groupes ethniques au congo
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GROUPES ETHNIQUES AU CONGO - AVEC DETAILS DE LA REGION DU
KASAI ORIENTAL
Histoire et Anthropologie géographique autour du lac Munkamba
La légende du Lac Munkamba :
…. Pour lire la suite voici un lien: http://books.google.be/books?id=hHwWJ3EWEZ0C&pg=PA89&lpg=PA89&dq=le+lac+munkamba&source=bl&ots=xcLVsg7P1D&sig=dtaYFRhodw7szunMPzRDkOQg6hc&hl=en&sa=X&ei=GfdCUsHqJumWiAfZioGoBw&ved=0CFcQ6AEwBDgU#v=onepage&q=le%20lac%20munkamba&f=false
Introduction
La province du Kasaï oriental est située en plein cœur de la République Démocratique du
Congo sur une superficie de 173 110 km², soit environ 7 % de la superficie totale du
pays. Divisée en trois districts, à savoir : Kabinda, Sankuru et Tshilenge, la province du
Kasaï Oriental est limitée par les provinces Orientale et de l’Equateur au nord, du Sud-
Kivu, du Nord-Kivu et du Maniema à l’est, du Kasaï Occidental à l’ouest et le Katanga
au sud. Le Kasaï Oriental, de même que sa voisine Maniema, n’a pas de frontières avec
les pays limitrophes de la RDC. Ce qui explique et justifie l’absence d’influences ou
transactions transfrontalières directes avec les pays étrangers comme c’est le cas avec les
autres provinces de la RDC.
GEOGRAPHIE
Les principaux facteurs qui déterminent le climat du Kasaï Oriental sont la forêt au nord
et la savane au centre et au sud. Ce climat tropical humide est caractérisé par deux
saisons dominantes à savoir, la saison pluvieuse longue de 6 à 9 mois et la sèche de 3
mois. Une végétation luxuriante et variée couvre la province et est caractérisée au nord
par la forêt équatoriale, au centre par la savane boisée et au sud par le prolongement de
ladite savane et de steppes. Ce climat et la fertilité caractéristique du sol favorisent le
reboisement et la plantation de plusieurs espèces florales. Deux principaux bassins
dominent l’hydrographie de la province du Kasaï –Oriental. Il s’agit notamment des
bassins du Sankuru et de la Lukenie. Affluent de la rivière Kasaï, le Sankuru draine
plusieurs rivières, principalement Mbuji-Mayi, Lubi, Luilu, Lubilanji, Lubefu, qui sont
orientées du sud au nord. Le Sankuru est navigable jusqu’à Pania – Mutombo avec ses
deux ports importants à Lusambo et à Bena Dibele dans le territoire de Kole. Par ailleurs,
le bassin de la Lukenie, avec ses rivières dans la direction est-ouest comme la Lomela ou
la Lomami notamment, termine sa course dans le Bandundu vers le Lac Maï
Ndombe. La température moyenne annuelle varie de 25°C dans le Nord, à 22,5°C dans
le Sud avec des minima de 18°C.
Histoire
Avant 1960, la province du Kasaï – Oriental faisait partie de la Province du Kasaï qui
avait Luluabourg comme chef-lieu. A la suite des conflits qui opposent à partir de 1959,
les Luluas aux Lubas, ces derniers quittent Luluabourg pour s’installer autour des
concessions de la Minière de Bakwanga (MIBA) et dans les villages environnants. En
août 1960, Albert Kalonji entre en sécession contre le pouvoir central de Léopoldville et
proclame l’Etat autonome du Sud-Kasaï avec Bakwanga comme chef-lieu. Elle a été
essentiellement aussi constituée suite à l’exode massif des Baluba qui venaient de
plusieurs provinces notamment du Katanga où la sécession avait éclaté dès le 11 juillet
1960. Les réformes territoriales qui s’opèrent avec l’adoption des constitutions
successives de 1964 et 1967, consacrent la province du Kasaï Oriental dans sa
configuration actuelle.
Economie
La province du Kasaï Oriental est une province agro-pastorale disposant de vastes
étendues de terres arables pour la production vivrière, maraîchère et pérenne, et des
plaines et plateaux favorables à l’élevage du gros et petit bétail. Mais l’attrait de
l’exploitation artisanale du diamant a provoqué un important mouvement des populations
vers des centres d’exploitation du diamant, et par conséquent, l’abandon des activités
agricoles rendant ainsi la province dépendante des autres provinces et de l’étranger pour
ses besoins alimentaires.
Jadis grenier du pays, le Kasaï Oriental garde des potentialités de production agricole
gigantesques grâce à la fertilité de son sol et à l’abondance des pluies. Ces potentialités
ne sont malheureusement pas ou très faiblement exploitées aujourd’hui. Elles offrent
pourtant des possibilités innombrables. Si plusieurs sociétés comme la Société d’Elevage
du Congo (SEC), la Ferme Diocésaine de Kamiji, la Ferme d’Ekuluyi, la Ferme de
Lualaba-Nsangua, la Ferme Diocésaine de Kabinda, les Huileries de Mpanya Mutombo,
les Cotonnières de Katanda, de Kabinda et de Ngandajika ont fait l’histoire de la province
par la mise en valeur de diverses potentialités dégagées, il s’avère aujourd’hui que la
province vit totalement de l’importation de produits vivriers.
L’élevage traditionnel de la volaille, des porcs et du lapin continue de se pratiquer sur
l’ensemble de la province mais pour de manière artisanale et en conditions de subsistance.
De même que la pêche, d’ailleurs.
Les voies de communication sont constituées de routes interconnectées au chemin de fer
et aux voies d’eau principalement, les rivières Kasaï et Sankuru. Mais toutes ces voies
sont quasi à l’abandon ou impraticables pour des raisons évidentes de non entretien. Les
routes sont soit coupées par les érosions, soit abandonnées et envahies par la brousse. Des
travaux de réhabilitation sont en cours sur certains tronçons depuis le lancement du
programme gouvernemental des cinq chantiers. Mais, ici cela relève davantage encore
qu’ailleurs de l’effet d’annonce …
La gare de Mwene Ditu (à 120 km environ de Mbuji-Mayi) constitue le point d’attache
majeur sur la voie ferrée Sakania-Ilebo qui passe par Lubumbashi et Kananga, pour le
transport de marchandises.
Le réseau aérien est constitué d’un aéroport national à Mbuji-Mayi, trois aéroports de
seconde catégorie : à Lusambo, à Kabinda, et à Lodja. Plusieurs compagnies aériennes
exploitent ces aéroports. Actuellement l’avion reste le seul moyen rapide et accessible
pour les passagers et les marchandises.
Population & langues
Avec une population estimée à environ 7 000 000 d’habitants, la province du Kasaï
Oriental est un brassage ethnoculturel où se côtoient plusieurs tribus réparties sur les
districts de Sankuru, de Kabinda et de Tshilenge. La ville de Mbuji-Mayi et le district de
Tshilenge sont peuplés essentiellement par des Luba, le district de Kabinda est habité par
les Luba (Ngandajika), les Songye (Kabinda et Lubao), les Kanyok (Mwene Ditu) et les
Kete (Kamiji). Le district de Sankuru est essentiellement occupé par les Tetela. Outre les
dialectes spécifiques à certaines tribus, les principales langues parlées au Kasaï Oriental
sont le Tshiluba, l’Otetela et le Songye. Par ailleurs, il faudra retenir que les Lubas
descendent de l’Empire Luba qui existait déjà vers le 15ème siècle. Cet empire s’étendait
des bords du lac Upemba dans le Katanga avec comme chef-lieu Kamina se trouvant près
de la frontière que constitue la rivière Lubilanji jusqu’aux lacs Munkamba et Fwa, à la
limite du Territoire de Dimbelenge et Lusambo tout en comprenant la vallée de la Mbuji-
Mayi – Bakwanga. C’est ainsi que les Luba se trouvent au Katanga et au Kasaï.
Les Baluba
Le royaume des Baluba s’étend des bords du lac Upemba au Katanga avec comme chef-
lieu Kamina et va jusqu’aux lac Munkamba et Mfua, à la limite avec Dimbelenge et
Lusambo, tout en comprenant la vallée de la Mbuji Mayi-Bakwanga. Lors de la création
des nouvelles provinces, la localité de Lusambo fut érigée en capitale avant de devenir
Luluabourg le long de laquelle on construisit le chemin de fer de Port Francqui (Ilebo).
L’organisation du peuple Muluba répond à une hiérarchie de type traditionnelle avec
un chef par village. On trouve ensuite un chef de chefferie auquel répondent les chefs de
villages, c’est le Muloho. A la tête du Royaume se trouve enfin le Mulopwe, c’est à dire
le chef des chefs. Ainsi, si chaque chef de chefferie exerce le pouvoir sur son peuple, tous
les chefs de chefferie sont sous l’autorité du chef suprême le Mulopwe.
Malgré la politique de recours à l’authenticité prônée par Mobutu pour disqualifier et
ridiculiser les pères de l’Indépendance du Congo et limiter l’importance des chefs
coutumiers, le peuple Muluba protégea son Mulopwe et lui conserva son autorité. Celle-
ci prévaut encore fortement aujourd’hui comme en atteste les célébrations en 2009 pour
les 80 ans de l’actuel Mulopwe, Albert Kalonji. Il est à noter d’ailleurs qu’au sein du parti
MPR, Mobutu s’autoproclama « Mulopwe » et l’on chanta : « Dia Lelo Tuban-dila Anka
Ye Mulupwe Mubutu ». Lors de la mise en place de la manifestation de son pouvoir, on
procéda à l’arrestation et à la torture de chefs coutumiers car un seul devait rester. Une
distinction nette tient du rapport même au pouvoir. Chez les Baluba, le pouvoir coutumier
n’est pas héréditaire comme dans les autres ethnies. Les chefs de chefferies élisent en
effet le Mulopwe lors d’un congrès puis l’initient selon les traditions. Mais
exceptionnellement, le successeur de l’actuel Mulopwe devrait être son fils, Kalonji
Mukania Kanungula, récemment désigné par l’assemblée des chefs.
Dans les années 1980 le Mulopwe Albert Kalondji m’invita régulièrement à passer
quelques heures dans son hôtel près de la porte de Louise à Bruxelles, seulement pour
discuter des anciens temps. Il avait très bien connu mon père au Kasaï avec qui il
s’entendait très bien. Mon père parlait très bien le Tshiluba(Chiluba).
On a vécu longtemps en territoire Kanioka dans notre « Caboose ».
Tourisme
L’exploitation, artisanale et industrielle, du diamant au Kasaï Oriental a relégué
quasiment aux oubliettes les autres secteurs productifs et principalement le tourisme alors
que la province pourrait mettre en valeur les potentialités touristiques intéressantes mais
totalement non exploitées. Les quelques rares infrastructures touristiques existantes sont
délabrées et régulièrement menacées par les érosions ou les éboulements. Il y a quelques
années, les Autorités provinciales ont pris l’engagement de répertorier les différents
sites touristiques de la province afin d’en aménager quelques-uns. Une cinquantaine ont
été répertoriés et consignés dans le plan d’action du gouvernement mais aucun
aménagement n’a été entrepris depuis. Alors presque partout la nature reprend ses droits
et place la province dans un sous-développement touristique regrettable par rapport à
d’autres. En dépit de l’absence d’infrastructures de base, notamment d’accueil et
d’hébergement, il reste la possibilité de découvrir et d’apprécier la nature à l’état sauvage.
Une quinzaine de chutes sont répertoriées sur les rivières Sankuru et de la Lukenie, dont
certaines de plusieurs dizaines de mètres de hauteur. Plusieurs grottes aussi qui ont servi
autrefois de caches durant les guerres ou au moment des razzias esclavagistes (Bena
Kalambayi à Ngandajika). Quelques-unes servent aujourd’hui de lieu de pèlerinage pour
des sectes religieuses. Des belles sources existent aussi dans la province dont notamment
deux sources thermales à Nkoto et Totwe dans le district de Kabinda, et la source de
Lukelenge à une quinzaine de kilomètres de Mbuji-Mayi, qui fournit l’eau à une
Brasserie pour la fabrication de leurs bières. Le nord de la province est couvert par la
partie sud de la forêt équatoriale et offre une diversité exceptionnelle de faune et de flore.
Une belle partie d’observation d’oiseaux, notamment des perroquets, est possible à
Mpanya Mutombo. En réalité, on constate que la province du Kasaï Oriental, tout comme
sa voisine le Kasaï Occidental, est parmi les provinces où il n’y a actuellement pas de
volonté politique manifestée pour envisager des perspectives de développement
touristique. Il existe une dizaine d’hôtels sur la ville dont quelques-uns s’efforcent de
maintenir avec les moyens du bord un semblant de confort et de service.
FORETde Perroquets
Situé à Mpanya Mutombo dans le district de Sankuru on peut y observer des milliers
d’oiseaux, mais surtout les plus rares dont le perroquet. Il a, paraît-il, une extraordinaire
capacité d’imitation de la voix humaine.
Lacs Mukamba & Fwa
Avec ses eaux très claires et refoulantes, le lac Mukamba a la forme physique d’un
homme couché avec des membres écartés. La légende affirme que le lac rejette tout objet
abandonné sur sa surface. La société Biopharco, filiale de la Miba utilise l’eau du Lac
Mukamba pour la fabrication du sérum. A une distance d’environ 41 km sur le même
pourtour, se situe le lac Fwa, très poissonneux. Une belle partie de pêche sportive est
possible dans un cadre naturel reposant. Les deux lacs forment la frontière naturelle entre
les deux Kasaï (Occidental et Oriental).
Lacs Ndinga & Lomba
La légende affirme qu’autrefois, des centaines de « mwa mulopo », sorte de guérisseuses
couvertes de kaolin (rouge et blanc) agissant par les esprits se rencontraient là-bas sous
forme d’assemblée pour tirer les forces mystérieuses de guérison. Le mythe reste vivace
jusqu’aujourd’hui sauf que les assemblées ne s’y tiennent plus. Les plus audacieux osent
même la comparaison avec Lourdes. Le lac Ndinga est situé à 51 kilomètres de Mbuji-
Mayi sur la route de Mwene Ditu et offre un cadre magnifique de détente. A quelques
centaines de mètres, se trouve un autre lac aux eaux plus claires. On peut y faire de belles
randonnées et pêcher. C’est le lac Lomba. Cadre magnifique de divertissement, à côté du
village de Bena Kalenda où l’on produit artisanalement de l’huile de palme. Des belles
plantations d’orangers sont visibles. En dépit d’absence d’infrastructures classiques
d’accueil, on peut imaginer d’y développer l’écotourisme avec les villages voisins et
envisager l’hébergement chez les villageois. Il y a un projet de production du bio-
carburant dans les environs.
Sources de Lukelenge
Situées à 15 kilomètres du centre de Mbuji-Mayi, ces sources sont l’occasion d’une petite
escapade avec possibilité de piquer une petite tête ou balader en pirogue. Elles se
trouvent à côté de la brasserie Bracongo et de la gare routière de la SNCC. Lukelenge a
son charme et reste étant donné la courte distance qui la sépare de Mbuji-Mayi, le lieu
privilégié d’évasion pour les habitants du coin.
