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Intérêt de l’injection intra fissuraire de plasma enrichi en plaquettes autologue dans la
tendinopathie latérale chronique fissuraire du coude
CAILLIEZ H.(1),HUOT P.(2), MOINARD M.(2), MEYER P.(2), PESQUER L.(2), MOREAU-DURIEUX M.(2), SILVESTRE A.(2)
(1) CHU Bordeaux (2) Clinique du Sport, Bordeaux-Mérignac
Généralités
• L’épicondylite latérale ou « tennis elbow » est une pathologie douloureuse de l’enthèse des tendons extenseurs des doigts et du poignet au niveau du coude
• Avec une incidence annuelle de 1 à 3% dans la population générale, c’est la principale cause d’épicondylalgie latérale
• Comme la plupart des tendinopathies, elle survient généralement durant les 4èmes et 5èmes décennies sans prédominance de sexe
• Elle est secondaire à un défaut de cicatrisation du tendon du court extenseur radial du carpe essentiellement après des microtraumatismes répétés
. .
LERC
CERC
ECD
EUC
TCE
Anatomie
Walz DM., Radiographics 2010.
Les muscles extenseurs des doigts et du poignet ont une enthèse commune sur l’épicondyle latérale: le tendon conjoint des muscles épicondyliens latéraux (TCE) - long extenseur radial du carpe (LERC) - court extenseur radial du carpe (CERC) - extenseur commun des doigts (ECD) - extenseur ulnaire du carpe (EUC)
Clinique
• Le principal symptôme est une douleur latérale du coude qui prédomine le matin et après une flexion prolongée de l’articulation
• A l’examen, la palpation de l’origine du tendon conjoint des muscles épicondyliens latéraux est douloureuse
• Il y a une diminution de la force de serrage, de supination et d’extension du poignet
• Les manœuvres de sensibilisation comme l’extension du majeur contre résistance peuvent aider au diagnostic
. .
Anatomo-pathologie (1)
• Même si les termes épicondylite ou tendinite sont habituellement utilisés, les études histo-pathologiques ont montré qu’il ne s’agit en réalité pas d’une atteinte inflammatoire
• En effet, il n’y a pas d’augmentation du nombre de cellules inflammatoires dans les prélèvements réalisés sur les tendons pathologiques
• Il semble s’agir plutôt d’un processus dégénératif caractérisé en anatomo-
pathologie par la présence d’une « hyperplasie angiofibroblastique » avec une population dense de fibroblastes, une hyperplasie vasculaire et une désorganisation des fibres collagènes
• Il serait secondaire à un défaut de cicatrisation du tendon du court extenseur radial du carpe essentiellement après des microtraumatismes répétés
• Le terme de tendinose apparaît donc plus exacte que celui de tendinite
Anatomo-pathologie (2) • Tendon normal : bandes
homogènes de collagène
• Tendinose du CERC :
hypercellularité mais absence d’inflammation (absence de leucocytes polymorphes/lymphocytes/macrophages)
• Processus dégénératif :
« hyperplasie angiofibroblastique » : population dense de fibroblastes, hyperplasie vasculaire, désorganisation des fibres collagène
Kraushaar BS, J Bone Joint Surg Am 1999.
