thierry le saëc
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Thierry Le SaëcLa PoéTique du TraiT
Marie-FrançoiSe Le Saux
GiLLeS PLazy
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édiTionS aPoGée
MuSée de VanneS
Les auteurs
GiLLes PLazy, écrivain et plasticien, a été longtemps journa-liste pour divers journaux ou magazines. il est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages parmi lesquels des romans, des nouvelles, des poèmes, des biographies, (eugène ionesco, Gustave courbet, Marlene dietrich, Picasso,…), des études consacrées à différents mouvements artistiques ou artistes(cézanne, Van Gogh, Matisse, Fra angelico, le douanier rousseau) et écrivains (Julien Gracq, henry Miller, Georges Perros, Tristan corbière, rené char). il est membre de l’asso-ciation internationale des critiques d’art.
Marie-Françoise Le saux est historienne de l’art, formée à l’université de rennes- 2, conservateur en chef des musées de Vannes. Sélection des publications du musée concernant l’art du xxe siècle dans le domaine de l’estampe :- Jean-Pierre Pincemin , Somogy / musée de Vannes, 1998- François Morellet , musée de Vannes, 1999- Aurelie Nemours, éditions rMn / musée de Vannes, 2001.elle est également l’auteur de la biographie de Geneviève asse dans Geneviève Asse, Silvia Baron-Supervielle, Jean Leymarie, éditions Palantines, 2004.
antoine Graziani, écrivain et poète, est né en corse en 1951. il a publié différents recueils de poèmes composés de suites ininterrompues. il a publié dans les revues Clivages, Po&sie, Java, L’Étrangère, Rehauts, La Canopée… il a égale-ment écrit de nombreuses préfaces et articles critiques sur des plasticiens : claude Viallat, Guy Le Meaux, rafols casa-mada, anna Mark, Thierry Le Saëc,… avec lesquels il réalisera aussi des livres d’artiste.
Si Thierry Le Saëc ne s’interdit pas des fulgurances, son travail, le plus souvent, est tenu, voire tendu, d’une intério-rité sans faille, condition même de l’émotion. Les tonalités colorées ramassées autour de rouges profonds, de verts sombres sur lesquels se superpose un écran de traits noirs serrés qui assourdissent l’ensemble, confèrent aux peintures une densité austère. depuis plus de deux ans, cette série des traits occupe l’artiste qui les décline sur les formats les plus variés.Le projet de l’exposition à la cohue, avec ses murs imposants et la rudesse de la pierre, a déterminé le peintre à poursuivre ses recherches sur de très grandes toiles, pour certaines en diptyque. Le geste mobilise tout le corps, comme dans la marche, ou la danse.cette œuvre renoue aussi avec des séries antérieures où la tache, longuement, questionne la couleur, la lumière, l’es-pace. rien de définitif donc, le geste, toujours recommencé, animé par la pensée vivante fait l’œuvre. Pour Thierry Le Saëc, cette méditation active est la seule manière de vivre.
Marie-Françoise Le Saux
iSBn 978-2-84398-382-5éditions apogée - 28 € TTc
Pastel gras sur papier2010
25 x 17 cm
Thierry Le SaëcLa PoéTique du TraiT
marie-françoise le saux
gilles plazy
antoine graziani
suivi d’un entretien avec michel et christine ségalen
musée de vanneséditions apogée
Thierry Le SaëcLa PoéTique du TraiTMarie-Françoise Le Sauxconservateur en chef des musées de Vannes,commissaire de l’exposition
Le travail de Thierry Le Saëc, bien que souvent montré, ne se livre pas facilement. Les entrées dans
l’œuvre sont multiples, indissociables et nécessaires à la compréhension du tout. Rien de
linéaire, contrairement aux apparences, mais une accumulation par strates serait une image
juste de cette production considérable.
Tout part du livre, au cœur de son activité créatrice, autant dire de sa vie. Comme lecteur assidu tout
d’abord, auteur de poésie, collectionneur d’ouvrages d’artistes qu’il admire, artisan inspiré en
matière de composition, impression et édition. Les textes poétiques dont il se laisse traverser
entrent en résonance avec son propre monde. Le livre ouvre et scande des séries de dessins,
de gravures, puis de peintures, en un processus complexe. Ainsi les poèmes d’Anne de Staël,
« Océanique », génèrent-ils une suite de gravures qui évoquent l’ardoise griffée : une série
d’eaux-fortes imprimées sur un fond noir de papier japon contrecollé. La justesse, vibrante,
du sillon creusé, le choix averti du papier qui restitue au plus près le projet d’impression, tout
ici est réflexion, précision, quasi-perfection.
