capacité antioxydant e chez les hélicidés variations ... · défense antioxydante (salmon et al....
TRANSCRIPT
Capacité antioxydant
variations intraspécifiques
Maîtres de stage
Camille LETELLIER
Master 2 EFCE
antioxydante chez les hélicidés
intraspécifiques et interspécifiques
Maîtres de stage : Jacqueline Russo et Luc Madec
UMR 6553, équipe S.C.A.
Camille LETELLIER
Master 2 EFCE
e chez les hélicidés :
interspécifiques.
1
Sommaire :
Remerciements…………………………………………………………………………………2
Introduction…………………………………………………………………………………….3
Matériel et méthodes…………………………………………………………………………...6
Matériel biologique…………………………………………………………………….6
Traitements……………………………………………………………………………..6
Prélèvement de l’hémolymphe…………………………………………………………7
Prélèvement de la glande digestive…………………………………………………….8
Mesure de la capacité antioxydante………………………………………………...…8
Analyses statistiques…………………………………………………………………...9
Résultats………………………………………………………………………………………10
Effets du traitement…………………………………………………………………..10
Comparaison intraspécifique………………………………………………………….11
Hémolymphe……………………………………………………………….…11
Glande digestive……………………………………………………………....13
Comparaison interspécifique………………………………………………………….14
Hémolymphe………………………………………………………………….14
Glande digestive………………………………………………………………15
Discussion……………………………………………………………………………………16
Bibliographie…………………………………………………………………………………23
2
Remerciements
Pour ses corrections, ses conseils, son soutien, son sourire et son savoir faire, je tiens à
remercier Jacqueline Russo, sans qui le sens du mot semi-statique me serait encore inconnu !
Pour ses statistiques, ses conseils, ses corrections et bien sûr ses approvisionnements en
escargots, merci à Luc Madec, qui sait donner un sens aux tests de Tukey ! Il est difficile
d’imaginer un cocktail de maîtres de stages plus détonnant et plus décalé, et pourtant je leur
dois tout.
Je tiens à remercier Delphine, étudiante de master 1, qui, même si elle est « toute petite », m’a
apporté une grande aide pendant les manips, un grand soutien pendant la rédaction du rapport,
mais a également su remettre au goût du jour des chansons oubliées en les marmonnant dans
le labo à 9h le lundi matin, pour mon plus grand malheur. Mille mercis à la fille sans gants qui
parle à ses glandes digestives en les disséquant…
Merci à Jean-Sébastien Pierre pour son coup de main lorsque les tests ne voulaient plus tester,
à Valérie Briand pour son énergie toujours à disposition lorsqu’une publi est introuvable,
merci à Marie-André Esnault pour ses conseils précieux, et merci aux nombreuses personnes
qui m’ont prêté des cônes pour la multi-pipette lorsque tous les fournisseurs semblaient être
en rupture de stock ! Je remercie Armelle Ansart d’avoir réussi à nous supporter, Delphine et
moi, quand les vapeurs d’éthanol et la fièvre du labo s’étaient emparées de nous. Merci à
Christine qui se bat dans l’ombre pour tous les stagiaires du labo, et qui est toujours là pour
nous remonter le moral quand les manips ne marchent pas.
Merci à Amaury, Guillaume, Julia, Michel, Natacha, Pauline, Pop’s, Quentin et Thiago pour
les pauses et la bonne humeur tous les midis ou presque ! Merci pour les soirées entre deux
manips histoire de se sortir la tête de la paillasse.
Enfin, un grand merci à ceux sans qui aucune étude n’aurait été possible, les quelques 600
braves hélicidés, Cornu et Cepaea, les petits-gris et les gros roses, qui ont donné leur vies pour
que je fasse mon stage !
3
Introduction
Les espèces réactives de l’oxygène (ERO), produits normaux du métabolisme aérobie, sont à
l’origine de dommages cellulaires lorsqu’elles sont produites en quantité excessive et qu’elles
provoquent un stress oxydant. Selon Storey (1996), face à la cytotoxicité des espèces réactives
de l’oxygène, trois niveaux de protection sont envisageables : la prévention de la formation
d’ERO, la neutralisation des ERO par production de défenses antioxydantes et la réparation
des dommages cellulaires engendrés après le stress oxydant, cette dernière éventualité n’ayant
encore jamais été mise en évidence.
Pour lutter contre le stress oxydant, les organismes ont donc développé des défenses
antioxydantes. Ces défenses peuvent être enzymatiques, ce sont les enzymes antioxydantes
telles que la superoxyde dismutase, la catalase et les glutathion peroxydases qui ont pour rôle
d’interrompre les réactions en chaîne produites par les espèces réactives de l’oxygène. Elles
peuvent également être non enzymatiques, ce sont alors des piégeurs de radicaux qui agissent
comme réducteurs ou qui viennent renforcer l’action des enzymes antioxydantes. Ces
molécules sont les vitamines A, C et E, de loin l’antioxydant le plus largement distribué dans
la nature ; un autre piégeur de radicaux est le glutathion qui est présent majoritairement à
l’état réduit (GSH) dans les cellules mais dont la forme oxydée (GSSG) est indicative d’un
stress oxydant.
Les espèces réactives de l’oxygène sont impliquées, par le biais de la respiration dans toutes
les fonctions physiologiques chez les organismes aérobies. En effet, malgré leurs effets
délétères sur l’organisme, les ERO peuvent être utilisées par les animaux comme défenses
immunitaires et agissent notamment lors de la phagocytose des pathogènes (Adema et al.,
1991). Les espèces réactives de l’oxygène sont aussi impliquées dans des trade-offs. Ainsi
chez le criquet méditerranéen Gryllus bimaculatus, il a pu être démontré que l’investissement
de l’énergie dans la défense immunitaire se répercute sur la durée de développement et la
taille des individus (Rantala et Roff, 2005). Chez la drosophile, la reproduction entraîne une
susceptibilité accrue au stress oxydant, ce qui conduit à un trade-off entre reproduction et
défense antioxydante (Salmon et al., 2001). Chez l’escargot Cornu aspersum, des trade-offs
entre défense immunitaire et croissance, maturité sexuelle et reproduction ont également été
mis en évidence (Février et al., 2009). En définitive, les ERO sont au centre d’un paradoxe
entre effets bénéfiques et effets délétères.
4
Les facteurs pouvant entraîner une surproduction d’espèces réactives de l’oxygène sont variés
et peuvent être d’origine biotique (pathogènes, compétition, etc.) ou abiotique (stress
hydrique, hyalin, anoxique, thermique, chimique). El-Gendy et al. (2009) ont montré chez
l’escargot Theba pisana que l’exposition à un pesticide à base de cuivre entraînait la
production d’espèces réactives de l’oxygène ainsi que l’augmentation de la production de
défenses antioxydantes. Les xénobiotiques (métaux lourds, pesticides) sont ainsi une des
causes majeures de stress oxydant. Chez les invertébrés, les mollusques marins ont été
largement utilisés comme modèle d’étude pour mettre en évidence des biomarqueurs de la
pollution environnementale. Ainsi, Borcovíc et al. (2005) ont montré que la production
d’enzymes antioxydantes chez la moule méditerranéenne Mytilus galloprovincialis était
influencée par la présence de polluants industriels dans l’environnement.