Imagerie (1) Indications :
- résistance au traitement médical
- symptomatologie atypique
- exclure diagnostics différentiels
- évaluation de la sévérité de l’atteinte tendineuse
- bilan pré-opératoire
• Radiographies • Normales +++
• Calcifications des parties molles en regard de l’épicondyle latérale
• Enthésophyte
• Irrégularité de la corticale de l’épicondyle latéral
• Echographie • Épaississement du tendon
• Calcifications intra tendineuses
• Irrégularité corticale osseuse adjacente
• Plage focale hypoéchogène/hétérogénéité tendineuse diffuse
Imagerie (2)
• IRM • Tendinose : plage de signal intermédiaire sur les séquences pondérées T1 et T2
• +/- épaississement du tendon
• +/- fissures transfixiantes ou non
épaississement du tendon conjoint des muscles épicondyliens latéraux en hypersignal sur les séquences T2 coronale (A) et axiale (B)
désinsertion du plan profond du tendon conjoint des muscles épicondyliens latéraux sur les séquences coronale T2 (A), coronale T1 (B) et axiale T2 (C)
Prise en charge (1)
• Cette tendinose du coude est une pathologie très fréquente qui cède le plus fréquemment avec un traitement non chirurgical
• Le traitement conservateur initial comprend l’application de glace, le repos, les anti-inflammatoires non stéroïdiens per os, les infiltrations de corticoïdes, l’immobilisation, la kinésithérapie, les ultrasons et depuis récemment le laser
• Le traitement conservateur est efficace dans 70-80% des cas à un an
• Il a été montré cependant que si les injections de corticoïdes induisaient une diminution de la douleur à court terme, il n’a pas été prouvé qu’elles favorisaient la cicatrisation
Prise en charge (2) • Même si la plupart des patients avec un « tennis elbow » répondent au
traitement conservateur, entre 5 et 10% développent une symptomatologie chronique
• Ainsi, la chirurgie est souvent réalisée s’il n’y a pas de réponse clinique après 3 à 6 mois de traitement conservateur
• Différentes techniques chirurgicales existent avec des techniques
« ouvertes » et sous arthroscopie incluant une dissection, une libération et un débridage du tendon lésé
• Bien que les études rapportent généralement des bons résultats, la chirurgie est encore considérée comme un « dernier recourt ». C’est pourquoi, quand les traitements conservateurs échouent, les patients sont intéressés par des solutions alternatives au traitement chirurgical
Problématique
• Beaucoup des traitements conservateurs ont été utilisés alors que leur efficacité n’a pas été prouvée : ils visent principalement à diminuer l’inflammation alors que celle-ci n’existe en réalité pas dans la tendinose
• Certaines études ont non seulement remis en cause l’efficacité de ces traitements mais ont aussi suggéré qu’ils pourraient avoir des effets délétères, notamment les injections de corticoïdes qui induisent une atrophie et des remaniements structuraux irréversibles du tendon
Almekinders LC et al. Am J Sports Med 1995
Labelle H et al. J Bone Joint Surg Br 1992
Jobe FW et al. J Am Acad Orthop Surg 1994
Problématique
• Récemment, les “injections de sang autologue” ont montré leur efficacité dans les épicondylites latérales sur le moyen et long terme
Edwards SG.et al., J Hand Surg Am 2003
• L’hypothèse physiopathologique est que le TGF β (transforming growth factor β) et le bFGF ( basic fibroblast growth factor) agissent comme des médiateurs humoraux pour déclencher la cascade de la cicatrisation
• Ces facteurs de croissance favorisent le recrutement des cellules souches, augmentent la vascularisation locale et stimulent directement la production de collagène par les fibroblastes du tendon
Problématique
• Pourquoi utiliser du plasma enrichi en plaquettes (PRP) plutôt que du sang autologue ?
