, ils pêchent et ils cultivent du manioc. En
outre, les galeries forestières dans leur arrière-pays immédiat
ne se limitent pas aux zones forestières, de sorte que la
majorité des villages a un certain degré d'accès aux
ressources forestières, végétales et animales.
Elle bénéficie aussi d’une variété de sols mixtes argileux,
sablonneux, calcaires et latéritiques et d’un climat tropical
avec des températures variant entre 21 et 32°C et d’une
pluviométrie annuelle qui varie autour de 1 000mm à
1 600mm. La population de la zone est une population vivant
d’une agriculture de subsistance basée sur la production
vivrière avec une forte commercialisation dont les marchés
urbains ont une valeur ajoutée remarquable par rapport au
revenu de ces communautés. Il s’agit de systèmes
d’exploitation sans intrants, sans mécanisation. Presque
toutes les cultures sont des cultures associées, souvent au
manioc et/ou au maïs et l’arachide, les principales
productions de la zone. En dehors des cultures principales,
l’écologie ainsi que le marché encouragent les paysans à
produire une variété de cultures notamment le haricot, le
taro, les ignames, les patates douces et d’autres gammes de
produits comme les bananes (douce et plantain), et un peu de
produits du maraîchage. Toutes ces cultures ont lieu sur des
propriétés foncières assez larges par rapport à d'autres
zones, entre 1 et 2 hectares pour les ménages pauvres et
généralement entre 3 et 7 hectares pour les ménages aisés.
Néanmoins compte tenu du potentiel agricole de la zone, le
rendement du manioc frais par exemple est assez
remarquable. Il y a aussi les produits de la cueillette des
zones forestières (les feuilles comestibles et protéiques de
gnétum (Gnetum africanum), champignons, chenilles, miel,
etc.).
La zone bénéficie également d’un bon réseau hydrique qui
permet la pêche mais aussi la pisciculture. On y trouve
beaucoup d’affluents des fleuves Oubangui et Congo
notamment le Nkeni, le Sangha, Alima ou Loukolela wazerbe
dans toute la zone.
Par rapport à l’élevage, les communautés mettent surtout
l’accent sur les petits ruminants, sans doute encore une fois
parce que la forte demande des villes donne des prix
attractifs pour les producteurs mais aussi parce que ça ne
demande pas beaucoup d’entretiens par rapport aux bovins.
En dehors des activités agricoles la population de la zone
s’engage dans les activités génératrices de revenu notamment
le petit commerce qui représente source conséquente de
revenu chez les aisés après la vente de la récolte, celle de
bétail, ainsi que l’auto-emploi et la vente de la main d’œuvre
des pauvres qui sont employés par les aisés pour accroitre
leur productivité.
Il est à noter que la zone souffre des inondations
particulièrement graves presque chaque cinq ans. En effet, en
septembre 2019, les inondations ont envahi les
communautés de la zone. Des déplacements de populations
de villages entiers ont été constatés, soit vers les chefs-lieux
chez les parents ou dans une paroisse, soit dans la brousse
ou la forêt. Les ménages déplacés ainsi que les populations
restées dans leur village ont fait face à de grandes difficultés
d’accès à la nourriture et aux marchés qui contribuent à la
dégradation de leurs conditions de vie. Ces inondations ont
laissé des séquelles douloureuses qui ont bousculé
l’économie et les relations sociales au niveau de la zone.
MARCHÉS
L’objectif d’évaluation du marché pour la base de référence
est de savoir comment le marché fonctionne habituellement
et ce qu’il représente pour les ménages de cette zone de
moyens d’existence. Aussi, il est important de comprendre les
fluctuations des prix dans l’année en cours, et d’une année
sur l’autre car elles déterminent les termes de l’échange pour
les habitants de la zone. Ce qui permettrait d’analyser les
obstacles et les opportunités du marché pour les ménages, et
met en relief, par exemple, les revenus gagnés suite à la vente
des produits et combien d’argent il leur faut pour acheter les
biens essentiels dont ils ont besoin.
Tout au long de l’année, la zone enregistre des flux
importants de produits entre les zones de productions
rurales et les différents marchés forains qui sont actifs. Mais il
faut noter de manière globale que l'accès au marché dans
cette zone est très faible en raison de l'inexistence de routes.
Du coup, toutes les transactions se font sur la voie fluviale ce
qui affecte la fréquentation, d’où l’achat localement de la plus
grande partie des produits par les commerçants qui viennent
des grands centres, notamment les départements de la zone,
mais aussi Brazzaville, Pointe Noire, ainsi que les parties
frontalières avec la République Démocratique du Congo.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 37
Profil des moyens d’existence
38 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Il est à noter que pendant le travail terrain l’équipe a visité
certains marchés fréquentés par les communautés. Il s’agit
notamment du marché de Liranga, celui de Loukolela mais
aussi d’Oyo, qui sont les carrefours et la destination finale de
tous les produits de la zone et ceux venant d’ailleurs. Les
transactions portent principalement sur des achats et les
ventes des produits agricoles locaux et importés (riz), du
bétail (caprins, ovins, bovins, porcins), des poissons ainsi que
de plusieurs biens de consommation. Les ventes de ces
produits locaux par la population de cette zone se font
essentiellement juste après la récolte dépendant de la
spéculation. Ainsi le manioc qui est la principale culture est le
produit le plus vendu suivi d’autres cultures notamment le
maïs, l’arachide, le taro, ensuite les bananes plantains et
douces. Le manioc qui suit plusieurs transformation
(chikwangue, cossette, farine) est le produit de base
disponible en permanence tout au long de l’année sur les
marchés et au niveau des villages. En plus du manioc, du maïs
et du bétail, d’autres produits sont aussi achetés et vendus
notamment les produits importés (sucre, l’huile, cosmétiques)
ainsi que d’autres biens de consommation. La vente du
poisson dépend du type de poisson et du marché visé. Les
prix de tous les produits varient sensiblement au cours de
l’année. Ainsi en moyenne, et pour l’année de référence, un
chikwangue de 0,68 kg s’échangeait entre 166 FCFA et 200
FCFA et le kilo de la farine de manioc s’échangeait entre 133
FCFA et 400 FCFA, le bouc entre 20 000 FCFA et 25 000 FCFA et
le porc moyen entre 20 000 FCFA et 30 000 FCFA. Aussi, cette
forte variation des prix peut s’expliquer par l’inaccessibilité
qui rend les échanges commerciaux difficiles compte tenu de
l’isolement de certains villages par rapport aux marchés.
