les ceintures de poésie - wordpress.com
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Prénom :
Les ceintures de poésie
Date et signature Date et signature
Les
cein
ture
s
8. ro
uge Je récite une poésie de plus de 120 mots.
4. ve
rte Je récite une poésie de moins de 80 mots.
1 2 3
1 2 3
7. no
ire
Je récite une poésie de moins de 120 mots.
3. or
ange
Je récite une poésie de moins de 70 mots.
1 2 3
1 2 3
6. m
arro
n Je récite une poésie de moins de 110 mots.
2. ja
une Je récite une poésie de moins de 60 mots.
1 2 3
1 2 3
5. ble
ue Je récite une poésie de moins de 90 mots.
1. b
lanc
he
Je récite une poésie de moins de 50 mots.
1 2 3
1 2 3
Les compétences des programmes 2020 de cycle 3 mises en jeu pour les ceintures de poésie
Com
pét
ences
Langage oral : Parler en prenant en compte son auditoire.
Attendu de fin de cycle 3 : Dire de mémoire un texte à haute voix.
1) mémoriser des textes (titre, texte, auteur) ; NA PA AR AC
Utiliser les techniques de mise en voix des textes littéraires (poésie).
2) maîtrise du débit, du volume de la voix, du souffle, (vitesse, volume, respiration). NA PA AR AC
3) travail sur la communication non verbale (regard, posture du corps, gestuelle, mimiques) NA PA AR AC
Copier ou transcrire, dans une écriture lisible, un texte d’une dizaine de lignes en respectant la mise en page, la
ponctuation, l’orthographe et en soignant la présentation ;
Ecriture : Écrire à la main de manière fluide et efficace. Maîtriser les bases de l’écriture au clavier.
4) Développer la rapidité et l’efficacité de la copie en respectant la mise en page d’écrits
variés (copie) ; NA PA AR AC
Arts plastiques : La représentation plastique et les dispositifs de présentation.
5) Etre capable d’utiliser : la narration visuelle : en réalisant des compositions plastiques,
en deux et en trois dimensions, à des fins de récit ou de témoignage (dessin). NA PA AR AC
Langage oral : Adopter une attitude critique par rapport à son propos.
6) Etre capable d’autocorrection après écoute (reformulation). NA PA AR AC
Les règles a) Je dois choisir une poésie.
b) Je recopie la poésie. La qualité de l’écriture et la mise en page sont évaluées.
Je dois écrire le titre de la poésie et le nom de l’auteur en noir.
Je respecte la mise en page du texte.
Je dois sauter deux lignes après le titre et avant le nom de l’auteur.
Je dois sauter des lignes pour les ceintures blanche, jaune et orange.
c) J’apprends la poésie par cœur. Le maitre peut te conseiller sur les méthodes qui peuvent t’aider.
d) J’illustre la poésie pour témoigner de ma compréhension de celle-ci.
e) Je récite ma poésie devant la classe en l’interprétant. Le maitre et tes camarades peuvent te conseiller.
f) J’écoute les appréciations de mes camarades et l’évaluation du maitre puis j’exprime ce que j’ai compris.
g) Lorsque j’écoute un camarade réciter une poésie, je ne fais rien d’autre et je prépare une remarque positive « ce qu’il a
très bien réussi » et une remarque constructive « ce qu’il doit encore améliorer ». Si je n’ai trouvé qu’une des deux
idées, je ne lève pas la main. Ces compétences sont également évaluées (voir quatrième page).
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture blanche
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture jaune
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture orange
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture verte
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture bleue
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture marron
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture noire
Poésie n° : Date :
Signature :
1 2 3 4 5 6
titre texte auteur vitesse volume respiration copie regard corps geste mimique dessin reformuler
Ceinture rouge
Mes compétences en tant que spectateur :
Langage oral : Ecouter pour comprendre un message oral, un propos, un discours, un texte lu.
7) Porter attention aux éléments vocaux et gestuels lors de l’audition (…) et repérer leurs effets
(écoute). NA PA AR AC
8) Exercer une vigilance critique par rapport au langage écouté (avis). NA PA AR AC
Langage oral : Adopter une attitude critique par rapport à son propos.
9) Prendre en compte les règles organisant les échanges (positif-constructif). NA PA AR AC
Évaluation n°1 Évaluation n°2 Évaluation n°3 Évaluation n°4 Évaluation n°5
7 8 9 7 8 9 7 8 9 7 8 9 7 8 9
éco
ute
avis
posi
tif
cons
truc
tif
éco
ute
avis
posi
tif
cons
truc
tif
éco
ute
avis
posi
tif
cons
truc
tif
éco
ute
avis
posi
tif
cons
truc
tif
éco
ute
avis
posi
tif
cons
truc
tif
Les pochettes
et
images des ceintures
Le recueil de poésie
évolutif rangé par
ceintures
Portrait dégoûtant
Il avait mauvaise mine
Une langue de vipère
Un nez de fouine
Des oreilles de cocker
Des dents de loup
Des yeux de mouche
Mais surtout
Une bouche d'égout.
C'est pourquoi
Il ne se sentait pas bien du tout.
Antoine Bial
Ceinture blanche
Le toucan
- Salut, toucan !
- Salut à toi !
- Le marché est-il bon ?
- Pourquoi pas ?
Tant qu’il y a
des criquets
des vers de terre,
des termites ailés,
le marché est toujours bon !
Issaka Soumaïla Karanta
Ceinture blanche
L'automne
L'automne au fond du bois,
Joue de l'harmonica.
Quelle joie chez les feuilles!
Elles valsent aux bras
Du vent qui les emporte.
On dit qu'elles sont mortes,
Mais personne n'y croit.
L'automne au coin du bois,
Joue de l'harmonica.
Maurice Carême
Ceinture blanche
Bonté
Il faut plus d’une pomme
Pour remplir un panier.
Il faut plus d’un panier
Pour que chante un verger.
Mais il ne faut qu’un homme
Pour qu’un peu de bonté
Luise comme une pomme
Que l’on va partager.
Maurice Carême
Ceinture blanche
Quand s’annonce l’automne Quand s’annonce l’automne La marmotte marmonne Rentre dans sa maison Et dit : « C’est la saison Où mon lit a du bon. Dormons. » Et elle attend le temps Du soleil, du printemps, En dormant.
Georges Jean
Ceinture blanche
Le chat
Le chat ouvrit les yeux,
Le soleil y entra.
Le chat ferma les yeux,
Le soleil y resta,
Voilà pourquoi, le soir,
Quand le chat se réveille,
J'aperçois dans le noir
Deux morceaux de soleil.
Maurice Carême
Ceinture blanche
L'enfant qui est dans la lune Cet enfant, toujours dans la lune, S'y trouve bien, s'y trouve heureux. Pourquoi le déranger ? La lune Est un endroit d'où l'on voit le mieux.
Claude Roy
Ceinture blanche
Sahara
Sahara
Mamelles de sable
Qui portent les caresses
Des caravanes
Sahara
Mamelles de sable
Qui enveloppent
La tiédeur des nuits
Bleues
Armand Balima
Ceinture blanche
Tu m'as regardée
Tu m'as regardée
Et ton regard plein d'amour
A souri
Dans le mien.
Tu m'as tendu
Ton bras
Ton bras droit
Comblé de promesses.
Et ton regard s'est fondu
Dans mon regard
Et tes bras m'ont enveloppée
D'un long pagne d'espoirs.
Élisabeth-Françoise Mweya
Ceinture blanche
La main de maman
Ouvre ta main, maman.
Papa m'a dit qu'elle contient
Tous les secrets du monde.
Pourquoi la lune
Ne descend-elle pas éclairer notre case ?
Dans quel pays se trouve-t-elle, la nuit
Quand elle n'est pas chez nous ?
