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L’efficacité énergétique est désormais considérée par les experts et les dirigeants politiques comme l’une des solutions économique et sociale majeure face à la crise énergétique que nous traversons. Ce colloque, organisé par Rexel et le CGEMP a été l’occasion de tracer des lignes d’action concrètes en matière d’efficacité énergétique et d’approfondir quelques axes de réflexion : - En quoi l’efficacité énergétique constitue-t-elle une solution génératrice d’économies et d’emplois? - Quels sont les comportements des utilisateurs face à ces problématiques et comment les accompagner, en particulier dans les bâtiments d’habitations?- Face à ces évolutions des techniques et des usages, quel doit être le rôle, en France et en Europe, des entreprises du secteur de l’énergie, des pouvoirs publics et des consommateurs?

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Page 1: Colloque Rexel-CGEMP - L'efficacité énergétique : une responsabilité économique et environnementale - Compte rendu

L’EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE :UNE RESPONSABILITÉ

ÉCONOMIQUE ET SOCIÉTALE

Actes du colloque Rexel – CGEMPUniversité Paris Dauphine

le 24 janvier 2012

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I. Introduction :

Patrice Geoffron Directeur du CGEMP, Université Paris Dauphine

Jean-Marie Chevalier Membre du CGEMP, Université Paris Dauphine

Jean-Charles Pauze Président du Directoire de REXEL

Patrice GeoffronDirecteur du CGEMP, Université Paris Dauphine

Quelques éléments de contexteL’énergie est au cœur de très nombreuses problématiques.Au niveau international, l’accident de Fukushima remet en question la production d’électricité d’origine nucléaire. Il est donc important de se préoccuper rapidement de la maîtrise de la demande. Dans le même temps, la crise et l’augmentation des prix de l’énergie engendrent la montée de la précarité énergétique. La question de l’efficacité énergétique de l’habitat est donc cruciale.

La précarité énergétique est une situation dans laquelle les ménages sont conduits à consacrer plus de 10% de leurs revenus aux dépenses énergétiques. En France, 13% des foyers sont concernés et jusqu’à 36% si l’on prend en compte les foyers modestes. Philippe de la Doucette, le patron de la CRE, a annoncé, il y a quelques jours, qu’en 2016 les prix de l’électricité auront augmenté de 30%. Nous avons là une combinaison absolument explosive, sur fond de montée du chômage et de baisse du pouvoir d’achat.

L’efficacité énergétique est la clef de ce problème. Selon les chiffres fournis par l’Union Européenne, l’efficacité énergétique pourrait représenter, en termes de pouvoir d’achat, 1000 € par an et par ménage.

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Jean-Marie Chevalier – économisteMembre du CGEMP, Université Paris Dauphine

Nous sommes à un moment particulièrement difficile de l’histoire de l’énergie, parce que l’histoire de l’énergie se préoccupe désormais du changement climatique, qu’elle avait superbement ignoré pendant très longtemps. Nous sommes dans un monde marqué par d’innombrables insécurités : le futur énergétique n’a jamais été aussi incertain, comme le montrent les événements auxquels nous avons assisté depuis un an : les gaz de schistes qui révolutionnent le paysage américain et leur interdiction en France, l’accident de Fukushima, le printemps arabe dont on n’a pas vu encore toutes les conséquences, l’interdiction nucléaire allemande… Le paysage est agité et turbulent. On se demande quel sera le prochain évènement de crise.

Dans un tel contexte, réfléchir à l’efficacité énergétique, est un jeu qui est gagnant-gagnant mais encore faut-il la financer. Les discours du ministre Eric Besson font apparaître l’efficacité énergétique comme stratégique. Elle apparait dans tous les scénarios.

Certains me contrediront peut-être, mais il n’y a pas de travaux de comparaison. Rexel a publié un baromètre, qui mesure très concrètement la question dans différents pays. La directive européenne sur l’efficacité énergétique est très importante. C’est un texte extrêmement intelligent, dont nous parlerons tout à l’heure.Plus récemment, la table ronde organisée par le gouvernement sur la question, est une preuve que le mouvement s’accélère.Dans la plupart des scénarios, la part de l’électricité augmente dans la consommation énergétique. C’est un problème, notamment à la pointe. L’électricité est devenue depuis une quinzaine d’années un bien essentiel, dont on ne peut plus se passer. La panne de 1999 avait un côté « fun », c’était amusant, insolite de rester sans électricité pendant quelques heures. Aujourd’hui, quand on ne peut plus charger nos appareils quotidiens, c’est grave.

Le financementNous sommes à un moment difficile. Les collectivités sont limitées, les utilities ne sont plus aussi riches qu’elles l’étaient il y a quinze ans. Les prix de l’électricité ne reflètent pas forcément les coûts. La déclaration de M. de Ladoucette est à la fois courageuse et très prudente.Il a dit, toutes choses étant égales par ailleurs, qu’en fonction des textes existants (lois, règlements), le prix de l’électricité devrait augmenter de 30% entre 2012 et 2016. Tout le monde dit que les prix de l’électricité sont moins chers en France qu’ailleurs, c’est vrai et faux car cela ne tient pas compte des coûts d’entretiens de notre structure qui vont inévitablement augmenter. Autrement dit, les ménages dans notre pays vont être soumis à une pression d’augmentation des prix des biens nécessaires, et ceci va peser sur le pouvoir d’achat. La précarité est une question majeure. Il faut envoyer aux consommateurs les bons signaux. Les prix augmentant, ils vont être de plus en plus sensibles à la réduction de leur consommation.

