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Construire bioclimatique: Architecture 12

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Page 1: Architecture Construire - ddata.over-blog.comddata.over-blog.com/xxxyyy/2/63/07/84/habitat-naturel-juin-06.pdf · Une boussole et un peu de logique Dans un second temps, la question

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On évoque aujourd’hui, encore trop timidement,

la possibilité de se passer d’énergie fossile, de

limiter ses besoins en chauffage, de réaliser une maison

intelligente, en harmonie avec son environnement,

agréable à vivre... Un mot résume toutes ces aspirations :

bioclimatisme. Plus qu’une simple réflexion, c’est une

manière très concrète de concevoir le bâti, qui pourrait

bien être la norme de demain.

…entre équilibre et raison…

Texte : Claire Leloy

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Dans les années 70, alors que la crise du pétrole sévit, une nouvelle réflexion incite à penser la construction sous un jour moins énergivore. La « conception climatique » est née, mettant à profit les calories dont nous gratifie le soleil pour chauffer les maisons. Trente ans plus tard, alors que les énergies fossiles s’épuisent davantage chaque jour, cette démarche trouve un regain d’intérêt auprès des professionnels comme des particuliers. Mais la conception

bioclimatique d’aujourd’hui n’est plus la conception climatique d’hier ! « En plus de la volonté de tendre vers l’autonomie énergétique, nous explique Jean-Pierre Oliva, le bioclimatisme intègre la notion de respect de l’environnement dans la construction. » Il s’agit donc de penser des constructions qui, non seulement ne consomment que peu d’énergie mais qui, en plus, mettent en œuvre des matériaux sains pour l’environnement comme pour l’homme.

Construction raisonnée...L’orientation sud d’une maison ou d’un appartement est une exigence essentielle. Elle relève du bon sens. La conception bioclimatique cherche à profiter, le plus simplement possible, de ce que la nature nous offre sans limite. Ainsi est-il question d’utiliser au maximum le rayonnement solaire pour bénéficier de sa chaleur en hiver ; la maison est, par ailleurs, conçue pour garantir une agréable fraîcheur en été. Pour parvenir à cet équilibre, la construction doit être « bien pensée ». Il faut comprendre le terrain, ses courbes et ses volumes, étudier les vents dominants, analyser la course du soleil et enfin envisager la maison qui trouvera sa place dans ce contexte. Les auteurs de « La Conception Bioclimatique » sont catégoriques : « Pas question de martyriser un terrain pour plaquer dessus l’idée que l’on se fait de «la maison de ses rêves » ! Il faut savoir rester modeste et retrouver la raison dont nos aînés faisaient preuve pour construire un habitat à l’écoute de son milieu.

…pour consommation raisonnable Mais pourquoi « penser la maison en fonction du terrain » ? Pour la rendre la plus économe possible ! Ainsi, on analyse les vents dominants afin d’imaginer la forme idéale : celle qui la protége de la bise glaciale sans empêcher la brise légère d’entrer ; un domaine où les reliefs ont aussi un rôle protecteur à jouer. On vérifie

Cette maison a reçu cette année le premier prix de la biennale de l’habitat durable à Grenoble. En

façade sud, elle bénéficie d’apports solaires passifs grâce à de nombreux vitrages et est protégée par

des pare-soleil en toile tendue démontables.

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que rien ne fait écran au sud (ou alors on y remédie) pour profiter abondamment du soleil et on interprète la course de ce dernier pour penser au mieux la construction de sorte qu’elle bénéficie d’un bon éclairage et de la chaleur naturelle... Mais la gageure consiste surtout à concilier ce qui, à première vue, paraît inconciliable : avoir naturellement chaud en hiver et être au frais l’été venu, sans effort, ni dépense énergétique superflue. « Au solstice d’été, le soleil décrit un angle d’approximativement 60°, nous éclaire le bio-constructeur Jean-Claude Tremsal. Mais au solstice d’hiver, il est à 20° ». Savoir « jouer » avec les hauteurs du soleil et l’inclinaison de ses rayons est donc une des solutions (que l’on combinera avec d’autres) : on protège ainsi la maison (avec des débords de toiture, une casquette, des plantations) pour qu’elle capte uniquement au bon moment.