CALENDRIER SAISONNIER POUR L’ANNÉE DE
RÉFÉRENCE
Le calendrier saisonnier ci-contre indique les différentes
activités agricoles, de pêche, d’élevage et autres menées par
les populations de la zone pendant l’année de référence qui
va de juin 2018 à mai 2019. Il nous informe sur les grandes
activités réalisées par ces populations pour satisfaire leurs
besoins alimentaires, pour se procurer du revenu et les
dépenses faites en fonction des différentes saisons de
l’année. Il est important de signaler que ce calendrier
commence avec la récolte et décrit comment les ménages de
la zone ont utilisé leur récolte et les activités initiées pour
satisfaire leurs besoins (nourriture et autre).
L’agriculture étant la principale activité économique de la
zone, les activités agricoles sont pratiquées par tous les
ménages de la zone sans distinction. La période d’installation
des pluies commence typiquement en mars et se termine
généralement en novembre avec une période sèche de trois
mois allant de juin à août. Il arrive que la période de pluie
commence en février (pluies précoces). Cette période de pluie
coïncide avec de grandes activités agricoles. Ainsi, de janvier à
février, les ménages sont occupés par la préparation des
terres. Les semis et entretiens (sarclages) interviennent en
mars pour terminer en mai. Les travaux de récolte
commencent à partir de juin et se poursuivent jusqu’en
décembre pour l’arachide et pratiquement toute l’année pour
le manioc ainsi que les bananes plantains. Pendant la période
de pluie, notamment entre mars et mai, mais aussi entre
septembre et novembre, le niveau des eaux du fleuve monte
et l'avantage de la pêche est dépassé par l'agriculture, si bien
qu'à l'exception de quelques pêcheurs plus doués, l'activité
de pêche est beaucoup plus limitée pendant cette période.
Pour les ménages résidents, la période maximale de pêche se
situe entre juin à août mais aussi décembre à février lorsque
le niveau des eaux du fleuve permet de bien pagayer et que
les poissons s'attrapent plus facilement.
Il est important de signaler que dans cette zone la production
laitière n’existe pas. Cependant la vente de bétail s’effectue
généralement en deux périodes. Une première période allant
d’août à septembre dans le but de profiter de bons prix
compte tenu du bon embonpoint des animaux, et la
deuxième de décembre à janvier qui coïncide avec la fête du
nouvel an. Bien que la zone soit une grande zone de
production, beaucoup de ménages sont contraints d’avoir
recours aux marchés pour couvrir les besoins alimentaires
aussi bien en produits de base que pour les autres denrées
alimentaires de première nécessité.
La période de soudure s’étale du début mars à la fin du mois
de mai, période à partir de laquelle les premières récoltes
sont disponibles. Il est aussi important de voir une deuxième
période de soudure de septembre à novembre. Ces moments
coïncident aussi avec la hausse des prix des denrées de base
ainsi que le pic des maladies humaines et animales. Cela fait
accroitre ainsi les dépenses des ménages. C’est pendant cette
période que les ménages se permettent de faire des
emprunts pour faire face aux difficultés quotidiennes alors
qu’il s’agit d’une période où les ménages très pauvres et
pauvres sont employés dans les champs des ménages aisés
(salariat agricole). La vente des produits agricoles, notamment
le manioc, le maïs, l’arachide, les bananes plantains, la patate
douce, etc. se fait principalement à partir de la période de
récolte et en fonction des besoins du ménage. Le
remboursement intervient généralement pendant la récolte.
La période de collecte des produits sauvages notamment les
chenilles, les champignons, le gnetum varie en fonction de la
disponibilité des produits. Ainsi, le gnetum se retrouve toute
l’année alors que les chenilles se collectent en période sèche
de juin à août, et les champignons en octobre.
Les principaux événements sociaux sont réglés par les
activités religieuses et scolaires. La rentrée scolaire a lieu en
octobre, les fêtes célébrées sont : Noël et le Nouvel An (fin
décembre, début janvier) et l’indépendance (août).
DÉCOUPAGE SOCIO-ÉCONOMIQUE
Au sein d’une même zone de moyens d’existence, il existe de
grandes différences économiques entre les ménages en
fonction, notamment de leur composition et des biens qu’ils
possèdent. L’analyse de l’économie des ménages repose donc
sur une classification socio-économique selon des critères
locaux. Chercher des différences entre les ménages est
fondamental pour faire une analyse utile de la sécurité
alimentaire et de la vulnérabilité à différents dangers parce
qu’en cas de choc, les ménages pauvres et les ménages nantis
seront touchés différemment et méritent donc d'être
examinés séparément. En effet, dans la zone de moyens
d’existence : « Pêche artisanale des grands fleuves, cultures
vivrières », les principaux facteurs discriminants du niveau de
richesse sont la superficie cultivée, la possession de bétail
ainsi que celle de moyens de production, notamment les
outils de pêche. Ces facteurs influencent les activités
principales des ménages et donc déterminent leurs options et
leurs possibilités de couvrir leurs besoins (en nourriture et
autre). Le tableau ci-après (Figure 1, page suivante) présente
la catégorisation des populations en quatre grands groupes
socio-économiques : très pauvres, pauvres, moyens et nantis.
Pour chacun d’entre eux, un profil typique de ménage y
appartenant est décrit. En effet, les activités exercées par la
population sont relativement similaires d’un groupe à l’autre,
la différence se situe davantage dans l’échelle à laquelle ces
activités sont menées. Il est à noter que ce découpage est
relatif à la période de référence (juin 2018 –mai 2019) qui est
une période avant les inondations qui ont affecté les activités
économiques de la zone. La catégorisation sociale effectuée
dans les 8 villages fait ressortir une forte proportion de
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Juin Juillet Août Sept Oct Nov Déc Janv Fév Mars Avri
l Mai
Mois de pluie
Manioc Récolte toute l'année
Maïs
Banane Plantain Récolte toute l'année
Igname
Taro
Patate douce
Arachide
Canne à sucre
Safou
Citron
Cacao
Orange
Pamplemousse
Cueillette : gnetum Récolte toute l'année
Cueillette : champi-
gnon
Cueillette : chenille Cueillette : fruits sau-
vages
Pèche
Vente de bétails
Chasse Toute l'année
Maladie bétails
Maladies humaine Emploi journalier Agri-
cole Emploi local non agri-
cole
Artisanat
Dettes Dettes Dettes
Remboursement Remboursement
Transferts
Soudure Soudure Soudure
Prix max denrées de
base
Fêtes
Rentrée scolaire Légende PT Semis sarclage Conso
verte Ré-
colte Pluie
39
40 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
ménages très pauvres et pauvres alors que les nantis ne
représentent que 15% de ménages, le reste étant constitué
des moyens qui représentent environ 25%. Aussi, les nantis
ont cultivé entre 5 à 7 ha pendant l'année de référence. Les
ménages moyens cultivent entre 3 à 5 ha alors que les
ménages très pauvres et pauvres arrivent à cultiver
respectivement de 0,5 à 1,5 ha et de 1 à 3 ha pendant l'année
de référence.
