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DOSSIER Le bénévolat muséal PATRIMOINE EN DANGER Au cœur des conflits PRATIQUES EXEMPLAIRES Prêt et emprunt LE MAGAZINE DU CONSEIL INTERNATIONAL DES MUSÉES VOL 65 NO 1 MARS 2012 I CO M nouvelles de l’

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DOSSIER Le bénévolat muséal

PATRIMOINE EN DANGER Au cœur des conflits

PRATIQUES EXEMPLAIRES Prêt et emprunt

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2 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

e souhait de consacrer son énergie et ses ressources à des activités liées au patrimoine peut se réaliser au travers de nombreuses opportunités en matière de bénévolat. Quelle que soit leur

forme, ces modes de participation constituent à la fois une source d’épanouissement pour les individus, en leur permettant de s’impliquer dans la société, et un moyen de développement pour les institutions afin d’accomplir des missions qui, sans cela, ne pourraient être menées à bien. Outre les principes de solidarité, de responsabilité et de coopération qui y sont associés, le bénévolat est intimement lié à la promotion de la connaissance dans son sens le plus large. Les personnes qui s’engagent en tant que bénévoles peuvent être mues par la volonté de se familiariser avec les pratiques, les principes et le fonctionnement de l’institution qui les accueille tout en acquérant des connaissances et des compétences liées à leur activité. Par ailleurs, nombre de bénévoles prennent activement part à l’organisation d’activités éducatives mises en place par les institutions. Dans ce numéro, le dossier consacré aux bénévoles dans les musées (pp. 10-15) vise à mettre en évidence la valeur inestimable de leur travail de soutien et de prolongement des actions menées par les institutions et les professionnels du patrimoine à travers le monde, dans des conditions et des environnements extrêmement variés. C’est aussi l’occasion d’exprimer notre reconnaissance aux nombreux bénévoles qui, régulièrement, apportent leur contribution aux activités du réseau de l’ICOM, et qui lui sont d’une aide cruciale.L’engagement sera également au cœur de la 35e édition de la Journée internationale des musées, que l’ICOM se prépare à célébrer, le 18 mai 2012, autour du thème Les musées dans un monde en

mouvement. Nouveaux défis, nouvelles inspirations. Dans la perspective de cet évènement, dont le programme s’enrichit de jour en jour, la rubrique Focus est consacrée à cette thématique, précisant quelques-unes des nombreuses questions que soulève le thème des transformations au sein de la communauté muséale. Un peu plus d’un an seulement après le tsunami et la catastrophe nucléaire au Japon, ainsi que le déclenchement de la révolution libyenne, il est certain que les experts en patrimoine culturel, les spécialistes des questions humanitaires et tous les citoyens préoccupés par ces problématiques dans le monde entier gardent à l’esprit que le changement peut être lourd d’implications et de conséquences. D’autre part, la montée en puissance de la société de l’information et la connectivité qu’elle implique – entre les individus comme entre les individus et la connaissance, ou les outils de la connaissance – permettent des interactions inédites qui transforment directement et de manière bénéfique le paysage muséal et patrimonial. Nous espérons que cette nouvelle édition de la Journée internationale des musées saura, une fois de plus, mobiliser avec succès la communauté muséale pour sensibiliser le public aux questions qui se posent actuellement dans notre domaine.Une heureuse manifestation de l’évolution des technologies est la publication du deuxième numéro des Nouvelles de l’ICOM au format numérique. Le premier numéro, Vol. 64, No 3, a reçu un excellent accueil de nos lecteurs ; nous invitons ceux d’entre vous qui ne l’auraient pas reçu à nous faire parvenir leur adresse électronique actualisée, afin de rejoindre les rangs de nos lecteurs en ligne dès les prochaines publications.

Hans-Martin Hinz Julien AnfrunsPresident de l’ICOM Directeur général de l’ICOM

L4Actualités des muséesConférences, inaugurations...

6Pratiques exemplairesPrêt et emprunt

8FocusLes Musées dans un monde en mouvement

10Dossier : Le bénévolat muséalMotivés et qualifiésApporter son aideMission : patrimoineUn engagement de longue durée

16Patrimoine en dangerLa Libye, un an après le début du conflit

18Les rencontres muséales internationales de l’ICOMPrendre le temps de la réflexion

20Communauté de l’ICOM Activités du réseau de l’ICOM

22PublicationsLa littérature muséale

Président de L’iCOM Hans-Martin Hinz

direCteUr GénérALJulien Anfruns

direCtriCe de LA PUBLiCAtiOnAurélie Aubourg

rédACtriCe en ChefAedín Mac Devitt

AssistAnte éditOriALeSara Heft

trAdUCtiOnSylvie Lucas

GrAPhisMeAgnès Quemper

COLLABOrAtriCeElisabeth Jani

AssistAnte COMMerCiALeLéa Desbourdes

iMPressiOn Solink, 75012 Paris

©ICOM ISSN 1020-6426

COUvertUre©SAN DIEGO ZOO GLOBAL/KEN BOHN

Les Nouvelles de l’ICOM, le magazine du Conseil international des musées, est publié en français, en anglais et en espagnol, avec l’assistance financière du Ministère de la Culture et de la Communication (France). Les opinions exprimées dans les articles signés n’engagent pas l’ICOM et relèvent de la seule responsabilité de leurs auteurs.

Ce projet a été financé avec le soutien de la Commission européenne. Cette publication reflète uniquement l’opinion de son auteur, et la Commission ne peut pas être tenue pour responsable de l’usage qui peut être fait des informations qu’elle contient.

Prochain numéroFocus : Les musées dans un monde en mouvementDossier : L’assurance muséalePratiques exemplaires : Les signalétiques des muséesSi vous souhaitez contribuer au prochain numéro des Nouvelles de l’ICOM, contactez Sara Heft à [email protected] pour plus de détails.

iCOM Maison de l’UNESCO1, rue Miollis 75732 Paris Cedex 15 France Tel +33 1 47 34 05 00 Fax + 33 1 43 06 78 62 [email protected] http://icom.museum

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4 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

actuaLités dEs muséEs

N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 54 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

AcquisitionsLa famille royale qatari a acheté Les joueurs de cartes (1895) de Paul Cézanne aux héritiers de l’armateur grec George Embiricos pour la somme record de 250 millions de dollars, selon Le Journal des Arts. Ce tableau est le cinquième d’une série thématique réalisée par le peintre français. Les quatre autres sont exposés respectivement au Musée d’Orsay (Paris, France), au Metropolitan Museum of Art (New York), à la fondation Barnes (Philadelphie, États-Unis) et à la Galerie Courtauld (Londres, Royaume-Uni). Cette transaction fait suite à une série d’acquisitions prestigieuses effectuées par l’émir du Qatar, notamment des œuvres de l’artiste britannique Damien Hirst et du maître de l’abstrait Mark Rothko. Les joueurs de cartes sera peut-être exposé au Musée national du Qatar, actuellement en cours de rénovation par l’architecte français Jean Nouvel et dont la réouverture est prévue pour décembre 2014. Le précédent record atteint pour l’achat d’une œuvre d’art datait de 2006, lorsque le tableau No. 5 (1948) de Jackson Pollock avait été acquis par un acheteur inconnu pour la somme de 140 millions de dollars.

Patrimoine en dangerLe 17 décembre 2011, l’Institut d’Égypte du Caire a pris feu durant des affrontements entre des manifestants et l’armée égyptienne. Ce centre de recherche prestigieux, fondé en 1798 par Napoléon au cours de sa campagne égyptienne et abrité dans un bâtiment de deux étages près de la place Tahrir, abritait une collection de près de 200 000 documents d’une valeur inestimable pour le patrimoine culturel égyptien. Ces ouvrages, revues et écrits très rares incluaient des trésors tels que la première édition de la Description de l’Égypte en 24 volumes, un inventaire détaillé réalisé par 160 érudits et scientifiques français des monuments du pays, de sa civilisation antique et de la vie contemporaine à l’époque de la publication, soit au début du XIXe siècle. D’après le Secrétaire général de l’Institut, Mohammed al-Sharbouni, la plus grande partie de la collection a été détruite ;

plusieurs conteneurs réunissant 50 000 documents, certains irrémédiablement détériorés, ont été transportés dans le bâtiment de la Bibliothèque et des Archives Nationales d’Egypte à la suite de l’incendie.

Le 7 février 2012, une trentaine de statues de Bouddha en corail et calcaire du musée national des Maldives, à Malé, ont été détruites par des vandales. Cette dégradation a eu lieu dans un contexte de troubles politiques : le même jour, le président Mohamed Nasheed, élu en 2008 lors des premières élections démocratiques du pays, a démissionné face à des pressions importantes des partis d’opposition, dont le parti islamique. Cet acte de vandalisme représente une atteinte irréversible au patrimoine archéologique préislamique de cette nation de l’Océan indien, constituée de 1 200 îles, qui s’est convertie à l’islam au XIIe siècle. Dans un entretien au New York Times, Ali Washeed, Directeur du musée national, a évoqué la possibilité de restaurer tout au plus deux ou trois des statues endommagées, et a déclaré que de nombreux érudits et musées du monde entier avaient proposé de s’associer à cet effort.

InaugurationsLe 3 décembre 2011 a été inauguré le nouveau Musée berbère du jardin Majorelle, à Marrakech (Maroc), une initiative de la Fondation Pierre Bergé-Yves Saint Laurent. Il s’agit de la première institution du pays exclusivement consacrée à la culture berbère, ou amazigh ; elle présente une collection d’objets issus de diverses régions du pays dans l’ancien musée d’Art islamique. L’équipe qui a supervisé la conception du musée a compté parmi ses membres Salima Naji, architecte et docteur en anthropologie ; Romain Simenel, ethnologue et chercheur à l’Institut de recherche pour le développement à Rabat ; ainsi qu’Ahmed Skounti, anthropologue à l’Institut national des sciences

de l’archéologie et du patrimoine à Rabat. Le musée couvre une superficie de 200 m2 et présente plus de 600 objets : des cartes, des photographies, des films d’archives ainsi que des documents audiovisuels créés spécifiquement pour le musée et destinés à guider les visiteurs dans leur voyage.

Au cours de l’année 2011, trois nouveaux musées ont été inaugurés en Espagne. Le Museo Carmen Thyssen Málaga abrite une importante collection de peinture andalouse au sein d’un ensemble architectural composé de bâtiments historiques restaurés datant du XVIe siècle et de nouvelles structures conçues spécialement à cet effet, avec une surface totale de 7 147 m2. Le Cristóbal Balenciaga Museoa à Getaria est dédié aux contributions du célèbre styliste Cristóbal Balenciaga Eizaguirre au monde de la mode et de la haute couture durant la seconde moitié du XXe siècle ; il occupe une nouvelle annexe du palais Aldamar, au sommet d’une colline qui surplombe la ville. Le Museo de Arte Contemporáneo d’Alicante comporte trois collections permanentes d’art du XXe siècle et s’inscrit dans un projet commun aux municipalités d’Alicante et de Valence autour de la réhabilitation des centres historiques de ces deux villes. Ces inaugurations ont enrichi le paysage patrimonial et culturel du pays, dans une année où les grands musées espagnols ont accueilli plus de visiteurs que jamais.

ConservationLe tableau Guernica (1937) de Pablo Picasso, exposé au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía de Madrid, fait actuellement l’objet d’une analyse par un robot, dans le cadre d’un projet de numérisation intitulé Viaje al interior del Guernica (Voyage à l’intérieur de Guernica) qui a débuté au tout début de l’année. L’appareil, long de 9 mètres et haut de 3,5 mètres, est capable de prendre jusqu’à 1 000 photos durant huit heures. 24 000 images en très haute résolution de cette œuvre de 27 m2 seront sélectionnées à la fin de ce processus de prise de vues en juin 2012 ; elles sont réalisées dans une variété de formats à l’aide des dernières technologies : à l’infrarouge, à l’ultraviolet, à la lumière visible, à la lumière multispectrale ainsi que sous forme de scans en 3D. Opérant seulement de nuit afin de ne pas perturber les visites, ce projet permettra des études approfondies sur l’histoire matérielle de ce chef-d’œuvre à l’occasion de son 75e anniversaire, en recourant à la technologie qui a permis la découverte récente de la première copie présumée de Mona Lisa au musée du Prado, également à Madrid.