La Cour des Comptes a bien noté que le Grenelle de l’environnement devait être financé par des transferts de crédits. Cela n’a pas été fait par manque de volonté, et, par manque de courage, on recule encore la question de la taxation du kérosène des poids-lourds. C’est reculer pour mieux sauter. Éviter des choix courageux pour ne pas prendre de risques électoraux. Il faut utiliser des recettes fiscales pour financer des projets dans lesquels l’efficacité énergétique vient en premier et aider les foyers les plus modestes. Non pas donner un chèque, mais une action structurelle incitative.

Il y a donc plusieurs plans à prendre en compte : une dimension économique, financière, politique et sociale. Une dimension sociale (pas au sens politique) qui va s’accentuer dans les mois qui viennent.

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Jean-Charles PauzePrésident du Directoire de REXEL

Pourquoi est-ce que Rexel intervient dans ce débat ? Dans notre quotidienneté d’industriel, on retrouve les questions abordées autour de cette table. La première constatation est que l’on fait face à un problème global, qui doit être lu sous de multiples dimensions.

Deuxièmement, et là c’est l’entrepreneur qui vous parle, nous sommes dans un monde extrêmement mouvant. Notre quotidien se trouve confronté à ces questions, nous devons trouver des réponses, développer des partenariats. Voilà pourquoi nous nous trouvons autour de cette table.

La mise en place des solutions d’économies d’énergie est un élément important de notre activité : comment adapter nos propositions face aux exigences des constructeurs ? Cet aspect technique est déjà ancien.Quelque chose de plus nouveau est l’adaptation des comportements. Que se passe-t-il sur la partie aval de la chaîne, du côté des usages ? Ça, on y était moins préparé. Nous travaillons du côté des professionnels, qui ne sont pas au bout de la chaine. Depuis 2008, nous mettons en place un effort pour nous rapprocher de ces problématiques, les comprendre. Symboliquement, nous avons lancé le baromètre l’année dernière. Il en ressort que la valeur d’usage de solutions est extrêmement importante. Créer le business, c’est proposer des solutions à ce constat.

Sur la techniqueIl y a toute la partie passive, des intervenants en parleront bientôt. Sur ce point la course est lancée.

Sur la partie active, à savoir les équipements électriques, je partage à 150% l’opinion de Jean-Marie, à savoir que l’électricité convoie de la puissance mais convoie aussi des données. De ce point de vue, elle devient un élément à prendre en compte beaucoup plus qu’avant, face aux risques globaux, systémiques, que peut connaître notre société.

On se heurte à des problématiques d’éducation et de financement. Il faut débloquer des solutions opérationnelles très rapidement. Par exemple, sur les lampes basse consommation, en quelques années on arrive à amortir leur coût, c’est encore un peu long.

Pour ce qui est des « usages », du côté de la consommation d’énergie globale, 40% concerne le bâtiment. Nous sommes donc extrêmement concernés. Le BBC nous amène à des diminutions par quatre ou cinq des consommations ! Les enjeux sont très importants ! Comme cela a été dit tout à l’heure, il s’agit de débloquer un pouvoir d’achat supplémentaire de 1000 € pour un foyer. On l’a bien vu dans notre panel, sur la première question liminaire : 90% des sondés considèrent que c’est un vrai sujet ! (étude menée dans quatre pays – France, Angleterre, USA, Allemagne – sur des panels de l’ordre de 1000 personnes). Là-dessus la crise de 2008 a certainement joué. D’un autre côté, quand on pose la question : est-ce que vous vous sentez à l’aise ? Est-ce que vous connaissez les mécanismes comme le prêt à taux zéro ? Seuls 40% des gens répondent qu’ils comprennent. Le fossé est donc énorme.

Il est clair que notre capillarité, le fait que nous touchions des milliers de clients, nous offre un rôle tout à fait particulier et une responsabilité pour débloquer, faire avancer cette situation.

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II. Conférence

Philippe Pelletier Président du Comité stratégique du Plan bâtiment du Grenelle

Armand Ajdari Directeur de la R&D, SAINT-GOBAIN

Silvia-Adriana Ţicău Député européen, Spécialiste des questions énergétiques, Rapporteur en 2008-2010 pour la directive sur la performance énergétique des bâtiments

Bernard Laponche Expert en économie de l’énergie

Colette Lewiner Directrice internationale, secteur énergie, CAPGEMINI

Fabien Roques Directeur de l’IHS CERA (Cambridge Energy Research Associates)

Philippe Pelletier – avocat, Président du Comité stratégique du Plan bâtiment du Grenelle

J’aimerai me concentrer aujourd’hui sur la question de la rénovation des bâtiments existants. Je laisse de côté l’aspect très important des normes pour les nouvelles constructions, car le sujet le plus important est celui de la rénovation.

Remarque liminaireQuel est l’enjeu de l’efficacité énergétique dans le bâtiment ?Les trois points que je développerai ensuite viendront répondre à cette question.La prise en compte de l’efficacité énergétique dans le bâtiment va tout changer. Pour reprendre un mot qui a eu son succès en 2007, on est dans la rupture. Il ne s’agit pas de faire un peu mieux qu’avant, mais différemment. Un chantier qui doit conduire à la construction d’un immeuble sobre en énergie, ou à la rénovation d’un bâtiment, ne se conduit pas comme un chantier d’hier. L’adjonction des métiers autour d’un même sujet ne suffit pas, il faut qu’ils travaillent ensemble. Sinon, par exemple, l’imperméabilité à l’air du bâtiment sera mauvaise. Si en même temps, nous ne changeons pas nos comportements d’usagers (bureau, habitat), il est clair qu’il ne se passera pas grand-chose. Et si les propriétaires ne prennent pas en compte le coût des travaux à effectuer dans ce domaine, la valeur de leur bien se dégradera. Des changements profonds sont sous-tendus par ce paramètre nouveau qui est le coût de l’énergie dans le bâtiment, et donc la recherche de l’efficacité énergétique.