Les ménages, dans leur grande majorité, sont propriétaires
de leurs terres qu’elles soient héritées ou achetées. Mais le
nombre de bras valides est un facteur très important pour
bien travailler la terre et donc détermine la superficie cultivée.
Ainsi, plus le ménage est grand, plus les superficies cultivées
augmentent. De plus, les ménages plus aisés (pour faire
travailler leurs champs) arrivent à employer la main d’œuvre
agricole venant typiquement des ménages pauvres et très
pauvres de la zone mais aussi des villages frontaliers de la
République Démocratique du Congo. Cette pratique d’emploi
agricole en période de hauts travaux agricoles, même si elle
constitue une opportunité de générer plus de revenus pour
les ménages très pauvres et pauvres, constitue pour eux un
facteur limitant en les empêchant de trouver le temps pour
travailler leurs propres champs.
Dans cette zone, la différence entre les ménages en termes
de possession de bétail se situe surtout à la taille du
troupeau. Du coup, tous les ménages disposent pratiquement
de toutes les espèces élevées dans la zone, notamment les
caprins, les ovins, les porcins et la volaille. Bien que les
ménages qui possèdent des animaux ne pratiquent pas
l’embouche, les animaux constituent tout de même une
source de revenus surtout chez les nantis qui se différencient
des autres groupes socio-économiques dans leur capacité à
faire face aux dépenses. Les ménages très pauvres et pauvres
disposent pratiquement du même nombre de têtes de petits
ruminants ; 1 - 9 caprins, 2 - 10 ovins et 0 – 4 truies tandis que
les nantis et les moyens possèdent un troupeau plus
important à la fois de petits ruminants. Il faut noter que les
ménages de cette zone, notamment les plus aisés, disposent
d’autres biens productifs notamment un panneau solaire et
des téléphones portables qui contribuent dans une certaine
mesure aux activités économiques sans compter la
possession d’outils de pêche dans tous les ménages de la
zone.
SOURCES DE NOURRITURE
Le graphique ci-contre (Figure 2) présente les sources de
nourriture pour tous les ménages de différents groupes socio
-économiques de la zone de moyens d’existence pendant la
période de référence juin 2018 - mai 2019. Distinguer les
différentes sources de nourriture est au cœur de l’évaluation
car les moyens par lesquels un ménage obtient sa nourriture
définissent sa vulnérabilité aux différents chocs. En plus,
l’analyse de moyens d’existence comptabilise en termes de
kilocalories la nourriture consommée par les ménages types
de chaque groupe socio-économique pendant l’année de
référence. Une telle quantification est nécessaire afin de
pouvoir juger une nouvelle situation – par exemple
l’inondation – en fonction de ses conséquences probables sur
la sécurité alimentaire. En moyenne, tous les ménages des
différentes catégories socio-économiques ont réussi à couvrir
sensiblement leurs besoins énergétiques minimums sur la
base de 2 100 kilocalories par jour et par personne pendant
l’année de référence. Il faut cependant noter que les nantis et
les moyens sont parvenus à couvrir largement leurs besoins
énergétiques de base (112% chez les moyens et 118% chez les
nantis). Mais les très pauvres n’arrivent pas à atteindre le
minimum vital avec 99% bien que les pauvres atteignent
102% durant cette année de référence. En effet, les
principales sources de nourriture dans cette zone sont : la
production agricole et l’achat pour les ménages pauvres.
Le graphique montre pour tous les groupes socio-
économiques, une contribution importante de la propre
production agricole dans la satisfaction des besoins
énergétiques annuels du ménage. Cette contribution varie
toutefois d’un groupe à un autre, si bien qu’on constate
qu’elle est la même chez les très pauvres et les moyens. Il est
quand même intéressant de noter que si pour les nantis, la
majeure partie des besoins est assurée par cette production,
pour les très pauvres cette production couvre plus de la
moitié 57% et celle-ci couvre 71% pour les pauvres. Cette
contribution de l’activité agricole à la satisfaction des besoins
Figure 1 : Caractérisation des groupes socio-économiques
alimentaires des ménages très pauvres pourrait être un
indice de la vulnérabilité alimentaire de cette partie de la
population dans cette zone. Si les ménages très pauvres
n’arrivent pas à produire pour couvrir la moitié de leurs
besoins alimentaires en année de choc, notamment pendant
la période d’inondation qui est le premier facteur limitant de
la production, on est en droit de se poser la question de
savoir quel serait alors leur état. Pendant l’année de
référence, les ménages de différentes catégories socio-
économiques ont produit des cultures pour couvrir une
grande partie de leurs besoins énergétiques. La particularité
de cette zone de moyen d’existence est que ces ménages ont
la possibilité de pratiquer deux campagnes agricoles avec
plusieurs spéculations notamment le manioc, le maïs, les
bananes (plantain et douce), l’arachide. La production agricole
au cours de cette année de référence est plus élevée chez les
ménages nantis que chez les très pauvres en raison d’une
plus grande superficie cultivée mais aussi d’un rendement
plus élevé obtenu grâce à une plus grande célérité dans
l’exécution des travaux champêtres par un recours à la main
d’œuvre salariale. Une bonne partie de cette production
agricole est destinée à l’autoconsommation. Ainsi elle
contribue à la couverture des besoins énergétiques des
ménages à hauteur de 57% chez les très pauvres et les
moyens contre 71% pour les pauvres et 74% chez les nantis.