La norme européenne NF EN 15946, qui se rapporte à l’emballage et au transport des biens culturels et qui avait initialement pris effet en octobre 2011, est devenue obligatoire pour les 31 pays du Comité européen de normalisation (CEN) en février 2012, remplaçant ainsi les réglementations nationales. Cette norme, rédigée par des professionnels du secteur culturel issus de toute l’Europe, s’inscrit dans une démarche

visant à standardiser les principes sur la conservation des biens culturels à travers l’Union européenne, afin d’encourager les échanges au sein de l’Europe et au-delà. Elle s’adresse à tous les acteurs impliqués dans le patrimoine culturel (institutions, galeries, antiquaires, sociétés de commissaires-priseurs ainsi que convoyeurs et assureurs), et elle indique tous les facteurs à prendre en considération avant d’engager le moindre transfert, à savoir le type d’emballage et de transport requis, le choix des matériaux utilisés, la qualité des gants à revêtir pour manipuler les objets ou encore la question de savoir si une halte est requise ou non durant le déplacement.

RestitutionLe 21 janvier 2012, le gouvernement italien a restitué aux autorités libyennes la tête d’une statue vieille de 2 000 ans qui était sortie du pays frauduleusement en 1990. Cette tête sculptée de Flavia Domitilla Minor, fille de l’empereur romain Vespasien, a été présentée au Premier ministre libyen Abdel Rahim al-Kib à Tripoli par le Premier ministre italien Mario Monti, qui effectuait sa première visite en Libye à la suite de la chute du régime de Kadhafi en octobre 2011. La sculpture complète avait été exhumée de Sabratha, site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, au nord-ouest de la Libye, et était exposée au musée de Sabratha lorsque des voleurs détachèrent la tête du corps et s’enfuirent avec. En avril 2011, l’objet a été mis aux enchères chez Christie’s, à Londres ; l’acheteur italien a volontairement renoncé à cette acquisition après avoir été alerté du vol.

En janvier 2012, l’Allemagne a restitué au Musée national d’Afghanistan une sculpture préislamique datant du deuxième siècle après Jésus-Christ, volée au cours de la guerre civile. Cette sculpture en calcaire haute de 30 centimètres représente huit personnages a

priori membres d’une audience regardant Bouddha sur son trône dans l’ancien royaume de Gandhara, qui couvre des parties de l’Afghanistan et du Pakistan actuels. L’Irish Times rapporte que cette œuvre a été renvoyée à Kaboul à la suite d’une enquête menée par l’ambassade de Kaboul à Berlin et qui a duré un an, après son apparition à Munich. Nombre des 70 000 antiquités qui ont été pillées dans les musées et les sites archéologiques du pays au début des années 1990 sont réapparues en Europe, aux États-Unis et au Japon, et plus de 8 000 de ces trésors ont été récupérés depuis 2007. La plupart d’entre eux ont été mis sous clé jusqu’à ce que des espaces adéquats équipés de systèmes de sécurité de dernière technologie puissent être aménagés.

PersonnalitéYvon Noël a été nommé Directeur du musée québécois de Culture populaire (MQCP) et est entré officiellement en fonction le 12 mars 2012. Directeur des activités éducatives et de l’accès à la culture du Musée des Beaux-Arts du Québec depuis 2006, M. Noël avait auparavant occupé le poste de Directeur général de l’École atelier de sculpture puis de la Maison des métiers d’art du Québec, tout en assurant la vice-présidence de la Société des musées québécois. Fondé en 2001, le MQCP a acquis tout au long de ces dix dernières années une position importante au sein du paysage muséal québécois en se consacrant au quotidien de ses habitants, à leur vécu, à leurs préoccupations ou encore aux valeurs proprement québécoises. ■

Alice Peinado, directrice du département de Design de l’École Parsons à Paris, explique le concept.

Pourquoi l’École Parsons a-t-elle décidé de s’associer à l’organisation des IDCA Awards ?L’École Parsons à Paris et ses étudiants sont ravis de participer à l’organisation des IDCA Awards 2012. C’est une occasion unique pour des étudiants en gestion du design de collaborer avec des musées et des galeries et de s’impliquer dans un projet pratique.L’existence d’un ensemble de prix dédiés au design et à la commu-nication pour les organisations artistiques nous semble capitale. Il est essentiel, en effet, de montrer que le monde de l’art n’est pas affranchi des questions qui ont trait aux stratégies de communica-tion ou de marque. [Les IDCA Awards] sont une excellente occasion d’étudier la manière dont ces institutions résolvent ces difficultés par des moyens novateurs et créateurs.

Qu’apportent les IDCA Awards à la communauté des musées ?Les musées ont déployé de grands efforts pour communiquer sur eux-mêmes et sur ce qu’ils représentent. Il est temps à présent que [ces efforts] soient récompensés. Se porter candidat aux IDCA Awards et remporter un prix permet à ces institutions d’être reconnues pour leurs stratégies de communication et de partager leurs pratiques exemplaires avec leurs pairs. Au sein de la communauté artistique, le prix démon-trera la valeur d’une bonne stratégie de communication. Démontrer une approche originale et une cohérence d’ensemble est d’ailleurs l’un des critères sur lesquels se basera le jury, en plus de la créativité.

Comment les vainqueurs sont-ils récompensés ?Les projets gagnants seront exposés au Metropolitan Museum of Art à New York le 29 juin 2012 au matin. Ce sera là l’occasion pour les lauréats de présenter leur travail à plus de 350 experts du secteur culturel dans l’un des musées les plus prestigieux du monde.

Les candidatures pour les IDCA Awards sont ouvertes jusqu’au 30 avril 2012.Plus d’informations sur Internet : agendacom.com/en/idca_awardset sur twitter @idca2012

Communicating the Museum27-29 juin 2012 New-York, États-UnisThème : Le monde change : comment les Musées s’adapteront?

Reconnaissance de la communication créative

Ouverts aux organisations culturelles du monde entier, les IDCA Awards (Prix

internationaux du design et de la communication) rassemblent les plus grands talents en matière de design et de communication déployés par les musées, les galeries et les fondations. La deuxième édition du prix est organisée conjointement par l’École Parsons à Paris (une section du Paris College of Art) et Agenda, une agence de communication culturelle basée à Paris. La cérémonie se déroulera chez Christie’s au Rockefeller Center à New York, le 28 juin 2012, au cours de la 12e conférence Communicating the Museum organisée par Agenda.

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6 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

PratiquEs ExEmPLairEs PrêT ET EMPrUNT

Inspection du siteEn amont de l’exposition temporaire, il est fortement conseillé d’effectuer une visite du musée emprunteur afin de vérifier les conditions de sûreté sur place. Cette mesure a démontré son efficacité et sa perti-nence en raison des nombreuses préconisations qu’ont engendrées ces visites. Il ne s’agit nullement de contrôles ni de censure mais de permettre de donner un conseil et d’avoir un oeil extérieur sur la sûreté du musée accueillant. Il serait opportun que le responsable sûreté du musée prêteur soit associé au processus de prêt en visitant les lieux, au moins, dans le cadre de prêts importants tant en valeur qu’en nombre d’objets concernés. Cette visite peut très bien se faire dans le cadre d’un convoyage afin de limiter les coûts. Les assureurs remplissent souvent cette fonction et assurent ainsi ces missions mais l’implication du musée prêteur est indispensable.

Mesures de sécuritéAujourd’hui, un nombre important de musées prêteurs se base sur le facilities report , un document type contenant toutes les mesures de sécurité prises par le musée emprunteur. Ce document est essentiel mais ne permet pas de détecter les failles de sûreté qui ne sont visibles que sur place. Lors d’expositions temporaires, il conviendra de s’assurer de la protec-tion mécanique des lieux (moyens de fermeture, serrures, blindage des portes, barreaudage, etc.). Malgré l’importance de la protection électronique, comprenant les alarmes, les détecteurs, la vidéosur-veillance, etc., elle doit être le dernier rempart après les protections mécanique et humaine. Des lieux ou des salles d’expositions bien fermés mécanique-ment de nuit et bien gardés avec un poste central de sécurité garantissent ainsi de bonnes conditions de sûreté.

La protection des œuvresIl est impératif de s’assurer que les tableaux sont munis d’accrochages sécurisés avec une détection rapprochée des oeuvres communément nommée TAG. Ces détecteurs permettent de signaler le moindre mouvement des oeuvres. Il est fréquent également qu’en matière de prévention de la malveillance et notamment de la dégradation, les peintures soient sous verre. De plus en plus d’assureurs préconisent cette mesure qui constitue un gage de protection supplémentaire. Les objets ou sculptures de petites tailles devront, quant à eux, être soclés solidairement à leur base ou placés dans des vitrines sécurisées munies d’alarmes.

Guy Tubiana, Commandant de Police, est le conseiller sûreté des musées de France auprès du ministère français de la Culture et de la Communication. Il adresse ses conseils aux musées en matière de prêt et d’emprunt d’oeuvres d’art.

CONSEIL D’ExPErT

N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 7

Dialoguer avec le mondeet Directeur adjoint pour la gestion des collections au VMFA.

Demandes de prêts et conditions requisesAfin de pouvoir accueillir l’exposition, le VMFA a soumis une demande officielle sous la forme d’un facilities report. En tant que site intermédiaire, entre Seattle et San Francisco, il n’avait pas à gérer l’importation ni l’exportation des œuvres, et n’était donc pas concerné par les procédures de douane. Plusieurs réunions et conférences téléphoniques ont eu lieu durant la phase préparatoire entre le VMFA et les deux au-tres institutions américaines, tandis que des échanges électroniques récurrents reliaient le VMFA et le Musée Picasso. Une rencon-tre préalable avec Anne Baldassari puis une visite sur place par un conservateur de Paris peu de temps avant l’événement ont été les seules entrevues réalisées pour organiser l’exposition.

L’exposition américaine comportait environ 150 œuvres couvrant toutes les grandes périodes de la production artistique de Picasso et comprenant peintures, dessins, structures, gravures, livres illustrés et sculptures ; elle a nécessité environ dix jours d’installation. Le VMFA a accueilli l’exposition très peu de temps après sa réouverture après une extension importante du musée, et, pendant la phase de prépara-tion, il a bénéficié de l’expertise du comman-dant Guy Tubiana (ministère français de la Culture et de la Communication) en matière de sécurité. Celui-ci a réalisé une inspection minutieuse du site, émis « des sugges-tions très perspicaces qui ont aidé à renforcer encore davantage les systèmes et les procédures de sécurité » du musée, comme l’indique Stephen Bonadies. En effet, un rapport défavorable de l’expert de la sécurité peut aboutir à l’annulation d’un événement. Pour Anne Baldassari, le critère essentiel pour accepter ou non les projets est le respect témoigné à l’égard des œuvres. Afin d’optimiser les conditions de prêt, un bilan sanitaire sur l’ensemble des œuvres qui voyagent est réalisé, et les plus fragiles sont inscrites sur une « liste rouge », ou soumises à un traitement préalable. Des cadres étanches et inaltérables ont été créés, verrouillés et équipés de filtres UV ; en outre, les œuvres voyagent dans des coffres étanches munis d’amortisseurs et de dispositifs destinés à enregistrer les chocs et les variations de température.

En partenariat avec les deux autres sites, le Programme d’indemnisation américain

a pris en charge l’assurance des pièces exposées, c’est-à-dire que « le gouvernement américain endosse tous les risques [...] dans l’éventualité où des dommages ou des pertes surviendraient », explique le Conservateur en chef. Pour une exposition qui requiert une assurance de plus d’un milliard de dollars, le fait de ne pas avoir à souscrire une police privée très onéreuse permet aux musées d’investir pleinement dans la production de l’exposition.

Avant de prêter ses œuvres, le Musée Picasso établit un contrat détaillant tous les aspects du prêt : des modes et condi-tions de transport jusqu’à l’usage qui peut être fait des œuvres. Lors de la négociation des termes, des difficultés peuvent surve-nir en raison des différences de systèmes juridiques entre les pays. Dans ce cas précis, la loi française s’applique pour toutes les pièces du Musée Picasso, alors que le VMFA, en tant qu’agence gouvernementale de l’état de Virginie, est obligé d’inclure cer-taines clauses dans tous les contrats qu’il dresse. Stephen Bonadies précise que les éventuels points de désaccord « ont été résolus à l’amiable grâce à une grande flexibilité de la part des deux parties ».

Le Musée Picasso a supervisé l’agencement et la scénographie de

l’exposition, missions qui relèvent en gé-néral de la respon-sabilité de l’institution d’accueil. Le VMFA s’est montré disposé à « effectuer les modi-fications requises y

compris durant l’installation [après qu’Anne Baldassari] a eu l’occasion de constater l’effet visuel que les œuvres produiraient dans la galerie d’exposition », comme l’explique Stephen Bonadies. L’accrochage des tableaux a été réalisé conjointement par le VMFA et le personnel français, certaines pièces délicates étant manipulées exclusivement par les spécialistes du Musée Picasso.