Les Diamants
Après la découverte du premier diamant de 10carats le 4 novembre 1907 par la Société
Forminière envoyée au Kasaï, plusieurs dizaines de diamants furent récupérés au
confluent des rivières Kasaï et Kambambaie et près du poste de Tshikapa. La
prospection systématique entreprise à partir de ces indices mit en évidence l’existence
d’un vaste district diamantifère « Tshikapa », s’étendant entre les longitudes 20° à 22°
Est et les latitudes 5°30 à 8° sud.
A l’Est de ce district, douze diamants furent découverts en 1916 dans le bassin de la
Lulua, et l’exploitation alluvionnaire entreprise, amena à la découverte en 1946, des pipes
de kimberlites de Bakwanga Kalonji et de la Lubi Lukula dans la Province du Kasaï
Oriental. La production du district diamantifère, dit « de Bakwanga », a fait passer le
Congo au premier rang des producteurs de diamant industriels du monde avec une
production cumulée à 382 487 906 carats à fin 1969, d’après les rapports officiels de la
Société Minière de Bakwanga (MIBA).
Le secteur minier artisanal contribue fortement au commerce informel et illégal des
matières premières de la RDC. Bien que le nouveau Code minier réglemente
théoriquement ce secteur, l'influence des dispositions législatives y est en réalité très
faible. Les conditions de travail sont mauvaises; le travail des enfants et le travail forcé
sont des pratiques courantes. De nombreux accidents se produisent en raison du manque
de sécurité. Pendant la phase de prospection, les négociants (sponsors) octroient souvent
des prêts aux creuseurs artisanaux qui sont alors obligés de travailler pour rembourser, ce
qui entraîne une dépendance à long terme. La production artisanale a peu d'accès aux
marchés libres. Cet obstacle au développement est accentué par l'état catastrophique des
voies de communication et donne en outre sur place la possibilité à des acheteurs en gros
de dicter les prix.
Les mineurs travaillent généralement comme journaliers sans garantie de revenus. En
raison de la mauvaise situation sociale et de la faible productivité du travail, le secteur
minier artisanal, bien qu'employant un grand nombre de personnes, n'est pas en mesure
actuellement de réduire la pauvreté et d'assurer le développement économique de la
région tel qu'il pourrait le faire.
L’on a observé dans les environs de Mbuji-mayi, qu’après 20 ans d’exploitation
artisanale des gisements alluvionnaires de faible profondeur, les réserves se sont épuisées
sans impact visible sur la ville. Les diamantaires qui ont pu obtenir des moyens financiers
importants ont préféré investir en dehors de la province et pour certains en dehors du
pays.
Le déplacement "forcés" des tribus ou groupes ethniques au Congo a continué pendant le
règne de Leopold II et même jusqu'en 1960 et au-delà. C'est ce phénomène qui est une
des raisons de la déstabilisation du Congo... Pour mieux comprendre cela il faut faire une
comparaison avec d'autres territoires ou provinces et regarder comment la division
arbitraire du territoire Congolais s’est faite à travers son existence :
Le Congo et ses territoires : plus d’un siècle de recompositions
Amorcée dans l’espace congolais dès l’aube de l’humanité, l’emprise humaine s’y est
renforcée avec l’expansion des peuples bantous, il y a plus de deux mille ans. Bien plus
tard, au XVème
siècle, l’Afrique centrale s’ordonnait selon une partition de type
écologique. Dans la forêt dense de la cuvette, les sociétés rurales bantoues restaient
disséminées et segmentaires, en relation de clientèle avec les chasseurs-cueilleurs
pygmées. Dans les forêts claires et savanes du pourtour, elles se structuraient en
royaumes plus ou moins vastes : au sud ceux des Kongo, des Yaka, des Luba, ou l’empire
Lunda ; à l’est les royaumes des Grands Lacs, tel le Rwanda ; au nord, les royaumes (non
bantous) des Zande et des Mangbetu.
Le tableau change au XIXème
siècle, lorsque se resserre l’étau des ingérences venues
d’outre-mer : le futur Congo se trouve partagé de facto entre deux mouvances, luso-
africaine à l’ouest, orientée vers les Amériques, arabo-swahilie à l’est, tournée vers le
Proche-Orient. L’ébranlement des vieux royaumes laisse alors le champ libre à des
pouvoirs inédits, fondés sur la traite des esclaves : Ngongo-Lutete au Kasaï, Tippo-Tip au
Maniema, Msiri au Katanga. C’est cet espace en réorganisation qui va être, pour la
première fois, unifié politiquement dans le cadre de l’État indépendant du Congo, en fait
la propriété personnelle du roi des Belges Léopold II. Après la période léopoldienne,
relativement courte (1885-1908), celle de la colonisation belge effective (1908-1960) sera
décisive pour la mise en place d’un schéma fonctionnel encore lisible de nos jours. Le
modèle reste périphérique et extraverti, opposant à la cuvette centrale déprimée une sorte
d’anneau utile où se déploie pleinement la « mise en valeur » coloniale. Mais
l’intégration de l’espace congolais, assurée par la création progressive d’un puissant
réseau circulatoire, le sera aussi par un maillage territorial de plus en plus serré, coercitif
et efficace (Bruneau, 1991).
Au début, l’Etat léopoldien répartit son domaine en districts assez flous (11 en 1888,
15 en 1895). Ensuite, avec l’instauration du système colonial véritable, l’encadrement
de l’espace et des hommes se renforce peu à peu, notamment afin de geler l’ancienne
mobilité des groupes ethniques en les territorialisant. Dès 1914, le Congo Belge est
restructuré en 4 grandes provinces, le Congo-Kasaï, l’Equateur, la Province Orientale et
le Katanga. S’y articulent les 22 districts existants, divisés en territoires, eux-mêmes
subdivisés en secteurs. Ces derniers englobent la multitude des chefferies, agglutinées
pour les plus petites, retaillées quand elles semblent trop vastes, voire (assez souvent)
assimilées telles quelles à des secteurs, mais toutes solidement amarrées à la nouvelle
grille administrative.
En 1933, au prétexte de la crise mondiale, l’autonomie de gestion jusqu’alors assez large
des provinces est sévèrement rognée, leur nombre passe à 6, et elles prennent le nom de
leur chef-lieu : provinces de Léopoldville et Lusambo (par scission du Congo-Kasaï), de
Coquilhatville (l’ex-Equateur), de Stanleyville et Costermansville (par scission de la
Province Orientale), d’Elisabethville (l’ex-Katanga). En 1947, on les rebaptise encore –
provinces de Léopoldville, du Kasaï, de l’Equateur, Orientale, du Kivu et du Katanga – et
le nombre des districts est porté à 25 : la trame ainsi formée peut être vue comme
« définitive », car les réaménagements ultérieurs respecteront le maillage fondamental
des districts (complété par de rares districts urbains), des territoires, et des secteurs ou
chefferies (Saint Moulin, 1992).
Carte n° 1 : 1947 – Provinces et districts du Congo Belge
A l’échelle régionale, le morcellement va reprendre après l’indépendance. Au tout début
certes, sous l’imperium contradictoire du président Joseph Kasavubu, fédéraliste, et du
Premier ministre Patrice-Emery Lumumba, unitariste, sont maintenues les 6 provinces
héritées des Belges mais redevenues – cette fois politiquement – autonomes. Mais dès
1962, le chaos de la guerre civile débouche sur leur remplacement de facto par 21 entités
bien plus petites, et vite affublées du surnom de « provincettes » : autonomes toujours,
elles ont surtout une connotation ouvertement ethnique, ce qu’illustre leur architecture
d’ensemble plus ou moins inspirée des anciens districts, mais intégrant aussi – pour y
faire pièce – les deux zones en sécession du Sud-Kasaï (d’Albert Kalonji) et du Sud-
Katanga (de Moïse Tshombe) (C.R.I.S.P., 1963). Bien que consacrées par la Constitution
dite de Luluabourg (1964), elles n’auront guère eu, au demeurant, le loisir d’exister.
Carte n° 2 : 1963 – « Provincettes » de la République Démocratique du Congo
A partir de 1965 en effet, le régime nouveau de Joseph-Désiré Mobutu cherche à
raffermir l’unité du pays. Dans cette optique, il revient à l’organigramme colonial, tout en
changeant l’intitulé des divers échelons – on parlera de régions, de sous-régions ou villes,
et de zones – et surtout en les vidant de toute réalité politique. Bientôt, en vertu de son
idéologie de « retour à l’authenticité », Mobutu rebaptise non seulement le Congo lui-
même, qui devient le Zaïre, mais aussi plusieurs provinces. Si l’Equateur et le Kivu
gardent leur nom, le Katanga et la Province Orientale deviennent le Shaba et le Haut-
Zaïre ; la province de Léopoldville fait place aux régions de Kinshasa, du Bas-Zaïre et du
Bandundu ; celle du Kasaï donne naissance au Kasaï-Occidental et au Kasaï-Oriental. On
le voit, la logique de l’émiettement territorial n’est que partiellement enrayée, face aux
aspirations identitaires. Elle se renforce encore en 1988 avec la création de plusieurs
sous-régions (ou villes), et surtout des régions du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du
Maniema, pour remplacer le Kivu mais aussi à titre expérimental, dans l’optique d’un
futur redécoupage de l’ensemble du pays.
Carte n° 3 : 1988 – Régions, sous-régions et villes de la République du Zaïre
C’est que l’ethnicisme, en dépit du dogme officiel, n’est nullement aboli. Il reprend
vigueur au contraire et se revendique même, d’autant que se délitent inexorablement
l’économie et les niveaux de vie, les liaisons internes vitales du pays, et une
administration territoriale dissoute dans le parti-É tat et réduite de ce fait à une hiérarchie
de compétences en trompe-l’œil (Bruneau, 1990). En ce temps de crépuscule du
mobutisme, les forces centrifuges semblent devoir l’emporter sur les facteurs
d’intégration – et à cet égard la Conférence nationale souveraine de 1990-92 n’arrange
rien. Une partition nouvelle se dessine, qui décalque en réalité les grandes aires
socioculturelles du passé précolonial. Une mouvance occidentale, globalement
lingalaphone (et kikongophone) reste orientée vers Kinshasa et l’Atlantique ; une
mouvance orientale, axée sur les hautes terres, swahiliphone, et presque sans lien avec la
capitale, est tournée vers l’océan Indien ; et une mouvance méridionale, l’espace
katangais, swahiliphone encore, est tournée vers l’Afrique australe. Fait exception
l’espace kasaïen du centre-sud, tshilubaphone, qui affirme son dynamisme et son identité
propre. Mais ce schéma ne concerne guère que l’anneau utile, la cuvette centrale faisant
figure d’immense isolat.
A cette situation, le régime imposé en 1997 par le coup de force de Laurent-Désiré Kabila
n’est pas en mesure de changer grand-chose. Consacrant le canevas territorial en place, il
se borne à rétablir les anciens intitulés (provinces, districts et territoires), et à restaurer
quelques dénominations d’avant Mobutu : le Zaïre redevient le Congo, et l’on voit
renaître le Bas-Congo, le Katanga, la Province Orientale. Mais la généralisation des
conflits armés confirme très vite la partition déjà émergente, faisant du Congo un géant
dépecé par ses voisins, qu’il soient « protecteurs » du régime ou des rébellions : dans
l’ouest les Angolais, dans le sud les Zimbabwéens, au Kasaï les deux ; dans l’est (et le
nord) les Ougandais et les Rwandais ; et dans la cuvette forestière, l’incertaine « ligne de
front ».
Pourtant, comme quarante ans plus tôt, la désintégration ne va pas à son terme, sans doute
parce que les Congolais n’en veulent pas. La RDC continue donc d’exister vaille que
vaille, et seules quelques créations dispersées de districts ou de territoires suggèrent que
les tensions ethniques, localement affûtées par la guerre étrangère, et plus généralement
manipulées au grand jour dans l’arène politique, poussent non pas à un éclatement
véritable du pays, mais au moins à sa recomposition territoriale. C’est finalement ce que
consacre, à l’échelle nationale, la nouvelle Constitution, qui fait plus que doubler le
nombre des provinces : la réforme doit prendre effet dans « les 36 mois suivant
l’installation des institutions politiques », soit au plus tard le 3 février 2010. Toutefois les
limites provinciales proposées doivent être entérinées par une loi organique qui reste à
venir, et il est précisé que de nouvelles entités territoriales peuvent être créées, par
démembrement ou regroupement. L’affaire paraît donc loin d’être réglée. En attendant
coexistent les 11 grandes provinces, toujours en place, et les 26 petites, en gestation, dans
une incertitude porteuse de conflits.
Provinces, provincettes : le patchwork des IDENTITES.
Comme déjà celles de 1962, à qui elles ressemblent beaucoup, les nouvelles provincettes
ont repris, pour l’essentiel, la trame des anciens districts [carte n° 4 ; tableau n° 1]. On en
plantera ici, sommairement, le décor (recadré dans celui des provinces plus grandes dont
elles sont issues), afin de saisir quelle sorte d’équilibre se trouve conforté ou remis en
cause, sur le terrain, entre les principaux peuples ou agrégats de peuples du vaste Congo.
Carte n° 4 : 2006 – Nouvelles provinces de la République Démocratique du Congo
LA NAISSANCE DES EMPIRES LUBA ET LUNDA
Avant les années 1960 le Kasaï était une grande province qui malheureusement a été sujet
à une subdivision territoriale qui fait l'objet de débats de la politique congolaise dans le
cadre d'une meilleure procédure de gestion du pays depuis 5 décennies. Les chefferies des
Lubas et d'autres sont en voie de disparition et si on regarde dans l'histoire du Kasaï, Jan
Vansina nous donne l'analyse suivante:
Au cœur de la savane de l'Afrique centrale, dans la région située à l'ouest du Haut
Lualaba et au nord des Lacs du Katanga, il se produisit au cours du XVIe siècle un
profond changement dans les structures politiques. Des envahisseurs, les Balopwe,
occupèrent la région et fondèrent un royaume important, l'empire Luba. De là ils se
déplacèrent peu après vers l'Ouest et établirent un royaume en pays Lunda. A partir de
1600 et pendant plus d'un siècle, des groupes d'immigrants allaient quitter cette dernière
région et transporter avec eux leur organisation politique à l'Ouest, au Sud et à l'Est, de
telle sorte qu'aux environs de 1750 la civilisation Luba / Lunda se trouvait diffusée
depuis la rivière Kwango à l'Ouest jusqu'au Lac Tanganyika à l'Est. Le présent chapitre
décrit successivement les origines du royaume Luba et son histoire interne, les origines et
l'histoire de l'empire Lunda, et l'histoire de l'expansion Lunda en Lunda Nord et Lunda
Sur, en Rhodésie du Nord-Est et dans la région comprise entre le Kwango et le Kasaï. Il
s’arrête de manière un peu arbitraire à l’année 1700, avant les expansions dans les pays
situés à l'intérieur du bassin forme par le Congo et le Zambèze, ainsi que dans les pays du
Kazembe.
