bac blanc 3lv

25
Teachers at Darwen Vale High School in Lancashire went on a strike and picketed the school gates, with around 70 teachers involved. The strike is in protest at the bad behaviour of their pupils and alleged poor treatment from the head teacher, Hilary Torpey. Cela fait plusieurs semaines, voire des mois si ce n’est des années ou des siècles que je pensais t’écrire cette longue missive pour te demander de tes nouvelles, si rares, si précieuses et si controversées. Car les habitants de notre bourgade pensent parfois que tu n’es qu’un fantôme, sorte d’ange diabolique déchu, qui a trahi les siens. Je sors de la mythologie. J’appartiens à l’engeance des revenants, car je crois à la résurrection et aux retours des âmes. Surgi du néant. Au début, j’ai pensé t’écrire en amazighe. La langue de tes aïeux, en tifinaghes bien sur, Massinissa, Yuba, Apulée, Assou Ou Baslam, Abdelkrim… J’ai renoncé à cette entreprise audacieuse, bien qu’elle soit légitime. Je sais que tu n’aimes pas qu’on te rappelle ta langue et je ne veux pas que mon écrit passe automatiquement au broyeur de papier de ton bureau. Je t’écris en français, ta deuxième langue, qui t’a permis de poursuivre une carrière prometteuse. La langue de Molière et de Voltaire que tu as reniés. Je serai n’importe qui et tout le monde. Je ne suis pas l’avocat du diable. Le diable ne fait pas partie de notre culture. Il a pris demeure en Arabie, où, chaque année, des millions

Upload: acroali

Post on 09-Jul-2016

230 views

Category:

Documents


5 download

TRANSCRIPT

Teachers at Darwen Vale High School in Lancashire went on a strike and picketed the school gates, with around 70 teachers involved. The strike is in protest at the bad behaviour of their pupils and alleged poor treatment from the head teacher, Hilary Torpey.Cela fait plusieurs semaines, voire des mois si ce nest des annes ou des sicles que je pensais tcrire cette longue missive pour te demander de tes nouvelles, si rares, si prcieuses et si controverses. Car les habitants de notre bourgade pensent parfois que tu nes quun fantme, sorte dange diabolique dchu, qui a trahi les siens. Je sors de la mythologie. Jappartiens lengeance des revenants, car je crois la rsurrection et aux retours des mes. Surgi du nant.Au dbut, jai pens tcrire en amazighe. La langue de tes aeux, en tifinaghes bien sur, Massinissa, Yuba, Apule, Assou Ou Baslam, Abdelkrim Jai renonc cette entreprise audacieuse, bien quelle soit lgitime. Je sais que tu naimes pas quon te rappelle ta langue et je ne veux pas que mon crit passe automatiquement au broyeur de papier de ton bureau. Je tcris en franais, ta deuxime langue, qui ta permis de poursuivre une carrire prometteuse. La langue de Molire et de Voltaire que tu as renis.Je serai nimporte qui et tout le monde. Je ne suis pas lavocat du diable. Le diable ne fait pas partie de notre culture. Il a pris demeure en Arabie, o, chaque anne, des millions de plerins, venus de tous les coins du globe, lattaquent coups de millions de pierres halalises par les fatwas des cabochards religieux. Un de nos anciens combattant te propose de suggrer aux responsables du plerinage de faire recours un bombardier nuclaire amricain, ou un missile Tomahawk, pour pulvriser, une bonne fois pour toute, la demeure de Satan qui infeste les lieux saints.Je serai un vieux amazighe ou du moins sa rincarnation. Les mes selon notre croyance voyagent. La mort nest pas une fin mais le dbut dautre chose. Je suis une mtorite qui claire un ciel ombrag et un pays sans transcendance idologique ou spirituelle. Je relve de la mmoire collective. Celle qui te colle la peau. Grave sur notre poterie, nos tapis, nos murailles et nos corps. Je parle des tatouages que nos femmes pratiquaient depuis des lustres et qui sont, aujourdhui, la mode, un business dans dautres contres.Mme si, je lavoue, relativement ma dcision, la plupart des gens, ici, dans la valle des Ayt Udrar Meqquren (Ceux de la grande montagne), ont tent tout pour me dissuader de le faire, de tcrire je veux dire. De tcrire donc noir sur blanc. Convaincus que ma lettre restera sans suite. Daucuns mont trait de fou et attendent lirruption dune jeep ou dun fourgon de police qui membarqueraient vers une destination sans retour. Ils gardent en mmoire le bagne de Tazmammart, dAgdez et de Kelat Mgouna.Aprs rception et lecture de ma lettre, nest-ce pas Moha, tu la froisseras nerveusement, ma missive subversive, puis tu la jetteras dans ta poubelle en plastique que des barbouses dguises en agents de mnage fouilleront ton insu ou avec ta bndiction.Je persiste, ttu comme tu me connais, et je tcris, de manire rgulire et saccade, pour te rappeler qui tu es et ce que tu es devenu. Car, je juge que tu fais tout pour nous gommer de ta mmoire encombre par des rituels qui te sont inculqus dans le seul but dhumilier les tiens. Tu aurais souhait donner une partie de tes biens, frauduleusement acquis, pour radiquer tes souvenirs antrieurs qui te taraudent comme une maldiction. Malheureusement pour toi, ni Freud ni Lacan ne te sont daucun secours. Ni mme les foqaha que frquente ton pouse pour tensorceler le jour de la fte de lAchoura.Ton enfance chez nous te poursuit et tu tentes tout pour lclipser dun geste dsinvolte chaque fois que les souvenirs, tel un volcan intrieur, resurgissent spontanment. Tu te sens coupable. Impuissant. Tu vis dans la schizophrnie permanente et le dni identitaire que mme une cure de psychanalyse ne peut traiter. En avanant dans lge, tu es rattrap par la rminiscence. Tu luttes en silence dans ton bureau si large et si dsert. Et tu noies tes chagrins en sifflant des bouteilles illicites que ton chauffeur tachte dans les grandes surfaces de Rabat. Une manire pour texiler momentanment face ta ralit si tenace, si vraie et si palpable.Tcrire donc pour soulager ma conscience, assumer ma responsabilit devant lhistoire. Je tcris pour laisser un tmoignage aux gnrations futures pour quelles vitent de reproduire ton exemple dalin et de dracin notoire. Tu as beau croire que ton ascension est dfinitive, que ton alination volontaire est confortable, je veux te rappeler que ce nest quillusions et mirages. Car, inluctablement, viendra le jour o tu reviendras au milieu des tiens. Et la honte, comme disait Kafka dans son Procs , te survivra. On ne peut vivre, cher Moha, sous une identit demprunt, en portant le masque de la veulerie. On tappelle Moha, Dda Moh, Moha Ou ali, Mohand ou Moha tout court. Ton identit te colle la peau. Seuls les serpents peuvent oprer une mue.Les valeurs qui ont faonn notre peuple amazighe sont immuables, lpreuve du temps et des contingences historiques et mtaphysiques. Je tcrirai autant de fois quil le faudrait, je continuerai dharceler ta conscience anesthsie, tobliger te regarder en face, devenir ton cauchemar de tous les jours. La nature recouvre toujours ses droits. Avant dabdiquer, tu useras de menaces auprs de mes oncles. Tu feras tout pour me muter. En vain. Tu oublies que je suis chez moi et que le Maroc est mon pays, un pays amazighe.Tu pourras mintenter un procs si tu le souhaites et maccuser de harclement et de menaces contre un respectable fonctionnaire de lEtat, en exercice de ses prrogatives. Tu solliciteras la contribution de plumitifs et de la volaille journalistique que tu achteras et corrompras loccasion dun diner mondain dans un palace cinq toiles. Je ne te le conseille pas. De telles oprations ne mnent rien et non aucune valeur juridique. Seule compte la vrit. Celle que tu refuses de voir, chaque matin que tu te regardes dans un miroir.Mais je sais que tu ne pourras pas franchir cet cueil fatal. Pour toi bien sr. Tu naimes pas les scandales. Non que je te hasse ou te dteste, Moha. Notre ducation amazighe nous a appris aimer les autres, se porter leur secours, agir avec solidarit et fraternit. Cest un reliquat tenace de notre christianisation. Nous sommes un peuple gnreux, tolrant et compatissant. La haine est le sentiment des faibles. Tu minspire plutt la piti et parfois la rvolte. Et les ntres / les tiens / estiment que tu es victime dun systme qui ta soudoy et qui ta retourn contre toi-mme. Au fond de toi, cest ce que tu ressens. Et ce sentiment qui te ronge, tu le noies dans des liqueurs qui te permettent de fuir ta ralit, oublier ton sentiment de culpabilit.Moha Nnsen