Les circonstances imprévues qui ont permis au VMFA d’accueillir cette expo-sition ambitieuse, avec une excellente maîtrise des procédures complexes inhérentes à un prêt international d’une telle ampleur, ont finalement apporté un succès phénoménal à l’institution. Près de 250 000 visiteurs se sont déplacés pour voir les chefs-d’œuvre de Picasso dans ce nouveau site d’Amérique du Nord, répondant, d’après Anne Baldassari, au désir de l’artiste de « dialoguer avec le monde entier » à travers ses créations, mais aussi à l’ambition ravivée du Musée Picasso de refléter cette ouverture dans ses propres pratiques. ■

depuis son ouverture en 1985, le Musée national Picasso à Paris (détenant la plus grande collection

publique mondiale de l’artiste d’environ 5 000 pièces) est l’institution qui prête le plus d’œuvres du maître espagnol dans le monde, grâce à une « démarche de prêt très généreuse », comme l’explique la Directrice du musée, Anne Baldassari. Paradoxalement, seule une partie de la collection était exposée sur place en raison des limites spatiales imposées par les dimensions de l’hôtel Salé, la demeure du xVIIe qui abrite le musée ; le non-renouvellement de cette exposition permanente résultait aussi du poids financier de ces activités internationales, qui freinait l’innovation muséologique de l’institution. La

fermeture actuelle du musée pour une réno-vation en deux phases (2006-2009 et 2011-2013) a conduit à la mise en place d’un vaste programme sans précédent d’expositions internationales, lancé en 2008 et conçu pour permettre de financer cette modernisation ainsi que la croissance future. D’ici la fin de l’année 2012, ces expositions auront voyagé dans neuf pays et sur quatre continents. C’est une action ambitieuse qui permet de prêter des œuvres d’une qualité inestimable et de les rendre accessibles à de nouveaux publics à travers le monde ; elle a abouti à la création d’un réseau durable de partenaires en vue de futures collaborations et a ajouté une nouvelle dimension aux pratiques de prêt pour cette institution déjà reconnue

pour son excellence dans ce domaine.Cet échange s’est révélé une occasion

inespérée pour des institutions partenaires telles que le Musée des Beaux-Arts de Virginie (VMFA) à richmond, aux états-Unis, qui a accueilli l’exposition Picasso : chefs d’œuvre du Musée national Picasso, Paris, du 19 février au 15 mai 2011, la deuxième des trois étapes aux états-Unis, après le Musée d’Art de Seattle et avant le Musée De Young à San Francisco. Le VMFA a formulé sa demande d’accueillir l’exposition moins d’un an avant la date de l’inauguration, grâce au retrait de l’une des institutions initialement prévues pour la recevoir, ce qui a contraint à agir « très rapidement », selon Stephen Bonadies, Conservateur en chef

Les musées ont de plus en plus fréquemment recours à l’emprunt d’œuvres d’art, favorisant la diversité et la collaboration internationale

par Sara Heft

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Picasso : chefs d’œuvre du Musée national Picasso, Paris au Musée des Beaux-Arts de virginie, 2011

Le critère essentiel pour accepter ou non les projets est le respect témoigné à

l’égard des œuvres

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8 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

Focus LES MUSéES DANS UN MONDE EN MOUVEMENT

N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 9

important du sujet. La fatigue muséale, cet état physique qui limite le temps d’absorption des connaissances, semblait donc davantage maîtrisée. À Montréal encore, le Musée McCord d’histoire canadienne a lancé son premier parcours utilisant la réalité augmentée avec l’application « Musée Urbain MTL », qui permet de visiter le passé en images numériques tout en mettant l’accent sur le présent. Tout le chemin historique parcouru prend forme devant nos yeux par voie de comparaison.

Vers une personnalisation de la visiteD’ici peu, grâce à la réalité augmentée, qui permet de connaître les paramètres de l’utilisateur et de lui offrir des découvertes à la carte selon son profil, les visiteurs pourront choisir la visite, réelle ou virtuelle, qui leur convient. La segmentation des publics se fera grâce au pouvoir du numérique, lequel pourra leur proposer l’itinéraire correspondant à leur humeur du moment.

retenons donc que les technologies numériques et leurs principaux objets d’utilisation favorisent le travail d’équipe

à l’intérieur du musée, c o nc ou ra n t a ins i à la poursuite des mêmes objectifs que ceux d’un plan straté-gique. Une politique d’utilisation de leurs

fonctions permet de mieux cibler les résultats et, en conséquence, d’atteindre les objectifs avec un meilleur taux de réussite – mais cela nécessite d’abord une interrogation sur les raisons qui poussent le musée à développer telle ou telle application numérique pour le public, voire pour les muséologues. Cette planification doit être mue par un souci d’optimisation des connaissances et des ressources. Peut-être faudrait-il alors développer des plans de dotation qui tiennent compte de l’acquisition d’une autonomie de production sur le plan technique et de mises à jour des outils numériques. De plus, amorcer un virage vers la production d’applications numériques exige des musées un effort de conceptualisation pragmatique. Il faudra bien accepter que le musée ait à la fois une vie immatérielle et une vie concrète, et que ces applications fassent vivre le musée autrement, par un va-et-vient du réel au virtuel et vice versa dans cette nouvelle culture de l’électronique. ■

depuis une dizaine d’années, le développement des technologies de la communication est si rapide que

les individus et les musées peinent à suivre. Des versions améliorées des smartphones (téléphones mobiles avec accès web, consultation du courrier électronique, utilisation des services de messagerie instantanée et autres applications téléchargeables), des logiciels et des appareils tels que les tablettes numériques (l’iPad d’Apple, le Kindle d’Amazon, etc.) ne cessent de nous émerveiller par leurs nouvelles possibilités. La technologie est si présente dans notre quotidien qu’il est vital de comprendre la spécificité de ces supports technologiques afin de bien cerner les nouvelles possibilités qu’ils offrent aux musées.

Le recours aux nouvelles technologies n’est pas une fin en soi, mais plutôt un moyen de répondre à des objectifs tels que la segmentation des marchés ou le développement de l’image de marque. Cela s’inscrit donc de manière stratégique dans la planification générale des musées, tout comme les différents moyens de communication conventionnels ou la planification du calendrier des expositions. Le contenu doit être conçu de manière à pouvoir être déployé simultanément sur plusieurs plates-formes électroniques. Il est donc désormais incontournable que les responsables du contenu maîtrisent les différentes plates-formes numériques et leur potentiel et qu’ils travaillent dès l’amorce d’un projet d’exposition avec tous les

départements du musée pour décliner le contenu en plusieurs expériences, y compris l’expérience virtuelle.

Chaque année, 1,2 milliard de smartphones sont produits, et d’ici moins de cinq ans, 80 % des utilisateurs accéderont à Internet via leur téléphone ou via leur tablette électronique (selon The NMC Horizon Report : 2011 Museum Edition. p. 10). Devant la multiplicité des supports, les musées doivent accepter de modifier leur vision de la muséologie afin de prendre de bonnes décisions. C’est ainsi par exemple que les conservateurs de musée doivent concevoir le rôle du visiteur, réel ou virtuel, sous un jour nouveau : plus actif dans la dynamique de l’expérience muséale et apte à diffuser son opinion de non-spécialiste, il est investi d’une confiance par le muséologue, bousculant de ce fait les hiérarchies établies.

Une nouvelle visionCompte tenu de l’importance croissante de l’Internet mobile, la production des contenus visibles sur ces appareils doit être prévue par chaque musée en amont de ses expositions et, si les moyens le permettent, comme outils d’expériences nouvelles intégrées aux programmes éducat i fs e t aux programmes destinés aux publics. Les technologies telles que la réalité augmentée permettent non seulement la mise à la disposition immédiate pour le visiteur de l’ensemble des informations conventionnelles (texte d’introduction, cartel, publication) et même au-delà, mais également de réaliser grâce aux applications numériques, le rêve de tous les conservateurs : proposer différents niveaux d’interprétation aux publics des musées selon une segmentation préétablie.

Au Centre des sciences de Montréal, au Canada, le Commissaire de l’exposition Indiana Jones et l’aventure archéologique a mis à la disposition du public ce qu’il nomme un « compagnon de visite », une technologie développée spécifiquement pour la visite, un peu comme l’étaient les audioguides. Selon l’étude qui a suivi, les visiteurs de 9 ans et plus, cible de l’exposition, consacraient plus de 2h30 à la visite, ce qui représente un approfondissement

Les musées et leur double numériqueDu virtuel à la 3D, les nouvelles technologies

bouleversent la dynamique entre public et musée

Nous assistons à une démocratisation des images

des collections et à leur diffusion à grande échelle

par Manon Blanchette, Directrice générale, Société des directeurs des musées montréalais ; Présidente du Comité international de l’ICOM pour l’audiovisuel et les nouvelles technologies de l’image et du son (AVICOM)

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“Compagnon de visite” au Centre des sciences de Montréal

sous la pression de certains événements, les individus révèlent naturellement ce qui a pour eux le plus d’importance. En

2007 aux états-Unis, le magazine Time a publié un article sur ce que les gens emporteraient s’ils devaient fuir leur maison en feu (Amanda ripley, « Que sauver dans un incendie », 25 octobre 2007). Les souvenirs de famille figuraient en haut de la liste et comprenaient notamment les albums de photo, des cartes de baseball dédicacées, les médailles de guerre d’un grand-père ou le beurrier d’une arrière-grand-mère. Ce patrimoine matériel personnel représente un lien avec le passé, et la plupart des maisons contiennent un certain nombre de ces objets, qui ont été transmis de génération en génération.

Les musées sont un macrocosme de ces reliques : ils conservent le patrimoine tant matériel qu’immatériel qui nous relie à notre histoire et à notre culture, lesquelles à leur tour nous relient à notre humanité. Et comme pour l’incendie qui dévaste la maison, malgré le démenti relayé parfois avec véhémence par les médias, les experts s’accordent tous pour dire qu’il est trop tard pour stopper le processus du réchauffement climatique. Nous devons à présent concevoir des stratégies pour nous y adapter.

Mais à quoi exactement devons-nous nous adapter ? Dans son livre récent, The Great Disruption (Londres, Bloomsbury, 2011), Paul Gilding, ancien Directeur général de Greenpeace International, donne matière à réflexion en prédisant la poursuite de la récession économique mondiale en raison du changement climatique. Sont notamment en cause les événements climatiques extrêmes, qui réduisent les services essentiels de l’écosystème tels que l’eau, la pêche et l’agriculture et influent sur les réserves de nourriture et d’eau, ainsi que sur la stabilité politique et la sécurité internationale. En conséquence, il y aura, selon Gilding, une augmentation considérable du prix de la nourriture, ce qui déclenchera une instabilité économique et géopolitique à très grande

Les musées face au changement climatique

Le rôle crucial des musées dans un monde affecté par le réchauffement climatique

Eric Dorfman, Dr., Directeur du musée régional de Whanganui ; Président d’ICOM Nouvelle-Zélande

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inondations au Musée du Queensland, Australie en 2011

échelle. Le marché financier mondial prendra conscience de toutes les implications à long terme, et les bourses seront alors réévaluées, prélude d’une crise importante pour toutes les économies mondiales.

Sauvegarder le patrimoineSe profilerait alors une réduction constante de la richesse mondiale face à une disponibilité des ressources en diminution. Dans un avenir où il nous faudra privilégier les actions transversales pour surmonter tous ces défis, le rôle des musées du monde entier – sauvegarder le patrimoine culturel de la planète et apporter une information crédible de façon accessible – sera d’autant plus crucial.

Le thème de la Journée internationale des musées 2012, Les musées dans un monde en mouvement, of fre l’occasion pour les institutions d’impliquer le public de diverses manières. L’une d’elles consiste à développer des stratégies qui permettent aux visiteurs de prendre des ini t iat ives face aux défis de cet avenir incertain. Par exemple, le fait de fournir des informations au public sur des modes de vie durables et sur la façon de réagir à des conditions environnementales en pleine mutation aura sans doute des effets très positifs. La fréquentation des musées, en constante hausse parallèlement à l’affaiblissement de l’économie mondiale, indique que le public est réceptif à ces thèmes.

Au niveau interne, les musées auront également besoin d’une planification efficace pour garantir leur capacité à conserver les objets en sécurité et d’une argumentation convaincante afin que les ressources nécessaires leur soient allouées. La Journée internationale des musées 2012 est l’occasion de mettre en œuvre une pensée

créative, tant sur le plan environnemental que politique. Une préparation efficace aux situations d’urgence ainsi que de solides stratégies en matière de réaction (voir Nouvelles de l’ICOM, vol. 64, n° 3, pp. 16-17) sont essentielles pour protéger le patrimoine face aux catastrophes naturelles et aux conflits armés. En outre, les plans d’urgence pour les musées deviennent de plus en plus sophistiqués, face aux événements tels que les tremblements de terre récents au Japon et en Nouvelle-Zélande et les graves inondations en Thaïlande et en Australie.