La naissance du Royaume Luba
Vers 1500 la région comprise entre le Lac Tanganyika et le Haut-Kasaï était divisée en
une multitude de petites chefferies. Dans la partie occidentale elles étaient gouvernées par
des Bungo, les ancêtres des Lunda. Dans la partie centrale, entre les Bushimai et les lacs
du Katanga, vivaient les ancêtres des Luba du Katanga. Il y avait là deux royaumes de
dimensions plus importantes, celui des Kaniok et celui des Bena Kalundwe. A l'est des
Bushimai, les chefferies étaient très petites et la population qui y vivait s'appelait les
Kalanga. Entre les lacs et le Tanganyika vivaient les ancêtres des Hemba et peut-être déjà
certains groupes parlant la langue Bemba. On ne sait à quel niveau d'organisation
politique ces régions étaient parvenues. A cette époque un immigrant nommé Kongolo
apparut dans les pays des Kalanga pour devenir le fondateur de ce qu'on a appelle le
premier empire Luba, Il n'y a pas de tradition unique concernant les origines ou la
provenance de Kongolo. Les versions qu'on a pu recueillir montrent seulement à quel
point nous manquons d'une étude générale des traditions orales Luba. Les traditions
subsistant encore disent qu'il était originaire soit du Nord-Est, de la région ou se trouve
maintenant la ville de Kongolo, soit du Nord-Ouest, de chez les Bena Kalundwe de
Mutombo Mukulu. Une des traditions prétend même qu'il était né proximité de ce qui
allait devenir sa capitale. Quoi qu'il en soit de son origine, il est certain que Kongolo
arriva dans le pays, soumit en cours de route des villages isolés et des petites chefferies et
édifia sa capitale à Mwibele près du Lac Boya.
Peu de temps après qu'il s'y fut installé, un chasseur du nom d'Ilunga Mbili, venant de
l'est du pays Lualaba, arriva avec sa troupe près de la capitale. Il y fut bien accueilli par
Kongolo dont il épousa deux demi-sœurs Bulanda et Mabela. Mais peu après, il repartait
pour son pays natal à la suite sans doute d'une violente dispute avec Kongolo, homme
rude qui refusait d'apprendre du nouveau venu les manières et subtilités du métier de chef.
Ilunga Mbili venait manifestement d'une chefferie bien organisée encore qu'on en ignore
pratiquement l’emplacement. Après son départ, Bulanda mit au monde Ilunga Kalala et
Mabela Kisulu Mabele. Devenu adulte Ilunga Kalala allait être un merveilleux guerrier et
aider Kongolo à soumettre toute la partie méridionale du royaume, ce qui montre que la
conquête de celui-ci prit au moins vingt ans sinon davantage. Mais Kongolo prit ombrage
des succès de Kalala et tenta de le tuer. Kalala se réfugia dans le pays de son père et en
revint avec une armée Kongolo prit aussitôt la fuite et se réfugia prés de Kai. Trahi par
ses propres sœurs, il fut capture et tue. Kalala s'empara du royaume et bâtit sa capitale à
Munza, à quelques kilomètres de Mwibele. C’était le début de ce qu'on a appelé le second
empire Luba qui est en fait le même royaume. L'histoire de Kongolo et de Kalala Ilunga
est devenue épopée nationale des Luba.
Après son accession au trône, Kalala guerroya, pour agrandir ses domaines. Il fit la
conquête de plusieurs chefferies sur les rives occidentales du Lualaba au nord du Lac
Kisale, et de quelques autres sur la frontière des Kalundwe. Une tradition recueillie par
Van der Noot rapporte que fors de l'édification de sa capitale il eut à combattre les Bena
Munza, habitants du lieu. Ce fait, s'il est vrai, montre que le royaume était encore très
faible à cette époque. Mais à la mort de Kalala, il semble que les bases de son
organisation étaient installées. L'organisation politique du royaume est très mal connue,
et devrait faire l'objet de recherches poussées de la part d'ethnologues qualifies. A l’heure
actuelle, on n'en connait que les Brands traits. Les Luba étaient organisés en patrilignages
qui ne semblent pas s'être insérés dans un système segmentaire, à la différence de ce qui
se produisit chez les Luba du Kasaï. Mais au Kasaï il n'y avait pas d'organisation
politique supérieure. Chaque lignage comprenait des clients, qui lui étaient liés par
contrat, et des esclaves domestiques. Le village était forme d'un ou plusieurs lignages. Il
était dirigé par un chef choisi sans aucun doute au sein du lignage qui avait joué le rôle
principal dans l’établissement du village, mais néanmoins nommé officiellement par un
supérieur hiérarchique qui pouvait être le roi lui-même Ce chef était assiste d'un conseil
qui comprenait tous les chefs des lignages existant dans le village. Plusieurs villages
formaient ensemble une chefferie, et il se peut que ces chefferies aient préexiste au
royaume. La chefferie avait à sa tête un kilolo, c'est-à-dire un chef territorial. Plusieurs
chefferies formaient une province placée sous la direction d'un chef provincial, et toutes
les provinces ensemble formaient le royaume. La hiérarchie territoriale n’était cependant
pas rigide. Certaines Chefferies dépendaient directement du Roi et il en allait de même
pour certains villages.
Il semble qu'un certain nombre de chefferies aient été héréditaires, sans doute celles des «
propriétaires du sol », tandis que d'autres étaient gouvernées par des chefs nommés par
leurs supérieurs immédiats et confirmés dans leur nomination par le roi. Tous les chefs, à
l'exception des «propriétaires du sol» étaient balopwe, c'est-à-dire membres des lignages
de Kongolo ou de Kalala Ilunga. Certains pontes de Chef étaient confiés à vie, d'autres
pour une période de quatre ans. Mais, le Roi pouvait déposer les chefs, quels qu'ils
fussent. Ce souverain gouvernait sa capitale, la kitenta, et chaque nouveau roi fondait une
nouvelle capitale. La kitenta du Roi décède ainsi qu'une zone environnante était confiée à
une femme, la mwadi qui était en contact avec l'esprit du défunt, et à un tivite, c'est-à-dire
le principal ministre du disparu. A la mort de ces personnes leurs fonctions passaient à
leurs descendants. Ces régions étaient sacrées et libres de toute ingérence du souverain
vivant ou de ses inférieurs. Le gouvernement central comprenait le Roi et ses dignitaires.
Les titres étaient hiérarchises et correspondaient à des fonctions différentes. Le plus
important était le titre de twite, chef de guerre et commandant d'un corps d'officiers qui
formait la seule force de police permanente du royaume; l'inabanza, gardien des
emblèmes sacrés qui était avec le sungu le chef provincial le plus important. D'autres
titres variaient de chefferie à chefferie. Citons les titres de nsikala, régent pendant un
interrègne, de kioni, et de mpesi. Plusieurs titres étaient expressément réservés aux
proches parents du roi, et en fait la plupart des autres allaient à la famille royale,
principalement aux membres du patrilignage de sa mère. Les dignitaires démissionnaient
a la mort du roi qui les avait nommés et ils étaient alors remplaces, ou reconduits dans
leur charge. Le nouveau dignitaire devait offrir au souverain une importante quantité de
présents, de manière à garder sa charge, de telle sorte qu'en fait plusieurs titres étaient
achetés.
Quoique les titres ne fussent pas héréditaires, les charges étaient souvent transmises aux
héritiers des dignitaires défunts. La royauté était fondée sur la notion de bulopwe. Il s'agit
d'une qualité sacrée, portée dans le sang, mais transmise par les mâles, qui donnait aux
chefs le droit et les moyens surnaturels de gouverner. Sans bulopwe personne ne pouvait
avoir d'autorité et tout bulopwe provenait de Kongolo ou de Kalala Ilunga. Le roi régnait
donc de droit divin, et l'on croyait qu'il possédait des pouvoirs surnaturels. Cela ressort
nettement de la description des rites d'installation, du fait qu'on le considérait comme un
Vidye, ou esprit de la nature, des emblèmes et tabous de sa fonction etc. La spécificité de
cette conception de la royauté, comparée à celle d'autres états africains, réside avant tout
dans ses liens étroits avec le culte des ancêtres et plus encore avec le sang, à tel point que
personne ne pouvait régner sans que le sang ne le désigne pour cette fonction.
Théoriquement, le Roi exerçait une autorité absolue: il ne semble pas qu'il y ait eu un
conseil supérieur pour contrebalancer sa puissance. Mais celle-ci était tempérée du fait
qu'il avait des demi-frères qui pouvaient s’élever contre lui, appuyés par le patrilignage
de leurs mères, et soutenus par la cour et le peuple au cas où le Roi était un tyran. II est
possible qu'il y ait eu d'autres freins institutionnels à la puissance royale, mais on n'en
trouve aucune mention. Toutefois il ressort nettement de l'histoire Luba et des rapports
ethnographiques que le roi n'avait pas la puissance des rois du Kongo et que la structure
du lignage semble avoir joué un rôle politique important. Ce tableau s'applique seulement
orientation de la région centrale du royaume, c’est-à-dire la région habitée par les Luba.
Lorsque les Luba conquirent des groupes étrangers, à l'est ou à l’extrême sud du Lualaba,
il semble qu'ils laissèrent les chefferies conquises aux mains de leurs chefs et se
bornèrent à les contrôler en installant un ou deux villages Luba et en les soumettant à
l'inspection d'un chef provenant de la région centrale. L'organisation que nous avons
décrite se présente d'une manière très semblable dans tous les autres royaumes Luba, tels
ceux des Kalundwe, des Kanioka et des Kikonja. Il diffère sous certains aspects
importants de I organisation Lunda que nous décrirons plus loin. Il n'y a pas d'accord
général au sujet de la succession du balopwe après Kalala Ilunga. Nous avons résume les
sources dans le tableau suivant, qui montre combien ce problème requiert des recherches
soutenues. Il est clair, spécialement pour la première partie de la liste, qu'aucune de ces
sources ne peut être préférée aux autres. L'ordre dans lequel nous les présentons est donc
arbitraire.
Le fils de Kalala Ilunga Walefu ou Liu est surtout connu comme le frère de Cibinda
Ilunga qui quitta le Royaume pour fonder l'Empire Lunda, peu avant 1600
vraisemblablement. Il eut pour successeur Kasongo Mwine Kibanza, petit-fils de Kalala
par son père, qui eut à subir la rivalité de ses cinq fils. Il les battit tous et conquit de
nouvelles terres. Ngoi Senza est renommé pour avoir décentralise le royaume en créant
de nombreuses chefferies autonomes. Parmi ses successeurs Kasongo Bonswe eut à lutter
contre ses oncles qui avaient été lèses dans la succession et qui étaient soutenus par leurs
clans maternels. Avec son fils Mwine Kombe s'acheva la première période de l'histoire
Luba, période pendant laquelle on ne signale pas de conquêtes après Kasongo Mwine
Kibanza, ni de luttes fratricides pour la royauté. En revanche, ces deux traits caractérisent
la période suivante qui commence avec Kadilo, le fils de Mwine Kombe. Ces données
fragmentaires sur un siècle et demi d'histoire Luba mettent en lumière la nécessité
d'études ultérieures en cette matière. Outre l'état de Kalala, il existait à la même époque
trois importants royaumes Luba. Dans la région de Kikonja un état fut fondé pendant le
règne de Kalala Ilunga sur les terres d'une chefferie antérieure dirigée par une femme
nommée Mputu. Le fondateur de cet É tat, un Kunda nommée Bombwe Mbili aurait été le
frère ou le fils d’Ilunga Mbidi Kiluwe. Le nouveau royaume groupait trois populations
légèrement différentes, les pécheurs Laba du lac Kisale, les sujets de Mputu, et les Songo
Meno de la rive nord du Lualaba. Cet É tat ne fut jamais expansionniste, en revanche il
dut résister à ses voisins et y parvint grâce au fait que la population pouvait trouver
refuge dans les îles du Lac Kisale. En réalité ses dimensions n'étaient genre plus
importances que celles des chefferies traditionnelles comme il y en avait beaucoup à l'est
du Lualaba en pays Hemba. Les Kalundwe disent que quand Kongolo arriva dans le pays
il y trouva une petite chefferie, groupant seulement quelques villages, qui était dirigée par
les Bena Basonge. Â pres Kongolo, c'est une famille Lunda qui prit le pouvoir et fonda
une nouvelle lignée royale, celle des Bena Kabeya.
Enfin, une ou plusieurs générations plus tard, c'est une autre lignée Lunda, celle des Bena
Gandu qui accéda au trône. Après une période de guerre civile entre ces trois familles, un
compromis fut trouvé qui établissait que le chef serait choisi selon un système de rotation
irrégulière entre elles trois. Entre-temps, probablement avant 1700, les Kalundwe, qui
formaient la chefferie de Mutombo Mukulu, s'étaient répandus et étaient devenus
suffisamment forts pour affirmer leur puissance à travers les siècles. On ne dispose
d'aucun renseignement digne de foi touchant le troisième Royaume, celui des Kanioka.
(Mon père(Clément Rosez) et moi avons vécu à Luputa avec les Kanioka, un peuple fier
mais cruel, n'aimant pas les Européens, pourtant en faisant des exceptions pour ceux
qu'ils connaissaient bien... en 1960 un grand nombre des "fermiers" dans la région ont
été tué par eux.)
C'est le cas aussi pour toutes les chefferies situées entre le Lualaba et le Lac Tanganyika,
à l'exception des Tabwa et des populations qui leur sont apparentées. Ceux-ci prétendent
être venus du Nord, avoir suivi la rivière Lovua et s’être rendus à partir de là dans la
région de Baudouinville et de Zongwe. Ils Laissèrent un groupe à Mengwe près du Lovua.
De Zongwe un groupe, celui des Tabwa et leur clan dirigeant, les Zimba, se dirigeait vers
le Sud, tandis que le clan Kasanga restait dans la région en donnant naissance aux
Tumbwe, et que le clan Kamanya organisait les Hemba.
En outre, on pense que les Bwile ou Aanza dérivèrent ultérieurement des Tabwa. Plus
tard les Tabwa et les Tumbwe s’étendirent vers le Nord et les seconds atteignirent
finalement le sud du cinquième parallèle. La chronologie et les détails de l'histoire de ces
peuples sont si incertains qu'on n'a absolument aucune image nette de leur évolution
ultérieure.
Pour toute la région du Kasaï, il n'y a actuellement ni traditions ni autres documents qui
remontent au-delà du XVIIIe Cependant, on peut supposer que toute la région située à
l'ouest des Lulua et au nord-ouest des Kanioka était occupée par les Kete du Sud et du
Nord. Les Luba du Kasaï vivaient dans le triangle compris entre les pays Lubilash,
Bushimai et Kanioka et il se peut qu'ils aient déjà alors commence à s'infiltrer chez les
Lwalwa, Mbal, Sala Mpasu, Kongo du Bas Lweta et de la vallée du Kasaï. A l'Est le pays
était occupé principalement par des Songye. La naissance de Empire Lunda Les
mythes Lunda traitant de l'origine de ce peuple nous apprennent qu'ils vivaient depuis des
temps très reculés dans les régions septentrionales de leur territoire actuel. Ils situent la
création du genre humain dans la vallée du Kalaany près de Sakapemb. A partir de ce
noyau, de petits groupes de villages auraient essaimé au gré de l'accroissement de la
population. Ils se seraient établis dans les plainer vers l'Ouest sous la conduite de leurs
chefs, les «chefs du pays», Mwaant Aangaand ou Acubuung (tubungu). Il se maintint des
relations entre villages à cette époque, le pays était gouverné par Mwaakw, un jumeau de
sexe male issu d’une longue lignée de jumeaux depuis les premiers hommes. C’étaient
encore les temps mythiques.