Fatou Sow Ndiaye
Ceinture blanche
Dans mon pays
Dans mon pays
On ne prête pas,
On partage.
Un plat rendu
N’est jamais vide ;
Du pain
Quelques fèves
Ou une pincée de sel.
Tahar Ben Jelloun
Ceinture blanche
Est-il une musique plus douce ?
Est-il une musique plus douce
Pour nous endormir que l'amour?
Les feuilles d'arbres caressent
Le rossignol solitaire
Qui transperce le cri du vent
De son chant merveilleux.
Mais pour se reposer, elles ont besoin
De la douceur de la nuit.
Kama Kamanda
Ceinture blanche
Chanson d’automne
Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure ;
Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Verlaine
Ceinture blanche
On Frappe
Qui est là
Personne
C'est simplement mon cœur qui bat
Qui bat très fort
À cause de toi
Mais dehors
La petite main de bronze sur la porte de bois
Ne bouge pas
Ne remue pas
Ne remue pas seulement le petit bout
du doigt.
Jaques Prévert
Ceinture blanche
Iles
Îles
Îles où l’on ne prendra jamais terre
Îles où l’on ne descendra jamais
Îles couvertes de végétation
Îles tapies comme des jaguars
Îles muettes
Îles immobiles
Îles inoubliables et sans nom
Je lance mes chaussures par-dessus bord
Car je voudrais bien aller jusqu’à vous.
Blaise Cendrars
Ceinture blanche
Bonne année !
Bonne année à toutes les choses :
Au monde ! À la mer ! Aux forêts !
Bonne année à toutes les roses
Que l'hiver prépare en secret.
Bonne année à tous ceux qui m'aiment
Et qui m'entendent ici-bas...
Et bonne année aussi, quand même,
A tous ceux qui ne m'aiment pas !
Rosemonde Gérard
Ceinture jaune
Devinette
« Je suis brin de bois noirci
Et travaille jour et nuit.
Je soulève- c'est inouï-
Cent fois mon poids, et sans cric.
Du grenier jusqu'au fournil,
J'engrange des grains de riz.
Ne touchez pas à mon nid
Vous feriez venir la pluie. »
C'est ce qu'un soir m'avait dit,
Quand nous étions entre amis,
La fourmi.
Michel Beau
Ceinture jaune
C’est la rentrée
Vite, vite, il faut se presser, Le réveil a déjà sonné ! Un peu raplapla, Toilette de chat. Petit déjeuner, Très vite avalé. Cheveux en pétard, Un peu dans le brouillard. Je file comme l’éclair, Chaussettes à l’envers. Vite, vite, il faut se presser, C’est la rentrée.
Sylvie Poillevé
Ceinture jaune
Quand automne en saison revient...
Quand automne en saison revient,
La forêt met sa robe rousse
Et les glands tombent sur la mousse
Où dansent les petits lapins.
Les souris font de grands festins
Pendant que les champignons poussent.
Ah ! que la vie est douce, douce,
Quand l'automne en saison revient.
Samivel
Ceinture jaune
Le Brouillard
Le brouillard a tout mis
Dans son sac en coton ;
Le brouillard a tout pris
Autour de ma maison.
Plus de fleurs au jardin,
Plus d’arbres dans l’allée ;
La serre du voisin
Semble s’être envolée.
Et je ne sais vraiment
Où peut s’être posé
Le moineau que j’entends
Si tristement crier.
Maurice Carême
Ceinture jaune
Le ver luisant
Ver luisant tu luis à minuit,
Tu t’allumes sous les étoiles
Et, quand tout dort, tu t’introduis
Dans la lune et ronge sa moelle.
La lune, nid des vers luisants,
Dans le ciel continue sa route.
Elle sème sur les enfants,
Sur tous les beaux enfants dormant,
Rêve sur rêve, goutte à goutte.
Robert Desnos
Ceinture jaune
Pour ma mère
Il y a plus de fleurs
Pour ma mère, en mon cœur,
Que dans tous les vergers ;
Plus de merles rieurs
Pour ma mère, en mon cœur,
Que dans le monde entier ;
Et bien plus de baisers
Pour ma mère, en mon cœur,
Qu’on en pourrait donner.
Maurice Carême
Ceinture jaune
Homonymes
Il y a le vert du cerfeuil
Et il y a le ver de terre
Il y a l'endroit et l'envers
L'amoureux qui écrit en vers
Le verre d'eau plein de lumière,
La fine pantoufle de vair
Et il y a moi, tête en l'air,
Qui dit toujours tout de travers.
Maurice Carême
Ceinture jaune
Un dragon chez soi
Avoir un dragon chez soi
Ce n’est pas si mal que ça,
Surtout quand il fait très froid.
Quand on lui tire la queue
Ca le rend tellement furieux
Que sa gueule crache du feu.
Il réchauffe l’appartement,
Il sèche les vêtements,
Les parents sont tout contents.
Corinne Albaut
Ceinture jaune
Je suis le vent -Ouvrez les gens ! Ouvrez la porte ! Je frappe au seuil et à l’auvent. Ouvrez les gens ! Je suis le vent Qui s’habille de feuilles mortes. -Entrez, Monsieur, entrez, le vent, Voici pour vous la cheminée Et sa niche badigeonnée, Entrez chez nous, monsieur le vent.
Émile Verhaeren
Ceinture jaune
Je parle
Je parle miel avec les abeilles.
Je parle sève avec les arbres.
Je parle pollen avec les fleurs.
Je parle terre avec les insectes.
Je parle source avec les poissons.
Je me tais quand le jour se tait.
Au vent, je souffle des histoires.
Sur la nuit, j’épingle mes rêves
Pour qu’ils se confondent aux étoiles.
Carl Norac
Ceinture jaune
Déménager
Quitter un appartement. Vider les lieux.
Décamper. Faire place nette.
Débarrasser le plancher.
Inventorier ranger classer trier
Éliminer jeter fourguer
Casser
Brûler
Descendre desceller déclouer décoller dévisser
Décrocher
Débrancher détacher couper tirer démonter
Plier couper
Rouler
Empaqueter emballer sangler nouer empiler
Rassembler entasser ficeler envelopper protéger
Recouvrir entourer serrer
Enlever porter soulever
Balayer
Fermer
Partir.
Georges Perec, Espèces d’espaces
Ceinture jaune
Automne
Dans le brouillard s'en vont un paysan
cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard
d'automne
Qui cache les hameaux pauvres et
vergogneux
Et s'en allant là-bas le paysan chantonne
Une chanson d'amour et d'infidélité
Qui parle d'une bague et d'un cœur que l'on
brise
Oh ! l'automne l'automne a fait mourir l'été
Dans le brouillard s'en vont deux
silhouettes grises
Guillaume Apollinaire
Ceinture orange
Trois escargots
J'ai rencontré trois escargots
Qui s'en allaient cartable au dos
Et dans le pré trois limaçons
Qui disaient par coeur leur leçon.
Puis dans un champ, quatre lézards
Qui écrivaient un long devoir.
Où peut se trouver leur école ?
Au milieu des avoines folles ?
Et leur maître est-il ce corbeau
Que je vois dessiner là-haut
De belles lettres au tableau ?
Maurice Carême
Ceinture orange
Chanson des Escargots qui
vont à l'enterrement
À l'enterrement d'une feuille morte
Deux escargots s'en vont
Ils ont la coquille noire
Du crêpe autour des cornes
Ils s'en vont dans le soir
Un très beau soir d'automne
Hélas quand ils arrivent
C'est déjà le printemps
Les feuilles qui étaient mortes
Sont toutes ressuscitées
Et les deux escargots
Sont très désappointés.
Jacques Prévert
Ceinture orange
Ponctuation
Un point d'interrogation
Comment ? Une question ?
Et un point d'exclamation
Oh ! Quelle émotion !
Sur mon écritoire,
J'invente une histoire,
J'aligne les mots
Avec mon stylo.