Le manioc, cultivé pratiquement pendant toute l’année, est la
principale culture cultivée dans la zone, suivi par les bananes
(plantain et douce), du maïs et du taro, une culture plus
importante pour ces ménages qui le consomment et le
vendent en même temps. Les ménages de tous les groupes
socio-économiques de cette zone de moyens d’existence
vendent environ la moitié de leur production agricole. Les
autres usages que représentent les semences, le paiement en
nature, les dons et stock, surtout pour les ménages nantis,
sont très faibles. Outre le manioc, toutes les classes socio-
économiques cultivent un certain nombre de produits,
notamment les bananes (plantain et douce), le maïs, le taro et
l’arachide qui contribuent substantiellement aux besoins
alimentaires de la zone. La consommation des bananes
(plantain et douce) est essentielle pour améliorer la qualité de
l’alimentation. Cette consommation des bananes varie selon
les groupes socio-économiques, elle représente 5% des
besoins énergétiques chez les très pauvres, 9% chez les
pauvres et moyens contre 13% des besoins énergétiques des
ménages nantis.
Les feuilles vertes (principalement feuilles de manioc, mais
aussi amarantes, feuilles de courges, feuilles de patates
douces, etc.) sont consommées de manière quotidienne
surtout pour les groupes les plus pauvres qui ont peu
d’opportunités de diversifier leur alimentation.
Malheureusement, nous n’avons pas pu quantifier l’apport de
ces feuilles aux besoins énergétiques annuels des ménages.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Figure 2 : Sources de nourriture (2018/19)
41
42 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Cependant, nous avons pu quantifier la consommation du
maïs : elle est très négligeable parce qu’elle représente 1%
des besoins énergétiques annuels de tous les ménages.
Les produits du bétail correspondent à la contribution de lait
et de la viande du propre troupeau à la couverture des
besoins énergétiques annuels. De manière générale, cette
contribution des produits animaux à la couverture des
besoins énergétiques est presque nulle chez tous les groupes
socio-économiques. Cela s’explique par le fait que tous les
ménages ne possèdent pas de gros ruminants donc de
vaches laitières pour pouvoir les traire afin de consommer le
lait. Mais la consommation de la viande de leur propre
troupeau chez les ménages moyens et nantis consiste à
égorger typiquement 1 à 2 petits ruminants pour les besoins
des fêtes pendant l’année de référence. La contribution de
cette consommation est très négligeable, représentant 1%
pour chaque ménage. Le lait des chèvres n’est pas
typiquement consommé dans cette communauté. C’est
pourquoi il serait intéressant d’approfondir les recherches
pour comprendre si cette non-consommation des produits
animaux surtout le lait (aliment complet) par les ménages de
la zone ne contribuerait pas de manière significative à la
malnutrition infantile chez les enfants de tous les groupes
socio-économiques au sein de la communauté.
Bien qu’étant une zone de pêche, les poissons collectés sont
plus destinés à la vente qu’à la consommation. Du coup, cette
pêche ne contribue que modestement aux besoins
énergétiques de tous les ménages avec 3% chez les très
pauvres,1% chez les pauvres et les moyens contre 2% chez les
nantis.
Les achats présentés comme deuxième source de nourriture
sur la Figure 3 ci-contre comprennent principalement les
achats de produits locaux (manioc, haricot) ou importés (riz,
l’huile et le sucre) qui constituent les aliments de
consommation de cette communauté. Ils contribuent en
moyenne assez sensiblement des besoins énergétiques des
ménages et ce, quel que soit le groupe socio-économique.
Cette dépendance vis-à-vis du marché constitue un facteur de
risque. Tout changement dans les prix de ces aliments a des
effets négatifs particulièrement chez les ménages très
pauvres et pauvres sur leurs capacités de couvrir les besoins
énergétiques déjà à la limite. Presque tous les ménages
achètent du riz, du sucre, de l’huile, et du poisson fumé et
frais ainsi que du pain pour le petit déjeuner. Les quantités et
la fréquence des achats des produits alimentaires qui servent
à améliorer la qualité du régime alimentaire dépendent de la
catégorie socio-économique. Pour les ménages pauvres et
très pauvres, les quantités achetées sont faibles et les achats
ne sont pas fréquents car ils sont obligés d’acheter d’abord
les aliments les moins chers pour manger à leur faim. Les
produits locaux, notamment la chikwangue et le haricot,
constituent les aliments aussi achetés par les ménages très
pauvres et pauvres où ils représentent 10% et 4% des besoins
totaux respectivement pour ces deux ménages. Le riz, produit
importé et acheté, est faiblement consommé et représente
5% et 8% respectivement chez les très pauvres et les nantis. Il
faut noter qu’en dehors des produits locaux achetés, d’autres
produits alimentaires, notamment le sucre, l’huile, le pain, le
poisson et le lait, sont achetés par les ménages. En effet,
l’huile, qui est très souvent utilisée dans la préparation des
repas, contribue à l’apport énergétique à un taux de 8% chez
les très pauvres, pauvres et moyens et 10% chez les nantis. La
consommation du sucre est assez modeste dans cette
communauté, avec une contribution variant entre 1% et 5%
des besoins énergétiques annuels chez tous les groupes socio
-économiques. Le pain, qui est essentiellement acheté pour la
consommation correspondant au petit-déjeuner, contribue
pour environ 7% à 8% chez les pauvres, les moyens et les
nantis contre 2% chez les très pauvres. La consommation du
poisson est aussi présente dans la diète de cette
communauté parce que c’est une zone de pêche et surtout
compte tenu des habitudes alimentaires de cette
communauté qui serait favorable à la consommation du
poisson pour des raisons socioculturelles.
Une autre source de nourriture assez modeste pour les
ménages très pauvres et pauvres est le paiement en nature.
Durant la campagne agricole, une ou deux personnes par
ménage très pauvre ou pauvre travaillent dans les champs
des nantis ou des moyens. La rémunération est soit en
espèces (comptabilisée dans les sources de revenu dans la
prochaine section) ou en nature. Cette rémunération en
nature permet aux travailleurs de recevoir entre 15 à 20 kg de
manioc frais à la récolte. C’est ainsi que cette source de
nourriture permet de couvrir 6% des besoins des ménages
très pauvres et 4% pour les ménages pauvres. Il faut noter
que l’employeur fournit très souvent aussi un repas aux
travailleurs.