Thierry Le Saëc graveur, à Vannes c’est probablement le versant de son activité qui l’identifie le mieux.
Aux ateliers municipaux de pratique artistique du manoir de Trussac, il apporte un savoir-faire
technique, mais bien plus encore, un regard, un espace d’échanges, des confrontations d’ex-
périences, toujours dans le respect de la singularité de l’autre. Thierry Le Saëc cultive aussi un
sens aigu du partage. L’estampe étant un multiple, c’est tout naturellement qu’il entreprend
de réaliser un tirage de chacune de ses planches gravées pour les collections du musée.
D’autres séries, non titrées, de dessins ou de gravures rehaussées de pastels gras, se déclinent comme
une longue conversation ininterrompue, une sorte de poème fleuve. L’artiste ne peut se satis-
faire d’une pièce isolée pour exprimer une idée, il lui faut le multiple — original —.
La peinture n’échappe pas à cette nécessité de la série. La couleur conquiert là une place plus affirmée.
Si, d’une manière générale, le travail de Thierry Le Saëc est d’abord « chose mentale », avant
de s’ancrer dans la matière, il arrive que des ensembles surgissent, inattendus, prenant au
dépourvu le peintre lui-même. C’est le cas dans cette série de petites pièces sur bois, où le
vert et le rose se bousculent dans une urgence peu fréquente. Ces peintures, brossées en un
temps très court, sont accrochées au mur de l’atelier, elles témoignent de la part insaisissable
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acrylique sur bois2009
28 x 35 cm x 7
de la création, ce jaillissement irrépressible que l’on nomme « l’art ». Si Thierry Le Saëc ne
s’interdit pas ces fulgurances, son travail, le plus souvent, est tenu, voire tendu, d’une intério-
rité sans faille, condition même de l’émotion.
Les tonalités colorées ramassées autour de rouges profonds, de verts sombres sur lesquels se superpose
un écran de traits noirs serrés qui assourdissent l’ensemble, confèrent aux peintures une
densité austère. Depuis plus de deux ans, cette série des traits occupe l’artiste qui les décline
sur les formats les plus variés.
Le projet de l’exposition à la Cohue, avec ses murs imposants et la rudesse de la pierre, a déterminé le
peintre à poursuivre ses recherches sur de très grandes toiles, pour certaines en diptyque. Ces
formats inhabituels peints dans l’atelier de Saint-Armel sont la vérification de ce que le trait
ouvre de sensation. Le geste mobilise tout le corps, comme dans la marche, ou la danse.
Dans ce travail récent, la réponse éclate, évidente parce qu’éprouvée. La peinture est question d’es-
pace et n’est en rien assujettie au format. Elle est paysage, respiration, aussi nécessaire au
peintre que ses longues randonnées en montagne. Mais Thierry Le Saëc livre peu la part trop
personnelle de ses expériences de vie. Pas d’épanchements complaisants dans les nombreux
catalogues qui lui sont consacrés. L’œuvre met une prudente distance entre la réalité et son
expression artistique. Tout juste pouvons-nous parfois apercevoir, dans la fenêtre de l’ordina-
teur, la photographie d’un paysage de vacances glissée entre deux fichiers d’œuvres.
D’où vient pour l’artiste ce sentiment d’être allé jusqu’au bout d’un cycle, d’une réflexion ? Qu’une ques-
tion d’ordre plastique, pour un temps, va le laisser en paix ? Cette interrogation obstinée de
l’espace au moyen de la ligne s’achève et ouvre un nouvel horizon sur une toile que Thierry Le
Saëc ressent comme joyeuse, qualificatif étonnant attaché au dernier tableau de l’exposition
qu’il « reconnaît », comme on le dit d’une vieille connaissance. Cette œuvre renoue avec des
séries antérieures où la tache, longuement, questionne la couleur, la lumière, l’espace. Rien de
définitif donc, le geste, toujours recommencé, animé par la pensée vivante fait l’œuvre. Pour
Thierry Le Saëc, cette méditation active est la seule manière de vivre.
De fines tiges de métal aux signes mystérieux, des cupules à la matière incertaine, grattées, colorées,
posées au sol, ces sculptures de Henri Larrière et Sophie Melon, ont été choisies par Thierry Le
Saëc pour venir dialoguer avec ses peintures, dessins, estampes. Cette invitation marque la
reconnaissance d’une sensibilité commune, une vision partagée du monde et de la création
et le désir d’ouvrir au visiteur des champs de perception inattendus.