Te voila donc, Uma Moha, satisfait de ta nouvelle fonction administrative, pour servir avec ventreplatisme le Makhzen, qui te confre dnormes pouvoirs dexcution, tel un mercenaire qui a reni sa foi volontairement pour des intrts sordides. Car les dcisions te viennent dailleurs. A ceux qui te reprochent ta mdiocrit et ton cynisme glacial, tu rponds : ce sont des Talimat- instructions . Tu as t promu pour mieux obir, baisser ton pantalon si ncessaire, plier lchine tel un esclave qui va au devant des dsirs de ses matres. Une concubine qui se dhanche dans un srail. Digr pas la machine du systme dont tu admires le fonctionnement inhumain et bureaucratique, instaure pour transformer la vie des citoyens en calvaire.

Peu importe le chemin que tu as emprunt pour y arriver. Tu tachemines vers ta perte inluctable. Nos sages le savent par exprience. Ils nont que trop ctoy le Makhzen pour en connatre les mthodes. Ils gardent en mmoire les descentes des Harkas contre les tribus amazighes. Harkas qui leur ont valu des arrestations et des ttements publics. Primitives mthodes que tu continues dadmirer.Cela ne peut plus intriguer les vieux de notre village. Ceux-l mmes qui participrent contre la colonisation aux batailles de Tazizawt, Tikkoucht, Hamdoun, Baddou, Anwal, At Baamran et Bougaffer ; qui firent partie des bataillons dAmazighes mobiliss par la France coloniale, avec la bndiction du pouvoir central, pour servir de chaire canon Sedan, en France, en Corse, Mont Cassino, en Italie, sous la houlette du capitaine Oufkir, au Vietnam, en Indochine et ailleurs en Asie.Mais sache, Uma Moha, quaussi haut que tu monteras, que tu escaladeras, dans la hirarchie administrative makhznienne, tu finiras un jour, tragiquement, par en descendre , subitement, ject, comme un pion qui nest plus daucune utilit. Peut- tre mme plus tt que tu ne le prvoie. Le Makhzen est comme un vampire qui te videra de ta sve, et de ton jus tel un citron presse, pour te rejeter comme une carcasse inerte. Tu dgringoleras du sommet pour atterrir ici, ct de nous, Tamda.Ton village natal, encastr entre deux immenses belles valles du Haut Atlas. Coup du monde. Vivotant dune culture vivrire bio et ingrate mais qui fait le bonheur de la population que tu mprises sans raison. Son seul tort est dexister. Physiquement, je veux dire, Moha. Etre amazighe tes yeux est dj un motif daccusation. Car le fait dtre ou de se dclarer Amazighe constitue, lui seul, un motif daccusation pour atteinte aux institutions et aux constantes de lEtat et une atteinte sa cohsion et sa stabilit, une hrsie qui menace la stabilit du pays et de la Oumma - nation.Cest ton destin, Moha. Semblable celui de tes paires amazighes qui ont russi accder aux hautes fonctions aprs avoir reni les leurs, comme des serpents qui se mordent la queue. Des rengats, pour les leurs, qui ont perdu tout sens de grandeur amazighe. Nous te demanderons alors des comptes, gentiment et ironiquement, car tu nous seras accessible, en chaire et en os, emmitoufl dans ton burnous blanc, nous pourrons te toucher, te tter le visage pour nous assurer des cicatrices dues ta chute dun amandier loccasion dune cueillette laquelle tu as particip il ya plusieurs annes, dans le verger de ton oncle Adrghal, qui perdit un il dans la bataille de Wirin, te regarder passer comme un coupable, la queue entre les jambes.