Puis trois points de suspension,
Hé hé hésitation ...
Je rajoute une virgule
Et regarde la pendule.
Quand j'ai tout écrit,
Alors je relis.
L'histoire est jolie,
Un point c'est fini.
Daniel Coulon
Ceinture orange
Le bel automne est revenu
À pas menus, menus,
Le bel automne est revenu.
Dans le brouillard, sans qu’on s’en doute,
Il est venu par la grand’ route
Habillé d’or et de carmin.
Et tout le long de son chemin,
Le vent bondit, les pommes roulent,
Il pleut des noix, les feuilles croulent.
Ne l’avez-vous pas reconnu ?
Le bel automne est revenu.
Raymond Richard
Ceinture orange
Comme il est bon d'aimer
Il suffit d'un mot
Pour prendre le monde
Au piège de nos rêves
Il suffit d'un geste
Pour relever la branche
Pour apaiser le vent
Il suffit d'un sourire
Pour endormir la nuit
Délivrer nos visages
De leur masque d'ombre
Mais cent milliards de poèmes
Ne suffirait pas
Pour dire
Comme il est bon d'aimer
Jean-Pierre Siméon
Ceinture orange
La poule et le mur
Une poule sur un mur
Cherchait des bouts de pain dur.
Sur le mur, pas de pain dur
Mais un trou plein de fissures,
Et dans le trou, des cailloux.
Que la poule, mise en goût,
Gloutonnement picora,
Deux par deux, puis trois par trois.
Que crois-tu qu'il arriva
À la poule sur le mur ?
Elle pondit un oeuf dur.
Pierre Coran
Ceinture orange
La catastrophe
Quel malheur ! Ça me désole :
On vient de fermer l'école !
On a tout cadenassé !
Que je suis bouleversé !
Au soleil ou sous la pluie,
Mon Dieu, que cela m'ennuie !
J'ai beau rire et m'amuser,
J'en ai le cœur tout brisé.
Quand finiront les vacances,
Si j'ai survécu par chance,
Épuisé de tant souffrir,
C'est moi qui viendrai rouvrir.
Istvan Csukas
Ceinture orange
L'invitation au voyage
Mon enfant, ma sœur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Charles Baudelaire
Ceinture orange
Caillou
Caillou noir,
Pas d'espoir.
Caillou rouge,
Rien ne bouge.
Caillou rond,
Pas un rond.
Caillou gris,
Rien de pris.
Caillou vert,
On le perd.
Caillou rose,
Peu de chose.
Caillou jaune,
On le prône,
Caillou blanc,
Vif argent.
Caillou d'or,
Quel trésor !
Caillou bleu,
Qui dit mieux ?
Moi, moi, moi,
Dit le fou:
Caillou plat
Et sans trou.
Maurice Carême
Ceinture orange
Et un sourire
La nuit n’est jamais complète
Il y a toujours puisque je le dis
Puisque je l’affirme
Au bout du chagrin une fenêtre ouverte
Une fenêtre éclairée
Il y a toujours un rêve qui veille
Désir à combler faim à satisfaire
Un coeur généreux
Une main tendue une main ouverte
Des yeux attentifs
Une vie la vie à se partager.
Paul Eluard
Ceinture orange
Tu dis
Tu dis sable
Et déjà
La mer est à tes pieds
Tu dis forêt
Et déjà
Les arbres te tendent leurs bras
Tu dis colline
Et déjà
Le sentier court avec toi vers le sommet
Tu dis nuage
Et déjà
Un cumulus t’offre la promesse du voyage
Tu dis poème
Et déjà
Les mots volent et dansent comme des
étincelles dans ta cheminée
Joseph-Paul Schneider
Ceinture orange
Les sentiments en images
La colère a des lèvres rouge sang
La mélancolie erre sur la grève
La joie fait tournoyer ses longues jupes
La jalousie se griffe le visage
Le désespoir s'effondre sur son lit
Le bonheur gravit l'échelle du ciel
La tristesse enfile une robe grise L'espoir s'élance en ouvrant grand ses bras
La peur grelotte dans son manteau pâle
Et moi je savoure l'instant vibrant...
Evelyne Wilwerth
Ceinture orange
Le vieux et son chien
S’il était le plus laid
De tous les chiens du monde
Je l’aimerais encore
À cause de ses yeux.
Si j’étais le plus vieux
De tous les vieux du monde
L’amour luirait encore
Dans le fond de ses yeux.
Et nous serions tous deux
Lui si laid , moi si vieux
Un peu moins seuls au monde
À cause de ses yeux.
Pierre Menanteau
Ceinture orange
Dimanche
Charlotte
Fait de la compote.
Bertrand
Suce des harengs.
Cunégonde
Se teint en blonde.
Epaminondas
Cire ses godasses.
Thérèse
Souffle sur la braise.
Léon
Peint des potirons.
Brigitte
S'agite, s'agite.
Adhémar
Dit qu'il en a marre.
La pendule
Fabrique des virgules.
Et moi dans tout cha?
Et moi dans tout cha?
Moi, ze ne bouze pas
Sur ma langue z'ai un chat.
René de Obaldia
Ceinture orange
Les beaux métiers
Certains veulent être marins,
D'autres ramasseurs de bruyère,
Explorateurs de souterrains,
Perceurs de trous dans le gruyère,
Cosmonautes, ou, pourquoi pas,
Goûteurs de tartes à la crème,
De chocolat et de babas :
Les beaux métiers sont ceux qu'on aime.
L'un veut nourrir un petit faon,
Apprendre aux singes l'orthographe,
Un autre bercer l'éléphant...
Moi, je veux peigner la girafe !
Jacques Charpentreau
Ceinture orange
Le printemps reviendra Hé oui, je sais bien qu’il fait froid, Que le ciel est tout de travers; Je sais que ni la primevère Ni l’agneau ne sont encore là. La terre tourne; il reviendra, Le printemps, sur son cheval vert. Que ferait le bois sans pivert, Le petit jardin sans lilas ? Oui, tout passe, même l’hiver, Je le sais par mon petit doigt Que je garde toujours en l’air...
Maurice Carême
Ceinture verte
La soupe de la sorcière
Dans son chaudron la sorcière
Avait mis quatre vipères,
Quatre crapauds pustuleux,
Quatre poils de barbe-bleue,
Quatre rats, quatre souris,
Quatre cruches d’eau croupies.
Pour donner un peu de goût
Elle ajouta quatre clous.
Sur le feu pendant quatre heures
Ça chauffait dans la vapeur.
Elle tourne sa tambouille
Et touille et touille et ratatouille.
Quand on put passer à table
Hélas c’était immangeable.
La sorcière par malheur
Avait oublié le beurre.
Jacques Charpentreau
Ceinture verte
Pour devenir une sorcière
À l’école des sorcières
On apprend les mauvaises manières
D’abord ne jamais dire pardon
Être méchant et polisson
S’amuser de la peur des gens
Puis détester tous les enfants
À l’école des sorcières
On joue dehors dans les cimetières
D’abord à saute-crapaud
Ou bien au jeu des gros mots
Puis on s’habille de noir
Et l’on ne sort que le soir
À l’école des sorcières
On retient des formules entières
D’abord des mots très rigolos
Comme "chilbernique" et "carlingot"
Puis de vraies formules magiques
Et là il faut que l’on s’applique.
Jacqueline Moreau
Ceinture verte
Le bonhomme de neige Au nord de la Norvège Vit un bonhomme de neige Il n’a pas peur de fondre Là-bas, la neige tombe Pendant de très longs mois, Il y fait toujours froid. Et le bonhomme de neige, Bien assis sur son siège, Regarde les flocons Voler en tourbillons. Sais-tu ce que j’en pense ? Il a bien de la chance Pour un bonhomme de neige D’habiter la Norvège.