L’aide aux plus fragilesJ’ai pesé, dans mon action, pour que le plan bâtiment du Grenelle ne soit pas dirigé vers les plus solvables d’entre nous. Il y a une situation de précarité énergétique dans notre pays. Les chiffres disent qu’aujourd’hui plus de 3 800 000 ménages consacrent 10% de leurs revenus à se chauffer. La stratégie des années passées étaient de les aider à payer leur facture (fond de solidarité logement, prime à la cuve, etc.). De cette stratégie d’hier, on est passé à l’idée que l’argent public doit être utilisé pour que les factures soient maitrisées ! C’est-à-dire des gestes simples : isoler le toit, changer les fenêtres, moderniser le système de production de chaleur. C’est un programme à 1.3 milliards d’euros, passé avec l’Agence Nationale de l’Habitat (ANAH), qui a pour objectif de sortir, en 6 ans, 300 000 ménages de la précarité énergétique. 300 000 sur plus de 3 millions, ce n’est pas suffisant, mais c’est déjà un effort énorme.C’est, contrairement aux idées reçues, une population âgée, de propriétaires, située dans des territoires ruraux, dans des pavillons individuels. En même temps se pose la question de la dépendance ! Question importante qui est maintenant bien lancée.

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L’aide au plus grand nombreVous avez tout à l’heure évoqué le fait que les outils sont compliqués, mal connus. Le plan de rénovation de notre habitat s’inscrit dans la longue durée : jusqu’en 2050, sur deux générations. J’essaie de combattre l’idée qu’il faut accélérer, forcer le pas. Pourquoi ? Parce qu’au-delà de l’effort concret, nous avons besoin de passer par une longue étape d’acculturation de toute notre société, qui n’est pas naturellement destinée à rénover son habitat. Interrogez-vous, comparez avec l’habitat de vos parents : qu’est-ce qui a changé ? Oui vous avez changé le papier-peint et la moquette, mais souvent pas beaucoup plus que cela. Nous n’avons pas une tradition de rénovation, l’habitat reste dans son jus.

En même temps, il faut que nous établissions une offre de service qui soit pertinente avec les demandes des propriétaires (ne pas créer de déception). Tout cela demande un peu de temps. Nous sommes dans un processus de montée en gamme de la capacité des entreprises. Les aides ont tâtonné à se mettre en place, mais le système est désormais prêt.

Doit-on passer d’une incitation à une obligation de réaliser des travaux d’efficacité énergétique ?La loi Grenelle II a prévu que le parc tertiaire devait entreprendre des travaux entre 2012 et 2020. Les pouvoirs publics m’ont demandé de préparer le décret qui établirait ce que seraient ces travaux d’efficacité énergétique. Ma question est la suivante : est-ce qu’il est responsable aujourd’hui (oublions l’échéance présidentielle) d’imposer aux entreprises la mise en œuvre de travaux sur les locaux ?Alors que les collectivités territoriales sont dans l’incapacité de financer ces programmes ?Mais il n’y a pourtant pas d’autres solutions. Ne rien faire, c’est s’exposer à une image pitoyable, faire c’est prendre en compte qu’il y aura une application molle du décret. Je suis donc dans la phase où je ne sais pas quoi recommander au gouvernement. L’outil est prêt…

La seule bonne nouvelle, c’est que sur les 40% d’économies d’énergie que l’on doit collectivement atteindre d’ici à 2020, on sait que la moitié réside dans l’ajustement de nos comportements. Réglages plus fin des thermostats, maintenance plus attentive… peut-être peut-on déjà lancer ce premier volet ? Il nous restera encore 20% à atteindre, mais cette première partie est plus simple.

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Armand AjdariDirecteur de la R&D, SAINT-GOBAIN

J’apporte le témoignage d’un industriel : Saint-Gobain, c’est 40 milliards de chiffre d’affaire, un groupe international, 400 millions d’euros de R&D. Nous sommes l’acteur du bâtiment qui avance le plus en termes de solutions technologiques. Notre objectif est d’être le leader industriel de l’habitat durable. Proposer un logement confortable, c’est notre métier. Surtout, par rapport aux transports ou à l’activité industrielle, il faut savoir que les bâtiments représentent 40% de notre consommation énergétique !

L’optimisation a été extrêmement faible ! Le parc immobilier existant est, par rapport à ce que l’on sait faire, est une véritable « passoire thermique ». On n’est pas dans une situation où il faut une rénovation technologique, les solutions existent, elles ne sont simplement pas déployées. Nous n’avons pas encore la filière prête pour les mettre en œuvre. C’est une vraie révolution à effectuer : notre plus gros réservoir d’énergie sur la planète se trouve dans l’efficacité énergétique de nos constructions. Il se construit bien plus de logements en Chine en un an de ce qu’on l’on aura rénové chez nous en vingt ans.

Si nos logements sont des « passoires » et que notre filière est peu formée, c’est parce que nous nous posons trop peu la question d’un bâtiment adapté aux contraintes climatiques, culturelles, sociales, locales. Il faut une enveloppe, un matériau performant et adapté pour entourer nos constructions. Mais ces constructions ne donnent leur pleine mesure énergétique qu’avec des équipements électroménagers qui consomment peu. On peut faire des énergies renouvelables indépendamment des bâtiments, mais ce serait peu efficace… Nous devons apprendre à penser les bâtiments comme des mini-centrales. Il y a possibilité de distribution d’énergie à l’échelle du bâtiment qui est adaptée, les énergies renouvelables sont tout à fait intégrables à un bâtiment. À tout cela se mêle des questions culturelles et d’éducation : on peut avoir un double vitrage très performant, si on laisse la fenêtre ouverte cela ne sert à rien.