La mesure de l’activité des enzymes antioxydantes (SOD, GPX) constitue donc un marqueur
du dérèglement des systèmes biologiques qui permet d’évaluer indirectement le statut
antioxydant d’un individu. Les mesures des activités non enzymatiques (vitamine E) mais
également d’expression des gènes sensibles sont également des marqueurs de ce statut
antioxydant.
Chez l’escargot petit-gris Cornu aspersum, Regoli et al. (2006) ont utilisé la capacité
antioxydante totale pour étudier les effets éco-toxicologiques de la pollution urbaine. Cette
mesure, visant à mettre en évidence la présence de molécules antioxydantes non-
enzymatiques dans l’organisme, a permis d’utiliser C. aspersum comme une espèce sentinelle
pour ce type de pollution.
En Europe, et notamment en France, l’escargot petit-gris est connu pour sa capacité à
coloniser les environnements anthropisés, des jardins urbains aux cultures intensives. Les
pesticides utilisés pour la plupart stimulent la production d’espèces réactives de l’oxygène.
L’escargot petit-gris vivant dans des environnements pollués, ne rentre pas dans la catégorie
des espèces évitant l’exposition au stress oxydant (Storey 1996) puisqu’il est constamment
contraint de s’exposer à la sécrétion d’ERO de par son habitat. Se pose donc la question de
savoir si l’escargot subit un stress oxydant en raison d’un déficit en antioxydants endogènes
ou exogènes (c’est-à-dire un déficit nutritionnel), ou s’il s’adapte par la mise en jeu de survie
cellulaire ou par la surexpression enzymatique. Une adaptation, ou tout au moins une forte
plasticité phénotypique, de la part de C. aspersum face à ces environnements pollués, devrait
5
donc générer une forte production de défenses antioxydantes ou des capacités importantes de
réparations des dommages cellulaires.
Le but de cette étude est de comprendre comment ces escargots s’adaptent à la toxicité de
leur environnement, et si leur activité antioxydante fait partie des mécanismes physiologiques
spécifiques intervenant dans l’interaction organisme-environnement.
Dans ce contexte, nous nous sommes intéressés à la capacité antioxydante des escargots de
deux espèces d’hélicidés vivant souvent en sympatrie : le petit-gris Cornu aspersum, dont les
échantillons proviennent de sites non pollués ou plus ou moins touchés par la pollution, et
l’escargot des haies Cepaea nemoralis également commun en Europe mais ne colonisant pas
les zones fortement anthropisées ou les sites agricoles. Le but de cette étude est de mettre en
évidence la présence ou l’absence de variations intra et interspécifiques de la capacité
antioxydante.
Les escargots étudiés ont un régime végétarien. Ils sont également en contact direct avec les
polluants présents sur le sol via leur pied. Les polluants entrent donc dans l’organisme par
différentes voies et sont finalement transportés par les cellules sanguines vers la glande
digestive, qui représente le principal organe cible pour les processus métaboliques et de
détoxification. Dans la glande digestive, peuvent avoir lieu des phénomènes d’accumulation
des métaux, surtout sur de longues périodes.
Chez les mollusques gastéropodes, dont le système circulatoire est ouvert, l’haemocœle forme
des lacunes et les cellules circulantes (hémocytes) ont bien d’autres fonctions que la défense
immunitaire. Les hémocytes participent à la défense de l'organisme par phagocytose et lyse
bactérienne mais aussi à la régulation métabolique par stockage et dégradation du glycogène,
aux processus de détoxification par accumulation d'éléments minéraux dans leurs lysosomes.
L’immobilisation des molécules xénobiotiques se fait aussi dans la fraction lysosomale des
hémocytes. Aussi l’étude de l’haemocœle est-elle importante dans la mesure où il peut
montrer une réponse cellulaire aux polluants, laquelle se présente comme un signal d’alerte
précoce, indiquant que l’environnement est en train de subir une détérioration.
Les mesures ont été effectuées sur trois populations de C. aspersum et une population de C.
nemoralis vivant en sympatrie avec C. aspersum dans le but de comparer la capacité
antioxydante des hélicidés au niveau intraspécifique et au niveau interspécifique.
6
La capacité antioxydante totale non enzymatique des individus a été mesurée sur la glande
digestive et l’haemocœle par la méthode TEAC, il s’agit donc d’évaluer le potentiel
antioxydant des vitamines et du glutathion présents dans l’organisme.
I- Matériel et méthodes
1.1- Matériel biologique
Trois populations de Cornu aspersum ainsi qu’une population de Cepaea nemoralis ont été
échantillonnées durant le mois d’octobre 2009.
Tableau 1: Provenance des populations d'escargots utilisées lors des expériences.
Espèce Localisation Type d’habitat
Cepaea nemoralis Cornu aspersum Pacé
(Ille et Vilaine ; 48°08’ N, 1°46’ O) Suburbain
Cornu aspersum Mont St Michel
(Manche, 48°37’ N, 1°32’ O) Agrosystème
Cornu aspersum Saint Etienne la Thillaye
(Calvados ; 49°17’ N, 0°06’ E)
Prairie, sauvage
Les individus collectés ont été placés en chambre froide à 4°C jusqu’au début des expériences
(février 2010). La sortie de l’hibernation a été effectuée en augmentant progressivement la
température jusqu’à 12°C (3 jours) puis les animaux ont été placés à 20 °C dans leurs
enceintes d’élevage. Celles-ci contiennent une ration de farine alimentaire, une coupelle
d’eau et leur fond est tapissé d’une mousse synthétique humide. Au bout de 36 heures
maximum, les escargots sont réveillés mais sont laissés encore une semaine pour
acclimatation ; ils subissent un jeûne de 48h avant d’être soumis aux différents traitements.
1.2- Traitements
Le traitement au fomesafen (C13895000, 99,5% pureté 5-(2-chloro-4-tritfluoromethyl-
phenoxy)-N-methylsulfonyl-2-nitrobenzamide) a été appliqué :
7
• par contact des individus avec l’herbicide en plaçant les animaux dans des boîtes
individuelles tapissées de papier filtre imbibé de fomesafen,
• par ingestion, les boîtes contenant une ration de nourriture mouillée de fomesafen.
La différence entre les poids moyens des deux espèces a conduit à une ration de nourriture de
250 mg de farine mouillée dans 500 µl de fomesafen pour les Cornu aspersum contre 125 mg
de farine mouillée dans 250 µl de fomesafen pour les Cepaea nemoralis.
