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Thèse présentée pour obtenir le grade de
Docteur de l’Université Louis Pasteur
Strasbourg I
( Domaine : Physique de la matière condensée )
par
Loïc Joly
Étude du mouvement du spin d’électrons dans des systèmes
ferromagnétiques mesuré en géométrie de réflexion par
spectroscopie électronique résolue en spin
Soutenue publiquement le 15/09/2006
Membres du jury :
Rapporteur Interne : B. DoudinRapporteur Externe : H.-J. DrouhinExaminateur : F. GautierRapporteur Externe : M. HehnDirecteur de Thèse : W. Weber
ii
A mes parents,
à ma soeur,
et à toute ma famille
"Sometimes it’s the search that counts, not the finding"
Aldous Gajic
Seeker of the Grail
Babylon 5, episode 15 "Grail"
iii
iv
Résumé
Cette thèse a été effectuée dans le cadre d’une thématique largement étudiée : le
transfert du moment cinétique entre les électrons injectés polarisés en spin et les électrons
établissant l’aimantation d’une couche mince magnétique. Il a été montré théoriquement
et expérimentalement qu’il était possible d’exciter une aimantation par le biais d’un fort
courant d’électrons polarisés en spin allant même jusqu’à obtenir un retournement complet
de l’aimantation dans des objets de taille nanométrique. Cet effet promet le développement
de nouveaux dispositifs magnétiques dans lesquels l’aimantation serait excitée par des
électrons polarisés en spin au lieu d’un champ magnétique.
La conservation du moment cinétique total implique que le couple exercé sur l’aiman-
tation par les électrons est exactement opposé au couple exercé sur les électrons polarisés
par l’aimantation. L’étude de l’effet du transfert de moment cinétique ne se fait donc pas
nécessairement par l’utilisation d’un fort courant d’électrons polarisés qui va exciter l’ai-
mantation. L’étude de l’effet d’une aimantation sur un faible courant d’électrons polarisés
sera tout aussi représentatif.
De nombreuses expériences ont été effectuées en injectant des électrons polarisés dans
un film mince en géométrie de transmission avec une polarisation parallèle ou antiparal-
lèle à l’aimantation, mettant en évidence un fort effet de filtrage de spin. Mais dans cette
géométrie colinéaire, aucun couple n’est exercé sur le vecteur polarisation des électrons.
De nouvelles expériences de transmission dans une géométrie où la polarisation des élec-
trons incidents est perpendiculaire à l’aimantation, ont mis en évidence un mouvement
du vecteur polarisation, qui peut se décomposer en deux sous-mouvements. Un premier
mouvement dû à une absorption dépendante du spin dans la couche ferromagnétique est
une rotation du vecteur polarisation vers l’aimantation. Le second mouvement est une
précession de type Larmor autour de l’aimantation. Son origine provient de la création
d’un déphasage dépendant du spin entre les électrons réfléchis et les électrons incidents
lors de l’interaction avec la couche ferromagnétique.
Aucune de ces études fournie cependant d’information sur les électrons réfléchis. Afin
d’obtenir une image plus complète du processus de transfert du moment cinétique dans
des couches minces ferromagnétiques, une étude en géométrie de réflexion est maintenant
v
nécessaire. C’est l’objet de ce présent travail.
La première partie de ce travail a consisté à étudier trois systèmes de couches minces
ferromagnétiques. Des couches polycristallines de Fe, de Co ou de Ni ont été déposées in-
situ et à température ambiante sur une couche tampon d’Au polycristallin sur un substrat
de verre. Le résultat principal découlant de ces expériences montre que le mouvement de
la polarisation des électrons est fortement lié à la structure de bandes électronique du
ferromagnétique.
La modélisation de la couche ferromagnétique par un modèle d’une marche de po-
tentiel dépendante du spin peut expliquer le comportement pour des énergies élevées. La
forte variation du mouvement du spin aux faibles énergies, cependant, s’explique par la
présence d’une bande interdite dépendante du spin dans la structure électronique du fer-
romagnétique. Des calculs ab initio corroborent cette interprétation. Cette partie aboutit
à une conclusion importante : pour avoir un angle de précession maximal et donc un trans-
fert du moment cinétique maximal en géométrie de réflection , il faut choisir un matériau
qui possède un rapport de l’énergie d’échange sur la largeur de la bande interdite aussi
grand que possible.
La seconde partie de ce travail a porté sur l’étude du mouvement de spin dans des
puits quantiques formés par un film ferromagnétique de Co(001) recouvert d’un film non
magnétique de Cu. L’apparition d’états quantiques dans de tels puits est à l’origine de phé-
nomènes oscillatoires dans les films minces. De plus, la présence d’interfaces magnétiques
ajoute une dépendance de spin au confinement quantique, qui intervient par exemple dans
le cas de systèmes tels que Co/Cu/Co(001), où l’on observe une oscillation du couplage
d’échange entre les deux couches ferromagnétiques séparées par la couche métallique non
magnétique. Ce phénomène est aussi responsable des oscillations observées lors de me-
sures magnéto-optiques, de moments magnétiques induits, ou d’anisotropie magnétique.
Cependant, aucune étude n’avait encore été menée sur le mouvement du spin dans de tels
systèmes.
Dans un premier temps, des mesures en fonction de l’énergie des électrons ont révélées
des oscillations du mouvement du spin. Nous avons pu montrer qu’un lien certain existe
entre les oscillations du mouvement du spin et l’apparition des états de puits quantiques.
Dans une seconde expérience, nous avons observé des oscillations à la fois de l’intensité et
du mouvement du spin en fonction de l’épaisseur de la couche de couverture et ceci pour
plusieurs énergies des électrons incidents. Nous avons montré qu’un modèle d’interféro-
mètre électronique de type Fabry-Pérot permet de très bien modéliser ces oscillations. Ce
modèle nous a aussi permis de déterminer des paramètres comme le coefficient de réflecti-
vité ou la différence de phase entre les électrons de spin up et de spin down de l’interface
vi
Cu/Co.
vii
viii
Remerciements
Un très grand merci à
– Bernard Doudin, Henri-Jean Drouhin, François Gautier et Michel Hehn pour avoir
accepté de participer à mon jury de thèse.
– Marc Drillon et Charles Hirlimann de m’avoir accueilli à l’Institut de Physique et
Chimie des Matériaux de Strasbourg.
– Jean Paul Kappler de m’avoir accueilli dans le Groupe d’Etude des Matériaux Mé-
talliques.
– Wolfgang Weber mon directeur de thèse avec qui travailler a été un très grand plaisir.
Merci pour ta disponibilité, ta patience, tes conseils avisés, ta bonne humeur, tes
coups de main sur la manip, les discussions, les corrections, la recherche d’un post-
doc... , enfin tout quoi !
– Fabrice Scheurer pour tout tes conseils, tes nombreux coups de main et ton soutient
lors de ma recherche d’un post-doc.
– Jacques Faerber pour tes conseils et tes images par microscopie électronique à ba-
layage.
– Véronique Wernher pour m’avoir sorti de tout ces déboires administratifs, sa bonne
humeur et sa gentillesse.
– Corinne Ulhaq pour m’avoir appris à préparer des échantillons pour le TEM.
– Daniel Spor pour avoir résolu tout mes problèmes électroniques divers.
– Jacek Arabski et Manuel Acosta Mendez pour tout leurs conseils avisés.
– Guy Schmerber pour ses mesures de diffractions X.
– Silviu Colis pour ses mesures magnétiques sur AGFM.
– Victor Da Costa pour sa formation sur la microscopie à force atomique.
– Hicham Majjad et Martin Bowen qui partagent mon bureau. Merci à vous pour
votre bonne humeur quotidienne.
– Alain Carvalho pour sa formation sur le profilomètre.
– Arnaud Boulard pour la fabrication des pièces mécaniques.
ix
– Mébarek Alouani et Jens Kortus pour leurs calculs de structure de bande électro-
nique.
– Jonathan Kin Ha pour son soutien lors de ma première année de thèse.
– Matthieu Bailleul, Eric Beaurepaire, Yves Henry, Christian Meny, Pierre Panissod,
Olivier Bengone, Samy Boukari et David Halley pour les discussions diverses lors
du café après le repas de midi.
– Guillaume Rogez pour sa bonne humeur constante.
– Julien Venuat pour ces multiples et diverses discussions autour d’un café ou du repas
de midi, merci à toi et à Perine pour l’après midi galette.
– Vincent Vlaminck pour la préparation de substrats de Si à moitiés recouvert de
résine ou de feutre pour la calibration des épaisseurs déposées lors des dépôts.
– Mes amis thèsards : Gabriel Vasseur, Guillaume Weick, Madjiid Abes, Peter Fal-
loon, Romaric Montsouka, Logane Tati Bismaths, Mircea Vomir, Nader Yaacoub,
Annabelle Bertin, Stéphane Klein, Aude Demessence, Thomas Fix, Rodaina Sayed
Hassan, Aymeric Avisou et Thomas Hauet.
– Mes collègues du Groupe d’étude des Surfaces et Interfaces : Christine Goyhenex,
Hervé Bulou, Christine Boeglin, Sébastien Joulie, Michelangelo Romeo.
– Mention spéciale pour Stéphane Mangin et François Montaigne sans doute les deux
personnes à qui je dois le plus de m’avoir donné envie de continuer à faire de la
physique durant ma formation universitaire et mes stages au laboratoire de Nancy.
– Mes collègues de Nancy du Laboratoire de Physique des Matériaux que j’ai croisé
plusieurs fois lors de diverses manifestations scientifiques : Stéphane Andrieu, Ca-
therine Dufour, Karine Dumesnil, Daniel Lacour, Michel Piecuch, Alain Schuhl,
Coriolan Tiusan.
– Toute ma famille pour m’avoir supporté durant ces dernières années.
x
xi
xii
Table des matières
Résumé v
Remerciements ix
Introduction 7
I Théorie et dispositif expérimental 13
1 Mouvement du spin 15
1.1 Spin de l’électron . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.2 Polarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.2.1 Faisceau d’électrons polarisés en spin . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.2.1.1 Observable de spin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.2.1.2 Etat de spin pur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.2.2 Matrice densité d’un faisceau d’électrons polarisés en spin . . . . . 20
1.3 Mouvement du vecteur polarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.3.1 Effet d’un ferromagnétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.3.1.1 Faisceau totalement polarisé en spin . . . . . . . . . . . . 24
1.3.1.2 Faisceau totalement dépolarisé en spin . . . . . . . . . . . 26
1.3.1.3 Faisceau partiellement polarisé en spin . . . . . . . . . . . 27
1.3.2 Direction de l’aimantation et du vecteur polarisation quelconque
dans l’espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2 Dispositif expérimental 33
2.1 Principe de l’expérience . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.2 La source d’électrons polarisés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.2.1 Principe de l’émission d’électrons polarisés en spin . . . . . . . . . . 37
2.2.2 Les différentes sources utilisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
1
Table des matières
2.2.2.1 Préparation avant activation . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
2.2.3 Méthode d’activation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
2.3 Chambre principale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.3.1 Le porte échantillon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
2.3.2 Evaporateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.4 Optique électronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.1 Inversion de la polarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.2 Déflecteur à 90° . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.3 Lentilles électrostatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
2.4.4 Bobines de déflexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
2.4.5 Optique électronique avant le détecteur de Mott . . . . . . . . . . . 48
2.4.6 Performance de l’ensemble : optiques électroniques - analyseur . . . 48
2.4.7 Schéma des potentiels dans l’expérience . . . . . . . . . . . . . . . 50
2.5 Détecteur de Mott . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
2.5.1 Principe du détecteur de Mott . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
2.5.2 Diffusion de Mott . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
2.5.3 Facteur de Sherman effectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
2.5.4 Fonctionnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
2.5.5 Accélération à 100 keV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
2.5.6 Détection des électrons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
II Résultats et discussions 61
3 Films ferromagnétiques polycristallins 63
3.1 Films polycristallins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.1.1 Caractérisation structurale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.1.1.1 Diffraction par rayons X . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.1.1.2 Microscopie électronique en transmission . . . . . . . . . . 67
3.1.1.3 Microscopie électronique à balayage . . . . . . . . . . . . . 67
3.1.2 Caractérisation magnétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
3.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
3.2.1 Angle de précession . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
3.2.2 Angle de rotation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
3.2.3 Réflectivité électronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
3.3 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
3.3.1 Modèle de la marche de potentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
2
Table des matières
3.3.2 Réflexion des électrons sur une bande interdite . . . . . . . . . . . . 78
3.3.3 Pourcentage d’électrons qui ont rencontrés la bande interdite . . . . 82
3.3.4 Calcul de structure de bandes électronique par FP-LMTO . . . . . 86
4 Mouvement du spin dans une structure de puits quantique 89
4.1 Films monocristallins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
4.2 Système Cu/Co/Cu(001) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
4.2.1 Étude en fonction de l’énergie des électrons incidents . . . . . . . . 93
4.2.2 Étude en fonction de l’épaisseur de la couche de Cu . . . . . . . . . 98
4.3 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
4.3.1 Principe du Fabry-Pérot électronique . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
4.3.2 Le programme d’ajustement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
4.3.3 Résultats des ajustements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
III Conclusions et perspectives 117
5 Conclusions et perspectives 119
Annexes 124
A Matrice densité 127
B La mesure du mouvement du spin 129
B.1 Étude de cas particuliers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
B.1.1 Un cas idéal : ~P0 ‖ ~M . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
B.1.2 Un autre cas idéal : ~P0 ⊥ ~M . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
B.2 Problème lors des mesures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
B.2.1 Approximations dans un cas réel pour les très faibles énergies . . . 134
B.2.2 Le système physique modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
B.2.3 Qualité de l’approximation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
C Outils gratuits utilisés lors de ma thèse 141
Traitement de texte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
Traitement d’image . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
Dessin 3D . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
Developpement en C/C++ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
3
Table des matières
Références 145
4
5
6
Introduction
7
Introduction
La plupart des dispositifs électroniques d’aujourd’hui utilisent uniquement les pro-
priétés électriques de l’électron, mais l’électron possède aussi un spin encore ignoré dans
l’électronique conventionnelle. Ce n’est que depuis la découverte de la magnéto résistance
géante (GMR) et de la magnéto résistance tunnel (TMR) que les chercheurs se sont ef-
forcés de développer de nouveaux dispositifs électroniques permettant d’utiliser cet effet
dépendant du spin, par exemple dans des systèmes d’enregistrement magnétique ( via des
têtes de lecture de plus en plus sensibles dans les disques durs d’ordinateur).
Alors que l’aimantation d’une couche magnétique est généralement orientée par l’ac-
tion d’un champ magnétique dans la direction désirée, Slonczewski [1] et Berger [2] ont
prédit qu’il devait être possible de changer l’orientation de l’aimantation d’un matériau
magnétique sans appliquer un champ magnétique, simplement en injectant un courant
d’électrons polarisés en spin qui vont transférer une partie de leur moment angulaire à
l’aimantation considérée.
Plus récemment, il a été montré par Myers [3] qu’il était possible de totalement
renverser l’aimantation dans des systèmes multicouches magnétiques nanostructurés, en
injectant dans ceux-ci un courant électrique polarisé en spin de densité suffisante (≈109A/cm2). Les électrons injectés interagissent avec l’aimantation en lui transférant un
moment angulaire qui l’excite. Cette expérience prouve qu’il est possible de renverser une
aimantation sans l’aide d’un champ magnétique, ce qui constituerait une grande avancée
dans le stockage d’information sur support magnétique. Une application directe de ce phé-
nomène serait la conception de mémoires magnétiques (spin-RAM) qui consommeraient
moins d’énergie que les systèmes actuels dans lesquels la commutation est effectuée par
un champ magnétique. De plus, l’effet du courant polarisé serait localisé sur l’élément à
commuter et n’aurait pas d’influence sur les éléments voisins.
Pour mieux comprendre ce phénomène, il est nécessaire d’analyser ce transfert du
moment angulaire entre les électrons et l’aimantation. La majorité des études menées jus-
qu’ici ont porté sur l’effet d’un fort courant d’électrons polarisés en spin sur l’aimantation
de couches magnétiques. Cependant la conservation du moment cinétique total implique
que le couple exercé par les électrons incidents sur les électrons établissant l’aimantation
soit exactement opposé à celui exercé par les électrons établissant l’aimantation sur les
électrons incidents. L’étude du transfert du spin peut donc se faire en étudiant l’effet de
l’aimantation sur les électrons incidents polarisés.
L’absorption dépendante de spin, responsable de la GMR, n’est pas le seul effet présent
dans un matériau ferromagnétique. Il existe aussi un mouvement du vecteur polarisation
des électrons lors de leur interaction avec l’aimantation du matériau ferromagnétique.
Alors que l’effet d’absorption dépendante de spin a été très largement étudié depuis la
8
Introduction
découverte de la GMR, très peu d’investigations concernant le mouvement de spin ont
été menées. Jusqu’à maintenant, toutes les expériences étaient effectuées en injectant des
électrons possédant un vecteur polarisation parallèle ou antiparallèle à l’aimantation du
ferromagnétique. Ce type de configuration ne peut en aucun cas induire un mouvement
de spin, car le couple exercé sur le vecteur polarisation des électrons par l’aimantation est
nul.
Pour obtenir un couple maximal il faut donc choisir une configuration où l’aimantation
et la polarisation d’électrons sont perpendiculaires. Très récemment, des études exploitant
cette configuration perpendiculaire ont été menées par Weber et collaborateurs dans le
cas de l’injection d’électrons polarisés transmis à travers des films minces ferromagné-
tiques auto-supportés. Les résultats indiquent qu’un mouvement du vecteur polarisation
apparaît. Celui-ci pouvant se décomposer en deux sous-mouvements : un mouvement de
rotation vers l’aimantation du ferromagnétique, et un mouvement de précession autour
de l’aimantation.
Ce type d’étude en géométrie de transmission a permis de mieux comprendre le phé-
nomène de transfert de spin. Cependant, pour obtenir une image plus complète de ce
phénomène dans des dispositifs électroniques, il est néanmoins nécessaire d’étudier le
mouvement de spin pour le cas des électrons réfléchis. Le but de ce travail a donc été
d’apporter une contribution à l’étude du mouvement de spin en géométrie de réflexion sur
des systèmes ferromagnétiques.
La première partie de ce travail a porté sur l’étude du mouvement de spin en fonction
de l’énergie des électrons incidents sur des échantillons polycristallins de Fe, Co et Ni.
La deuxième partie de ce travail a été consacrée à un autre type d’expérience. Nous
avons étudié l’effet de la présence d’états de puits quantiques sur le mouvement de spin.
En fait, nous avons étudié le mouvement de spin d’électrons polarisés en géométrie de
réflexion dans des structures de puits quantiques dépendant du spin. Cette étude a été
motivée par le fait que l’apparition d’états de puits quantiques dans ces structures est à
l’origine de plusieurs effets oscillatoires. De plus, la présence d’une interface magnétique
dans ces systèmes engendre un confinement quantique qui est dépendant du spin. Ce
dernier effet est notamment responsable des oscillations du couplage d’échange entre deux
couches ferromagnétiques séparées par une couche non magnétique [4], de la réponse
magnéto-optique [5], du moment magnétique induit [6] et de l’anisotropie magnétique [7].
Cependant, la possibilité d’un mouvement de spin des électrons dû à des interférences
quantiques dépendant du spin n’a encore jamais été considérée.
Nous avons étudié le mouvement de spin dans le système Cu/Co/Cu(001) en fonction
de l’énergie des électrons incidents ainsi qu’en fonction de l’épaisseur de la couche de
9
Introduction
recouvrement non magnétique.
Ce manuscrit a été organisé de la manière suivante.
Dans le premier chapitre, nous nous intéressons au mouvement de spin des électrons,
en commençant par un bref rappel sur le spin et sur l’état de polarisation de spin de
l’électron. Nous serons ensuite en mesure de comprendre le principe du mouvement du
vecteur polarisation de spin d’un électron après une interaction avec un film mince ferro-
magnétique.
Le second chapitre décrit le dispositif expérimental que nous avons utilisé.
Le troisième chapitre présente les résultats obtenus sur les échantillons polycristallins
de Fe, Co et Ni. Une relation très nette entre la structure de bandes électronique du
film ferromagnétique et le mouvement de spin est mise en évidence. Ces résultats sont
corroborés par des calculs ab initio.
Le quatrième chapitre est consacré à l’étude du mouvement de spin dans une structure
de puits quantique : Cu/Co/Cu(001) en fonction de l’énergie des électrons pour une
épaisseur de cuivre donnée. Cette étude montre que la présence d’états de puits quantiques
dans la couche de cuivre est à l’origine des oscillations de l’intensité réfléchie ainsi que
du mouvement de spin. La deuxième étude a porté sur l’investigation du mouvement de
spin et de l’intensité réfléchie en fonction de l’épaisseur de la couche de recouvrement
de cuivre et ceci pour différentes valeurs de l’énergie des électrons incidents. Cette étude
montre que les oscillations de l’intensité réfléchie et du mouvement de spin peuvent très
bien s’expliquer par un modèle d’interféromètre du type Fabry-Pérot.
Le cinquième chapitre présente la conclusion de ce travail et donne quelques prolon-
gements pour de futurs travaux.
Des annexes présentent un rappel sur la matrice densité, des détails sur la méthode
de mesure développée pour étudier le mouvement de spin pour de très faibles énergies
des électrons incidents, ainsi que quelques références sur les outils informatiques gratuits
disponibles sur internet dont j’ai fait usage pendant ma thèse.
10
Introduction
11
12
Première partie
Théorie et dispositif expérimental
13
Chapitre 1
Mouvement du spin
Sommaire1.1 Spin de l’électron . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.2 Polarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.2.1 Faisceau d’électrons polarisés en spin . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.2.1.1 Observable de spin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.2.1.2 Etat de spin pur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.2.2 Matrice densité d’un faisceau d’électrons polarisés en spin . . . 20
1.3 Mouvement du vecteur polarisation . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.3.1 Effet d’un ferromagnétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.3.1.1 Faisceau totalement polarisé en spin . . . . . . . . . . 24
1.3.1.2 Faisceau totalement dépolarisé en spin . . . . . . . . . 26
1.3.1.3 Faisceau partiellement polarisé en spin . . . . . . . . . 27
1.3.2 Direction de l’aimantation et du vecteur polarisation quelconquedans l’espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
15
Chapitre 1 : Mouvement du spin
Cette partie essentiellement théorique rappelle des notions de base pour la compré-
hension de la section portant sur le mouvement du spin.
1.1 Spin de l’électron
Dans la description quantique de l’électron, celui-ci possède une charge électrique, mais
aussi tout comme d’autres particules élémentaires, une autre propriété intrinsèque qui est
le spin. Beaucoup d’expériences montrent l’existence du spin de l’électron, comme par
exemple la structure fine des raies spectrales de l’atome d’hydrogène ou l’effet Zeeman
«anormal». De plus, il est impossible d’expliquer les propriétés magnétiques des corps
ferromagnétiques sans faire appel au spin. Afin d’interpréter les résultats expérimentaux,
il est nécessaire d’admettre que l’électron est une particule de spin 1/2 (s = 1/2), c’est à
dire qu’il possède un moment cinétique intrinsèque ~S, auquel il faut associer un moment
magnétique ~MS = −gµB~S, avec g le facteur gyromagnétique que l’on approxime à g = 2
et µB = eh/2me le magnéton de Bohr.