Corinne Albaut
Ceinture verte
Nuit de neige Oh ! La terrible nuit pour les petits oiseaux ! Un vent glacé frissonne et court par les allées; Eux, n'ayant plus l'asile ombragé des berceaux, Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées. Dans les grands arbres nus que couvre le verglas Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège; De leur œil inquiet ils regardent la neige,
Attendant jusqu'au jour la nuit qui ne vient pas.
Guy de Maupassant
Ceinture verte
La prisonnière
Plaignez la pauvre prisonnière
Au fond de son cachot maudit !
Sans feu, sans coussin, sans lumière...
Ah ! Maman me l’avait bien dit !
Il fallait aller chez grand-mère
Sans m’amuser au bois joli,
Sans parler comme une commère
Avec l’inconnu trop poli.
Ma promenade buissonnière
Ne m’a pas du tout réussi :
Maintenant je suis prisonnière
Dans le grand ventre noir du loup.
Je suis seule, sans allumettes,
Chaperon rouge bien puni :
Je n’ai plus qu’un bout de galette,
Et mon pot de beurre est fini !
Jacques Charpentreau
Ceinture verte
La tranche de pain
Un enfant seul,
Tout seul avec en main
Une belle tranche de pain,
Un enfant seul
Avec un chien
Qui le regarde comme un dieu
Qui tiendrait dans sa main
La clé du paradis des chiens.
Un enfant seul
Qui mord dans sa tranche de pain,
Et que le monde entier
Observe pour le voir donner
Avec simplicité,
Alors qu'il a très faim,
La moitié de son pain
Bien beurré à son chien.
Maurice Carême
Ceinture verte
Conseils donnés par une sorcière
Retenez-vous de rire
Dans le petit matin.
N'écoutez pas les arbres
Qui gardent les chemins.
Ne dites votre nom
À la terre endormie
Qu'après minuit sonné.
A la neige à la pluie
Ne tendez pas la main.
N'ouvrez votre fenêtre
Qu'aux petites planètes
Que vous connaissez bien.
Confidence pour confidence
Vous qui venez me consulter
Méfiance, méfiance
On ne sait pas ce qui peut arriver.
Jean Tardieu
Ceinture verte
Voici venu le froid
Voici venu le froid radieux de septembre :
Le vent voudrait entrer et jouer dans les chambres;
Mais la maison a l'air sévère ce matin,
Et le laisse dehors qui sanglote au jardin.
Les feuilles dans le vent courent comme des folles;
Elles voudraient aller où les oiseaux s'envolent;
Mais le vent les reprend et barre leur chemin :
Elles iront mourir sur les étangs demain.
Anna de Noailles
Ceinture verte
Les larmes du crocodile
Si vous passez au bord du Nil
Où le délicat crocodile
Croque en pleurant la tendre Odile,
Emportez un mouchoir de fil.
Essuyez les pleurs du reptile
Perlant aux pointes de ses cils,
Et consolez le crocodile :
C'est un animal très civil.
Sur les bords du Nil en exil,
Pourquoi ce saurien pleure-t-il ?
C'est qu'il a les larmes faciles
Le crocodile qui croque Odile.
Jacques Charpentreau
Ceinture verte
La blanche école
La blanche école où je vivrai
N’aura pas de roses rouges
Mais seulement devant le seuil
Un bouquet d’enfants qui bougent
On entendra sous les fenêtres
Le chant du coq et du roulier ;
Un oiseau naîtra de la plume
Tremblante au bord de l’encrier
Tout sera joie ! Les têtes blondes
S’allumeront dans le soleil,
Et les enfants feront des rondes
Pour tenter les gamins du ciel
René-Guy Cadou
Ceinture verte
La grêle
Les légers grêlons de la grêle
Bondissent sur le bord des toits ;
Leur chute claire s'amoncelle,
Au pied des murs, en tas étroits ;
Parfois, se heurtant aux parois,
Un grain rejaillit et sautelle
Sur les pavés mouillés et froids,
Comme une blanche sauterelle.
Le sol un instant étincelle,
Argentés de ce fin gravois ;
Les légers grêlons de la grêle
Bondissent sur le bord des toits.
Auguste Angellier
Ceinture verte
Pour mon papa
J'écris le mot agneau
Et tout devient frisé :
La feuille du bouleau,
La lumière des prés.
J'écris le mot étang
Et mes lèvres se mouillent ;
J'entends une grenouille
Rire au milieu des champs.
J'écris le mot forêt
Et le vent devient branche.
Un écureuil se penche
Et me parle en secret.
Mais si j'écris papa,
Tout me devient caresse,
Et le monde me berce
En chantant dans ses bras.
Maurice Carême
Ceinture verte
Le Pélican
Le Capitaine Jonathan,
Étant âgé de dix-huit ans
Capture un jour un pélican
Dans une île d'Extrême-orient,
Le pélican de Jonathan
Au matin, pond un oeuf tout blanc
Et il en sort un pélican
Lui ressemblant étonnamment.
Et ce deuxième pélican
Pond, à son tour, un oeuf tout blanc
D'où sort, inévitablement
Un autre, qui en fait autant.
Cela peut durer pendant très longtemps
Si l'on ne fait pas d'omelette avant.
Robert Desnos
Ceinture verte
L'heure du crime
Minuit. Voici l'heure du crime.
Sortant d'une chambre voisine,
Un homme surgit dans le noir.
Il ôte ses souliers
S'approche de l'armoire
Sur la pointe des pieds
Et saisit un couteau
Dont l'acier luit, bien aiguisé.
Puis masquant ses yeux de fouine
Avec un pan de son manteau,
Il pénètre dans la cuisine
Et, d'un seul coup, comme un bourreau
Avant que ne crie la victime,
Ouvre le coeur d'un artichaut.
Maurice Carême
Ceinture verte
Au petit bonheur
Rien qu'un petit bonheur, Suzette,
Un petit bonheur qui se tait.
Le bleu du ciel est de la fête;
Rien qu'un petit bonheur secret.
Il monte ! C'est une alouette
Et puis voilà qu'il disparaît;
Le bleu du ciel est de la fête.
Il chante, il monte, il disparaît.
Mais si tu l'écoutes, Suzette,
Si dans tes paumes tu le prends
Comme un oiseau tombé des crêtes,
Petit bonheur deviendra grand.
Géo Norge
Ceinture verte
Semonce à Mistigri
Mon Mistigri, mon infidèle,
Tu dois venir quand je t'appelle,
Au lieu de courir la souris
Tout le jour et encor la nuit.
Je n'aime pas cette manière
De te sauver dans les jardins
Quand je t'ai préparé du pain,
Et de la sauce et du gruyère...
Tu en connais, toi, des maîtresses
Aussi patientes que je suis,
Et qui vous font mille caresses
Après qu'on s'est si mal conduit ?
Jean Desmeuze
Ceinture verte
Les papillons
De toutes les belles choses
Qui nous manquent en hiver,
Qu'aimez-vous mieux ? - Moi, les roses ;
- Moi, l'aspect d'un beau pré vert ;
- Moi, la moisson blondissante,
Chevelure des sillons ;
- Moi, le rossignol qui chante ;
- Et moi, les beaux papillons !
Le papillon, fleur sans tige,
Qui voltige,
Que l'on cueille en un réseau ;
Dans la nature infinie,
Harmonie
Entre la plante et l'oiseau !...
Gérard de Nerval
Ceinture verte
L'écolière
Bon Dieu ! que de choses à faire !
Enlève tes souliers crottés,
Pends donc ton écharpe au vestiaire,
Lave tes mains pour le goûter
Revois tes règles de grammaire
Ton problème, est-il résolu ?
Et la carte de l'Angleterre,
Dis, quand la dessineras-tu ?
Aurai-je le temps de bercer
Un tout petit peu ma poupée,
De rêver, assise par terre,
Devant mes châteaux de nuées ?