Une boussole et un peu de logiqueDans un second temps, la question de la maison se pose. Une configuration compacte, offrant un bon coefficient de forme (le rapport surface/volume), est souvent privilégiée puisqu’elle permet de limiter les surfaces déperditives. Mais, pour optimiser cette forme, un point ne souffre pas d’être oublié : l’organisation du lieu de vie. Un maximum de vitrages est ainsi placé sur la façade sud où, le plus fréquemment, se trouvent les pièces à vivre. Sur ce point, on peut encore aller plus loin et intégrer une serre qui sera d’autant plus efficace qu’elle sera encastrée. « Avec une serre bien conçue, précise Jean-Pierre Oliva, on aura non seulement un apport de calories solaires

15 m2 de capteurs solaires assurent le chauffage de la dalle du rez-de-chaussée. En cas d’intempéries

le poêle à bois à post-combustion (de 6kW) installé dans le séjour prendra le relais. Ainsi

équipée, la maison ne nécessite aucun chauffage complémentaire en étage.

3 questions à…Jean-Pierre Oliva Jean-Pierre Oliva, un des pionniers de l’habitat écologique en France, pratique la construction bioclimatique depuis 20 ans. Maître d’œuvre, formateur, il est aussi auteur de l’ouvrage de référence « L’isolation écologique ». Son prochain ouvrage, co-écrit avec Samuel Courgey, s’intitule « La conception bioclimatique ».

: Le bioclimatisme est-il une préoccupation aujourd’hui ?Jean-Pierre Oliva : Cette réflexion a été entamée il y a plus de 30 ans, suite au choc pétrolier. Il y a une dizaine d’années, l’autonomie énergétique et la bio-construction se sont rapprochées. Ainsi, le bioclimatisme actuel vise un habitat tout à la fois économe en énergie pour son chauffage et son rafraîchissement, sain pour ses habitants, constitué de matériaux les moins producteurs de gaz à effet de serre possible : bref, une maison intelligente qui ne privilégie aucun aspect au détriment d’un autre.

: En dehors de ce duo bio-construction/autonomie énergétique, la réflexion sur la conception bioclimatique a-t-elle évoluée ?J.-P. O. : Oui, à tel point que le moment était venu de faire un bilan sur ces évolutions. D’une part, le bioclimatisme a bénéficié du progrès technique en certains domaines (les vitrages par exemple). D’autre part, le bioclimatisme ne réfléchit plus dans les mêmes termes : dans les années 70, on choisissait souvent un matériau pour ses seules qualités d’isolation ou d’inertie. Et on corrigeait ses défauts avec d’autres matériaux, qui eux-mêmes posaient de nouveaux problèmes... A l’heure actuelle, le défi consiste à sélectionner des matériaux sur un ensemble de qualités, sans défauts à corriger. Dans cette optique, les matériaux « premiers » comme le bois, les fibres végétales, la terre, reviennent en force.

: En sous-titre de votre livre, vous parlez de maisons économes et confortables à la fois... est-ce véritablement possible ?J.-P. O. : Actuellement, la RT 2005 vise une consommation aux environs de 100 kW/h par m2 et par an : avec une conception architecturale bioclimatique cohérente, on peut arriver à diviser par deux ces objectifs, sans surcoûts notables. Par exemple, avec des parois intérieures à 20°C, on n’a plus besoin que d’un air à 16°C pour se sentir bien, et on économise du même coup jusqu’à 50% de consommation par rapport à un air à 20 ou 21°C ! Et cela sans renoncer à quelque confort que ce soit, ni à la beauté, bien au contraire.

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rappelons-le, le meilleur des isolants) protège et renforce l’isolation des autres pièces. C’est pour cela que dans les maisons d’autrefois, le couloir de circulation se trouvait souvent au nord. Enfin, il est tout à fait possible de masquer cette façade pour mieux protéger la maison. On a alors recours à des volumes, des arbres ou, profitant d’une pente du terrain, on enterre (même partiellement) cette partie.

gratuites en hiver, un outil de rafraîchissement en été, mais aussi un nouvel espace à vivre très attractif la majeure partie de l’année. »Au nord, il sera astucieux de percer le moins d’ouvertures possible. Une maison bioclimatique utilise au nord ce que l’on appelle « l’effet tampon ». L’idée est de placer les pièces les moins usitées (garage, sas d’entrée, buanderie, chaufferie) qui, moins chauffées, feront office d’intermédiaire entre l’extérieur et les pièces plus confortables. Leur présence (et surtout l’air qu’elles contiennent qui est,

Construite avec des matériaux sains et bénéficiant d’une excellente isolation (ouate

de cellulose dans les murs et en toiture), cette maison dispose en plus d’une toiture terrasse

végétalisée qui améliore son inertie.