Le fils de Mwaakw Nkond eut deux fils Kinguri et Cinyama. Ils étaient paresseux et
cruels et un jour leur père faillit mourir des coups qu'ils lui donnèrent. Il fut sauvé par
leur sœur Rweej (Lueji) et décida alors que sa fille lui succèderait après sa mort, nouveau
thème mythique expliquant cette fois l'origine de la succession matrilinéaire. Selon les
mêmes traditions, Nkond mourut des suites des coups qu'il avait reçus, selon d'autres il
périt dans une guerre contre les Tchokwe dont le chef Kabamba sopa niama ou Kadiki ka
Ditanga vivait à l'ouest du Haut-Kasaï fiction de la royauté perpétuelle, de telle sorte que
le pays Lunda formait déjà dès le XVIe siècle une entité politique aux liens, assez lâches
mail unifiée. Quoiqu'il en soit, c'est Rweej qui lui succéda. C'est alors qu'arriva Cbinda
Ilunga (Cibiind Yiruung) venant de la capitale d'Ilunga Walwefu. Il épousa Rweej et
devint Roi. Ce mythe signifie manifestement que le balopwe Luba conquit la région Cette
hypothèse trouve une confirmation importante dans le fait que de nombreux titres Lunda
sont dérives du pays Luba et que certaines traditions prétendent que plusieurs compa-
gnons d'Ilunga quittèrent le pays pour fonder le royaume Bemba. Kinguri et Cinyama
n’acceptèrent pas le nouveau règne et émigrèrent, le premier pour fonder le royaume
Kasanje sur le Kwango, le second pour porter le règne Lunda jusqu'au Lwena. Peu  pres
se produisit une insurrection générale qui ne fut matée qu'avec l'aide des troupes
Tchokwe. Mais ensuite les Tchokwe quittèrent le pays Lunda, de même que les Bemba et
les populations apparentées. Telle est, en résumé, la première expansion du règne Lunda
sur de larges parties de l'Afrique centrale. Selon l’interprétation correcte de ces traditions,
seuls de très petits groupes d'hommes, peut-être seulement une centaine à la fois ou
même moins, auraient participé aux migrations. Rweej n'eut pas d'enfants et Cibinda
Ilunga épousa Kamonga Lwaza qui mit au monde un fils Mwaant Luseeng lequel monta
sur le Trône. Luseeng était un grand organisateur. C'est sous son règne que semble s’être
édifiée toute la structure politique du royaume Lunda. II institua les titres de la cour et les
titres territoriaux. Son fils et successeur Mwaant Yaav Naweej poursuivit son œuvre et
son nom Yaav devint un titre générique de la Royauté Lunda. Au cours de ces trois
premiers règnes, le Royaume Lunda connut une expansion qui le mena de la vallée du
Nkalaany jusqu'à la région comprise entre cette rivière et le Kasaï à l'Ouest et les chutes
du Lulua au Sud. Les mwaantaangaand locaux se seraient soumis assez rapidement aux
émissaires de la capitale, une fois l'un d'eux soumis par la force, du moins si les liens de
royauté perpétuelle existant entre eux correspondaient à des liens d'authentique royauté.
Mais si ces liens étaient fictifs, il faut admettre que chacun d'eux aurait été conquis à son
tour. L’envoyé Lunda devenait alors un cilool (kilolo) ou Chef politique et recevait un
morceau de terre du mwaantaangaand qui reconnaissait son autorité. Vers la fin de la vie
de Naweej, les conquérants étaient arrivés dans la région de Malasa et Mukulu entre les
rivières Lovua et Kasileshi. Ils avaient atteint aussi la rivière Rutembe. Ils y trouvèrent un
peuple nouveau, les Kosa, qui différaient des Lunda du Nord auxquels cependant ils
étaient culturellement apparentés.
Leur conquête ne fut achevée que sous le règne de Muteba au début du dix-huitième
siècle .La structure politique des Lunda telle qu'elle existait vers 1700 était basée sur le
village et son domaine, le Ngaand. Les villageois étaient gouvernés par un conseil
d'anciens le Ciyul et un chef dont le titre se transférait héréditairement en ligne maternelle,
le Mwaantaangaand, spécialement responsable du bonheur surnaturel des villageois, et
dont les pouvoirs venaient de ses ancêtres qui étaient censés avoir fondé le village. A
cause de ses pouvoirs rituels le Mwaantaangaand ne pouvait être dépose que par le roi,
car celui-ci aussi détenait des pouvoirs surnaturels. Différents villages étaient unis en
groupes selon la nature des liens de royauté perpétuelle existant entre leurs chefs. Ces
groupes étaient, semble-t-il, diriges par le mbay, c'est-à-dire le plus ancien des chefs.
Ceux-ci à leur tour étaient groupés en districts politiques régis par un cilool, nommé par
le roi et le conseil général sur proposition d'un groupe de mbay après une période d'essai
et le paiement de redevances appropriées. Le cilool n'avait ni droits ni devoirs surnaturels;
il était uniquement percepteur d'impôts. Il devait expédier les taxes à son supérieur dans
la capitale, qui les transmettait au Roi. Ce système avait également des buts administratifs.
Chaque district était donc lie à un représentant spécial à la cour et ce lien était également
conçu en termes de royauté perpétuelle Le cilool régissait lui-même un morceau de forêt,
am pat, que les villages lui avaient donné et où il vivait avec ses proches parents. On
trouvait encore sous ses ordres des Mvwab ou fonctionnaires charges de gouverner tel
village ou la charge de mwaantaangaand n’était pas exercée, ce qui se produisait
fréquemment étant donné que le titre de mwaantaangaand se transmettait par filiation
maternelle seulement, quoiqu'en matière d’héritage et en d'autres domaines la succession
se calculait bilatéralement. Au-dessus du cilool, mais gouvernant dans le même district
on trouvait le yikeezy, qui supervisait les activités du premier sur nomination royale
lorsque son honnêteté ou son efficacité étaient douteuses. Cette institution semble
indiquer qu'il était impossible ou très difficile de déposer un cilool incompétent. Dans la
capitale le Roi, Le Mwaant Yaav, «Seigneur de la vipère», et ses dignitaires formaient le
gouvernement central. Il détenait des attributs sacrés, nommait les fonctionnaires de la
cour, créait de nouveaux titres, pouvait déposer les fonctionnaires de tout rang et présidait
le citentam, conseil national et cour suprême composée des plus hauts dignitaires. Il était
assisté par trois types de fonctionnaires. Le premier groupe comprenait quinze acubuung,
chefs des quinze villages les plus anciens du pays, qui exerçaient des devoirs rituels, et
tous les autres principaux dignitaires religieux tels que le magicien de la guerre, le mwadi
gardien des tombes des rois défunts etc. Le deuxième groupe comprenait des dignitaires
résidant dans la capitale, tous lies au roi par des liens de royauté perpétuelle Ce groupe
comprenait des dignitaires fameux tels que le nswaan muruund (Swana Mulunda), mère
perpétuelle des Lunda, la Rukonkish (Lukonkesha), tante perpétuelle, le nswaan mulapw
(Swana Mulopwe), prince héritier, le mutiy ou chef de la guerre etc. Ces dignitaires
étaient lies à différents cilool par des liens de royauté perpétuelle, ces cilool étant leurs «
fils » du point de vue successoral. Le troisième groupe de dignitaires vivait en dehors de
la capitale. C’était des chefs tributaires représentés à la capitale par des délègues
permanents, les ntomb. Ceux-ci payaient au Roi les tributs qui leur provenaient des chefs,
des cilool ou des yikeezy qu'ils représentaient. Parmi ces chefs tributaires se trouvait
notamment le Cibiing, gardien des frontières entre le pays Lunda et le pays Luba. C'était
un ancien émigre Luba qui avait juré fidélité au roi et s’était installé près de la frontière.
Les liens de royauté perpétuelle unissant les chefs de ce troisième groupe au roi étaient
assez lointains: ils n’étaient que des «enfants» du Roi. Il n'y avait pas d'armée régulière
permanente. Toutefois, au dix-neuvième siècle, un petit régiment faisait de constantes
incursions chez les Sala Mpasu. Mais il y avait des kakwata, ou chefs itinérants, qui
voyageaient sans cesse avec une suite armée pour percevoir le tribut ou exécuter des
ordres dans les régions lointaines de l'empire. Ils ne servaient pas en pays proprement
Lunda, ou il n'y avait d'autre force militaire qu'un petit corps de police installe dans la
capitale. La puissance militaire des Lunda était donc très réduite ce qui rend d'autant plus
remarquable leur expansion sur une bonne part de l'Afrique. Les cilool éloignes payaient
le tribut une fois Fan à la saison sèche, tandis que ceux qui vivaient aux alentours de la
capitale devaient payer des impôts plusieurs fois par an. On payait en produits de la
région ou en nourriture. La capitale qui comprenait 8 à 10.000 habitants lors de la visite
de Pogge dépendait entièrement de ce dernier tribut pour sa subsistance. Comme le
remarque le professeur Biebuyck, le paiement du tribut semble avoir été la caractéristique
la plus notable de L'empire Lunda.
Les provinces extérieures pouvaient vivre comme bon leur semblait à condition qu'elles
payent le tribut. Toute la structure politique reposait sur les mécanismes jumelés de la
succession positionnelle et de la parente perpétuelle. Un successeur n’héritait pas
seulement de la charge mais du statut personnel du défunt y compris son nom propre et
ses relations de famille. Ainsi les anciennes relations de parente étaient rétablies à chaque
génération et il ne se créait de nouveaux liens qu'après que toutes les «positions»
anciennes du système eussent été remplies. En pratique, ces mécanismes s'avérèrent
extrêmement utiles parce qu'ils opéraient un divorce entre la structure politique et la
structure de la descendance réelle, n’étant lies à aucun principe particulier de
descendance. Chez les Lunda du Nord le système de la parente était bilatéral, mais
matrilinéaire quant à la succession au poste de nuvaantaangaand: ailleurs, dans l'empire,
c’était le système matrilinéaire qui prévalait, mais il arrivait comme chez les Yaka que le
système fut matrilinéaire pour la population et patrilinéaire pour les chefs. Mais cette
diversité n'empêchait pas les principes de la succession positionnelle et de la parente
perpétuelle de s'appliquer partout. Ces mécanismes jumelés pouvaient se répandre sans
nécessiter de changements dans les structures sociales existantes, ce qui explique
pourquoi tant de civilisations d'Afrique centrale purent les adopter sans grande résistance,
même lorsqu'il y avait déjà des lignages segmentaires à fonctions politiques, comme
c’était le cas chez les Lwena.
Une autre caractéristique fondamentale du système, qui lui permettait de s'adapter partout,
était le «gouvernement indirect». Des chefs locaux pouvaient être assimiles aantaangaand
tandis que les nouveaux-venus devenaient cilool. Ils s’établissaient et fondaient une
colonie Lunda, iyanga, considérée comme place neutre par les résidents non Lunda de la
région, qui pouvaient recourir à son arbitrage et lui étaient finalement soumis sans que
l'usage de la force eut été nécessaire. En comparant les systèmes politiques Luba et
Lunda, on peut comprendre pourquoi le royaume Luba ne parvint jamais à déborder
sensiblement le pays d'origine des Luba, tandis que les Lunda réussirent à se répandre
d'une manière si remarquable. Les Luba en effet, ne pratiquaient pas la succession
positionnelle et la parente perpétuelle. Ils n'exploitèrent pas la division existant entre les
«propriétaires du pays» et les «chefs politiques» ; ils n'assimilèrent jamais de chefs
étrangers dans leur propre système, quoiqu'ils aient installe des villages Luba au
voisinage de chefs tributaires afin de contrôler leurs paiements. Du point de vue du chef
soumis au tribut le système Lunda était meilleur, puisqu'il y était honoré et respecte en
tant que « propriétaire du pays », tandis que dans le système Luba il n’était qu'un chef
vaincu oblige de payer .Les évènements les plus remarquables des règnes de Mwaant
Luseeng et de Mwaant Yaav Naweej sont, outre l'expansion régulière et la consolidation
du Royaume, les campagnes dans le Nord.
Luseeng fut attaque par les Kanioka diriges par leur chef Sabwa. Après plusieurs
invasions Kanioka, le Roi les pourchassa dans leur propre territoire. Mais il fut tué dans
une embuscade. Son successeur reprit l'offensive et annexa une portion de territoire sur la
rive du Mulungu. Mais il ne put annexer le territoire Kanioka plus au Nord.
Il attaqua également les Kete et les Sala Mpasu sur le Lulua et annexa une partie de leur
territoire, à savoir toute la région comprise entre le Lulua et le Bushimai. Mukoko, le
grand chef des Sala Mpasu, qui vivait près de ce qui est actuellement la ville de Luisa, fut
soumis au tribut. Plus tard lors d'une nouvelle campagne, le Roi franchit le Lulua afin de
soumettre les Sala Mpasu de la rive occidentale, mais il fut vaincu et trouva la mort dans
le combat .C'est sous le règne de Naweej que les Imbangala ouvrirent la route
commerciale de Kasanje à Musumba, la capitale Lunda. En progressant dans l'autre
direction, de Kasanje à Luanda, cette route permit aux objets et techniques d'origine
occidentale de s'infiltrer dans le pays Lunda des une époque avancée que l'on peut situer
approximativement autour de l'année 1650. C'est par cette route que parvinrent les
premiers tissus, les premiers fusils, et, fait plus important, c'est par elle que leur fut trans-
mise la culture du manioc et peut-être le mais. C'est par elle aussi que l'on commença à
acheminer des esclaves vers la côte.
L'expansion Lunda
Quand Kinguri quitta le pays Lunda après l’arrivée de Cibinda émigra vers Kahunze et
les sources des rivières «Pulo» et «Lukombo» sur le haut plateau situe entre le Kwango et
le Kasaï. Mais les colons furent déranges quelque temps plus tard par l'arrivée d'un
deuxième groupe d’émigrants venant du pays Lunda, les ancêtres des Tchokwe, des
Minungo, des Shinje et des Songo. C'est alors que quelques-uns des chasseurs de Kinguri
revenant de la région qui allait devenir le pays Songo, l'informèrent des qualités du pays
situe à L’Ouest et lui apprirent qu'au loin à Kasanga dans le Ndongo, il y avait des
hommes blancs qui possédaient de belles armes. Kinguri franchit alors le Kileulo vers
Bola Cassache, où il arriva à la cour de Mboluma, chef Sungwe.
Mais sa suite complota avec les Sungwe afin de le tuer sous prétexte qu'il était trop cruel.
Le complot réussit et c'est le neveu de Kinguri, Kasanje ka Imba qui lui succéda à la tête
du groupe. Il émigra à son tour, pour alter chez les Européens, en laissant les femmes à
Bola Cassache. Mais la route de Luanda était bloquée par les troupes du Roi du Ndongo.
Certains des officiers de celui-ci le trahirent et passèrent à Kasanje, qui avec leur aide
vainquit le Roi, atteignit les portugais et avec eux refoula les Nzinga jusqu’à Pungo à
Ndongo.