Bon Dieu ! que de choses à faire !
Maurice Carême
Ceinture verte
Le coyote tagueur
Un coyote rageur
Sur un mur blanc taguait
Griffonnant sa rancoeur
Contre un loup trop aisé
« C’est bien que je salisse,
Grommelait ce jaloux,
La trop belle bâtisse
De ce trop riche loup ! »
Regagnant sa masure,
Il se trouva surpris
D’y trouver la peinture
D’un plus pauvre que lui.
Moralité :
Si tu veux qu’on soit correct
Avec ce qui t’appartient
Il faudra que tu respectes
De tous les autres les biens.
Yvon Danet
Ceinture verte
Les mots qui font vivre
Il y a des mots qui font vivre
Et ce sont des mots innocents
Le mot chaleur le mot confiance
Amour justice et le mot liberté
Le mot enfant et le mot gentillesse
Et certains noms de fleurs et
certains noms de fruits
Le mot courage et le mot découvrir
Et le mot frère et le mot camarade
Et certains noms de pays de villages Et certains noms de femmes et d'amis.
Paul Eluard
Ceinture verte
Sables mouvants
Démons et merveilles
Vents et marées
Au loin déjà la mer s'est retirée
Et toi
Comme une algue doucement caressée par
le vent
Dans les sables du lit tu remues en rêvant
Démons et merveilles
Vents et marées
Au loin déjà la mer s'est retirée
Mais dans tes yeux entrouverts
Deux petites vagues sont restées
Démons et merveilles
Vents et marées
Deux petites vagues pour me noyer.
Jacques Prévert
Ceinture verte
Pour toi mon amour
Je suis allé au marché aux oiseaux
Et j'ai acheté des oiseaux
Pour toi
Mon amour
Je suis allé au marché aux fleurs
Et j'ai acheté des fleurs
Pour toi
Mon amour
Je suis allé au marché à la ferraille
Et j'ai acheté des chaînes
De lourdes chaînes
Pour toi
Mon amour
Et je suis allé au marché aux esclaves
Et je t'ai cherchée
Mais je ne t'ai pas trouvée
Mon amour
Jacques Prévert
Ceinture verte
À mes amis
Rions, chantons, ô mes amis,
Occupons-nous à ne rien faire,
Laissons murmurer le vulgaire,
Le plaisir est toujours permis.
Que notre existence légère
S'évanouisse dans les jeux.
Vivons pour nous, soyons heureux,
N'importe de quelle manière.
Un jour il faudra nous courber Sous la main du temps qui nous presse ;
Mais jouissons dans la jeunesse,
Et dérobons à la vieillesse
Tout ce qu'on peut lui dérober.
Evariste De Parny
Ceinture verte
Liberté
Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom.
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom.
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom.
[…]
Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer :
LIBERTE
Paul Eluard
Ceinture verte
Ces fous
Il va vous bousculer
Et monter dans le train
Qui est déjà parti.
Ou presque.
Sans s’excuser.
Il va vous empêcher
De descendre du train
Qui est déjà en route.
Ou presque.
Sans s’excuser.
Il va vous demander
De lui donner du feu,
Lira votre journal
Par dessus votre épaule.
Sans s’excuser.
Il va vous critiquer
De ne pas vous lever,
Lui céder votre place
Et ranger son bagage.
Sans s’excuser.
Ces fous !
Claude Blanc
Ceinture verte
La chevauchée
Certains, quand ils sont en colère,
Crient, trépignent, cassent des verres...
Moi, je n'ai pas tous ces défauts :
Je monte sur mes grands chevaux.
Et je galope, et je voltige,
Bride abattue, jusqu'au vertige
Des étincelles sous leurs fers,
Mes chevaux vont un train d'enfer.
Je parcours ainsi l'univers,
Monts, forêts, campagnes, déserts ...
Quand mes chevaux sont fatigués,
Je rentre à l'écurie « calmé ».
Jacques Charpentreau
Ceinture verte
L'air en conserve
Dans une boîte, je rapporte
Un peu de l'air de mes vacances
Que j'ai enfermé par prudence.
Je l'ouvre ! Fermez bien la porte
Respirez à fond ! Quelle force !
La campagne en ma boîte enclose
Nous redonne l'odeur des roses,
Le parfum puissant des écorces,
Les arômes de la forêt...
Mais couvrez- vous bien, je vous prie,
Car la boîte est presque finie :
C'est que le fond de l'air est frais.
Jacques Charpentreau
Ceinture verte
Le lutin horloger
Il court, il court, sa montre en main,
Par les rues et par les chemins !
Mais qu'est- il en train de chercher
De l'hôtel de ville au clocher ?
Il retourne les sabliers,
Il inspecte les balanciers.
Quartz ou ressort, vite il déloge
L'oiseau caché dans votre horloge.
Tic- tac, il avance, il recule
Les aiguilles de la pendule.
Il court, de demeure en demeure,
Chercher midi à quatorze heures.
Jacques Charpentreau
Ceinture verte
Ulysse
- Ulysse, Ulysse, arrête- toi,
Écoute la voix des sirènes
Plonge, va trouver notre reine,
Dans son palais, deviens le roi.
Mais Ulysse préfère au toit
Des vagues celui des nuages,
Dans la direction d'Ithaque
Son regard reste fixé droit.
Et les filles aux longs cheveux
Ont beau nager dans son sillage,
Il demeure sourd, il ne veut
Que la chanson, que le visage
Conservé au fond de ses yeux,
De Pénélope toujours sage.
Louis Guillaume
Ceinture verte
Pour dessiner un bonhomme
Deux petits ronds dans un grand rond.
Pour le nez, un trait droit et long.
Une courbe dessous, la bouche.
Et pour chaque oreille, une boucle.
Sous le beau rond, un autre rond
Plus grand encore et plus oblong.
On peut y mettre des boutons :
Quelques gros points y suffiront.
Deux traits vers le haut pour les bras
Grand ouverts en signe de joie,
Et puis deux jambes, dans le bas,
Qu’il puisse aller où il voudra.
Et voici un joli bonhomme
Rond et dodu comme une pomme
Qui rit d’être si vite né
Et de danser sur mon papier.
Maurice Carême
Ceinture bleue
Les roses de Saadi
J'ai voulu ce matin te rapporter des roses ;
Mais j'en avais tant pris dans mes ceintures closes
Que les nœuds trop serrés n'ont pu les contenir.
Les nœuds ont éclaté. Les roses envolées
Dans le vent, à la mer s'en sont toutes allées.
Elles ont suivi l'eau pour ne plus revenir ;
La vague en a paru rouge et comme enflammée.
Ce soir, ma robe encore en est tout embaumée...
Respires- en sur moi l'odorant souvenir.
Marceline Desbordes-Valmore
Ceinture bleue
Mon cartable
Mon cartable a mille odeurs,
Mon cartable sent la pomme,
Le livre, l'encre, la gomme,
Et les crayons de couleurs.
Mon cartable sent l'orange,
Le bison et le nougat,
Il sent tout ce que l'on mange,
Et ce qu'on ne mange pas.
La figue, la mandarine,
Le papier d'argent ou d'or,
Et la coquille marine,
Les bateaux sortant du port.
Les cowboys et les noisettes,
La craie et le caramel,
Les confettis de la fête,
Les billes remplies de ciel.
Les longs cheveux de ma mère,
Et les joues de mon papa.
Les matins dans la lumière,
La rose et le chocolat.
Pierre Gamarra
Ceinture bleue
C’est pour maman
J’ai cueilli trois fleurs dans les champs,
Mais la plus jolie que j’aime tant,
La plus jolie, c’est pour maman.
J’ai trouvé trois beaux cailloux blancs,
Mais le plus joli que j’aime tant,
Le plus joli, c’est pour maman.