Le véritable défi consiste à faire en sorte que les gouvernements reconnaissent le rôle incontournable des musées dans la sauvegarde du patrimoine et la sensibilisation du public et qu’ils leur octroient des fonds suffisants à cette fin. C’est là une tâche rendue plus difficile encore par la conjoncture économique, les musées

étant souvent jugés « non essentiels » et subissant de ce fait des réductions voire la suppression d e f i n a n c e m e n t s . Ces institutions sont également confrontées à des défis internes. Les

professionnels de musée voient s’ouvrir une grande variété de perspectives sur le rôle des musées, appelés à devenir le lieu de débats éthiques, d’initiatives publiques et de plaidoyers pour certaines causes. La réticence à franchir la fine ligne qui sépare le plaidoyer du prosélytisme, ou peut-être le simple désir de se concentrer sur la recherche pure, explique que pour l’instant aucune perspective commune à l’ensemble du secteur n’ait été adoptée. Les musées dans un monde en mouvement pourrait aider à catalyser le débat philosophique sur le rôle des professionnels de musée en général, tout en servant de lien entre différentes approches qui permettraient de faire avancer ce domaine, et le monde, vers un avenir viable. ■

Les musées doivent faire l’objet d’une

planification pour assurer leur capacité à conserver les objets de manière sécurisée

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10 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012 N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 11

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pas un profil type de volontaire. Souvent considérées comme une façon de favoriser l’insertion professionnelle, les missions de bénévolat attirent un grand nombre de jeunes adultes, de jeunes diplômés ou encore de personnes sans emploi désireuses de nouer des contacts. Les retraités sont également nombreux et très dévoués : c’est l’occasion pour eux de transmettre leur savoir et d’entretenir des liens avec la société. Les motivations sont donc très variées. Karen Griffiths, Coordinatrice du Programme des bénévoles pour le Historic Houses Trust de Nouvelle-Galles du Sud (HHT), une fondation dédiée à la conservation et à la gestion de sites historiques en Australie, décrit son équipe de 250 bénévoles comme motivée par la perspective de « tester une nouvelle carrière et de gagner en assurance », mais aussi par le souhait d’acquérir des connaissances et des compétences propres au domaine muséal, de tisser des liens et de jouer un rôle dans la communauté – des motivations souvent exprimées par les bénévoles dans le secteur du patrimoine.

D’autres facteurs plus personnels peuvent inciter les individus à donner de leur temps à une institution spécifique : au zoo de San Diego (Californie, états-Unis), Tammy rach, responsable des bénévoles, décrit une équipe de bénévoles qui partagent la même « passion pour la conservation de la faune et de la flore » tout comme le désir de « donner quelque chose en retour à une organisation qui fait partie pour nombre d’entre eux de leurs plus anciens souvenirs de famille, renforçant ainsi leurs liens avec [le zoo]tout en [participant] à une organisation de bienfaisance de portée mondiale ». Cette équipe composée d’ « étudiants comme de chercheurs en aérospatiale, de maquilleurs, de professeurs de mathématiques, de retraités ou encore de grands donateurs, âgés de 18 à 92 ans, [représente] un véritable échantillon de notre communauté ».

Qualification et formationLes procédures de sélection sont souvent strictes et extrêmement compétitives, et des systèmes officiels de recrutement assurent généralement l’importante coordination et la formation nécessaires des bénévoles, tout en garantissant un engagement de leur part en termes de régularité et de durée. Lorien Holland, membre du comité exécutif de Museum Volunteers Malaysia, une association basée à Kuala Lumpur qui offre un programme de formation de 13 semaines pour les guides bénévoles en anglais et japonais au Muzium Negara (Musée national), explique que pour être admis dans le programme, « les bénévoles doivent avoir un intérêt pour la Malaisie, l’histoire et les musées et s’engager à être guides bénévoles une fois qu’ils sont diplômés ». Il précise également que le programme compte « plus de 200 diplômés […] de nationalités très variées ». Celui-ci comprend trois heures de cours et de discussion par semaine durant quatre mois, assurés par des guides bénévoles, ainsi que par le personnel de Muzium Negara et des experts extérieurs ; à l’issue de cette période, les diplômés doivent servir comme guides au moins une fois par mois.

Des compétences très spécifiques sont parfois requises, en plus de certains intérêts ou d’une formation académique. Tammy rach note qu’au zoo de San Diego, par exemple, les bénévoles du service de physiologie reproductive doivent avoir « une très grande expérience de laboratoire pour que leur candidature soit considérée ». Au HHT, où le recrutement est effectué toute l’année en fonction des candidatures reçues et des entretiens, contrairement à de nombreuses institutions, un profil de chaque poste de bénévole est fourni, détaillant « l’expérience, les connaissances et les intérêts que le candidat doit avoir pour se présenter à un entretien », selon Karen Griffiths. De cette façon, ajoute-t-elle, « il n’est pas nécessaire d’avoir de l’expérience dans

la conservation du patrimoine, étant donné que chaque bénévole a un rôle différent. […] Il se peut que nous ayons besoin d’aide dans notre département de marketing, et dans ce cas les compétences requises ont trait au marketing au sens large ». Les nouveaux bénévoles suivent une première formation générale de deux jours puis une seconde, plus spécifique ; un engagement minimum de douze mois est exigé des candidats retenus.

Droits, responsabilités et avantages des bénévolesÀ la suite d’une procédure rigoureuse de sélection et de formation, les bénévoles doivent parfois signer des documents qui stipulent les conditions institutionnelles de leur engagement et énoncent leurs responsabilités vis-à-vis d’un programme ou d’un département spécifique. C’est le cas notamment au Metropolitan Museum of Art, à New York, où tous les bénévoles doivent signer un Contrat du bénévole, qui est contresigné ensuite par un représentant du personnel. Au HHT, toutes les mesures et règles en vigueur s’appliquent aussi bien au personnel qu’aux bénévoles (médecine et sécurité du travail, protection des enfants, etc.), et la fondation exige des bénévoles qu’ils remplissent un formulaire d’acceptation ainsi qu’une Déclaration d’interdiction de travail, qui leur défend de travailler en tant que salariés. C’est une pratique relativement courante : le zoo de San Diego, conformément à la législation californienne, interdit aux bénévoles de travailler – et aux employés payés à l’heure d’effectuer du bénévolat. Selon Tammy rach, nombreux sont ceux au sein de l’organisation qui souhaiteraient « faire les deux mais qui, légalement, [n’en ont pas le droit]. On a même vu des gens arrêter de travailler pour pouvoir s’engager comme bénévoles, parce que c’est une activité très plaisante ».

Les bénévoles jouent souvent un rôle clé dans la bonne marche des institutions et, s’ils doivent par conséquent se conformer à des règles strictes, ils se voient offrir en retour certains avantages et diverses formes de reconnaissance. Il peut s’agir d’ un accès libre aux institutions,

d’invitations pour certains événements, sorties ou réceptions, de réductions pour des événements, produits dérivés ou repas, de laissez-passer, de possibilités de formation continue, ou encore de cérémonies ou célébrations annuelles de remerciements.

Certaines organisations se sont donné pour mission permanente d’œuvrer en faveur des bénévoles, en cherchant à mettre en valeur la place qu’ils occupent dans les institutions et au-delà, ainsi qu’en favorisant la reconnaissance du rôle qu’ils jouent. On peut citer Museum Volunteers Malaysia, la Fédération mondiale des amis des musées,

Union rEMPArT (France), et bien d’autres encore. De même, le travail de l’IAVE dans le domaine du bénévolat en général, en termes de diffusion du savoir et de développement des réseaux, s’est révélé crucial pour donner à des « ressources limitées une portée considérable dans le monde entier », comme l’explique Kathi Dennis.

2011 a marqué le 10e anniversaire de l’Année internationale des volontaires, ce qui a été l’occasion de réfléchir aux défis actuels et futurs qui entourent cette activité, ainsi qu’aux possibilités d’évolution pour les bénévoles et les organisations bénévoles dans un monde en pleine mutation, soumis à des bouleversements économiques et écologiques mais de plus en plus connecté grâce à la révolution technologique planétaire. Cette hyperconnectivité, annoncée dès le début du siècle par une vague de mouvements populaires culturels, sociaux et politiques sans précédent, représente désormais un moyen formidable de canaliser l’énergie des bénévoles et de multiplier leurs activités dans les années à venir. ■

dossiEr LE BéNéVOLAT MUSéAL

N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 1110 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

Motivés et qualifiésLes bénévoles sont une mine de ressources pour les musées et les institutions du patrimoine dans le monde entierpar Sara Heft, avec la contribution d’Aedín Mac Devitt

Des étudiants comme des chercheurs en aérospatiale, des maquilleurs, des profes-seurs de mathématiques, des retraités ou encore de grands donateurs, âgés de 18 à 92 ans – les bénévoles sont un

véritable échantillon de notre communauté

L’année 2001 avait vu la célébration de l’Année internationale des volontaires des Nations Unies, dont le coup d’envoi avait été donné par la Conférence mondiale sur les bénévoles à Amsterdam organisée par l’IAVE (Association internationale pour l’effort volontaire). À cette occasion, la Déclaration universelle du bénévolat avait été adoptée,

définissant cette activité comme « une composante essentielle de toutes les sociétés ». Une enquête sur le rôle que remplit le bénévolat dans la sphère muséale aujourd’hui, plus de dix ans après l’adoption de ce texte, révèle l’extrême diversité des profils des bénévoles, de leurs motivations et de leurs besoins en matière de formation dans le monde entier, certains aspects variant d’un pays à l’autre, tant du point de vue de la législation que du statut de ces individus dans le domaine du patrimoine.

Dans un contexte de crise économique mondiale, qui a mené à la réduction drastique des budgets des musées pour l’ensemble de leurs missions, le bénévolat est plus important que jamais et peut constituer une ressource efficace pour conserver et promouvoir le patrimoine. Kathi Dennis, Directrice générale de l’IAVE, explique que si le budget

de nombreuses organisations a été réduit et si « de nombreuses ONG ont disparu, […] de plus en plus d’individus s’intéressent désormais au bénévolat afin d’acquérir de nouvelles compétences et de développer leur réseau professionnel. »

Au-delà des activités bénévoles traditionnelles qui se traduisent par un investissement physique, l’implication individuelle peut également prendre la forme d’un investissement financier : fin 2010, par exemple, dans le but d’acquérir le chef d’œuvre de la renaissance Les Trois Grâces de Cranach l’Ancien, s’élevant à 5 millions d’euros, le Louvre a rassemblé, outre l’apport du mécénat d’entreprise usuel, 1 million d’euros grâce à 5 000 donateurs volontaires en ligne – un usage des plus rentables des nouvelles technologies qui permet d’exploiter le potentiel de la société civile pour soutenir l’activité muséale et qui a fait des adeptes dans le paysage muséal.

Des motivations et des profils très diversLe désir de participer à des programmes classiques de bénévolat dans des musées ou à des projets patrimoniaux demeure très fort, et il n’existe

Un membre de l’équipe de bénévoles du Zoo de san diego au travail

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12 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012 N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 13

Certains musées imposent aux personnes intéressées de suivre une formation assez poussée avant d’intégrer l’équipe des bénévoles. Pour être bénévole au musée d’Israël, par exemple, il faut non seulement être adhérent, mais aussi assister à un cours préparatoire de six mois coûtant 2 500 NIS (500 euros) et passer un examen final. Ce degré de professionnalisme est loin de dissuader les bénévoles puisque le musée d’Israël ne reçoit pas moins de 50 candidatures par cours, dont 20 sont acceptées.

Les jeunes diplômés de l’université, quant à eux, considèrent le bénévolat comme un tremplin pour accéder éventuellement au rang de professionnels des musées. Au musée des Beaux-Arts de Budapest, en Hongrie, la directrice des bénévoles, Izabella Csordás, a ainsi commencé sa carrière dans le musée en tant que bénévole.

Le statut des bénévolesUne fois recrutés, les bénévoles doivent être pris en charge et encadrés afin de pouvoir devenir un soutien effectif pour le musée. Dans son article « Advancing Volunteering Management » (BAFM Journal, numéro 98, été 2010), Peter Walton, responsable de projet Gestion du bénévolat pour l’Association britannique des amis des musées, se réfère à trois modes de gestion des bénévoles au royaume-Uni. Dans le premier modèle, les bénévoles sont recrutés, administrés et encadrés par le personnel salarié du musée ; dans le deuxième, les amis du musée sont administrés en interne par le musée, comme n’importe quel autre service ; et dans le troisième, le personnel est entièrement bénévole, mais soutenu et coordonné par un professionnel rémunéré – tel qu’un secrétaire général – pour superviser les opérations quotidiennes. D’autres systèmes existent ; aucun ne l’emporte sur les autres, l’essentiel étant que chaque pays et chaque institution adoptent ou adaptent le modèle qui paraît le plus approprié à leur contexte particulier.