Tu finiras mme par passer inaperu au milieu des tiens auxquels tu inspireras la piti. Cest Moha de Rabat, de Casa ou dailleurs, diront certains vieux, le pauvre ! Le Makhzen la banni. Anonymement, tu passeras le reste de tes jours solitaire, abandonn de tous, except les mouchards et les plumitifs de service qui tentent de te rhabiliter en reconnaissance de pots de vin que tu eus lhabitude de leur offrir. Incapable de texpliquer, tu noieras ton chagrin dans des bouteilles dalcool locales que tu russis te procurer, discrtement avec la complicit du cad du village ou de son Khalifa, ton cousin honni par la population pour son implication dans les lections et ses fourberies minables et interminables.Moha NnsenActuellement, tu es hors de notre porte. Ton chawch, par lintermdiaire de ton planton de service, muni dun tarbouch rouge turc et ne parlant que larabe, nous dit toujours, avec mpris et arrogance, chaque visite que nous effectuons ton bureau, que tu tais soit en runion, soit en dplacement. Il excute des instructions. Il naime pas les montagnards amazighes que nous sommes, mal habills et baragouinant dans une langue exotique. Il nous traite de chleuh et de barbares primitifs . Nous navons jamais ragi ses propos. Nous regrettons le temps de la siba ou les problmes se rglaient avec des armes. Et dans le respect de lhonneur.Des personnes de chez nous vivant en ville et qui russirent accder au march du travail pour devenir administrateurs ou sous responsables, nous ont assur quils te voient rgulirement passer la tlvision, loccasion dvnements nationaux. Face aux journalistes qui tinterviewaient, tu tremblais et tu fournissais des efforts reintants pour parler un arabe correct et rhtorique, sans oublier dexprimer ton allgeance maladive au Makhzen.Nayant ni radio ni tlvision, et encore moins lInternet, nous ne pouvons, objectivement parlant, ni infirmer ni confirmer leurs propos. Tu passerais la tlvision du Makhzen, muni dune cravate dernier cri, assis sur un fauteuil pivotant en cuire, et nonnant un discours de bois, dans la langue de Qoraich. Le torse bomb comme un singe bonobo en rut. Il test arriv une fois davoir affirm que tes descendants son originaire de lOrient et que ton arbre gnalogique te relie une famille de marabouts de Bagdad. Des nobles qui tireraient leur lgitimit du prophte de lIslam.Ton pre en fut offusqu et dcida de runir lassemble de la tribu pour leur expliquer que toi, son fils an Moha, tu as perdu tes facults mentales. Il ta reni publiquement pour sauver son honneur, comme le lui imposa la coutume amazighe ancestrale. Il organisa mme un diner o des prires furent scandes pour que tu puisses retrouver tes esprits. Il fit appel aux sages de la tribu et de la confdration avec lesquels il est li par le pacte sacr de Tada, ce pacte ancestrale amazighe dont tu ignore les tenants et les aboutissants.Moha NnsenCar, comme tu le sais, Uma Moha, notre pays est fait de tribus amazighes : Iznatn, Iznagn et Imsmoudn qui ont leurs prolongement en Algrie, en Tunisie, en Libye et en Egypte Siwa. Une partie sest installe aux Iles Canaries. Nous fonctionnons ainsi. Mme les quatre tribus arabes, les Banu Hilal, les Banu Maqil, les Banu Soulaym et Arb Ssbbah se sont intgres nos structures ancestrales et ont adopt notre droit coutumier, plus juste et plus quitable que les clauses de la charia qui fonde la loi du talibon, hrits des juifs et de lancien testament, la Thora qui vient tymologiquement de tirra, criture en amazighe, qui sert toujours de rfrence aux wahhabites saoudiens.Moha NnsenOn nous a affirm, la main sur le cur, que lors de tes passages tlvisuels , tu nas jamais parl de notre valle, si belle, si marginalise et si enclave entre deux normes montagnes, coupe du reste du monde, o la vie scoule au rythme de la nature et des saisons. Tu sais bien que nos sources deau commencent tarir et nos puits voient leur rserve diminuer rapidement. Pour que nous puissions avoir suffisamment deau, ta tante Izza, tes cousines Bedda et Qechou ainsi que les autres femmes de la tribu, dos de mulets ou pieds, parcourent une bonne dizaine de kilomtres pour nous approvisionner, en t, la seule source qui est situe en amont de lAqqa n Tarir, la valle de logresse, qui faisait hrisser tes cheveux durant ton enfance chaque traverse que tu y effectuais.

Elles accomplissent leur besogne en chantant en amazighe, invoquant la fiance de la pluie , un mythe locale qui plonge ses racines dans les plus hautes antiquits Ils nous ramnent la denre rare dans des bidons de plastique, de couleur jaune-orange, achets loccasion du souk hebdomadaire qui se tient une journe de marche, prs du village des Ayt Umalu. Les dmarches dune ONG pour difier un barrage collinaire sur lAsif Mellulen, sont restes sans suite. A cause du gouverneur qui a accus les bienfaiteurs de tentative de nous christianiser. Pourtant, tu connais les gens de notre bourgade. Musulmans tolrants et ouverts de pre en fils. Cest juste pour nous maintenir dans la ncessit. Ils perptuent la politique des Fassis andalous au Moyen Atlas Toumlilin, Ain Llouh, Amezmiz, Ahermammou et ailleurs. Ils veulent nous prendre en otage et grer nos mes.Moha NnsenOn nous a dit que chez vous en ville, il y a des robinets quil suffit douvrir pour avoir leau chaude ou froide tous les jours, et chaque heure. Dans ce cas, Uma Moha, dis tes suprieurs, lors de ta prochaine runion, de nous envoyer quelques robinets qui font des miracles. Nous ten serons reconnaissants et nous prierons pour toi loccasion de la prire de laurore, au moment o les portes du ciel, Tiwwura, souvriront. Tu seras mme trs gnreux si tu arrives convaincre tes responsables de venir nous rendre visite, constater de visu notre situation lamentable.Si vous dcidez de venir, ce sera en t, au mois daot de prfrence, aprs avoir consult le service mtorologique national. Car les orages sont frquents, autant que violents pendant cette saison caniculaire qui permet nos fruits de mrir naturellement. Et nous ne voulons pas endosser la responsabilit de vous voir terrasss par la foudre ou emports par la crue diluvienne de lAqqa Aghzzaf. Mme si, au fond de nous, cest ce que nous vous souhaitons. Les orages sont fatals. Et, dfaut de moyens, moult bergers voient leur cheptel emport par la crue, rsigns.