Kasanje jura fidélité au roi du Portugal et s'établit à Lukamba près d'Ambaka, juste en
dehors du contrôle effectif des portugais Après deux ans, à la suite d’une famine, il partit
vers l'Est à travers le pays Bondo et atteignit les plaines du Lui Kwango ou régnait un
Chef Pende, Kilamba. A la suite d'une querelle entre les deux hommes, Kasanje fut fait
prisonnier, mais sa femme, qu'il avait épouse à Bola Cassache, lui dépêcha le secours de
ses frères qui avec l'aide d'un ancien général des Nzinga le délivrèrent et tuèrent Kilamba.
Dans les mois ou les années qui suivirent, les Pende furent chassés de la vallée et
partirent vers le Nord-Est jusque dans la région du Kwango méridional. On décida alors
que le Royaume conquis s'appellerait Kasanje et serait gouverné tour de rôle par des Rois
du matrilignage de Kasanje ka Imba, du matrilignage des frères de l’épouse de Kasanje,
la Ligne Kalunga, et du matrilignage de Ngonga Mbande, la ligne Ngonga.
Tous ces événements se produisirent au début du dix-septième siècle. C'est
vraisemblablement en 1610 que Kasanje prèta serment de fidélité, et en 1613 qu'il quitta
Lukamba. La population du royaume y fut connue sous le nom d'Imban- gala, nom qui
désignait les Jaga, et son chef portait le titre de Jaga. Cela signifie dès lors que certains
des allies de Kinguri ou de Kasanje, probablement à Bola Cassache, étaient des Jaga. Si
comme nous le pensons, les Jaga étaient originaires d'une région comprise entre le
Kwango et le Lunda, une telle alliance entre Jaga et émigres Lunda eut été parfaitement
compréhensible. On se rappellera qu'en même temps que Kinguri son frère Kinyama
quittait lui aussi le pays Lunda. Il partit vers le Sud et fonda, les royaumes Lwena. C'est
de là selon les Lunda du Nord que par la suite les ancêtres des Tchokwe auraient émigre
vers l'Ouest. Mais sur ce point tous les témoignages ne concordent pas. Les Lwena
soutiennent que leur ancêtre était Ndalamuhitanganyi et qu'il avait quitté le pays Lunda
avant l'arrivée de Cibinda. Il trouva en chemin un peuple primitif qui se nourrissait de
Poisson et de nénuphars et ne savait pas cultiver le sol. De retour au pays Lunda il y
trouva Cibinda, et dès lors repartit vers le Sud avec son fils Cinyama qui devint le chef
des Lwena. Cette vue est certainement très simplifiée. Il semble que les premiers
habitants aient été les Mbwela. Ils étaient organisés en grands matrilignages segmentaires
quoiqu'il n'y ait pas d'opposition complémentaire régulière entre les segments, c'est-à-dire
que les segments mineurs d'un même lignage majeur ne s'unissaient pas automatiquement
si l'un d'eux se trouvait en guerre avec un lignage majeur étranger.
On trouvait le même type d'organisation, en réalité les mêmes clans, dans les régions
connues plus tard comme Tchokwe et Luvale. Les arrivants Lunda furent d'abord
considérés, comme des arbitres neutres, mais après un certain temps lorsqu'ils disposèrent
d'un appui local suffisant, le chef ou mwangana devint un juge compètent pour tout
conflit entre lignages y compris le meurtre et pouvant faire appel a "'aide d'un tiers
lignage lorsqu'il voulait mettre un terme à des querelles non sanglantes. La population
commença à croire à l'influence des chefs sur la fertilité du sol et petit à petit la notion de
royauté divine fut introduite. Il semble que ce processus se soit produit en différents
endroits, ce qui donne à penser qu'il n'y eut jamais un unique royaume Lwena, pas plus
qu'un seul royaume Tchokwe ou Mbunda. Tout se passe donc comme s'il y avait eu non
pas une seule migration sous la conduite d'un chef Lunda mais l'installation dans diverses
parties de la région Lwena, Tchokwe de petits meneurs Lunda s’efforçant d'y devenir
chefs. Cette lente croissance du commandement Lunda expliquerait pourquoi les listes,
des chefs Lwena ne permettent pas de fixer leur arrivée à une date antérieure à 1750. Il se
peut qu'ils soient arrivés beaucoup plus tôt mais la période de croissance aurait duré
jusqu'en 1700 ou 1750 .Selon la tradition Lunda les Tchokwe quittèrent le pays Lunda
peu de temps après Kinguri et Cinyama. La tradition Imbangala dit que ce furent les
Tchokwe et les Songo qui amenèrent Kinguri à quitter le plateau nord-ouest de l'Afrique
Austral. Selon d'autres traditions Lunda les Tchokwe se détachèrent des Lwena.
Certaines traditions Tchokwe dissent la même chose tandis que d'autres prétendent que
les Tchokwe quittèrent le pays Lunda ou son voisinage à la suite d'une guerre, «la guerre
des flèches de bois». Les traditions recueillies dans le Kwango racontent que Kabamba
Usopa Nyama Chef des Tchokwe, combattit Nkond, chef des Lunda, dans le pays de
ceux-ci et qu'après la victoire Lunda les Tchokwe partirent vers les rivières Lunguebungu
et Lwena et les sources du Kasaï ou ils s'établirent sous le commandement de différents
chefs, dont les plus importants furent Ndumba Tembo et Kanyika . En dépit de ces
traditions, des auteurs comme Biebuyck et White estiment que les Lunda se sentent
actuellement moins proches, des Tchokwe que des Lwena, et White note que la migration
Tchokwe consista en une série de coups de mains d'aventuriers agissant pour leur compte,
qui se produisirent sans grande coordination et à des périodes échelonnées dans le temps.
La population qu'ils organisèrent était composée de chasseurs et d'artisans et ressemblait
aux Ambwela du point de vue culture”. On associe généralement aux Tchokwe les
Minungo et les Songo qui furent soumis en même temps qu'eux à la domination Lunda.
Mais la tradition des Songo prétend que leurs ancêtres émigrèrent avec Kinguri. II n'y
aurait pas eu qu'un seul fondateur d'une lignée Lunda en pays Songo, il y en aurait eu
cinq sans compter Kinguri. Plus tard leur culture, comme la culture et la langue des
Imbangala et des Minungo aurait subi de fortes influences Ambundu, mais il semble que
leurs liens avec les Lunda soient authentiques.
L'expansion Lunda vers l'Est
Les prairies situées au sud des lacs du Katanga ainsi que le plateau de la Rhodésie du
Nord furent occupées en 1600 par un certain nombre de peuples de civilisations très
semblables. Il y avait chez tous un grand nombre de clans. Ces clans s'étaient éparpilles à
travers la région en vertu de la virilocale du mariage et de la structure de l'établissement
selon laquelle tout homme ayant des successeurs pouvait construire son propre village. Il
semble que l'on puisse distinguer à cette époque trots constellations de peuples jouissant
d'une civilisation presque identique: ceux du Haut-Katanga, ceux de la vallée du Luapula
et ceux du plateau du Nord-Est. Les traditions les, plus anciennes dont nous disposions
sont celles des Luapula. Selon eux, le bas de la était occupé par des sections de clans
commandées par des chefs héréditaires ou Cikolwe. Dans le Haut, Luapula il y avait de
petites chefferies dont les chefs régnaient sur d'autres peuples que leurs parents et
recevaient tribut de leurs sujets. Les clans possédaient le pays et leurs domaines ou
katongo se limitaient aux deux côtes de la vallée de telle sorte que l'organisation politique
de ces chefferies semble avoir été très rudimentaire. On trouve au sud-est du Katanga des
domaines claniques de même type, qui ont pratiquement survécu jusqu'à nos jours,
comme chez les. Sanga par exemple. Les peuples du plateau rhodésien étaient organisés
en petites chefferies, exactement comme dans la partie supérieure de la vallée du Luapula.
Leurs chefs étaient sans doute d'origine Luba ou Hemba, et portaient le titre de mulopwe
wa bantu, «chef du peuple», mulopwe signifiant évidemment chef dans la langue Luba.
Ceci s'accorde parfaitement avec les traditions des peuples Cewa et Maravi vivant plus au
Sud-Est, qui se disent originaires eux aussi du pays Luba. Si ce tableau de la situation est
bien exact, il en résulte que l'histoire de cette vaste région dans les temps recules peut être
retracée dans une proportion considérable à l'aide de la seule étude des traditions
claniques et des traditions des descendants des premiers chefs, c'est-à-dire de sources qui
jusqu'à présent n'ont pas encore été systématiquement recueillies.
É tant donné que les unités de population étaient des clans ou plutôt des segments de clans
localises, il est très probable que l'image de grandioses migrations tribales élaborée par
des auteurs comme Gouldsbury et Sheane, Lane Poole ou Grévisse est complétement
erronée. Le mouvement de population se serait produit au niveau de la section de clan.
Les sections de clans étaient sans doute très mobiles, mais elles se seraient déplacées
dans toutes sortes de directions. Sur l'étendue de la région l'ensemble de la population
pourrait être considéré comme une masse statique. Cette vue est détaillée par des preuves
culturelles qui montrent que d'un point à l'autre de la région, il n'y a pas de brusque
rupture culturelle, mais seulement des changements graduels, ce qui concorde exactement
avec l'hypothèse. Donc les récits traditionnels que nous ayons de l'histoire de la région
font supposer que la grande majorité des ancêtres des populations actuelles y étaient déjà
installés et formaient dans l'ensemble une masse statique. Cela implique que
l'immigration et l'expansion des Lunda dans cette région, ne consista pas en mouvements
de masse, mais simplement en mouvements de clans dirigeants, de telle sorte que le
nombre réel des immigrants Lunda a pu être extrêmement réduit. La première
immigration semble avoir été celle des Bemba. Les quelques indications chronologiques
dont nous disposons semblent situer leur sortie du pays Lunda au cours du règne de
Cabinda Ilunga dont ils étaient des suivants Luba.
Ceci explique pourquoi les chercheurs qui étudient la tradition des Bemba se sont
toujours opposes au sujet de l'origine de ce peuple, les uns prétendant qu'il est d'origine
Lunda, les autres lui attribuant une origine Luba. La meilleure source Bemba connue à ce
jour, le panégyrique de Nkole wa Mapembwe, second roi ou citimukulu, manifeste son
accord avec la tradition citée lorsqu'il dit : « Nkole wa Mapembwe... tu étends le pays
Lunda. Tu es un vrai chef Luba ».Les chefs Bemba quittèrent le pays Lunda parce qu'ils
s'y sentaient négliges ou humiliés et se dirigèrent vers le Luapula, qu’ils franchirent au
nord du Lac Bangweolu. Dans leurs traditions, l'histoire de cette migration est animée de
nombreux clichés étiologiques qui expliquent la présence du royaume de Kazembe dont
nous savons que la fondation est de loin postérieure, l'introduction du système
matrilinéaire etc... Arrives au nord du Bangweolu, ils franchirent la rivière Lwena, un
affluent du Lac, puis franchirent le Chambesi pour ensuite se diriger vers le Sud. C'est
alors qu'une querelle survint entre deux femmes, ce qui eut pour résultat qu'une partie du
groupe demeura en arrière et organisa les chefferies Bisa. Les autres poursuivirent vers le
Sud dans le pays des Lala auxquels ils donnèrent pour chef Kankomba Cibale.
Cependant la plupart d'entre eux poursuivirent leur chemin, se dirigèrent vers l'Est,
franchirent le Lwangwa et parvinrent à la petite rivière Katengoma, dans le pays des
Nsenga dont le chef Mwase vivait au sud-est de Lundazi dans le Nyassaland. C'était une
chefferie bien organisée et Mwase tua Citi Mukulu chef des Bemba. Mais celui-ci fut
venge par son frère Nkole wa Mapembwe qui tua Mwase, puis retourna vers le Nord-Est
ou il eut à combattre Pilula, Roi des Fipa. Ce Royaume Fipa était nettement du type Est-
africain et c'est à eux que les Bemba, empruntèrent les rites funéraires royaux ainsi que
les institutions qui s'y rattachent. L'un des chefs Bemba un homme « blanc », Luchele
Nganga, quitta alors le gros du groupe Bemba et partit vers l'Est ou il disparut. On dit que
l'un des membres de sa suite Cungu wa Nkonde fonda le Royaume Nkonde. Mais c'est
une explication qui n'est pas confirmée par l'histoire Nkonde. Nkole mourut près du pays
Fipa; il eut pour successeur Cilufya, son neveu par sa mère. Mais celui-ci n'étant encore
qu'un enfant, la régence fut confiée à un chef nommé Cimba. Quand Cilufya eut atteint
l’âge d'homme, reconduisit les Bemba à l'ouest de la rivière Chambezi, dans la région qui
allait devenir leur pays, et il donna à Cimba l'une des principales chefferies. C'est au
cours de son règne, ou sous le règne de son successeur, que furent deux importants postes
de chef, le mwamba et le nkula. Les Bemba se mirent alors à soumettre les différentes,
parties du pays. Certains d'entre eux rompirent avec le roi et établirent des royautés dans
les groupes voisins, tels Mwanga qui créa la chefferie Nyika et Cangala qui fonda le
royaume Mambwe. Cilufya eut pour successeur son jeune frère, Mulenga Pokiri, qui
soutint et repoussa un assaut des Fipa conduits par Pilula. C'est sous son règne que prit
forme l'organisation politique du pays Bemba, dont l'histoire ultérieure, jusqu'en 1850, est
mal connue.
Même la liste des rois n'est pas fermement établie à ce jour. Les principaux faits
ressortant du mémoire que Labrecque a consacré à cette période sont des disputes au sujet
de la succession, la mise en échec d'une invasion Mambwe, et des luttes contre les Lungu
qui perdirent certaines de leurs terres. Les données ethnographiques dont on dispose
témoignent sans conteste de l'existence d'une tradition officielle vivante qui pourrait
permettre à des travaux ultérieurs de retracer la chronique détaillée de l'histoire antérieure
à 1850 .En pays Bisa les chefs au pouvoir perdirent rapidement le contrôle du pays et
trois nouvelles chefferies outre la chefferie originale naquirent au cours du XVIIe ou du
XVIIIe siècle, ayant à leur tête des princes de la ligne royale. Le même processus se
produisit en pays Lala. Au cours des mêmes siècles des lignes d'origine Lunda établirent
aussi leur domination sur les Nsenga, les Swaka, les, Ambo et les Lamba, toutes
peuplades qui probablement essaimèrent de chez les Lunda établis parmi les Lala.
L'origine de la chefferie Ushi est sans doute liée elle aussi à un groupe Lunda et à
l'histoire Lala. Les Lunda fournirent des chefs à d'autres peuples en pays Bemba. Parmi
eux il faut mentionner les Unga, les Mukulu, et les Ngumbu, qui furent conquis plus tard
par les Ushi, les Cishinga, les Shila et les Bena Ngoma. Il se pourrait que ces derniers
aient reçu leurs chefs non pas directement des Bemba, mais des Unga sinon mémé du
pays Lunda. Il est douteux également que les chefs Lala aient été réellement des membres
du groupe Bemba. La tradition. Lala raconte qu'ils émigrèrent séparément. Que la
migration Bemba ne fut pas la seule, c'est ce que montre l'histoire de Lubunda du clan des
rats.