Et j’ai aussi trois beaux rubans,
Mais le plus joli que j’aime tant,
Le plus joli, c’est pour maman.
Je n’ai qu’un petit cœur d’enfant,
Mais mon p’tit cœur qui l’aime tant,
Mon petit cœur, c’est pour maman.
C. Duparc
Ceinture bleue
La biche brame au clair de lune
La biche brame au clair de lune
Et pleure à se fondre les yeux :
Son petit faon délicieux
À disparu dans la nuit brune.
Pour raconter son infortune
À la forêt de ses aïeux,
La biche brame au clair de lune
Et pleure à se fondre les yeux.
Mais aucune réponse, aucune,
À ses longs appels anxieux !
Et, le cou tendu vers les cieux,
Folle d'amour et de rancune,
La biche brame au clair de lune.
Maurice Rollinat
Ceinture bleue
Grosgnongnon le cochon
Grosgnongnon le cochon
Rouspète en toute saison
Pour un oui, pour un non
Au printemps quand il fait doux
Il dit qu'il se sent tout mou
En été, quand il fait chaud
Et qu'il se met en maillot
Il se trouve un peu trop gros
Lorsque s'approche l'automne,
Grosgnongnon baille et frissonne.
Et, quand arrive l'hiver
Grosgnongnon est en colère :
Il n'aime pas son bonnet
Qui lui tombe sur le nez!
C'est ainsi toute l'année
Ce qu'il aime, c'est rouspéter.
Claude Clément
Ceinture bleue
La neige tombe
Toute blanche dans la nuit brune,
La neige tombe en voletant,
Ô pâquerettes ! Une à une,
Toutes blanches dans la nuit brune.
Qui donc là-haut plume la lune ?
Ô frais duvet ! Flocons flottants !
Toute blanche dans la nuit brune,
La neige tombe en voletant.
La neige tombe monotone
Monotonement dans les cieux,
Dans le silence qui chantonne
La neige tombe monotone
Et file, tisse, ourle et festonne,
Un suaire silencieux.
La neige tombe monotone
Monotonement dans les cieux.
Jean Richepin
Ceinture bleue
Ce matin
Ce matin, j'ai mangé de la colère
À la petite cuillère.
J'ai mis plein de mauvaise humeur
Sur ma tartine de beurre.
Toute la journée,
Je l'ai passée à grogner,
À donner des coups de pieds,
Et à dire "C'est bien fait !".
Mais maintenant, ça suffit,
J'ai envie que ce soit fini.
Et avant d'aller me coucher,
Je voudrais vous apporter
Une salade de baisers
Bien frais, bien doux, bien sucrés.
C'est très facile à préparer.
Qui veut la goûter ?
Monique Müller
Ceinture bleue
La pendule
Je suis la pendule, tic !
Je suis la pendule, tac !
On dirait que je mastique
Du mastic et des moustiques
Quand je sonne et quand je craque,
Je suis la pendule, tic !
Je suis la pendule, tac !
J'avance ou bien je recule,
Tic, tac, je suis la pendule,
Je brille quand on m'astique
Je ne suis pas fantastique,
Mais je sais l'arithmétique.
J'ai plus d'un tour dans mon sac,
Je suis la pendule, tic !
Je suis la pendule, tac !
Pierre Gamarra
Ceinture bleue
Soleil
Ô Soleil ! Que fais-tu là-haut,
L’air fatigué ?
Tu rougis !
Est-ce colère ou timidité ?
Allons tu te couches déjà,
Sans même attendre que la lune
T’apporte des étoiles avec lesquelles avant de
dormir
Tu joueras ?
Non ! Ne boude pas la fête !
Pourquoi ces coups de soleil ?
Est-ce fantaisie ou coup de tête ?
T’as chaud !
Ton crâne chauve n’est pas beau, gros insecte
va !
Couvre-toi la tête, avec un joli bonnet de nuit,
Veux-tu ?
Mohamed Azizlahababi
Ceinture bleue
Sagesse
Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme
Un arbre, par - dessus le toit,
Berce sa palme.
La cloche, dans le ciel qu'on voit,
Doucement tinte.
Un oiseau sur l'arbre qu'on voit
Chante sa plainte.
Mon Dieu, Mon Dieu, la vie est là,
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur là
Vient de la ville.
- Qu'as- tu fait, ô toi que voilà,
Pleurant sans cesse,
Dis, qu'as- tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ?
Paul Verlaine
Ceinture bleue
Terre- Lune
Terre Lune, Terre Lune
Ce soir j'ai mis mes ailes d'or
Dans le ciel comme un météore
Je pars.
Terre Lune, Terre Lune
J'ai quitté ma vieille atmosphère
J'ai laissé les morts et les guerres
Au revoir.
Dans le ciel piqué de planètes
Tout seul sur une lune vide
Je rirai du monde stupide
Et des hommes qui font les bêtes.
Terre Lune, Terre Lune
Adieu ma ville, adieu mon cœur
Globe tout perclus de douleurs
Bonsoir.
Boris Vian
Ceinture bleue
La Poule aux œufs d’or
L'avarice perd tout en voulant tout gagner.
Je ne veux, pour le témoigner,
Que celui dont la Poule, à ce que dit la Fable,
Pondait tous les jours un œuf d'or.
Il crut que dans son corps elle avait un trésor.
Il la tua, l'ouvrit, et la trouva semblable
A celles dont les œufs ne lui rapportaient rien,
S'étant lui-même ôté le plus beau de son bien.
Belle leçon pour les gens chiches :
Pendant ces derniers temps, combien en a-t-on vus
Qui du soir au matin sont pauvres devenus
Pour vouloir trop tôt être riches ?
Jean de La Fontaine
Ceinture marron
L’homme et la mer
Homme libre, toujours, tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer.
Tu te plais à plonger au sein de ton image ;
Tu l’embrasses des yeux et des bras, et ton cœur
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.
Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets :
Homme, nul n’a sondé le fond de tes abimes,
Ô mer, nul ne connait tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets !
Et cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié ni remord,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
Ô lutteurs éternels, ô frères implacables !
Charles Baudelaire
Ceinture marron
En rêve
En rêve, j'ai trouvé
Le joli, joli rêve !
En rêve, j'ai trouvé
La clochette enchantée
Qui dit la vérité.
En rêve, j'ai trouvé
Était-ce bien un rêve ?
En rêve, j'ai trouvé
Les miettes semées
par le petit Poucet !
En rêve, j'ai trouvé
L'étrange, étrange rêve !
En rêve, j'ai trouvé
La citrouille si grosse
qui se change en carrosse !
Dans mon plus joli rêve,
Au pied d'un blanc perron,
J'ai trouvé, Cendrillon,
ta pantoufle de vair...
Madeleine Ley
Ceinture marron
Le petit chaperon rouge
Chaperon rouge est en voyage,
Ont dit les noisetiers tout bas.
Loup aux aguets sous le feuillage,
N'attendez plus au coin du bois.
Plus ne cherra la bobinette
Lorsque, d'une main qui tremblait,
Elle tirait la chevillette
En tendant déjà son bouquet.
Mère-grand n'est plus au village.
On l'a conduite à l'hôpital
Où la fièvre, dans un mirage,
Lui montre son clocher natal.
Et chaperon rouge regrette,
Le nez sur la vitre du train,
Les papillons bleus, les fleurettes
Et le loup qui parlait si bien.
Maurice Carême
Ceinture marron
Le cancre
Il dit non avec la tête
Mais il dit oui avec le cœur
Il dit oui à ce qu’il aime
Il dit non au professeur
Il est debout
On le questionne
Et tous les problèmes sont posés
Soudain le fou rire le prend
Et il efface tout
Les chiffres et les mots
Les dates et les noms
Les phrases et les pièges
Et malgré les menaces du maître
Sous les huées des enfants prodiges
Avec des craies de toutes les couleurs
Sur le tableau noir de malheur
Il dessine le visage du bonheur.