Plus les amis et les bénévoles seront reconnus comme occupant une place essentielle dans le musée, et plus leur statut sera élevé. À cet égard, la FMAM joue un rôle déterminant car elle s’efforce d’accroître la compréhension et la coopération entre les bénévoles les professionnels des musées.

Malheureusement, les bénévoles ne sont pas toujours compris, ni appréciés, ni même bien accueillis par les professionnels. Cette réaction semble provenir d’un malentendu sur le rôle qu’ils remplissent et sur leur potentielle contribution, non seulement au sein du musée, mais également vis-à-vis du personnel lui-même. Toutefois, dans le contexte actuel de réduction importante des budgets des gouvernements pour les institutions culturelles, et notamment les musées, le rôle des bénévoles et des amis des musées est très clairement renforcé. Ceux-ci ne pouvant remplacer les professionnels, ils ne devraient pas être perçus comme une menace, mais au contraire comme un soutien au personnel dans l’accomplissement de ses tâches et de ses responsabilités.

La place des bénévoles dans la sphère muséale est appelée à se développer au xxIe siècle, gagnant en importance dans les pays où ce phénomène est encore un concept nouveau. Comme de nombreux pays connaissent aujourd’hui de graves difficultés financières, les budgets consacrés à la culture et aux musées se trouvent menacés. Il est donc plus important que jamais pour des organisations telles que l’ICOM et la FMAM de s’unir et de s’assurer que les musées du monde entier continuent à renforcer leur service à l’égard de la société. ■

L Le Congrès international de la Fédération mondiale des amis des musées (FMAM) qui s’est tenu en septembre 2008 à Jérusalem, Israël, a donné lieu à un important débat sur la différence entre

les amis des musées, les membres des conseils d’administration et les bénévoles. La conclusion est que si des variantes existent d’un pays à l’autre et d’un musée à l’autre, de manière générale, toutes les catégories de personnes travaillant dans les musées sans être payées peuvent être considérées comme bénévoles. On constate, néanmoins, une grande disparité dans la conception, l’organisation et la participation de ces différentes catégories d’individus qui mettent leur temps, leur énergie et leur talent au service des musées.

Le Code de déontologie adopté au Congrès international de la FMAM à Oaxaca, au Mexique, en octobre 1996 définit les « amis des musées » comme ceux « qui contribuent, de diverses façons, au soutien des musées, à leur développement ainsi qu’à leur présence et à leur influence dans la société, sur la base du volontariat et de la non-rémunération. […] Les amis et bénévoles n’attendent en retour aucun bénéfice, ni financier ni de toute autre nature, hormis la satisfaction de contribuer au maintien et au développement de l’institution à laquelle ils appartiennent, ainsi qu’à la satisfaction du public qu’[ils] servent. »

Les bénévoles, comme certains professionnels de musées à la retraite qui ont encore l’énergie et la volonté d’œuvrer pour leur communauté de manière non-lucrative, offrent ainsi leur talent et leur expérience, ce qui peut représenter une aide précieuse pour les musées, dans des domaines aussi variés que la restauration, l’archivage, la comptabilité, la scénographie ou encore l’édition.

Des rôles et des exigences hétérogènes Dans de nombreux pays, la pratique du bénévolat est solidement ancrée dans la culture ou la religion, tandis que dans d’autres elle commence tout juste à apparaître. En Occident, le concept de bénévolat est répandu dans tous les milieux, et les bénévoles jouent un rôle central dans de nombreux domaines de la société civile, y compris les musées.

L’exemple du musée d’Israël, fondé en 1965, est emblématique de l’importance que peuvent prendre les bénévoles dans le fonctionnement d’un musée. Son organisation bénévole a été fondée en 1974 et compte actuellement 360 bénévoles actifs, dépassant de loin les effectifs du personnel et totalisant près de 72 000 heures de travail par an. Les bénévoles sont présents dans tout le musée, que ce soit pour les services traditionnels d’information et de visite guidée, ou pour la recherche, les ateliers de restauration, l’assistance à la conservation ou à d’autres départements du musée, ou encore la bibliothèque.

Dans l’ancien bloc soviétique, au contraire, les amis et les bénévoles des musées sont des réalités relativement nouvelles, apparues dans certains pays seulement vers le milieu des années 1990. Ils acquièrent de plus en plus d’importance, et les visites guidées

et les services d’information sont des activités où prévaut désormais le bénévolat. Aux états-Unis, le musée d’Art du comté de Los Angeles (LACMA), l’un des plus grands musées d’art du pays, a été fondé exclusivement par des bénévoles en 1910, comme une branche du musée des Sciences, de l’Histoire et de l’Art de Los Angeles.

Bien que la plupart des bénévoles puissent se vanter de posséder déjà d’excellentes qualifications et une expérience professionnelle reconnue, une formation spécifique est souvent requise. S’ils se voient confier la responsabilité d’un poste au bureau d’information, ils doivent bien sûr être capables de répondre aux questions qu’on leur pose. Par ailleurs, il est souhaitable que les conservateurs commentent les expositions en présence des guides pour que ceux-ci possèdent l’assurance et l’information nécessaires pour initier le public. Cette pratique est parfois difficile à mettre en place dans la mesure où les conservateurs se soucient principalement de finaliser l’installation de l’exposition, sans avoir nécessairement le temps de former les bénévoles.

Apporter son aideLes opportunités de bénévolat évoluent à des rythmes différents selon les régions du mondepar Daniel Ben-Natan, Président, Fédération mondiale des amis des musées

12 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

dossiEr LE BéNéVOLAT MUSéAL

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Les bénévoles du Musée d’israël guidant un groupe

Le talent et l’expérience des volontaires peut représenter une aide

précieuse pour les musées dans des domaines variés

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14 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

Des chantiers d’apprentissage et de valorisation de compétences attirent les jeunes bénévoles de l’Union REMPART pour la restauration du patrimoine Le Musée du transport de Londres s’efforce de construire

et de consolider les relations avec ses bénévoles

dossiEr LE BéNéVOLAT MUSéAL

L ’Union rEMPArT, association française reconnue d’utilité publique, s’est fixée pour objectif de conjuguer patrimoine et citoyenneté : sa volonté est de donner accès au patrimoine au plus grand nombre et

d’en permettre ainsi la conservation et la transmission. L’Union rEMPArT regroupe 170 associations locales ou régionales en France qui interviennent sur un patrimoine varié. Toutes ont le souci de sauver des sites de l’oubli et de rendre le patrimoine vivant.

Depuis 1966, date de la création de rEMPArT, des centaines d’édifices – militaires, religieux, industriels, civils, etc., en milieu rural ou urbain, protégés ou non au titre des monuments historiques – ont été rendus visibles au public grâce à l’action de dizaines de milliers de bénévoles : après avoir été restaurés et réhabilités, un château fort devient un lieu de spectacle vivant, une ancienne blanchisserie industrielle accueille un musée, une maison rurale est transformée en gîte, une chapelle s’ouvre à la visite, etc.

La plupart des associations membres de rEMPArT organisent pour cela des chantiers de bénévoles qui constituent pour les participants – près de 3 500 bénévoles chaque année – un lieu d’apprentissage technique et de découverte du patrimoine, une occasion de rencontre interculturelle et internationale, une opportunité d’exercice de la citoyenneté où se côtoient des personnes d’origine sociale et culturelle très variée.

C’est ainsi, par exemple, qu’à Tusson, un village de Charente, le Club Marpen, membre de rEMPArT, a entrepris depuis les années 1960 des chantiers de bénévoles internationaux. Plusieurs maisons du village acquises par l’association ont été restaurées et sont devenues des gîtes dans lesquels l’association peut accueillir non seulement des bénévoles des chantiers d’été, mais aussi des élèves venus en classes « patrimoine » durant l’année scolaire.

Une expérimentation menée depuis 2011L’Union rEMPArT a choisi de développer, en partenariat avec des missions locales, une action en direction de jeunes franciliens de 18 à 25 ans, déscolarisés, en parcours d’insertion, en recherche de formation ou en cours de formation professionnelle, avec le soutien du ministère de l’éducation nationale. L’association organise un parcours permettant de découvrir le patrimoine et ses métiers en trois étapes successives : des réunions d’information dans les centres d’Ile-de-France ; des journées « découverte du patrimoine » sur un site patrimonial local pour y découvrir des techniques utilisées pour la restauration du patrimoine et donner à chaque bénévole l’occasion d’en pratiquer certaines ; et des chantiers de bénévoles pour la sauvegarde du patrimoine d’une durée de 15 jours en France voire à l’étranger. Ces derniers offrent l’occasion d’approfondir les techniques déjà abordées ou de faire l’apprentissage de nouveaux savoir-faire (taille de pierre, maçonnerie traditionnelle de moellons, pierre sèche, charpente, couverture…). Si 200 bénévoles sont attendus en 2012 dans les réunions d’information, seulement 80 participeront in fine à un chantier de bénévoles. En effet, tous les jeunes entrant dans ce « dispositif » n’auront pas nécessairement l’envie, après une étape de sensibilisation ou de découverte, d’aller jusqu’au bout de la démarche. Les

chantiers se déroulent au cours des vacances de printemps ou d’été sur un site du réseau rEMPArT et sont encadrés par des professionnels de la restauration du patrimoine. Lieux de vie collective, les chantiers permettent le développement de savoir-être et de comportements sociaux utiles aux participants. Le groupe accueilli est composé de jeunes français et de bénévoles venus de l’étranger. Durant ce séjour, des visites de la région et d’autres lieux patrimoniaux sont proposées aux bénévoles pour stimuler leur curiosité et développer leurs connaissances culturelles. À l’issue des chantiers 2011, les participants ont témoigné de leur satisfaction quant au travail communautaire, à l’apprentissage d’un savoir-faire technique, à l’encadrement des animateurs « patients », « passionnés » et « à l’écoute », à la possibilité de se « rendre utile », de rencontrer des personnes du monde entier et de « passer un séjour dans une bonne ambiance ».

Une valorisation des compétencesÀ la fin du chantier, chaque bénévole remplit un livret de compétences, avec l’aide de l’équipe d’animation du chantier composé d’un animateur technique et d’un animateur vie collective. L’auto-évaluation du jeune est complétée par le point de vue de l’équipe d’animation.

Cet outil d’évaluation vise à mettre en valeur les compétences acquises au cours du chantier – techniques et sociales, telles que la capacité à travailler en équipe et à s’investir dans un projet. Ce livret de compétences est encore expérimental et pourra par la suite être généralisé dans l’ensemble du réseau rEMPArT, en remarquant que les compétences valorisées relèvent non seulement du savoir-faire, mais également du savoir-être ou du savoir-devenir.

La charte de rEMPArT stipule que l’association doit agir à part égale en faveur du patrimoine et en faveur des individus. En organisant ces chantiers de bénévoles et en y accueillant un public toujours aussi nombreux et varié, rEMPArT démontre que la restauration du patrimoine, loin d’être uniquement une fin en soi, est un outil d’éducation et de formation des personnes qui y participent. ■

dans le contexte économique actuel, le bénévolat au royaume-Uni peut s’inscrire plus que jamais dans l’évolution d’une carrière, l’acquisition de nouvelles compétences, et dans

le système éducatif. Le Musée du transport de Londres (LTM) reçoit une multitude de candidatures (315 en 2011), attirant des individus qui s’intéressent aux transports et d’autres, curieux de travailler dans l’environnement du musée. Dans les deux cas, le bénévolat leur permet d’améliorer leurs compétences professionnelles, de se forger une expérience et de créer des liens amicaux.

Le LTM compte plus de 130 bénévoles (le nombre peut varier selon la demande) qui secondent le personnel dans l’ensemble du musée pour l’organisation des projets et des événements. Les bénévoles ont de 16 à 90 ans et proviennent de milieux et d’origines divers. En outre, chaque année, le musée accueille environ huit stagiaires, et une vingtaine d’étudiants participent à un programme de formation professionnelle. L’intérêt pour le bénévolat est constant, mais l’enjeu principal est de retenir les bénévoles. C’est pourquoi ils ne sont jamais cantonnés à un seul projet, sont encouragés à s’impliquer dans différentes activités du musée, et se voient confier des rôles qui vont de l’accueil et de la visite guidée à l’inventaire des objets et à la recherche sur les expositions.

Une voix pour les bénévoles Les bénévoles font régulièrement part de leurs impressions sur la conduite des projets du musée, suggérant des améliorations destinées à renforcer l’expérience du visiteur, et s’expriment également sur la mise en œuvre de nouvelles procédures et pratiques. Leur implication et leur développement personnels sont indispensables à l’établissement d’un partenariat fructueux : les bénévoles sont intégrés autant que possible dans le programme public du musée. Cela contribue à entretenir un cadre stimulant, qui représente selon un bénévole « d’excellentes relations de travail avec le personnel », et participe au fait qu’ils se sentent inclus dans le processus de prise de décision.