SOURCES DE REVENUS
Le graphique ci-contre (Figure 4) fournit de manière explicite
des informations relatives aux revenus en espèces d'un
ménage typique de chaque groupe socio-économique, tant en
termes absolus que proportionnels, pendant l'année de
référence juin 2018 - mai 2019. Il y a en effet une différence
frappante du revenu gagné et aussi de l’importance des
diverses sources de revenu par catégorie socio-économique
pendant l’année de référence. Les ménages nantis ont gagné
typiquement 7 580 589 FCFA / an contre environ
1 151 887 FCFA /an pour les ménages très pauvres. Les
ménages aisés ont gagné plus de 6 fois plus de revenu
monétaire que les ménages très pauvres et 5 fois plus que les
ménages pauvres. Cette situation illustre parfaitement la
fragilité économique des ménages très pauvres et pauvres de
cette communauté. Les principales sources de revenus dans
cette communauté sont la vente de la propre production
agricole, la vente du bétail, les emplois journaliers, l’auto-
emploi, la pêche et le petit commerce. Le niveau de ces
sources de revenus est variable selon que l’on se situe dans
l’échelle des pauvres ou des moyens et nantis. La pratique de
la vente des produits agricoles, la vente de bétail, l’auto-
emploi, la pêche et le petit commerce constituent les
principales sources de revenu des ménages aisés. Par contre,
chez les pauvres et très pauvres, il s’agit davantage du revenu
tiré de la vente de leur force de travail, la vente des produits
agricoles, la pêche et dans une moindre mesure la vente de
bétail.
Les produits agricoles sont vendus par toutes les catégories
socio-économiques. Dans cette communauté, le revenu tiré
de la vente des produits agricoles semble être très important.
Toutefois, l’importance de la vente des produits agricoles
augmente avec une petite nuance par groupe de richesse.
Cette source de revenu représente 67% chez les ménages très
pauvres et pauvres, par contre elle est de 68% chez les
ménages moyens et nantis. En effet, les ménages aisés et
moyens retardent la mise sur marché afin de bénéficier des
bons prix par contre les ménages pauvres sont contraints de
vendre dès les récoltes (périodes de baisse des prix) en raison
des besoins urgents d’argent pour régler les dettes et d’autres
dépenses de première nécessité. Le revenu de la production
agricole provient principalement de la vente du manioc, du
maïs, des bananes plantains, des arachides et du taro.
L’amélioration du système de production de cultures pourrait
permettre d’améliorer la qualité de l’alimentation, assurer la
sécurité alimentaire et garantir une activité génératrice de
revenus de beaucoup de ménages. Il est important de
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Figure 3 : Sources de revenus – valeurs absolues (2018/19)
Figure 4 : Sources de revenus – valeurs relatifs (2018/19)
43
44 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
rappeler que la vente du manioc constitue une source
indéniable dans le total du revenu provenant de la vente de la
propre production agricole pour tous les ménages de cette
zone. En effet, cette vente du manioc représente 39% du
revenu total de la vente de la production agricole chez les très
pauvres, 58% chez les pauvres contre 45% et 46%
respectivement chez les moyens et les nantis.
Tous les groupes socio-économiques procèdent à la vente du
bétail pour payer des dettes, s’acheter de la nourriture ou
d’autres bétails et subvenir aux différents besoins du ménage.
Pendant cette année de référence, les ménages très pauvres
ont vendu 4 volailles, 1 ovin et 1 caprin alors que les pauvres
n’ont vendu que 2 petits ruminants. Le revenu annuel tiré est
de 45 000 FCFA et 51 000 FCFA respectivement pour les
ménages pauvres et très pauvres. Les moyens et aisés par
contre ont vendu 6 à 8 ovins et 5 à 6 caprins. Le revenu total
tiré de la vente de ces petits ruminants est d’environ
250 000 FCFA chez les moyens et 320 000 FCFA chez les
nantis. Pour les ménages très pauvres et pauvres le revenu
tiré du bétail contribuait respectivement pour environ 4% et
3% du revenu annuel total contre environ 5% chez les
moyens.
Le petit commerce comprend principalement la vente en
détail des petits articles et produits comme le sucre, le savon,
la nourriture préparée ainsi que l’achat et la revente des
boisons. Il est intéressant de noter que le commerce n’est pas
une activité génératrice de revenu typique pour les ménages
très pauvres et pauvres. Toutefois, il constitue une source
non négligeable de revenus chez les ménages moyens et
nantis. L’apport au revenu total est estimé à environ 5% chez
les moyens et nantis.
Les ménages pauvres ont généré 8% de leur revenu annuel
grâce à la vente de la force physique des bras valides, soit à
travers le salariat agricole dans les champs des plus aisés
pendant la période agricole, soit à travers la fabrication des
briques. Ceci les rend très dépendants de facteurs externes
sur lesquels ils ont peu d’emprise, comme le taux de
rémunération des frais de la main d’œuvre journalière. Cette
forte dépendance vis-à-vis de la vente de leur force de travail
constitue un risque énorme lors de la survenu de maladie. En
cas d’un choc affectant la production agricole, ces ménages
seront doublement touchés par la baisse de leur propre
production agricole et du revenu tiré de la main d’œuvre
agricole.
La pêche est pratiquée par tous les groupes socio-
économiques de cette zone. En réalité, les moyens et les
nantis ne pratiquent pas directement la pêche. Ces derniers
payent les matériels de la pêche et mettent à la disposition
des ménages pauvres. Cette pratique est semblable à celle de
la zone agropastorale et pêche du lac Tchad. Selon la nature
du contrat, le ménage pauvre soit partage (partage égale) les
produits de la pêche avec les ménages aisés ou soit les
poissons sont achetés uniquement par les ménages aisés
propriétaire des matériels. L’apport au revenu total varie en
fonction du groupe de richesse, d’où son estimation à environ
9% chez les très pauvres, 7% chez les pauvres contre 3% chez
les moyens et les nantis.
POSTES DE DÉPENSES
L’analyse du graphique ci-contre (Figure 5) permet de
comprendre les variations des différentes postes de
dépenses sur le budget annuel d’un ménage. En effet, les
informations sur les dépenses sont importantes pour savoir
ce que les ménages dépensent sur la nourriture, ce qu’ils
achètent en dehors de la nourriture mais aussi ce qu’ils
pourraient réduire temporairement en période difficile. Il faut
noter que pendant la période de référence juin 2018 – mai
2019, ces dépenses augmentent d’un groupe socio-
économique à l’autre en fonction de ses capacités à générer
des revenus mais aussi de ses besoins quotidiens.
Schématiquement, les dépenses des ménages de la zone
couvrent les achats de nourriture de base et autres aliments,
les équipements ménagers, les intrants de production, les
services sociaux (éducation et santé), l’habillement, et autres
comme le transport et l’achat de la bière locale.