: D’un point de vue constructif, qu’est-ce qu’une maison bioclimatique a de plus qu’une maison « traditionnelle » ?Jean-Claude Tremsal : Les maisons bioclimatiques sont des habitats à faibles besoins en énergie... une caractéristique qui a forcément des répercussions en termes constructifs. On réussit à diviser par 4 les besoins grâce d’une part à une isolation thermique renforcée (bien plus performante que ne l’exige le label « très haute performance

énergétique »), d’autre part, grâce aux apports solaires passifs. On utilise des matériaux de forte densité qui auront une grande capacité thermique, assurant un bon déphasage. C’est indispensable ! Enfin on utilise des énergies renouvelables (solaires et biomasse) pour couvrir les besoins restants.

: Est-ce que ce type de construction vous semble plus complexe à réaliser ?J.-C. T. : En réalité non. Du moins, ce n’est pas sensé l’être. Dans certains pays comme l’Allemagne,

la conception bioclimatique est quasiment une norme. En France ce n’est pas tout à fait le cas, mais ce n’est pas pour cela que c’est une démarche complexe. Une fois que l’on a saisi les points essentiels, on trouve les applications techniques. Ainsi, pour avoir une meilleure isolation, on fait une isolation par l’extérieur, ainsi les murs ne sont jamais froids ; pour profiter au mieux du soleil, il suffit de connaître sa course selon les saisons...

: Vos réalisations sont toutes des constructions « bois massif »,

le lien est-il évident ?J.-C. T. : Toutes nos maisons sont effectivement en bois massif. Cela pour plusieurs raisons : la construction bois est une construction sèche, rapide et respectueuse de l’environnement. Si on prend garde (traitements et lasure non toxiques avec des produits naturels, essences de bois indigènes, adjonction d’isolants naturels...), ce matériau constitue une base saine. De plus, une maison bois massif offre un bon déphasage et d’excellentes qualités hygrométriques.

3 questions à…Jean-Claude Tremsal Jean-Claude Tremsal est constructeur. Largement impliqué dans la bio-construction, il réalise (via ses entreprises Mégabois et La Vieille Montagne Solaire) des maisons bioclimatiques.

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Protection renforcéePour exploiter au mieux les apports solaires passifs et le rafraîchissement naturel, l’habitat se doit de disposer d’une isolation irréprochable. Une isolation thermique renforcée évite les déperditions en même temps qu’elle empêchera la surchauffe d’été. « Plus un isolant est lourd, plus il est efficace, intervient Jean-Claude Tremsal. Car la capacité thermique d’un matériau est, entre autres, fonction de sa densité. » L’inertie, ou la capacité d’un matériau à stocker de l’énergie, découle de cette caractéristique. Une qualité plus qu’intéressante car un matériau offrant une bonne inertie thermique change d’état moins rapidement. Les murs sont ainsi capables de conserver la chaleur ou la fraîcheur produite pour la restituer plusieurs heures après. C’est ce qu’on appelle le déphasage ! « Il s’agit du temps que met la chaleur ou le froid à traverser une paroi », explique encore Jean-Claude Tremsal. Une notion essentielle qui dépend, elle aussi, de la qualité des matériaux que l’on emploie et de leur capacité thermique. Laine de chanvre ou laine de bois pour l’isolation, ou encore brique monomur ou bois massif (qui jouent à la fois le rôle de matériau de structure et d’isolant) disposent de ces qualités et sont, de plus, des matériaux naturels dont la facture énergétique est plus que faible au regard de celle d’une laine de roche, d’une laine de verre ou d’une poutre en acier.