Ne venez surtout pas en hiver. La route est impraticable. Seul un tank de fabrication sovitique pourrait parvenir la valle. A moins que vous ne dcidiez de vous dplacer en hlicoptre. Vous nous prendrez ainsi den haut. Ce sera un vnement historique. La vue dun hlicoptre remonte la priode de la rsistance. Seuls les vieux savent que de tels engins existent. Ils en subirent dintenses bombardements aveugles. Lhlicoptre vous confra une dimension surhumaine. Surnaturelle. Une occasion pour nos ades de versifier pour mmoriser lvnement insolite et le transmettre de valle en valle, accomplissant ainsi leur rle de journalistes locaux. Ils traiteront de la forme de lengin, de ses vrombissements et de son atterrissage sur les airs.Tes invits seront bien accueillis comme le veut notre tradition millnaire amazighe. Nous gorgerons des moutons et des caprins pour ceux qui parmi vous soufrent de diabte et de tension artrielle, et vous dgusterez le mchoui sous la tente. Vous aurez droit un spectacle de danse pour admirer les primitifs que nous sommes. Nos ades chanteront votre gloire et celle du Makhzen. Une fantasia pourra tre envisage, condition que vous arriviez convaincre le cad qui nous a spolis nos rserves de poudre pour fusils. Il estime que le port darmes feu constitue un danger pour la stabilit du pays et menace la scurit de lEtat et de ses institutions prennes !Il nous a mme demand de souder les petits sabres que nous portons au flan droit. Ils les considrent comme des armes blanches passibles de prison. Le cad veut nous dshonorer et nous rduire en personnages fantomatiques disposs excuter ses ordres iniques. Il nous affirme, chaque occasion, quil ne fait quobir aux ordres qui lui sont transmis de Rabat. Noubliez donc pas de vous dplacer avec des 4/4 japonaises et un service sanitaire complet : une ambulance et un personnel comptent.Aprs avoir remis la gendarmerie le plan de votre itinraire, vous risquez toujours dattraper des maux de tte en raison de laire pure de nos montagnes qui risque de dstabiliser vos petites cervelles pollues par lhypocrisie, la civilisation moyen-orientale et le mensonge. Votre voyage ressemblera un safari, car sur la route, vous admirerez les macaques qui descendront des normes cdres pour vous souhaiter la bienvenue, des renards, furtivement, traverseront la piste et des livres nhsiteront pas se faufiler entre les essieux de vos engins. Ne nous reprochez pas ces incidents incontrlables. Des phacochres pourront bousiller vos voitures. Ils sont sous la haute protection des agents des Eaux et Forts. Mme sils ruinent nos champs dorge et de mas. Nos plaintes sont restes sans suite.Moha NnsenJe te supplie, Uma Moha, de faire limpossible pour venir nous voir, au nom des interminables kilomtres que tu parcourais pieds nus, grelottant de froid, le nez coulant, quant tu revenais du collge des Ayt Umalu, rebaptis Collge Abou Houdaifa, passer les vacances dt chez nous tamazirt. Au nom des journes que nous passions nous baigner dans les eaux boueuses de lAssif n Ulili, des nombreuses excursions que nous organisions en amont de la valle, pieds nus galement, pour chasser les livres, pcher du poisson pour les griller sur les braises que nous obtenions en allumant un feu de bois sur le lieu-dit Tadawt n udrar ou dos du mont.Recommande tes invits de ne pas endosser leurs costumes en venant nous rendre visite. La poussire rougetre de notre valle les salira. Dis leur de shabiller comme des jeunes, en jean amricain. Ils mettront leurs costumes aprs avoir pris une douche improvise chez le cad. Parce que la piste que vous emprunterez, notre unique lien avec le monde extrieur, sest relativement dtriore ces dernires annes, cause des crues ravageuses de lAqqa n Ulili. Ce nest pas de notre faute, nest-ce pas Moha. Au cas o des problmes surviendraient, vous terminerez le voyage dos de mulets. Nous avons pris nos dispositions. Nous sommes toujours prvenants.Dautres personnes importantes sont dj passes par cette piste. Pour des raisons autres. A loccasion de campagnes lectorales. Ils nous ont promis de la goudronner, transformer notre valle en paradis sur terre. En faire une destination prise pour le tourisme culturel, devenu une mode cologique. Convaincre des ONGs soucieuses de lenvironnement venir dvelopper et commercialiser nos cultures bios, nos produits artisanaux et nos valeurs gnreuses. Nous attendons toujours que le miracle se produise. Et votre visite constituera un miracle historique.En fait, ne parle pas tes invits de la route. Cela risque de les dissuader de venir. Parle leur plutt de nos coutumes de primitifs , de nos croyances dsutes, de notre gnrosit sculaire et de notre stocisme atavique. Inutile dvoquer devant eux les camions Ford rouges que nous utilisons comme unique moyen de transport, entasss au milieu du batail, de sacs de bl et de charbon. Encore que ces moyens de locomotion ne sont pas rguliers. Ils ne sont disponibles que deux fois par mois, suivant les saisons, la scheresse, la mtorologie et leur tat mcanique.A propos des moyens de transport, Uma moha, ils nous cotent les yeux de la tte. Nous payons le chauffeur au retour du souk, aprs avoir vendu, des crales, des lgumes, des fruits locaux ainsi que quelques poules et les ufs collects durant deux semaines. Ce qui constitue un lourd fardeau pour le budget familial. Pour louer une corsa , sorte de transport priv, encore faudrait-il arriver toucher le propritaire de la Land Rover, le prix rclam est exorbitant. Dailleurs nous ne louons une corsa que dans des situations critiques, lorsquune personne est gravement malade, quand une femme des difficults pour accoucher ou si un enfant est foudroy par la mningite ou par un claire ou une mningite. Ce qui arrive souvent.Notre calvaire ne se limite pas au transport. Il nous faudrait soudoyer les contrleurs des barrages routiers qui se comportent notre gard comme des cow boy en territoire conquis. Puis sen sortir lhpital provincial o nous sommes accueillis comme des pestifrs, sur notre propre sol. Le personnel rode autour de nous comme des vautours lafft. Le personnel mdical nous jette des regards mprisants et les personnes du service des urgences nous parlent brutalement en arabe. Ils leur arrivent mme de nous insulter, reprocher au patient, en proie des coliques atroces, dtre tomb malade. Nous ny sommes pour rien Moha.Certains nous crachent dessus. Un ou deux billets verts ou bleus suffisent les rendre doux comme des agneaux. Pour cela nous nhsitons pas brader nos ovins, et nos caprins. Cest alors que ce personnel nous fait la danse du ventre, nous courtise en nous assurant quil fera tout pour nous servir, condition que nous lui rapportions quelques litres de miel sauvage, des amandes et des mottes de beure. Une routine pour nous.Moha NnsenTu sais, Uma moha, que notre infirmier de la valle, originaire de Kelat Sraghna, un digne descendant des Banou Hilal, une tribu arabe connue pour ses murs bdouines et sa cupidit insatiable, sa clbrissime sauvagerie voque par Ibn Khaldounne dans sa Moqaddima, ne dispose pas de salle daccouchement. De toutes les faons ses comptences se limitent nous administrer des piqres aprs avoir reu des bakchichs.Il n y a ni mdecin ni sage femme au dispensaire. Cette besogne est assure par les sages femmes de la valle. Des volontaires qui croient en Dieu et en ses saints. Notre hpital se rduit une pice exigu, en prfabriqu de couleur rougetre, qui devient une vraie glacire en hiver, une fournaise en t, et dont les murs sont barbels et couverts de papiers et daffiches multicolores, sur papier brillant, relatifs aux diffrentes campagnes de vaccination nationale, crits dans une langue incomprhensible pour nous, avec des images insolites.Notre infirmier nest pas encore rgularis dans sa fonction officielle, nous dit-il. Il rouspte tout le temps. Ce sont les gens de la valle qui le prennent en charge, au mme titre que le fkih originaire de Rissani et souponn de penchants pdophilies. tour de rle, au mme titre que la jeune institutrice, qui passe ses temps libres soigner ses ongles, demander nos femmes de lui prparer le pain de la semaine, qumander une bouteille de lait ou de miel Elle, originaire des Rhamna, et apprend nos enfants des choses tranges : de longs pomes en arabes apprendre par cur, dont le sens voque pour nous des contres lointaines o svissent des orgies dalcool de dattes, le vent chaud, les razzias et les temptes de sable.Ce personnel ne parle pas amazighe. Pour communiquer avec es habitants il ralle. Les citoyens ne comprennent pas son attitude. Ils ne parlent quamazighe. Mais ils font avec, comme on dit, Moha. Ils supportent avec fatalit et stocisme. Le cad rappelle la population que larabe est la langue du paradis. Que leur parler est vulgaire et que pour sauver leurs mes de barbares, ils sont censs vnrer larabe et ce qui en dcoule.Moha NnsenPour son argent de poche, notre infirmier, le pauvre, nous vend des mdicaments. Un ami moi ma appris que cest le Makhzen qui les lui donne comme dotation pour le dispensaire, dautres nous disent que cest lui qui les achte dans une pharmacie pour nous les revendre, histoire de nous rendre service. Ces derniers temps, il passe son temps rler, insulter ses suprieurs. Il dsire rentrer en ville, avoir sa mutation. Il serait, Uma Moha, au cas o tu serais intress, prt verser une grande sommeIl te communiquera les dtails ton arrive. Le cad est de son ct. Tous les deux se voient rgulirement. Ils ne nous aiment pas. Nous, non plus dailleurs.A prsent, revenons tes invits, si tu arrives bien sr les convaincre de lutilit du dplacement et des indemnits y affrentes et qui pourraient vous servir de motivation pcuniaire. Alors, noublie pas de leur rappeler quil faudrait venir de jour. Comme tu le sais, nous navons pas encore dlectricit dans la valle et la lumire des bougies et des lanternes nest pas suffisante pour que nous puissions vous regarder au fond des yeux, afin de croire ou ne pas croire ce que vous allez nous promettre. Sils te disent quils sont occups le jour et quils ne pourraient venir que la nuit, alors tant pis, ou tant mieux.Avec un peu de chance et la pleine lune aidant, tout se passera bien. Ils auront loccasion dapprcier le calme et le silence de notre valle, le hurlement de nos chacals, le hululement de nos hiboux, le bruit du vent sur nos chnes, la clart de notre ciel bleu et le scintillement de nos toiles pures. Nous leur expliquerons que les toiles filantes sont des jets de feu divins destins aux diables qui tentent daccder aux secrets du Crateur. Dis leur de ramener avec eux du papier hyginique au cas o ils auront envie de faire leurs besoins et viter la constipation. Ca se passera loin des agglomrations, au bas du flan de la montagne et ils en profiteront pour sentir la fracheur de nos nuits effleurer leurs derrires crisps.