L’élément le plus frappant est que l’achat des denrées de base
représente le poste de dépense négligeable par tous les
groupes socio-économiques compte tenu du potentiel
agricole de la zone. Ces faibles achats des aliments de base se
justifient chez ces ménages par le fait qu’ils arrivent à avoir
une forte contribution de leur propre production leur
permettant de couvrir leur besoin énergétique de 2 100k cal
par personne par jour. L’aliment de base acheté ici est
essentiellement le manioc qui suit plusieurs types de
transformation comme le chikwangue avant la
consommation. En effet, cet achat d’aliment de base ne
représente que 5% des dépenses totales des ménages très
pauvres contre 1% chez les nantis.
Les autres aliments sont composés principalement de l’huile,
du sucre, du riz, du haricot, du pain et du poisson. Ceux-ci
permettent de diversifier le régime alimentaire ainsi que
l’amélioration de la qualité nutritionnelle. Les achats de ces
aliments représentent environ 23% des dépenses totales des
ménages très pauvres et pauvres contre 12% chez les
ménages moyens et 9% chez les nantis. Mais en terme de
dépenses totales journalières, les ménages nanti
(20 064 FCFA/jour/an) dépensent beaucoup plus que les
ménages très pauvres (3 145FCFA/jour/an). Du coup, ces
dépenses représentent un coût énorme pour les ménages
très pauvres et pauvres compte tenu de leur pouvoir d’achat.
Très
pauvres Pauvres Moyens Nantis
Vente de manioc 295946 491368 1428254 2350808
Vente d'autres
cultures 471691 440489 1726456 2772147
Vente produits du
bétail 90000 90000 360000 840000
Petit commerce 0 0 211 560 371 520
Vente de bétail 45000 45000 250 000 320 000
Vente de volaille 6000 0 39000 21000
Main d’œuvre 25000 115 533 0 50000
Auto-emploi 0 44040 334024 572 064
Autres 218250 165252 316800 283050
Total 1 151 887 1 391 682 4 666 094 7 580 589
Note: Les chiffres représentent le point médian de la fourchette des
réponses issues des entretiens dans 8 communautés et sont le
résultant d’une analyse raisonné approfondie des données.
Les dépenses réalisées pour les intrants de production
concernent essentiellement les investissements dans l’achat
des animaux, les semences, l’emploi des travailleurs agricoles
et non agricoles et l’achat des outils. Ces dépenses sont
estimées à 1 273 334 FCFA chez les nantis, 856 166 FCFA pour
les moyens, 12 834 FCFA pour les pauvres et 9 167 FCFA pour
les très pauvres. Cet investissement représente 17% des
dépenses totales chez les nantis, 18% chez les moyens contre
environ 1% chez les pauvres. Il est important de signaler que
la dépense pour l’emploi des travailleurs agricoles couvre à
elle seule 8% des dépenses totales chez les nantis contre 9%
chez les moyens. La proportion des dépenses utilisées pour
les investissements dans la production agricole et l’élevage
est aussi un facteur de différenciation des groupes socio-
économiques.
La proportion des dépenses destinées aux services sociaux de
base, notamment la santé et l’éducation, augmentent en
fonction du niveau de richesse des ménages. En effet, chez les
ménages très pauvres et pauvres ces dépenses représentent
respectivement 348 838 FCFA soit 30% et 438 072 FCFA soit
33% de leurs dépenses totales annuelles. Pour les autres
groupes socio-économiques, ces dépenses atteignent
1 032 575 FCFA soit 22% et 1 845 098 FCFA soit 25% des
dépenses totales respectivement chez les moyens et les
nantis. Pour l’éducation, la grande motivation des parents
pour envoyer les enfants à l’école dans cette zone semble être
un acquis remarquable. L’intérêt pour la scolarisation serait à
mettre en rapport avec la forte présence coloniale dans le
pays ainsi que la forte présence des missions chrétiennes qui
ont depuis longtemps sensibilisées les populations sur
l’importance de l’éducation. Toutefois, à cause de
l’enclavement de la zone, de nombreuses écoles ne sont pas
bien équipées en matériels adéquats et manquent même
d’enseignants qualifiés dans plusieurs villages. Les dépenses
pour la santé sont principalement des dépenses pour les
consultations et les prescriptions aux centres de santé qui, du
reste, n’existent pas dans plusieurs villages, et même dans les
localités où on les trouve, les outils permettant son bon
fonctionnement font défaut.
Les dépenses pour l’habillement augmentent aussi
proportionnellement à la taille des ménages mais aussi en
fonction du statut économique des ménages. Il faut toutefois
prendre en compte la quantité et la nature des habits
achetés. Chez les très pauvres et pendant l’année de
référence, les dépenses vestimentaires ont coûté environ
9 555 FCFA par personne contre 42 727 FCFA par personne
chez les nantis. Enfin, la catégorie « autre dépense » se
compose des dépenses relatives au transport, aux fêtes, aux
funérailles, la consommation de la bière locale, etc. Il est
intéressant de noter que ce poste de dépense est plus
important chez les moyens et nantis que chez les pauvres et
très pauvres. Du coup, les nantis dépensent 2 462 342 FCFA,
soit 8 fois plus que les très pauvres qui engagent
301 723 FCFA dans cette rubrique. Cet écart entre les groupes
socio-économiques prouve le rôle important que joue le
pouvoir d’achat dans la satisfaction des besoins des ménages.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Figure 5 : Postes de dépenses (2018/19)
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46 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
SEUIL DE SURVIE ET DE PROTECTION DES
MOYENS D’EXISTENCE
L'établissement de seuils est essentiel pour savoir si les
ménages produisent suffisamment de nourriture et d'argent
pour satisfaire leurs besoins de base et pour déterminer
quand intervenir et comment mesurer le succès d'une
intervention. Dans l'AEM, deux seuils communs sont utilisés :
• Le seuil de survie (ligne rouge dans le graphique ci-
contre, Figure 6) : les coûts pour qu'un ménage puisse
subvenir à ses besoins de survie les plus élémentaires
pendant un an, y compris 100% de ses besoins
caloriques minimaux, ses besoins en eau (si de l'eau
est achetée), ses moyens de préparation des aliments
(ustensiles de base, kérosène ou bois de chauffage et
savon). Un déficit de survie devrait déclencher une
intervention pour sauver des vies.