Un point que l’on ne développe pas suffisamment est la relation commerciale et la pédagogie. Par rapport à d’autres secteurs industriels, le BTP a besoin de « démonstrateurs ». C’est infiniment plus difficile et complexe de faire des démonstrations de bâtiments performants que de faire des démonstrations de téléphones performants.  Un exemple : la maison multi confort. Elle consomme moins de 40 kW/h par m2 par an, et en produit plus de 60 grâce au photovoltaïque. La maison en elle-même produit plus d’énergie qu’elle n’en consomme et surtout elle en consomme peu. Développement d’un vitrage qui isole en hiver et en été : fraicheur de l’atrium en été, confort thermique en hiver.

Philippe Pelletier« Cette maison est belle ! Il faut tordre l’idée qu’avec nos normes on ne va savoir faire que des thermos ou des blockhaus. En termes d’esthétique, nous devons également faire évoluer les mentalités. Les normes énergétiques n’imposent pas forcément un bâtiment laid ! Et son coût est à peine supérieur à celui d’une construction classique. »

Armand AjdariUne autre particularité dans le neuf est qu’actuellement, on décide de la performance énergétique d’un bâtiment au moment des plans. Mais ensuite il n’y a pas de mesures concrètes réalisées ! Du coup, les acheteurs se demandent souvent si les promesses sont tenues. C’est assez dommageable, une automobile est vérifiée après avoir été construite !

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Notre secteur doit clarifier son expertise avec le développement de labels contrôlés. Le juge de paix, ce devrait être la consommation après un an. Trop souvent le particulier relève des consommations supérieures à celles qu’on lui a promis.

Sur la rénovationEn 2050, plus de 70% des bâtiments qui existeront existent déjà. La rénovation est donc le premier chantier. L’acte de rénovation, en général, est souvent déclenché par un événement qui n’est pas économique, mais quand votre maison va être sale ou abimée. Sachant que c’est le premier réservoir d’énergie sur la planète, c’est presque criminel de laisser faire des rénovations de bâtiments qui ne prendraient pas en compte l’aspect énergétique. Il faut la lisser en permanence, pas seulement une fois tous les 20 ans. Quand on rénove un bâtiment, il faut prendre en compte l’énergie. L’incitation publique doit orienter dans cette voie, la rénovation c’est plus difficile que le neuf. Pour les bâtiments publics, on peut envisager que la puissance publique assume son leadership, effectue des travaux, et propose ensuite des démonstrations.

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Silvia-Adriana Ţicău – Député européen Spécialiste des questions énergétiques. Rapporteur en 2008-2010 pour la directive sur la performance énergétique des bâtiments

Voici les principaux objectifs de la directive sur l’efficacité énergétique lancée par le Parlement européen :

Réduire de 20% la consommation d’énergie d’ici à 2020 tout en satisfaisant mieux les besoins minimaux en matière de consommation d’énergie (rénovation, changement des mentalités etc.). Chaque État membre peut déterminer son taux de réduction, mais ce ne sera pas moins de 20%.

Promouvoir et mettre en place des compteurs intelligents. Mettre en place des systèmes de qualification et de mesure de l’efficacité énergétique,

notamment pour les bâtiments.

Cette directive établit un cadre commun pour la promotion de l’efficacité énergétique et l’objectif fixé est prioritairement une réduction de 20 % des consommations d’énergie. Chaque État membre doit veiller qu’à partir du 1er janvier 2014, 3% de la surface au sol des organismes publics soit rénovée chaque année.

Par ailleurs, les États membres doivent établir un mécanisme d’obligation en matière d’efficacité, pour assurer que les distributeurs d’énergie effectuent chaque année une réduction de 1.3 % de leur vente d’énergie en volume par rapport aux ventes de l’année précédente. Les États membres veillent également à ce que les consommateurs soient dotés du compteur dit intelligent, qui mesure avec précision les consommations réelles. Le 1er janvier 2014 au plus tard, les États membres devront communiquer à la Commission un gain national en matière de chaleur et de froid visant à développer le potentiel de la cogénération à haut rendement et des systèmes de chauffage et de refroidissement urbain. En parallèle, ils devront évaluer la performance de leur système énergétique national.Le 30 avril de chaque année, les États membres devront rendre compte des difficultés nationales rencontrées sur tous ces points.

Amendements discutés au ParlementAu Parlement, cette directive est très discutée. Les amendements essaient de toucher les objectifs obligatoires comme ceux qui sont à titre indicatifs, et de s’attaquer à la question de la pauvreté. Nous discutons également le chiffrage des objectifs et la temporalité (nombre de mètres carrés à rénover chaque année, délais, etc.)

Sur tous ces points les ressources financières sont bien sûr très importantes. On ne peut pas demander aux foyers de rénover leurs bâtiments si on ne fournit pas aussi les aides nécessaires. C’est pourquoi on essaye d’augmenter le pourcentage des fonds structurels qui peuvent être attribués aux États membres pour travailler à l’efficacité énergétique.Or beaucoup de fonds affectés à des tâches connexes pourraient être mieux utilisés.

Propositions du ConseilLe Conseil a commencé à travailler sur ces sujets. Il n’est pas arrivé à un accord final, mais la présidence danoise a affiché le sujet comme l’une de ses priorités. On va essayer d’arriver un accord en première lecture au Parlement, pour justement pouvoir saisir la présidence danoise.