Les résultats du questionnaire annuel que les bénévoles sont invités à remplir soulignent l’importance d’une communication régulière et performante afin de maintenir un bon moral parmi les bénévoles. Cela

passe notamment par une lettre d’information mensuelle, un soutien individuel, et un relais régulier des projets de bénévoles sur le blog du musée. Une formation en interne est fournie, et dans ce cadre, dix bénévoles ont participé en 2011 à des sessions organisées par la Conservation, le service des publics et les équipes de sécurité et de la citoyenneté pour mettre en place des visites guidées publiques de la collection d’art et des affiches. Ouverte à tous, cette formation offrait la possibilité aux guides expérimentés comme à ceux sans expérience d’améliorer leur connaissance des collections et leurs « capacités d’élocution », selon un guide bénévole, qui s’est réjoui du soutien constant du LTM dans son « évolution en tant que guide ». Les bénévoles sont également encouragés à participer à des formations financées par renaissance London (un programme de soutien destiné à la communauté muséale de Londres); elles abordent des sujets pouvant aller des premiers secours à la façon de gérer les visiteurs difficiles, et permettent d’acquérir de nouvelles compétences qui contribuent au développement de l’individu comme à celui du musée.

Le musée hors les mursDernièrement, le musée a reçu des financements pour plusieurs projets en partenariat, lui permettant de poursuivre son engagement pour la diversité et l’égalité en relation étroite avec la communauté. Depuis 2009, il a été impliqué dans de nombreux projets de bénévolat à l’intention des jeunes pour « Histoires du monde », s’inscrivant dans le programme de l’Olympiade culturelle liée au JO de Londres 2012. Ce projet se distingue notamment par le « Journeys Youth Project », destinés à des jeunes âgés de 16 à 19 ans, assistés dans l’élaboration d’activités familiales qu’ils présentent ensuite durant les vacances scolaires. Celles-ci comprennent par exemple des récits sur les années de guerre à Londres racontés aux enfants ou une course de bus londoniens miniatures fabriqués sur place. Vicki Pipe, responsable pédagogique jeune public, décrit ce projet comme l’occasion pour les participants d’« acquérir des compétences relationnelles et professionnelles essentielles, telles que la capacité de parler en public, le travail en équipe, l’aptitude pour la recherche et la communication, avec une attention particulière portée à la créativité ».

Le LTM a déployé d’importants efforts pour mettre en valeur les bénévoles au sein du musée. Il y est parvenu notamment avec le rapport mensuel sur l’implication des bénévoles présenté au Conseil d’administration, grâce à la cérémonie annuelle de remerciements, ou encore au travers des nominations pour le prix des Bénévoles de musées, décerné par renaissance London. Depuis 2009, 43 bénévoles ont été sélectionnés pour leurs contributions, ce qui a permis au LTM de leur manifester sa gratitude pour leur soutien constant. À l’avenir, le défi réside dans la continuité et l’essor des projets favorisant l’intégration des bénévoles et leur développement, en s’assurant toujours que leurs intérêts demeurent au centre des priorités. ■

Mission patrimoine Un engagement de longue durée

par Olivier Lenoir, Délégué national de l’Union REMPART

par Sam Clift, Coordinateur du bénévolat, Musée du transport de Londres

sur un chantier de bénévoles d’Union rempart

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16 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012 N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 17

PatrimoinE En dangEr LE PATrIMOINE CULTUrEL AU CœUr DES CONFLITS

La Libye, un an après le début du conflit

Force est de constater que le patrimoine culturel de différentes régions du monde a été particulièrement mis à

l’épreuve en 2011. En conséquence directe de catastrophes naturelles et de conflits armés, les biens culturels mobiliers et immobiliers de nombreux pays ont en effet été rudoyés. La situation n’est guère plus rassurante pour 2012, alors que certains conflits perdurent depuis des mois voire se durcissent, que de nouveaux éclatent, et que de nouvelles catastrophes naturelles voient le jour.

Alors que le monde entier a le regard fixé sur la Syrie, et sur les conséquences dramatiques de l’intensification de son conflit pour les populations, se pose la délicate question du devenir du riche et diversifié

patrimoine culturel syrien. Différentes sources font déjà état de possibles pillages, difficiles à vérifier, dans des musées et sites du pays.

Cette situation n’est malheureusement pas sans rappeler le cas de la Libye qui, après un long conflit, tente de panser les plaies des événements qui constituent un moment charnière de son histoire récente. L’heure est en effet à la délicate reconstruction dans ce pays.

rappelons que la révolution libyenne a commencé le 15 février 2011 dans le contexte de ce qui restera comme le « printemps arabe ». La situation s’étant rapidement envenimée, prenant la forme d’un véritable conflit armé, les manifestations ont cédé la place à des affrontements durant plusieurs mois. Le conflit menant à la chute du régime

libyen en octobre 2011 a mis en évidence la fragilité de son patrimoine, riche de 4 000 ans d’histoire. Carrefour historique des cultures et des influences entre les mondes arabo-musulman, africain et européen, la Libye compte notamment cinq sites officiellement inscrits au Patrimoine mondial de l’UNESCO, incluant un site d’art rupestre datant de 12 000 ans av. J.-C. Le pays abrite aussi bien des vestiges puniques et romains à l’Ouest, des sites grecs et égyptiens à l’Est, que des sites berbères dans le Sud. Outre ces nombreux sites historiques et les musées du territoire libyen, le pays a d’importants sites préhistoriques de même que des sites archéologiques subaquatiques le long des côtes méditerranéennes.

première a eu lieu du 28 au 30 septembre 2011, à Tripoli, Leptis Magna et Sabratha ; la seconde du 12 au 16 novembre 2011, dans le Nord-Est Libyen, en Cyrénaïque. Ces missions, les premières du genre à se rendre sur place, ont été essentielles pour permettre d’établir un premier constat de la situation du patrimoine situé dans ces régions.

En outre, une étroite coopération entre des experts du réseau du Bouclier Bleu américain, en partenariat avec l’ICOM, a également permis de dresser et transmettre à temps à l’OTAN une liste des coordonnées

géograph iques des p r inc ipau x s i tes e t musées à épargner lo rs des p remiè res frappes aériennes. Bien que la communauté internationale ait ensuite poussé un p remie r soupir de soulagement en constatant que les d o m m a g e s é t a i e n t

mineurs, ces évaluations ont corroboré le constat sur l’importance d’une assistance internationale auprès de la Libye en matière de patrimoine culturel, notamment pour aider le pays à réfréner le trafic illicite, en faisant l’inventaire de ses biens culturels et en tentant de récupérer les objets pillés. Pleinement engagé dans la lutte contre ce trafic depuis de nombreuses années, l’ICOM a été sollicité, à cet effet, pour mener à bien un projet de Liste

Il était alors aisé de deviner que ces événements auraient une incidence considérable sur le patrimoine culturel libyen. En cas de conflit armé, les institutions culturelles, sites et monuments se retrouvent toujours en situation de vulnérabilité. Ainsi le patrimoine culturel libyen a-t-il été largement menacé par les bombardements aériens et les combats au sol, de nombreux sites patrimoniaux se trouvant au centre de zones de conflits intenses. Par ailleurs, toute situation d’instabilité poli t ique et /ou économique augmente les risques de vol d’objets d’ar t et donc de trafic ill icite de biens culturels. Les biens culturels libyens son t a ins i sous la menace de pillages et d’exportations illégales. Certains dommages ont en effet été constatés, ainsi que des situations d’insécurité pour les biens culturels. Le vol du trésor de Benghazi en est le cas le plus illustre [voir encadré] : plus de 7000 pièces de monnaie datant de l’Antiquité grecque (VIIe siècle avant J.-C.), ainsi que des statuettes et des joyaux constituent ce trésor colossal qui a été pillé. À Cyrène, des dommages matériels du site archéologique ont été déclarés ; à Darnah le musée aurait été vandalisé, et le palais de King Idris endommagé par son occupation illégale ; à Apollonia, on déplore une intrusion dans le musée et le vol de vases notamment. Enfin, à Umm al Shuga, l’ancien site romain aurait subi des pillages. Outre ces principaux cas, le Musée de Tripoli s’est trouvé dans une situation particulière : le musée, qui est resté dix jours sans surveillance lors des événements, a été pillé, mais des sources locales ont rapporté que les biens avaient été ramenés à la chute du régime. Cela illustre bien comment l’art et le patrimoine culturel peuvent également devenir un enjeu lors de conflits, et démontre l’importance que revêt ce patrimoine pour les pays et leurs populations.

Le pays, un des plus vastes du continent Africain, garde donc des traces tangibles et mémorielles des événements qui se sont achevés en octobre dernier. Deux premières missions d’évaluation du Bouclier Bleu ont cependant permis de constater, avec un certain étonnement et un grand soulagement, que le patrimoine culturel libyen, malgré l’ampleur du conflit, avait été relativement épargné. Elles ont été menées sous l’égide du Bouclier Bleu et de l’IMCurWG (International Military Cultural Resources Work Group) afin de récolter des informations initiales sur la situation des biens culturels du pays. La

Le coffre-fort abritant le trésor de Benghazi a été cambriolé en Libye : le 2 juin 2011, alors que le pays était en plein conflit, il a été porté disparu. Une alerte a été lancée par INTERPOL en septembre. Le principal problème dans le recouvrement de ce trésor est que la multiplicité des objets et l’absence de photographie rend leur identification extrêmement difficile, d’autant plus que la taille réduite des pièces facilite leur dissimulation et leur dispersion.

Le trésor de Benghazi est le nom attribué à l’une des plus importantes collections d’antiquités qui a été trouvée lors de fouilles réalisées à partir des années 1920 sur le site de Cyrène, colonie grecque fondée au VIIe siècle av. J.-C., figurant parmi les cinq sites libyens inscrits sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO. L’archéologue Serenella Ensoli, qui dirige la mission italienne de fouilles archéologiques à Cyrène depuis 1980, estime qu’il est « difficile d’évaluer la valeur du trésor »

compte tenu de la quantité et de l’unicité de ces objets.

Ce trésor comprend : des pièces de monnaies antiques (364 en or, 2 433 en argent et 4 484 en bronze) 306 joyaux et 43 autres objets incluant des figurines et sculptures, tous étant des objets datant de l’Antiquité grecque. En 1942, dans le contexte de la seconde Guerre Mondiale, le trésor fut emporté en Italie et ne fut rapatrié en Libye qu’en 1961, placé dans un coffre-fort dans la Banque nationale de commerce de Benghazi. Un inventaire fut établi à cette époque, mais sans photographies.

Le trésor de Benghazi en question

Par France Desmarais

Souvent pris pour cibles, véritables otages des

conflits, les biens culturels méritent toute notre

attention quand il est question de situations

d’urgence

Le site archéologique de Cyrène, cité grecque inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité de l’UnesCO, où des dommages matériels ont été déclarés à la suite de la révolution libyenne en 2011

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Le trou foré dans le sol par les pillards pour atteindre le coffre-fort

Rouge d’urgence des biens culturels libyens en péril afin de les protéger d’éventuels vols, ventes et exportations illégales. Par ailleurs, une stratégie de soutien aux autorités libyennes, fondée sur la sécurisation des sites et sur le renforcement des cadres nationaux du point de vue légal et institutionnel dans la protection et la gestion du patrimoine, a été esquissée.

En cette année charnière, post-conflit, si la reconstruction et la pacification du pays demeure la priorité, la préservation du patrimoine culturel libyen présente une double finalité, visant à la fois le patrimoine même et la restructuration et la stabilisation d’un pays affecté, notamment par le biais de l’accompagnement du développement de la politique culturelle et patrimoniale du pays. Sans compter que la préservation du patrimoine influe également sur la richesse culturelle du pays, laquelle engendre, entre autres, une plus grande ouverture sur le monde et une reprise de l’activité touristique qui pourraient soutenir le développement économique du pays.

Souvent pris pour cibles, véritables otages des conflits, les biens culturels méritent toute notre attention quand il est question de situations d’urgence. Au nombre des dommages collatéraux résultant de crises diverses, nous pouvons déplorer que le patrimoine culturel soit souvent la part négligée de l’aide d’urgence, alors que son apport à l’avenir et la reconstruction d’un pays n’est quant à lui jamais négligeable. ■

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18 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

rEncontrEs muséaLEs intErnationaLEs dE L’icom

Les rencontres muséales internationales de l’ICOM se déroulent à la Maison de l’Unesco à Paris au mois de juin deux années sur trois,

en alternance avec la Conférence générale. En juin 2011, cet événement avait été l’occasion pour les participants de réfléchir sur trois thématiques au cœur des activités de l’organisation :- Musées, environnement et développement durable : comment faire de l’ICOM et des musées des acteurs au service du développement de la société ?