L’influence de la durée d’exposition à ce traitement semi-statique a été testée au moyen d’un
traitement « court », durant lequel les escargots ont été intoxiqués pendant 24h, et un
traitement « long ». Celui-ci consiste en une exposition pendant 5 jours au fomesafen grâce au
renouvellement de la nourriture contaminée et l’humidification des parois de la boîte au bout
de trois jours.
Un lot témoin a également été constitué. Les individus de ce lot ont été placés pendant 24
heures ou 5 jours dans les mêmes conditions d’expérience, mais le pesticide a été remplacé
par de l’eau.
Les doses nominales croissantes de fomesafen qui ont été utilisées sont 0,001%, 0,003%,
0,009%, 0,02%, 0,03% et 0,04%.
Á l’issue des 24h ou des 5 jours, seuls les animaux ayant consommé l’intégralité de la
nourriture ont été analysés, soit une proportion d’environ 96,8% sur l’ensemble des
traitements.
1.3- Prélèvement de l’hémolymphe
L’escargot possède un appareil circulatoire ouvert avec lacunes (haemocœle), formé du
cœur d’où partent une artère antérieure qui va irriguer la cavité palléale et une artère
postérieure médiane qui se dirige vers les viscères. Le vaisseau antérieur est atteint après avoir
pratiqué une fenêtre dans la coquille, préalablement nettoyée à l’eau distillée, au niveau de
l’emplacement du cœur (Figure 1). L’hémolymphe est ensuite prélevée à l’aide d’un capillaire
biseauté.
8
Figure 1 : Prise d’hémolymphe dans l’artère antérieure d’un escargot petit-gris (C. aspersum).
Le volume d’hémolymphe des Cepaea nemoralis étant très inférieur à celui de l’escargot
petit-gris, les échantillons de C. nemoralis testés contiennent en fait l’hémolymphe de deux
individus traités de façon identique.
1.4- Prélèvement de la glande digestive
Dans le même temps, le lobe hépatique accessoire des glandes digestives des escargots a été
prélevé (tampon PBS pH= 7,4 ; 0,2M) puis placé au congélateur à -80°C jusqu’à leur analyse.
Les glandes digestives encore congelées ont été broyées une minute puis centrifugées 30
minutes à 600 tours / minute à 0°C. Après récupération du surnageant, les échantillons ont été
de nouveau centrifugés 1 heure à 14 500 tours / minute à 0°C.
Les analyses de la capacité antioxydante totale et le dosage des protéines de la glande
digestive ont été effectuées à partir du surnageant de ces échantillons.
1.5- Mesure de la capacité antioxydante
Les capacités antioxydantes (CAO) de l’hémolymphe et de la glande digestive ont été
mesurées grâce à la méthode TEAC (Trolox Equivalent Antioxidant Capacity) (Miller et al.,
1993).
Il s’agit de mesurer les antioxydants non enzymatiques qui agissent comme des piégeurs de
radicaux et qui viennent renforcer l’action des enzymes antioxydantes. Le trolox, équivalent
de la vitamine E sert de référence pour évaluer la CAO de l’extrait (Trolox (S65192-408) 6
hydroxy-2,5,7,8-tetramethylchloroman-2-carboxylic acid ~97%).
9
Les analyses consistent à mesurer au spectrophotomètre les changements colorimétriques
d’une solution radicalaire formée d’un mélange ABTS-persulfate de potassium en présence
d’un échantillon de capacité antioxydante inconnue ((A1888-SG) 2,2 Azino-bis(3-ethylbenzo-
thiazoline-6-sulfonic acid) diammonium salt ~98%). La gamme étalon de trolox sert de
référence. La CAO exprimée en équivalent trolox (TEAC) correspond à la concentration de
trolox ayant la même activité que l’échantillon. Les résultats sont exprimés en milli-moles
d’équivalent trolox par ml d’hémolymphe ou g de protéines pour la glande digestive (méthode
de Bradford).
1.6- Analyses statistiques
Les résultats ont été analysés statistiquement grâce à une ANOVA sous le logiciel R. Lorsque
les résultats donnaient des différences significatives, un test HSD de Tukey était utilisé pour
faire des comparaisons deux à deux. Le nombre de réplicats utilisés durant les expériences
figure sur le tableau 2.
Tableau 2: Nombre de réplicats utilisés pour les différentes doses (µg/l) de fomesafen en fonction de la population.
C. aspersum Pacé
C. aspersum Mont Saint Michel
C. aspersum Saint Etienne la Thillaye
Cepaea nemoralis Pacé
hémolymphe
glande digestive
hémolymphe glande
digestive hémolymphe
glande digestive
hémolymphe glande
digestive
24
heu
res
Témoin 21 8 11 11 11 12 15 5
10 9 9 9 9 9 9 5 5
30 9 9 9 9 9 9 5 4
90 9 9 9 8 9 9 5 5
200 17 9 9 9 9 9 13 3
300 8 9 8 8 9 9 5 5
400 5 5 9 9 9 9 2 2
5 jo
urs
Témoin 16 6 10 10 11 10 15 7
10 3 3 9 9 9 8 4 4
30 5 5 8 9 9 8 5 7
90 5 5 8 8 9 9 5 5
200 15 5 9 8 8 9 12 3
300 5 5 9 9 9 9 2 2
400 5 5 9 9 7 7 4 4
II- Résultats
2.1- Effets du traitement
D’une manière générale, il n’existe d’effet traitement que pour l’hémolymphe des populations
de Cornu aspersum et de Cepaea
différences significatives entre les témoins et les différentes doses de fomesafen.
En ce qui concerne les variations de la concentration d’herbicide, on n’observe jamais d’effet
dose-réponse. En revanche on peut observer un effet «
entre la dose 200 et la dose 300µg/l de fomesafen, et pour lequel la capacité
augmente par rapport aux autres doses. Toutefois, cette augmentation n’est statistiquem
vérifiée que pour l’espèce Cepaea nemoralis
pour l’hémolymphe et en traitement 5 jours pour la glande digestive (figures 2 et 3) (test de
Tukey, p<0,001).
L’augmentation de la durée du traitement entraîne
l’hémolymphe pour les populations de
Michel (test de Tukey, p<0,05).
Figure 2 : Capacité antioxydante de l'hémolymphe (mmol d’équivalent Cornu aspersum et Cepaea nemoralis. A: Population de de C. aspersum de Saint Etienne la Thillaye ; C: Population de nemoralis de Pacé. En blanc : traitement 24 heures, en gris
10
Effets du traitement
D’une manière générale, il n’existe d’effet traitement que pour l’hémolymphe des populations
Cepaea nemoralis de Pacé (Tukey, p<0,05) pour lesquelles on a des
différences significatives entre les témoins et les différentes doses de fomesafen.