Pour obtenir une description quantique du spin, Pauli énonça deux postulats [8] :
– L’opérateur de spin ~S est un moment cinétique. Ses composantes sont donc reliées
par la relation de commutation [Sx, Sy] = ihSz. Par permutation circulaire de Sx,
Sy et Sz on obtient les deux autres relations.
– L’ensemble des états propres |s,m〉 communs à S2 et Sz est défini par :
S2|s,m〉 = s(s+ 1)h2|s,m〉Sz|s,m〉 = mh|s,m〉
L’espace des états de spin est dans le cas de l’électron de dimension 2. Nous pouvons
donc prendre comme base le système orthonormé | ↑〉, | ↓〉 des kets propres communs à
S2 et Sz qui vérifient les équations :
S2| ↑〉 = 34h2| ↑〉
S2| ↓〉 = 34h2| ↓〉
Sz| ↑〉 = +12h| ↑〉
Sz| ↓〉 = −12h| ↓〉
〈↑ | ↓〉 = 0
〈↑ | ↑〉 = 〈↓ | ↓〉 = 1
| ↑〉〈↑ | + | ↓〉〈↓ | = 11 (matrice unité)
16
1.2 : Polarisation
Un état de spin quelconque est donné par :
|χ〉 = a1| ↑〉 + a2| ↓〉
avec a1 et a2 des nombres complexes.
L’opérateur ~S agissant dans l’espace d’états de spin peut être représenté par une
matrice 2 × 2 :~S =
h
2~σ
où ~σ désigne les matrices de Pauli :
σx =
(
0 11 0
)
σy =
(
0 −i
i 0
)
σz =
(
1 00 −1
)
1.2 Polarisation
1.2.1 Faisceau d’électrons polarisés en spin
1.2.1.1 Observable de spin
L’opérateur de spin ~S prend tout son sens pour des fonctions d’onde à deux compo-
santes tel que
(
a1
a2
)
, qui vont nous aider à décrire les différentes orientations du spin
des électrons. Nous avons par exemple les équations aux valeurs propres suivantes
σz
(
10
)
=
(
1 00 −1
)(
10
)
= 1.
(
10
)
σz
(
01
)
=
(
1 00 −1
)(
01
)
= −1.
(
01
)
ce qui signifie que l’état
(
10
)
est un vecteur propre de σz avec la valeur propre +1 (ou
+h/2 pour Sz) ainsi que l’état
(
01
)
avec la valeur propre -1 (ou −h/2 pour Sz). On
peut utiliser ces deux états comme base pour représenter l’état général défini plus haut
χ =
(
a1
a2
)
comme une superposition des deux vecteurs propres
χ = a1
(
10
)
+ a2
(
01
)
=
(
a1
a2
)
Dans le cas où cet état de spin χ est normalisé nous avons
〈χ|χ〉 = (a∗1, a∗2)
(
a1
a2
)
= |a1|2 + |a2|2 = 1
17
Chapitre 1 : Mouvement du spin
1.2.1.2 Etat de spin pur
Dans cette partie, on va supposer que tous les électrons se trouvent dans le même état
de spin. Dans ce cas, le faisceau d’électrons est dit dans un état de spin pur. La direction
de spin de l’état décrit par χ =
(
a1
a2
)
est spécifié par a1 et a2 comme nous le verrons.
Fig. 1.1 – Représentation du vecteur unitaire ~e.
Soit −→e = (ex, ey, ez) le vecteur unitaire dans la direction (ϑ, φ) définie par la figure
1.1, avec
ex = sinϑ cosφ, ey = sinϑ sinφ, ez = cosϑ
Pour connaître la fonction de spin qui décrit un spin dans la direction (ϑ, φ), nous devons
résoudre l’équation aux valeurs propres (−→σ .−→e )χ = λχ, puisque (−→σ .−→e ) est la projection
de l’opérateur de spin suivant la direction −→e . Avec
σx
(
a1
a2
)
=
(
a2
a1
)
, σy
(
a1
a2
)
=
(
−ia2
ia1
)
, σz
(
a1
a2
)
=
(
a1
−a2
)
nous obtenons
(−→σ .−→e )χ =
(
a2 sinϑ cosφ− ia2 sinϑ sinφ+ a1 cosϑa1 sinϑ cosφ+ ia1 sinϑ sinφ− a2 cosϑ
)
=
(
a1 cosϑ+ a2 sinϑe−iφ
a1 sinϑeiφ − a2 cosϑ
)
L’équation aux valeurs propres nous donne donc le système d’équations suivant
a1(cosϑ− λ) + a2 sinϑe−iφ = 0
a1 sinϑeiφ + a2(− cosϑ− λ) = 0
18
1.2 : Polarisation
Ce système possède des solutions non triviales si son déterminant est nul
− cos2 ϑ+ λ2 − sin2 ϑ = 0
c’est à dire si λ2 − 1 = 0 et donc λ = ±1.
Pour λ = +1 nous obtenons
a2
a1
=cosϑ− 1
− sinϑe−iφ= tan
ϑ
2eiφ
et pour λ = −1a2
a1
=cosϑ+ 1
− sinϑe−iφ= − cot
ϑ
2eiφ.
De plus, la fonction d’onde de spin χ doit être normalisés : 〈χ|χ〉 = 1. Nous avons donc
a1 = cosϑ
2, a2 = sin
ϑ
2eiφ pour λ = +1 et
a1 = sinϑ
2, a2 = − cos
ϑ
2eiφ pour λ = −1.
Un facteur de phase commun reste indéterminé pour a1 et a2.
On définira par la suite le vecteur polarisation de spin comme étant la valeur moyenne
de l’opérateur −→σ dans l’état de spin χ
−→P = 〈−→σ 〉 = 〈χ|−→σ |χ〉 = (a∗1, a
∗2)−→σ(
a1
a2
)
.
Avec cette définition nous trouvons
Px = sinϑ cosφPy = sinϑ sinφPz = cosϑ .
Nous pouvons aussi définir le degré de polarisation comme
P =√
P 2x + P 2
y + P 2z
qui vaut 1 ici. C’est correct car nous avons pris comme hypothèse que les spins des électrons
étaient décrit par la fonction de spin
(
a1
a2
)
qui est un état pur. Si l’état χ n’est pas
normalisé, nous utiliserons la définition suivante pour−→P :
−→P =
〈χ|−→σ |χ〉〈χ|χ〉 .
Nous notons que le cas particulier où a1 = a2 = 1/√
2 définit un état de spin pur
χ = 1√2
(
11
)
. Les relations ci-dessus indiquent que ϑ = π/2 et φ = 0. Cet état de spin
pur représente donc le cas où le vecteur polarisation est orienté parallèlement à l’axe x.
Nous serons amenés à utiliser ce cas par la suite.
19
Chapitre 1 : Mouvement du spin
1.2.2 Matrice densité d’un faisceau d’électrons polarisés en spin
En général, un faisceau d’électrons polarisés ne se trouve pas dans un unique état de
spin pur. Il est donc nécessaire d’utiliser un formalisme tenant compte de multiples états
de spin pur.
Considérons un ensemble d’électrons répartis statistiquement dans des sous-ensembles
d’états purs définis par les vecteurs d’états χn =
(
an1
an2
)
, possédant une occupation Nn
et un vecteur de polarisation de spin du sous-ensemble n décrit par−→Pn = 〈χn|−→σ |χn〉. Le
vecteur polarisation du spin total−→P du système est
−→P =
∑
n
Nn−→Pn
∑
n
Nn
=
∑
n
Nn 〈χn|−→σ |χn〉∑
n
Nn
=∑
n
wn 〈χn|−→σ |χn〉
avec
wn =Nn
∑
nNn
.
La matrice densité du système est définie par
ρ =∑
n
wn|χn〉〈χn| =∑
n
wn
(
an1
an2
)
(
an1∗ an
2∗ ) =
∑
n
wn
(
|an1 |2 an
1an2∗
an1∗an
2 |an2 |2
)
.
Le vecteur polarisation total du système peut s’écrire (Annexe A) :
−→P =
Tr(ρ−→σ )
Tr(ρ)
d’où
Px =Tr(ρσx)Tr(ρ)
=
∑
n
ωn(an1a
n2∗ + an
1∗an
2 )
Tr(ρ)
Py =Tr(ρσy)Tr(ρ)
=
i
∑
n
ωn(an1a
n2∗ − an
1∗an
2 )
Tr(ρ)
Pz =Tr(ρσz)Tr(ρ)
=
∑
n
ωn(|an1 |2 − |an
2 |2)
Tr(ρ).
20
1.3 : Mouvement du vecteur polarisation
En utilisant ces relations, nous pouvons aussi montrer que la matrice densité s’exprime
en fonction des composantes du vecteur polarisation de spin [9] :
ρ
Tr(ρ)=
1
2
(
1 + Pz Px − iPy
Px + iPy 1 − Pz
)
=1
2
(
I +−→P · −→σ
)
.
Si nous choisissons une polarisation suivant l’axe z(−→P = (0, 0, P0)
)
, la matrice densité
est diagonale
ρ =1
2
(
1 + P0 00 1 − P0
)
. (1.1)
Pour un faisceau totalement polarisé en spin suivant l’axe z (P0 = 1), la matrice densité
devient donc
ρpol =
(
1 00 0
)
alors que pour un faisceau totalement dépolarisé en spin (P0 = 0) on a
ρunpol =
(
12
00 1
2
)
.
A partir de la relation (1.1) nous obtenons la matrice densité pour un faisceau partielle-
ment polarisé en spin qui nous sera utile par la suite
ρtotal =1
2
(
1 + P0 00 1 − P0
)
= P0
(
1 00 0
)
+ (1 − P0)
(
12
00 1
2
)
.
En généralisant nous obtenons la matrice densité pour un faisceau possédant un vecteur
polarisation quelconque :
ρtotal = P0ρpol + (1 − P0)ρunpol . (1.2)
Nous constatons donc une propriété intéressante. Un faisceau d’électrons partielle-
ment polarisés, possédant un vecteur polarisation de spin P0, peut être considéré comme
la superposition d’un faisceau totalement polarisé en spin et d’un faisceau totalement
dépolarisé dans le rapport P0
1−P0[10].
1.3 Mouvement du vecteur polarisation
Par la suite, nous n’allons parler que de spin, et non de moments magnétiques. Le
moment magnétique associé à un spin étant ~MS = −gµB~S, il est toujours opposé à la
direction du spin. L’aimantation d’un matériau ferromagnétique est donc toujours op-
posée à la direction des spins majoritaires. Mais par abus de langage, nous allons dans
21
Chapitre 1 : Mouvement du spin
ce manuscrit, assimiler la direction de l’aimantation à la direction des spins majoritaires
dans le ferromagnétique.
Soit par la suite, l’aimantation ~M d’un ferromagnétique suivant la direction de l’axe
z. Considérons un électron ayant son spin suivant l’axe x. D’après la section 1.2.1.2, la
fonction d’onde de spin d’un tel électron s’écrit donc comme étant la superposition de
deux fonctions d’ondes de spin correspondant aux directions du spin up et du spin down
ψ0 =1√2
[(
10
)
+
(
01
)]
.
Après interaction avec le ferromagnétique en réflexion, sa fonction d’onde devient
ψ =1√2
[
|r↑|(
10
)
eiθ↑+ |r↓|
(
01
)
eiθ↓]
.
On remarque l’introduction de deux changements. Le premier est l’apparition d’un
module de l’amplitude de réflection |r↑,↓| qui est dépendant du spin . Les deux fonctions
d’ondes partielles de spin sont différemment diffusées à cause de la sélectivité en spin
de l’interaction ferromagnétique. En conséquence, deux modules dépendant du spin du
coefficient de réflection apparaissent.
La différence entre ces deux modules des coefficients de réflection |r↑| et |r↓| va faire
apparaître un changement de l’angle entre le vecteur polarisation des électrons incidents
et l’aimantation du ferromagnétique. Par exemple, si les électrons de spin minoritaire sont
moins bien réfléchis que les électrons de spin majoritaire, on a |r↑| > |r↓|, alors le vecteur
polarisation tourne vers la direction de l’aimantation d’un angle φ.
Le deuxième changement intervient sur la phase des ondes de spin partielles. Les deux
fonctions d’ondes partielles de spin ont aussi une phase qui est dépendante du spin pendant
la réflection. Cela entraîne un déphasage entre elles, ce qui correspond dans l’espace réel à
une précession du vecteur polarisation autour de l’aimantation du ferromagnétique d’un
angle ε = θ↓ − θ↑. Le choix de prendre la différence de phase comme étant la phase des
spins minoritaires moins la phase des spins majoritaires est arbitraire. Ce mouvement du
vecteur polarisation est représenté sur la figure 1.2.
En tenant compte d’un faisceau d’électrons partiellement polarisés en spin, le vecteur
polarisation ~P résultant est la valeur moyenne du produit de la matrice densité ρ et des
matrices de Pauli σi (i = x, y, z) dans l’état ψ :
~P =〈ψ|ρ~σ|ψ〉〈ψ|ψ〉 .
Nous trouvons donc
22
1.3 : Mouvement du vecteur polarisation
Fig. 1.2 – Mouvement du vecteur polarisation après interaction avec un ferromagnétique.
~P =
2P0|r↑||r↓| cos(θ↓ − θ↑)
|r↑|2 + |r↓|2
2P0|r↑||r↓| sin(θ↓ − θ↑)
|r↑|2 + |r↓|2
|r↑|2 − |r↓|2|r↑|2 + |r↓|2
=
P0
√1 − A2 cos ε
P0
√1 − A2 sin ε
A
en introduisant l’asymétrie suivante : A = |r↑|2−|r↓|2|r↑|2+|r↓|2 .
En utilisant les projections de ce vecteur polarisation, il est simple de trouver l’angle
de rotation φ :
φ = arctan
( |r↑|2 − |r↓|22P0|r↑||r↓|
)
= arctan
(
A
P0
√1 − A2
)
.
La forme de l’asymétrie A suggère une autre façon de remonter à l’angle φ que par une
mesure directe dans la configuration non colinéaire, à savoir dans une configuration où la
polarisation initiale et l’aimantation sont parallèle ou antiparallèle. Comme |r↑|2 et |r↓|2sont proportionnelles aux intensités I↑ et I↓ des électrons réfléchis dans la configuration
parallèle respectivement antiparallèle de la polarisation initiale et l’aimantation, on obtient
A et donc l’angle φ dans cette configuration. Bien entendu, dans la dernière configuration
il n’y a pas de mouvement du spin et donc ni rotation φ, ni précession ε. Mais, à travers
23
Chapitre 1 : Mouvement du spin
une telle mesure on peut remonter à l’angle φ qui devrait exister dans une configuration
non colinéaire. En revanche, il est impossible de remonter à l’angle de précession dans
cette configuration.
Nous notons que dans les mesures du chapitre 3 nous avons préféré, pour des raisons
expérimentales, de déterminer l’angle φ à travers cette configuration colinéaire alors que
dans le chapitre 4 l’angle φ a été mesuré en alignant le vecteur polarisation et l’aimantation
du ferromagnétique dans une configuration perpendiculaire et en utilisant les relations B.4
données dans l’annexe B.
Par la suite, l’angle de rotation est toujours normalisé pour une polarisation de 100%.
1.3.1 Polarisation de spin des électrons après interaction avecun ferromagnétique
Dans cette partie, nous allons voir comment change la polarisation d’un faisceau d’élec-
trons lorsque celui-ci interagit avec un ferromagnétique dans une expérience de réflexion.
Étudions le cas où l’aimantation−→M du ferromagnétique est dans une direction quelconque
de l’espace (fig.1.3). Nous nous plaçons dans le cas où le faisceau d’électrons se déplace
suivant l’axe y, et possède une polarisation partielle de spin−→P0 suivant la direction z. La
direction de l’aimantation est définie par les angles θ et α. L’angle θ représente l’angle
entre l’aimantation−→M et la polarisation de spin
−→P0, et l’angle α est l’angle azimutal. La
polarisation de spin est mesurée dans le repère x,y,z. Mais il est utile d’introduire un
second repère x’,y’,z’ qui est donné par la rotation du repère x,y,z. Nous avons vu
précédemment par la relation 1.2 qu’un faisceau d’électrons partiellement polarisés en spin
peut se décrire comme la superposition d’un faisceau d’électrons totalement polarisés en
spin et d’un faisceau totalement dépolarisé en spin. Nous allons donc étudier ces deux
types de faisceau de façon indépendante.
1.3.1.1 Faisceau totalement polarisé en spin
Pour simplifier les calculs et en se plaçant dans le repère x,y,z, considérons un
faisceau d’électrons totalement polarisés en spin suivant la direction z, sa fonction d’onde
de spin étant égale à
ψ1 =
(
10
)
.
Pour obtenir la représentation de cette fonction d’onde de spin dans le repère x’,y’,z’
nous avons besoin de la matrice de Wigner [11]
R =
(
cos θ2e−i
α2 sin θ
2ei
α2
− sin θ2e−i
α2 cos θ
2ei
α2
)
.
24
1.3 : Mouvement du vecteur polarisation
Fig. 1.3 – Définition des angles θ et α définissant le repère x’,y’,z’
La fonction d’onde de spin devient donc dans le repère x’,y’,z’
ψ2 = Rψ1 =
(
cos θ2e−i
α2
− sin θ2e−i
α2
)
.
Il a déjà été montré [12] qu’il est possible de définir une matrice donnant les propriétés
du ferromagnétique comme
F =
( √1 + Ae−i
ε2 0
0√
1 − Aeiε2
)
.
Cette matrice définit l’interaction entre la fonction d’onde de spin des électrons incidents
et le ferromagnétique. La fonction d’onde de spin après interaction avec le ferromagnétique
est donc donnée par
ψ3 = Fψ2 =
( √1 + Ae−i
ε2 cos θ
2e−i
α2
−√
1 − Aeiε2 sin θ
2e−i
α2
)
.
Nous devons maintenant retourner dans le repère x,y,z, ce qui nous donne
ψ4 = R−1ψ3 =
( √1 + Ae−i
ε2 cos2 θ
2+√
1 − Aeiε2 sin2 θ
2[√
1 + Ae−iε2 −
√1 − Aei
ε2
]
e−iα cos θ2sin θ
2
)
.
A partir de ψ4 nous pouvons écrire la matrice densité décrivant cet état de spin pur en
remarquant que
ψ4 = a1
(
10
)
+ a2
(
01
)
25
Chapitre 1 : Mouvement du spin
avec a1 =√
1 + Ae−iε2 cos2 θ
2+√
1 − Aeiε2 sin2 θ
2
et a2 =[√
1 + Ae−iε2 −
√1 − Aei
ε2
]
e−iα cos θ2sin θ
2.
Les éléments de la matrice densité du faisceau d’électrons totalement polarisé sont
donc donnés par
ρpol11 = |a1|2 = (1 + A) cos4 θ
2+ (1 − A) sin4 θ
2+ 2 cos2 θ
2sin2 θ
2
√1 − A2 cos ε
ρpol22 = |a2|2 =
sin2 θ
2
(
1 −√
1 − A2 cos ε)
ρpol12 = a1a2
∗
=(√
1 + A cos2 θ2e−i
ε2 +
√1 − A sin2 θ
2e−i
ε2
)
eiα sin θ2
(√1 + Aei
ε2 −
√1 − Ae−i
ε2
)
= eiαsin θ
2
(
A+ cos θ +√
1 − A2 (i sin ε− cos θ cos ε))
ρpol21 = a1
∗a2
= e−iα sin θ
2
(
A+ cos θ +√
1 − A2 (−i sin ε− cos θ cos ε))
1.3.1.2 Faisceau totalement dépolarisé en spin
Nous devons maintenant considérer un faisceau d’électrons complètement dépolarisés.
Dans le jeu de coordonnées x’,y’,z’ ce faisceau peut être décrit par une superposition
incohérente de N fonctions d’onde de spin
ξk = ak1
(
10
)
+ ak2
(
01
)
ou alors par sa matrice densité
ρmn =1
N
N∑
k=1
akn
∗ak
m
qui est égale par définition à celle d’un faisceau totalement dépolarisé
ρ =
(
12
00 1
2
)
.
La k-iéme fonction d’onde de spin est modifiée par le ferromagnétique comme
ξ′k = Fξk =√
1 + Ae−iε2ak
1
(
10
)
+√
1 − Aeiε2ak
2
(
01
)
.
26
1.3 : Mouvement du vecteur polarisation
La matrice densité décrivant ce faisceau est alors donné par
ρ′11 =1
N
N∑
k=1
∣
∣
∣
√1 + Ae−i
ε2ak
1
∣
∣
∣
2
= (1 + A)1
N
N∑
k=1
∣
∣ak1
∣
∣
2= (1 + A)ρ11 =
1 + A
2
ρ′21 =1
N
N∑
k=1
(√1 + Ae−i
ε2ak
1
)∗ (√1 − Aei
ε2ak
2
)
=√
1 − A2eiε1
N
N∑
k=1
ak1
∗ak
2 =√
1 − A2eiερ21 = 0
ρ′12 =1
N
N∑
k=1
(√1 − Aei
ε2ak
2
)∗ (√1 + Ae−i
ε2ak
1
)
=√
1 − A2e−iε 1
N
N∑
k=1
ak2
∗ak
1 =√
1 − A2e−iερ12 = 0
ρ′22 =1
N
N∑
k=1
∣
∣
∣
√1 − Aei
ε2ak
2
∣
∣
∣
2
= (1 − A)1
N
N∑
k=1
∣
∣ak2
∣
∣
2= (1 − A)ρ22 =
1 − A
2
d’où
ρ′ =1
2
(
1 + A 00 1 − A
)
.
Cela nous donne dans le système de coordonnées x,y,z :
ρunpol = R−1ρ′R
=1
2
(1 + A) cos2 θ
2+ (1 − A) sin2 θ
22eiα sin
θ
2cos
θ
2A
2e−iα sinθ
2cos
θ
2A (1 + A) sin2 θ
2+ (1 − A) cos2 θ
2
.
1.3.1.3 Faisceau partiellement polarisé en spin
En utilisant l’équation (1.2) et les résultats trouvés pour la matrice densité dans les cas
d’un faisceau totalement polarisé et totalement dépolarisé, on peut maintenant calculer
la matrice densité d’un faisceau d’électrons partiellement polarisés en spin par :
ρtotal = P0ρpol + (1 − P0)ρunpol .
27
Chapitre 1 : Mouvement du spin
Nous obtenons donc
Tr(ρtotal) = P0Tr(ρpol) + (1 − P0)Tr(ρunpol) = 1 + AP0 cos θ
Tr(ρtotalσx) = A sin θ cosα+ P0 sin θ cos θ(1 −√
1 − A2 cos ε) cosα
−P0
√1 − A2 sin θ sin ε sinα
Tr(ρtotalσy) = A sin θ sinα+ P0 sin θ cos θ sinα(1 −√
1 − A2 cos θ cos ε)
−P0
√1 − A2 sin θ sin ε cosα
Tr(ρtotalσz) = A cos θ + P0 cos2 θ + P0
√1 − A2 sin2 θ cos ε .
En utilisant ensuite−→P =
Tr(ρtotal−→σ )
Tr(ρtotal)
nous trouvons pour les composantes du vecteur polarisation de spin du faisceau d’électrons
après interaction avec le ferromagnétique
Px =A sin θ cosα+ 1
2P0 sin 2θ(1 −
√1 − A2 cos ε) cosα− P0
√1 − A2 sin θ sin ε sinα
1 + AP0 cos θ
Py =A sin θ sinα+ 1
2P0 sin 2θ sinα(1 −
√1 − A2 cos θ cos ε) − P0
√1 − A2 sin θ sin ε cosα
1 + AP0 cos θ
Pz =A cos θ + P0 cos2 θ + P0
√1 − A2 sin2 θ cos ε
1 + AP0 cos θ(1.3)
Cependant, ce n’est pas encore le cas le plus général car le vecteur polarisation est fixé
suivant la direction z.