Nous ferons un effort pour les clairer au gaz, mme si cela nous occasionnera des dpenses supplmentaires, imprvues. Nous ferons une collecte, si ncessaire, et le crieur public annoncera la nouvelle aux habitants, les sommant de participer pour sauver lhonneur tribal. Ils pourront ainsi nous programmer sur la liste des prochaines valles lectrifier. Ils nauront pas besoin de ramener les fils lectriques qui dfigureront le paysage. Jai entendu dire que le soleil fera laffaire et ce ne sera pas cher surtout par ces temps de scheresse endmique. Que Dieu soit clment envers nous. Notre source deau, situ en amont de la valle pourrait, ventuellement, devenir source dnergie hydraulique bio. Il suffirait dinstaller des turbines. Nous ne sommes plus quune quarantaines de foyers alimenter.Moha NnsenOh ! Uma Moha ! Comment veux-tu que Dieu soit clment envers nous ? Le comportement des gens de la ville est irritant. Il parait quil jette la nourriture dans des poubelles en plastique. Dautres personnes vivent de ces poubelles quils fouillent pour rcuprer des objets vendables. Sentretuent pour une barre de fer ou un morceau de pain. Tu sais que la situation chez nous est diffrente : le reste de la nourriture on le donne au voisin, sinon il sert nourrir le btail. Quant la viande, nous en mangeons rarement et nous pouvons aussi la conserver pour les jours de disette.Lavidit des rsidants de la ville contraste avec notre simplicit. Le gaspillage ne fait pas partie de nos moeurs. Tu le sais. Lindividualisme des citadins est aux antipodes de nos valeurs de solidarit et dentraide. Au lieu de chercher les exemples ailleurs, revenez nos valeurs millnaires, notre droit amazighe qui vous inspirera des modes de gestion efficients.Je voudrais te dire un mot sur notre instituteur Brahim ou Ali. Contrairement linstitutrice qui tabasse nos enfants pour un rien et qui les traite darrirs et de mal levs, il est aim de tous. Il est de la confdration des At Yafelmane avec lesquels nous sommes lis par le trait de Tada. Un pacte tribal caractre fraternel qui garantit la libert de mouvement et la solidarit face lennemi. Brahim connat lhistoire de nos tribus et des autres confdrations. Cest son cousin, qui poursuit ses tudes en France, qui lui a apport des ouvrages traitant de lhistoire millnaire des Amazighes en Afrique du Nord. Il nous parle des vnements de Addi Ou Bihi et de Abdelkrim El Khattabi le Rifain, de Saint Augustin, des Touaregs, des Canariens amazighes. Cest grce lui que nous russissons dmler les fils de la politique. Le cad ne laime pas. Il le dteste de manire pidermique.Lui, il est presque sr quil ne sera jamais mut. Brahim. Son directeur, originaire de Wazzan, lui rend visite deux fois par mois et ses visite se terminent par des avertissements et des vocifrations inintelligibles. Il reproche linstituteur son honntet et son franc parler vis--vis du ministre de tutelle. Il nous a affirm que pour avoir une mutation, droit lgitime rglement, il faudrait se transformer en mouchard, lcher les bottes ses suprieurs, prparer le mchoui pour les inspecteurs pour pouvoir tre pistonn . Brahim critique aussi le contenu des manuels dhistoire qui marginalise les autochtones et rigent des traitres et des collaborateurs au statut de hros nationaux.Moha NnsenJe me chargerai, personnellement, de te le prsenter, toi et tes invits de marque. Il parle tamazight comme toi et comme nous tous. A la diffrence que lui, il en est fier, alors que toi, tu en as honte et tu prfres baragouiner dans la langue dAbou Nouas. Ton accent trahit tes efforts ridicules et tu deviens la rise de tes collgues. Tu aurais donne tout pour changer dappareil phonatoire, remplacer ton nom emblmatique par un autre moderne . Je serais aussi heureux de te prsenter Assou ou Ali nAt Lhou, Heddou Qessou nAt Umur et Idir ou Ali nAt Uzighimt. Ils ont termin leur tudes il y a plus de cinq ans et ils trainent, sans espoir, dans la valle, du lever du soleil jusquau soir.Assou prtend connatre fond la nature de nos pierres et de notre terre. Il a dcroch une licence en gologie avec mention trs bien. Il nous explique la formation de notre valle, la fertilit de son sol et les bienfaits de nos plantes mdicinales. Nos trois diplms ne savent quoi faire. Ils rvent dun emploi en ville car ils nont plus la force de labourer les champs, irriguer ou moissonner nos lopins de terre et nos vergers ravags par les attaques des sangliers qui dbarquent en troupeau chaque nuit. Les sangliers sont protgs, Uma Moha. Nous ne pouvons pas les tuer. Ni les manger car cest illicite. Le garde forestier veille leur respect au sein de la rserve qui surplombe nos valles. Ils sont sous haute protection et nous sous haute surveillance.Les mains des tudiants sont fragiles. Comme toi, ils esprent, un jour, vivre dans une villa avec interphone et piscine, une voiture de service et un chauffeur. Ils fument et nous avons peur quils contaminent les jeunes de la valle. Ils ont tent dmigrer ltranger sans succs. Ils ont galement tent de fonder une association socioculturelle, mais le cad, le Khalifa et le pacha leur ont mis des btons dans les roues. Une fois, ils ont os photocopier lalphabet amazighe tifinaghe pour le distribuer aux lves. Le cad les a interpells sans mnagement. Il les menaa en des termes innommables.Alors je te demande, Uma Moha, de me tenir au courant de votre dcision et minformer du jour o tu nous honoreras de ta visite avec tes illustres invits. Nous aurons loccasion de discuter largement du reste de nos problmes. Et ils sont nombreux. Tu vois bien que je nai touch ni au cad de faon dtaille, ni au cheikh, ni aux moqaddems ni au prsident de la commune. Tout un dossier sombre vous attend. Jai pris linitiative, pour cette heureuse occasion, dinviter nos ades. Ils composeront des pomes en votre honneur. Je leur ai suggr de parler des batailles de Bouffer, de Lehri et de Tazizawt. Ils nous rappelleront les sacrifices de nos parents pour la libert et lindpendance, les prouesses des tratres et des collaborateurs. Ils citeront leurs noms si vous le souhaitez. Tu serviras dinterprte ou traducteur tes invits.Uma Moha,Tu as pris ta retraite et tu es revenu continuer ton uvre de rengat et de mouchard au service du makhzen. Prostituer et travestir ta culture, dvier les jeunes filles. Pactiser avec le pacha et le Khalifa contre les tiens. Tu combats ceux qui luttent pour la dignit de la tribu. Tes oreilles sont devenues des antennes paraboliques au service des agents de lautorit. Tu frquentes la mosque pour mieux arnaquer. Tu es devenu hadj ; titre honorifique penses-tu. Tu casses les dcisions de lassemble pour satisfaire le cad. Install dans le confort, tu ronronnes un discours morbide contre ton identitTu as russi, dans des conditions surralistes, tre lu et accder ainsi au statut de dput de la nation . Tu as constat, par toi-mme, labsurdit de la propagande que tu as mene, face lindiffrence gnrale des citoyens auxquels vous inspirez la piti. Votre immunit en tant que parlementaire est acquise grce la contribution consquente des moqaddem qui vous ont soutenu ostensiblement. Et votre premier rflexe, une fois lu, a t de changer votre numro de portable. Histoire de ne pas tre embt par les requtes des dizaines de citoyens auxquels vous avez fait des promesses. Au sein de lhmicycle, tu as ralis que ton prtendu pouvoir est plus que drisoire : un maillon insignifiant de la chane. Cest ce que nos ades ont toujours pens. Et ils le rcitent chaque occasion : dans les ftes au village et dans les souks hebdomadaires.