Lubunda quitta la capitale. Lunda sous le règne de Naweej I, parce qu'on le tenait pour
responsable d'un grand incendie qui s'y était déclare. Il prit la fuite vers le Luapula et
devint le chef d'une petite chefferie dans le Haut-Luapula. L'image d'ensemble du
processus est donc la suivante : divers groupes d'aventuriers Lunda seraient partis vers
l'Est et y auraient fonde des chefferies sur tout le plateau rhodésien, et dans une large
partie du Katanga du Sud-Est. Il se peut cependant que cette image ne corresponde pas à
la réalité. Le prestige des Lunda aurait été si grand dans ces régions que toutes les, lignes
de chefs se seraient réclamées d'une origine Lunda, quelle que fût leur origine réelle.
Mais si cette déformation est possible il n'en demeure pas moins qu'elle témoigne de la
profonde influence qu'eurent les Lunda sur cette vaste région. L'histoire des Shila éclaire
bien ce processus de formation des chefferies. On se rappellera que la vallée du Bas-
Luapula était habitée par des populations qui ne possédaient pas de chefferie. Ce n'étaient
pas les premiers habitants, qui étaient semble-t-il un groupe de pécheurs et de chasseurs,
les Twa. Leurs voisins en amont les appelaient les Bwilile, «Ceux qui mangent leurs
propres produits», c’est-à-dire ceux qui ne paient pas tribut par allusion à leur manque de
chefs. Un Bemba nommé Nkuba à la suite d'une querelle avec l'un des premiers chefs
régnants des Bemba vint dans cette région Bwilile accompagné de toute une suite. Les
nouveaux venus s'y marièrent et montrèrent aux habitants ce qu'était l'institution de la
chefferie et les avantages qu'elle comportait. Ils érigèrent une petite chefferie et avec
l'appui de leurs parents par alliance se répandirent lentement sur la côte ouest du lac
Mweru, moitié grâce à la persuasion, moitié grâce à la guerre.
Nkuba jouissait d'une supériorité militaire décisive parce que ses forces relativement
modestes en nombre pouvaient submerger les sections claniques isolées, qu'il avait à
combattre. Mais la persuasion faisait l'essentiel de sa force, car il devait convaincre ses
adversaires d'accepter la conquête. Il est probable qu'il recourut abondamment à la
technique du mariage avec les habitants locaux, à l'exploitation du prestige du titre de
chef, et à la création de nouveaux titres destinés à entrainer une participation locale au
nouveau système. Mais une fois la région Bwilile entièrement conquise, la chefferie était
devenue trop vaste et elle donna naissance à trois chefferies de dimension plus réduite,
commandées par des chefs dont le titre -était désormais Nkuba. Leurs sujets perdirent le
nom de Bwilile et devinrent des Shila. Les Shila étaient donc une nouvelle « tribu », mais
sans qu'il y eût la moindre migration de masse. Une évolution analogue semble s'être
produite dans toutes les autres parties de la Rhodésie du Nord-Est et dans le Katanga
oriental, Les noms des « tribus » actuelles y reflètent sans doute moins une opposition
culturelle réelle que les vicissitudes de l'implantation de l'institution de la chefferie.
L'expansion Lunda dans la REGION du Kwango
D'une manière générale, la région bordée à l'Ouest par le Kwango et à l'Est et au Nord par
le Kasaï, était aux environs de l'an 1600 habitée par deux types de populations. Vers le
Nord-Ouest, le long du Bas-Kwango et du Kwango moyen, et le long du Bas-Kasaï
jusqu'au Kamtsha vivaient des populations qui se prétendaient originaires de ce qui est
aujourd'hui le pays Tyo (Teke). Nous traiterons de leur histoire dans le chapitre suivant.
Elles avaient pour voisins au Sud des populations parlant une des langues apparentées à
la langue du Kongo, comme les Mbala, les Pindi, les Tsamba, les Suku etc. Leur habitat
semble avoir été très dissémine et if se peut qu'ils ne se soient pas étendus à l'est de la
Loange ou une population à très faible densité de pygmées et de Kete occupait le pays.
Le premier événement historique que l'on puisse repérer dans la région est l'arrivée des
Jaga sur le Kwango avant 1568. Il semble qu'ils aient mis en déroute certains peuples du
groupe du Nord-Est mais qu'ils n'affectèrent nullement ceux des groupes du Sud-Est.
C'est par l'arrivée des Lunda que ceux-ci auraient été mis en fuite. Vers 1880 en effet,
toute la région du Sud-Est était gouvernée par des chefs d'origine Lunda. Les récits
concernant l'arrivée des Lunda sont assez embrouilles mais il semble néanmoins qu'après,
que les Tchokwe eussent quitté le pays Lunda Rweej envoya son cousin Kandumba ou
Kakilya. Uhongato vers l'ouest pour y fonder un É tat tampon entre le pays Lunda et le
nouveau pays de Kinguri. Il portait le titre de Kapenda Mukwa Ambungo, et était
accompagné de Mona Mavu à Kombo, fille de sa sœur. Le groupe s'établit d'abord sur le
Luajimu. Mais, Mavu se maria et son mari prit sa place. Les autres émigrants quittèrent la
région, franchirent le Kwenge et atteignirent le Kwango après une lente progression. Le
mythe étiologique raconte que Mavu, eut trois maris et qu'il naquit de chacun d'eux un
garçon et une, fille. Le premier fils Yenge et sa sœur Mahango fondèrent la lignée de
Kapenda ka Mulemba en pays Shinje; le second fils Malundo et sa sœur Muzombo
organisèrent la chefferie de Kapenda ka Malundo au sud du pays Shinje, tandis que le
troisième fils Masongo et sa sœur Maholo fondèrent la Chefferie de Kapenda Masongo
au sud de Mulemba. Ces trois dynasties régnantes allaient accepter des successeurs l'une
de l'autre et s'aider mutuellement dans la hâte contre les étrangers. Il semble qu'un seul
lignage ait reine dans les trois É tats et il se pourrait bien que la division en trois chefferies
se soit produite subséquemment. Les Shinje se trouvaient dans la région où ils vivent
actuellement et ils étaient étroitement apparentés aux Pende qui venaient d'être expulses
par Kasanje ka Imba. Kapenda Masongo confinait aux Songo dans le Sud. Tel est ce que
prétend la tradition recueillie par Carvalho, la seule publiée jusqu'à ce jour.
Mais certains des détails de cette tradition sont en conflit avec la tradition Songo. Ici
encore il existe d'autres données qui mériteraient d'être recueillies .La nouvelle de
l’établissement de Kapenda suscita de la joie chez les Lunda et Cibinda Ilunga, décida
d'envoyer son frère Mai vers le Nord dans le pays occupé par les Taba. Mai se fraya un
chemin jusqu'à l'embouchure du Tshikapa ou il fonda l’État de Mai Munene. Ses sujets
étaient des pygmées, des Kete et bientôt des Pende. Une tradition Bieng (Kuba) rapporte
un conflit avec les Lunda aux environs de 1650, date qui pourrait donc être considérée
comme le "terminus ante quem" de cette migration. Ce fut aussi la date de la première
arrivée des Pende dans la région .Des expansions ultérieures amenèrent davantage de
Lunda dans, le pays Kisanda Kameshi, cousin de Rweej et Mukelenge Mutombo cousin
d'Ilunga qui avaient accompagné Mai allèrent jusqu'au Lovua. De là Kameshi, après avoir
bâti une capitale sur la rivière Tshikapa, revint chercher du renfort chez les Lunda, et
repartit avec le titre de Kahungula et la permission de diviser ses terres entre ses trois fils.
II mourut en cours de route, et c'est son fils ainé, nomme lui aussi Kameshi, qui fit le
partage. Ce Kameshi laissa son frère Lusenge dans la capitale de son père avec le titre de
Bungulo et partit vers le Luajimu tandis que son autre frère s'établissait sur le Luembe
pour y contenir les peuples qui vivaient entre cette rivière et le Kasaï. Kahungula
conserva une prééminence sur les autres centres et ses Lunda s'appelèrent Lunda
Amukundo. Le chef établi sur le Luembe portait aussi le titre de Kahungula mais son
peuple s'appelait les Taba. Toutes les chefferies nommées ci-dessus, étaient matrilinéaires
quant à la succession politique à l'exception des deux chefferies Kahungula. Ou le
principe bilatéral était en vigueur. Les trois chefferies de Kameshi ne se développèrent
pas en É tats satellites des Lunda mais demeurèrent des provinces sous contrôle étroit du
Mwaat Yak. Mukelenge Mutombo franchit le Luvua, s'établit dans une région qu'il
trouva occupée par les Pende et prit le titre de Mwata Kumbana. Selon une autre tradition,
il était de fils préfère, le mwana uta d'Ilunga et serait parti de lui-même suivant l'exemple
de son oncle Kinguri, après qu'un autre émigrant, Mwene Putu Kasongo, eût quitté le
pays Lunda. Il se serait établi au confluent du Shikoku et du Loange avant l’arrivée des
Pende, et n'aurait trouvé dans la région que des Lele. C'est plus tard, vers 1650, que
seraient arrivés les Pende et les Mbun. Nous n'avons pas plus de renseignements sur
l'histoire de ce royaume que sur celle des autres chefferies mentionnées ci-dessus.
On sait seulement que ce royaume acquit une grande importance dans tout le Kwango. Il
n'avait d’égaux que le royaume de Mai Munene et celui des Yaka sur lequel régnait
Mwene Putu Kasongo. Kasongo, un neveu de Cibindi Ilunga, à moins qu'il ne fût fils de
Rweej (ce qui semble impossible car elle était stérile, suivant toutes les autres traditions),
désirant retrouver Kinguri émigra vers l'Ouest. Mais rencontra les Hobo et les Suku, près
des chutes du Tungila et engagea le combat avec eux sur la rive droite du Wamba. Arrêté
dans sa progression il laissa sur place son frère ainé Lukundo Sango, chef en titre de
l’expédition, et revint chez les Lunda demander des renforts. Mais il ne retourna pas chez
son frère. II suivit une route allant légèrement plus au Nord et laissa des colonies Lunda
sur toute la côte occidentale du Kwilu. Il franchit le Kwenge par un gué qui depuis
s'appelle Kasongo Lunda et atteignit finalement le Kwango ou il entreprit d'édifier l'Etat
Yaka. A la suite d'une querelle, certains des membres de sa suite le quittèrent,
retournèrent vers l'Est, en direction des deux rivières Bwele, où ils s'établirent et
devinrent les Soonde. Ils adressèrent un message au Mwaant Yaav pour lui demander de
leur envoyer un chef. Il leur envoyé Tyanza des Koola (Koala signifie Lunda) qui
s’établit à Kitoto pour y régner sur les Soonde, les Luwa et quelques, Pende. Plus tard, ou
presque dans le même temps, d'autres immigrants suivirent. De Mwata kumbana arriva
Sha Katwala ou Mwe Nzila qui s'établit entre le Kwenge et le Bwele, quatre autres
groupes Lunda suivirent après. II se développa dans la région un véritable courant
migratoire et jusqu'en 1880 on assista à l'immigration, de familles isolées ou de petits
groupes de Lunda provenant du pays Lunda ou Koola, de Lunda Sur et Lunda Nord et de
Mwata Kumbana. Dans cette région donc, comme dans le Lunda Nord, l'expansion
Lunda ne se borna point à un mouvement de groupes réduits et influents; elle prit la
forme d’une poussée continue qui, échelonnée sur deux siècles, équivalait à une véritable
migration de masse .A époque des conquêtes, dans la première moitié du XVIIe il y eut
encore un autre groupe de Lunda qui quitta le pays. Ce groupe était conduit par
Mukalenge (titre Luba) Mwansansa, et son fils Mukalenge Mwene Luanda quittèrent la
cour et s'établirent au Sud-Ouest, sur le Kihumbwe, au sud des chefferies Bungulo et
Kahungula. A leur suite Sakambunj quittait lui aussi le pays Lunda pour aller s'établir sur
la rive droite du Haut-Kasaï, sur les terres qui avaient été occupées à un certain moment
par Mukwa Ambungo des Shinje. Outre cette chefferie, d'autres cilool se repartirent le
pays jusqu'aux sources du Lulua. Ces chefferies, comme celle de Bungulo et les
chefferies Kahungula, restèrent des provinces du royaume Lunda proprement dit.
Lorsque Mwene Putu Kasongo arriva dans la vallée du Kwango il y trouva les Suku
organises en un ou deux royaumes. Ces Suku étaient des peuples Kongo — ils parlent
toujours le Kongo oriental pur —; ils avaient quitté le centre de ce royaume à une date
bien antérieure. La vallée du Kwango comprenait encore les Tsaam, qui étaient venus du
Kongo ou du Matamba, et des Jaga qui s'y étaient établis après avoir été expulsés du
Kongo vers 1570. Face à ces royaumes organises la progression des Lunda fut lente. Ils
s'avancèrent jusqu'au Haut-Wamba, puis jusqu'au Kwango près des rivières Yonso et
Fufu, et ensuite un peu vers le Nord jusqu'à Kiamfu Kinzadi où furent enterrés les quatre
premiers kiamfu ou chefs Lunda. Ce n'est sans doute qu'au cours du XVIII' siècle qu'ils
allaient entrer en conflit avec les Suku sur la rivière Nganga et les chasser de la vallée .II
se produisit une autre migration de tout un peuple entre 1620 et 1650, dans le sud du
Kwango. Les Pende qui vivaient à l’est du Lukala et dans les plaines du Lui en avaient
été chassés par les Imbangala. Au cours de ces trente années, ils franchirent le Kwango
d'Ouest en Est, en pays Shinje, allèrent jusqu'aux sources du Kwenge et ensuite jusqu'au
Kwilu près de Mashita Mbanza, d'où divers groupes Pende se dispersèrent, poursuivant
généralement leur marche vers l'Est. Ils arrivèrent près de la capitale de Mwata Kumbana,
soit immédiatement avant, soit immédiatement après les Lunda, et atteignirent le Kasaï: à
l'embouchure du Tshikapa immédiatement après les Bieng et les Lunda. II ne fait pas de
doute que certains d'entre eux furent assimilés par les Shinje. Installés, les Pende
continuèrent à vivre dans leur nouvelle chefferie. Mwata Kumbana et Mai se contentèrent
de placer auprès des chefs des colonies Lunda pour veiller au paiement du tribut. Mais
certains chefs du royaume Mai comme Kombo se rebellèrent avec succès et devinrent
pratiquement indépendants.
Certaines traditions Pende, recueillies par Haveaux, prétendent que le peuple Pende
venait du Ndongo et de la mer. Ils se seraient retirés devant les portugais et le récit
identifie un groupe Pende avec le lignage des Ngola. Au cours de leur retraite ils
traversèrent la région du Lui dont ils furent bientôt chassés. Ces traditions demandent à
être confirmées sur de nombreux points de détail, mais il ne fait pas de doute que les
Pende apportèrent avec eux une civilisation Ambundu, qui survécut en grande partie, en
dépit de deux siècles de domination Lunda. La civilisation des Lunda n'eut pas
d'influence très profonde sur les Pende; ils n'en reprirent que certains traits, dont
beaucoup concernent l'institution de la chefferie. D'autre part, certaines colonies Lunda
situées parmi les Pende furent complétement assimilées par ceux-ci. Le nombre des
Pende et leur structure politique et sociale relativement complexe empêchaient leur
assimilation par les Lunda. En outre, les Pende influencèrent très fortement la culture des
Kwese, à tel point qu'on les prend souvent pour des Pende. Une version Kwese maintient
que Pende et Kwese étaient le même peuple et avaient migré ensemble. Les Kwese
refusaient d'accepter un pouvoir cheffal autocrate et se séparèrent des Pende. II se
pourrait aussi que les Pende aient exercé une forte influence sur les Mbuun, avec lesquels
ils avaient été en contact depuis leur arrivée à Mashita Mbanza.