En ce qui concerne les variations de la concentration d’herbicide, on n’observe jamais d’effet
evanche on peut observer un effet « seuil » situé chez toutes les populations
entre la dose 200 et la dose 300µg/l de fomesafen, et pour lequel la capacité
augmente par rapport aux autres doses. Toutefois, cette augmentation n’est statistiquem
Cepaea nemoralis et ce pour la dose de 200µg/l en traitement 24h
pour l’hémolymphe et en traitement 5 jours pour la glande digestive (figures 2 et 3) (test de
L’augmentation de la durée du traitement entraîne une diminution significative de la CAO de
l’hémolymphe pour les populations de C. aspersum de Pacé et de la baie du Mont Saint
Michel (test de Tukey, p<0,05).
e de l'hémolymphe (mmol d’équivalent trolox par ml) des différ. A: Population de C. aspersum de la baie du Mont Saint Michel
de Saint Etienne la Thillaye ; C: Population de C. aspersum de Pacé ; D : traitement 24 heures, en gris : traitement 5 jours.
D’une manière générale, il n’existe d’effet traitement que pour l’hémolymphe des populations
de Pacé (Tukey, p<0,05) pour lesquelles on a des
différences significatives entre les témoins et les différentes doses de fomesafen.
En ce qui concerne les variations de la concentration d’herbicide, on n’observe jamais d’effet
» situé chez toutes les populations
entre la dose 200 et la dose 300µg/l de fomesafen, et pour lequel la capacité antioxydante
augmente par rapport aux autres doses. Toutefois, cette augmentation n’est statistiquement
et ce pour la dose de 200µg/l en traitement 24h
pour l’hémolymphe et en traitement 5 jours pour la glande digestive (figures 2 et 3) (test de
une diminution significative de la CAO de
de Pacé et de la baie du Mont Saint
par ml) des différentes populations de de la baie du Mont Saint Michel ; B: Population
: Population de Cepaea
Figure 3 : Capacité antioxydante de la glande digestive (mmol d’équivalent trolox par g de protéines) des différentes populations de Cornu aspersum et Cepaea nemoralisB: Population de C. aspersum de Saint Etienne la Thillaye ; C: Population de Cepaea nemoralis de Pacé. En blanc : traitement 24 heures, en gris
2.2- Comparaison intraspécifique
2.2-1. Hémolymphe
L’analyse de la CAO de l’hémolymphe a montré des différences entre populations
(F2,343=10,43 ; p <0,001), traitements (F
(F1,343=31,93 ; p <0,001). De plus, l’interactio
(F6,343=2,25 ; p <0,05) produit un effet significatif sur la capacité
l’hémolymphe.
Les analyses montrent également que la population de Pacé est significativement différente
des deux autres (test de Tukey, p<0,05) (figures 4 et 5).
11
e de la glande digestive (mmol d’équivalent trolox par g de protéines) des différentes Cepaea nemoralis. A: Population de C. aspersum de la baie du Mont Saint Michel
de Saint Etienne la Thillaye ; C: Population de C. aspersum de Pacé: traitement 24 heures, en gris : traitement 5 jours.
Comparaison intraspécifique
Hémolymphe
L’analyse de la CAO de l’hémolymphe a montré des différences entre populations
; p <0,001), traitements (F6,343=3,61 ; p<0,01) et durée du traitement
; p <0,001). De plus, l’interaction entre concentration x durée du traitement
; p <0,05) produit un effet significatif sur la capacité
Les analyses montrent également que la population de Pacé est significativement différente
de Tukey, p<0,05) (figures 4 et 5).
e de la glande digestive (mmol d’équivalent trolox par g de protéines) des différentes de la baie du Mont Saint Michel ;
de Pacé ; D : Population de
L’analyse de la CAO de l’hémolymphe a montré des différences entre populations
; p<0,01) et durée du traitement
n entre concentration x durée du traitement
; p <0,05) produit un effet significatif sur la capacité antioxydante de
Les analyses montrent également que la population de Pacé est significativement différente
Figure 4 : Capacité antioxydante de l’hémolymphe de différentes populations de
croissantes de fomesafen pendant 24 heures (N = ±9, moyenne ± SE).
Figure 5 : Capacité antioxydante de l’hémolymphe de différentes populations de
croissantes de fomesafen pendant 5 jours (N = ±9, moyenne ± SE).
12
e de l’hémolymphe de différentes populations de Cornu aspersum
croissantes de fomesafen pendant 24 heures (N = ±9, moyenne ± SE).
e de l’hémolymphe de différentes populations de Cornu aspersum
croissantes de fomesafen pendant 5 jours (N = ±9, moyenne ± SE).
Cornu aspersum soumises à des doses
Cornu aspersum soumises à des doses
2.2-2.
L’analyse de la capacité antioxydant
aspersum montre des différences significatives entre populations (F
un effet significatif de la durée de traitement (F
La population B (Saint Etienne la Thillaye) est différente des deux autres (p<0,05) (fig
et 7). Lors de l’intoxication de courte durée, la capacité
population B est significativement supérieure à celle des deux autres pour la dose 200µg/l et
supérieure à la A (Baie du Mont Saint Michel) pour les doses de 30,
fomesafen, ainsi que pour le témoin (test de Tukey, p<0,05).
Lors de l’intoxication longue, la capacité
supérieure à celle de la population de Pacé pour la dose 300µg/l et supérieure à celle de
population de la baie du Mont Saint Michel pour les doses de 10 et 300 µg/l de fomesafen
(test de Tukey, p<0,05).
Figure 6 : Capacité antioxydante de la glande digestive de différentes populations de
doses croissantes de fomesafen pendant 24 heures (N = ±9, moyenne ± SE).
13
Glande digestive
antioxydante de la glande digestive des trois populations de
montre des différences significatives entre populations (F2,304 =61,76; p<0,001), et
un effet significatif de la durée de traitement (F1,304=4,60 ; p=0,03).
La population B (Saint Etienne la Thillaye) est différente des deux autres (p<0,05) (fig
et 7). Lors de l’intoxication de courte durée, la capacité antioxydant
population B est significativement supérieure à celle des deux autres pour la dose 200µg/l et
supérieure à la A (Baie du Mont Saint Michel) pour les doses de 30, 200 et 300 µg/l de
fomesafen, ainsi que pour le témoin (test de Tukey, p<0,05).
Lors de l’intoxication longue, la capacité antioxydante moyenne de la population B est
supérieure à celle de la population de Pacé pour la dose 300µg/l et supérieure à celle de
population de la baie du Mont Saint Michel pour les doses de 10 et 300 µg/l de fomesafen
e de la glande digestive de différentes populations de Cornu aspersum
doses croissantes de fomesafen pendant 24 heures (N = ±9, moyenne ± SE).
e de la glande digestive des trois populations de C.