• Le sang se compose du plasma, des globules rouges, des globules blancs et des plaquettes qui contiennent les facteurs de coagulation et de croissance impliqués dans la cicatrisation
• En général, un échantillon de sang contient 93% de GR, 6% de plaquettes et 1% de GB. Le rationnel pour l’utilisation du PRP est d’inverser ces proportions en diminuant le taux de GR qui sont peu utiles pour la cicatrisation à 5% et en augmentant le taux de plaquettes à 94% afin d’accélérer cette cicatrisation
Objectifs de l’étude Evaluer de façon prospective les effets cliniques et échographiques des injections de PRP autologue dans le traitement des tendinopathies latérales chroniques fissuraires du coude
Evaluation d’une nouvelle méthode d’administration du PRP par injection directement dans la fissure tendineuse sous guidage échographique
Matériel et méthode : population
• Etude prospective
• 26 patients : 9 hommes, 17 femmes, moyenne d’âge de 46,7 ans (28- 71 ans)
• Consentement éclairé
Critères d’inclusion
• Tendinopathie latérale coude › 6 mois malgré traitement conservateur
• Confirmée par l’échographie
• Fissure intra tendineuse visualisée en échographie
Critères d’exclusion
• Infiltration corticoïdes ≤ 3mois
• Antécédents de chirurgie du tendon conjoint des épicondyiens latéraux
• Autres causes de douleurs du coude
• Contre-indications à l’injection de PRP (troubles de la coagulation, anti agrégeant plaquettaire)
Matériel et méthode : évaluation clinique
• Pour évaluer la symptomatologie clinique, nous avons utilisé le questionnaire quick DASH (DASH : Disabilities of the Arm, Shoulder, and Hand) pour l’incapacité et les symptômes et l’EVS (échelle verbale simple) pour la douleur
• Les critères cliniques étaient évalués lors de l’inclusion des patients puis 4 semaines (EVS et quick DASH) et 3 mois (uniquement l’EVS) après l’injection de PRP
• Le critère d’efficacité clinique de l’injection de PRP était une réduction de 25% du score EVS ou du score quick DASH
Matériel et méthode : évaluation échographique
• Toutes les échographies et les injections de PRP ont été réalisées par un seul radiologue spécialisé en imagerie ostéo-articulaire
• L’échographe était un Philips IU22 équipé d’une sonde linéaire haute fréquence L17-5
• L’origine du tendon conjoint des muscles épicondyliens latéraux a été étudiée à la fois dans le plan transverse et le plan longitudinal afin de confirmer les anomalies détectées
• Le diagnostic de tendinose a été basé sur la présence de 3 critères échographiques : la présence de zones de remaniements architecturaux, de fissures ou ruptures intra tendineuses et la néovascularisation
Matériel et méthode : évaluation échographique
• Les fissures intra tendineuses étaient identifiées comme des plages anéchogènes sans fibres intactes retrouvées en leur sein ou comme des plages hypoéchogène d’interruption des fibres
• Le nombre et la taille des fissures dans les 2 plans étaient notés
• Enfin, la néovascularisation était recherchée en montant la sensibilité du Doppler couleur au maximum puis en diminuant le gain. Une estimation du pourcentage du maximum de pixels colorés dans l’origine du tendon était réalisée avec un score de 0 à 2
patient de 35 ans, tendinopathie latérale chronique du coude droit avec fissure et hyperhémie en
doppler gradé à 2
Evaluation clinique et échographique
• Avant injection PRP – Douleur (EVS)
– Quick DASH
– échographie
• À 1 mois – Douleur (EVS)
– Quick DASH
– échographie
• À 3 mois – Douleur (EVS)
Critères échographiques : - nombre fissure - taille dans les 2 plans - hyperhémie en doppler gradée de 0 à 2
Efficacité clinique : diminution EVS ou quick DASH›25
Peerbooms JC . Am J Sports Med;2010
Matériel et méthode : préparation du PRP
• Les plaquettes du patient étaient collectées grâce au système Thermo Scientific CL10
• Environ 30 à 60 ml de sang veineux étaient prélevés de façon aseptique sur le bras non atteint
• Le sang était ensuite placé dans un tube contenant du citrate comme anticoagulant. Pour isoler le PRP de ce petit volume de sang anti coagulé, il était centrifugé pendant 15 minutes à 3200 tours par minute. Ainsi le sang était séparé en plasma pauvre en plaquettes, globules rouges et PRP. En fonction de la quantité de sang prélevée initialement, il y avait environ 3 à 6 ml de PRP disponible. Puis celui-ci est amené au pH physiologique par adjonction bicarbonate de sodium à 8,4%. Aucun agent activateur n’était utilisé