Outils intelligentsLa conception bioclimatique s’appuie sur des outils intelligents qui savent mettre les vertus de la nature en exergue. Mur capteur pour stocker les calories (intégralement stockées dans la masse du mur, ou partiellement dans

Trouver le juste équilibreCe schéma, issu de la Conception bio-climatique (Éd. Terre

Vivante), explique que dans un projet (où l’homme est au

centre) il est question de trouver un équilibre entre 5 pôles :

le lieu qui accueille le projet, la forme architecturale, les

matériaux qui permettent de la matérialiser, la mise en œuvre

qui lui donne réalité, et enfin les fluides et les énergies*,

nécessaires d’abord au processus de construction, puis ensuite

au fonctionnement de la construction lorsqu’elle sera habitée.

Le but étant de trouver le point d’équilibre qui permettra une

réduction maximale du pôle « fluides et énergies ».

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cette masse et partiellement distribuées par l’air), toiture végétalisée pour accroître l’inertie thermique, vitrage performant pour augmenter la surface vitrée sans pénaliser l’isolation, plantation d’arbres à feuillage caduc pour masquer la maison des rayons en été et les laisser passer en hiver..., les solutions sont aussi logiques que nombreuses pour gérer l’ambiance thermique. Mais attention : il n’est nullement question, sous prétexte de garder la chaleur ou de maintenir la maison au frais, de rester enfermé dans un air vicié. Aussi la question de la ventilation est-elle incontournable. Or, lorsque l’on sait qu’une simple VMC peut extraire jusqu’à 12 fois par jour la chaleur produite dans une maison, on mesure à quel point il est nécessaire que cette ventilation ait l’intelligence de ne pas « jeter l’énergie par les fenêtres ». Les possibilités allant dans ce sens abondent. Que l’on parle de ventilation à double flux avec récupérateur de chaleur, de puits canadien ou encore de capteurs à air, l’objectif demeure constant : il s’agit de moduler la température de l’air entrant (capté sur le toit, sur les parois... et chauffé par le rayonnement, la terre ou encore l’air sortant).

A ne pas manquer !

La conceptionbioclimatique

En librairie depuis le 22 mai 2006, cet ouvrage explique ce qu’est le

bioclimatisme d’aujourd’hui. A la lumière des évolutions récentes en

termes de performance et d’un souci environnemental constant, les

auteurs, Jean-Pierre Oliva et Samuel Courgey, remettent à jour ce que

l’on savait de cette démarche. Principes de base, outils, techniques,

dimensionnements... rien n’a été oublié dans cette réflexion aussi précise

que facile à aborder. Un livre qui s’adresse aussi bien aux personnes qui

construisent qu’à celles qui rénovent.

244 pages – prix : 35 € – parution : mai 2006 – editions terre ViVante

– domaine de raud – 38710 mens – tél. : 04 76 34 80 80

Pas de maison bioclimatique sans serre bioclimatique ! Accroissant considérablement les apports de chaleurs en hiver, elle peut aussi avoir une fonction rafraîchissante en été.

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Vivre le bioclimatiquePour résumer, la conception bioclimatique est un retour de l’habitat vers le bon sens. Avoir le bon sens de ne pas bâcler la phase de réflexion. Avoir le bon sens de ne pas construire « à la va-vite ». Avoir le bon sens de ne pas économiser sur ce qui ne se voit pas (les matériaux, la mise en œuvre... souvent le plus important). Mais, enfin et surtout, avoir le bon sens de vivre en harmonie avec la maison et de ne pas gâcher ces superbes apports avec de vilains réflexes. Rouler moins, chauffer mieux, ne pas gaspiller et réapprendre à se sentir bien dans une maison sont autant de perspectives qui dévoilent un certain mieux-vivre. Car le bioclimatique, c’est avant tout un choix de vie.

Cette maison bioclimatique située à Lacanau a été conçue par le cabinet Matières d’Espaces. L’objectif ? Concilier bioclimatisme et esthétique régionale. Ici, la coursive a été dimensionnée de manière à ombrager totalement les baies vitrées l’été et à laisser pénétrer les rayons du soleil d’hiver.

