il écrivit sa vie- tipi. final cut
Post on 03-Feb-2016
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Alors qu’il allait encore une fois faire demi-‐ tour. Il ne s’arrêta pas. Le demi-‐tour qu’il aurait du réenclencher ne se fit pas. Au début il s‘était seulement trompé de chemin. Il avait décidé de continuer sur un sentier, et d’enfanter son propre chemin. Il cessait d’être lui pour devenir autre chose. Il ne savait pas bien quoi. Il savait seulement que pour l’être il fallait marcher. C’était là sa raison d ‘être. Marcher. Seulement marcher. Être au monde en mouvement. Traverser montagne, colline et ruisseau pour atterrir là. Dans cette ville urbaine où il décida de faire demi-‐tour et d’engendrer le système des boucles infinies. Comme tant d’autres avant lui et comme d’autres après lui. Voilà son lieu, sa place, sa ville, ses bouches de métro, ses murs, ses rampes. Il était comme un fantomatique personnage de dessin se mouvant dans un décor immobile. Une silhouette hors de contexte dans un croquis des flux de la rue. Il était pourtant là, présent, lui, dans les rues de la ville alors que tous les autres étaient absents dans leurs pensées. Il était le seul qui croyait en ce qu’il faisait, le seul qui a traversé vraiment ces rues. Bien qu’il n’ait été le seul a y être présent. Aujourd’hui la rue, la chaussée, le chemin étaient son territoire. Autant d’endroits qui ont marqué sa vie comme il a marqué ces endroits, ces lieux, ces places. Il était ce que la rue avait de plus sincère, de plus fidèle à sa raison (d’être). Aujourd’hui c’est un homme qui ressemble à l’extérieur. Il s’était simplement trompé de chemin. Un jour, une fois. Alors qu’il était comme eux. Le même parmi les autres. Il avait fait ce choix qui l’avait amené à ce rond point, qui quelques années plus tôt l’avait séduit assez pour qu’il l’intègre à jamais à son parcours. Pourtant aujourd’hui c’était différent. Aujourd’hui il se posait des questions. Il remettait en doute toute sa démarche depuis cette erreur qui l’avait amené à prendre un autre chemin. Pourquoi aujourd’hui ? Pourquoi maintenant ? Ça ce sont nos questions. Les siennes étaient pourquoi ? Comment ? Dans quel but faire demi tour ? Voilà des années que sa vie avait suivi ce choix, partant d’une séparation de deux chemins anodins. Il s’en souvenait. Il était encore jeune. Il était le même parmi les autres. Et ce chemin l’avait convaincu d’être autres parmi les mêmes. Grande route pour petit chemin. Il y avait quelque chose de pictural, pittoresque dans ce chemin. Il s’en souvient à la manière d’un spectateur qui le voit, lui, à travers les yeux de l’esprit, s’avancer
vers ce qui fera la seconde partie de sa vie. Parce que, comme on dit, il était quelqu’un avant. Il était installé dans un monde. Médecin d’un bourg. Père d’enfants. Mari de femme. Fils de parents. Tout vous dis je, tout. Cela lui revient comme un flash. Pourquoi n’ y avait il plus pensé jusqu’ à maintenant. Toujours debout, immobile, au seuil du rond point, immergé dans le bruit des voitures, et le passage des passants. Devant ce café ou il était passé dix fois, cent fois, mille fois. Il n’aura fallu que d’une hirondelle pour que cela cesse. Pour qu’il se redécouvre. Cela ne tenait donc qu’à cela. Qu’à un coup de vent un peu plus fort qu’à la normal, qu’à un rayon de soleil plus frappant. Mais comment ? Le regard fixé sur l’au delà, il était planté. Alors que tout ce qu’il avait dépassé le rattrapait. Les habitants de ces murs bien sûr, mais aussi sa vie qui lui revenait. Qui l’avait rattrapé. Toutes ces années vécues comme un interstice. Était-‐ce cela la raison de sa marche, seulement ça ? La fuite. Pourquoi maintenant, pourquoi a-‐t-‐elle fallu qu’elle le rejoigne maintenant alors qu’il est à l’aube d’un nouveau cycle. Comment a-‐t-‐elle pu le rattraper, cette vie qu’il ne connaît plus. La souffrance lui revient comme un vent de derrière. Ses cheveux et sa barbe poussés comme un rideau de perle se rattache à son visage marqué de ses yeux profonds qui se mouillent. On y retrouve l’homme de la mer soufflé par les vents, immobile par sa stature, dans la brume. Lui revient des tableaux, des images, des peintures, et toutes peignent le même homme, seul dans les champs. Sur les chemins qui dessinent les artères de ces champs. Avait-‐il voulu reproduire ce schéma de l’homme seul sur la terre tassée des chemins. Découvrir quel était cet autre chemin. Donner une réponse au moment figé de ces tableaux qu’il se remémorait. Il se remit à marcher, mais à la troisième sortie, il ne s’engagea pas. Sa démarche avait quelque chose de différent. Il avait sauté une ligne, pris un nouveau chemin. Il avait répondu à la question qu’il s‘était posé quelques années plus tôt. Il était allé au bout et en était satisfait. Il marchait désormais, la bobine brisée, le pas sans attache. Découvrir pour la première fois l’extérieur de sa caverne. Il fît parti des âmes mouvantes et cycliques de nos villes. Elles ont toutes un semblant de similarité et un semblant de différence et pourtant elles restent au banc de la conscience publique. Sans début ni fin elles reproduisent la formation d’une bobine comme pour représenter ce que nous faisons. Lui a brisé la bobine, il marche désormais sans attache.
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