1.3.2 Direction de l’aimantation et du vecteur polarisation quel-conque dans l’espace
Supposons que sur la figure 1.3 α = 0. Le vecteur polarisation défini par l’équation
(1.3) devient (fig. 1.4)
−−→P (1) =
A sin θ+ 12P0 sin 2θ(1−
√1−A2 cos ε)
1+AP0 cos θ
−P0
√1−A2 sin θ sin ε
1+AP0 cos θ
A cos θ+P0 cos2 θ+P0
√1−A2 sin2 θ cos ε
1+AP0 cos θ.
Nous pouvons utiliser ce résultat pour trouver le vecteur polarisation pour une direc-
tion du vecteur polarisation initiale ( ~P0) arbitraire et une direction de l’aimantation ( ~M)
arbitraire, en utilisant des rotations.
28
1.3 : Mouvement du vecteur polarisation
Fig. 1.4 – Définition de la direction du vecteur polarisation initiale ~P0 et de la directionde l’aimantation ~M
Pour se placer dans la convention utilisée lors de l’expérience (le plan (yz) constitue le
plan du détecteur de spin) , nous allons tout d’abord orienter la direction de l’aimantation
selon l’axe y, et la direction du vecteur polarisation initiale dans le plan (yz) (fig.1.5). Cela
mène à la polarisation suivante :
−−→P (2) = Rz
(π
2
)
Ry
(π
2− θ)−−→P (1)
avec
Rx(φ) =
1 0 00 cosφ − sinφ0 sinφ cosφ
Ry(α) =
cosα 0 sinα0 1 0
− sinα 0 cosα
Rz(ψ) =
cosψ − sinψ 0sinψ cosψ 0
0 0 1
.
Les transformations suivantes nous donnent le résultat pour un vecteur polarisation initial
et une direction de l’aimantation arbitraire (fig.1.6) :
−→P = Rz(−ψ)Rx(φ)Ry(α)
−−→P (2) . (1.4)
29
Chapitre 1 : Mouvement du spin
Fig. 1.5 – Définition des angles pour le repère (2).
Fig. 1.6 – Définition des angles pour un vecteur polarisation et une aimantation dans unedirection quelconque de l’espace.
30
1.3 : Mouvement du vecteur polarisation
Nous notons que le seul angle physique est θ, qui correspond à l’angle entre le vecteur
polarisation initial et la direction de l’aimantation. La relation 1.4 nous donne donc la
possibilité de décrire le mouvement du vecteur polarisation de spin des électrons après
interaction avec le ferromagnétique pour une direction quelconque à la fois du vecteur
polarisation de spin initial ~P0 et de l’aimantation ~M .
Dans le cas particulier de la géométrie de notre expérience où l’aimantation ~M est
perpendiculaire au vecteur polarisation initial ~P0 (fig.1.7) et l’angle de l’aimantation est
à 45° du plan (yz), la relation 1.4 devient
−→P =
A sin(45) − cos(45)P0
√1 − A2 sin ε
−A cos(45) − sin(45)P0
√1 − A2 sin ε
P0
√1 − A2 cos ε .
Fig. 1.7 – Configuration pour le cas idéal où l’aimantation ~M est perpendiculaire auvecteur polarisation initial ~P0.
En conclusion, ce chapitre nous a permis de comprendre la base du mouvement du
spin d’un faisceau d’électrons lors de sa réflexion sur un matériau ferromagnétique. Il a
été montré que ce mouvement se décompose en deux sous-mouvements, une précession
du vecteur polarisation ~P0 autour de l’aimantation dû à une phase dépendante du spin,
et une rotation vers l’aimantation ~M (ou dans le sens opposé) dû à un coefficient de
réflection dépendant du spin. Nous avons de plus établi la relation 1.4 qui nous donne la
polarisation ~P des électrons réfléchis lorsque l’aimantation ~M du ferromagnétique et le
vecteur polarisation initial ~P0 des électrons incidents est dans une direction quelconque
de l’espace.
31
Chapitre 1 : Mouvement du spin
32
Chapitre 2
Dispositif expérimental
Sommaire2.1 Principe de l’expérience . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.2 La source d’électrons polarisés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.2.1 Principe de l’émission d’électrons polarisés en spin . . . . . . . 37
2.2.2 Les différentes sources utilisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
2.2.2.1 Préparation avant activation . . . . . . . . . . . . . . 39
2.2.3 Méthode d’activation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
2.3 Chambre principale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.3.1 Le porte échantillon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
2.3.2 Evaporateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.4 Optique électronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.1 Inversion de la polarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.2 Déflecteur à 90° . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.3 Lentilles électrostatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
2.4.4 Bobines de déflexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
2.4.5 Optique électronique avant le détecteur de Mott . . . . . . . . 48
2.4.6 Performance de l’ensemble : optiques électroniques - analyseur . 48
2.4.7 Schéma des potentiels dans l’expérience . . . . . . . . . . . . . 50
2.5 Détecteur de Mott . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
2.5.1 Principe du détecteur de Mott . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
2.5.2 Diffusion de Mott . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
2.5.3 Facteur de Sherman effectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
2.5.4 Fonctionnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
2.5.5 Accélération à 100 keV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
2.5.6 Détection des électrons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
33
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
Ce chapitre comporte essentiellement une description de notre dispositif expérimental
ainsi que son principe de fonctionnement. Le dispositif est composé de trois chambres
ultravides séparées par des vannes.
La première chambre est appelée ’chambre source’. C’est dans cette partie que la
source d’électrons polarisés est préparée et activée dans un vide maintenu à une pression
de 10−11 mbar par une pompe ionique et une pompe à sublimation de titane. La source
d’électrons polarisés est un cristal d’AsGa hautement dopé p (Zn), normal ou contraint
en surface. Ces deux cristaux sont collés sur un porte échantillon par de l’indium, et lui
même fixé sur un bras manipulateur nous permettant de transférer la source d’électrons
dans la chambre principale une fois l’activation terminée. Un filament fixé à l’arrière du
porte échantillon nous permet de chauffer les cristaux d’AsGa pour les régénérer à une
température d’environ 500°C, contrôlée par un thermocouple soudé au porte échantillon.
La chambre contient également un distributeur de césium et une arrivée d’oxygène pur
sous forme gazeuse pour activer la source.
La seconde chambre est la ’chambre principale’ (fig. 2.1 et 2.2). On y prépare l’échan-
tillon par évaporation d’éléments purs (Fe,Co,Ni,Au,Cu) par bombardement électronique,
les flux de matières étant calibrés par une micro-balance à quartz. La pression y est de
2.10−10 mbar, maintenue par une pompe turbo-moléculaire, une pompe ionique, et une
pompe à sublimation de titane. Un système LEED/Auger nous permet d’obtenir une
information à la fois sur la structure et sur la composition chimique de la surface de
l’échantillon. Cette chambre contient également un premier système d’optique électro-
nique permettant à la fois de focaliser les électrons provenant de la source sur l’échan-
tillon et d’aligner de façon perpendiculaire la polarisation des électrons et l’aimantation
de l’échantillon. Un deuxième système d’optique électronique guide les électrons réfléchis
vers une grille de retard (Retarding Field Analyser) servant d’analyseur d’énergie puis vers
le détecteur de Mott. Le bras manipulateur sur lequel est fixé le porte échantillon nous
permet de déplacer celui-ci dans les trois directions de l’espace et de le tourner suivant la
direction perpendiculaire au plan de diffusion.
Enfin la dernière chambre est celle qui contient le détecteur de Mott (détecteur de
spin) avec une pression de 10−9 mbar maintenue par une pompe ionique et une pompe à
sublimation de titane. Le détecteur de Mott en lui-même sera détaillé plus loin.
Les différentes chambres sont étuvées à une température d’environ 120°C pendant 36
heures puis nous effectuons un dégazage des sources d’évaporation à chaque mise à l’air.
Il est important de noter que notre système ne comporte pas de sas d’introduction. Tout
changement d’échantillon nécessite donc une mise à l’air de la chambre principale.
34
Fig. 2.1 – Photographie du dispositif expérimental. La chambre source est placée à gauche,la chambre principale au centre, et le détecteur de Mott derrière l’ensemble.
Fig. 2.2 – Schéma représentant le dispositif expérimental. Cette figure ne représentepas la chambre source, ni les moyens d’élaborations et de caractérisations de la chambreprincipale.
35
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
2.1 Principe de l’expérience
Fig. 2.3 – Principe de la mesure
Une source d’électrons polarisés en spin envoie dans le vide des électrons possédant
une polarisation de spin−→P0, en géométrie de réflexion sur un film mince ferromagnétique
possédant une aimantation−→M , avec un angle d’incidence de 45° par rapport à la normale
de l’échantillon. Après une réflexion spéculaire du faisceau sur l’échantillon, l’énergie des
électrons est sélectionnée par une grille de retard afin de ne garder que les électrons
réfléchis résultant d’une interaction élastique. Finalement les électrons sont analysés en
spin par un détecteur de spin à deux dimensions (Fig.2.3).
2.2 La source d’électrons polarisés
Notre expérience nécessite une source d’électrons polarisés en spin. Nous utilisons ici
un type de source très utilisé pour la spectroscopie d’électrons polarisés en spin, basée
sur la photoémission d’une photocathode d’AsGa préparée par un traitement de surface
spécifique pour avoir une affinité électronique négative. Lorsque ce type de photocathode
est irradiée par un rayonnement polarisé circulairement, des électrons de la bande de
valence absorbent un photon, ce qui les excite dans la bande de conduction. Ces électrons
sont polarisés en spin et vont ensuite diffuser dans la bande de conduction vers la surface
avant de s’échapper dans le vide. Ces sources sont utilisées dans de nombreux laboratoires
36
2.2 : La source d’électrons polarisés
pour des expériences variées en physique atomique [9], de surface [13] ou des hautes
énergies [14].
Nous n’allons présenter que rapidement le principe d’une émission polarisée en spin,
car c’est un sujet qui a été et qui est encore aujourd’hui largement étudié. Pour plus de
détails, le lecteur pourra se référer à des articles sur la photoémission d’électrons polarisés
en spin par l’AsGa [15,16].
2.2.1 Principe de l’émission d’électrons polarisés en spin
L’AsGa est un semi-conducteur à gap (bande interdite) direct (Eg = 1.52eV ) centré
sur le point Γ. Les électrons possèdent une symétrie p pour le maximum de la bande de
valence et une symétrie s pour le minimum de la bande de conduction. L’interaction spin-
orbite lève la dégénérescence des six états p en quatre états dégénérés p3/2 et deux états
dégénérés p1/2 séparés par une énergie ∆ = 0.34eV . La figure 2.4 représente sur la gauche
la structure de bandes électronique de l’AsGa aux environs du point Γ, et sur la droite,
les états dégénérés correspondants, identifiés par leur moment cinétique mj. Lorsqu’un
photon possédant une énergie hω ≥ Eg est absorbé, seules les transitions indiquées sur la
figure 2.4 qui sont caractéristiques du point Γ sont possibles. Les probabilités de transition
relatives sont indiquées dans les cercles sur la même figure [15].
Fig. 2.4 – Principe de la photoémission d’électrons polarisés en spin
Le principe de la production d’électrons polarisés dans la bande de conduction est
le suivant [16]. Considérons des photons polarisés circulairement (σ+, polarisation circu-
laire droite, les photons possèdent un moment magnétique m = +1, en trait plein sur la
37
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
figure 2.4 ) possédant une énergie adéquate (hω ≈ 1.52eV , λ ≈ 780nm) afin de ne sélec-
tionner que les transitions allant des états p3/2 à s1/2. Les règles de sélection impliquent
que seules les transitions correspondantes à une variation du moment cinétique de +1
( ∆mj = mf − mi = +1 ) sont autorisées. Les deux seules transitions possibles sont
donc celles passant des états p3/2 vers les états s1/2 : mj = −3/2(bande de valence) →mj = −1/2(bande de conduction) et mj = −1/2 → mj = 1/2. La polarisation étant défi-
nie par la différence entre le nombre d’électrons possédant un spin majoritaire et le nombre
d’électrons possédant un spin minoritaire sur le nombre total d’électrons P =N↑−N↓N↑+N↓
, on
a donc une polarisation théorique de -50%. Un raisonnement analogue pour une polari-
sation circulaire gauche (σ−, les photons possèdent un moment magnétique m = −1, en
pointillé sur la figure 2.4 ) nous donne une polarisation théorique de 50%. La conservation
du moment cinétique implique que le vecteur de polarisation doit être perpendiculaire à
la surface du cristal.
Avec une telle source, on arrive à une polarisation expérimentale d’environ 25% car
les électrons excités vers les états s1/2 de conduction doivent diffuser vers la surface avant
d’être éjectés dans le vide. Pendant cette diffusion, on observe donc une dépolarisation
des électrons.
Il est important de noter que, dans le modèle atomique, si l’énergie des photons est
supérieure ou égale à Eg +∆, les transitions des états p1/2 → s1/2 deviennent possibles. Un
traitement analogue à celui décrit ci-dessus montre alors clairement que la polarisation
résultante est nulle.
2.2.2 Les différentes sources utilisées
Avec un cristal d’AsGa ’normal’, il est possible d’extraire des électrons polarisés à
25% [9, 13, 15], mais une possibilité pour augmenter la polarisation des électrons dans
la bande de conduction est de lever la dégénérescence des états p3/2. L’utilisation d’un
cristal d’AsGa contraint en surface par des super-réseaux AsGa-AsGaP [17–19] permet
cette levée de dégénérescence, ce qui rend possible l’obtention d’une polarisation théorique
de 100% et expérimentale de plus de 80%. Pour réaliser un cristal d’AsGa contraint en
surface, on utilise un substrat d’AsGa recouvert par des multi-couches de AsGaP avec
différents taux de dopage p. Un tel système des multi-couches est représenté sur la figure
2.5. La couche émissive étant la couche d’AsGa0.7P0.3 de 1 µm.
Notre système nous permet d’utiliser les deux types de sources d’électrons polarisés.
Une source qui est simplement un cristal d’AsGa(001) ’normal’, et une autre qui est
un cristal d’AsGa(001) contraint en surface. Les deux cristaux sont collés l’un à coté
de l’autre sur le porte substrat par de l’indium. Nous avons donc le choix lors d’une
38
2.2 : La source d’électrons polarisés
As - cap ( 20 nm )AsGa0.95P0.05 ( 150 nm ) ♦
AsGa0.7P0.3 (1 µ m)10 périodes
AsGa0.55P0.45 ( 10 nm )AsGa0.85P0.15 ( 10 nm )AsGa0.7P0.3 ( 100 nm )AsGa0.8P0.2 ( 300 nm )AsGa0.9P0.1 ( 300 nm )AsGa(001) - substrat
Fig. 2.5 – Structure en couche du cristal d’AsGa contraint dopé p (Mg) avec un taux de3 · 1018cm−3. La couche supérieure d’As sert de protection avant l’utilisation sous vide.♦ : taux de dopage = 1 · 1019cm−3.
expérience, d’utiliser l’une ou l’autre source, en fonction des besoins. La source d’AsGa
normal nous donne un faisceau d’électron polarisé à environ 25% et la source contrainte
en surface un faisceau d’électrons polarisés à environ 75%. Mais la première nous offre un
courant d’électrons environ dix fois supérieur, ce qui est fort utile pour les échantillons à
faible réflectivité électronique.
2.2.2.1 Préparation avant activation
Avant mise sous vide, il faut nettoyer le cristal d’AsGa normal en deux étapes. La
première étape consiste à un nettoyage chimique par un mélange H2SO4,H2O2 et H2O
dans la proportion 4:1:1 , pendant 5 minutes [16]. Il faut ensuite placer le cristal sous
vide aussitôt que possible. La seconde étape consiste à chauffer le cristal sous vide à une
température de 500°C pendant une heure. La température de la surface ne doit jamais
être supérieure à 600°C sous peine de rendre la source inutilisable. Une fois à température
ambiante, la source est prête pour la procédure d’activation décrite plus loin.
La source contrainte en surface nous a été fournie par le Stanford Synchrotron Ra-
diation Laboratory. Avant la mise sous vide, il convient de préparer le cristal d’AsGa
contraint comme suivant :
1. Décoller la source de la plaque de verre en utilisant une plaque chauffante
2. Dégraisser dans du trichloroéthane bouillant
3. Couper l’échantillon à la taille voulu
4. Dégraisser dans de l’acétone bouillant
5. Nettoyer dans du méthanol bouillant
39
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
6. Rincer dans de l’eau distillée
7. Plonger dans de l’hydroxide d’ammonium pour supprimer l’oxyde de la surface
8. Rincer dans de l’eau distillée
9. Sécher sous un flux d’azote
10. Installer la source sous vide avant 30 minutes. Sinon l’efficacité quantique sera dé-
tériorée
2.2.3 Méthode d’activation
Les électrons excités dans la bande de conduction ne peuvent normalement pas s’échap-
per du cristal d’AsGa, car celui-ci possède une haute affinité électronique (≈ 4 eV). Néan-
moins, il est possible de faire passer le niveau du vide en dessous du minimum de la bande
de conduction par un traitement de surface spécifique en déposant du Cs et de l’O2 sur la
surface du cristal d’AsGa. Cette condition est appelée affinité électronique négative. Ces
surfaces sont très émettrices car la profondeur d’émission des électrons n’est pas limitée
par le libre parcours moyen des électrons chauds (≈ 10A ) mais plutôt par la longueur
de diffusion des électrons thermalisés dans la bande de conduction ( ≈ 1µm) [20]. La
figure 2.6 représente la structure de bandes de l’AsGa après le traitement de surface par
le Cs et l’O2. On remarque que le minimum de la bande de conduction de l’AsGa pour le
matériau massif est au dessus de l’énergie du vide. Les électrons excités dans la bande de
conduction ne voient donc aucune barrière. Ils sont libres de sortir du cristal après avoir
diffusés vers la surface.
Durant l’activation, les cristaux d’AsGa restent dans la chambre source car l’activation
de la source d’électrons polarisés nécessite la présence d’O2 sous forme gazeuse, ce qui
contaminerait les autres chambres. Un module laser d’une longueur d’onde de 635 nm et
d’une puissance de 10 mW, irradie en permanence un des cristals, alors que le courant
émis par la source est mesuré par un micro-ampèremètre. Pendant la phase d’activation, il
n’est pas nécessaire d’avoir une polarisation des électrons émis, ce qui justifie l’utilisation
d’un laser dont la longueur d’onde est située dans le spectre visible (rouge).
Une activation se fait en plusieurs étapes. Après avoir nettoyé thermiquement (500°C)
la surface du cristal d’AsGa et avoir attendu environ 30 minutes pour que sa température
soit inférieure à 50°C, on dépose uniquement du Cs sur sa surface par l’intermédiaire d’un
distributeur de Cs. Une température supérieure ne permet pas l’adsorption de Cs sur la
surface de l’AsGa si bien que son activation est impossible. La figure 2.7 représente le
photocourant émis par un cristal d’AsGa en fonction du temps lors de son activation.
Après une dizaine de minutes de dépôt de Cs, un photocourant est observé. Après environ
40
2.3 : Chambre principale
Fig. 2.6 – Courbure des bandes de valence et de conduction de la surface d’un cristald’AsGa activé. Une affinité électronique négative (niveau du vide en dessous du minimumde la bande de conduction du cristal massif) est obtenue par une activation avec du Cset de l’O2. Un électron est excité dans la bande de conduction par un photon, thermalisedans le minimum de la bande de conduction puis diffuse vers la surface pour s’échapperdans le vide.
15 min, un maximum du photocourant (≈ 1µA) est atteint. On introduit alors dans la
chambre source de l’O2 sous forme gazeuse par l’intermédiaire d’une vanne à une pression
d’environ 5.10−9mbar, ce qui provoque une augmentation sensible du photocourant émis.
Une fois le maximum atteint en présence de l’O2 (≈ 24µA), on ferme la vanne. On
observe encore une fois une augmentation du photocourant. Puis, une fois le maximum
atteint, on introduit encore de l’O2, et ainsi de suite, jusqu’à atteindre une saturation
du photocourant émis. Cette technique d’augmentation successive du photocourant est
appelée technique du ’yoyo’ [21–23]. Une fois activé, le courant émis par la source décroît
d’une façon exponentielle [16]. Sa demi-vie qui est de quelques heures peut être fortement
augmentée par le dépôt constant de césium à sa surface. C’est pour cette raison qu’un
distributeur de césium est placé sur la plaque accélératrice juste avant le déflecteur à 90°
de l’optique électronique qui sera décrit plus tard.
Après chaque utilisation, on chauffe la source d’électrons à une température de 500°C
afin d’éliminer le césium et l’oxygène déposés ainsi que d’éventuels polluant. Cette tem-
pérature ’régénère’ la surface du cristal, qui peut ensuite être réactivé.
2.3 Chambre principale
Cette chambre constitue à la fois la chambre de croissance et de caractérisation de sur-
face. Le vide y est maintenu à une pression de 2.10−10mbar par groupe de pompage turbo-
41
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
Fig. 2.7 – Photocourant émis par l’AsGa en fonction du temps lors d’une activation. Enbleu, les périodes de dépôt avec uniquement du Cs, et en rouge les périodes avec un dépôtde Cs et d’O2
moléculaire, une pompe ionique, et un sublimateur de titane. C’est dans cette chambre que
l’échantillon est préparé par une procédure de décapage ionique à l’argon, puis éventuelle-
ment d’un recuit. Les dépôts sont effectués par des évaporateurs à bombardement électro-
nique, la vitesse de dépôt étant calibrée avant chaque dépôt par la microbalance à quartz.
Cette chambre permet une caractérisation de surface grâce à un dispositif LEED/Auger.
Une fois la source d’électrons polarisés activée et transférée dans la chambre principale,
une optique électronique permet de focaliser les électrons sur l’échantillon. Les électrons
réfléchis passent ensuite dans une autre optique électronique avant de pénétrer finalement
dans la chambre du détecteur de Mott.
2.3.1 Le porte échantillon
Un filament de tungstène d’un diamètre de 0.2 mm placé derrière l’échantillon à étudier
nous permet de faire un recuit en appliquant une tension positive d’environ 500 volts sur
le porte échantillon et en faisant passer un courant d’environ 3A dans le filament pour at-
teindre une température de thermo-émission. Les électrons émis bombardent l’échantillon
ce qui en augmente la température. La température de recuit a d’abord été contrôlée par
un pyromètre à une seule longueur d’onde, mais ce type de contrôle étant trop sensible
à la qualité de transparence de la fenêtre a été abandonné. Nous avons finalement utilisé
un thermocouple W95Rh5/W75Rh25 placé sur l’échantillon.
42
2.3 : Chambre principale
Deux configurations du porte-échantillon ont été utilisées durant ma thèse. La figure
2.8 représente sur la droite le porte échantillon utilisé pour l’étude des films polycristallins
sur substrat de verre. Sur la gauche est représenté le porte échantillon utilisé lors de l’étude
portant sur le monocristal de Cu(001).
Fig. 2.8 – Représentation du porte échantillon pour l’étude des échantillons polycristallins(à droite) et l’étude sur le monocristal de Cu(001) (à gauche).