Le spectacle de Carolyn Carlson, Poetry Event, moment de danse et de grâce dans l’espace même de
l’exposition, ajoute encore à cette rencontre où la ligne du corps, le trait dessiné, la forme
fermée de la sculpture révèlent un monde de justesse et de poésie. Un arrêt dans le temps,
sublime et précieux s’offre ainsi à chacun.
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acrylique sur toile2010190 x 400 cm
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regarder La PeinTureune LeTTre à Thierry Le Saëc
gilles Plazy
Regarder la peinture, cela se fait-il avec des mots déjà sur la langue, de ce discours si prompt à se plaquer
sur l’expérience dans le désir de classer, d’expliquer ? Le critique, il faut bien qu’il pense,
puisque c’est au tournant de la parole, de l’écriture qu’on l’attend, et la pensée, c’est déjà du
langage, des mots qui viennent sur la peinture. Et cela non sans préjugés, avec son savoir, sa
culture, sa petite théorie personnelle, ses idées sur l’art, sur la vie, ce qu’il sait de l’histoire de
l’art, ce qu’il attend encore de l’art et des artistes. Et le voici qui regarde, les yeux pris dans
le discours naissant, la tête pleine de pensée, au lieu de s’ouvrir sans idée préconçue à ce qui
se propose à lui.
Nous voici dans ton atelier de Kergollaire, sur ces deux étages en rez d’un jardin à deux niveaux, dont
rien ne se laisse ici voir. Là, tout à ton travail, tu n’es pas distrait par ce qu’à d’autres heures
tu apprécies pleinement : une nature certes redessinée d’une main d’homme, mais tout de
même nature, arbres, herbes, fleurs et chants d’oiseaux. Tu peux bien te nourrir de cette
campagne d’un Morbihan dont tu es originaire, en avoir plein le regard, plein les poumons,
en vivre donc, peut-on dire, il n’empêche que le travail de l’art se fait comme en cellule, maté-
riellement coupé du monde, la peinture à l’étage supérieur ; la gravure, les livres d’artiste,
le travail sur l’ordinateur et l’imprimante à l’étage inférieur, dans une atmosphère de cave
encombrée. Réclusion, repli sur soi, cela d’emblée se voit, tu es un peintre du recueillement,
non de l’expansion. Je dis peintre, par commodité, mais ce mot ne suffit pas pour dire l’en-
semble de ton activité artistique. C’est pour cela qu’on a inventé, au xxe siècle, le qualificatif
plasticien pour accompagner le terme artiste, mais le mot à mes oreilles sonne dur, artificiel,
avec un écho d’industrie qui est inopportun.
Peintre, donc, d’abord, tu l’es par l’envergure de l’œuvre peint, l’évidence des tableaux accomplis en
quantité depuis des années, aussi par le prestige attaché depuis toujours à la peinture plus
qu’à l’estampe et à l’illustration d’ouvrages. Illustration, encore un mot inconvenant, puis-
que nous n’en sommes plus au temps de l’enluminure ornant, souvent si magnifiquement,
des ouvrages anciens ; non plus au temps des livres aux pages d’images incluses dans celles
de texte. Mais comment nommer celui qui conçoit, met en page, imprime et confectionne
quelquefois entièrement de ces ouvrages qu’un usage récent nomme livres d’artiste ? C’est
là un pan important de ton activité artistique, depuis ce premier livre, Éloge de l’ombre,
composé d’un poème de toi et de huit eaux-fortes. Car tu écris aussi, même si cela est une
part discrète…
La peinture, donc, en premier lieu, dans cette pièce austère où l’espace se défend contre l’encombre-
ment, ménageant juste ce qu’il faut de place pour le geste du peintre et le recul pour prendre
la mesure du tableau accroché au mur. Des œuvres récentes sont là, adossées les unes aux
autres ; d’autres, nombreuses, sont dans un pavillon, une maison-cabane que tu as érigée
pour elles dans ton jardin. Tu nous montres des toiles, de ces toiles qui sont d’une récente
avancée, œuvres en lesquelles le trait est souverain, qui dans l’emprise du dessin ne fait pas
naître de forme, se plaît à s’étendre d’un bord à l’autre de la toile, ou presque. Il peut suffire
pour animer un espace ou bien, dans la profusion, tend à composer un plan. Mais pour toi le
trait ne va pas sans retrait, dis-tu. C’est que cette simplicité d’un trait, fût-il un grand nombre
de fois répété, implique un retrait de l’artiste, qui se limite à un geste simple, ne laisse pas
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acrylique, vernis sur papier kraft contrecollé sur toile1997160 x 130 cm
s’élancer son imagination, bride toute tentation d’expression flagrante. Pourtant sensible est
ce trait, tracé d’une main assez joueuse pour le moduler, le faire même danser dans une
élégante oscillation. Tu es quelqu’un de retenu, comme on dit de celui qui ne cherche pas
à se mettre en avant, mais n’en est peut-être, dans sa discrétion, que plus présent que bien
d’autres. Il y a là du minimal (que je dis sans isme) ; une économie de moyens que je considère
comme une belle preuve d’éthique artistique, ou la marque d’un esprit classique, à distance
de toute effusion baroque.
