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LE PREMIER MAGAZINE DE LA PLACE FINANCIÈRE SUISSE # 138 - Juillet-Août 2018 - FR 10.00 L'INVITÉ Patrick Artus, Natixis REPÈRES La zone Euro en turbulences INVESTIR Les hedge funds se refondent BANQUE & FINANCE CONSEILLER OU ROBOT A qui confier votre fortune?

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Page 1: CONSEILLER OU ROBOT A qui confier votre fortune?...Le «robo-advisor» est souvent choisi pour sa facilité d’utilisa-tion et sa rapidité d’adoption au quotidien. Néanmoins sa

LE PREMIER MAGAZINE DE LA PLACE FINANCIÈRE SUISSE # 138 - Juillet-Août 2018 - FR 10.00

L'INVITÉPatrick Artus,

Natixis

REPÈRESLa zone Euro en turbulences

INVESTIRLes hedge funds se refondent

BANQ

UE &

FINA

NCE

CONSEILLER OU ROBOT

A qui confier votre fortune?

Page 2: CONSEILLER OU ROBOT A qui confier votre fortune?...Le «robo-advisor» est souvent choisi pour sa facilité d’utilisa-tion et sa rapidité d’adoption au quotidien. Néanmoins sa

ROBO ADVISORS

D’un côté, les segments traditionnels exigent de plus en plus de transparence financière de la part de leurs conseillers en inves-tissement et d’un autre, les segments

dits de masse ainsi que les nouvelles géné-rations de clients résolument plus techno-philes, semblent être la cible privilégiée des «roboadvisors»

Ces nouveaux modèles offrent à l’in-vestisseur des solutions portées par

la technologie. Ils couvrent objectifs du client, adéquation des placements et appétit au risque à travers la construction et la supervision de portefeuilles. Ajoutant à cela le niveau actuel historiquement bas des taux d’intérêts, la confiance accrue

aux recommandations générées par ordi-nateurs, l’évolution des super-ordinateurs et du cloud, le succès futur des «robo-ad-visors» est quasi garanti. Dans les marchés émergents, avec des services relativement simples, les «robo-advisors» pallient au

manque de gestionnaires professionnels. Par contre dans des places comme la Suisse, les «robo-advisors» comblent le manque de temps et parfois de compétences des gestionnaires à fournir adéquation et risque efficacement. Ainsi, ils relient mathématiquement les variables de rende-ment et de risques pour fournir une base à la construction automatisée de portefeuilles.

Certains «robo-advisors» utilisent des stratégies passives sur base d’ETF

(fonds indiciels) simples. De ce fait, ils fournissent des solutions d’investissement «low-cost» très attractives aux investisseurs modestes, tant pour le capital initial néces-saire que pour les frais de transaction. En revanche, face à une gestion traditionnelle, ces stratégies de réplication d’indices ont de la peine à prévoir l’évolution des marchés à court terme.

En Europe, et ce malgré les prédictions alarmistes qui voyaient les gestion-

naires de fortune traditionnels se faire «Uberiser» ou «Netflixer», les premiers «robo-advisors» ont quand même eu la vie dure et ont été obligés à faire face à de nombreux obstacles. Manque de notoriété, coûts marketing importants mais primor-diaux pour se faire connaitre, désir des clients plus fortunés à un contact humain ou complexité de certains portefeuilles sont autant de facteurs qui expliquent la part encore très limitée du patrimoine total géré par des robots.

POUR UNE CLIENTÈLE «DE MASSE» ET JEUNES FORTUNÉS

Les premiers «robo-advisors» n’ont en fait atteint que les segments de masse:

des clients autogérés avec un patrimoine limité. Le marché s’est ensuite consolidé et actuellement les meilleures solutions fournissent des interfaces («API») ouvertes ainsi que des solution Web flexibles, qui s’intègrent harmonieusement dans d’autres offres numériques bancaires.

En parallèle, les banques et gestion-naires de fortune ont eux aussi évolué.

Ils ont trouvé des opportunités pour offrir leur propre modèle de «robo-advisor», utilisant comme levier leur notoriété, leur compétence reconnue, leur clientèle et leurs gestionnaires. Les grandes banques ont ainsi vu l’opportunité d’accéder et de servir la génération suivante de clients, certes encore pas très fortunée, mais vouée à le devenir grâce à un important transfert de patrimoine dans les prochaines années. En partenariat avec des «robo-advisors», ces banques ont pu rapidement gagner une expérience et s’offrir une vitrine numérique1.