- recherche, formation, publications : valoriser l’ICOM en tant que plateforme de recherche muséale internationale.

- L’éthique des musées, nouvelles perspectives : développer la déontologie au-delà du Code de déontologie de l’ICOM ?

Des groupes de travail avaient été constitués pour l’examen de ces questionnements, et les sessions de travail avaient été suivies d’une restitution qui a alimenté la ligne de travail de l’organisation.

En 2012, cette réflexion thématique sera prolongée suivant trois nouvelles pistes de travail proposées aux participants.

La gestion des musées dans un contexte de changementsLes enjeux auxquels sont confrontés les musées depuis quelques années ont beaucoup évolué, conduisant souvent les gestionnaires de musées à se poser des questions inédites, et à trouver de nouveaux axes d’actions et de développement. Ils sont par exemple amenés à rechercher de nouvelles perspectives de financements, dans un contexte largement répandu de resserrement des subventions publiques et des aides privées. L’assistance aux musées dans les situations de conflits ou de catastrophes naturelles, particulièrement nombreuses en 2011, a également été l’une des grandes actions de l’ICOM, soulignant la nécessité d’une préparation des institutions muséales.

Ainsi, face aux nouvelles problématiques auxquelles les gestionnaires doivent trouver des solutions, il s’agit pour l’ICOM de sensibiliser la communauté muséale et au-delà, de mobiliser le réseau à tous les niveaux, et d’accompagner les musées pour faire face aux transformations. De quelle manière procéder ? Quels outils ou services

Les rencontres muséales internationales de l’ICOMPrendre le temps de la réflexion

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pourraient être mis à disposition des gestionnaires de musées dans ce contexte ? La Journée internationale des musées en 2012, autour du thème « Les musées dans un monde en mouvement. Nouveaux défis, nouvelles inspirations », est un premier pas vers la fédération de la communauté muséale autour de cette question ; le groupe de travail sera invité à aller plus loin et à proposer de nouvelles perspectives.

Trafic illicite, une approche globale pour un problème internationalLe trafic illicite des biens culturels occupe une place de plus en plus importante au rang des principales activités criminelles mondiales. C’est pourquoi la lutte contre le trafic illicite des biens culturels est l’un des programmes prioritaires de l’ICOM, qui a mis en place des actions concrètes, outils pratiques et partenariats performants pour combattre ce trafic ; le principal étant la publication des Listes rouges.

Cependant, les musées, parfois les premières victimes de ce fléau, doivent aussi être les principaux acteurs de la lutte contre ce trafic et participer à l’approche globale prônée comme solution au problème. Comment l’ICOM peut-il les y aider ? Quelle est l’approche développée par l’ICOM pour une lutte efficace contre le trafic illicite des biens culturels et pour une meilleure sensibilisation au niveau international ? Un certain nombre de formations, d’ateliers et de publications sont déjà disponibles : comment les promouvoir et renforcer la communication autour des outils existants ? Si l’ICOM travaille déjà avec de nombreux experts sur ces sujets, il est également important de pouvoir engager le réseau et réfléchir à la manière d’intensifier les actions de sensibilisation.

Musées et excellenceL’excellence est comme la ligne d’horizon vers laquelle on se dirige mais que l’on n’atteint jamais. Derrière le terme « excellence » se cachent les notions de qualité, de spécialité, d’exactitude, mais aussi d’ambition et de progrès. Associer les deux termes, musées et excellence, revient à considérer que les institutions muséales recherchent constamment à se perfectionner, à offrir un niveau de qualité élevé pour l’ensemble de leurs missions, et à être des centres d’expertise reconnus.

Face à cette visée, qui peut être vue comme constitutive de l’idée même de musée, l’ICOM a nécessairement un rôle à jouer. En effet, le Code de déontologie de l’ICOM pour les musées fixe les normes minimales de pratiques et de performances professionnelles pour les musées et leur personnel. D’autres standards, outils et garanties d’excellence peuvent être renforcés, développés et conçus pour que l’ICOM apporte à la communauté muséale mondiale une contribution et une confirmation dans l’atteinte et la réalisation d’objectifs, et s’engage pour l’excellence à leurs côtés. Il s’agira donc pour les participants de réfléchir à la définition de l’excellence appliquée au domaine des musées, et à des opportunités de déclinaisons opérationnelles de cette définition. ■

Les rencontres muséales internationales de l’ICOM en 2012 coïncideront avec de nombreuses expositions dans les musées parisiens, dont certaines toucheront à leur fin :

Centre National d’Art et de Culture Georges Pompidou : Matisse, paires et séries, jusqu’au 18 juin 2012

Cité de la Musique : Bob Dylan, l’explosion rock, jusqu’au 15 juillet 2012

Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration : J’ai deux amours, jusqu’au 24 juin 2012

Cité des Sciences et de l’Industrie : Gaulois, une expo renversante, jusqu’au 2 septembre 2012

Jeu de Paume : Eva Besnyö, 1910-2003. L’image sensible, jusqu’au 23 septembre 2012

Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris : Resisting the Present : Mexico/2000-2012, jusqu’au 8 juillet 2012

Musée des Arts Décoratifs : Les histoires de Babar, jusqu’au 2 septembre 2012

Musée du Louvre : La Sainte Anne, l’ultime chef-d’œuvre de Léonard de Vinci, jusqu’au 25 juin 2012

Musée National de la Marine : Phares, jusqu’au 4 novembre 2012

Musée d’Orsay : Degas et le nu, jusqu’au 1er juillet 2012

Musée du Quai Branly : Les maîtres du désordre, jusqu’au 29 juillet 2012

Petit Palais : José María Sert, le Titan à l’œuvre (1874-1945), jusqu’au 8 juillet 2012

L’exposition phareMonumenta 2012/ Daniel Buren, 10 mai-21 juin 2012 au Grand PalaisChaque année depuis 2007, le Grand Palais organise l’exposition Monumenta, qui invite un artiste contemporain de renommée internatio-nale à investir les 13 500m2 de la nef du Grand Palais avec une œuvre magistrale conçue pour l’occasion. Après Anselm Kiefer, Richard Serra, Christian Boltanski et Anish Kapoor, ce sera au tour de Daniel Buren de relever le défi pour cette 5e édition de l’évènement.

Les rencontres muséales internationales de l’ICOM se tiendront du 4 au 6 juin 2012 à la Maison de l’UNESCO, à Paris.

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Les participants à l’évènement en juin 2009

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20 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

communauté dE L’icom

L ’adoption d’un Code de déontologie professionnel par l’ICOM, en 1986, a marqué une étape clé dans la

reconnaissance d’un besoin d’autorégulation de l’action des professionnels de musée. Cette recherche de préceptes déontologiques pour guider l’exercice de la profession émerge de l’éthique des acquisitions adoptée en 1970 par l’ICOM, dans le sillage de la Convention UNESCO de 1970 concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels.

La longue et complexe révision du Code de déontologie de l’ICOM pour les musées, initiée dès 1998 et achevée en 2004, a permis de développer des sujets présents au cœur de l’actualité (trafic illicite, restitution, restes humains, etc.) et de les inscrire dans la pratique des professionnels. Le Code est ainsi devenu un outil consultable au quotidien tout en demeurant une référence ultime. Il a pour vocation de gouverner la conduite professionnelle et de tracer le périmètre des interventions et des activités développées par les responsables et les spécialistes en charge des musées et du patrimoine. Ceux-ci sont les garants et les gardiens du Code de déontologie de l’ICOM.

Des principes aux pratiquesSi par essence la déontologie demeure un corpus de référence pour une communauté

professionnelle, les principes du Code de déontologie de l’ICOM peuvent également inspirer les institutions ou les autorités de tutelle en charge des musées, qui ont la faculté de renforcer l’effectivité du Code et de l’inscrire plus fortement dans la réalité quotidienne des musées.

C’est ce défi qu’a relevé la Ville de Genève en 2009, sous l’impulsion de son Conseiller administratif en charge de la culture, et que poursuit aujourd’hui son successeur. Les auteurs de cet article ont ainsi été

chargés de mettre en place un Comité de déontologie des musées de la Ville de Genève, composé de personnalités suisses et internationales. Aux côtés du magistrat municipal chargé de la culture à la Ville de Genève, ce comité réunit des personnalités dans différents domaines d’expertise, qu’il s’agisse de conservateurs ou directeurs de musées genevois et suisses, de représentants du comité national suisse de l’ICOM, d’experts en droit suisse et en droit international, ou de personnalités ayant occupé des fonctions au sein d’organisations internationales dans le domaine de la culture et des musées.

Un outil d’évaluationLe but de ce comité est d’étudier et d’évaluer les modes d’acquisitions passés et présents et de proposer, si nécessaire, d’éventuelles restitutions ou coopérations. L’enjeu est d’initier une politique de transparence sur les conditions de conservation et de constitution des collections des musées genevois, car ce qui apparaissait hier comme acceptable peut maintenant être analysé comme une appropriation par un musée prédateur. Il ne s’agit ni de diaboliser, ni de faire preuve d’angélisme, mais de s’assurer que les musées de Genève inscrivent leur politique d’acquisition dans l’esprit des conventions et des normes internationales qui protègent le patrimoine. En ce sens, il n’appartient pas à ce comité de se

substituer aux organes juridictionnels qui pourraient statuer sur la légalité de processus d’acquisition ; il lui revient de poser la question de la légitimité des modes de constitution de certaines collections et de les évaluer à l’aune des préceptes du Code de déontologie de l’ICOM.

Ce comité apporte une expertise aux conservateurs genevois et à leur autorité de tutelle. Face à des situations parfois complexes, il leur permet de solliciter les conseils des personnalités investies dans le domaine du patrimoine et des musées, et de prendre des décisions éclairées par les avis ou les recommandations recueillis. Les travaux entrepris dans le cadre du Comité de déontologie convergent vers un même objectif : poser les conditions et le cadre de référence pour une conservation durable des collections, et guider les politiques d’acquisition conformément à cet objectif. L’expérience de ce comité municipal montre que les générations de conservateurs qui se sont succédées ont agi avec cohérence et lucidité et que les scories de l’histoire muséale peuvent être corrigées sans drame.

Le Comité de déontologie des musées de la Ville de Genève n’a que deux années d’existence mais les résultats obtenus – la clarification du statut de collections en dépôt, le renforcement du partenariat avec les responsables de l’archéologie de terrain pour la gestion et l’étude des collections archéologiques, l’officialisation de la restitution d’une tête maori – ainsi que les changements de mentalité qu’il a induits, nous permettent de penser que sa création était nécessaire et que les évolutions en cours enrichiront le document de référence sur la politique d’acquisition que la Vil le de Genève souhaite adopter prochainement pour l’ensemble de ses musées. Les travaux d’un tel comité doivent s’inscrire dans la durée afin de constituer progressivement un corpus de référence en regard de l’histoire et de la constitution des collections des musées. Nous ne pouvons que souhaiter la multiplication à l’échelle territoriale de tels comités. Il y va de la légitimité et de l’avenir des musées. ■

Un comité de déontologie de proximité

En février 2012, l’ICOM a officiellement lancé la Liste rouge d’urgence des biens culturels égyptiens en péril, onzième publication de sa série des Listes rouges et troisième Liste rouge d’urgence. Celle-ci est le fruit des efforts de l’ICOM pour protéger le patrimoine culturel égyptien, à la suite des vols des objets non inventoriés des sites archéologiques et des musées qui se sont produits dans le sillage des événements de 2011. Elle a été rédigée en collaboration étroite avec les membres du Comité international de l’ICOM pour l’égyptologie (le CIPEG) et des experts nationaux et internationaux en art et antiquités, ainsi qu’avec le ministère des Antiquités d’égypte ; elle a été rendue possible grâce au soutien généreux du Bureau des affaires éducatives et culturelles du département d’état des états-Unis.Le lancement de cette nouvelle liste a eu lieu le 6 février 2012 au musée national de la Civilisation égyptienne (NMEC), au Caire. À cette occasion, le Directeur général de l’ICOM, Julien Anfruns, a présenté officiellement la Liste d’urgence en présence du directeur du NMEC, Mohammad Abdel Fatah, de plusieurs membres du gou-

Création du Comité national qatari

L’ouverture du musée de l’Art islamique en 2006 illustre l’impressionnante croissance qu’affiche le Qatar dans le secteur culturel depuis quelques années. Plus récemment, le 21 octobre 2011, af in de renforcer le rôle des musées dans le développement du pays, un Comité national de l’ICOM a été élu à Doha : il a pour but de stimuler et promouvoir les act iv i tés m u s é a l e s d u Q a t a r aux niveaux régional, national et international. Ce comité est présidé par M. Abdullah Ennajar, Directeur général de l’Autorité des musées du Q a t a r. U n e d é l é g a t i o n qatari a été accueillie il y a peu au siège de l’ICOM à Paris par le Directeur général Julien Anfruns, pour que soient a b o rd é s l ’e s s o r e t l e s possibilités de recherche du comité et envisager le soutien nécessaire à ce processus.