A prsent tu as honte de rendre visite aux tiens dcouvert . Cest au milieu de la nuit que tu dbarques furtivement dans notre village, pour le quitter au lever du jour. Comme un voleur. Tu as mme pouss la veulerie trs loin et tu tes accoquin avec une horde de rapaces pour spolier les terres de notre tribu. Les meilleures et les plus fertiles, protges par le pacte coutumier de lagdal. Tu as servi de proxnte des Arabes moyen-orientaux pour quils se les approprient sans lgalit aucune et y installer des bordels pour leurs orgies. Des dizaines de familles sont alors prives de leurs pturages, si vitaux leur cheptel. Unique ressource dont ils disposent. Et chacune de leurs manifestations lgitimes et pacifiques, tu cautionnes lenvoi des forces de lordre qui se chargent de les mater au grand jour. Pour nous civiliser , car tu penses profondment que nous sommes arrirs, tu as implant une cole ddie larabisation de notre communaut. Tu appelles cela, la lutte contre notre analphabtisme endmique, convaincu que la langue dAbou Houraira sera notre clef daccs lEden ternel.Moha NnsenNous avons appris aussi que tu siges la commission de la justice. Laquelle sest prcipite pour condamner tes cousins, Bassou ou NBark, Ichou ou Hssaine et Yidir ou Moha, cinq ans de prison ferme : leur seul tort est dtre des Amazighes qui refusent de voir leur langue lunique langue que tes parents parlent - et leur identit amazighes combattues et stigmatises. Votre commission les a accuss datteinte la scurit de lEtat et datteinte la langue sacre de Qoraich, la stabilit du pays et aux institutions sacres de la nation.