• Le seuil de protection des moyens d’existence (ligne
bleue dans le graphique ci-contre, Figure 6) : les coûts
pour un ménage pour satisfaire ses besoins de survie
les plus élémentaires durant un an, ainsi que pour
maintenir ses moyens d’existence et répondre aux
standards de vie dans le contexte local, y compris les
intrants productifs, la santé, la scolarité et les articles
ménagers essentiels. Un déficit de protection des
moyens d'existence devrait déclencher une
intervention pour soutenir les moyens d'existence.
Les informations pour générer les seuils proviennent des
données de la ligne de base sur les patrons de dépenses.
Pour la plupart des produits alimentaires, articles et services
de base, c’est le schéma de dépenses de ménages Pauvres
durant l’année de référence qui est utilisé comme seuil ;
représentant la dépense minimale adéquate dans le contexte
local. Néanmoins, toutes les valeurs peuvent être révisées
facilement dans l’outil AEM. Les détails peuvent être trouvés
dans la base de données qui accompagne ce rapport ; le
tableau de synthèse ci-dessous indique la composition des
seuils par groupe socio-économique (en Franc CFA).
Le concept de « revenu total (nourriture + cash) » est utilisé en
AEM pour analyser la contribution des sources de nourriture
et les sources de revenus combinées utilisant une seule unité
de mesure : la contribution des différentes sources sous
forme de% des besoins énergétiques minimaux pour un
ménage (sur la base de 2 100 kcal par personne par jour) ; ou
bien, sous forme de la valeur économique des différentes
sources utilisant la divise locale. Pour effectuer le calcul, soit
les apports calorifiques sont transformés en valeurs
économiques, soit les revenus sont transformés en apports
calorifiques. Les deux calculs utilisent un panier alimentaire
adapté au contexte local pour calculer son coût.
Dans le graphique (Figure 6), nous pouvons voir la valeur du
panier de survie, qui est le même pour tous les ménages
puisqu'il est basé sur le même panier de produits de
première nécessité. Le seuil de protection des moyens
d'existence est différent dans chaque zone de moyens
d'existence et pour chaque groupe car les coûts du maintien
des moyens d'existence diffèrent selon le système de
production et le groupe socio-économique.
Le seuil de protection des moyens d'existence et le revenu
total fournissent une mesure de la sécurité des moyens
d'existence. Le « revenu total » divisé par le seuil de
protection des moyens d’existence fournit une mesure de la
sécurité des moyens d’existence des ménages ; le « score de
protection des moyens d'existence des ménages ».
Ce score est de : Très Pauvres 1.6; Pauvres 1.5, Moyens
1.9, Nantis 2.0.
RISQUES ET CHOCS
Les principaux risques auxquels font face les ménages de la
zone pêche artisanale des grands fleuves, cultures vivrières
sont résumés dans le tableau ci-contre (Figure 7).
STRATÉGIES D’ADAPTATION
Les stratégies d’adaptation sont les stratégies que les
ménages utilisent pour augmenter leur revenu en nourriture
et en argent après un choc ou un danger. Les différents
groupes de richesse utilisent des stratégies d’adaptation
différentes, selon les ressources et les biens dont ils
disposent. Autrement dit, dans la méthodologie adoptée pour
cette enquête, l’Analyse de l’Economie du Ménage (AEM), on
fait l’analyse quantifiée des capacités des ménages à
diversifier et à élargir leur accès à diverses sources de
nourriture et de revenu, et donc à faire face à un danger
déterminé. Cet aspect de l’analyse est souvent appelé dans
l’AEM « extensibilité ». Cependant, « l’extensibilité » dans l’AEM
n’est pas simplement une réflexion de ce qui est possible.
C’est aussi, en partie, un jugement de ce qui est acceptable du
point de vue humanitaire. C’est ainsi que des stratégies de
réponse que les ménages peuvent utiliser ne sont pas toutes
incluses dans une analyse des résultats. Certaines stratégies
peuvent être exclues si elles ont des effets secondaires
indésirables ou nuisibles du point de vue social ou qui
menacent la durabilité des moyens d’existence à moyen ou à
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
Figure 6 : Le graphique montre une représentation visuelle des sources de revenus et de nourriture des quatre groupes socio-économiques exprimés en termes de « revenu total » par rapport au deux seuils.
Cultures
Les changements climatiques (insuffisance ou irré-
gularité de la pluviométrie) qui affectent à la crois-
sance des cultures ainsi que la productivité.
Les maladies des cultures notamment la pourriture du manioc qui impacte la productivité ainsi que la
qualité du produit.
Les inondations dues à des pluies diluviennes parti-
culièrement en septembre et/ou avril. Cela détruit
les cultures et augmente l'incidence des maladies
des cultures.
Élevage
Les épizooties avec une réduction du cheptel
Baisse des prix du bétail sur le marché
Les inondations dues à des pluies diluviennes parti-
culièrement en septembre et/ou avril réduisent le cheptel à travers les maladies et les morts.
Pouvoir
d’achat
Les inondations dues à des pluies diluviennes parti-
culièrement en septembre et/ou avril ralentissent
les activités économiques.
Hausse des prix des denrées sur les marchés.
Baisse des prix du bétail
Baisse des prix de la rémunération de la main
d’œuvre.
Pêche
La montée d’eaux sur le fleuve pendant l’inonda-tion ne permet pas la pratique de la pêche d’où l’impact négatif sur le produit consommé ainsi que le revenu provenant de cette activité.
Figure 7 : Risques et chocs
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48 Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2
long terme telles que la vente ou l’hypothèque des articles
productifs notamment la terre, les femelles gestantes, etc.
Les inondations répétitives que vit la population de cette zone
sont l’un des facteurs du ralentissement de l’économie de
cette zone de moyens d’existence dans son ensemble. En
réponse aux risques et aux mauvaises années de production,
les ménages ne restent pas les bras croisés, ils réagissent afin
d’y faire face. Ces stratégies sont détaillées ci-dessous pour
cette zone de moyens d’existence :
• En cas d’inondation et en fonction du niveau de l’eau,
les ménages de tous les groupes socio-économiques
se déplacent dans les zones non-inondées laissant
malheureusement la majorité de leurs biens.
• Certains ménages qui restent pendant l’inondation
vivent dans des maisons construites avec des pilotis si
bien que leurs conditions de vie laissent à désirer.
• Les ménages Très Pauvres et Pauvres tentent
d'augmenter leurs revenus en intensifiant la
recherche de la main-d'œuvre agricole dans les
champs des ménages Moyens et Nantis pendant la
période pré-récolte et celle de récolte.