L’évènement crucial dans l'histoire reculée de l'Afrique centrale fut, non pas la création
d'un Royaume Luba par Kongolo et Kalala Ilunga, mais l'introduction des principes Luba
de gouvernement dans le pays Lunda sous le règne de Cibinda Ilunga, ainsi que la
transformation de ces principes par les Lunda. La nouvelle structure politique,
développée vers 1600 dans la capitale Lunda, pouvait être adoptée par n'importe quelle
culture. Sa diffusion allait déterminer l'histoire et l'évolution générale de la civilisation
dans une vaste région jusqu'en 1850. A l'heure actuelle encore, on peut en discerner les
effets sur les peuples d'Afrique centrale. Mais par un curieux paradoxe, vers 1700, alors
que cette expansion avait déjà touché tant de peuples de la Savane, l'organisation du pays
d'origine des Lunda n'était encore qu'en voie d'achèvement, et les derniers districts entre
Lulua et Lubudi n'avaient pas encore été organisés. Ce paradoxe entre l'expansion d'une
part et la lente croissance du noyau d'autre part, montre que ce n'est pas la puissance
militaire des Lunda qui décida de leur suprématie, mais bien la supériorité et la souplesse
d'adaptation de leur système de gouvernement, jointes l'esprit d'aventure des conquérants
qui le répandirent au loin, au cours d'une diffusion d'autant plus aisée que la Savane était
ouverte et ne leur opposait pas de frontières naturelles.
Conclusion: apprivoiser l’ethnicité?
À l’arrière-fond, des éléments socio-historiques ci-après semblent avoir prévalu. Les
chefs-lieux des deux provinces au Kasaï sont situés sur des terroirs traditionnellement
reconnus à une tribu ou à une autre de l’ethnie Luba : à Luluabourg, à Bakwanga et à
Kananga. Marque indélébile d’un système culturel et juridique, qui lie le destin des
populations au terroir d’origine, a marqué des millénaires de l’histoire et de la culture des
humains.
Par ailleurs, le peuplement Luba a longtemps été le plus important et le plus disséminé de
tout le Kasaï, du Kasaï Oriental et du Kasaï Occidental, en comparaison de celui des
autres peuples frères et voisins, que ces derniers soient pris globalement ou
individuellement.
Enfin, sur le plan linguistique, le Ciluba a longtemps représenté – de par le hasard de la
géographie, le poids de la démographie et l’avantage de la mobilité sociale – le parler
véhiculaire le plus répandu de tout le Kasaï, en plus du rôle de langue d’enseignement et
de culture.
Au cours du temps, toutes ces réalités et représentations ont façonné du Kasaï une image
verrouillée sur l’identité Luba, faisant que tous les Kasaïens se reconnaissent plus ou
moins dans cette identité – ou, à tout le moins, se sentent contraints à se présenter sous
celle-ci, surtout à l’extérieur du Kasaï.
L’indépendance du pays et le drame de Luluabourg en 1959-60 sont donc loin d’avoir
évacué ces réalités et représentations. À ceci près que, dans les méandres des pogroms et
vendetta au cours des guerres civiles perlées ayant endeuillé le Kasaï, des millions de
Kasaïens ont quitté Luluabourg, Bakwanga et Kananga vers les divers terroirs d’origine.
En même temps, des revendications sont apparues en faveur du démembrement de
l’espace kasaïen en plusieurs provinces. Les provinces suivantes ont été proclamées
(entre 1960 et 1966), certaines ayant même été reconnues par la constitution du 2 août
1964 : Luluabourg, Unité Kasaïenne, Sankuru, Sud-Kasaï, Lomami, et la province du
Midi. Elles ont eu, comme chefs-lieux respectifs, les chefs-lieux des territoires de
Luluabourg, Tshikapa, Lusambo, Bakwanga, Kabinda et Mwene-Ditu.
Parallèlement, dans toutes ces agglomérations, un mouvement culturel s’est dessiné dans
le sens du rejet de la commune identité collée au Kasaï. Les élites politiques des divers
horizons kasaïens ont engagé, à armes égales, une compétition serrée en faveur de la
représentation de leurs terroirs, et pour la prise en compte de leurs spécificités et de leurs
aspirations.
Comparée au reste du pays, la terre du Kasaï a vécu une rare période de turbulences
géopolitiques, sociales et culturelles. Méfiance, haines tenaces, conflits armés,
suspicions, migrations forcées, assassinats, …
Cependant, tout n’a pas été négatif. L’éveil à l’importance de l’alphabétisation et de
l’instruction s’est généralisé à tous les terroirs du Kasaï. On en ressent aujourd’hui, plus
d’un tiers de siècle après, un bienfait qui n’a pas manqué de renforcer la considération
envers la terre kasaïenne et qui, demain, peut constituer – dans un espace kasaïen plus
réfléchi, mieux restructuré et mieux assumé – un précieux atout vers une solidarité plus
équilibrée et un progrès plus rapide.
De 1965 à ce jour, le coup de barre totalitaire et les velléités centralisatrices des régimes
de Mobutu et de Kabila ont contenu ce processus d’émiettement et de décentralisation.
Ce processus, en effet, a été grossièrement et hâtivement assimilé aux réflexes
d’anarchie, sinon aux relents sécessionnistes. Le découpage a été supprimé sur le
territoire congolais. Il l’a été avec d’autant plus de facilité que, de l’avis unanime, les
ressources ont manquaient cruellement, pour construire partout un minimum
d’infrastructures, et même déjà pour faire tourner les nouvelles administrations. Les
espoirs que les populations, çà et là, avaient placés dans le découpage ont fini par être
déçus. À cette exception près : la province du Sud-Kasaï a survécu – et s’est même
élargie – adossée à la MIBA et à l’exploitation artisanale du diamant. Surtout, elle était
soutenue par l’énergie du désespoir qui habitait les populations Luba, particulièrement
marquées par les affres des guerres civiles, notamment à Luluabourg et au Katanga.
Notons également que cette même guerre, la province rebelle du Sud-Kasaï (août 1960 –
septembre 1962) ne s’était pas privée de l’imposer à certains peuples frères limitrophes
(fin 1960), avant de la retourner contre elle-même (1963-64).
La perspective actuelle de redécoupage du pays en petites entités provinciales peut,
certes, faire frémir les congolais porteurs de cette mémoire collective. Mais, en réalité,
elle fait trépigner d’enthousiasme tous les coins et recoins du même Kasaï.
En effet, un rêve de conquête est porté par tous les peuples du Kasaï. Ils désirent chacun
devenir le pivot identitaire et hégémonique de quelque province (syndrome yougoslave!),
et couvrir ainsi, de leurs étiquettes et de leurs totems, le visage de l’une ou l’autre entité
provinciale. Ils désirent tous détenir l’essentiel du pouvoir de distribuer postes
administratifs et prébendes économiques. Du moins, c’est le rêve secret des élites de
chaque coin.
Joutes oratoires, tiraillements et empoignades ont aujourd’hui libre cours. Par leurs élites
interposées, déjà Tshikapa croise le fer avec Mweka, pour la prérogative d’abriter le chef-
lieu de la nouvelle province du Kasaï. Lodja et Lusambo sont aux prises pour le chef-lieu
de la province du Sankuru. Entre Ngandajika, Mwene-Ditu et Kabinda, c’est une
véritable veillée d’armes pour « l’honneur » d’abriter le chef-lieu de la province de
Lomami. Compétition normale ? Sans nul doute, mais pourvu que ce soit dans un pays
normal ! C’est un sérieux risque de dérapage dans un pays aussi mal préparé – mais
également aussi mal parti – que le Congo-Kinshasa.
On souffre partout de faim et de dénuements. Mais on sait aujourd’hui derrière quels
lièvres les populations est-kasaïennes seront occupées à courir, au moins pendant une
bonne moitié de la prochaine décennie ! La misère a donc tout le loisir de continuer à
creuser son sinistre sillon dans la chair et dans les cœurs. L’heure est donc au partage des
fiefs, à l’essaimage des étiquettes identitaires, et à la quête du pouvoir de régner
durablement sur des plages de misère. Avec leurs responsables politiques en tête, les
adultes de tous les terroirs kasaïens en ont décidé ainsi. Les jeunes qui rêvent, quant à
eux, d’un avenir radieux, n’ont qu’à attendre, en puisant dans leur maigre réserve de
patience !
La prégnance politique du fait identitaire en Afrique sub-saharienne est bien mise en
lumière par l’exemple congolais. A l’évidence, l’ethnie est ici fort présente, et coriace.
C’est d’ailleurs ce qu’a confirmé la rafale des élections de 2006 : si les présidentielles –
en donnant la victoire à Joseph Kabila, face à Jean-Pierre Bemba – ont scellé une sorte de
revanche du grand Est swahiliphone sur un grand Ouest plutôt lingalaphone, les
législatives et les sénatoriales (sans parler des provinciales), comme la composition du
gouvernement central, ont partout consacré un dosage dit « géopolitique », d’ailleurs bien
ancré dans les mœurs. Faut-il pour autant se résigner à voir ces ethnicités emboîtées finir
par occulter l’État, dont les gens ont pourtant ici grand besoin, comme de souveraineté,
de démocratie citoyenne, de droits de l’homme, de développement ? Pour résoudre
l’équation, et le modèle « jacobin » – celui de Lumumba, et même plus tard de Mobutu –
ayant échoué ici comme souvent ailleurs, il peut être opportun d’en rechercher un autre
moins contraire au vécu des Congolais, plus « Co sociatif » en quelque sorte. Comment
faire de cette ethnie ambivalente, sans cesse recomposée, trop souvent dévoyée aussi en
un « tribalisme » manipulateur, un projet enfin positif ? Le débat est lancé depuis pas mal
de temps, suscitant intérêt et réflexion chez divers chercheurs africains, y compris
congolais (Tshiyembe, 2001). Un début de réponse réside peut-être dans les modèles
d’inspiration « ethno-fédérale » d’ores et déjà mis en place par de vastes États tels le
Nigeria ou l’Ethiopie, ou moins ouvertement l’Afrique du Sud, et qui tâchent d’y
fonctionner, faute apparemment de solutions plus crédibles. Au Congo même, la
Conférence nationale avait proposé en 1992 de faire du pays une république fédérale,
dont le principe (sinon la lettre) transparaît dans la Constitution actuelle. L’immense pays
désarticulé avait-il un autre choix ? Quoi qu’il en soit, l’essentiel reste à faire : trouver,
pour réussir une régionalisation utile, qui construise et non déconstruise, des formules
viables, et surtout durables. Elles ne pourront passer que par un profond réaménagement
du territoire (Bruneau, 1991 ; Pourtier, 2008), et cette route-là sera longue et difficile.
Carte du Kasai Occidental
Les autres Ethnies et Tribus du Congo
Grâce à l'étude du Professeur Léon de Saint Moulin, intitulée : Conscience nationale et
identités ethniques - Contribution à une culture de la paix(CEPAS) nous voudrions
procéder à l’inventaire de toutes les ethnies, regroupées au sein de HUIT cartes ethniques
régionales.
Notre but est de représenter nos tribus sur les différentes cartes ethniques. Nous nous
passerons des autres aspects de cette étude. [Mbokamosika]
DEFINTION DE L’ETHNIE.
Selon cette étude, « ethnie et tribu sont des termes souvent employés l’un pour l’autre,
dans le sens approximatif d’un ensemble de personnes qui se reconnaissent issues d’un
même ancêtre ou qui ont en commun un patrimoine comportant un mode de vie, une
langue et un territoire (parfois symbolique) »
L’EXISTENCE DE GRANDES UNITES ETHNIQUES
Cette étude démontre que le Congo n’était pas un émiettement de 450 tribus, mais qu’il
n'en comprendrait que 250 seulement regroupées, d’après Malcolm Guthrie au sein de
huit familles linguistiques.
En outre ce travail distingue seulement 212 langues en République Démocratique du
Congo, dont 34 non bantoues, oubanguiennes ou nilo-sahariennes.
PRESENTATION DE LA CARTE ETHNIQUE PAR REGION
Les cartes ethniques seront présentées dans l’ordre suivant : Le Bas-Congo ; Le Kwango-
Kasaï ; la Cuvette-centrale et l’Ubangi ; L’Uele-Ituri ; Le Kivu-Maniema ; le Nord-
Katanga ; et Le sud- Katanga.
1. La Carte ethnique du Bas-Congo. (Carte 1, fig. 3)
L’ensemble du Bas-Congo est occupé par l’ethnie Kongo, jadis réunie dans le royaume
du même nom.
La carte indique 16 noms de tribus ci-après : Yombe ; Kakongo ; Sundi ; Solongo ;
Manianga ; Ndibu ; Mboma ; Mbata ; Zombo ; Mpangu ; Ntandu ; Mbeko ; Dikidiki ;
Teke ; Mfinu ; Mbisa.
La carte ne mentionne pas les Vungana, les Bwende, les Lula et les Humbu qui ne se
rencontrent que mêlés à d’autres populations. Elle ne reprend non plus les Besi Ngombe
et les Balenfu que les autorités politiques et les ethnologues ont refusé de reconnaître,
pour le fait qu’aucun ancêtre commun ne peut leur être assignés et qu’ils n’ont pas
d’identité culturelle pouvant les distinguer de la population environnante, les Ndibu et les
Manianga en l’occurrence.
Comme déjà indiqué, les zones de populations mixtes sont identifiées par des numéros.
La composition de ces zones est détaillée en note. Pour la carte du Bas-Congo :
01 Yombe + Kakongo
09 Manianga + Ndibu 16 Mbeko + Mpangu
02 Yombe + Sundi
10 Ndibu + Mboma
17 Lula + Dikidiki
03 Kakongo + Solongo
11 Mbata + Ndibu
18 Humbu + Dikidiki
04 Yombe + Vungana
12 Mbata + Zombo
19 Teke+Mfinu+Humbu
05 Manianga + Sundi
13 Ndibu + Sundi
20 Teke + Mfinu
06 Bwende + Manianga
14 Mpangu + Ntandu 21 Teke + Humbu
07 Bwende + Manianga + Sundi 15 Lula + Mpangu
22 Humbu + Mbinsa
08 Bwende + Sundi
2. Le Kwango, le Kwilu et le Kasaï Occidental (carte 2,
fig. 5)
Sur cette carte quelques tribus occupent un espace particulièrement vaste : les Yaka ; les
Suku ; les Yans ; les Dzing ; les Mbuund et les Pende ; les Kuba, et les Lulua. On peut y
ajouter, au Kwango : les Soonde et les Ciokwe dont la plus grande partie se trouve au
Katanga, et au Kasaï ; les Leele, les Luntu et les Kete.
Au Kwilu : les Mbala sont une autre grande tribu impNgongoortante par sa population,
mais elle cohabite en de nombreux endroits avec d’autres tribus.