Jacques Prévert
Ceinture marron
Les enfants qui s'aiment
Les enfants qui s'aiment s'embrassent debout
Contre les portes de la nuit
Et les passants qui passent les désignent du
doigt
Mais les enfants qui s'aiment
Ne sont là pour personne
Et c'est seulement leur ombre
Qui tremble dans la nuit
Excitant la rage des passants
Leur rage, leur mépris, leurs rires et leur envie
Les enfants qui s'aiment ne sont là pour
personne
Ils sont ailleurs bien plus loin que la nuit
Bien plus haut que le jour
Dans l'éblouissante clarté de leur premier
amour.
Jacques Prévert
Ceinture marron
Le chat
Dans ma cervelle se promène,
Ainsi qu'en son appartement,
Un beau chat, fort, doux et charmant.
Quand il miaule, on l'entend à peine,
Tant son timbre est tendre et discret ;
Mais que sa voix s'apaise ou gronde,
Elle est toujours riche et profonde,
C'est là son charme et son secret.
De sa fourrure blonde et brune
Sort un parfum si doux, qu'un soir
J'en fus embaumé, pour l'avoir
Caressée une fois, rien qu'une.
C'est l'esprit familier du lieu ;
Il juge, il préside, il inspire
Toutes choses dans son empire ;
Peut-être est-il fée, est-il dieu?
Charles Baudelaire
Ceinture marron
Les petits bruits nocturnes
Une goutte sur l'évier,
Un meuble qui
Craque,
Une montre où bat
Le pouls infime des secondes,
Des bœufs qui remâchent leurs souffles,
Une goutte sur l'évier,
Un moustique insaisissable
Jouant d'un très mince violon,
Un rien de vent qui retrousse du lierre,
Des pépiements feutrés qui dénoncent un nid
Entre solive et tuile,
Un grillon limant la clef des songes,
Une goutte sur l'évier,
Une reinette, ti, tâ
Modulant un télégramme aux anges,
Des souris à fleur de trou
Grignotant des miettes de silence,
Une goutte sur l'évier,
Dix gouttes dans le pot,
Un baiser.
Hervé Bazin
Ceinture marron
Si...
Si la sardine avait des ailes,
Si Gaston s'appelait Gisèle,
Si l'on pleurait lorsque l'on rit,
Si le pape habitait Paris,
Si l'on mourait avant de naître,
Si la porte était la fenêtre,
Si l'agneau dévorait le loup,
Si les Normands parlaient zoulou,
Si la mer Noire était la Manche
Et la mer Rouge la mer Blanche,
Si le monde était à l'envers,
Je marcherais les pieds en l'air,
Le jour je garderais la chambre,
J'irais à la plage en décembre,
Deux et un ne feraient plus trois...
Quel ennui ce monde à l'endroit !
Jean-Luc Moreau
Ceinture marron
C'est la Toussaint
C'est la Toussaint
Le ciel est gris comme demain
Et lourd comme les chrysanthèmes.
Le vent
Rougit le nez des gens
Glace leurs pieds
Glace leurs mains :
C'est la Toussaint.
Des feuilles mortes
Que la brise emporte
Bouchent les portes.
Dans les maisons
Le feu chante
À son diapason
Sa chanson.
Mais le froid
Entre quand même
Par les fentes des croisées :
Il faut geler.
Alors
Dedans comme dehors
le froid mord.
Et les gens moroses
Se plaignent des choses
De l'hiver qui vient:
C'est la Toussaint...
Clod'Aria
Ceinture marron
La Cigale et la Fourmi
La Cigale, ayant chanté
Tout l'été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue.
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu'à la saison nouvelle.
Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l'août, foi d'animal,
Intérêt et principal.
La Fourmi n'est pas prêteuse ;
C'est là son moindre défaut.
Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
Nuit et jour à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.
Vous chantiez ? j'en suis fort aise :
Et bien ! dansez maintenant.
Jean de La Fontaine
Ceinture noire
L’école est fermée
L'école est fermée ;
Le tableau s'ennuie ;
Et les araignées
Dit-on, étudient
La géométrie
Pour améliorer
L'étoile des toiles :
Toiles d'araignées,
Bien évidemment.
L'école est fermée
Les souris s'instruisent,
Les papillons lisent,
Les pupitres luisent,
Ainsi que les bancs.
L'école est fermée,
Mais si l'on écoute
Au fond du silence,
Les enfants sont là
Qui parlent tout bas
Et dans la lumière,
Des grains de poussière,
Ils revivent toute
L'année qui passa,
Et qui s'en alla…
Georges Jean
Ceinture noire
La guenon, le singe et la noix
Une jeune guenon cueillit
Une noix dans sa coque verte ;
Elle y porte la dent, fait la grimace... ah ! Certes,
dit-elle,
Ma mère mentit
Quand elle m'assura que les noix étaient bonnes.
Puis, croyez aux discours de ces vieilles personnes
Qui trompent la jeunesse !
Au diable soit le fruit !
Elle jette la noix.
Un singe la ramasse,
Vite entre deux cailloux la casse,
L'épluche, la mange, et lui dit :
Votre mère eut raison, ma mie :
Les noix ont fort bon goût, mais il faut les ouvrir.
Souvenez-vous que, dans la vie,
Sans un peu de travail, on n'a point de plaisir.
Jean-Pierre Claris de Florian
Ceinture noire
L’enfant et l’étoile
Un astre luit au ciel et dans l’eau se reflète.
Un homme qui passait dit à l’enfant- poète :
« Toi qui rêves avec des roses dans les mains
Et qui chantes, docile au hasard des chemins,
Tes vains bonheurs et ta chimérique souffrance,
Dis, entre nous et toi, quelle est la différence ?
— Voici, répond l’enfant. Levez la tête un peu ;
Voyez-vous cette étoile, au lointain du soir bleu?
— Sans doute !
— Fermez l’oeil. La voyez-vous, l’étoile ?
— Non, certes. »
Alors l’enfant pour qui tout se dévoile
Dit en baissant son front doucement soucieux : « Moi, je la vois encore quand j’ai fermé les yeux. »
Catulle Mendès
Ceinture noire
La fourmi et la cigale
La fourmi ayant stocké
Tout l’hiver
Se trouva fort encombrée
Quand le soleil fut venu :
Qui lui prendrait ses morceaux
De mouches ou de vermisseaux ?
Elle tenta de démarcher
Chez la cigale, sa voisine,
La poussant à s’acheter
Quelques grains pour subsister
Jusqu’à la saison prochaine.
« Vous me paierez, lui dit-elle,
Après l’oût, foi d’animal,
Intérêt et principal. »
La cigale n’est pas gourmande :
C’est là son moindre défaut.
Que faisiez-vous au temps froid ?
Dit-elle à cette amasseuse.
- Nuit et jour à tout venant
Je stockais, ne vous déplaise.
- Vous stockiez ? j’en suis fort aise ;
Et bien soldez maintenant ! »
Françoise Sagan
Ceinture noire
Les colchiques
Le pré est vénéneux mais joli en automne
Les vaches y paissant
Lentement s’empoisonnent
Le colchique couleur de cerne et de lilas
Y fleurit .Tes yeux sont comme cette fleur-là
Violâtres comme leur cerne et comme cet automne
Et ma vie pour tes yeux lentement s’empoisonne.
Les enfants de l’école viennent avec fracas
Vêtus de hoquetons et jouant de l’harmonica.
Ils cueillent les colchiques qui sont comme des
mères
Filles de leurs filles et sont couleurs de tes
paupières
Qui battent comme les fleurs battent au vent
dément.
Le gardien du troupeau chante tout doucement
Tandis que lentes et meuglant les vaches
abandonnent
Pour toujours
Ce grand pré mal fleuri par l’automne.