: Le bioclimatisme est au cœur des préoccupations du cabinet Matières d’Espaces... Pourquoi avoir pris cette direction ?Emmanuelle L’Huillier-Chauzit : Le bioclimatisme est à l’architecture ce que le commerce équitable est aux marchés de consommation courante... Il répond à un besoin urgent : le défi énergétique. C’est très important, car le secteur du bâtiment représente une grande part de la consommation énergétique et des émissions de gaz à effet de serre.

: Aux détracteurs du bioclimatisme qui évoquent le surcoût qu’une telle conception génère, que répondez-vous ?E. L.-C. : Tout est question d’analyse ! Considérée dans son ensemble, la conception bioclimatique n’entraîne pas ou peu de surcoût. Peu, c’est-à-dire de l’ordre de 3 à 5% seulement. D’un autre côté, l’optimisation des gains solaires passifs et le travail sur l’enveloppe diminuent la part des investissements en installations techniques (chauffage et climatisation). Enfin, les investissements liés aux énergies renouvelables sont très rapidement rentables.

: En tant qu’architecte, le permis de construire fait partie de votre quotidien. Bioclimatisme et Plans Locaux d’Urbanisme font-ils toujours bon ménage ?E. L.-C. : Malheureusement non. J’ai, de fait, été confrontée à des situations où des exigences du P.L.U. (pentes ou sens de la toiture, limitation des parois vitrées, volumes...) entraient en contradiction avec une démarche bioclimatique. Il n’y a pas de législation forte pour inciter à aller dans ce sens. Mais il faut dire que si le projet est bien pensé, la démarche a de quoi convaincre et les élus restent à l’écoute. On peut ainsi faire avancer les choses.

3 questions à…Emmanuelle L’Huillier-Chauzit Emmanuelle L’Huillier-Chauzit est architecte. Il y a cinq ans, elle a créé Matières d’Espaces, enseigne de conception architecturale spécialisée dans le bioclimatisme.

Un plan bien réfléchi : aucune façade n’est directement exposée. Au nord et à l’est, des espaces boisés protègent des vents tandis qu’au sud et à l’ouest, la vue est dégagée.

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1 Conception : choisir le terrain2 facteurs : le soleil et les vents. Choisir un terrain dégagé au sud et protéger la maison des vents dominants (le plus souvent à l’est et au nord). Notez que les arbres peuvent être déplacés. 2 Orientation : place au soleil

Baies vitrées au sud pour favoriser les apports solaires passifs.Débords de toitures pour protéger la maison des rayons brûlants de l’été.

3 Réalisation : ajouter une serreUne serre bioclimatique en façade sud permet d’amplifier les apports solaires passifs. Pour un meilleur résultat, elle sera encastrée (trois de ses murs sont ceux de la maison). Elle doit pouvoir être occultée, séparée du reste des pièces (cloison escamotable) et sera ventilée.

4 Disposition : réfléchir à l’organisation des piècesLes pièces de vie seront au sud. Les pièces de services ou les pièces techniques seront placées au nord. 5 Isolation : se protéger hiver comme été

Une bonne isolation et des murs disposant d’une forte inertie thermique.

6 Construction : prendre le tempsNe pas chercher à gagner du temps sur la construction ni à économiser sur ce qui ne se voit pas : fondations, isolation, main d’œuvre... ce sont souvent les postes les plus importants pour la pérennité de la maison.

7 Ventilation : renouveler l’airUne maison doit être bien ventilée. Possibilités d’exploiter les calories de l’air sortant pour chauffer l’air entrant, la température du sol…

8 Modération : utiliser les énergies renouvelablesChauffage au bois, chauffage ou chauffe-eau solaire… et pourquoi pas électricité solaire.

9 Plantation : profiter des qualités des végétauxLes toitures végétalisées permettent d’augmenter l’inertie thermique de la toiture. Jouer avec l’ombre des arbres à feuilles caduques pour le confort d’été.

10 Adéquation : vivre en harmonie avec sa maisonFaire construire une telle maison est une chose, mais modifier un tant soit peu ses habitudes (en ne chauffant pas le garage, par exemple...) est tout aussi important.

en 10 points La conception bioclimatique est une manière raisonnée de penser une maison. Si la performance

(des matériaux, des installations...) y est primordiale, la recherche d’équilibre entre l’homme, la

maison et son terrain est le véritable souci de cette démarche. Explication en 10 points.

Le bioclimatisme

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