Pour les besoins expérimentaux, il est impératif que l’échantillon soit conducteur et re-
lié à la terre afin d’éviter tout effet de charge rendant impossible les mesures. L’échantillon
est isolé du porte échantillon (fig.2.9) par des éléments en alumine(Al2O3) et connecté à
la terre de façon ex situ en passant au préalable par un micro-ampèremètre qui mesure
ainsi le courant électrique collecté par l’échantillon. L’échantillon est placé au centre d’une
bobine afin de pouvoir l’aimanter de façon rémanente par un champ magnétique pulsé.
Une impulsion de 150 A peut donner un champ d’environ 300 Oe largement suffisant pour
saturer tous les échantillons étudiés. Les bobines sont constituées chacune de 100 tours
par un fil de cuivre de 0.2 mm de diamètre recouvert de capton , et elles ne possèdent pas
de noyau de fer doux. Les bobines sont recouvertes par une peinture de particules de gra-
phite colloïdales en suspension dans de l’isopropanol pour rendre la surface conductrice.
43
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
En la reliant à la terre, on supprime tout effet de charge. Les bobines sont changées ré-
gulièrement car les dépôts successifs de matériaux ferromagnétiques sur celles-ci influence
les mesures du mouvement du spin.
Fig. 2.9 – Porte échantillon en vue éclatée.
2.3.2 Evaporateurs
La figure 2.10 représente le schéma des deux types d’évaporateurs utilisés. Les évapo-
rateurs sont constitués d’une tige d’un matériau pur à évaporer ou d’un creuset de Mo
contenant ce matériau porté à une tension positive d’environ 1kV. Un filament de tungs-
tène d’un diamètre de 0.2 mm entoure cette tige dans lequel un courant d’environ 3A
permet d’atteindre une température de thermo-émission. Les électrons émis bombardent
la tige métallique provoquant la sublimation du matériau. On obtient ainsi un jet molé-
culaire. L’ensemble est thermiquement isolé par un refroidissement à eau. La vitesse d’un
dépôt peut aller de quelques dixièmes d’angström par minute jusqu’à dix angström par
minute. Ce type d’évaporateur est donc bien adapté pour une étude des films ultra-minces.
Le flux de particules est contrôlé par le biais d’un quartz oscillant placé dans le cône
d’évaporation de l’évaporateur. Le principe de l’oscillateur à quartz repose sur la sensibilité
piézo-électrique d’un cristal de quartz dont la fréquence propre dépend de la quantité
déposée sur la surface. Plus il y a de matière déposée sur le quartz, plus sa fréquence
44
2.3 : Chambre principale
Fig. 2.10 – Schéma représentant les deux types de canons pour l’évaporation des maté-riaux dans la chambre principale.
d’oscillation diminue. Cette balance est placée à l’extrémité d’un translateur pour la
placer à l’endroit de l’échantillon. Généralement, une mesure de la vitesse de dépôt est
faite avant et après le dépôt pour contrôler une éventuelle instabilité du flux atomique.
L’épaisseur déposée a été calibrée en déposant une couche d’environ 100nm sur un
substrat de Si(111) dont la moitié a été recouverte par une couche de feutre. Une fois la
couche à calibrer déposée, le tout est placé dans un bain d’acétone, ce qui dissout le feutre,
et laisse donc réapparaître la surface du substrat de Si. Cette préparation fabrique donc
une marche de 100nm. A l’aide d’un profilomètre, la hauteur de cette marche est mesurée,
ce qui donne l’épaisseur réellement déposée. A partir de cette mesure, on détermine le
facteur géométrique due à la position de la balance.
Une fois la ou les couches minces déposées et analysées, un canon ionique sous flux
d’argon permet de décaper ces couches afin de pouvoir réutiliser le substrat. Sous une
pression de 3.10−6mbar, une tension d’accélération de 1.5kV et un courant collecté sur
l’échantillon d’environ 3 µA, il est possible de supprimer une dizaine de nanomètre en une
heure.
45
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
2.4 Optique électronique
Un système d’optique électronique est utilisé pour diriger les électrons provenant de
la source d’AsGa vers l’échantillon à étudier (fig. 2.11). Toutes les parties constituant
l’optique électronique sont uniquement électrostatiques, permettant ainsi de modifier la
trajectoire des électrons sans changer la direction des spins. La première partie est consti-
tuée d’une plaque (Ep) accélérant les électrons, puis d’un déflecteur à 90° (Ki et Ka)
permettant de changer la trajectoire des électrons sans changer la direction de la polari-
sation. Les électrons sortant du cristal d’AsGa avec une polarisation perpendiculaire à sa
surface, le déflecteur permet donc d’obtenir une polarisation perpendiculaire à la trajec-
toire des électrons. A la sortie du déflecteur, les électrons sont focalisés sur l’échantillon à
l’aide de 3 lentilles électrostatiques (L1,L2 et L3). La surface sondée par les électrons est
un disque d’environ 1 mm de diamètre. Des bobines sont disposées autour du déflecteur
à 90° et de L1 pour manipuler la direction de la polarisation.
2.4.1 Inversion de la polarisation
Le rayonnement auquel est soumis le cristal d’AsGa est produit par un laser dont la
longueur d’onde est dans la gamme des infrarouges (≈ 780 nm). La polarisation circulaire
est assurée par un ensemble polariseur linéaire - cellule de Pockels (fig. 2.11). La cellule
de Pockels est un cristal qui possède la propriété de changer de biréfringence lorsqu’il est
soumis à une tension électrique. Avec cette cellule nous avons la possibilité de changer
rapidement la polarisation circulaire (gauche ou droite) du rayonnement laser, en inversant
la tension sur la cellule de Pockels. La polarisation des électrons émis peut donc facilement
être inversée à l’aide de ce dispositif. Le banc optique peut se déplacer dans le plan du
cristal d’AsGa afin d’optimiser la position du faisceau laser sur la surface du cristal.
2.4.2 Déflecteur à 90°
Une fois les électrons émis par le cristal d’AsGa, ils sont accélérés vers un déflecteur
à 90° par une plaque d’Herzog portée au potentiel Ep > 0. Le déflecteur est composé
de deux coquilles métalliques, portées à un potentiel Ka négatif pour la coquille de plus
grand rayon et à un potentiel Ki positif pour l’autre. Ce dispositif permet de modifier la
trajectoire des électrons sans changer la direction de leur spin. La conservation du moment
cinétique impose que les électrons sortant du cristal possèdent un vecteur polarisation
perpendiculaire à la surface de celui-ci. Le déflecteur nous permet donc de placer le vecteur
polarisation perpendiculairement au plan de diffusion des électrons. Le faisceau possède
donc une polarisation de spin transverse. On note la présence d’un distributeur de Cs
46
2.4 : Optique électronique
Fig. 2.11 – Schéma de principe de l’optique électronique. Le faisceau laser polarisé circu-lairement par la succession d’un polariseur linéaire et d’une cellule de Pockels excite desélectrons dans le cristal d’AsGa. Ces électrons, qui sont polarisés en spin, sont accéléréspar la plaque porté au potentiel Ep. Ils sont alors déviés par un déflecteur à 90° avant depasser dans un système d’optique électronique.
proche du cristal d’AsGa, placé sur la plaque Ep mais néanmoins isolé électriquement de
celle-ci, pour augmenter le temps de vie de la source activée. Pour perturber le moins
possible la trajectoire des électrons, le distributeur est placé aussi au potentiel Ep.
2.4.3 Lentilles électrostatiques
Un système d’optique électronique nous permet de concentrer les électrons qui sortent
du déflecteur sur un minimum de surface de l’échantillon. Ce dispositif est composé de
quatre cylindres métalliques portés à des potentiels électrostatiques différents. Un gra-
dient de champ électrique est donc créé entre deux cylindres, ce qui forme une lentille
convergente ou divergente en fonction des potentiels appliqués ( pour créer une lentille
électrostatique il faut deux cylindres ). La variation de potentiel appliquable sur ces len-
tilles est limitée par le bloc d’alimentation du système à environ ±150 Volts. Un système
de déflexion est présent pour les cylindres C1 et C3, pour déplacer la position du faisceau
d’électrons dans le plan (xz).
47
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
2.4.4 Bobines de déflexion
Des bobines sont placées autour du déflecteur à 90° afin d’appliquer un champ ma-
gnétique suivant l’axe x, et autour du premier cylindre constituant la lentille L1 pour
appliquer un champ magnétique suivant la direction y. Ces bobines nous permettent de
déplacer la direction du vecteur polarisation dans le plan (yz) pour la première bobine
et dans le plan (yz) pour la seconde. Il est en effet nécessaire de compenser l’effet du
champ magnétique environnant pour obtenir un bon alignement perpendiculaire avec l’ai-
mantation de l’échantillon. La présence de ces bobines nous a aussi permis d’effectuer les
mesures de l’angle de précession décrites dans l’annexe B.
2.4.5 Optique électronique avant le détecteur de Mott
Un autre système d’optique électronique est présent à l’entrée du détecteur de Mott
afin de focaliser les électrons sur celui-ci. Un analyseur d’énergie à grille retardatrice nous
permet de sélectionner l’énergie inférieure des électrons pénétrant dans le détecteur de
Mott, identique à un filtre passe haut. Cet analyseur est constitué d’une grille métallique
recouverte de carbone portée à un potentiel négatif Vgrille. Les électrons arrivant sur cette
grille sont sélectionnés en énergie puisque seuls ceux qui possèdent une énergie supérieure
à eVgrille peuvent passer, les autres étant réfléchis par le potentiel négatif. En ne sélection-
nant que les électrons résultant d’une interaction élastique, ceux qui passent ne possèdent
qu’une très faible énergie par rapport au vide dans la zone de la grille. Cette grille re-
tardatrice est donc écrantée magnétiquement par un bouclier de mu métal afin de ne pas
subir les effets d’un champ magnétique externe (champ magnétique terrestre), à la fois sur
la trajectoire et sur la rotation de la polarisation des électrons. La figure 2.12 représente
le résultat de l’intensité collectée (en pointillés) en fonction de la tension appliquée à la
grille, pour des électrons possédant une énergie cinétique de 17.5 eV. Au delà d’une cer-
taine énergie, plus aucun électron n’arrive au détecteur de Mott. Cet analyseur étant un
filtre passe haut, la courbe en pointillés représente donc I(Vgrille) =∫∞
VgrilleN(Vgrille)dVgrille
avec N(Vgrille) le nombre d’électrons possédant une énergie eVgrille. Sa dérivée (en trait
plein) par rapport à Vgrille nous donne donc l’allure du spectre énergétique du nombre
d’électrons.
2.4.6 Performance de l’ensemble : optiques électroniques - analy-seur
Étudions maintenant la performance de l’ensemble des deux optiques électroniques
et de l’analyseur. En pratique, on cherche à optimiser l’optique pour obtenir une bonne
48
2.4 : Optique électronique
Fig. 2.12 – Exemple d’un spectre d’intensité en fonction de la tension appliquée à la grilleretardatrice pour une énergie cinétique des électrons incidents de 17.5 eV. La dérivée parrapport à la tension de ce spectre d’intensité est également montrée.
Fig. 2.13 – Largeur à mi-hauteur ∆E du pic élastique en fonction de l’énergie des électrons
transmission (obtention d’un signal maximal), et une bonne résolution relative (∆E/E).
La figure 2.13 représente la largeur à mi-hauteur ∆E et donc la résolution, ainsi que la
résolution relative du pic élastique en fonction de l’énergie des électrons. On note que la
49
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
distribution d’énergie finie de la source d’AsGa est incluse.
La transmission de l’optique électronique dirigeant les électrons provenant de la source
vers l’échantillon est de 50% dans le meilleur des cas pour une énergie supérieure à 7 eV.
Elle décroit fortement si l’énergie des électrons diminue.
2.4.7 Schéma des potentiels dans l’expérience
Fig. 2.14 – Schéma des différents potentiels représentant l’expérience.
La figure 2.14 montre le schéma des différents potentiels mis en jeu dans notre dispositif
expérimental, avec VAsGa le potentiel appliqué sur le cristal d’AsGa, eφS le travail de sortie
de l’échantillon, eφgrille le travail de sortie de l’analyseur.
Pour comparer les résultats expérimentaux des différents scans en énergie, nous avons
choisi d’utiliser une échelle d’énergie relative au niveau de Fermi (E−EF ) de l’échantillon.
Les électrons sortent du cristal d’AsGa avec une énergie Eg par rapport au niveau de Fermi
de l’AsGa. L’énergie des électrons comparée au niveau de Fermi de l’échantillon est donc
E−EF = VAsGa +Eg qui est indépendante de la nature de l’échantillon ou de l’analyseur.
Un autre choix pourrait être l’utilisation de l’énergie cinétique des électrons par rapport
au niveau du vide de l’échantillon, mais ce choix pose des problèmes car l’énergie cinétique
du point de vue de l’échantillon est Ekin = VAsGa+Eg−eφS qui dépend du travail de sortie
de l’échantillon. Le travail de sortie des différents matériaux utilisés sont respectivement
[24] : eφC = 5.0eV , eφCs = 2.14eV , eφAu = 5.1eV , eφCo = 5.0eV , eφCu = 4.6eV ,
eφFe = 4.5eV et eφNi = 5.15eV , donnés ici uniquement à titre indicatif.
Nous remarquons que pour traverser l’analyseur avec Vgrille = 0, et pour eφS < eφgrille
50
2.5 : Détecteur de Mott
un électron doit posséder une énergie supérieure à eφgrille. Ceci implique donc qu’il est im-
possible avec ce dispositif d’utiliser des électrons possédant une énergie incidente inférieure
à 5 eV.
2.5 Détecteur de Mott
Dans une expérience de spectroscopie électronique dépendante du spin, il est nécessaire
de déterminer la polarisation d’un faisceau d’électrons. Une possibilité pour mesurer la
polarisation de spin d’un faisceau d’électrons est l’utilisation de l’interaction spin-orbite
entre les électrons incidents et le potentiel électrostatique d’un atome.
Dans un tel type de détecteur basé sur l’interaction spin-orbite, une asymétrie gauche-
droite (ou/et haut-bas ) de la probabilité de diffusion des électrons polarisés en spin est
exploitée dans un processus de diffusion à haute énergie sur des atomes lourds. Ce type
de diffusion est appelé ’diffusion de Mott’.
Notre expérience est dotée d’un détecteur de Mott hémisphérique qui utilise une ten-
sion accélératrice de 100kV.
2.5.1 Principe du détecteur de Mott
Le polarimètre de Mott est constitué d’une feuille d’or très fine (1000A ), sur la-
quelle vient diffuser un faisceau d’électrons polarisés de haute énergie (fig.2.15). L’or a
l’avantage d’être chimiquement passif et d’avoir un numéro atomique élevé, donc un fort
couplage spin-orbite. L’accélération des électrons se fait avec un potentiel électrostatique
à géométrie hémisphérique, et les électrons sont détectés par quatre détecteurs à semi-
conducteur. L’interaction spin-orbite qui couple le spin des électrons incidents au potentiel
électrostatique des atomes d’or, induit une asymétrie dans la section efficace différentielle
de diffusion élastique des électrons : σ(θ, φ) 6= σ(−θ, φ). Pour une polarisation perpendi-
culaire au plan de diffusion, la diffusion des électrons sur la gauche diffère des électrons
diffusée sur la droite par le signe du moment orbital−→l (Fig. 2.15). Le terme de spin-orbite
VSO étant proportionnel à−→l .−→S , il en résulte une asymétrie de la diffusion gauche-droite.
Nous pouvons alors placer deux détecteurs d’électrons selon les directions (θ, φ) et (−θ, φ).
En comptant le nombres d’électrons arrivant sur le détecteur gauche Ng et sur le détec-
teur droit Nd dans le même intervalle de temps, il est possible de mesurer l’asymétrie
gauche droite A = Ng−Nd
Ng+Nd. Pour un détecteur de Mott parfait elle est proportionnelle à la
composante du vecteur polarisation qui est perpendiculaire au plan de diffusion, à savoir~P .~n.
51
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
Fig. 2.15 – Principe de fonctionnement du détecteur de Mott.
2.5.2 Diffusion de Mott
Nous allons présenter ici de façon simple la diffusion de Mott. La diffusion de Mott
est le cas de la diffusion par un potentiel central tout en tenant compte de l’interaction
spin-orbite [25].
Prenons le cas d’un électron possédant un spin parallèle à sa trajectoire suivant la
direction z. Sa fonction d’onde de spin à grande distance r du potentiel diffuseur est
ψ↑ −−−→r→∞
(
10
)
eikz +
(
S11(θ, φ)S21(θ, φ)
)
eikr
r
avec S11 et S21 les amplitudes de diffusion. Nous tenons compte du fait que la seconde
composante de la fonction d’onde n’est pas nécessairement zéro après la diffusion car le
spin peut changer de direction dû au couplage spin-orbite, ce qui est décrit par l’amplitude
de diffusion S21.
Pour un spin antiparallèle à la trajectoire z on a de façon analogue
ψ↓ −−−→r→∞
(
01
)
eikz +
(
S12(θ, φ)S22(θ, φ)
)
eikr
r.
Les grandes étapes du calcul peuvent être trouvées dans le livre de Kessler [9] et
les détails dans le livre de Mott [25]. Les résultats donnent en définissant de nouvelles
fonctions f(θ) et g(θ) :
S11(θ, φ) = f(θ) S12(θ, φ) = −g(θ)e−iφ
S21(θ, φ) = g(θ)eiφ S22(θ, φ) = f(θ).
52
2.5 : Détecteur de Mott
La superposition de ces deux fonctions d’onde de spin nous donne la possibilité de trouver
le résultat pour n’importe quel état de spin pur :
ψ −−−→r→∞
(
a1
a2
)
eikz +
(
a′1a′2
)
eikr
r
en utilisant
a1
(
10
)
eikz + a2
(
01
)
eikz =
(
a1
a2
)
eikz
et
a1
(
S11
S21
)
eikr
r+ a2
(
S21
S22
)
eikr
r=
(
a1S11 + a2S21
a1S21 + a2S22
)
eikr
r
=
(
a1f − a2ge−iφ
a1geiφ + a2f
)
eikr
r
=
(
a′1a′2
)
eikr
r.
La section efficace étant définie par
σ(θ, φ) =|a′1|2 + |a′2|2|a1|2 + |a2|2
= |f |2 + |g|2 +−a1a
∗2e
iφ + a∗1a2e−iφ
|a1|2 + |a2|2(fg∗ − f ∗g)
et en définissant S(θ) = ifg∗−f∗g|f |2+|g|2 on obtient [26]
σ(θ, φ) = (|f |2 + |g|2)[
1 + S(θ)−a1a
∗2e
iφ + a∗1a2e−iφ
i(|a1|2 + |a2|2)
]
.
Finalement, si le spin est perpendiculaire au plan de diffusion, c’est à dire dans un état
de spin
(
11
)
, la section efficace devient une fonction de l’angle φ :
σ(θ, φ) = (|f |2 + |g|2)[1 + S(θ) sin(φ)] .
Il est important de noter ici que la section efficace de diffusion σ(θ, φ) est différente de
σ(−θ, φ). Nous obtenons donc une asymétrie de l’intensité diffusée. Dans le cas plus général
d’une polarisation quelconque et non polarisé à 100%, la section efficace de diffusion
devient [9]
σ(θ, φ) = (|f |2 + |g|2)[1 + S(θ)~P .~n] .
La fonction S(θ) est appelée fonction de Sherman. Les calculs montrent que si un
faisceau d’électrons non polarisés est diffusé par un atome, alors ces électrons sont polarisés
53
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
en spin. La polarisation est donnée par : ~P = S(θ)~n avec ~n =~k∧ ~k′
|~k∧ ~k′| ,~k et ~k′ étant les
vecteurs d’onde des électrons avant respectivement après la diffusion [9] .
La fonction de Sherman décrit donc deux propriétés importantes : la grandeur de
l’asymétrie lors de la diffusion d’un faisceau polarisé et la polarisation produite par la
diffusion d’un faisceau non polarisé.
2.5.3 Facteur de Sherman effectif
La diffusion de Mott telle qu’elle est décrite ci-dessus, décrit l’interaction d’un électron
polarisé avec un seul atome d’or. La valeur de la fonction de Sherman a été calculée par
Holzwarth et Meister [27] pour la diffusion par un seul atome d’or (S = 0.39), mais
l’utilisation d’une cible d’or de faible épaisseur ne suffit pas à rendre compte du cas
monoatomique. On observe donc une réduction de la fonction de Sherman causée par [28]
– la diffusion multiple dans la feuille d’or due à l’épaisseur non négligeable de la feuille
– la moyenne de la fonction de Sherman sur l’angle solide vue par les détecteurs
d’électrons
– la rétro-diffusion par les parois constituant le détecteur de Mott.
On parlera désormais de la fonction de Sherman effective Seff du polarimètre, qui
tient compte de la situation expérimentale. L’efficacité d’un détecteur de Mott est définie
par
F = S2effN/N0
avec N0 le nombre d’électrons arrivant sur la feuille d’or et N le nombre d’électrons
arrivant aux détecteurs. Cette fonction doit donc être maximisée autant que possible.
La fonction de Sherman effective présente un maximum pour un angle θ = 120° dans le
cas de l’or. C’est pour cette raison que les détecteurs ont été disposés dans cette direction
particulière (fig. 2.15).
L’influence de l’épaisseur d de la feuille d’or sur le facteur de Sherman effectif par la
diffusion multiple peut être décrite par [29]
Seff =S
1 + αd(2.1)
où α est une fonction de l’angle de diffusion θ (fig.2.15) et de l’énergie des électrons.
De l’autre coté, la probabilité de diffusion p augmente avec l’épaisseur [30] :
p ∝ ρdσ(1 + bd) (2.2)
où ρ est la concentration atomique et le terme b tient compte de la diffusion multiple. Il
existe donc une épaisseur de la feuille d’or qui maximise l’efficacité du détecteur de Mott.
Un maximum est trouvé pour une épaisseur d’environ 1000A .
54
2.5 : Détecteur de Mott
On note que l’équation 2.1 tend vers le facteur de Sherman pour une diffusion par un
seul atome d’or lorsque d = 0. Il est donc possible en déterminant le facteur de Sherman
pour différentes épaisseurs de la feuille d’or, et en extrapolant les résultats pour d = 0, de
calibrer de façon absolue le facteur de Sherman effectif. Dans notre dispositif, le facteur
de Sherman effectif est de 0.2 ± 0.02 pour une tension d’accélération de 100kV.
2.5.4 Fonctionnement
D’après Kessler [9], l’intensité collectée sur le détecteur de gauche et droite est :
Ng ∝ I(θ)[1 +−→P .−→n Seff (θ)]
Nd ∝ I(θ)[1 −−→P .−→n Seff (θ)]
avec I(θ) = |f |2 + |g|2 l’intensité de diffusion.
Dans le cas d’un détecteur de Mott parfait, on a les mêmes préfacteurs pour l’intensité
collectée à gauche et à droite. On peut donc mesurer l’asymétrie gauche-droite A =Ng−Nd
Ng+Nd= PnSeff , avec Pn la composante de la polarisation perpendiculaire au plan de
diffusion. Connaissant le facteur de Sherman effectif Seff (θ), il est facile de déterminer
la polarisation perpendiculaire au plan de diffusion. Avec deux détecteurs d’électrons
à gauche et à droite on obtient donc une composante du vecteur polarisation. Si on
place aussi un détecteur en haut et un en bas, il est possible d’obtenir une mesure de la
polarisation dans le plan du détecteur de Mott. C’est ce type de détecteur bi-dimensionnel
qui est implanté sur l’expérience.