Guillaume Apollinaire
Ceinture noire
La cour de mon école
La cour de mon école
Vaut bien, je crois,
La cour de Picrochole,
Le fameux roi :
Elle est pleine de charme,
Haute en couleur;
On y joue aux gendarmes
Et aux voleurs;
Loin des Gaulois, des Cimbres
Et des Teutons,
On échange des timbres,
À croupetons;
Des timbres des Antilles,
De Bornéo…
Et puis on joue aux billes
Sous le préau.
Qu'on ait pris la Bastille,
C'est merveilleux,
Mais que le soleil brille,
C'est encore mieux !
Orthographe et problèmes
Sont conjurés.
École, ah ! que je t'aime
À la récré !
Jean-Luc Moreau
Ceinture noire
Les comédiens
Les comédiens
On dit souvent
Ça vend du vent
À la sauvette
Ils vont
De scène en scène
et partent en tournée
Et dès qu'ils sont vêtus
Des habits qu'on leur prête
Ils deviennent Jésus
Harpagon ou Hamlet
Les comédiens
Disent les gens
Ont bien souvent
Des amourettes
À force de jouer
Ils se prennent au jeu
Sans être Roméo
On s'éprend de Juliette
Juste le temps qu'il faut
Pour en souffrir un peu
Les comédiens
Quand l'âge vient
Quittent la scène
Et quand il leur advient
De vivre de longs jours
Sur cour ou sur jardin
Tout seuls ils se souviennent
De ce fichu métier
Qu'ils ont aimé
D'amour
Jean Roger Caussimon
Ceinture noire
Le Lion et le Rat
Il faut, autant qu'on peut, obliger tout le monde :
On a souvent besoin d'un plus petit que soi.
De cette vérité deux Fables feront foi,
Tant la chose en preuves abonde.
Entre les pattes d'un Lion
Un Rat sortit de terre assez à l'étourdie.
Le Roi des animaux, en cette occasion,
Montra ce qu'il était, et lui donna la vie.
Ce bienfait ne fut pas perdu.
Quelqu'un aurait-il jamais cru
Qu'un Lion d'un Rat eût affaire ?
Cependant il advint qu'au sortir des forêts
Ce Lion fut pris dans des rets,
Dont ses rugissements ne le purent défaire.
Sire Rat accourut, et fit tant par ses dents
Qu'une maille rongée emporta tout l'ouvrage.
Patience et longueur de temps
Font plus que force ni que rage.
Jean de La Fontaine
Ceinture rouge
La pomme et l’escargot
Il y avait une pomme
À la cime d'un pommier ;
Un grand coup de vent d'automne
La fit tomber sur le pré !
Pomme, pomme,
T'es-tu fait mal ?
J'ai le menton en marmelade
Le nez fendu
Et l'oeil poché !
Elle tomba, quel dommage,
Sur un petit escargot
Qui s'en allait au village
Sa demeure sur le dos
Ah ! Stupide créature
Gémit l'animal cornu
T'as défoncé ma toiture
Et me voici faible et nu.
Dans la pomme à demi blette
L'escargot, comme un gros ver
Rongea, creusa sa chambrette
Afin d'y passer l'hiver.
Ah ! Mange-moi, dit la pomme,
Puisque c'est là mon destin ;
Par testament je te nomme
Héritier de mes pépins.
Tu les mettras dans la terre
Vers le mois de février,
Il en sortira, j'espère,
De jolis petits pommiers.
Charles Vildrac
Ceinture rouge
Le Corbeau et le Renard
Maître Corbeau, sur un arbre perché,
Tenait en son bec un fromage.
Maître Renard, par l'odeur alléché,
Lui tint à peu près ce langage :
Et bonjour, Monsieur du Corbeau,
Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau !
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage,
Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois.
À ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie,
Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.
Le Renard s'en saisit, et dit : Mon bon Monsieur,
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l'écoute.
Cette leçon vaut bien un fromage sans doute.
Le Corbeau honteux et confus
Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.
Jean de La Fontaine
Ceinture rouge
Dans Paris
Dans Paris, il y a une rue;
Dans cette rue, il y a une maison;
Dans cette maison, il y a un escalier;
Dans cet escalier, il y a une chambre;
Dans cette chambre, il y a une table;
Sur cette table, il y a un tapis;
Sur ce tapis, il y a une cage;
Dans cette cage, il y a un nid;
Dans ce nid, il y a un oeuf,
Dans cet oeuf, il y a un oiseau.
L'oiseau renversa l'oeuf;
L'oeuf renversa le nid;
Le nid renversa la cage;
La cage renversa le tapis;
Le tapis renversa la table;
La table renversa la chambre;
La chambre renversa l'escalier;
L'escalier renversa la maison;
La maison renversa la rue;
La rue renversa la ville de Paris.
Paul Eluard
Ceinture rouge
L'Albatros
Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.
À peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à coté d'eux.
Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait !
Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.
Charles Baudelaire,
Les Fleurs du mal
Ceinture rouge
Promenade de Picasso
Sur une assiette bien ronde en porcelaine réelle
Une pomme pose
Face à face avec elle
Un peintre de la réalité
Essaie vraiment de la peindre
La pomme telle qu’elle est
Mais
Elle ne se laisse pas faire
La pomme
Elle a son mot à dire
Et plusieurs tours dans son sac de pommes
La pomme
Et voilà qui tourne
Dans son assiette réelle
Sournoisement sur elle-même
Doucement sans bouger
Et comme Duc de Guise qui se déguise en bec de gaz
Parce qu’on veut malgré lui tirer le portrait
La pomme se déguise en beau fruit déguisé
Et c’est alors
Que le peintre de la réalité commence à réaliser
Que toutes les apparences de la pomme sont contre lui.
Jacques Prévert
Ceinture rouge
Printemps
Tout est lumière, tout est joie.
L'araignée au pied diligent
Attache aux tulipes de soie
Les rondes dentelles d'argent.
La frissonnante libellule
Mire les globes de ses yeux
Dans l'étang splendide où pullule
Tout un monde mystérieux.
La rose semble, rajeunie,
S'accoupler au bouton vermeil
L'oiseau chante plein d'harmonie
Dans les rameaux pleins de soleil.
Sous les bois, où tout bruit s'émousse,
Le faon craintif joue en rêvant :
Dans les verts écrins de la mousse,
Luit le scarabée, or vivant.
La lune au jour est tiède et pâle
Comme un joyeux convalescent;
Tendre, elle ouvre ses yeux d'opale
D'où la douceur du ciel descend !
Tout vit et se pose avec grâce,
Le rayon sur le seuil ouvert,
L'ombre qui fuit sur l'eau qui passe,
Le ciel bleu sur le coteau vert !
La plaine brille, heureuse et pure;
Le bois jase ; l'herbe fleurit.
- Homme ! ne crains rien ! la nature
Sait le grand secret, et sourit.
Victor Hugo
Ceinture rouge
Les sept nains
La princesse Blanche-Neige,
Chez les sept nains qui la protègent,
Lave, nettoie, époussette,
Sept fois un, sept…
... Lorsqu'une vieille aux jambes torses,
Sept fois deux, quatorze,
Lui dit : "Prends ce beau fruit, tiens!"
Sept fois trois, vingt et un,
Mais un des nains frappe à la vitre,
Sept fois quatre, vingt-huit,
Et lui dit : "Garde-toi bien",
Sept fois cinq, trente-cinq,
"De mordre à ce fruit dangereux",
Sept fois six, quarante-deux,
"C'est un poison qu'elle t'offre!"
Sept fois sept, quarante-neuf,
La vieille, dans les airs, s'enfuit...
Sept fois huit, cinquante-six.
Et la Princesse des bois,
Sept fois neuf, soixante-trois,
Est sauvée par ses amis,
Sept fois dix, soixante-dix.
Jean Tardieu
Ceinture rouge
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