Une telle évolution est aussi présente en Suisse. Dans un secteur bancaire à

la recherche de solutions d’investissement modernes, digitales, automatisées et adap-tées, de nombreux partenariats sont nés. Certaines banques ont intégré les robots comme offre digitale séparée, fournissant une solution rapide à moindre risque. D’autres ont privilégié des partenariats avec des fournisseurs de données analy-tiques, découplant les données de l’offre elle-même, pour une plus grande flexibi-lité future. Et finalement quelques banques, avec des connaissances numériques et des référentiels de données importants, ont développé leur propre modèle.

Les différents «robo-advisors» se comparent dans leur gestion de l’ex-

périence d’investissement – entrée en rela-tion; profil de risque; sélection de produits; construction de portefeuille; supervision de portefeuille; interaction banque –, et les tarifs associés. Le «robo-advisor» est souvent choisi pour sa facilité d’utilisa-tion et sa rapidité d’adoption au quotidien. Néanmoins sa survie dépend de sa capacité à évoluer, à s’adapter aux avancées dans

le domaine de la prédiction numérique et à ouvrir sa gamme de produits. Ainsi, des éléments comme la transposition de profils de risque en allocations d’actifs, les univers d’investissement personnalisés, le calcul de rendements (stratégies dites actives) et les modèles de concentration des risques sont moins visibles mais résolument importants pour son futur.

La construction de portefeuilles devient alors une pièce centrale mais ne

propose souvent que des recommandations basiques (passives); en intégrant parfois des éléments de recherche financière (active) et plus rarement un volet réglemen-taire ou des préférences clients «bespoke» (sur mesure).

VOTRE COMPAGNON GÉRANT

Malgré certaines offres B2C2 sur le marché, la tendance actuelle est

d’intégrer les fonctionnalités graphiques et/ou analytiques des «robo-advisors» dans d’autres propositions plus complètes. L’entrée en relation numérique d’un client lambda est ainsi personnalisée, voire remplacée par un accompagnement dans l’expression de ses objectifs de vie. Le robot devient alors un compagnon (ou ChatBot) pour identifier, planifier et surveiller la probabilité de réaliser ses buts.

Pour le client plus fortuné de la banque privée, le «roboadvisor» se transforme

en partenaire du gestionnaire. Il augmente ses capacités cognitives et analytiques de conseil pour offrir un meilleur service via un modèle dit hybride. Une telle approche limite ainsi la contrainte de confier une somme importante à un robot et permet au gestionnaire de réaffecter une partie de son temps pour traiter des situations plus complexes.

Les banques et les gestionnaires de fortune sont contraints d’entrer dans

l’ère numérique. En adoptant des modèles digitaux basés en partie sur des «roboadvi-sors», elles peuvent non seulement offrir une vitrine à leur clientèle mais aussi renforcer et épauler leurs propres gestionnaires. Une récente étude3 de marché réalisée par le cabinet Orbium, sur la base du sondage d’une cinquantaine de membres de direc-tion de banques suisses, européennes et asiatiques, a montré que les opportunités de croissance à l’avenir sont principalement axées autour du développement de modèles d’entreprises portés par le numérique. Les banques privées et gestionnaires de patri-moine se doivent d’accélérer leur transition vers le numérique et proposer des offres plus adaptées à l’évolution des besoins de leurs clients. z

LONGTEMPS BASÉE SUR LE RENDEMENT, AVEC UN RISQUE OCCULTÉ OU AGRÉGÉ DANS DES STRATÉGIES DE PLACEMENTS CONSERVATRICES, ÉQUILIBRÉES OU DE CROISSANCE, LA GESTION DE FORTUNE TRADITIONNELLE FAIT FACE À UNE NOUVELLE CONCURRENCE: L’ÉMERGENCE DE NOUVEAUX MODÈLES D’INVESTISSEMENT VIA LES «ROBO-ADVISORS».

Mon partenaire de confiance…

PAR OLIVIER GRANDJEAN, SENIOR MANAGER, ORBIUM

MARCHÉ

JUILLET-AOÛT 2018 | BF # 138 | 76 | BF # 138 | JUILLET-AOÛT 2018

1 par exemple UBS Wealth Management, utilisant Sig Fig comme partenaire pour lancer Smart Wealth, un «robo-advisor» visant les clients dès 10'000 pounds.

2 Business to Customer, i.e. une offre robo-advisory complètement numérisée, s’appuyant sur un partenariat entre le robo et la banque en transparence pour le customer. Le robo démarche directement des clients finaux

3 «Orbium Wealth Management C-Level Survey», https://orbium.com/c-level-survey/