Cependant, en pratique, il existe toujours une asymétrie factice, due au fait que les
détecteurs ne sont pas tout à fait identiques (efficacités différentes), et ne possèdent pas
une position exactement symétrique par rapport à la direction des électrons incidents.
Cette asymétrie factice est l’asymétrie mesurée pour un faisceau d’électrons totalement
dépolarisés (possédant une polarisation nulle). On doit donc chercher à supprimer cette
asymétrie factice.
Considérons le cas où une polarisation ~P est alignée suivant la direction de l’axe y qui
constitue l’expérience 1. Dans ce cas on peut écrire l’intensité collectée par les détecteurs
gauche et droite comme [9]
Ng1 = nρEgΩgI(θ)[1 + PSeff (θ)]
Nd1 = nρEdΩgI(θ)[1 − PSeff (θ)]
55
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
où n est le nombre d’électrons incidents, ρ le nombre d’atome d’or par unité d’aire, Eg,d
l’efficacité du détecteur gauche ou droite et Ωg,d les angles solides des détecteurs. Pour une
polarisation ~P aligné suivant la direction opposé à l’axe y, ce qui constitue l’expérience 2,
on peut écrire :
Ng2 = n′ρ′EgΩgI(θ)[1 − PSeff (θ)]
Nd2 = n′ρ′EdΩdI(θ)[1 + PSeff (θ)] .
Dans cette deuxième expérience, nous avons tenu compte d’un changement de la position
et de l’intensité du faisceau incident, en introduisant un nombre d’électrons incidents n′
et un nombre d’atome d’or par unité d’aire ρ′ différents de n et ρ.
On peut ensuite définir N+ et N− comme
N+ ≡√
Ng1Nd2 =√
nn′ρρ′EgEdΩgΩdI(θ)[1 + PSeff (θ)]
N− ≡√
Ng2Nd1 =√
nn′ρρ′EgEdΩgΩdI(θ)[1 − PSeff (θ)]
et on obtient bien une asymétrie qui n’inclut plus l’asymétrie factice :
A =N+ −N−
N+ +N− = PSeff (θ) .
L’erreur faite lors de la mesure de la polarisation P peut se séparer en deux contribu-
tions, l’une provenant d’une erreur systématique due à l’erreur sur la fonction de Sherman
effective, et l’autre provenant de l’erreur statistique due au nombre d’électrons collectés :
∆P = ∆Psyst + ∆Pstat =A
S2eff
∆Seff +∆A
Seff
.
Afin de minimiser l’erreur statistique, nous devons utiliser un nombre d’électrons détectés
suffisamment élevé qui a été fixé à 106 lors de nos mesures. L’erreur statistique est dans
ce cas inférieure à 1 %.
2.5.5 Accélération à 100 keV
Avant d’entrer dans le détecteur de Mott, les électrons doivent être accélérés à une
énergie de 100 keV. Ils sont accélérés en passant par des éléments d’optique de tension
croissante, de 400V, 2kV, 6 kV, 50 kV et enfin 100 kV. Les deux derniers éléments possèdent
une géométrie sphérique afin de réduire de façon significative les problèmes d’alignement.
Étant donnée la haute tension utilisée dans le détecteur de Mott, il est vital de protéger les
équipements et les utilisateurs. L’ensemble du détecteur, c’est à dire la partie ultra-vide
et le système électronique de comptage, est placé dans une cage de Faraday d’un volume
de plusieurs mètres cube. De plus l’air ambiant doit être sec afin d’éviter toute ionisation
et donc court circuit dans l’air ambiant. L’air entourant la partie à 100kV du détecteur
de Mott est donc chauffé en permanence pendant son utilisation.
56
2.5 : Détecteur de Mott
2.5.6 Détection des électrons
Les quatre détecteurs d’électrons dans le détecteur de Mott sont des détecteurs à sili-
cium, constitués d’une jonction p-n polarisée par une tension de 60V pour obtenir une zone
désertée aussi grande que possible. Le principe de fonctionnement est le suivant : lorsqu’un
électron externe pénètre dans le détecteur, il va créer des paires électron-trou le long de
sa trajectoire, dont le nombre est proportionnel à la perte d’énergie de l’électron incident.
Les charges ainsi créées vont produire une impulsion de courant vers l’électrode positive
(dans le cas de l’électron). Le signal collecté passe ensuite dans un pré-amplificateur de
charge avant de passer dans un amplificateur de mise en forme. Chaque impulsion est
ensuite comptabilisée sur des compteurs, un pour chaque détecteur. L’énergie perdue par
l’électron incident dans le silicium est de 390eV/µm, et l’épaisseur de Si dans le détec-
teur est de 300µm ( épaisseur limitée par diffusion multiple coulombienne ). Afin d’avoir
un rapport signal bruit maximal, il faut donc une énergie d’environ 100keV à l’électron
incident. Finalement, pour un électron incident de 100 keV, on récupère environ 30000
électrons, ce qui nécessite une électronique à faible bruit.
Les détecteurs étant portés à 100kV, le banc de détection est flottant à cette même
Fig. 2.16 – Photographie du détecteur de Mott. L’ensemble du détecteur, la partie ultra-vide et l’électronique de comptage, est placé dans une cage de Faraday, pour éviter toutproblème d’arc électrique avec les utilisateurs où le matériel.
57
Chapitre 2 : Dispositif expérimental
tension. Un transformateur d’isolement est donc nécessaire pour alimenter sans risque les
appareils de détection, qui sont eux aussi dans leur propre cage de Faraday. La transmis-
sion des données collectées par les compteurs est assurée par une connection GPIB via
une liaison intermédiaire par fibre optique.
Fig. 2.17 – Principe de fonctionnement du détecteur d’électrons à base de silicium. Lors-qu’un électron de haute énergie pénètre dans le Si, il forme sur son chemin des pairesélectron-trou, qui sont par la suite détectées par l’électronique de comptage.
58
2.5 : Détecteur de Mott
59
60
Deuxième partie
Résultats et discussions
61
Chapitre 3
Films ferromagnétiques polycristallins
Sommaire3.1 Films polycristallins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.1.1 Caractérisation structurale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.1.1.1 Diffraction par rayons X . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
3.1.1.2 Microscopie électronique en transmission . . . . . . . 67
3.1.1.3 Microscopie électronique à balayage . . . . . . . . . . 67
3.1.2 Caractérisation magnétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
3.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
3.2.1 Angle de précession . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
3.2.2 Angle de rotation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
3.2.3 Réflectivité électronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
3.3 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
3.3.1 Modèle de la marche de potentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
3.3.2 Réflexion des électrons sur une bande interdite . . . . . . . . . 78
3.3.3 Pourcentage d’électrons qui ont rencontrés la bande interdite . 82
3.3.4 Calcul de structure de bandes électronique par FP-LMTO . . . 86
63
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
Les trois éléments ferromagnétiques de transition Fe, Co et Ni ont été choisis pour
cette étude qui consiste à déterminer le mouvement du spin en fonction de l’énergie des
électrons incidents. Une couche de 10 nm de ferromagnétique a été déposée sur une couche
tampon d’Au de 10nm texturée de façon cubique face centrée dans la direction (111). Le
tout est déposé sur un substrat de verre. Les mesures pour l’angle de précession ε ont été
effectuées par la méthode décrite dans l’annexe B et l’angle de rotation φ par la mesure
des intensités collectées dans une configuration parallèle et anti-parallèle (voir partie 1.3).
3.1 Films polycristallins
Tous les dépôts ont été effectués dans la chambre principale à température ambiante.
Les substrats de verre sont des lames de verre pour microscopes, préalablement coupés
en bandes de 18x8 mm par une pointe de diamant. Les substrats ont été nettoyés succes-
sivement dans des bains d’acétone et d’éthanol placés dans un bac à ultra sons pendant
5 minutes, puis séchés sous un flux d’azote.
L’or a été choisi car c’est un élément conducteur et pour son caractère inoxydable. La
couche d’or et les autres éléments ferromagnétiques ont été déposés avec une vitesse de
dépôt d’environ 3A par minute préalablement mesurée par la microbalance à quartz.
3.1.1 Caractérisation structurale
Afin d’identifier la structure cristalline des différents films étudiés, nous avons utilisé
la technique de diffraction des rayons X. Cependant, la taille des grains a été déterminé
par microscopie électronique à balayage.
3.1.1.1 Diffraction par rayons X
La technique de diffraction par rayons X est un outil de caractérisation puissant et non
destructif des films minces. Les mesures ont été réalisées sur un diffractomètre Siemens
D500 de longueur d’onde λCuKα1 = 1.54184A pour les films de Ni et Siemens D5000 de
longueur d’onde λCoKα1 = 1.78896A pour les films de Fe et de Co.
Le principe de la mesure par rayons X dans la géométrie θ − 2θ est représenté sur la
figure 3.1. Le vecteur de diffusion ~q est toujours perpendiculaire au plan de l’échantillon. A
longueur d’onde constante, la variation de l’angle θ permet de sonder les différentes valeurs
de q. Lorsque la condition de Bragg ( 2d sin(θ) = nλ ) est réalisée, un pic de l’intensité
réfléchie apparaît. Cette mesure permet donc de déterminer la distance inter-réticulaire
d = λ/(2 sin(θ)) des différents constituants dans la direction de croissance.
64
3.1 : Films polycristallins
Fig. 3.1 – Principe de la mesure par rayons X dans la géométrie θ − 2θ
Fig. 3.2 – Spectre θ − 2θ pour l’échantillon de Fe/Au/Verre
Les figures 3.2, 3.3 et 3.4 montrent les résultats pour les échantillons de Fe, Co et Ni,
respectivement. Le film d’Au pour les trois échantillons présente une texture majoritai-
rement (111) dans une structure cubique face centrée. Le film de fer est majoritairement
texturé (110) dans une structure cubique centrée, le film de cobalt est majoritairement
texturé (0001) dans une structure hexagonale compacte, et le film de nickel est majori-
tairement texturé (111) dans une structure cubique face centrée.
65
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
Fig. 3.3 – Spectre θ − 2θ pour l’échantillon de Co/Au/Verre
Fig. 3.4 – Spectre θ − 2θ pour l’échantillon de Ni/Au/Verre
66
3.1 : Films polycristallins
3.1.1.2 Microscopie électronique en transmission
Toutes nos tentatives pour obtenir une image sur des échantillons en coupe par mi-
croscopie électronique à transmission (M.E.T.) ont échouées. Des difficultés ont princi-
palement été rencontrées lors des étapes ’agressives’ de préparation de l’échantillon. Le
premier problème a été une très mauvaise accroche de la couche d’or sur le verre. Le
simple fait de plonger l’échantillon dans un bain d’acétone a suffit pour décoller l’or du
verre. Ce problème avait été contré par un dépôt d’une pré-couche d’accroche de Co sur le
verre avant de déposer la couche tampon d’or. Mais les étapes de polissage et/ou de recuit
à 100°C pour la fixation par de la résine époxy, ont entraînées un mélange des interfaces,
les rendant imperceptibles.
3.1.1.3 Microscopie électronique à balayage
La figure 3.5 représente des images observées par microscopie électronique à ba-
layage. Les trois images représentent les échantillons de Fe(10nm)/Au(10nm)/Verre,
Co(10nm)/Au(10nm)/Verre et Ni(10nm)/Au(10nm)/Verre, respectivement de haut en
bas. Nous avons observé des formes de grains différentes pour les échantillons étudiés. La
taille des grains est par contre à peu prés constante pour les échantillons étudiés avec une
taille moyenne d’environ 30 nm.
67
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
Fe(10nm)/Au(10nm)/Verre
Co(10nm)/Au(10nm)/Verre
Ni(10nm)/Au(10nm)/Verre
Fig. 3.5 – Images des surfaces de Fe, Co Ni des échantillons polycristallins observées parmicroscopie électronique à balayage
68
3.1 : Films polycristallins
3.1.2 Caractérisation magnétique
La caractérisation magnétique de nos échantillons a été effectuée sur un magnétomètre
à gradient de champ alternatif (AGFM). Son principe repose sur la détection de l’ampli-
tude d’oscillation d’un échantillon fixé sur une sonde en quartz qui vibre dans un petit
gradient de champ alternatif. Des échantillons recouverts par une couche d’or de 3 nm
ont été spécialement réalisés pour cette étude.
Fig. 3.6 – Définition de la direction du champ magnétique ~B appliqué lors de la mesuremagnétique par AGFM sur les échantillons polycristallins. Le champ magnétique pulséappliqué avec nos bobines in situ correspond à la direction α = 0.
On remarque la présence d’un axe de facile aimantation probablement induit par la
géométrie du dépôt suivant la direction définie par l’angle α = 0°, correspondant à la
direction du champ magnétique appliqué dans notre expérience (fig. 3.6). Les cycles sont
pratiquement carrés et nous remarquons que l’aimantation rémanente obtenue lors de ces
cycles d’aimantation est pratiquement de 100% pour les trois ferromagnétiques (fig. 3.7,
3.8 et 3.9).
Les mesures pour un angle α égal à 45° ou 90° indiquent une aimantation rémanente
plus faible que pour le cas où le champ magnétique est appliqué suivant l’axe de facile
aimantation (α = 0°).
Une information importante à extraire de ces mesures est le champ magnétique à
appliquer pour obtenir une aimantation saturée. Il est tout à fait essentiel pour notre
expérience de pouvoir saturer l’échantillon magnétique avec nos bobines in situ. Le champ
de saturation est d’environ 60 Oe pour le Fe, 220 Oe pour le Co, et 110 Oe pour le Ni,
tous inférieurs à la limite de 300 Oe de champ magnétique pulsé par nos bobines in situ.
69
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
Fig. 3.7 – Cycle d’aimantation en fonction du champ magnétique sur l’échantillon deAu(3nm)/Fe(10nm)/Au(10nm)/verre.
Fig. 3.8 – Cycle d’aimantation en fonction du champ magnétique sur l’échantillon deAu(3nm)/Co(10nm)/Au(10nm)/verre.
70
3.1 : Films polycristallins
Fig. 3.9 – Cycle d’aimantation en fonction du champ magnétique sur l’échantillon deAu(3nm)/Ni(10nm)/Au(10nm)/verre.
71
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
3.2 Résultats
3.2.1 Angle de précession
La figure 3.10 représente les résultats obtenus pour l’angle de précession en fonction
de l’énergie des électrons incidents par rapport au niveau de Fermi, et ceci pour les trois
ferromagnétiques (Fe, Co et Ni). Les trois types de ferromagnétiques montrent le même
type de comportement. Alors qu’un fort pic apparaît pour une énergie inférieure à 12eV,
le signal est pratiquement constant pour des énergies supérieures. On note également
que l’angle de précession possède toujours une valeur positive, quelque soit l’énergie des
électrons incidents.
Pour une énergie supérieure à 12 eV, la valeur de l’angle de précession augmente en
allant du Ni vers le Fe. Cette valeur pratiquement constante reste toutefois faible, avec
une valeur inférieure à 10° pour le Fe et pratiquement nulle pour le Ni.
La valeur du maximum du pic aux basses énergies augmente aussi en allant du Ni vers
le Fe. La position du maximum pour le Fe, le Co et le Ni est respectivement de 7 eV,
6.6 eV et 6.2 eV. Pour le Fe, nous notons cependant la présence de modulations pour des
énergies supérieures à 12 eV. Dans le cas du Co et du Ni, il y a trop peu de données pour
exclure la présence de telles modulations.
Fig. 3.10 – Angle de précession ε en fonction de l’énergie des électrons incidents parrapport à l’énergie de Fermi pour les trois ferromagnétiques Fe, Co et Ni
72
3.2 : Résultats
3.2.2 Angle de rotation
Les résultats de l’angle de rotation φ pour le Fe, Co et Ni sont représentés sur la figure
3.11. Ici aussi, les trois ferromagnétiques étudiés montrent un comportement similaire.
L’angle de rotation reste pratiquement constant pour une énergie au dessus de 12 eV. En
revanche, une forte variation apparaît dans la gamme des faibles énergies, en passant d’une
valeur positive à une valeur négative. L’amplitude du changement augmente en allant du
Ni vers le Fe, et la position de la variation maximale se déplace vers les hautes énergies. On
remarque que pour chaque élément ferromagnétique, la position de la variation maximale
de l’angle de rotation coïncide au maximum de l’angle de précession.
Fig. 3.11 – Angle de rotation φ en fonction de l’énergie des électrons incidents par rapportà l’énergie de Fermi pour les trois ferromagnétiques Fe, Co et Ni
3.2.3 Réflectivité électronique
Les résultats de la réflectivité pour le Fe, Co et Ni sont représentés sur la figure 3.12.
Encore une fois, nous observons le même comportement pour les trois ferromagnétiques.
Un maximum de la réflectivité apparaît pour les basses énergies, dont la position cor-
respond au maximum de l’angle de précession et à la variation maximale de l’angle de
rotation. Pour le Fe, comme dans le cas de l’angle de précession, il apparaît une modulation
de la réflectivité pour une énergie supérieure à 12 eV.
73
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
Fig. 3.12 – Réflectivité en fonction de l’énergie des électrons incidents par rapport àl’énergie de Fermi pour les trois ferromagnétiques Fe, Co et Ni. Pour plus de clarté, lescourbes ont été décalées verticalement.
74
3.3 : Discussion
3.3 Discussion
3.3.1 Modèle de la marche de potentiel
Une première tentative pour comprendre les propriétés du mouvement du spin observé
a été de considérer un modèle très simple d’une marche de potentiel unidimensionnelle.
Dans ce modèle, un électron traversant le vide avec une énergie cinétique Ec rencontre une
marche de potentiel U↑,↓ dépendant du spin de l’électron incident. La différence U↑ − U↓
correspond à l’énergie d’échange ∆Eex du matériau. Dans ce modèle, la fonction d’onde
d’un électron dans la partie correspondant au vide est
ψV↑,↓ = eikx + |r↑,↓|eiθ↑,↓e−ikx
où k ∝√Ec est le vecteur d’onde dans le vide. Cette fonction d’onde correspond à une
onde incidente et à une onde réfléchie qui possède un coefficient de réflexion dépendant
du spin avec un module |r↑,↓| et une phase θ↑,↓.
Fig. 3.13 – Modèle de la marche de potentiel pour expliquer le comportement de ε, φ etI en fonction de l’énergie
Dans la partie correspondant au ferromagnétique, la fonction d’onde s’écrit
ψFM↑,↓ = t↑,↓e
i(k′↑,↓+iσ↑,↓)x
avec k′↑,↓ ∝√
Ec + U↑,↓ le vecteur d’onde dans le ferromagnétique et t↑,↓ le coefficient de
transmission dépendant du spin dans le ferromagnétique. Cette fonction d’onde inclut une
partie correspondant à une absorption dépendante du spin par le coefficient σ↑,↓. Cette
absorption est définie par le libre parcours moyen inélastique λ↑,↓ des électrons dans le
ferromagnétique : σ↑,↓ = 1/λ↑,↓.
75
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
La fonction d’onde et sa dérivée première par rapport à la variable spatiale x doivent
être continues à l’interface vide/ferromagnétique. Cette continuité nous permet de trouver
des relations pour |r↑,↓| et θ↑,↓, en fonction de l’énergie des électrons incidents, du potentiel
interne dans le ferromagnétique, de l’énergie d’échange et de l’absorption. La condition
de continuité implique que
ψV↑,↓(0) = ψFM
↑,↓ (0)
dψV↑,↓dx
(0) =dψFM
↑,↓dx
(0)
et donc que
1 + r↑,↓ = t↑,↓
(1 − r↑,↓)k = t↑,↓(k′↑,↓ + iσ↑,↓) .
En éliminant t↑,↓ de ces équations, nous trouvons le coefficient de réflection :
r↑,↓ =−(k′↑,↓
2 − k2) − σ2↑,↓
(k′↑,↓ + k)2 + σ2↑,↓
+ i−2σ↑,↓k
(k′↑,↓ + k)2 + σ2↑,↓
.
On obtient donc pour le module et la phase les expressions suivantes :
|r↑,↓| =(k′↑,↓ − k)2 + σ2
↑,↓(k′↑,↓ + k)2 + σ2
↑,↓et
tan(θ↑,↓) =2σ↑,↓k
k′↑,↓2 − k2 + σ↑,↓2
.
A partir du module du coefficient de réflection |r↑,↓|, il est possible de déduire la valeur
de l’asymétrie A =|r↑|2−|r↓|2|r↑|2+|r↓|2 , ce qui nous donne l’angle de rotation
φ = arctan
(
A√1 − A2
)
.
De même, à partir de la phase θ↑,↓ du coefficient de réflection, il est possible de déterminer
la valeur de l’angle de précession défini comme étant la différence de phase θ↓ − θ↑ :
ε = arctan
(
2σ↓k
k′↓2 − k2 + σ↓2
)
− arctan
(
2σ↑k
k′↑2 − k2 + σ↑2
)
.
Les résultats de ce modèle sont représentés sur la figure 3.14 pour le cas du cobalt. Nous
avons utilisé des valeurs expérimentales de σ↑,↓ [31–33], du potentiel interne U = 14eV [34]
et de l’énergie d’échange ∆Eex de 0.57 eV [35]. Ce modèle reproduit bien la faible variation
de ε et φ pour une énergie supérieure à 12 eV, mais n’explique pas la forte variation du
76
3.3 : Discussion
Fig. 3.14 – Résultats obtenus avec le modèle de la marche de potentiel, pour l’angle deprécession ε et de rotation φ dans le cas du cobalt.
mouvement du spin aux faibles énergies. L’apparition de structures aux faibles énergies
doit donc provenir d’un effet supplémentaire.
Cependant, pour une énergie supérieure à 12 eV, il est possible d’expliquer l’augmen-
tation expérimentale de l’angle de précession et de l’angle de rotation en allant du Ni vers
le Fe. Dans ce modèle, l’angle de précession est sensible à ∆σ = σ↓−σ↑, qui augmente en
allant du Ni vers le Fe [31,32], alors que l’angle de rotation est plutôt sensible à l’énergie
d’échange ∆Eex, qui augmente en allant du Ni vers le Fe [35].
Il existe néanmoins une différence entre la valeur mesurée et la valeur calculée par ce
modèle pour des énergies supérieures à 12 eV due à la grande simplicité de la description
de ce phénomène par une marche de potentiel.
77
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
3.3.2 Réflexion des électrons sur une bande interdite
Fig. 3.15 – Résultat de la présence d’une bande interdite dans la structure électroniquesur la phase et sur l’intensité réfléchie.
Une explication des fortes variations rencontrées aux faibles énergies peut être faite en
supposant la présence d’une bande interdite dépendant du spin. Le premier à avoir supposé
qu’une bande interdite avait un effet sur le mouvement du spin a été J. Henk [36, 37]. Il
a étudié théoriquement son effet, mais dans une géométrie de transmission. Nous allons
expliquer ici le principe du mouvement du spin des électrons élastiques dans une géométrie
de réflexion.
78
3.3 : Discussion
La présence d’une bande interdite a un effet à la fois sur la phase des électrons réfléchis,
et sur l’intensité réfléchie. Nous allons supposer par la suite qu’une bande interdite est
présente dans la structure électronique et ceci pour les trois ferromagnétiques étudiés.
Comme il s’agit d’un matériau magnétique, il existe donc une énergie d’échange, qui a
pour effet de décaler en énergie les bandes de spin majoritaire et minoritaire (fig. 3.15.a).