Journée d’étude sur la déontologie pour ICOM France

ICOM France et le Service des musées de France ont organisé leur première Journée d’étude sur la déontologie le 21 mars 2012, autour du thème Déontologie du patrimoine et des musées : historique et questionnement, à l’Institut National d’histoire de l’Art , Paris. Cette volonté d’examiner la déontologie des musées français ainsi que, plus largement, celle des professionnels du patrimoine et du marché de l’art, s’opère à l’heure où sont créés plusieurs codes de déontologie professionnels pour les conservateurs du patrimoine, les restaurateurs, les médiateurs, etc. , et où des changements profonds interviennent dans la gestion patrimoniale, au regard, par exemple, de l’externalisation des services, des partenariats ou encore du règlement des litiges. Des intervenants du ministère français de la Culture, des juristes, des professionnels indépendants et des acteurs du marché de l’art se

sont réunis pour explorer les enjeux et les limites de ces codes de déontologie et pour débattre de la portée de tels textes.

Réunion annuelle d’AVICOMEn collaboration avec ICOM Canada et la Société des directeurs des musées mont- réalais, AVICOM tiendra à Montréal du 9 au 12 octobre 2012 sa réunion générale et son colloque annuels, de même que la présentation des prix du FIAMP (Festival international de l’audiovisuel et du multimédia sur le patrimoine). Sous le titre Nouvelles technologies, nouvelle muséologie ?, l’événement se propose d’analyser l’influence des technologies sur les programmes de médiation des musées. Les musées et leurs partenaires sont invités à soumettre leurs contributions pour les prix du FIAMP avant le 30 avril en remplissant le formulaire d’inscription disponible sur le site d’AVICOM (http://avicom.icom.museum).

La Journée internationale des muséesCette année, pour célébrer les 35 ans de la JIM, l’ICOM organise un concours photographique intitulé Me in My Museum. Les amoureux des musées sont invités à participer en prenant une photo d’eux-mêmes, seuls ou avec leurs amis, dans leur musée préféré, en arborant le logo officiel créé pour l’occasion. Les participants doivent envoyer leurs photos avant le 22 avril 2012. Les gagnants recevront un « panier surprise » composé d’objets provenant des boutiques des musées du monde entier. La Journée internationale des musées 2012 se tiendra le 18 mai sur le thème Les musées dans un monde en mouvement. Nouveaux défis, Nouvelles inspirations.

vernement égyptien et d’institutions locales du patrimoine, mais aussi d’experts nationaux et in te rnat ionaux , de représentants de la police et des douanes e t d e p l u s i e u r s partenaires du projet, sans oublier les médias. Cet événement a été suiv i, le 7 févr ier, d’un séminaire de sensibilisation et de renforcement des ca- pacités concernant les Listes rouges et leur application à travers le monde dans la lutte contre le trafic illicite des objets culturels, qui a eu lieu au NMEC.La Liste rouge d’urgence des biens culturels égyptiens en péril a été imprimée en 10 000 exemplaires et en quatre langues : anglais (3 000), arabe (3 000), français (2 000) et allemand (2 000). Elle est distribuée dans le monde entier aux fonctionnaires de la police et des douanes, aux professionnels du

patrimoine et du marché de l’art ainsi qu’aux autres parties concernées. Elle peut également être téléchargée gratuitement sur la base de données en ligne des Listes rouges de l’ICOM. La publication de cette nouvelle Liste rouge d’urgence réaffirme l’engagement de longue date de l’ICOM vis-à-vis de la lutte contre le trafic illicite du patrimoine culturel, en particulier au lendemain de crises graves.

La Ville de Genève fait un pas de plus en matière de déontologie

Vincent Négri, Dr., expert en droit comparé et droit international du patrimoine et des muséesJean-Yves Marin, Directeur du Musée d’Art et d’Histoire de la Ville de Genève, Suisse

Comme les autres institutions muséales de la ville de Genève, le Musée d’Art et d’histoire participe aux travaux du Comité de déontologie.

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Le directeur général de l’iCOM, Julien Anfruns, présente la Liste rouge d’urgence des biens culturels égyptiens en péril au Caire, le 6 février 2012

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N°1 2012 | LES NOUVELLES DE L’ICOM 21

une Liste rouge pour l’égypte

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PuBLications

22 LES NOUVELLES DE L’ICOM | N°1 2012

Critique de Nicholas Crofts, professeur associé, Museum of Texas Tech University, Président du CIDOC, Comité international de l’ICOM pour la documentation

de l’Ouest, mais l’ouvrage ne cherche pas à aborder les problèmes liés à la gestion des collections dans d’autres parties du monde. Les listes détaillées concernant la législation, les codes et les institutions juridiques britanniques, par exemple, seront d’un intérêt limité pour les lecteurs d’autres pays, et plusieurs aspects essentiels de la législation aux états-Unis, comme la loi sur la protection et le rapatriement des tombes des Amérindiens (NAGPrA), n’apparaissent nulle part, pas plus que certaines res-sources précieuses, comme l’excellent Museum Handbook du Service des parcs nationaux américains.

Contrairement à d’autres ouvrages précédents traitant du même sujet, tels que Museum Collections Management (dir. publ. Anne Fahy, routledge, 1995) ou Comment gérer un musée : manuel pratique (dir. publ. Patrick J. Boylan, 2004, ICOM/UNESCO), qui sont tous les deux des ouvrages collectifs, le livre de Matassa comporte l’avantage considérable d’offrir une unité de voix et de style. Les informations sont organisées et présentées de façon logique et méthodique du début à la fin. L’approche de Matassa est pragmatique et directe, sans nécessairement, toutefois, inviter à la réflexion ; elle est davantage institution-nelle qu’internationale, par contraste avec la publication de l’ICOM/UNESCO qui adopte une perspective internationale, avec des contributions représentant une large variété d’approches différentes. Même si l’auteur fait parfois peu de cas de certains aspects particulièrement subtils et problématiques du sujet, associant, par exemple, le deaccession-ing (la libre disposition des œuvres d’art) et le disposal (les actes de cession) et ne consacrant que cinq lignes à la question épineuse du choix d’un système de base de données, Museum Collections Management apporte néanmoins des réponses directes et des conseils simples sous un format pratique que beaucoup apprécieront.

Museum Collections Management, A handbook par Freda Matassaéditeur : Facet Publishing (royaume-Uni)

aru en 2011, Museum Collections Management est un ouvrage à la fois théorique

et pratique. Il est divisé en deux sections : la première donne une vue d’ensemble des grands principes, des aspects éthiques et légaux du sujet ainsi que des aspects pratiques qui ont trait à l’entretien des collections, à la gestion du risque et à la sécurité ; la deuxième étudie sept méthodes de gestion des collections et aborde la documentation, les déplacements, le stockage, les acquisitions, les prêts, les expositions et l’accessibilité. Cette approche et cette philosophie sont similaires à celles utilisées par le Collections Trust au royaume-Uni (une organisation qui travaille avec les musées britanniques afin d’améliorer la gestion de leurs collections), qui fournit des éléments comparables à travers le réseau Collections Link et la norme dite SPECTrUM, une norme de gestion des collections appliquée dans plus de 7 000 musées à travers le monde.

Le lecteur ne doit pas se fier à la quatrième de couverture, qui présente ce livre comme « adapté à tous les types de collections » et comportant « tout ce qu’un responsable de collection se doit de savoir ». Les conseils donnés, quoique fort utiles, sont clairement destinés à des collections de beaux-arts et mettent l’accent principalement sur la pratique britannique. Les déclarations et les traités de l’UNESCO sont cités, et de brèves comparaisons sont établies avec les états-Unis et certains pays d’Europe

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Des solutions pour la gestion des collections

icom-cEca (comité international pour l’éducation et l’action culturelle)

ICOM Education 22, CECA Membership Survey / Emma Nardi (dir. publ.), Rome, Edizioni Nuova Cultura, 2011, 113 p. ISBN 978886-1347-236.(questionnaire en anglais, français et espagnol)

Le Comité international de l’ICOM pour l’éducation et l’action culturelle est le deuxième comité le plus important de l’organisation : ses membres sont répartis dans 50 pays avec par-

mi eux certains des plus grands experts en éducation muséale. Le dernier numéro d’ICOM Education se penche sur les résultats d’une enquête menée en 2009 par les membres du conseil d’administration du CECA, en collabora-tion avec l’entreprise néerlandaise Cultuurnetwerk, dans le but de rassembler plus d’informations sur les membres du comité et sur leurs institutions respec-tives. Ces données ont été comparées à celles qui sont recueillies tous les deux ans par Cultuurnetwerk sur les musées néerlandais, pour le compte du ministère de la Culture. Cette publication décrit et analyse les résultats selon une perspective comparative ; elle présente les projets spéciaux mis en place par le conseil d’administration afin de répondre aux attentes des membres du CECA ; et elle inclut le questionnaire adressé aux professionnels des musées qui a servi de base à l’enquête.Plus d’informations sur le site Internet du CECA : http://ceca.icom.museum

icom BrésilWaldisa Rússio Camargo Guarnieri : textos e contextos de uma trajetória profissional / Maria Cristina Oliveira Bruno (coord.) ; Marcelo Mattos Araujo e Maria Inês Lopes Coutinho (collab.). São Paulo : Pinacoteca do Estado de São Paulo, Comitê Brasileiro do Conselho Inter-nacional de Museus, 2010, 2 volumes : 311, 185 p. ISBN 978-85-99117-59-0. (en portugais)

Waldisa rússio Camargo Guarnieri (1935-1990) fut une personnalité majeure de la muséologie non seulement au Brésil, mais aussi d’un point de vue général, pour l’élaboration d’une réflexion sur la muséologie contemporaine. Elle a coordonné plusieurs projets de musées au Brésil à la fin des années 60 et durant les années 70 et fut aussi à l’origine, en 1978, du premier cours de muséologie à l’école de sociologie et de politique de São Paulo. Le premier volume de cette publication présente une sélection de textes rédigés par Waldisa rússio, peu diffusés jusqu’à aujourd’hui. Les contributions du deuxième volume constituent autant de témoignages sur l’importance et l’influence de son travail pour la réflexion muséologique contemporaine.Pour commander : ICOM-BrasilEmail : [email protected]

icom Belgique-Wallonie-BruxellesLa Vie des musées n° 23 : « Les restes humains » / Madeleine Brilot (coord.), Bruxelles, 2011, 95 p. ISSN 0775-1532. (en français)

Le comité ICOM-Belgique-Wallonie-Bruxelles consacre le numéro de l’année 2011 de la revue La Vie des musées à la question des restes humains dans les musées. De récentes affaires ont donné lieu ces dernières années à des controverses et ont fait ressurgir cette thématique, suscitant l’organisation de colloques pour en étudier

et en éclairer les enjeux. Les musées doivent examiner cette question qui sous-tend plusieurs problématiques (l’exposition des restes humains, la restitution des restes humains aux populations autochtones qui en font la demande, la conservation) et qui, en raison de la diversité des restes humains conservés dans les musées, ne concerne pas uniquement les musées ethnographiques, mais également les musées archéologiques (ossements, momies), voire les musées d’art contemporain (exemple de l’exposition des plastinats de Gunther von Hagens). Ce numéro étudie la question sous ces différents aspects et présente dans la dernière partie des cas spécifiques. Pour commander : AFMB - ICOM Belgique-Wallonie-Bruxelleshttp://www.afmb.museum

Possibilité de devenir membre de l’ICOM

ou de renouveler votre adhésion sur place

Des cadeaux spécialement offerts dans

le kit de bienvenue

Le calendrier des activités de l’ICOM

aux États-Unis et au Canada

en 2012

Davantage d’informations sur la Conférence générale

de l’ICOM de 2013 à Rio de Janeiro

Venez rencontrer l’ICOM ainsi que vos contacts américains

à MuseumExpo, stand #218, à l’occasion des rencontres annuelles de l’Association américaine des musées à Minneapolis-Saint Paul, États-Unis

du 29 avril au 2 mai 2012

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Barocci, Federico, L’Institution de l’Eucharistie (1603), The Fitzwilliam Museum, Cambridge, Royaume Uni, Survitrage réalisé avec Optium Museum Acrylic.

Photographié par Mr Michael F. Jones, Fitzwilliam Museum.

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