Est-ce donc cela, regarder la peinture ? Me voici d’emblée dans un mouvement de mots, de pensées et
me viennent en comparaison des noms d’artistes, de mouvements qu’on a vus éclore au siècle
dernier, ou même plus anciens tant il est vrai que la peinture qu’on dit abstraite n’est pas
entièrement coupée de celle qui l’a précédée. Abstraction, c’est aussi un mot qui demande
réflexion, que tu ne revendiques pas pour qualifier la peinture que tu fais, peu enclin que
tu es à la séparer catégoriquement de la figuration. Mais peu importe et, pour l’instant,
gardons-le, puisque, par l’usage qui en est fait, il nous permet de désigner cette nouvelle voie
de la peinture qui ni ne se fonde sur la représentation de motifs de l’expérience visuelle, ni
ne se contente d’effets décoratifs… Il faudrait pouvoir se trouver là, devant un tableau, naïf,
innocent, ouvert à l’accueil de l’œuvre inconnue, présence nouvelle, originale, être (parce que
c’est bien d’un être qu’il s’agit) soudain apparaissant pour surprendre le regard, le provoquer,
le séduire, l’intriguer, venant vers lui dans la force de ses formes et de ses couleurs, ou bien
l’appelant, l’invitant à se glisser, ou à plonger, dans son espace.
Dans l’atelier, dans la mémoire qui nous fait revisiter des expositions, et avec l’aide des catalogues qui
témoignent en images, faisons-nous une petite rétrospective de ton œuvre peint. Commençons
acrylique sur papier japon contrecollé sur papier vélin199850 x 50 cm
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acrylique et pigment sur papier kraft contrecollé sur toile2001140 x 114 cmcollection particulière
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« […]
Je vous en supplie
faites quelque chose
apprenez un pas
une danse
quelque chose qui vous justifie
qui vous donne le droit
d’être habillés de votre peau de votre poil
apprenez à marcher et à rire
parce que ce serait trop bête
à la fin
que tant soient morts
et que vous viviez
sans rien faire de votre vie. »
Extrait de Prière aux vivants pour leur pardonner d’être vivants, Charlotte Delbo, Auschwitz et après, tome II, Une connaissance inutile.
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acrylique sur toile2008150 x 360 cmTriptyque
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acrylique sur toile200955 x 46 cm
Page 38 :acrylique sur toile2009150 x 120 cm
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acrylique et pastel sec sur toile2010
150 x 120 cm
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acrylique et pastel gras sur toile2010150 x 120 cm
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Pastel gras sur papiermarouflé sur toile201060 x 50 cm
acrylique et pastel gras sur toile2010
150 x 120 cm
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acrylique et pastel gras sur toile2010
180 x 480 cm
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acrylique et pastel gras sur toile2010
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Série du reconnaiSSabLe
antoine graziani
image première
La conscience quotidienne, diurne ou nocturne, ne connaît pas la conscience savante, qui la précède et
l’accompagne. Elle ne connaît pas la méthode de son savoir, ni son désir. Elle sait, au mieux,
les avoir oubliés, être venue pour cet oubli, elle se sait dépassée par la sensation, dont elle
n’est pas la fin, ou la destination.
La conscience savante, comme Rimbaud dirait la musique savante, la conscience inconnue abandonne
des traces. Ce sont ses exigences, des éclairements soudains, des éblouissements ouvrant
imprévisiblement les voies du monde, qui est lui-même une extase.
C’est la sensation en voyage vers la gravitation parallèle du temps. Réponse véloce, immédiate à ce qui la
produit et l’informe, elle se dirige vers un savoir, un ordre dont elle montre un instant comme
la mémoire close et lumineuse. Elle laisse la mémoire de l’oubli, et l’idée bouleversante d’une
cohérence qu’elle rejoint. L’émoi qu’elle laisse de son évanescence porte à l’expression. L’image
est bâtie du souvenir étrangement, abruptement revivifié, de cette cohérence inconnue.