Les électrons possédant un spin majoritaire étant les plus décalés vers les basses énergies.
Étudions tout d’abord l’effet sur la phase. Il est connu que le déphasage rencontré sur
une bande interdite, d’un électron réfléchi par rapport à un électron incident, doit être
de π en traversant la bande interdite [38]. Ce changement de phase peut être représenté
par une fonction arctangente [39,40]. Andreas Rampe a utilisé dans sa thèse une fonction
arctangente pour modéliser des résultats obtenus par calcul ab initio. L’utilisation de cette
fonction a été motivée par le modèle d’Anderson [41,42]. Par la suite, nous utiliserons pour
cette variation de la phase en fonction de l’énergie, la fonction suivante (fig. 3.15.b)
θ↑,↓(E) = − arctan
(
E − E0 ± ∆Eex/2
∆Eθ↑,↓/2
)
avec ∆Eθ↑,↓ la largeur de la fonction arctangente, E0 le milieu de la bande interdite et
E l’énergie des électrons incidents. Par conséquent, l’angle de précession ε = θ↓ − θ↑ va
montrer un pic centré sur l’énergie E0 (fig. 3.15.c). La largeur a mi-hauteur du pic de
l’angle de précession sera notée ∆Eε.
Nous notons que dans la littérature, d’autres formes pour le changement de phase en
fonction de l’énergie ont été utilisées dans divers modèles [43–45]. Cependant ces formes du
changement de phase ne sont pas du tout en accord avec nos observations expérimentales.
Le changement de phase n’est pas le seul effet résultant de la présence d’une bande
interdite. Il y a aussi un phénomène de résonance de l’intensité réfléchie [39,46]. Le maxi-
mum du pic étant centré sur le milieu de la bande interdite pour chaque direction de spin
(fig. 3.15.d). Dans la zone de la bande interdite, les ondes d’électrons peuvent se propager
uniquement en tant qu’ondes évanescentes, et sont donc fortement réfléchies. En revanche
en dehors de la bande interdite, les électrons pénétrent dans la structure de bande élec-
tronique du solide, et sont donc beaucoup moins réfléchis. Nous supposons ici que le pic
de la réflectivité peut être décrit par une fonction lorentzienne :
R↑,↓(E) ∝[
1 +
(
E − E0 ± ∆Eex/2
∆ER↑,↓/2
)2]−1
avec ∆ER↑,↓ la largeur à mi-hauteur du pic de la réflectivité. L’énergie d’échange décale
donc en énergie ces deux pics. Une asymétrie de l’intensité réfléchie A =R↑−R↓R↑+R↓
en fonction
de l’énergie des électrons apparaît alors. Cela a pour conséquence un angle de rotation
79
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
φ = arctan(
A√1−A
)
qui possède une forte variation dans la zone de la bande interdite en
passant d’une valeur positive à une valeur négative (fig. 3.15.e).
Fig. 3.16 – Résultats obtenus avec le modèle de la bande interdite, pour l’angle de pré-cession ε et de rotation φ dans le cas du cobalt.
Finalement les résultats de ce modèle sont en bon accord avec les résultats expéri-
mentaux. Le modèle prédit pour la même énergie à la fois l’apparition d’un pic de la
réflectivité R(intégrée en spin) et d’un pic de l’angle de précession ε, ainsi qu’une forte
variation de l’angle de rotation φ en passant d’une valeur positive à une valeur néga-
tive. La position énergétique de la variation maximale de l’angle de rotation coïncide au
maximum de l’angle de précession et de l’intensité réfléchie.
En utilisant les résultats expérimentaux concernant la réflectivité intégrée en spin
(fig. 3.12) ainsi que l’énergie d’échange [35], nous avons déterminé pour le Co, l’angle de
précession ε et l’angle de rotation φ en fonction de l’énergie des électrons incidents prévus
par notre modèle. Nous obtenons un bon accord entre les résultats de ce modèle et les
valeurs expérimentales (fig. 3.16).
Cependant, nous remarquons qu’il existe une forte dissymétrie des extrema de l’angle
φ par rapport à zéro pour les valeurs expérimentales. En fait, le modèle qui est décrit
ci-dessus suppose un simple décalage des bandes interdites l’une par rapport à l’autre par
l’énergie d’échange, ce qui n’est pas le cas dans la réalité. Par exemple, des expériences
de photoémission résolues en spin sur un monocristal de Fe(001) [13, 47–49] montrent
une forte différence de l’intensité collectée entre les électrons possédant un spin up et les
80
3.3 : Discussion
électrons possédant un spin down.
Pour rendre compte de l’effet de dissymétrie dans le cas du Co, nous avons introduit
un facteur R↑(E)
R↓(E)= 1.2 entre la réflectivité des électrons de spin majoritaire et celle des
électrons de spin minoritaire visible sur la figure 3.17 en inclusion. Ce faible facteur suffit
pour trouver un très bon accord avec les résultats expérimentaux (figure 3.17). Il est
important de noter que cet effet de dissymétrie des pics de réflectivité n’a absolument pas
d’influence sur le pic de l’angle de précession.
Fig. 3.17 – Résultats obtenus avec le modèle de la bande interdite, pour l’angle de préces-sion ε et l’angle de rotation φ en introduisant une dissymétrie dans les réflectivités entreles électrons de spin majoritaire et minoritaire (figure incluse) dans le cas du cobalt.
Finalement en superposant l’effet de la marche de potentiel et l’effet de la bande
interdite représentés sur la figure 3.18, nous obtenons une bonne description des résultats
expérimentaux.
Arrivé à cette partie de la discussion, nous pouvons nous demander pourquoi nous
observons les effets d’une bande interdite, alors que nous étudions le cas d’échantillons
polycristallins. La première idée qui vient à l’esprit est que le signal observé doit être
moyenné sur toutes les directions de l’espace reciproque. Cependant, nous devons tenir
compte de la réflectivité des électrons. Celle-ci est beaucoup plus grande dans le cas d’une
bande interdite qu’en dehors d’une bande interdite. Nous avons donc bien une moyenne du
signal, mais pondérée par la réflectivité électronique. En conséquence, la grande majorité
des électrons réfléchis, qui sont donc les électrons détectés, proviennent d’une réflexion
sur une bande interdite.
81
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
Fig. 3.18 – Superposition des résultats obtenus avec le modèle de la marche de potentielet le modèle de la bande interdite, pour l’angle de précession ε et l’angle de rotation φ enintroduisant une dissymétrie dans les réflectivités entre les électrons de spin majoritaireet minoritaire dans le cas du cobalt.
3.3.3 Pourcentage d’électrons qui ont rencontrés la bande inter-dite
Dans le cas où l’énergie d’échange ∆Eex est petite devant la largeur à mi-hauteur du
pic de réflection ∆ER↑,↓ , ce qui est le cas dans notre expérience, on peut approximer la
largeur du pic de réflectivité à celui du pic de l’angle de précession (∆ER↑,↓ ≈ ∆Eε).
Dans ce cas, il est possible de trouver une expression très simple de l’angle de précession
maximal prévu avec notre modèle :
εmodelmax ≈ 2 arctan (∆Eex/∆Eε) .
En utilisant les valeurs expérimentales pour ∆Eex, il est donc possible de confronter
notre modèle aux résultats expérimentaux εexpmax. L’ajustement des pics de l’angle de pré-
cession pour le Fe, Co et Ni donne une largeur à mi-hauteur ∆Eε de 2.8, 2.4 et 1.4 eV
respectivement. Pour les valeurs de l’énergie d’échange, on peut utiliser les valeurs trou-
vées expérimentalement [35] qui donnent : 0.92 eV pour le Fe, 0.57 eV pour le Co et 0.18
eV pour le Ni. Avec notre modèle on trouve donc pour εmodelmax un angle de 36° pour le Fe,
27° pour le Co et 14° pour le Ni.
Les résultats expérimentaux nous donnent pour εexpmax, après soustraction de la partie
82
3.3 : Discussion
Fe Co Ni
∆Eε (eV) 2.8 ± 0.2 2.4 ± 0.2 1.4 ± 0.2
∆Eex (eV) 0.92 ± 0.05 0.57 ± 0.05 0.18 ± 0.05
εmodelmax (°) 36 ± 2 27 ± 2 14 ± 3
εexpmax (°) 30 ± 0.5 21 ± 0.5 9 ± 0.5
εexpmax/ε
modelmax 0.84 ± 0.1 0.79 ± 0.1 0.63 ± 0.2
R1/R 0.74 ± 0.1 0.9 ± 0.1 0.75 ± 0.1
Tab. 3.1 – Tableau récapitulatif des résultats
constante, 30.5° pour le Fe, 21° pour le Co et 9° pour le Ni. Si nous calculons le rapport
entre la valeur donnée par l’expérience et celle donnée par le modèle, nous trouvons un
rapport εexpmax/ε
modelmax de 0.84±0.1 pour le Fe, 0.79±0.1 pour le Co, et 0.63±0.2 pour le Ni.
En tenant compte de l’erreur qui est assez grande pour la valeur de l’énergie d’échange du
Ni, nous pouvons dire que des valeurs assez semblables sont trouvées pour les trois types
de ferromagnétiques.
Ces résultats nous permettent d’établir une conclusion importante pour les électrons
qui possèdent une énergie correspondant au pic de l’angle de précession : environ 80%
des électrons élastiques réfléchis ont rencontrés une bande interdite ( voir le tableau 3.1
récapitulatif ). Nous aboutissons à la même conclusion lors de l’analyse de l’intensité des
pics de la réflectivité. Les figures 3.19, 3.20 et 3.21 représentent les différents pics résultant
de l’ajustement de la réflectivité pour les films de Fe, Co et Ni. La courbe R représente
la somme d’une contribution constante R0 et de trois (quatres pour le Fe) autres pics
Lorentziens R1, R2 et R3, le pic R1 représentant la contribution du gap à basse énergie. A
l’emplacement du pic, par l’étude du rapport entre le maximum de l’intensité du pic ajusté
à l’emplacement du gap (R1) et le maximum de l’intensité totale (R), il est possible de
déduire qu’environ 80% de l’intensité à la position du maximum provient du pic à cette
énergie, alors que le reste provient des pics à des énergies supérieures. Le tableau 3.1
rassemble les différents paramètres obtenus.
Cette partie aboutit à un point pratique important : pour avoir un angle de précession
maximal et donc un transfert de moment cinétique maximal en géométrie de réflection ,
il faut choisir un matériau qui possède un rapport de l’énergie d’échange sur la largeur de
la bande interdite aussi grand que possible.
83
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
Fig. 3.19 – Résultat de l’ajustement de la réflectivité pour l’échantillon de Fe/Au/verre .
Fig. 3.20 – Résultat de l’ajustement de la réflectivité pour l’échantillon de Co/Au/verre.
84
3.3 : Discussion
Fig. 3.21 – Résultat de l’ajustement de la réflectivité pour l’échantillon de Ni/Au/verre .
85
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
3.3.4 Calcul de structure de bandes électronique par FP-LMTO
Fig. 3.22 – Calcul réalisé par la méthode FP-LMTO indiquant l’inverse de la vitesse degroupe moyennée sur une surface iso-énergétique en fonction de l’énergie des électrons parrapport au niveau de Fermi
Cette interprétation du mouvement du spin par l’action d’une bande interdite dépen-
dant du spin est renforcée par un calcul ab inito de la vitesse de groupe des électrons,
moyennée sur une surface iso-énergétique, en fonction de l’énergie, représentée sur la fi-
gure 3.22 . Ce calcul a été réalisé par M. Alouani à l’institut par la méthode FP-LMTO
(Full Potential - Linear Muffin Tin Orbital). La présence d’une bande interdite entraîne
à ses alentours une zone où la structure de bandes électronique est plate, ce qui induit
une vitesse de groupe faible (vg = ∂E/∂k). Pour mettre en relief ces zones où la vitesse
de groupe est faible, nous avons choisi de tracer l’inverse de la vitesse de groupe moyenne
1/〈vg〉 en fonction de l’énergie des électrons incidents par rapport à l’énergie de Fermi.
Pour les trois ferromagnétiques, des doubles pics sont trouvés, indiquant la présence de
bandes interdites dépendante du spin. La prise en considération des erreurs à la fois dans
le calcul et dans l’expérience, indiquent que l’accord de la position en énergie des pics entre
le calcul et l’expérience est satisfaisante. En particulier, l’ordre du décalage énergétique
des pics entre le Fe, le Co et le Ni est reproduit par le calcul.
86
3.3 : Discussion
Dans ce chapitre, nous avons montré que la forte variation de l’angle de précession
et de l’angle de rotation qui apparaît pour des énergies inférieures à 12 eV peut être
interprétée par la présence d’une bande interdite dans la structure de bande électronique
des ferromagnétiques étudiés. En revanche, pour des énergies supérieures, un modèle de
marche de potentiel dépendant du spin explique le comportement observé.
87
Chapitre 3 : Films ferromagnétiques polycristallins
88
Chapitre 4
Mouvement du spin dans une structure
de puits quantique
Sommaire4.1 Films monocristallins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
4.2 Système Cu/Co/Cu(001) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
4.2.1 Étude en fonction de l’énergie des électrons incidents . . . . . . 93
4.2.2 Étude en fonction de l’épaisseur de la couche de Cu . . . . . . . 98
4.3 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
4.3.1 Principe du Fabry-Pérot électronique . . . . . . . . . . . . . . . 103
4.3.2 Le programme d’ajustement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
4.3.3 Résultats des ajustements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
89
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Le but de cette section est d’étudier les effets de la présence d’états de puits quantiques
sur le mouvement du spin des électrons. Pour réaliser cette étude, nous avons choisi
d’utiliser le système Cu/Co(001). Durant ces dernières années, le système Cu/Co(001) a
déjà été beaucoup étudié car il montre de forts effets de confinement quantique [43,50–53].
En plus, ce système nous offre une interface magnétique Cu/Co qui nous fournit une
réflectivité dépendant du spin. Nous serons donc en présence d’états de puits quantiques
dans la couche de cuivre dépendants du spin. Jusqu’à maintenant, aucune étude sur le
mouvement du spin dans ce type de structure n’a été menée.
4.1 Films monocristallins
Pour réaliser des films monocristallins de cobalt (001), nous avons utilisé un mono-
cristal de Cu(001). Après un décapage à l’argon, et un recuit à environ 500°C, un film de
cobalt de 50A est déposé à température ambiante avec une vitesse de dépôt d’environ 2
A /min. Cette épaisseur nous fournit une surface d’une bonne qualité structurale (fig.4.2).
Le cobalt pousse sur le cuivre dans une structure cubique face centrée avec une légère
distorsion tetragonale inférieure à 4% selon la normale à la surface [54,55], alors que son
état massif est plutôt hexagonal compact. Ramsperger [56] a montré par microscopie à
effet tunnel que la croissance du cobalt sur un monocristal de Cu(001) se fait couche par
couche avec une haute qualité.
Fig. 4.1 – Orientation du cristal de Cu(001).
Un axe de facile aimantation est trouvé selon les axes [110] et [110] [57]. Pour les
90
4.1 : Films monocristallins
besoins expérimentaux, le cristal de Cu a été orienté tel que la direction [110], et donc
l’axe de facile aimantation est dans le plan de diffusion des électrons (fig. 4.1)
La figure 4.2 représente les clichés de diffraction LEED obtenus pour le monocristal de
cuivre (001) (cliché de gauche) et pour une couche de 2 nm de cobalt (cliché de droite).
Ce dernier cliché montre une bonne cristallinité du cobalt.
Cu(001) Co(2 nm)/Cu(001)
Fig. 4.2 – Clichés de diffraction LEED du monocristal de Cu(001) (à gauche) et d’unecouche de 2 nm de Co sur ce monocristal pour une énergie de 130 eV.
La figure 4.3 représente l’intensité du pic Auger du cuivre pour une énergie de 916 eV en
fonction de l’épaisseur de la couche de cobalt. Un ajustement des données expérimentales
nous donne une longueur d’atténuation des électrons dans le cuivre d’environ 12A , ce
qui correspond bien au libre parcours moyen inélastique des électrons de cette énergie
dans le cobalt [58]. Le résultat est consistant avec une croissance couche par couche du
Co sur le monocristal de Cu(001).
91
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Fig. 4.3 – Intensité du pic Auger du Cu pour une énergie de 916 eV en fonction del’épaisseur de Co.
92
4.2 : Système Cu/Co/Cu(001)
4.2 Système Cu/Co/Cu(001)
4.2.1 Étude en fonction de l’énergie des électrons incidents
Dans cette partie, nous allons étudier la réflectivité ainsi que les angles de précession
et de rotation correspondant au mouvement du spin, en fonction de l’énergie des élec-
trons incidents. Lors de ce balayage en énergie, nous avons gardé une épaisseur de cuivre
constante.
Dans un premier temps, étudions tout d’abord la réflectivité. La figure 4.4 montre les
spectres énergétiques de la réflectivité pour différentes épaisseurs de la couche de Cu. Les
résultats pour 0 ML (mono layer = mono couche) de cuivre (nous avons donc uniquement
du cobalt) vont nous servir de référence par la suite. Un pic de la réflectivité apparaît à
une énergie de 11 eV, ce qui indique la présence d’une bande interdite au dessus du niveau
de Fermi dans la structure électronique du cobalt. Le dépôt d’une couche de cuivre change
complètement ce spectre. Un nouveau pic apparaît à une énergie d’environ 8.5 eV alors
que le pic initial du Co à 11 eV disparaît. La position de ce nouveau pic est indépendante
de l’épaisseur de cuivre. Ce résultat indique désormais la présence d’une bande interdite
dans la structure électronique du Cu.
Cependant, d’autres structures apparaissent à des énergies supérieures (fig. 4.4). Des
maxima et minima apparaissent. Nous remarquons que leur position énergétique change
avec l’épaisseur de cuivre. En fait, tous les extrema se déplacent vers les faibles énergies
lorsque l’épaisseur de cuivre augmente. En étudiant leur position, nous constatons que
la distance entre les maxima et la distance entre les minima diminue avec l’épaisseur
de cuivre. Ces deux phénomènes sont une indication très claire de la présence d’états
de puits quantiques dans la couche de Cu. La figure 4.5 reporte pour la réflectivité la
position énergétique en fonction de l’épaisseur de cuivre de chaque extrema sur un dia-
gramme énergie-épaisseur. Ces phénomènes ont déjà été observés à plusieurs reprises par
des expériences de photoémission ou de photoémission inverse [43]. Le modèle retenu pour
expliquer ces observations est le modèle de l’accumulation de phase [59]. Si les électrons
sont confinés dans un film de Cu d’épaisseur dCu, la condition de l’existence d’interférences
constructives (correspondant à un maximum de la réflectivité) s’exprime par
2dCukCu cos(α) + θvide/Cu + θCu/Co = 2πn
avec θvide/Cu +θCu/Co le déphasage dû à la réflexion sur les interfaces vide/Cu et Cu/Co, α
l’angle d’incidence des électrons dans le Cu, n un entier, et kCu le vecteur d’onde dans la
couche de cuivre. Nous notons cependant que la périodicité des oscillations observées n’est
pas déterminée par le vecteur d’onde de la fonction d’onde de Bloch, mais par le vecteur
93
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Fig. 4.4 – Réflectivité en fonction de l’énergie des électrons incidents, pour différentesépaisseurs de cuivre.
d’onde de la fonction d’enveloppe qui module la fonction de Bloch dans la couche de cuivre
[43] (fig. 4.6). La fonction d’onde dans un puits quantique est une fonction Bloch oscillant
très rapidement et modulée par une fonction d’enveloppe. Cette fonction qui possède une
94
4.2 : Système Cu/Co/Cu(001)
période beaucoup plus grande que la fonction de Bloch dans le matériau massif, assure
que les conditions de bords aux interfaces du puits quantique sont respectées.
Fig. 4.5 – Diagramme énergie-épaisseur représentant la position des extrema pour l’in-tensité réfléchie et pour l’angle de précession ε
Fig. 4.6 – Illustration de la fonction d’onde d’enveloppe dans une couche mince. Lafonction de Bloch qui est la fonction d’onde des électrons dans un cristal infini, se voitmodulée par une fonction d’enveloppe possédant une périodicité beaucoup plus grandeafin de rendre compte des conditions de bord.
Intéressons nous maintenant au mouvement du spin. Son étude se fait donc en étudiant
les angles de précession ε et de rotation φ en fonction de l’énergie des électrons incidents.
La figure 4.7 représente l’angle de précession ε et de rotation φ en fonction de l’énergie
95
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
des électrons incidents pour différentes épaisseurs de la couche de Cu. Dans le cas d’une
couche de Co non recouverte (0 ML de Cu), nous retrouvons comme dans le cas de la
réflectivité les effets de la présence d’une bande interdite dans la structure électronique du
Co ( section 3.3.2 ). Pour l’angle de précession ε nous obtenons donc un pic à une énergie
de 11 eV, et une structure plus/moins pour l’angle de rotation φ. Dès que la couche de Co
est recouverte par du cuivre, les propriétés du mouvement de spin en fonction de l’énergie
des électrons incidents changent. Comme dans le cas de la réflectivité, nous observons
en fonction de l’épaisseur de Cu, l’apparition d’une modulation à la fois de l’angle de
précession ε et de l’angle de rotation φ. En reportant la position énergétique des extrema
de l’angle de précession sur le même diagramme énergie-épaisseur que la réflectivité ( fig.
4.5 ), nous remarquons que les positions des extrema de l’angle de précession correspondent
bien aux positions des extrema de la réflectivité. Ce diagramme démontre clairement qu’il
existe un lien entre le mouvement du spin dans la couche de Cu et la présence d’états
de puits quantiques. La présence d’états de puits quantiques est donc à l’origine de ces
modulations.
96
4.2 : Système Cu/Co/Cu(001)
Fig. 4.7 – Résultats pour l’angle de précession ε et de rotation φ en fonction de l’énergiedes électrons incidents, pour différentes épaisseurs de cuivre.
97
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
4.2.2 Étude en fonction de l’épaisseur de la couche de Cu
Dans cette partie, nous allons étudier la réflectivité, l’angle de précession et l’angle
de rotation en fonction de l’épaisseur de la couche de cuivre. La couche de cuivre a été
déposée à une vitesse d’environ 0.5A /min avec des pas allant de 30 secondes à quelques
minutes.
La figure 4.8 représente l’intensité du pic Auger du cobalt pour une énergie de 657 eV en
fonction de l’épaisseur de la couche de cuivre. Un ajustement des données expérimentales
nous donne une longueur d’atténuation des électrons dans le cobalt d’environ 13.5A ,
ce qui correspond bien au libre parcours moyen inélastique des électrons de cette énergie
dans le cuivre. Le résultat est conforme à la littérature avec une croissance couche par
couche du cuivre sur le cobalt.
Fig. 4.8 – Intensité du pic Auger du Co pour une énergie de 657 eV en fonction del’épaisseur de la couche de Cu.
La figure 4.9 représente les résultats pour la réflectivité et la figure 4.10 les résultats
pour le mouvement du spin, en fonction de l’épaisseur dCu de cuivre, et ceci pour différentes
énergies des électrons incidents. Pour toutes ces quantités, les résultats montrent très
clairement des oscillations en fonction de l’épaisseur de cuivre pour des énergies comprises
entre 10 et 17 eV.