En ce qui concerne l’objectif des 3% de rénovation de surface au sol, le Conseil voudrait exclure les administrations locales, ainsi que les bâtiments religieux ou qui ont une importance historique ou culturelle.

À propos des compteurs intelligents, le Conseil propose qu’ils soient offerts aux particuliers (80% des citoyens devront en être équipés d’ici à 2020, en ce qui concerne l’électricité). En

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matière de chaleur et de froid, la Commission réfléchit à une méthodologie pour une analyse coûts/bénéfices de chaque type de travaux.

Objectifs futurs du ParlementLe Parlement est très ambitieux et veut aller encore plus loin. Nous souhaitons un accord en première lecture, pour profiter de la présidence danoise et ne pas perdre encore six mois.

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Bernard Laponche – Physicien nucléaire, ingénieurExpert en économie de l’énergie

Ma première réaction est de dire « enfin » ! Parce l’efficacité énergétique n’est pas née de la crise de 2009. Nous nous penchons sur l’efficacité énergétique aujourd’hui, le thème devient un enjeu politique mais beaucoup le disent depuis bientôt un demi-siècle… Ces réflexions sont nées en 1974 après le 1er choc pétrolier.

Si l’on penche aujourd’hui sérieusement sur la question, beaucoup de choses ont néanmoins été faites, notamment au niveau européen. Si on était resté sur la courbe de consommation d’électricité de 1974, on aurait consommé, en 2010, le double. Les directives européennes et l’ensemble des actions ont donc pesé, même si on peut aller beaucoup plus loin.

C’est un sujet complexe à ne pas prendre à la légère. L’efficacité énergétique prend autant en compte des questions règlementaires que fiscales, mais aussi des thématiques sectorielles. Aujourd’hui, la majorité de nos débats portent sur les bâtiments, mais il y a aussi des normes d’efficacité énergétique dans l’industrie, dans les transports. On réfléchit souvent, sur ce sujet, en termes de production, d’offre d’énergie. Hors la demande est aussi variée, complexe et intéressante que l’offre ! Les efforts à faire sont aussi importants que sur l’offre. Il faut réduire nos consommations, pas seulement consommer moins… La moitié de la consommation d’électricité dans le secteur résidentiel et tertiaire est faite par de la consommation spécifique : équipements audiovisuels, informatiques, etc.

Ce qui est important, c’est la réduction des énergies primaires. Cet engagement de réduction s’applique également à l’électricité, où le potentiel de réduction des consommations est énorme. 50% de la consommation est dite « spécifique » : consommation due à l’électro-ménager, les appareils, etc. Et là ce n’est plus même type d’entreprise qui est concerné : ce sont les producteurs d’objets électroménagers.

Les objectifs politiques actuels sont ambitieux face à notre structure économique.Par exemple, les moteurs représentent 70% de la consommation d’électricité dans l’industrie. Il faut absolument progresser dans l’efficacité électrique des machines industrielles. Au niveau de la consommation globale : les transports représentent 3%, contre 60% pour le chauffage ! Cela ne me gêne pas d’augmenter la part consacrée aux transports : si elle est multipliée par 3 pour arriver à 10% de notre consommation totale, l’effort fourni en matière de transport aura été considérable.

Sur la question de l’organisation de notre systèmeLes best-practices ne sont pas quelque chose d’inconnu ! Nous avons une expérience accumulée importante dans l’ensemble des secteurs. Mais c’est beaucoup plus une question de volonté politique. La difficulté est que l’efficacité énergétique est une activité très horizontale qui s’adresse à un ensemble de secteurs, et on ne peut pas tout renvoyer sur le comportement des consommateurs. On a besoin d’intermédiaires, de gens sur le terrain qui soient experts du domaine : quand vous êtes un maire en France qui veut faire des choses, vous ne savez pas à qui vous adresser.

Premier besoin : la création d’un réseau de « capacité ».Par ailleurs, un point dont on parle assez peu souvent : les expériences pilotes, qui souvent ne restent que pilotes, notamment quand il s’agit de financements fournis par l’État).

Second besoin : le financement. Il faut des mécanismes financiers incitatifs.Par exemple, on pourrait créer une SEM qui joue un rôle intermédiaire entre les consommateurs et les industriels. L’objectif est que les consommateurs puissent se rembourser sur les économies réalisées sur leurs factures, mais pour cela il faut des fonds de départ.

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Colette LewinerDirectrice internationale, secteur énergie, CAPGEMINI

Plutôt que de parler au niveau macro, voici une présentation de plusieurs expériences intéressantes en matière d’efficacité électrique permettant de montrer l’impact des équipements techniques et de la tarification sur les comportements des clients :

L’installation de compteurs intelligents en ItalieCompteurs à lecture automatique. Première expérience européenne initiée de 2002 à 2009. Niveau très élevé des pertes sur les réseaux domestiques à cause des nombreux vols d’électricité. Le compteur intelligent à lecture automatique a permis d’éviter ces vols/pertes. La qualité du service s’est nettement améliorée mais les économies sur les factures restent minimes. Ils représentent malgré tout un bon retour sur investissement améliorant la sécurité des usagers et la distribution.

Les tarifs différenciés au CanadaEn Ontario, l’État a mis en place des tarifs différenciés qui dépendent de la période d’utilisation (été, hiver, vacances…). En période de pointe, les tarifs sont les plus élevés. Installation indispensable de compteurs communicants pour réaliser cette expérience. Le résultat est très positif puisque cette expérience a conduit à un lissage de la consommation de pointe et à un déplacement vers des heures moins chargées. Au total, baisse de 6% de la consommation générale pour les 75% des clients impactés par le programme.