L’image est ce qui est saisi d’une volonté de sens, qu’elle tente de représenter, en laquelle elle s’évanouit,
avec laquelle elle se confond.
Il y a eu une première image entraperçue, contemporaine de l’oubli et du surgissement de la conscience
actuelle, puis disparue, repartie vers sa source, aussitôt qu’elle nous a reconnus, aussitôt que
nous nous sommes sentis reconnus. Nous avons souvenir de cette première figuration du
sens, du premier motif de toute composition. De ce premier lien.
chant
Imago ignota, image inconnue, c’est le titre d’une série de peintures de Thierry Le Saëc, exposée à Quim-
per tout récemment. Mais toutes les peintures de Thierry Le Saëc, même étrangères à cette
série, réfèrent à ce motif, fascinant par sa structuration et son retour à l’invisibilité, par le signe
qu’il propose dans sa disparition et l’appel insistant qu’il transmet.
La peinture y répond dans un langage dont elle mime le caractère spécifique par le moyen de la série.
Langage spécifique donc, comme celui des oiseaux.
série
Plus que l’analyse de l’objet qu’elle traite, ou le parcours exhaustif de ses orientations, la série en est la
reprise en vue d’en repérer l’information, et le passage qu’elle constitue, car les séries toujours
communiquent.
À propos d’un poème de Jaufré Rudel, Gregory Nagy note ceci : « La métaphore contenue dans le
verbe provençal refranhar peut être comprise comme un équivalent auditif d’une métaphore
visuelle fondée sur la réfraction de la lumière (cf. latin re-fringere). L’image de la réfraction
intervient aussi dans deux noms provençaux : refrins, signifiant “écho”, au sens d’un élément
sonore qui se répète, et refrim, signifiant “chant d’oiseau”, “cri d’animal”, et “refrain”. »
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Série de dessinsPastel gras sur papier
2006 / 201025 x 17 cm
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Pages 110 à 113 :Pastel gras
2010120 x 80 cm
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Pastel gras2010
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Être dans le dénuement, dans l’attente et au plus profond
chercher le monde, celui que nous portons et celui qui
nous entoure. Chercher, creuser.
Être attentif au chant de l’oiseau, au bruit du moteur
dans la cour, au vent qui pousse les nuages, aux sillons
blancs laissés par l’avion dans le ciel, à la rosée qui embue
la vitre, aux chuchotements ou à la ferveur de ceux qui
passent dans l’allée et à ce clair matin qui s’annonce.
Chercher, creuser. Être dans le dialogue avec ceux qui
furent, chercher, creuser. Être parmi les siens aujourd’hui,
chercher, creuser.
Être dans le temps de l’action et travailler le temps, l’es-
pace, la lumière. Prendre le chemin le plus droit ou le plus
tortueux mais chercher, creuser.
Être autant dans la question que dans la réponse et tenter
sans cesse une « lucide traversée des apparences ».
Thierry le Saëc
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eurydiceétudes pour un livre de Jean-Pierre chevaisimpression numérique et graphite201050,5 x 33 cm
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« Donner à voir est le titre d’un beau recueil
d’Éluard. On n’y voit rien répond avec
malice Daniel Arasse. Ce que donne à voir
la peinture de Thierry Le Saëc : la peinture,
c’est-à-dire la couleur, c’est-à-dire la lumière,
c’est-à-dire l’espace.
On n’y voit rien puisqu’on n’en a plein les
yeux. La peinture crève les yeux. Donne à
voir le silence. Montre ce que la musique
dissimule dans ses interstices. »
Daniel Kay, Ce que les images ignorent.
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Ludovic degrooteà notre hauteurSept photographies numériques rehaussées à la gouache sur vélin bFK de rives emboîtage de l’atelier Jeanne Frère14,5 x 12,5 cm, 34 p., 16 ex., 2008
daniel KayFiniS Terrae, brest-Lisboa(traduction en portugais de rémy Lucas)Sept compositions typographiques sur vélin bFK de rives emboîtage de l’atelier Jeanne Frère22,50 x 15 cm, 28 p., 16 ex., 2010
daniel Kayimago ignotadouze photographies rehaussées au crayon aquarelle sur vélin bFK de rives emboîtage de l’atelier Jeanne Frère32 x 24 cm, 68 p. , 16 ex., 2008
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