98
4.2 : Système Cu/Co/Cu(001)
Les trois quantités observées montrent le même type de comportement pour l’ampli-
tude de leurs oscillations en fonction de l’épaisseur de cuivre. Leur amplitude diminue
rapidement jusqu’à devenir impossible à observer. Ce comportement est une conséquence
directe du libre parcours moyen inélastique des électrons dans la couche de cuivre. Plus
l’épaisseur de cuivre est importante, plus le nombre d’électrons susceptibles d’être réfléchis
par l’interface Cu/Co est petit. En conséquence, nous observons des effets d’interférences
électroniques de plus en plus faibles.
Nous notons un déphasage de 90° entre les oscillations de l’angle de précession et de
l’angle de rotation.
La période des oscillations montre aussi un changement important en fonction de
l’énergie des électrons incidents. Lorsque l’énergie des électrons diminue, la période aug-
mente très fortement. Il devient impossible de la mesurer pour une énergie inférieure à 10
eV.
La figure 4.11 représente les données du mouvement du spin de la figure 4.10, mais
cette fois-ci en trois dimensions, en fonction de l’épaisseur de la couche de cuivre pour des
énergies allant de 9 à 19 eV. Cette figure représente le mouvement du spin dans l’espace.
99
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Fig. 4.9 – Réflectivité en fonction de l’épaisseur de cuivre, pour différentes énergies desélectrons incidents.
100
4.2 : Système Cu/Co/Cu(001)
Fig. 4.10 – Angle de précession ε et de rotation φ en fonction de l’épaisseur de cuivre,pour différentes énergies des électrons incidents.
101
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Fig. 4.11 – Mouvement du spin en fonction de l’épaisseur du Cu représenté en troisdimensions pour des énergies allant de 9 à 19 eV
102
4.3 : Discussion
4.3 Discussion
4.3.1 Principe du Fabry-Pérot électronique
Une façon de modéliser des interférences électroniques dans un puits quantique est
d’utiliser le modèle d’un interféromètre de type Fabry-Pérot. Un changement de l’épaisseur
de Cu, revient dans le cas de l’optique à un changement de l’écart entre les deux miroirs.
Cependant, il existe une grande différence entre un interféromètre optique et le cas de
notre interféromètre électronique. Alors que dans le cas de l’optique nous devons considérer
de multiples réflexions de la lumière sur les miroirs, dans les cas des électrons de notre
système, il suffit de tenir compte d’un nombre limité de réflexions. La très faible réflectivité
des électrons aux interfaces ainsi que la grande atténuation du signal dans le Cu aux
énergies considérées, indiquent clairement que très peu de réflexions successives par les
électrons sont possibles.
Considérons le cas d’un faisceau incident faisant un angle de 45° avec la normale
de la surface de l’échantillon (fig. 4.12). Une première partie de ce faisceau est réfléchie
par l’interface vide/Cu avec une amplitude r↑,↓12 = |r↑,↓12 |eiφCu (|r↑12| = |r↓12| = |r12|/√
2),
alors que la grande majorité du faisceau est transmise dans le Cu avec un angle α. Cet
angle α est l’angle de réfraction, qui est calculé grâce à la conservation du vecteur d’onde
parallèle à la surface de l’échantillon. On a donc kvide sin(45°) = kCu sin(α), d’où α =
arcsin(
1√2
kvide
kCu
)
= arcsin(
1√2
√E√
E+UCu
)
, avec E l’énergie des électrons incidents, et UCu le
potentiel interne du Cu, qui est pris égal à 12 eV [60]. Une partie de ce faisceau transmis est
réfléchie par l’interface Cu/Co avec une amplitude r↑,↓23 = |r↑,↓23 |eiθ↑,↓23 , avec |r↑,↓23 | le module
de l’amplitude de réflexion dépendant du spin et θ↑,↓23 sa phase dépendante du spin. Une
fois ce faisceau sorti de la couche de Cu, il a accumulé un déphasage par rapport au
premier faisceau égal à
δ(dCu) = 2dCu
[
kenvCu cos(α) − i
λCu cos(α)
]
avec kenvCu = π/ΛCu le vecteur d’onde de la fonction d’enveloppe de la fonction de Bloch
dans le Cu (fig. 4.6) [43, 53], ΛCu la période de la fonction d’enveloppe, et λCu le libre
parcours moyen inélastique des électrons dans le Cu.
4.3.2 Le programme d’ajustement
Un programme d’ajustement écrit en C++ a été utilisé pour "ajuster" les résultats
expérimentaux dans le cadre de notre modèle de Fabry-Pèrot électronique. Les trois quan-
tités |r|2, ε et φ sont ajustées en même temps en fonction de l’épaisseur de cuivre.
103
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Fig. 4.12 – Principe de notre modèle de type Fabry-Pèrot électronique.
La croissance du cuivre sur la couche de cobalt n’étant pas parfaite, nous devons intro-
duire une rugosité de la couche de cuivre dans notre modèle. Nous avons choisi de décrire
cette rugosité en supposant une croissance du cuivre selon le modèle de Cohen [61], initia-
lement prévu pour expliquer les oscillations de l’intensité en fonction de l’épaisseur d’un
film lors d’expériences de diffraction d’électrons rapides en incidence rasante ( Reflection
High Energy Electron Diffraction ). Le principe de ce modèle est expliqué sur la figure
4.13. Le processus 1 correspond à la croissance non diffusive sur la surface de la couche
(n − 1), le processus 2 correspond à un adatome du niveau (n + 1) qui diffuse vers le
niveau (n), et le processus 3 correspond à un adatome du niveau (n) qui diffuse vers le
niveau (n− 1).
Fig. 4.13 – Principe de la croissance dans le modèle de Cohen.
En partant du principe qu’un atome qui est recouvert par un ou plusieurs atomes ne
peut plus diffuser vers une couche inférieure, le taux d’atomes qui diffuse par exemple de
la couche (n+ 1) à la couche n doit être proportionnel au produit de l’espace disponible
104
4.3 : Discussion
sur la couche n qui est (cn−1 − cn), et de l’espace non recouvert de la couche (n+ 1) qui
est (cn+1 − cn+2). La variation du taux de recouvrement cn(t) (qui varie entre 0 et 1) de
la couche n avec le temps de dépôt t est alors donnée par
dcndt
=1
τ(cn−1 − cn) + k(cn+1 − cn+2)(cn−1 − cn) − k(cn − cn+1)(cn−2 − cn−1)
avec τ le temps de croissance pour une monocouche, et k le taux de diffusion. Il
est facile de résoudre numériquement ce système d’équations non linéaires, en utilisant les
conditions initiales suivantes : c0(t) = 1 et cn(0) = 0. La figure 4.14 représente en inclusion
les taux de recouvrement cn en fonction de l’épaisseur de Cu déposé pour différentes valeurs
du taux de diffusion k. Le cas de la croissance couche par couche est représenté pour un
taux de diffusion élevé (k=1000) , alors que le cas sans diffusion est représenté par un
taux de diffusion nul (k=0).
La rugosité ∆2 =∑∞
n=0(n− t/τ)2(cn − cn+1), qui dépend de l’épaisseur du film consi-
déré, a été choisie pour être en accord avec des études expérimentales déjà réalisées sur
le même système [62]. Dans ce travail, de longues périodes d’oscillations ont toujours été
observées(6 ML de Cu), mais plus difficilement de courtes périodes (2.7 ML de Cu), la
rugosité est donc supérieure à 3 ML. Nous avons donc une estimation de la rugosité pour
ce système (fig. 4.14 ), et nous avons finalement choisi d’utiliser un taux de diffusion
k = 15, sur la base de ces travaux.
Le modèle de Cohen nous donne donc une distribution d’épaisseur du cuivre afin
d’en modéliser la rugosité. Par la suite, nous allons donc considérer la contribution de
multiples interféromètres indépendants possédant une épaisseur qui est une valeur entière
de monocouche, dont les résultats seront pondérés par le taux de surface non recouverte
cn − cn−1 de la couche n.
Le programme calcule tout d’abord le résultat de l’amplitude réfléchie r↑,↓ pour des
valeurs de l’épaisseur du cuivre qui sont des nombres entiers de monocouches.
Pour ce faire, nous avons utilisé une valeur très faible du module de l’amplitude de
réflexion de l’interface 1-2. Cette valeur est prise de façon arbitraire car elle n’a pas
d’influence sur les résultats, mais elle doit cependant rester faible par rapport à l’unité.
L’amplitude de réflexion de l’interface 2-3, a été mise sous la forme suivante :
|r↑23| =√
(1 + Ai)/2√
RCu−Co/Cu|r12||r↓23| =
√
(1 − Ai)/2√
RCu−Co/Cu|r12|
avec l’asymétrie Ai =R↑
23−R↓23
R↑23+R↓
23
où R↑,↓23 = |r↑,↓23 |2, et RCu−Co/Cu le rapport des intensités
réfléchies de l’interface Cu/Co et de la couche de cuivre seule.
105
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Fig. 4.14 – Rugosité en fonction de l’épaisseur du cuivre calculée à partir du modèle deCohen pour différents taux de diffusion k, ainsi que le taux de recouvrement cn pour k=0,10 et 1000.
Par définition, nous avons R23 = R↑23+R↓
23. A partir de cette relation et de la définition
de l’asymétrie Ai, nous obtenons donc R↑23 = R23(1 + Ai)/2 et R↓
23 = R23(1 − Ai)/2, et
finalement
|r↑23| =
√
R↑23 =
√
R23
√
(1 + Ai)/2 = |r23|√
(1 + Ai)/2
|r↓23| =
√
R↓23 =
√
R23
√
(1 − Ai)/2 = |r23|√
(1 − Ai)/2
avec |r23| =√
RCu−Co/Cu|r12|.Le vecteur d’onde des électrons dans le vide (1) est pris comme : k1 =
√2mE/h, et
dans la couche 2 : k2 = π/Λ, avec Λ la période de la fonction d’enveloppe dans la couche
(2).
Les relations de continuité aux interfaces nous fournissent des relations supplémen-
taires : r21 = −r12, t12 = 1+r12 et t21 = 1+r21, avec t12 et t21 le coefficient de transmission
des interfaces 1-2 et 2-1.
Nous devons aussi tenir compte d’un changement de phase dépendant du spin lors de
la réflexion sur l’interface magnétique 2-3 en introduisant une phase θ↑23 = θ23 − εi/2 et
θ↓23 = θ23 + εi/2. Le coefficient de réflexion sur l’interface 2-3 s’écrit donc
r↑23 = |r↑23|eiθ23e−iεi/2
r↓23 = |r↓23|eiθ23eiεi/2 .
106
4.3 : Discussion
Finalement, l’amplitude de réflexion totale s’écrit avec t12 et t21 les coefficients de
transmission des interfaces 1-2 et 2-1 :
r↑,↓ =r12√
2+ t12t21
(
N∑
j=1
r21j−1r↑,↓23
je−jiδ
)
(4.1)
avec r↑,↓ = |r↑,↓|eiθ↑,↓23 . N est le nombre de réflexions possibles dans notre système. Dans
le programme, N = 10, mais en pratique, N = 2 est largement suffisant pour décrire de
façon significative les résultats expérimentaux.
Lorsque l’épaisseur de cuivre dCu = 0, nous avons utilisé pour le coefficient de réflexion :
r↑ = r↑23 =√
(1 + A0)/2√
RCo/Cu|r12|eiθ23e−iε0/2
r↓ = r↓23 =√
(1 − A0)/2√
RCo/Cu|r12|eiθ23e+iε0/2
qui correspond à la réflexion sur la couche de Co seule, avec A0 l’asymétrie , RCo/Cu le
rapport de réflectivité de la couche de Co seule et de la couche de cuivre seule, et ε0 l’angle
de précession de la couche de Co non recouverte.
L’introduction de ces coefficients A0, RCo/Cu et ε0 qui sont différents des coefficients
Ai, RCu−Co/Cu et εi nous permet de tenir compte d’un changement des propriétés de la
couche de cobalt lors du dépôt de la première couche de Cu.
Nous sommes donc capable de calculer les valeurs de ε, A et I pour chaque épaisseur
de la couche de cuivre dCu = n.ML possédant une valeur entière de monocouche :
εn = θ↓23 − θ↑23
An =|r↑|2 − |r↓|2|r↑|2 + |r↓|2
In = |r↑|2 + |r↓|2.En utilisant le taux de recouvrement cn de chaque monocouche calculé par la méthode
de Cohen, nous calculons l’angle de précession total, l’asymétrie totale et l’intensité totale
(fig. 4.15)
ε =M∑
n=0
(cn − cn+1)εnIn/I
A =M∑
n=0
(cn − cn+1)AnIn/I
I =M∑
n=0
(cn − cn+1)In
107
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
avecM un nombre supérieur au nombre de monocouches déposées. Nous ne considérons ici
que la somme des contributions de multiples interféromètres indépendants, en négligeant
la contribution de faisceaux entrant dans une couche n en sortant d’une couche m 6= n.
Fig. 4.15 – Principe de fonctionnement du programme : pour tenir compte de la rugosité,nous utilisons une distribution d’interféromètres indépendants d’épaisseurs différentes.
L’angle de rotation φ est toujours calculé avec l’asymétrie A par la relation φ =
arctan(A/√
1 − A). Nous avons de plus ajouté une décroissance exponentielle pour I avec
Iexp = Ie−dCu/λI afin de modéliser la décroissance expérimentale de l’intensité en fonction
de l’épaisseur de cuivre, avec λI le paramètre contrôlant la décroissance. Nous sommes
donc en mesure d’ajuster les résultats expérimentaux à partir de ce modèle, en utilisant
comme paramètres : Ai, λCu, εi, θ23, Λ et RCu−Co/Cu. Les paramètres A0 et ε0 ont été pris
comme étant les valeurs expérimentales pour une épaisseur de 0 ML de cuivre et RCo/Cu
le rapport entre la valeur expérimentale de I pour 0 ML et à la fin des oscillations pour
des épaisseurs de Cu importantes.
L’influence de la rugosité sur les valeurs mesurées de l’angle de précession ε, l’angle de
rotation φ, et l’intensité réfléchie I est indiquée sur la figure 4.16. Nous remarquons que
pour une épaisseur fixe du cuivre, lorsque l’on diminue la valeur du taux de diffusion k,
la rugosité augmente. Il apparaît alors une diminution du signal oscillant.
108
4.3 : Discussion
Fig. 4.16 – Influence du paramètre de diffusion k sur l’angle de précession ε, l’angle derotation φ et l’intensité réfléchie I en fonction de l’épaisseur de la couche de cuivre calculépour différents taux de diffusions k, en prenant Ai = A0 = 20%, εi = ε0 = 10°, λCu = 30A , Λ = 10
A et RCu−Co/Cu = RCo/Cu = 1.
109
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
4.3.3 Résultats des ajustements
Fig. 4.17 – Résultat des ajustements pour une énergie des électrons incidents de 11, 13et 15 eV
Afin de confronter le modèle de l’interféromètre électronique de type Fabry-Pérot décrit
auparavant, nous avons utilisé ce modèle pour ajuster les résultats expérimentaux, dans
la gamme d’énergie où le mouvement oscillatoire du spin est observable.
Comme le montre la figure 4.17 pour trois énergies des électrons incidents, le modèle
permet une bonne modélisation des résultats expérimentaux. Le résultat du modèle est
représenté sur la figure par les lignes.
Le premier résultat que nous avons extrait de ces ajustements est la période des os-
cillations en fonction de l’énergie des électrons. La figure 4.18 montre que la période
augmente très nettement lorsque l’énergie diminue. Ce résultat prouve qu’il existe une
bande interdite aux alentours de 8.5 eV dans la structure électronique du Cu, ce qui a
déjà été démontré auparavant (figure 4.4) en observant un pic de la réflectivité à 8.5eV
pour des épaisseurs de cuivre importantes. Ce type de comportement sur le même système
a déjà été montré par exemple par Egger [63]. L’explication est la suivante : le confinement
des électrons dans la couche de cuivre d’une certaine épaisseur provoque l’apparition de
niveaux énergétiques discrets représentés sur la figure 4.19 par les points noirs. Les vec-
teurs d’ondes possèdent également des valeurs discrètes dans la direction du confinement,
mais celles-ci sont régulièrement espacées de π/(N.a), avec N le nombre de monocouches
constituant le résonateur. Lorsque N augmente, le nombre de vecteurs d’ondes autorisé
110
4.3 : Discussion
Fig. 4.18 – Période des oscillations en fonction de l’énergie des électrons incidents.
augmente, ce qui déplace les états représentés en noirs vers les états représentés en blanc
vers le bord de zone le plus proche. La conséquence de ce mouvement est un passage
périodique de ces états discrets par un niveau d’énergie E donné lorsque N varie. C’est
ce passage périodique qui produit le comportement oscillatoire observé.
Fig. 4.19 – Principe de l’augmentation de la période des oscillations lors de la variationde l’énergie des électrons incidents.
Egger a également montré que la période du signal est inversement proportionnelle
à l’écart entre le vecteur d’onde correspondant au bord de zone le plus proche et le
111
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
vecteur d’onde dans le couche de Cu. La période Γ est donc une fonction de l’énergie des
électrons : Γ = πkBZ−k(E)
avec kBZ le vecteur d’onde du bord de zone le plus proche et
k(E) le vecteur d’onde dans la couche de cuivre. Lorsque l’énergie des électrons diminue,
le vecteur d’onde dans la couche de cuivre devient de plus en plus proche du bord de zone,
et donc la période augmente considérablement. Nous ne pouvons malheureusement pas
comparer nos résultats avec les siens, car l’angle par rapport à la normale de l’échantillon
n’est pas identique (dans son cas 20° par rapport à la normale), mais le principe reste le
même.
Fig. 4.20 – Réflectivité de l’interface Cu/Co déduite des résultats des différents ajuste-ments sur les oscillations du mouvement du spin.
Les résultats des ajustements nous permettent de noter un point d’une grande impor-
tance : l’analyse de la réflectivité et du mouvement de spin dans une structure de puits
quantique avec notre modèle de Fabry-Pérot électronique nous permet de déterminer la
valeur du coefficient de réflection r↑,↓ de l’interface Cu/Co, à une phase près. Sa détermi-
nation nécessite néanmoins de connaître la valeur du coefficient de réflection de la couche
de cuivre seule. Cette valeur a été déterminée en mesurant la réflectivité pour des échan-
tillons possédant une épaisseur de cuivre importante (figure 4.9), pour une épaisseur de
cuivre de 22 ML.
Les résultats obtenus pour la réflectivité de l’interface Cu/Co, représentés sur la figure
4.20, sont similaires à ceux obtenus pour une couche de Co seule. L’interface Cu/Co
montre un pic à une énergie de 11 eV qui est dû à la présence d’un gap à cette énergie.
112
4.3 : Discussion
En revanche pour des énergies en dehors de la bande interdite, la réflectivité est beaucoup
plus faible que dans le cas d’une couche de Co non recouverte.
Fig. 4.21 – Principe de la diminution de la réflectivité de l’interface Cu/Co comparé àl’interface vide/Co
Pour expliquer ce phénomène, prenons le cas d’une marche de potentiel. Dans le cas
d’une couche de Co non recouverte représentée par la figure 4.21a , le coefficient de
réflexion de l’interface vide/Co est rvide/Co = kvide−kCo
kvide+kCo= 1−kCo/kvide
1+kCo/kvideavec E l’énergie des
électrons et kvide le vecteur d’onde des électrons dans le vide, et kCo le vecteur d’onde des
électrons dans la couche de Co. Dans le modèle des électrons libres on a kvide ∝√E et
kCo ∝√E + VCo avec VCo = 14 eV le potentiel interne du Co. Ces deux vecteurs d’onde
sont donc assez différents.
Dans le cas d’une couche de Co recouverte par le Cu représenté par la figure 4.21b ,
toujours dans le modèle de la marche de potentiel, le coefficient de réflection de l’interface
Cu/Co est rCu/Co = 1−kCo/kCu
1+kCo/kCuavec kCu le vecteur d’onde des électrons dans la couche de
cuivre qui est proportionnel à√E + VCu, avec VCu = 12 eV le potentiel interne du Cu.
Dans ce cas, les vecteurs d’onde dans la couche de Cu et dans la couche de Co sont très
proches, leur rapport est donc proche de l’unité. Cela donne une réflectivité de l’interface
Cu/Co très faible comparée à l’interface vide/Co.
La figure 4.22 représente la différence de phase entre les électrons de spin majoritaire
et minoritaire pour l’interface Cu/Co. La comparaison de cette quantité avec l’angle de
précession pour la couche de Co non recouverte nous indique un résultat différent. Les
résultats montrent un pic de l’angle de précession centré sur 12 eV qui est beaucoup plus
prononcé. La valeur trouvée pour le maximum est pratiquement le double de celle mesurée
pour la couche de Co non recouverte.
A l’heure actuelle, nous avons deux solutions pour expliquer ce comportement. La
première suggère un changement des propriétés magnétiques du Co induite par le dépôt
de cuivre. En fait il a déjà été montré qu’un dépôt de cuivre peut influencer les propriétés
113
Chapitre 4 : Mouvement du spin dans une structure de puits quantique
Fig. 4.22 – Différence de phase θ↓23 − θ↑23 en fonction de l’énergie des électrons incidentsdéduite des résultats des différents ajustements sur les oscillations du mouvement du spin
magnétiques du Co [64]. La seconde solution est la suivante : l’angle d’incidence des
électrons avec la normale de l’échantillon, initialement à 45° dans le cas de la couche de
cobalt non recouverte, change lorsque du cuivre est déposé. En fait l’angle de réfraction
des électrons dans le cuivre, en suivant le modèle décrit plus haut, prend une valeur de 30°
pour les faibles énergies. Ce changement de l’angle d’incidence doit donner des résultats
différents pour le mouvement du spin. Malheureusement notre dispositif expérimental ne
permet pas de changer cet angle d’incidence, et il nous est donc impossible de vérifier
expérimentalement ce changement induit par l’angle de réfraction.
114
4.3 : Discussion
115
116
Troisième partie
Conclusions et perspectives
117
Chapitre 5
Conclusions et perspectives
119
Chapitre 5 : Conclusions et perspectives
Cette thèse a été consacrée à l’étude du mouvement de spin dans des systèmes fer-
romagnétiques en utilisant la spectroscopie électronique résolue en spin en géométrie de
réflexion. Le mouvement du spin se décompose en deux sous-mouvements correspondant
à une précession autour de l’aimantation due à une phase dépendante du spin, et à une
rotation vers l’aimantation due à une réflexion dépendant du spin.
La première partie de ce travail à consisté à étudier ce phénomène sur des échantillons
polycristallins ferromagnétiques de Fe, Co et Ni déposés sur une couche tampon d’or sur
un substrat de verre. Les résultats obtenus montrent le même comportement pour les
trois types de ferromagnétiques étudiés. Une forte variation de l’angle de précession et de
l’angle de rotation apparaît pour des énergies des électrons incidents inférieures à 12 eV. Il
a été montré qu’une variation de l’angle de rotation en passant d’une valeur positive à une
valeur négative , ainsi qu’un pic de l’angle de précession et de la réflectivité apparaissent
aux basses énergies. En revanche, pour des énergies élevées, on observe des valeurs très
faibles et pratiquement constantes.
Il a été montré que la valeur mesurée de l’angle de précession pour des énergies élevées
peut être expliqué par un simple modèle de marche de potentiel dépendant du spin.