Les boules lumineuses en CalifornieExemple de technologie plus primaire. En Californie, les fournisseurs d’énergie ont décidé de fournir aux clients qui le souhaitent une boule changeant de couleurs selon la période de consommation. Cette technique, toute simple, qui n’impacte en rien l’offre d’électricité, a des résultats surprenants d’efficacité. On se rend compte ici que la sophistication des éléments ne va pas obligatoirement de pair avec les économies engendrées. Les consommateurs se régulent eux même suivant les changements de couleurs de la boule. Cela entraine une baisse de la consommation lors des périodes de pointe. Impacts importants sur le comportement des clients.

En Europe, on parle beaucoup des compteurs intelligents, mais il faut que l’utilisateur interagisse avec le compteur pour qu’il y ait des résultats (ce qui n’est pas le cas de la première génération de Linky, qui ne permettait pas de savoir de combien était sa consommation). Le problème des données personnelles est une vraie limite, alors que les américains confient la gestion de leur énergie à des entreprises spécialisées, voire directement aux fournisseurs.

Un dernier point essentiel : l’information des consommateurs.Il faut lister les différents comportements des clients : segmentation, méthodes de marketing et communication sont essentielles pour informer les consommateurs de la manière la plus directe possible. C’est avant tout par le changement de comportement que l’on arrive à une meilleure efficacité électrique, comme le montre l’expérience des boules lumineuses. Ce sont les dispositifs les plus simples qui remportent le plus de succès.

Les compteurs intelligents seuls ne suffisent pas. Il faut que l’on mette également en place des affichages dans le salon, la cuisine, sur les Smartphones pour que le consommateur ait en temps réel l’affichage de sa consommation et ne surtout pas laisser le compteur dans le garage. C’est l’une des conditions de la réussite du système.

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Fabien RoquesDirecteur de l’IHS CERA (Cambridge Energy Research Associates)

L’objectif affiché de l’Union européenne est une baisse de 20% de la consommation d’énergie, mais actuellement nous sommes plus près des 10-11%. Chiffres similaires à ceux que la Commission européenne a évalué dans certaines études.

Plusieurs technologies ont le potentiel pour nous aider à réduire notre consommation, que ce soit dans le secteur résidentiel ou dans le secteur commercial. Ces potentiels sont présents dans la définition d’un « scénario vert » aux objectifs identifiés par la directive éco-design de l’UE.

Dans le secteur résidentiel, on a, par exemple, le stand-by des appareils. C’est une chose assez simple pour faire des économies d’énergie et qui permet de rendre obligatoire l’extinction complète des appareils quand ils sont en veille. Vous l’avez peut-être remarqué avec les nouveaux téléviseurs. C’est une évolution considérable, un exemple de politique publique dont on voit l’impact aujourd’hui.

Dans le secteur commercial et les industries, les potentiels sont plus difficiles. Ils concernent notamment l’éclairage, le chauffage qui sont les éléments principaux des gros chantiers. Le message à retenir est donc que nous avons identifié les objectifs et les technologies à mettre en place.

Au niveau du bâti, une limite est intéressante à étudier : la théorie économique du principal agent. On manque souvent d’information lors de l’achat d’un bien sur l’efficacité énergétique. De même, lorsque l’on est propriétaire, on n’a pas intérêt à investir dans des charges qui ne rapporteraient qu’au locataire. À l’inverse, quand on est locataire, on n’a pas intérêt à faire soi-même des travaux qui ne seront rentables qu’au bout de 10 ans, alors qu’on ne sera certainement plus locataire des lieux.

Un autre problème en matière de finance, le financement des taux de retour. Le financement de départ n’est pas toujours possible, et le taux de retour souvent inconnu ! Cette double peine fait que les investissements en efficacité énergétique sont encore difficiles.

Un exemple très prometteur, le green deal en Angleterre :Plusieurs éléments novateurs en matière de rénovation du bâti : réduction, voire annulation, du coût d’investissement initial, démarches administratives simplifiées… Le gouvernement a mis en place une banque publique d’investissement qui prête à des taux réduits. Les particuliers et les banquiers recherchent un phénomène d’équilibrage : on attache le remboursement du prêt au bien lui-même. Si on revend un logement à quelqu’un, on revend également le prêt effectué pour les travaux d’efficacité énergétique. Cette technique est en train d’être déployée à grande échelle. Pour l’instant le Royaume-Uni est le pays qui a été le plus loin en Europe.

L’efficacité énergétique se pose également en termes de gestion du réseau. Sur ce sujet, deux problématiques sont à distinguer : la maitrise durable de la demande et l’effacement (qui constitue une réduction à la pointe, mais non permanente). Les deux ont une valeur pour le système. Il y a eu un développement très rapide des techniques d’effacement depuis 2005 aux USA.À l’inverse le potentiel d’effacement en France n’a cessé de se réduire depuis 2000. On consomme plus. En 2000, on pouvait compenser une chute de 4 degrés de température simplement grâce à l’effacement. Aujourd’hui, ce n’est plus qu’un degré en équivalent puissance. En 10 ans, nous sommes devenus beaucoup fragiles face à la thermo sensibilité, à cause de l’augmentation de notre consommation.

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III. Questions / réponses

Qui a intérêt à faire ce marketing sur les questions énergétiques ?

Colette LewinerLe consommateur certainement mais on peut se demander ce qu’il en est des utilities ? Elles n’ont pas intérêt à baisser leur chiffre d’affaires. C’est plutôt l’effacement qui les intéresse. On a donc un besoin de changement du modèle à travers des certifications réglementaires. Pour la pointe de consommation, il y a un intérêt économique à la réduire ! Pour le reste, le régulateur californien a obligé les utilities à augmenter leurs tarifs, si et seulement si, elles réduisaient les consommations d’électricité… la réduction des consommations est donc rémunérée ! Changement de paradigme pour les compagnies de services énergétiques, et pas seulement pour celles qui vendent des kWh.