Les autres noms de tribus indiqués sur la carte sont, dans le Kwango : les Holo et les
Lunda ; dans le Kwilu : les Humbu, les hungaan, les Lwer, les Ngul, les Tsong, les Pindi,
les Ngongo, et les Kwese, et dans le district du Kasaï : les Shoowa, les Kete, les Mbagani,
les Lwalwa, les Mbal et les Salampasu. Dans les zones de cohabitation, la carte indique en outre, dans le Kwango : les Humbu,
les Lula, les Tsamba, les Ngongo, les Shinji et les Minungu, et dans le district du Kasaï,
les Wongo et les Dinga.
Composition des zones de cohabitation sur la carte du Kwango-Kasaï Fig.5 ci-contre:
23 Humbu + Yaka
38 Suku+Ngongo+Hungaan+Mbala+Mpindi
53 Suku + Shinji
24 Humbu + Lula
39 Suku+Tsamba+Ngongo+Hungaan+Mbala+Pindi 54 Ciokwe + Lunda
25 Yaka + Tsamba
40 Tsamba + Hungaan + Mbala
55 Ciokwe+Shinji+Lunda
26 Yaka + Ngongo
41 Suku + Mbala
56 Soonde + Pende
27 Yaka + Suku
42 Tsamba + Mbala
57 Lunda + Pende
28 Yaka+Suku+Tsamba
43 Mbala + Kwese
58 Pindi + Pende
29 Ciokwe + Tsamba
44 Mbala + Mbuund
59 Ciokwe + Leele
30 Hungaan+Mbala+Yans
45 Mbala + Pindi
60 Leele + Wongo
31 Hungaan+Ngongo+Mbala+Yans 46 Kwese + Pende
61 Lulua + Luba
32 Yans + Mbala + autres
3.La Cuvette Centrale (carte 3, fig. 6)
La troisième carte couvre les districts du Mai-Ndombe et de la Tshuapa, ainsi qu’une
bonne partie de celui de l’Equateur et de la région Tetela. L’étude révèle que » si l’ethnie
Mongo a une unité linguistique et culturelle incontestée, les subdivisions y sont
nombreuses et peuvent correspondre à des réelles oppositions ».
L’ensemble de la région Mongo est ceinturée d’un trait gras, selon la délimitation du
Centre Equatorial de Bamanya. Les Tetela et les Nkutshu qui appartiennent pourtant à la
même famille linguistique, n’y sont pas inclus et sont considérés comme deux groupes
distincts, selon l’avis du Père Honoré Vinck, qui se distancie en cela du Père Gustave
Hulstaert.
Ainsi au Sud-ouest, la carte indique les groupes de la zone linguistiques B, les Teke,
auxquels sont apparentées les Ngenge, les Tiene et les Nunu, puis le groupe plus ancien
des Mboma et des Sakata, dont on peut distinguer les Tere, et plus au nord, des
populations plus anciennes ayant réussi à sauvegarder leur autonomie : les Mpe, les Dza,
les Tow et les Bobai.
Au Nord-ouest, avec les Ngombe et les Doko, on trouve comme tribus non Mongo les
Bobangi, les Eleku, les Mampoko, les Ndobo, les Loi, les Likila, les Ngele, les Bonjo et
les Jamba.
Parmi les Mongo, selon le Père Hulstaert, il y a de nombreux groupes Ntomba, Kutu et
Nkole.
Les tribus indiquées sont, en citant d’abord les plus étendues, à l’ouest : les Nkundo et les
Ekonda, plus à l’est, les Ntomba de l’entre Lopori-Maringa, les Mbole de la Salonga, les
Bosaka, les Ngando, les Boyela et les Mbole du Lomami, et au sud, les Ndengese et les
Bokala.
La carte indique en outre dans le district du Mai-Ndombe les Sengele, les Bolia, les
Iyembe, les Nkole, les Mbelo, les Mbiliankamba, les Ipanga, les Titu et les Ooli, dans le
district de l’Equateur, les Ntomba du Lac Tumba, les Mpama, les Lusakanyi et les
Baenga plus au nord, et dans le district de la Tshuapa les Boonde, les Bofonge, les
Nsongo, les Ekota, les Lionje, les Bakutu, les Ikongo et les Imona-Mpongo, ainsi qu’un
autre groupe Ooli.
N.B. Sur cette carte, la cohabitation de deux groupes gardant leur autonomie n’apparaît
guère, comme sur les autres cartes ethniques.
4. L’ Ubangi (carte 4, fig 7)
On retrouve sur cette carte des populations de langues non bantoues qui se sont
implantées par vagues successives et ont refoulé vers le sud les tribus bantoues qui s’y
trouvaient auparavant. Ces mouvements ont affecté les Mongo.
On y est encore en milieu de forêt, mais la marque imposante du fleuve allonge sur ses
rives des populations de pêcheurs ou commerçants, les Bobangi, les Ngombe, les Doko,
les Mbuja, les Poto et les Lokole notamment.
Dans la région de la Ngiri, entre l’Ubangi et le Congo, on trouve, outre les groupes déjà
cités sur la carte de la Cuvette centrale les Lobala, les Tanda, les Mboli, les Ngiri, les
Ewaku, les Ndolo, les Lobo, les Makanza, les Ndobo, leBoros Mabembe, les Sengo et les
Motembo. Entre la Mongala et Itimbiri, vers la limite de la Province Orientale on trouve
les Wenza.
A l’est de l’Itimbiri, on retrouve les groupes assez étendus des Binja et des Boa au nord,
des Mbesa et des Topoke au sud du fleuve. On trouve en outre au sud les Lokole et les
lokele et au nord, les Bango, les Hanga, les Benja, les Binza, les Boro, les Angba, les So
(Basoko), les Tungu, les Olombo (Turumbu) et les Mba.
Au niveau des peuples des langues oubanguiennes, les grands groupes sont les Ngbaka,
les Ngbandi et les Zande, parmi lesquels on distingue les Abandiya des Avungara. Le
regroupement des Ngbaka sur le plateau de Gemena aurait été organisé par
l’administration en 1920.
Il faut y ajouter les Mbanja, les Banda, les Furu et les Nzakara. Les Ngombe présents
dans le Nord-Ubangi sont les témoins d’une occupation antérieure de la région par des
bantous.
D’autres groupes enclavés le long de l’Ubangi ont des origines diverses, d’amont en aval,
les Buraka, les Gbanziri, les Ngbaka et les Monjombo.
5. La Province Orientale (carte 5, fig.8)
La Province Orientale (fig.8) reproduit une part de celle de l’Ubangi (fig.7) et souligne
ainsi la continuité qui existe entre les deux, malgré leur division administrative.
Au nord de l’Uele, les Ngbandi, les Zande, les Bangby et les Mayogo appartiennent à la
famille oubanguienne.
Il importe de souligner l’originalité du Haut-Uele et de l’Ituri. On y trouve d’une part
deux nouvelles familles linguistiques, celle des langues nilotiques, représentées en RDC
par les Alur et les Kakwa, auxquelles Jan Vansina joint les Pajulu, et celle dite nilo-
saharienne, qui s’étend autour d’Isiro et jusqu’aux frontières du Soudan et de l’Uganda.
Elle comprend le sous-groupe Mangbetu, qui englobe, outre les mangbetu, les Makere,
les Malele, les Popoi et les Medje, le sous-groupe Mangutu-Mamvu-Lese, le sous-groupe
Logo-Lugbara-Madi-bari et le sous-groupe Lendu.
On y trouve aussi les Lese, les NKumu, les Nyari, considérés comme le premier peuple
bantou de la région, les Hema, les Banya Rwanda, tant Hutu que Tusi.
Au caractère particulièrement complexe du Haut-Uele et de l’Ituri, il faut ajouter le
découpage ethnique en petites unités de la frontière nord-est du pays- on y trouve, outre
les groupes déjà cités, les Mundu, les Keliko, les Ndo Vare, les Ndo Okebo et les
Mabendi, parlant tous des langues de la famille nilo-saharienne.
Les Lombi, formant un groupe enclavé entre les Bali et les Kumu, appartiennent aussi à
la famille nilo-saharienne, de même que les Mvuba, au sud des Lese.
Parmi les langues bantoues d la famille D, il faut ajouter aux Nyari et aux Hema déjà
cités les Budu, les Ndaka, les Mbo, les Bira, les Père et les Amba. Les Lika semblent par
contre apparentés aux Boa et aux Bali de la famille C.
Les Mba en territoire de Banalia et les Dongo en territoire de Faradje sont classés parmi
les langues oubanguiennes.
Composition ethnique des zones de cohabitation : Uele-Ituri
68 Mangbele + Mangbetu + Meje 69 Budu + Lika 70 Balese + Budu
71 Balese + Bira.
6. Les deux Kivu et le Maniema (carte 6, fig.9)
La carte ethnique de Kivu et du Maniema est plus massive. On y repère au premier regard
les Kumu et les Lega, (qui sont parmi les plus anciens peuples du Maniema et du Kivu)
encadrés, au nord-ouest d la carte par d’autres peuples dont les langues appartiennent à la
famille D, les Wagenia, les Lengola, les Metoko et les Songola. Les Langa, les Ngengele
et les Tetela, comme déjà signalé. Au sud et au sud-est, les Binja, les Bangubangu, les
Boyo, les Bembe et les Nyintu font partie de la famille D. Les Bembe ont intégré une
série de populations, dont les Bwari, bien connus par le nom de la presqu’île, Ubwari, où
les Pères blancs ouvrirent leur première mission au Congo en 1880.
Les Shi, représenté en bloc sur la carte est un exemple de fragmentation, dont l’espace est
divisé entre les territoires de Kabare et de Walungu.
Les autres peuples du Kivu parlent des langues qui, comme le kinyrwanda et le kirundi
appartiennent à la famille J des langues bantoues. Ce sont, du nord au sud, les Nande, les
Nyanga, les Hunde, les Havu, les Shi et les Fulero, parmi lesquels se trouvent aussi les
Vira et des Hundi.
En 1927, le gouvernement du Congo se proposa de créer un mouvement massif de
peuplement du Kivu par des Rwandais, mais le projet n’aboutit qu’en 1936 à une action
qui transplanta dans les Gishari, entre Sake et les Lacs Mokotos, dans le territoire de
Masisi, environ 25.000 personnes. L’opération fut suspendue en juin 1945 pour saturation.
(…)
Composition ethnique des zones de cohabitation :
71 Balese + Bira
74 Kalanga + Bangubangu
72 Luba Katanga + Bangubangu
75 Boyo + Bangubangu + Kunda
73 Hemba + Kunda
7.Le Nord-Katanga, Kasaï-Oriental (carte 7. Fig., 11)
En descendant au sud du 4e parallèle, on constate la réapparition des zones de
cohabitation. Il n’est pas exclu que la population s’y est formée par vagues successives
qui se sont superposées.
Sur base d’une série d’indices, les Kete au Kasaï et les Kunda au Katanga sont
unanimement considérés comme des couches les plus anciennes du peuplement.
Les Kete, dont on retrouve des groupes de la région Kuba à celle de Lwalwa et des
Kanyok, auraient été suivis au KTumbwe Kasaï par les Lulua et les Kanyok, puis par les
Bakwa Luntu du territoire de Dimbelenge, dont on retrouve aussi un groupe plus à l’ouest,
et enfin par les Luba du Kasaï. Tous provenaient d’un foyer de population extrêmement
ancien implanté au Katanga.
Au Kasaï Oriental, la carte indique, outre les groupes cités ci-haut, le groupe des Songye,
les Binji, les Mputu et, en cohabitation dans le territoire de Mwene-ditu, les Kanincim,
qui font partie du monde Lunda.
Au Katanga, des groupes importants de Kunda existent tant au nord, dans le territoire de
Kongolo, qu’au sud, dans celui de Kasenga, mais il y en a toute une série d’autres entres
ces deux extrêmes, soit isolés, soit associés à des Hemba, des Bangubangu, des Boyo, des
Luba, des Lumbu
Les Luba Katanga sont le groupe de plus important au Katanga, suivis en bordure du Lac
Tanganyika, par les Tumbwe et les Tabwa, adossées aux Bwile. A l’ouest, les Lunda et
les Kalundwe sont deux autres groupes importants.
On trouve aussi dans la partie orientale les Hemba, célèbres pour la qualité de leurs
sculptures, quelques groupes Yeke.
Composition ethnique des zones de cohabitation :
61 Lulua + Luba
76 Luba Katanga + Kunda 84 Hemba + Boyo
63 Kete + Lulua
77 Hemba + Bangubangu
85 Luba Katanga+Lumbu
66 Luba Katanga + Luba Kasai
78 Bangubangu + Kunda
86 Luba Katanga+Tumbwe
67 Lunda + Kanyok + Kete
79 Tumbwe + Kunda
87 Hemba + Tumbwe
72 Luba Katanga + Bangubangu
80 Tumbwe + Lumbu
88 Tabwa
73 Hemba + Kunda
81 Boyo+Bangubangu+Lumbu+Kunda 89 Tabwa + Tumbwe
74 Kalanga + Bangubangu
82 Luba Katanga + Boyo
90 Bwile + Kunda
75 Boyo + Bangubangu + Kunda
83 Luba Katanga + Songye
91 Hemba + Lumbu
Bwile
73 Hemba + Kunda
8. Le Sud-Katanga (carte 8. Fig.12)
L’espace représenté sur cette carte est celui de la zone cuprifère. Il est aussi celui de
l’extension Lunda, qui introduisit le système de titres de parenté positionnelle jusqu’au
royaume de Kazembe, sur la rive droite du Luapula en Zambie, et jusqu’au Kwango vers
l’ouest.
Les compétitions pour le contrôle de cette zone furent intenses entre Luba et Lunda. Les
Ciokwe étaient, lors de l’arrivée des Européens, de grands caravaniers qui reliaient
l’Angola au Kasaï et au Katanga.
Selon la carte on a à l’ouest, les Lwena, les Ndembo et les Minungu. La partie orientale
est plus complexe. On y retrouve, du nord au sud, les Zela, les Lomotwa, les Sanga, les
Kaonde, les Lemba et les Lamba, comme les groupes les plus étendus, avec en outre les
Bemba, les Shila, les Nwenshi, les Lembwe, les Ngoma, les Seba, les Aushi et les Lala,
qui occupent aussi des territoires plus vastes que de nombreuses tribus dans la province.
Composition ethnique des zones de cohabitation:
91 Ciokwe+Lunda
95 Luba Katanga+Lunda+Ndembo 99 Kaonde+Lamba+Lemba
92 Luba Katanga+Lunda+Ciokwe 96 Luba Katanga + Lunda
100 Lamba + autres
93 Lunda + Ndembo
97 Kaonde + Lunda
101 Yeke + Kunda
94 Luba Katanga+Ndembo
98 Kaonde + Sanga
102 Bemba+Luba Katanga+Kunda
* * *
Carte ethnique ancienne et le Congo à la fin du XIXème siècle.
Carte à laquelle il faut ajouter la population d’origine : les Pygmées qui ne sont ni Hamites ou Nilotiques ou Soudanaises.
assemblage historique fait par Victor Rosez
avec textes et commentaires personnels
ainsi que des sources d'origine inconnues et
le récit de Jan Ansina -(qui est un assemblage
de sources diverses aussi)
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