Ces résultats ont mis en évidence que la forte variation de l’angle de précession et de
l’angle de rotation aux faibles énergies peut être interprétée par la présence d’une bande
interdite dans la structure électronique des ferromagnétiques étudiés. L’existence d’un
changement de phase dépendant du spin ainsi que d’une résonance de l’intensité réfléchie
sur une bande interdite dépendant du spin fait intervenir un pic de l’angle de précession et
une structure plus/moins dans l’angle de rotation. Cette partie aboutit à une conclusion
importante : pour avoir un angle de précession maximal et donc un transfert de moment
cinétique maximal en géométrie de réflection , il faut choisir un matériau qui possède
un rapport de l’énergie d’échange sur la largeur de la bande interdite aussi grand que
possible.
La deuxième partie de ce travail a été consacrée à l’effet d’états de puits quantiques sur
le mouvement du spin. Nous avons utilisé le système Cu/Co/Cu(001) pour notre étude.
Dans ce système, la couche supérieure sert de résonateur, et la présence d’une interface
magnétique ajoute une dépendance de spin au confinement quantique.
Dans une première expérience, nos résultats sur les puits quantiques montrent des
pics de la réflectivité en fonction de l’énergie des électrons incidents. En fonction de
l’épaisseur de la couche de couverture, la position et le nombre de ces pics changent,
indiquant clairement la présence d’effets quantiques. La même étude pour le mouvement
du spin indique que les positions des pics observés en réflectivité correspondent à ceux de
l’angle de précession, montrant ainsi qu’un lien certain existe entre le mouvement du spin
120
et les états de puits quantiques.
Dans une seconde expérience, nous avons observé des oscillations à la fois de la ré-
flectivité et du mouvement du spin en fonction de l’épaisseur de la couche de couverture
et ceci pour plusieurs énergies des électrons incidents. Nous avons montré qu’un modèle
d’interféromètre électronique de type Fabry-Pérot permet de bien comprendre ces oscilla-
tions. Ce modèle nous a aussi permis de déterminer des paramètres comme le coefficient
de réflectivité ou la différence de phase entre les électrons de spin majoritaire et de spin
minoritaire de l’interface Cu/Co.
Ce travail appelle quelques nouvelles perspectives.
Contrairement aux études qui ont déjà été réalisées en utilisant des échantillons fer-
romagnétiques polycristallins, nous aimerions réaliser une étude du mouvement du spin
avec des expériences en transmission sur des échantillons monocristallins. Cette étude à
été proposée par Henk et al. [36] en utilisant le rayonnement synchrotron.
Fig. 5.1 – Principe de l’expérience proposé par Henk et al. pour étudier le mouvementdu spin dans un monocristal.
Cette expérience serait effectuée sur un film de Fe évaporé sur un substrat de Pd(001)
monocristallin. Un rayonnement synchrotron polarisé circulairement excite des électrons
du niveau de coeur 3d3/2 du substrat de Pd. Ces photoélectrons sont polarisés en spin car
le paladium possède un fort couplage spin-orbite. Le substrat de Pd sera donc une source
interne d’électrons polarisés. Pendant la transmission des photoélectrons dans la couche
de Fe, le vecteur polarisation de ceux-ci subira un mouvement que l’on pourra mesurer
par un détecteur de Mott.
Une étude de systèmes anti-ferromagnétiques pourrait aussi être intéressante. Les
résultats attendus dépendent du type d’anti-ferromagnétique. Dans le cas d’un anti-
121
Chapitre 5 : Conclusions et perspectives
ferromagnétique où les aimantations sont antiparallèles couche par couche mais paral-
lèles dans les couches, à cause du libre parcours moyen inélastique des électrons, nous
nous attendons à obtenir un mouvement de précession mesurable. Dans le cas d’un anti-
ferromagnétique où les aimantations portées par les atomes sont tête-bêche de proche en
proche, nous devrions avoir un mouvement de précession dans un sens pour une première
moitié du faisceau, et un mouvement de précession dans la direction opposée pour l’autre
moitié du faisceau. Le résultat attendu est donc un mouvement de précession résultant
du spin nul, mais cependant, nous devons nous attendre à une dépolarisation du faisceau.
122
123
124
Annexes
125
Annexe A
Matrice densité
Afin d’étudier un mélange statistique d’états, il est commode d’introduire l’opérateur
densité qui permet une description simple du mélange statistique d’états. Considérons
un vecteur d’état |ψ〉 =∑
n cn|χn〉 où les |χn〉 forment une base orthonormé. La valeur
moyenne d’un opérateur A est donné par 〈A〉 = 〈ψ|A|ψ〉 =∑
p,n c∗pcn〈χp|A|χn〉. Cette
relation montre que les coefficients c∗pcn interviennent dans le calcul de la valeur moyenne.
En fait, ce sont des éléments de matrice de l’opérateur |ψ〉〈ψ|, ce qui se montre facilement
en écrivant 〈χn|ψ〉〈ψ|χp〉 = c∗pcn. Il est ensuite facile d’introduire l’opérateur densité ρ =
|ψ〉〈ψ| dans le calcul de la valeur moyenne de l’opérateur A :
〈ψ|A|ψ〉 =∑
n,p
〈χn|ρ|χp〉〈χp|A|χn〉
=∑
n
〈χn|ρA|χn〉 .
Si le vecteur |ψ〉 n’est pas normalisé on a alors :
〈ψ|A|ψ〉 =∑
n
〈χn|ρA|χn〉〈χn|χn〉
=Tr(ρA)
Tr(ρ).
127
Chapitre A : Matrice densité
128
Annexe B
La mesure du mouvement du spin
B.1 Étude de cas particuliers
Pour réaliser une mesure avec le détecteur de Mott ( ce détecteur mesure seulement la
polarisation dans le plan (yz), en conséquence, nous ne pouvons pas utiliser la projection
du vecteur polarisation suivant l’axe x), nous devons utiliser une combinaison des quatre
intensités mesurées pour supprimer l’asymétrie factice (voir partie 2.5).
Par la suite, nous définirons avec Seff = 0.2 le facteur de Sherman effectif,
P 1,2y =
1
Seff
1 − Y 1,2
1 + Y 1,2et P 1,2
z =1
Seff
1 − Z1,2
1 + Z1,2, (B.1)
les composantes de la polarisation mesurées dans le plan du détecteur de Mott à l’aide
des configurations 1 et 2 avec
Y 1,2 =
√
Ih2 I
b1
Ih1 I
b2
, Z1,2 =
√
Ig2I
d1
Ig1I
d2
et Ig,d,h,b1,2 les intensités collectées par les quatre détecteurs (gauche, droite, haut et bas)
du polarimètre de Mott dans les expériences 1 ou 2.
B.1.1 Un cas idéal : ~P0 ‖ ~M
Supposons un cas de géométrie de transmission où ~M et ~P0 sont parallèles à l’axe y
(fig. B.1). Ce système est donc défini (fig.1.6) par les angles ψ = 0, φ = 0, θ = 0, α = 0, les
électrons arrivant suivant l’axe x. Soit ~P (Mσ) la polarisation obtenue dans la configuration
(Mσ), avec M = ± pour la direction de l’aimantation (M = + si l’aimantation est suivant
la direction de l’axe y (fig. B.1)) et σ = ± pour la direction initiale du vecteur polarisation
(σ = + si le vecteur polarisation est suivant la direction de l’axe y). La projection du
vecteur polarisation sur l’axe y obtenu dans ce cas (les projections sur l’axe x et z sont
nulles) dans la configuration (++) est donc
129
Chapitre B : La mesure du mouvement du spin
Fig. B.1 – Configuration pour le cas idéal où l’aimantation ~M est parallèle au vecteurpolarisation initial ~P0
P (++)y =
A+ P0
1 + AP0
.
Ensuite en inversant la polarisation seulement
P (+−)y =
A− P0
1 − AP0
.
En inversant l’aimantation seulement
P (−+)y =
−A+ P0
1 − AP0
et en inversant à la fois la polarisation et l’aimantation on trouve
P (−−)y =
−A− P0
1 + AP0
.
Ces quatre configurations correspondent donc à quatre expériences différentes. Nous re-
marquons tout de suite que dans ce cas idéal : P (++)y = −P (−−)
y et P (+−)y = −P (−+)
y . En
combinant les intensités récoltées par le détecteur de Mott de façon à supprimer l’asymé-
trie factice, nous obtenons une polarisation P1 = P(++),(−−)y = P0+A
1+AP0et P2 = P
(−+),(+−)y =
P0−A1−AP0
, en utilisant la notation introduite par les relations B.1.
Il ne nous reste plus qu’à résoudre ce système d’équations pour obtenir A et P0. Pour
le faire, utilisons l’ansatz suivant :
1 − P1P2
P1 − P2
=1 + A2
2A
130
B.1 : Étude de cas particuliers
ce qui nous donne une équation du second degré :
A2 − 21 − P1P2
P1 − P2
A+ 1 = 0
et donc
A =1 − P1P2
P1 − P2
+
√
(
1 − P1P2
P1 − P2
)2
− 1 . (B.2)
En ce qui concerne P0, nous pouvons l’obtenir de deux façons différentes, soit P0 = P1−A1−P1A
,
soit P0 = P2+A1+P2A
. En pratique nous utilisons la moyenne
P0 =1
2
(
P1 − A
1 − P1A+
P2 + A
1 + P2A
)
. (B.3)
B.1.2 Un autre cas idéal : ~P0 ⊥ ~M
Fig. B.2 – Configuration pour le cas idéal où l’aimantation ~M est perpendiculaire auvecteur polarisation initial ~P0
Si le plan (yz) correspond au plan du détecteur de Mott, la configuration idéale pour
notre expérience de réflexion correspond à un vecteur polarisation parallèle à l’axe z et
une aimantation à 45° du plan (yz) (fig. B.2). Ce système est donc défini (fig.1.6) par les
angles ψ = 3π4
, φ = 0, θ = π2, α = 0, les électrons arrivant suivant la direction de l’axe y.
Utilisons cette fois la convention suivante pour le vecteur polarisation obtenu dans la
configuration (Mσ) : ~P (Mσ) avec M = + si l’aimantation est suivant la direction défini
sur la figure B.2 et σ = + si le vecteur polarisation est suivant l’axe z. Avec une détection
par le détecteur de Mott, nous devons pouvoir inverser la direction du vecteur polarisation
initiale et la direction de l’aimantation.
131
Chapitre B : La mesure du mouvement du spin
Nous obtenons donc quatre vecteurs polarisations finals différents en fonction de la
direction de ~P0 et de ~M :
−−−→P (++) =
A sin(45) − cos(45)P0
√1 − A2 sin ε
−A cos(45) − sin(45)P0
√1 − A2 sin ε
P0
√1 − A2 cos ε .
Après avoir inversé la direction du vecteur polarisation seulement nous obtenons :
−−−→P (+−) =
A sin(45) + cos(45)P0
√1 − A2 sin ε
−A cos(45) + sin(45)P0
√1 − A2 sin ε
−P0
√1 − A2 cos ε .
Après avoir inversé la direction de l’aimantation seulement nous obtenons :
−−−→P (−+) =
−A sin(45) + cos(45)P0
√1 − A2 sin ε
A cos(45) + sin(45)P0
√1 − A2 sin ε
P0
√1 − A2 cos ε .
Après avoir inversé la direction du vecteur polarisation initial et la direction de l’aiman-
tation nous obtenons :
−−−→P (−−) =
−A sin(45) − cos(45)P0
√1 − A2 sin ε
A cos(45) − sin(45)P0
√1 − A2 sin ε
−P0
√1 − A2 cos ε .
Utilisons le résultat de l’expérience (−+) et de l’expérience (++). Dans ce cas les pro-
jections du vecteur polarisation suivant l’axe y sont égales et opposées (P (−+)y = −P (++)
y ),
ce qui mène à :
P (−+),(++)y = A cos(45) + sin(45)P0
√1 − A2 sin ε .
De la même façon, utilisons les expériences (−−) et (+−), ce qui donne :
P (−−),(+−)y = A cos(45) − sin(45)P0
√1 − A2 sin ε .
En combinant les expériences (++) et (−−) et les expériences (−+) et (+−) suivant l’axe
z, nous trouvonsP
(++),(−−)z = P0
√1 − A2 cos ε
P(−+),(+−)z = P0
√1 − A2 cos ε .
132
B.2 : Problème lors des mesures
Nous sommes maintenant capable de trouver l’asymétrie A, la polarisation initiale P0 et
l’angle de précession ε en résolvant ce simple système linéaire de trois équations :
A =1√2
(
P (−−),(+−)y + P (−+),(++)
y
)
P0
√1 − A2sinε =
1√2
(
P (−+),(++)y − P (−−),(+−)
y
)
P0
√1 − A2 cos ε =
P(++),(−−)z + P
(−+),(+−)z
2.
Nous trouvons donc :
A = 1√2
(
P(−−),(+−)y + P
(−+),(++)y
)
P0 =
√P
(++),(−−)z +P
(−+),(+−)z
2
2
+
P
(−+),(++)y −P
(−−),(+−)y√
2
!2
1−A2
ε = arcsin
(
1√2(P
(−+),(++)y −P
(−−),(+−)y )
P0
√1−A2
)
.
(B.4)
Dans ce cas idéal, nous avons montré qu’à partir des intensités collectées sur les quatre
détecteurs du polarimètre de Mott dans les quatre expériences, en inversant les directions
relatives du vecteur polarisation initial et de l’aimantation, il était possible de trouver la
valeur de la polarisation initiale P0, de l’asymétrie A et de l’angle de précession ε.
B.2 Problème lors des mesures
Le cas précédent où ~P0 ⊥ ~M n’est que le cas idéal pour notre système. Dans la réalité,
l’aimantation n’est pas exactement à 45° du plan (yz), et l’axe de facile aimantation de
l’échantillon n’est jamais parfaitement aligné dans le plan (xy). L’aimantation et le vecteur
polarisation ne sont pas non plus exactement orthogonaux. Nous pouvons tenter d’aligner
de façon orthogonale le vecteur polarisation et l’aimantation du film ferromagnétique,
grâce aux différentes bobines disposées sur l’optique électronique ( entre l’échantillon et
la source ), mais ces problèmes de désalignement sont impossibles à éliminer expérimen-
talement. De plus, les bobines utilisées pour changer la direction du vecteur polarisation
ne sont pas parfaitement alignées selon les axes x et y. Dans le cas d’expériences utilisant
une énergie par rapport au niveau de Fermi supérieure à environ 7 eV, il est relativement
simple d’obtenir un bon alignement perpendiculaire entre ~P0 et ~M . En revanche, pour des
énergies inférieures, il est difficile à obtenir. Deux problèmes interviennent alors. Premiè-
rement, en conséquence d’une faible vitesse des électrons dans le vide et de la répulsion
coulombienne, le faisceau d’électrons devient plus large. Nous avons utilisé un diaphragme
133
Chapitre B : La mesure du mouvement du spin
à la sortie de l’optique l’électronique pour atténuer cet effet. Le second problème, beau-
coup plus gênant, est l’effet du champ magnétique terrestre sur la direction du vecteur
polarisation ~P0 qui possède un grand effet sur les électrons de faibles énergies.
Obtenir un alignement perpendiculaire pour des énergies inférieures à 7 eV est difficile
et long, car les électrons à ces énergies sont très sensibles aux champs magnétiques. Plutôt
que de perdre beaucoup de temps à essayer d’aligner correctement ~P0, nous avons utilisé
un nouveau type de mesure qui consiste, pour une énergie fixe, à faire tourner grâce aux
bobines disposées sur le déflecteur à 90°, le vecteur polarisation initial ~P0 sur un cône.
B.2.1 Approximations dans un cas réel pour les très faibles éner-gies
Les formules B.4 ne sont valables que dans le cas perpendiculaire. Pour effectuer une
mesure d’une polarisation de spin avec un détecteur de Mott, il faut impérativement être
capable d’inverser la direction du vecteur polarisation à mesurer. C’est tout à fait possible
dans le cas des deux systèmes idéaux cités précédemment. En revanche dans le cas général
où le vecteur polarisation est défini par l’équation 1.4, ce n’est plus le cas. Il est impossible
d’obtenir des projections sur le détecteur de Mott qui soient strictement opposées et qui
possèdent la même norme. Nous devons donc utiliser des approximations.
Fig. B.3 – Principe de l’approximation qui est utilisée
L’approximation que nous allons utiliser pourrait sembler radicale, mais nous verrons
par la suite que les valeurs obtenues sont très proche de la réalité. Soit un vecteur po-
larisation ~P0 = P0x ~ex + P0y ~ey + P0z ~ez et une aimantation ~M = Mx ~ex + My ~ey + Mz ~ez
134
B.2 : Problème lors des mesures
(fig. B.3). Nous allons supposer que la seule interaction qui existe entre ~P0 et ~M , concerne
uniquement leur projection. Ainsi, nous allons considérer que chaque composante est indé-
pendante des autres. La composante suivant l’axe x de l’aimantation agit donc uniquement
avec la composante suivant l’axe x de la polarisation. Dans ce cas notre système est gran-
dement simplifié puisque les composantes du vecteur polarisation final dans le cas (++)
sont
P (++)x =
Ax + P0x
1 + AxP0x
P (++)y =
Ay + P0y
1 + AyP0y
P (++)z =
Az + P0z
1 + AzP0z
,
dans le cas (+−)
P (+−)x =
Ax − P0x
1 − AxP0x
P (+−)y =
Ay − P0y
1 − AyP0y
P (+−)z =
Az − P0z
1 − AzP0z
,
dans le cas (−+)
P (−+)x =
−Ax + P0x
1 − AxP0x
P (−+)y =
−Ay + P0y
1 − AyP0y
P (−+)z =
−Az + P0z
1 − AzP0z
,
dans le cas (−−)
P (−−)x =
−Ax − P0x
1 + AxP0x
P (−−)y =
−Ay − P0y
1 + AyP0y
P (−−)z =
−Az − P0z
1 + AzP0z
.
Les formules B.2 et B.3 nous permettent immédiatement de calculer les projections de~A et de ~P0 dans le plan (xy) du détecteur de Mott :
135
Chapitre B : La mesure du mouvement du spin
Ay =1 − P
(++),(−−)y P
(−+),(+−)y
P(++),(−−)y − P
(−+),(+−)y
+
√
√
√
√
(
1 − P(++),(−−)y P
(−+),(+−)y
P(++),(−−)y − Py(−+), (+−)
)2
− 1
Az =1 − P
(++),(−−)z P
(−+),(+−)z
P(++),(−−)z − P
(−+),(+−)z
+
√
√
√
√
(
1 − P(++),(−−)z P
(−+),(+−)z
P(++),(−−)z − Pz(−+), (+−)
)2
− 1
et
P0y =1
2
(
P(++),(−−)y − Ay
1 − P(++),(−−)y Ay
+P
(−+),(+−)y + Ay
1 + P(−+),(+−)y Ay
)
P0z =1
2
(
P(++),(−−)z − Az
1 − P(++),(−−)z Az
+P
(−+),(+−)z + Az
1 + P(−+),(+−)z Az
)
.
La norme du vecteur polarisation initial est donc P0 =√
P 20y + P 2
0z et celle de l’asy-
métrie A =√
2A2y + A2
z si la direction de l’aimantation est à 45° du plan (yz).
Nous avons donc une approximation de la norme et de la direction du vecteur po-
larisation de spin initial P0 et de l’asymétrie A. Reste maintenant à mesurer l’angle de
précession ε. Si nous ne sommes pas très éloigné de la configuration perpendiculaire idéale,
nous pouvons continuer à utiliser la formule B.4 pour ε. En revanche, si nous ne sommes
pas très éloigné de la configuration où le vecteur polarisation initial est aligné suivant la
direction de l’axe y, nous devons utiliser une autre formule pour déterminer l’angle de
précession que nous dénommerons par la suite εy :
εy = arcsin
(
1√2(P
(−+),(++)z − P
(−−),(+−)z )
P0
√1 − A2
)
On se rend compte ici que la mesure de A, P0 et surtout ε n’est pas si simple dans
une configuration non idéale. Nous avons donc utilisé une autre méthode décrite dans la
section suivante .
B.2.2 Le système physique modèle
Nous avons vu que pour le cas réel, il n’était pas possible de mesurer de façon correcte
l’angle de précession ε avec ne seule mesure. Nous allons utiliser plusieurs mesures avec
différentes directions du vecteur polarisation de spin, afin de pouvoir ajuster ces résul-
tats. Pour changer la direction du vecteur polarisation, nous avons à notre disposition des
bobines situées sur le déflecteur à 90°, l’axe du champ magnétique appliqué étant per-
pendiculaire au plan de déflexion des électrons. L’application de ce champ nous permet
136
B.2 : Problème lors des mesures
Fig. B.4 – Le système physique modèle
de faire subir une rotation au vecteur polarisation, celui-ci subissant une précession de
Larmor.
Théoriquement, le vecteur polarisation devrait tourner dans le plan (yz), mais avec l’in-
certitude sur la direction exacte du champ magnétique appliqué, nous considérons plutôt
un déplacement sur un cône. Pour des valeurs successives du champ magnétique appliqué
et pour une énergie constante des électrons incidents, le vecteur polarisation va décrire un
cône de révolution d’angle δ, dont l’axe est défini par les angles ρ et κ, sa génératrice étant
le vecteur polarisation de spin (fig. B.4). L’angle η, directement proportionnel au champ
magnétique appliqué, nous donne donc la possibilité de décrire les différentes positions du
vecteur polarisation sur le cône.
B.2.3 Qualité de l’approximation
La figure B.5 représente la différence entre la valeur attendue et la valeur qui est
mesurée en fonction de l’angle η, en utilisant les approximations de la section précédente
pour un système défini tel que : ψ = 135°, φ = 0°, ρ = 90°, κ = 0°, δ = 90°, P0 = 70%, A =
30% et ε = 15°. Les valeurs qui sont mesurées pour P0mes, Ames, et l’angle γ qui est défini
sur la figure B.6 sont en très bon accord avec les valeurs attendues, alors que les angles
εmes et εymes peuvent varier fortement en fonction de l’angle η. Ce comportement pour
les angles εmes et εymes n’est pas surprenant, car les formules établies ne sont valables que
lorsque le vecteur polarisation est aligné suivant l’axe z ou y respectivement. Cependant,
à partir de plusieurs mesures, en faisant varier l’angle η du vecteur polarisation de spin
137
Chapitre B : La mesure du mouvement du spin
Fig. B.5 – Erreur sur les mesures en fonction de l’angle η pour un système défini tel que :ψ = 135°, φ = 0°, ρ = 90°, κ = 0°, δ = 90°, P0 = 70%, A = 30% et ε = 15°
par l’application d’un champ magnétique sur l’axe x, nous sommes capable de retrouver
les différents paramètres physiques de l’expérience notement l’angle de précession ε avec
un programme d’ajustement.
138
B.2 : Problème lors des mesures
Fig. B.6 – Définition de l’angle γ
139
Chapitre B : La mesure du mouvement du spin
140
Annexe C
Outils gratuits utilisés lors de ma thèse
Traitement de texte :
– MikTeX http://www.miktex.org
– TeXnicCenter http://www.toolscenter.org
– OpenOffice http://www.openoffice.org
Traitement d’image :
– The Gimp http://www.gimp.org
– Scion Image http://www.scioncorp.com
Dessins 3D :
– Blender3D http://blender.org
Developpement en C/C++ :
– DevC++ http://www.bloodshed.net/devcpp.html
– Weditres
– Numerical Recipes in C http://lib-www.lanl.gov/numerical/bookcpdf.html
141
Chapitre C : Outils gratuits utilisés lors de ma thèse
142
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