Tu as brill par ton silence face la dtresse de tes frres dAnfgou et de MSemrir. Et tu vites dvoquer le sort rserv ceux de Ben Smim. Quant la contestation dImider, tu restes bouche be. Ta moiti, une andalouse disent tes parents, tapprend les bonnes manires : renier les tiens, dilapider les deniers publics et ironiser sur les chleuh . Cest une femme civilise, penses-tu, qui roule et fume des ptards, te sert des apritifs et toblige porter le tarbouch turc qui, selon nos potes, te donnes les allures dune cigarette blonde. Une marquise. Elle sappelle Chems Addoha, mais nos ades aiguiss la trouvent monstrueuse, en raison dun excs de testostrone qui lui fait pousser des moustaches et les poils partout. Ils vont loin et estiment que cest une crature diabolique qui tensorcelle chaque nuit avec les recettes des foqaha de la qaraouine.Moha NnsenJe ne voudrais pas aller plus loin quant ta vie conjugale que jai voque lors de ma lettre prcdente, du moment que ta femme andalouse ne te permet pas de recevoir les tiens quelle juge frustres et pas assez, du tout, civiliss. Des barbares te dit-elle qui salissent son salon. Je voudrais te parler de la tragdie survenue dans notre village au cours de lhiver pass. Il a neig deux semaines durant. Notre valle fut revtue dun beau manteau de blancheur clatante limage de notre innocence immacule. Nous tions coups du monde. Mais nous tions heureux car la neige alimente nos sources et verdit nos pturages si vitaux notre cheptel. Elle rend notre valle verdoyante au printemps, elle epermet la faune et la flore de se rgnrer.Une mystrieuse maladie a dcim plusieurs bbs. Linstitution de tutelle voqu la baisse de la temprature. Chose absurde, puisque nous sommes habitus rsister au froid glacial et des tempratures au dessous de zro. Il sagirait, probablement, de maladies denfance qui peuvent tre traites ou de virus contract en raison des produits manufacturs et des aliments industriels qui inondent la valle sans contrle aucun de la part des services sanitaires comptents.La majorit des mdias nationaux, particulirement laudiovisuel, minimisrent la situation et ne ragirent quaprs laction mene par des ONGs trangres qui vinrent soulager un peu les maux de la population. Je suis cur en apprenant que les dons de couvertures, dhabits et de denres alimentaires livrs par ces ONGs aux villageois ont t dtourns par le cad et ses sbires. Le cad obligea les associations de bienfaiteurs dposer leurs dons dans le dpt de la commune et leur promit, pour des raisons dorganisation, a-t-il avanc, de se charger, en personne, de la rpartition au sein de la population. Il fut le premier se servir. Les protestations des habitants neurent aucune suite.Evidemment, Uma Moha, tu noses pas lever le petit doigt. Tu es mme irrit en apprenant que nos jeunes ont manifest leur ras-le-bol en organisant un sit-in pacifique devant le cadat. Avec le soutien dun avocat amazighe du Rif, ils purent fonder une association socioculturelle dont les actions et initiatives mettent le cad hors de lui. En distribuant lalphabet amazighe tifinaghe, notre criture ancestrale plusieurs fois millnaire, le responsable de lautorit mobilisa les agents des forces auxiliaires quil chargea de perquisitionner le local de lassociation. Tels des lphants qui firent irruption dans un magasin de porcelaine, ils saccagrent la bibliothque et la vue dune feuille contenant le tifinaghe, ils cabrrent avant de la pitiner sauvagement.Le butin quils collectrent et amenrent devant le cad est compos de journaux, de cassettes de chansons amazighes et de photocopies de livres dhistoire. Lagent de lautorit leur somma de dresser un bucher, semblable celui qui fut dress par un responsable du collge berbre dAzrou, et dy brler cette littrature mal saine , destine, selon lui, semer la division et porter atteinte la langue du paradis et de Dieu et aux constantes nationales arabes.Le cad bavait tel un torero excit. Il ordonna que lassemble se runisse et lui tint ce discours moyengeux : le Maroc est arabe, lamazighe est un dialecte primitif ; vous devez renier et dnoncer les responsables de lassociation qui sont des allis du sionisme, de limprialisme et des ennemis de la nation et de notre religion sacre : lislam, dernier message rvl en langue arabe. Il jura par tous les saints moyen-orientaux quil ne laisserait pas cette action impunie.Le cad dclama avec rage son message officiel, accompagn par ladjudant de gendarmerie quil a fait dplacer en urgence. Un amazighe de Tahla, prcisment dAhermammou, qui resta silencieux, scrutant les gestes dsinvoltes du cad et ses mouvements ridicules. Aucun des membres de lassemble ne riposta. Ils quittrent la runion en hochant la tte. Les responsables de lassociation rsistrent. Ils sont dans leur droit. Et ne manqurent de le signifier au cad : Nous ne sommes pas des Arabes ! Ce nest pas un choix, cest un destin. Nous ne font que dfendre notre culture millnaire. Nos parents se sont sacrifis contre la colonisation pour la libert. Tes discours ne nous impressionnent pas .Et tout en sueur, le cad de rpondre : Vous avez besoin dtre duqus. Je vous apprendrais respecter lautorit. Vous tes des anarchistes Je mgare, Uma Moha. Je reviens tes prestigieux invits. Une partie du groupe te sera impose, certainement, par ta femme andalouse qui est, penses-tu, de bonne extraction comme tu en dlires toutes les nuits, qui les invitera pour une balade exotique en montagne, chez les primitifs amazighes: il sagira de ses nices, cousins, amis et autres proches. Le reste du groupe sera compos de tes suprieurs qui se dplaceraient pour fuir la routine de la capitale, pour te faire plaisir, et soffrir un week end sur le dos du budget des communes rurales de notre valle. Tu seras gn par leurs questions. Et pour les satisfaire, tu mobiliseras ton cuisinier personnel que tu chargeras de prparer des mets leur got. Tu chargeras ton copain arabe de Bejjad, un ivrogne qui sert dinformateur aux barbouses de la province, traiteur de son tat, de soccuper de la restauration.Ils ne mangeront pas le couscous avec leurs mains. Tu te procureras des fourchettes dans une grande surface Rabat. Tu sauras, grce au cad, nous sommer dtaler nos plus beaux tapis, mobiliser lassemble, et contraindre nos femmes te livrer un spectacle de danse inoue. Tu installeras mme des lavabos provisoires que tu auras achets, chez un fournisseur fassi qui test recommand par le gouverneur. Lequel gouverneur a pous la sur du traiteur qui a fait de ta rgion son domaine priv en matire daffaires et de business.