• Pendant une mauvaise année, il y a des limites
évidentes au revenu supplémentaire qui peut être
gagné surtout avec l’augmentation de l’offre de travail
des pauvres. Ainsi les ménages Moyens et Nantis
réduisent l’emploi des travailleurs agricoles en temps
et le taux de la rémunération. Cette stratégie adaptée
a un effet d'entraînement inverse pour les ménages
Pauvres, car elle réduit les gains dont bénéficient ces
ménages auprès de leurs paires Nantis.
Dans cette zone, l’extensibilité de différentes sources de
nourriture et revenu et les dépenses réduites, surtout pour
les ménages pauvres, en cas d’un choc ou d’un danger, sont
résumées dans les tableaux ci-dessous (Figure 8 et 9).
PARAMÈTRES CLÉS POUR LE SUIVI DE LA
SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
Les principaux paramètres énumérés dans le tableau ci-
contre sont les sources de nourriture et de revenus qui
contribuent de manière substantielle à l'économie des
ménages dans la zone d’existence CG09 Pêche artisanale des
grands fleuves, cultures vivrières. Ces différentes sources
devraient faire l'objet d'un suivi afin d'indiquer les pertes ou
les gains potentiels pour les économies locales des ménages,
soit par le biais de systèmes de suivi permanent, soit par des
évaluations périodiques. Il est également important de
surveiller les prix des principaux postes de dépenses, y
compris les denrées alimentaires de base.
RECOMMANDATIONS
Les recommandations suggérées ci-dessous, classées par
ordre de priorité par tous les groupes de richesse,
comprennent celles qui ont été mises en évidence par les
personnes interrogées elles-mêmes et celles qui ont été faites
par l'équipe d'évaluation à la suite de discussions détaillées et
d'observations sur le terrain. Pour la mise en œuvre de ces
suggestions afin d’accompagner ces communautés, il serait
nécessaire pour le PAM et/ou les autres intervenants
potentiels d’envisager d'autres études de faisabilité détaillées.
Appui aux systèmes de culture : Pour une bonne
amélioration de la production agricole, une priorité doit être
accordée à la modernisation des outils aratoires, à
l’introduction des variétés améliorées plus productives et plus
précoces mais aussi la formation des producteurs sur les
techniques de cultures. Cette stratégie nécessitera alors :
• La mise en place de structures communautaires de
commercialisation des semences et des intrants
(boutiques d’intrants villageoises par exemple) en
impliquant les pauvres dans le processus de gestion ;
• L’amélioration du système de commercialisation des
produits agricoles afin de diminuer le bradage
pendant la récolte par les plus pauvres en termes de
processus permettant des prix rémunérateurs aux
producteurs. Le warrantage pourrait être une option
à étudier et mettre en place ;
• L’appui à la production maraîchère ainsi que la
création de système d’écoulement de ces produits ;
• L’amélioration de l’accès au crédit d’investissement
aux ménages pauvres pour leurs permettre de
diversifier leurs moyens d’existence.
Denrée/produit/service
Un peu (25%)
Moitié (50%)
Pas d’achat/dépense (0%)
Habillement x
Articles ménagers x
Fêtes x
Bière locale x
Figure 9 : Dépenses pouvant être réduites dans une mauvaise année par les ménages pauvres
Sources de nourriture et revenu
Quantité pour l’année de réfé-
rence
Quantité pendant la mauvaise année
Vente de petits rumi-nants
1 à 2 têtes 2 à 3 têtes
Vente de volailles 3 à 5 poules 5 à 7 poules
Travail agricole 1 à 4 fois par mois 2 personne
4 à 6 fois par mois 3 à 4 personnes
Auto-emploi 2 à 3 semaines (1 à 2 personnes)
3 à 4 semaines (2 à 3 personnes)
Pêche 1 personne 2 à 3 personnes
Transfère d’argent Pas typique 15 000 à 20 000 FCFA
Migration/exode Pas typique 1 à 2 personnes
Figure 8 : Les stratégies de différentes sources de nourriture et revenu dans une mau-vaise année (ménages pauvres)
Appui aux systèmes d’élevage et de pêche :
Les opportunités de ces secteurs sont importantes dans la
zone et peuvent être améliorées par :
• La mise en place de structures de santé animale de
proximité afin de mieux répondre aux besoins ;
• La promotion de l’accroissement du petit élevage chez
les ménages très pauvres et pauvres soit par la
distribution des animaux mais aussi les techniques
d’élevage ;
• L’initiation de l’embouche ovine pour toutes les
catégories de groupe socio-économiques afin
d’accroitre leur revenu ;
• L’accompagnement en techniques et outils pour la
pêche artisanale ou la pisciculture.
Intégration de la nutrition à la sécurité alimentaire :
• Encourager la production et la consommation des
cultures maraîchères ;
• Orienter les ménages pauvres à la création des
structures collectives pour des activités économiques
plus rentables ;
• Améliorer l’accessibilité et la qualité des services de
santé et de l'éducation ;
• Sensibiliser sur l'hygiène ainsi que l'éducation
nutritionnelle.
Mai 2020 | Analyse de l’Economie des Ménages (AEM) en République du Congo volume 2 49
Paramètre clé -
Quantité
Paramètre clé - Prix
au producteur
Cultures
Manioc - production totale Maïs – production totale Bananes – production totale (douce et plan-tain) Arachides – production totale Taro – production totale
Prix manioc Prix maïs Prix bananes Prix arachides Prix taro
Production ani-male et pêche
Petit ruminants – nombre vendu Porcs – nombre vendu Poisson – quantité ven-du
Prix petit ruminants Prix porcs Prix poissons
Autres sources de nourriture et reve-nu
Main-d'œuvre agricole locale (pré-récolte) –demande locale Main-d'œuvre non-agricole locale (construction/brique) - demande locale Cueillette – accès Auto-emploi – niveau de demande Petit commerce – niveau de demande
Main-d'œuvre agri-cole locale (pré-récolte) - taux de la rémunération Main-d'œuvre non-agricole locale (construction/brique) - taux de la rémunéra-tion Cueillette - prix
Dépenses (denrée de base)
Manioc (farine et tubercules) Riz
Programme Alimentaire Mondial
Avenue du Général de Gaulle—BP 1036
Brazzaville—République du Congo
Tél. +242 06 668 74 93
Email : Brazzaville.registry@wfp.org
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