=61,76; p<0,001), et
La population B (Saint Etienne la Thillaye) est différente des deux autres (p<0,05) (figures 6
antioxydante moyenne de la
population B est significativement supérieure à celle des deux autres pour la dose 200µg/l et
200 et 300 µg/l de
e moyenne de la population B est
supérieure à celle de la population de Pacé pour la dose 300µg/l et supérieure à celle de la
population de la baie du Mont Saint Michel pour les doses de 10 et 300 µg/l de fomesafen
Cornu aspersum soumises à des
Figure 7 : Capacité antioxydante de la glande digestive de différentes populations de
doses croissantes de fomesafen pendant 5 jours (N
2.3- Comparaison interspécifique
2.3-1. Hémolymphe
Lors de l’analyse des variations interspécifiques de la capacité
des escargots de Pacé, des différences significatives ont été enregistrées entre:
(F1,198 =21,52 ; p<0,001), traitement (F
p<0,001). De plus les interactions entre espèce x traitement (F
concentration x durée du traitement (F
(F6,198 =2,22; p<0,05) possèdent un effet significatif sur la CAO de l’hémolymphe.
Cepaea nemoralis a une activité
8) : après 24h pour la dose de 200µg/l ainsi qu’après cinq jours pour les
300µg/l (test de Tukey, p<0,05).
14
e de la glande digestive de différentes populations de Cornu aspersum
doses croissantes de fomesafen pendant 5 jours (N = ±9, moyenne ± SE).
Comparaison interspécifique
Hémolymphe
Lors de l’analyse des variations interspécifiques de la capacité antioxydant
des escargots de Pacé, des différences significatives ont été enregistrées entre:
21,52 ; p<0,001), traitement (F6,198 =2,51; p<0,05), durée du traitement (F
p<0,001). De plus les interactions entre espèce x traitement (F1,198
concentration x durée du traitement (F6,198 =5,17; p<0,01), concentration x durée
=2,22; p<0,05) possèdent un effet significatif sur la CAO de l’hémolymphe.
a une activité antioxydante supérieure à celle de Cornu aspersum
: après 24h pour la dose de 200µg/l ainsi qu’après cinq jours pour les doses 10, 90, 200 et
300µg/l (test de Tukey, p<0,05).
Cornu aspersum soumises à des
antioxydante de l’hémolymphe
des escargots de Pacé, des différences significatives ont été enregistrées entre: espèces
=2,51; p<0,05), durée du traitement (F1,198 =13,63;
1,198 =2,71; p<0,05),
=5,17; p<0,01), concentration x durée x espèce
=2,22; p<0,05) possèdent un effet significatif sur la CAO de l’hémolymphe.
Cornu aspersum (figure
doses 10, 90, 200 et
Figure 8: Capacité antioxydante de l'hémolymphe de deux espèces sympatriques d'hélicidés soumises à des doses croissantes de fomesafen pendant 24h et 5 jours (N=±9, moyennes ±SE).
2.3-2. Glande digestive
L’analyse de la capacité antioxydant
de Pacé a montré des différences significatives entre
CAO de la glande digestive. Les interactions entre
concentration x espèce (F6,127
p<0,01) ont également un effet significatif sur la CAO de la glande digestive
15
e de l'hémolymphe de deux espèces sympatriques d'hélicidés soumises à des doses croissantes de fomesafen pendant 24h et 5 jours (N=±9, moyennes ±SE).
Glande digestive
antioxydante de la glande digestive des deux espèces sympatriques
de Pacé a montré des différences significatives entre espèce (F1,127 =21,48; p<0,001) sur la
CAO de la glande digestive. Les interactions entre : espèce x durée (F1,127
6,127 =3,77; p<0,01), concentration x durée x espèce (F
p<0,01) ont également un effet significatif sur la CAO de la glande digestive
e de l'hémolymphe de deux espèces sympatriques d'hélicidés soumises à des doses
e de la glande digestive des deux espèces sympatriques
=21,48; p<0,001) sur la
,127 =4,13; p<0,05),
=3,77; p<0,01), concentration x durée x espèce (F6,127 =3,83;
p<0,01) ont également un effet significatif sur la CAO de la glande digestive (figure 9).
Figure 9: Capacité antioxydante de la glande croissantes de fomesafen pendant 24h et 5 jours (N=±9, moyennes ±SE).
III- Discussion
Le but de cette étude est de comprendre comment des organismes comme les escargots
s’adaptent à la toxicité de leur environnement et si les défenses
en œuvre sont caractéristiques de l’espèce ou de la population. La production d’espèces
réactives de l’oxygène étant considérée comme un facteur clé de la réponse adaptative ou de
la réaction à un évènement toxique, il s’agit de savoir si celle
augmentation des défenses antioxydant
animaux. Pour le déterminer, nous avons étudié la réponse d’escargots
l’exposition au fomesafen.
Ce travail a abordé deux axes de réflexion
par l’organisme lors d’une exposition à un pro
part l’étude des processus adaptatifs que subissent les organismes vivant pendant de longues
périodes en environnement pollué.
16
e de la glande digestive de deux espèces sympatriques d'hélicidés soumises à des doses croissantes de fomesafen pendant 24h et 5 jours (N=±9, moyennes ±SE).
Le but de cette étude est de comprendre comment des organismes comme les escargots
icité de leur environnement et si les défenses antioxydant
en œuvre sont caractéristiques de l’espèce ou de la population. La production d’espèces
réactives de l’oxygène étant considérée comme un facteur clé de la réponse adaptative ou de
la réaction à un évènement toxique, il s’agit de savoir si celle-ci est caractérisée par une
antioxydantes, c'est-à-dire de connaître le statut
animaux. Pour le déterminer, nous avons étudié la réponse d’escargots à un épisode toxique:
Ce travail a abordé deux axes de réflexion : d’une part l’analyse de la défense mise en place
par l’organisme lors d’une exposition à un pro-oxydant à court terme et à long terme
l’étude des processus adaptatifs que subissent les organismes vivant pendant de longues
périodes en environnement pollué.
digestive de deux espèces sympatriques d'hélicidés soumises à des doses
Le but de cette étude est de comprendre comment des organismes comme les escargots
antioxydantes qu’ils mettent
en œuvre sont caractéristiques de l’espèce ou de la population. La production d’espèces
réactives de l’oxygène étant considérée comme un facteur clé de la réponse adaptative ou de
ci est caractérisée par une
dire de connaître le statut antioxydant des
à un épisode toxique:
: d’une part l’analyse de la défense mise en place
oxydant à court terme et à long terme, d’autre
l’étude des processus adaptatifs que subissent les organismes vivant pendant de longues
17
Les capacités antioxydantes de l’hémolymphe et de la glande digestive n’augmentent pas avec
la concentration de pesticide, il n’y donc pas d’effet dose-dépendance. En revanche un effet
seuil plus ou moins marqué a pu être mis en évidence à partir de 200µg/l. Cette observation
corrobore le fait que l’effet des pesticides en général, et du fomesafen en particulier, sur le
système antioxydant est connu pour être de type seuil, comme cela a pu être observé chez
d’autres mollusques comme la limnée (Russo et al., 2007). L’existence d’un seuil de réponse
au pesticide peut être expliquée par le fait que les espèces réactives de l’oxygène, produites
lors de l’intoxication au fomesafen, sont connues pour être impliquées dans l’expression de
nombreux gènes et pour constituer des signaux cellulaires (Allen et Tresini, 2000). En tant
que signal déclencheur, les ERO, lorsqu’ils atteignent un certain seuil, sont à l’origine de la
production de défenses antioxydantes. La concentration seuil de fomesafen serait alors la dose
pour laquelle la production d’espèces réactives de l’oxygène est suffisante pour provoquer
l’augmentation de la production de défenses antioxydantes.