Fabien RoquesQui a intérêt ? Aujourd’hui, nous n’avons pas de système économique qui rémunère ces services. Nous devons donc créer un espace économique qui rémunère les économies d’énergie ! Aujourd’hui on achète de l’énergie, demain on achètera le service que procure cette énergie.Une fois que l’on aura mis en place ce système, ce seront bien évidemment les consommateurs, mais également tous ceux qui gravitent autour de ce champ d’innovation important, qui en bénéficieront.Cela concernera l’ensemble des acteurs, des équipementiers aux fournisseurs.

Philippe PelletierIl faut réfléchir à la question de la valeur des actifs. Par exemple : à la Défense, les grandes entreprises ont une politique d’achat de locaux qui répond à un score énergétique. Les promoteurs doivent s’adapter, proposer des bâtiments plus économes en énergie, et les fournisseurs s’adapteront.C’est la même logique au niveau des particuliers : les agences immobilières sont placardées d’affichettes qui mesurent la performance des biens.

Existe-t-il une véritable industrie française de l’efficacité énergétique ?

Jean-Charles PauzeNous devons créer une filière prenant en compte l’efficacité énergétique. Nous devons mettre ensemble un certain nombre de blocs importants.

Les constructeurs font évoluer leurs propres produits mais c’est la capacité à mettre ensemble qui est importante. Il ne faut pas créer de services distincts. Oui l’industrie existe en France, mais c’est la cohérence entre les acteurs qui est à travailler.

L’industrie n’est pas assez informée, elle n’est pas capable de s’orienter donc il faut faire un grand travail pour informer mais surtout pour former les différentes parties prenantes.Nous avons ajouté énormément de valeur ajoutée à ce bloc. Il faut maintenant travailler sur la cohérence du système pour témoigner de sa réussite.

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Est-ce que l’efficacité énergétique représente un surcoût élevé par rapport à un ensemble de travaux de rénovation ?

Silvia-Adriana Ţicău La directive européenne exige que si le coût de la rénovation dépasse un certain seuil, c’est l’instance publique qui prend en charge le coût supplémentaire. Il faut tout mettre en œuvre pour que l’on tienne compte du bénéfice énergétique de la rénovation.

Philippe PelletierLa question de l’accessibilité des bâtiments devra être un prétexte pour traiter cette question des travaux et des coûts de la rénovation. Les fédérations du bâtiment indiquent que le budget des travaux énergétiques représente près de la moitié du budget total français consacré à la rénovation de bâtiments. C’est donc un coût élevé, et en même temps une évolution logique du secteur immobilier. Le bailleur a tout intérêt à ce qu’un immeuble continue à progresser. Le contrat de performance énergétique est intéressant à ce titre : on fixe contractuellement un objectif de performance ! C’est très nouveau.

Philippe Pelletier a expliqué que la rénovation était une rupture pour le bâtiment. Il a bien expliqué que l’objectif était une transversalité entre plusieurs corps de métiers pour faire un objet nouveau. On voit bien que dans le domaine énergétique, il y a une transversalité obligatoire. Si on passe du bâtiment à l’éco quartier, on voit que la transversalité augmente encore. Il y a une intégration de plusieurs corps de métiers qui contribuent à l’efficacité énergétique. Même si l’efficacité énergétique commence à être bien comprise, elle est encore trop souvent traitée par secteur. On peut se poser la question au niveau national, est-ce qu’il n’y a pas un raisonnement transverse et prospectif pour arriver de manière efficace à cet objectif efficacité énergétique ?

Philippe PelletierJe réagis à ce propos avec lequel je suis complétement en phase par deux observations : l’une pour illustrer votre propos, l’autre pour y ajouter un élément.

L’illustration c’est ce qui est en train de se produire, c’est un processus de qualification des entreprises. Les fédérations ont accepté l’idée qu’à partir de 2014, seules les entreprises qui justifient d’une qualification particulière pourront effectuer des travaux comprenant une aide de l’état (comme l’éco-prêt à taux zéro).

Deuxièmement, l’efficacité énergétique transforme aussi les équilibres réglementaires. La demande est de plus en plus exigeante et va faire appel à des connaissances de plus en plus pointues.

Bernard LaponcheJe suis convaincu que l’intérêt du développement de la transversalité doit être un effort collectif. Il en est de même avec les communautés urbaines et périurbaines en matière de développement des transports collectifs.

Par contre, je ne suis pas convaincu du développement des moyens individuels. Je ne suis pas contre, mais je n’y crois pas. Il y a de plus en plus de transports collectifs mais on ne peut pas se fixer sur le développement des véhicules électriques, je ne pense pas que ce soit la bonne manière de changer les comportements.

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AuditeurIndustriel engagé dans le développement des véhicules électriques, je pense qu’il y a une pluralité de solutions. En leur sein, le développement des véhicules électriques est une solution.

Sur le plan général du bâtiment, pour moi, la société et la puissance publique ont intérêt sur le long terme à faire des économies d’énergies, elles sont rentables sur le long terme. On y vient doucement.

Doit-on rendre obligatoire ou pas l’efficacité énergétique aux entreprises ? Les économies d’énergie permettent d’amortir les investissements à venir. Le contexte est important car quand la situation économique va bien on ne pose pas la question mais dans le cas contraire, la situation est complexe. L’argent public doit donc aider et permettre que la situation reste égalitaire, il doit subventionner les formations et contrôler les prêts.

A-t-on un retour sur les mesures publiques qui fonctionnent ou pas ?