Tu rquisitionneras notre internat pour tes invits distingus, pour en faire un dortoir de qualit pour tes invits de Rabat. Tu improviseras des douches et des sanitaires, dots de papier hyginique au parfum de rose. Nous taiderons dans cette besogne qui psera sur notre honneur communautaire. Pendant ce temps, les tudiants du Centre de formation aux mtiers de la montagne, seront expulss manu militari. Ils bnficieront de vacances impromptues et spciales.

Tu texprimeras sur lestrade improvise pour la circonstance en arabe classique, la langue de la tribu de Qoraich, des bdouins du dsert qui, comme la crit Ibn Khaldoun, sont semblables aux sauterelles, dvastatrices de cultures et des civilisations, tu le feras pour souhaiter la bienvenue tes htes de prestige. Nos vieux te bigleront tonns de tentendre baragouiner dans un parler exotique, en bombant le torse. En dclamant des phrases dmoniaques qui donnent de toi limage dun possd.A ta descente de lestrade, reint, tu viteras de croiser nos vieux en haillons. Y compris tes tantes paternelles qui souhaitent ta rencontre non afin de te solliciter pour quelque service, mais pour tinviter manger chez elles la pizza amazighe qui te rchauffait en hiver, avant daller lcole. Des veuves qui ont perdu leur poux Bougaffr, comme en tmoigne lhistoire de la rsistance. Elles te traiteront comme leur fils et toffriront le meilleur de ce quelles ont : miel, beurre et amande. Elles inviteront les voisins pour cet vnement insolite. Et tu seras gn par leurs questions, si simples et si profondes.Tu sais, Uma Moha, que grce aux satellites, nos enfants qui ont russi se faire une place au soleil, nous ramnent des PC portables, connects Internet par le Wi Fi. Ce rseau magique qui transcende les frontires et qui nous permet, les uns colls contre les autres, sur la colline qui domine notre valle, de regarder sur ce bijou technologique les nouvelles du monde. Cest de cette manire que nous suivons les fatwas surralistes dcrtes par les chioukh et les foqahas, relatives au Jihad de nnikah , sorte de contrat de prostitution lgalise, religieusement parlant. Nous estimons que les promoteurs de ce genre de fantaisie relvent dune espce non humaine.Grce ce moyen de communication, nous visionnons moult vidos relatives au marches et sit-in de Msemrir, Ifni, Housima et Targuist, Nalut, Tizi Ouzzou et Kidal. Nous sommes sidrs suite au visionnage de la vido des tours amricaines pulvrises par deux avions dtourns par des terroristes qui pensaient que leur acte allait leur offrir un billet express vers le paradis o les attendent les soixante douze vierges, promises aux croyants dans lau-del.Tu auras le privilge dtre film en train de tgosiller et nous publierons ton speech sur le You tub, pour tobliger rpondre aux commentaires des visiteurs, qui seront nombreux. Sorte de publicit gratuite, aux consquences fatales.(A suivre), push them in the corridors and insult them.But teachers say when they take the matters to the head teacher, she often sides with the pupils instead of staff. Members of the National Union of Teachers (NUT) said the problems stemmed from the head. 'Sheis very hard on staff but soft on the pupils. Until the management put in place behaviour policy that is applied consistently, we will not be coming to settlement. They claim that when teachers have confiscated the phones, they have been returned by the schools management - leaving them totally undermined.Five teachers have apparently been suspended since Mrs. Torpey took over as head teacher last September. Mr. Girdley- a member of the NUT- said: Teachers are being suspended and that is career threatening. We need the head teacher to start realising her staff are actually her best allies. 'Mrs. Torpey has been denying there is a problem for too long and now with all this attention she must deal with it. Mrs Torpey 52, was at her desk today but lessons were cancelled for the 1,150 pupils.The strike comes days after Education Secretary Michael Gove announced an assault on bad behaviour which he said was widespread in too many schools. Problems at Darwen Vale began after the former head teacher, Lynn Dunning, diedfrom cancer after ten years in charge. She was replaced by Mrs. Torpey who has been in the post since September. But teachers claim that instead of backing staff when they had to deal with disruptive and violent pupils, she sided with the children.. http://www.dailymail.co.uk/news/article-1374346/

1. Circle the idea that summarizes the text best a- Teachers furious at their head teacher b- aggressive teachers at Darwen Vale high school c- teachers and pupils against the head teacher. 2. Say whether these sentences are true or false. a- Mrs Torpey is with the pupils against the teachers. b- Mrs Torpey was aware there was a problem with her staff. c- Darwen Vale High School is the only school where there is bad behaviour.

3.Answer the following questions according to the text. a- Why did the teachers at Darwen Vale High School go on stike? b- Acoording to NUT,who is responsible for the bad atmosphere at school?4. In which paragraph is it mentioned that some pupils are aggressive towards their teachers? 5. Who or What do the underlined words in the text refer to? a- them 1 = b-they 2 = c- she 4 =Text exploration1. Find in the text words closest in meaning toa- attack 3 = b- undisciplined 4=2. Find in the text words whose defitions follow.a. to be with someone against someone else 1 =b. to take something from a person as a punishment.3.Ask the questions that the underlined words answer.