Les doses nécessaires à la mesure d’une augmentation de la capacité antioxydante chez Cornu
aspersum et chez Cepaea nemoralis, situées entre 200 et 300 µg/l représentent des
concentrations beaucoup plus élevées de pesticides que celles que l’on pourrait rencontrer en
milieu naturel. A titre indicatif, la dose observée pour un autre herbicide, l’atrazine, est de 30
à 87µg/l dans les régions d’agriculture intensive (in Russo et al., 2009). De plus, ce seuil est
beaucoup plus haut que celui observé chez d’autres mollusques, puisque chez la limnée
stagnée Lymnea stagnalis, on observe une diminution de l’activité des hémocytes de par leur
nécrose et apoptose dès la dose de 30µg/l (Russo et al., 2007). Cette observation indique que
le seuil de tolérance à la production d’ERO de ces espèces est particulièrement élevé.
L’augmentation de la durée d’intoxication au fomesafen entraîne, toutes populations
confondues, une diminution de la capacité antioxydante. Cet effet est le plus marqué pour
l’hémolymphe des populations de Cornu aspersum de Pacé et de la baie du Mont Saint
Michel. Ce résultat peut être expliqué par le fait que dès l’exposition des escargots au
fomesafen, celui-ci va être véhiculé par le système circulatoire et être dans un premier temps
détoxifié par l’hémolymphe et ensuite seulement par la glande digestive. Cependant, la
capacité antioxydante peut être dépassée pour une durée trop importante d’intoxication et
provoquer une dépression des défenses antioxydantes. Ainsi, chez la moule méditerranéenne
Mytilus galloprovincialis, les polluants (tels que les métaux lourds) commencent à
s’accumuler dans les tissus de l’animal après seulement trois jours d’exposition (Regoli et al.,
2004). Les longues expositions aux polluants pourraient être à l’origine d’une diminution de
18
la capacité antioxydante lorsque le système de détoxification est dépassé et insuffisant pour
palier au stress oxydant.
La comparaison de la sensibilité de l’hémolymphe et de la glande digestive des escargots au
pesticide montre des intensités de réaction différentes en fonction du tissu. Lorsqu’on étudie
par exemple la réaction des différents tissus de Cepaea nemoralis, la forte capacité
antioxydante de l’hémolymphe observée dès 24 heures pour la dose 200µg/l disparait ensuite
rapidement, tandis que le pic de capacité antioxydante n’intervient qu’après 5 jours
d’intoxication pour la glande digestive. Cette observation peut être expliquée par le fait que
l’hémolymphe est un transporteur de substances dans l’organisme, quelle que soit leur voie
d’entrée, qui peut certes jouer le rôle de détoxification, mais dans une moindre mesure que la
glande digestive. Ainsi, chez la moule brune Perna perna, la glande digestive est moins
sujette au stress oxydant que les autres tissus, tels que les branchies, grâce à la plus grande
activité de ses défenses antioxydantes (Almeida et al., 2005). On peut alors poser l’hypothèse
que la glande digestive prendrait le relais de l’haemocœle dans la détoxification de
l’organisme au bout d’un certain temps. Le fait que lorsque l’activité antioxydante d’un des
deux tissus diminue, celle de l’autre augmente, a été vérifié par Regoli et al. (2006) sur Cornu
aspersum. Ces auteurs ont testé l’efficacité des défenses antioxydantes de différents tissus et
ont montré que la glande digestive était la plus performante tandis que les hémocytes ont
pour rôle d’une part de détoxifier, et d’autre part de concentrer les polluants avant de les
transporter vers la glande digestive. Cette hypothèse est proche de la « mobile immune brain
hypothesis » énoncée par Ottaviani et al. (1993), qui proposent que face à un stress, les
hémocytes des invertébrés sont capables des mêmes réponses immunitaires et
neuroendocriniennes que le système hypothalamo-hypophysaire des mammifères.
Au niveau intraspécifique, des variations ont pu être mises en évidence aussi bien pour
l’hémolymphe que pour la glande digestive. La population de Pacé possède une meilleure
capacité antioxydante que les autres pour l’hémolymphe, tandis que c’est la population de
Saint Etienne la Thillaye qui possède la meilleure CAO lorsque l’on compare les glandes
digestives. Ces variations peuvent être expliquées par le fait que les trois populations n’ont
pas subi les mêmes épisodes toxiques dans leurs milieux naturels. Dans une étude sur le ver
polychète Laeonereis acuta, des différences dans les activités des enzymes antioxydantes ont
pu être observées selon que la population venait d’un site pollué ou sain (Geraticano et al.,
19
2004). De plus, Borkovíc et al. (2005) ont montré chez Mytilus galloprovincialis que les
activités des enzymes antioxydantes pouvaient varier en fonction du type de pollution auquel
était exposée la population. Si la population de Saint Etienne la Thillaye provient d’un
environnement sain, la population de la baie du Mont Saint Michel quant à elle est exposée à
une pollution de type agricole (pesticides), et la population issue de Pacé subit non seulement
des épisodes toxiques provenant des cultures voisines, mais également les retombées de la
pollution urbaine (gaz d’échappement, métaux lourds). La pollution urbaine est de nature à
stimuler le système immunitaire, source de production massive d’ERO. De ce fait on peut
exprimer l’hypothèse selon laquelle les variations intraspécifiques observées chez Cornu
aspersum sont dues aux différences de nature du stress auquel les trois populations doivent
faire face dans leur milieu naturel.
De plus, le régime alimentaire pourrait influencer la capacité antioxydante, Cohen et al.
(2009) ont montré chez des oiseaux que la capacité antioxydante du sérum variait en fonction
du régime alimentaire des individus et en particulier qu’elle augmentait avec la consommation
d’aliments riches en vitamine E. Cette hypothèse pourrait être appliquée aux différences de
CAO entre populations de Cornu aspersum. En effet, les escargots de la commune de Saint
Etienne la Thillaye se nourrissent majoritairement de plantes aromatiques trouvées dans les
jardins (Allium schoenoprasum, Rosmarinus officinalis, Thymus vulgaris, etc.), et dont la
richesse en composés phénoliques leur confère de grandes propriétés antioxydantes (Zheng et
Wang, 2002), ce qui pourrait être la cause des fortes capacités antioxydantes de sa glande
digestive. En ce qui concerne la population de Pacé, la zone de prélèvement recelait du colza
dont les propriétés antioxydantes sont en cours de démonstration (M-A Esnault,
communication personnelle). Le régime alimentaire de la population de la baie du Mont Saint
Michel s’est avéré difficile à observer étant donné que leur environnement, composé de
cultures intensives, change régulièrement en fonction des légumes et céréales plantés (choux,
pommes de terre, oignons, carottes…). Il a pourtant pu être prouvé qu’un grand nombre
d’espèces de légumes possèdent des propriétés antioxydantes de part leur composition en
phénols, tanins et flavonoïdes (Amarowicz et Pegg, 2008). La faiblesse de la capacité
antioxydante de cette population en comparaison des autres ne pourrait donc pas être
expliquée par son régime alimentaire. La piste de l’influence de l’alimentation sur la capacité
antioxydante des végétaux mérite donc d’être approfondie et une étude détaillée de la
composition végétale des différents sites, ainsi que des habitudes alimentaires des trois
20
populations associées à la connaissance des propriétés antioxydantes des plantes semble
souhaitable.