Armand AjdariOn parle d’économie et d’efficacité énergétique, il y a la représentation environnementale associée et le lien direct avec le CO2 qui est un moteur important pour l’image et l’orientation de l’entreprise.

Recruter des gens avec un meilleur niveau permet d’être plus efficace. C’est un moteur interne pour l’entreprise. On a une sensibilisation d’une partie des utilisateurs finaux car ils ont accès à de plus en plus d’informations.

Les clients nous parlent de ce qu’ils trouvent sur internet, des éléments, des indicateurs et il faut répondre à ces nouvelles attentes et demandes. Il existe une sollicitation des clients et des artisans quant à la formation (partie réglementaire et incitative), et aux offres et produits utilisés. Ce sont des gens qui ont un discours fort et mobilisant.

Philippe PelletierLa Cour des Comptes vient de déposer un rapport assez sévère sur les dépenses du Grenelle, mais le plan bâtiment ne subit pas cette sévérité.

La mesure la plus coûteuse et la moins efficace c’est le crédit d’impôt développement durable. Globalement le gouvernement joue du crédit d’impôt développement durable en haussant la performance de certains équipements mais cela est difficilement lisible.

À l’inverse, un éco-prêt collectif pour les copropriétés, pour prêter de l’argent aux propriétaires, est plus simple et efficace.

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Au sujet des instruments de politique publique et notamment des crédits d’impôt, quelle est leur efficacité ?

Colette LewinerOn peut imaginer des solutions réglementaires mais à condition qu’elles soient respectées. Mais elles sont rarement appliquées. Est-ce que l’on va vérifier les emplois des subventions ? C’est complexe et je n’ai pas confiance dans les mécanismes trop complexes qu’on n’arrive pas à faire respecter.

Bernard LaponcheOn peut imposer simplement des standards économiques. Par exemple, la Californie interdit à la vente des équipements qui consomment trop !

Armand AjdariSur le photovoltaïque, des systèmes ont été mis en place par plusieurs États. Dans le cadre de l’efficacité électrique d’un bâtiment, en plus du choix de l’outil particulier, on a la difficulté à tirer la filière par le haut. En respectant la transversalité et la consommation énergétique, une capacité de certification technique doit se développer, ou doit mettre en place un système d’étiquetage plus vertueux et intelligent, sans parler de labellisation. Pour arriver à terme à une sophistication de l’efficacité énergétique des bâtiments.

Fabien RoquesLe crédit d’impôt introduit de la distorsion sur le marché, mais aide à l’éducation. Pour la plupart des équipements retenus par la collectivité, leur prix double ! Comment imaginer des aides d’États qui ne fassent pas monter les prix ?

Colette LewinerAttention aux usines à gaz en matière législative.

Comment structurer les acteurs de la filière pour vendre aux particuliers ? Comment simplifier et formater les offres pour les rendre plus accessibles ?

Silvia-Adriana Ţicău Le Contrat de performance énergétique est important à ce titre. C’est un premier pas pour l’information nécessaire.

Philippe PelletierL’un des premiers sujets c’est la sensibilisation. Il faut saisir l’occasion de la faire !Il faut sensibiliser au sujet du diagnostic de performance énergétique dans les transactions immobilières.Il faut faire travailler les copropriétés sur des audits de performance énergétique.Pour les ménages précaires, on les aide et leur tient la main jusqu’aux chèques travaux. On a mis en place les bouquets de travaux pour regrouper les actions. On peut développer l’idée de travaux pour l’éco-prêt à taux zéro.L’efficacité électrique peut être meilleure si on aide les ménages.

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IV. Conclusion

Jean-Charles Pauze 

Il faut travailler en termes de politique de société.Ce qui est important c’est que la performance attendue, vantée, soit au rendez-vous !Il faut travailler ensemble sur la filière, et sensibiliser l’utilisateur final. On ne peut travailler tout seul. On a besoin de complémentarité et de transversalité pour avancer.La question de l’éducation et de la sensibilisation est également primordiale. Il faut apprendre et montrer aux gens ce qu’est l’efficacité énergétique et les aider à changer les comportements.

Un exemple : en Angleterre, sur des parkings, il nous a fallu à peu près une année pour faire comprendre aux propriétaires qu’il était efficace (retour sur investissement inférieur à un an) de mettre en place des sources à faible consommation et des automatismes télé-contrôlés.Autre exemple : la climatisation des stations-service d’autoroutes. 98% des moteurs de climatisation sont usés, anciens, très consommateurs en énergie… il faut éduquer et créer des déclenchements.

Deux points soulignés dans cette conférence me paraissent cruciaux : L’utilisateur

C’est lui qui supporte beaucoup de chose, il faut l’éduquer en termes d’acceptation des politiques.

Mesurer et faire ensembleOn le voit, les pays en pointe sont ceux où les pouvoirs publics, les fabricants et les autres acteurs travaillent ensemble.

Jean-Marie Chevalier

La question du grand emprunt a été peu évoquée. Une partie de ce grand emprunt va vers l’université, une autre partie vers les projets énergétiques innovants dans le cadre du Grenelle de l’Environnement.Je suis frappé de voir que dans ces projets, il y a une innovation extraordinaire. Si j’étais étudiant à Dauphine, et que j’assistais à ce séminaire, je me dirais : « on est sur quelque chose de fabuleux en termes d’opportunités futures !». On a d’une part des coûts d’énergies à la hausse, et d’autre part une prise de conscience des consommateurs-citoyens de l’efficacité énergétique.

Je me rends compte que tout ce qui a été dit ce soir est un appel à de nouveaux business modèles : un chantier formidable pour créer de l’emploi, de l’innovation, de l’intelligence.

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