Matériel et méthode : préparation du PRP
• Le concentré plaquettaire était ensuite apporté en main propre par le biologiste au radiologue qui allait réaliser l’injection (traçabilité)
• La durée totale à partir du prélèvement sanguin jusqu’à l’injection au patient était de moins de 30 minutes
Matériel et méthode : injection de PRP
• Sous asepsie stricte et guidage échographique avec une sonde linéaire compacte large bande haute fréquence L15-710, 3 ml de xylocaïne à 1% étaient infiltrés dans les plans cutanés et sous cutanés en regard de la zone de tendinose sans injection intra tendineuse (risque d’interaction et d’inhibition du PRP)
• Après une durée de temps suffisante pour que l’anesthésie puisse être efficace, l’extrémité de l’aiguille était placée dans la fissure tendineuse. La seringue d’anesthésiant était ensuite retirée de l’aiguille et remplacée par la seringue de PRP. Puis le PRP était injecté doucement dans la fissure
Matériel et méthode : injection de PRP
• Après la procédure, les patients étaient renvoyés à domicile avec une attelle d’immobilisation du poignet pour une durée de 4 semaines
• Il leur était conseillé en cas de douleur de glacer la zone douloureuse et de prendre des antalgiques simples de type paracétamol mais pas d’anti inflammatoires non stéroïdiens
• La kinésithérapie n’était commencée qu’après la première échographie de contrôle à 1 mois
Résultats : clinique : EVS à 1 mois
Amélioration significative de la douleur 1 mois après l’injection de PRP (p≤0,05)
Résultats : clinique : EVS à 3 mois
Amélioration significative de la douleur 3 mois après l’injection de PRP (p≤0,05)
Résultats : clinique : quick DASH
Au total : Efficacité clinique chez 62% des patients à 1mois et 77% à 3 mois Diminution significative de l’EVS (p‹0,05) et du quick DASH ((p‹0,05) à 1 mois et de l’EVS à 3 mois (p‹0,05)
Amélioration significative de la fonction 1 mois après l’injection de PRP (p≤0,05)
Résultats : échographie : taille de la fissure
Parmi les 9 patients chez lesquels la fissure était encore visualisée sur l’échographie réalisée 1 mois après l’injection de PRP: - 6 présentaient les critères cliniques d’efficacité du traitement lors de la consultation de premier mois et 6 lors de la consultation à 3 mois - 5 n’avaient plus de fissure visualisée sur l’échographie réalisée 2 mois après l’injection
Absence de corrélation clinique/persistance fissure
Résultats : échographie : hyperhémie
Parmi les 14 patients pour lesquels il persistait une hyperhémie, 10 avaient une amélioration significative de leur symptomatologie à 1 mois
Absence de corrélation clinique/hyperhémie
Patient 41 ans
• Échographie M0
• Échographie M1
Tendinopathie latérale du coude droit avec fissure 3x3 mm et hyperhémie
Disparition de la fissure et régression de l’hyperhémie
Discussion (1)
• Aucune complication • lors de la procédure : absence de complications
hémorragiques, allergiques
• lors du suivi des patients, notamment pas d’infection, de rupture tendineuse ou de lésion nerveuse
• quelques patients ont cependant mentionné une exacerbation de la douleur durant les deux jours suivant l’injection cependant bien soulagée par les antalgiques simples
Discussion (2) • Il s’agit d’une nouvelle méthode d’injection: injection du PRP
directement dans la fissure tendineuse sous guidage échographique
• Efficacité clinique chez 77% des patients à 3 mois
• Limites de l’étude • Pas de sujets témoins
• Suivi court (3mois)
Discussion (3)
• Pas de corrélation entre la persistance d’anomalies échographiques et la symptomatologie douloureuse – Ces résultats sont concordants avec ceux de Connell et al. qui
mentionnaient que la persistance d’anomalies tendineuses chez de nombreux patients asymptomatiques
Skeletal Radiol 2006
• Diminution de l’hyperhémie en doppler chez seulement 27%
des patients – En effet, de même qu’il ne semblait pas exister de corrélation
entre l’importance de l’hyperhémie et l’intensité de la douleur avant traitement, il ne semblait pas exister de corrélation entre la persistance d’une hyperhémie en doppler et la persistance des symptômes après traitement
– Ces résultats pourraient aussi être expliqués par le caractère précoce du contrôle échographique dans notre étude. En effet, Connell et al. retrouvaient sur des échographies réalisées 6 mois après traitement une diminution significative de l’hyper vascularisation
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