D’autres hypothèses peuvent être envisagées pour expliquer cette variation intraspécifique de
la capacité antioxydante. L’état de santé général peut être suggéré pour expliquer les faibles
performances des individus de la baie du Mont Saint Michel, mais une mesure précise de leur
état physiologique est bien évidemment nécessaire pour tester cette hypothèse. On peut
ajouter que des stratégies de détoxification différentes, basées sur une importance relative de
chaque tissu, pourraient être à l’origine des différences observées.
La différence entre capacité antioxydante de C. aspersum et celle de Cepaea nemoralis doit
être interprétée de façon prudente car elle n’est due qu’à la forte capacité antioxydante de C.
nemoralis pour la dose de 200µg/l. Si l’on considère que les deux espèces sont vraiment
différentes, on peut expliquer ce résultat par le régime alimentaire de l’espèce. En effet, les
deux espèces étant sympatriques, elles sont exposées aux mêmes polluants, qui ne peuvent
être à l’origine de la variation, mais leurs choix alimentaires peuvent être différents, ce qui
rend leur étude nécessaire pour C. nemoralis, sachant qu’elle a déjà été menée sur l’escargot
petit-gris (Chevalier, 2001).
L’analyse de la capacité antioxydante totale est un outil efficace pour évaluer le statut
antioxydant d’un individu. D’autres analyses sont toutefois nécessaires pour une comparaison
plus fine des différentes populations et espèces. L’analyse des activités des enzymes
antioxydantes est une étape supplémentaire pour étudier le statut antioxydant d’une espèce,
même si la capacité antioxydante non enzymatique représente 70% de la capacité
antioxydante totale (Regoli et Winston, 1999). De même, le glutathion étant au cœur des
défenses antioxydantes, il représente un biomarqueur de choix dans l’analyse du stress
oxydant (Doyotte et al., 1997). Ainsi une analyse des enzymes antioxydantes (glutathion
peroxydase et glutathion réductase) et des concentrations de glutathion est d’ores et déjà
programmée dans le cadre de cette étude.
Les différences observées entre les trois populations de Cornu aspersum peuvent être la
conséquence d’une plasticité phénotypique ou d’un processus adaptatif local, comme cela a
pu être mis en évidence chez certains mollusques marins (Lambert et al., 2007). Afin de tester
21
ces hypothèses une expérience de transplantation des individus d’une population dans un
milieu différent devrait être réalisée (Regoli et Principato, 1995). En effet il serait alors
possible de savoir si la capacité antioxydante change en fonction du milieu dans lequel évolue
la population. Des manipulations visant à tester l’héritabilité de la capacité antioxydante sont
donc à envisager.
22
BIBLIOGRAPHIE
1. ADEMA C.M., R.A. HARRIS, E.C. VAN DEUTEKOM-MULDER, 1992. A
comparative study of hemocytes from six different snails: morphology and functional
aspects. Journal of Invertebrate Pathology, 59:24-32.
2. ALLEN R.G., M. TRESINI, 2000. Oxidative stress and gene regulation. Free Radical
Biology and Medicine, 28: 463-499.
3. ALMEIDA E.A., A.CELSO DIAS BAINY, A. LUIZ DAFRE, O.F. GOMES, M.H.G.
MEDEIROS, P. DI MASCIO, 2005. Oxidative stress in digestive gland and gill of the
brown mussel (Perna perna) exposed to air and re-submersed. Journal of
Experimental Marine Biology and Ecology, 318: 21-30.
4. AMAROWICZ R., R.B. PEGG, 2008. Legumes as a source of natural antioxidants.
European Journal of Lipid Science and Technology, 110: 865-878.
5. BORKOVIC S.S., J.S. SAPONJIC, S.Z. PAVLOVIC, D.P. BLAGOJLEVIC, S.M.
MILOSEVIC, T.B. KOVACEVIC, R.M. RADOJICIC, M.B. SPASIC, R.V. ZIKIC,
Z.S. SAICIC, 2005. The activity of antioxidant defense enzymes in the mussel Mytilus
galloprovincialis from the Adriatic sea. Comparative Biochemistry and Physiology,
141C: 366-374.
6. CHEVALIER L., 2001. Facteurs influençant la composition du régime alimentaire de
l’escargot petit-gris Helix aspersa Müller (Gastéropode terrestre). Biologie, thèse
soutenue devant l’université de Rennes 1, 298 pages.
7. COHEN A.A., K.J. McGRAW, W.D. ROBINSON, 2009. Serum antioxidant levels in
wild birds vary in relation to diet, season, life history strategy, and species. Oecologia,
161: 673-683.
8. DOYOTTE A., C. COSSU, M.C. JACQUIN, M. BABUT, P. VASSEUR, 1997.
Antioxidant enzymes, glutathione and lipid peroxidation as relevant biomarkers of
experimental or field exposure in the gill and the digestive gland of the freshwater
bivalve Unio tumidus. Aquatic toxicology, 39: 93-110.
23
9. EL-GENDY K.S., M.A. RADWAN, A.F. GAD, 2009. In vivo evaluation of oxidative
stress biomarkers in the land snail, Theba pisana exposed to copper-based pesticides.
Chemosphere, 77: 339-344.
10. FEVRIER Y., J. RUSSO, L. MADEC, 2009. Intraspecific variation in life history
traits of a land snail after a bacterial challenge. Journal of Zoology, 277: 149-156.
11. GERATICANO L.A., R. BOCCHETTI, J.M. MONSERRAT, F. REGOLI, A.
BIANCHINI, 2004. Oxidative stress responses in two populations of Laeonereis acuta
(Polychaeta, Nereididae) after acute and chronic exposure to copper. Marine
Environmental Research, 58: 1-17.
12. LAMBERT C., P. SOUDAN, L. DEGREMONT, M. DELAPORTE, J. MOAL, P.
BOUDRY, F. JEAN, A. HUVET, J.F. SAMAIN, 2007. Hemocyte characteristics in
families of oysters, Crassostrea gigas, selected for differential survival during summer
and reared in three sites. Aquaculture, 270: 276-288.
13. MILLER N.J., C. RICEEVANS, M.J. DAVIES, V. GOPINATHAN, A. MILNER,
1993. A novel method for measuring antioxidant capacity and its application to
monitoring the antioxidant status in prematurate neonates. Clinical Science, 84: 407-
412.
14. OTTAVIANI E., E. CASELGRANDI , A. FRANCHINI, C. FRANCESCHI, 1993.
CRF provokes the release of norepinephrine by hemocytes of Viviparus ater
(gastropoda, prosobranchia)-further evidence in favor of the evolutionary hypothesis
of the mobile immune-brain. Biochemical and biophysical research
communications,193: 446-452.
15. R Development Core Team (2009). R: A language and environment for statistical
computing. R Foundation for Statistical Computing, Vienna, Austria. ISBN 3-900051-
07-0, URL http://www.R-project.org.)
16. RANTALA M.J., D.A. ROFF, 2005. An analysis of trade-offs in immune function,
body size and development time in the Mediterranean Field Cricket, Gryllus
bimaculatus. Functional Ecology, 19: 323-330.
17. REGOLI F., G. PRINCIPATO, 1995. Glutathione, glutathione-dependant and
antioxidant enzymes in mussel, Mytilus galloprovincialis exposed to metal under field
24
and laboratory conditions – Implications for the use of biochemical biomarkers.
Aquatic toxicology, 31: 143-164.
18. REGOLI F., G.W. WINSTON, 1999. Quantification of total oxidant scavenging
capacity of antioxidants for peroxynitrite, peroxyl radicals, and hydroxyl radicals.
Toxicology and applied pharmacology, 156: 96-105.
19. REGOLI F., S. GORBI, D. FATTORINI, S. TEDESCO, A. NOTTI, N. MACHELLA,
R. BOCCHETTI, M. BENEDETTI, F. PIVA, 2006. Use of the land snail Helix
aspersa as sentinel organism for monitoring ecotoxicologic effects of urban pollution:
an integrated approach. Environmental Health Perspective, 114: 63-69.
20. REGOLI F., S. GORBI, G. FRENZILI, M. NIGRO, I. CORSI, S. FOCARDI, G.W.
WINSTON, 2002. Oxidative stress in ecotoxicology: from the analysis of individual
anti-oxidants to a more integrated approach. Marine Environmental Research, 54:
419-423.
21. RUSSO J., L. LEFEUVRE-ORFILA, L. LAGADIC, 2007. Hemocyte-specific
responses to the peroxidizing herbicide fomesafen in the pond snail Lymnaea stagnalis
(Gastropoda, Pulmonata). Environmental Pollution, 46: 420-427.
22. RUSSO J., L. MADEC, M. BREHELIN, 2009. Haemocyte lysosomal fragility facing
environmental reality: a toxicological perspective with atrazine and Lymnaea
stagnalis (Gastropoda, Pulmonata) as a test case. Ecotoxicology and Environmental
Safety. 72 : 1719-1726.
23. SALMON A.B., D.B. MARX, L.G. HARSHMAN, 2001. A cost of reproduction in
Drosophila melanogaster: stress susceptibility. Evolution, 55: 1600-1608.
24. STOREY K.B., 1996. Oxidative stress : animal adaptations in nature. Brazilian
Journal of Medical and Biological Research, 29: 1715-1733.
25. ZHENG W., S.Y. WANG, 2001. Antioxidant Activity and Phenolic Compounds in
Selected Herbs. Journal of agriculture and food chemistry, 49: 5165-5170.
Images de couverture:
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b4/Cepaea_nemoralis_on_moss.jpg
http://www.nhm.ac.uk/natureplus/servlet/JiveServlet/showImage/38-1138-1427/Schneckesnail1.jpg
http://domenicus.malleotus.free.fr/a/img/escargot_petit-gris_001_%28sur_eglantine,_cotes_de_clermont,_2007-05-18%29.jpg
http://spd.fotolog.com/photo/29/57/116/bio_pictures/1208701120_f.jpg
25
Résumé ─ Afin d’étudier les variations interspécifiques et intraspécifiques du statut antioxydant des
hélicidés, trois populations de Cornu aspersum provenant de sites plus ou moins pollués et une population
sympatrique de Cepaea nemoralis ont été exposées à des doses croissantes de fomesafen (10, 30, 90, 200,
300 et 400 µg/l), un herbicide pro-oxydant, pendant 24 heures et 5 jours. Les mesures de la capacité
antioxydante non enzymatique de la glande digestive et de l’hémolymphe ont été effectuées grâce à la
méthode TEAC (trolox equivalent antioxidant capacity). Après analyse, il s’avère que les résultats
dépendent du tissu étudié. La comparaison intraspécifique montre que c’est la population de C. aspersum
en provenance du site soumis à la pollution urbaine qui présente la meilleure capacité antioxydante de
l’hémolymphe, ce qui s’explique par le rôle de transporteur et de concentration de particules
atmosphériques à potentialité inflammatoire de l’hémolymphe. La glande digestive de la population
provenant du site sain a une bonne capacité antioxydante, peut-être attribuable à son alimentation. La
comparaison interspécifique montre que Cepaea nemoralis semble avoir une meilleure capacité
antioxydante que Cornu aspersum. Les différences interspécifiques observées pourraient être attribuées
aux différences de choix alimentaire des deux espèces sympatriques. De nombreuses mesures restent à
faire afin de préciser ces résultats et dans le but de déterminer le potentiel évolutif de la variation chez les
deux taxa.
Mots clés : Hélicidé, capacité antioxydante, variabilité intraspécifique, variabilité interspécifique,
herbicide.
Abstract ─ To study intraspecific and interspecific variations of the antioxidant status of helicidae, three
populations of Cornu aspersum from polluted and unpolluted sites and a sympatric population of Cepaea
nemoralis were exposed to increasing doses of fomesafen(10, 30, 90, 200, 300 et 400 µg/l), which is a
pro-oxidant weed-killer, for 24 hours and 5 days. Measurements of the digestive gland and hemolymphe’s
non-enzymatic antioxidant capacity were done thanks to the TEAC method (trolox equivalent to (?)
antioxidant capacity). After analyses, it turned out that the results depended on the studied tissue.
Intraspecific comparison showed that the population subjected to urban pollution presented the best
hemolymphe antioxidant capacity, which can be explained by the carrier and atmospheric particles
concentration role of the hemolymphe. The digestive gland of the population from the unpolluted site had
a good antioxidant capacity, which may be due to its diet. Interspecific comparison showed that Cepaea
nemoralis seemed to have a better antioxidant capacity than Cornu aspersum. The interspecific
differences observed might be attributed to different diet choices of the two sympatric species. Many
measurements remain to be done to specify these results, and in order to determine the evolutive potential
of the variation in both taxa.
Key-words: Helicidae, antioxidant capacity, intraspecific variability, interspecific variability, weed-
killer.