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La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir » 10 e Institut d’été du Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et l’euthanasie (CRISE) Université du Québec à Montréal (UQÀM) 1 er mai 2013 Michèle Marchand, M.D., Ph.D .

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Health & Medicine


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Présentation de Michèle Marchand. Secrétaire du groupe de travail en éthique clinique, conseillère en éthique clinique, direction générale et Collège des médecins. Description de la présentation : - Cette présentation vise à expliquer la position voulant que « l’aide médicale à mourir » puisse être vue comme un soin, approprié dans certaines situations exceptionnelles. Or, dans cette perspective, deux choses sont claires : la souffrance joue un rôle déterminant au plan de la justification morale; l’euthanasie est plus facile à justifier que le suicide médicalement assisté.

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Page 1: CRISE- INSTITUT 2013 ÉTÉ - Michèle Marchand - La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir »

La souffrance comme justification

à une « aide médicale à mourir »

10e Institut d’été du Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et l’euthanasie (CRISE)

Université du Québec à Montréal (UQÀM)

1er mai 2013

Michèle Marchand, M.D., Ph.D.

Page 2: CRISE- INSTITUT 2013 ÉTÉ - Michèle Marchand - La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir »

Cette présentation vise à expliquer la position voulant que « l’aide

médicale à mourir » puisse être vue comme un soin, approprié dans

certaines situations exceptionnelles.

Or, dans cette perspective, deux choses sont claires :

la souffrance joue un rôle déterminant au plan de la justification

morale;

l’euthanasie est plus facile à justifier que le suicide médicalement

assisté.

Page 3: CRISE- INSTITUT 2013 ÉTÉ - Michèle Marchand - La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir »

Il existe des situations exceptionnelles, des douleurs incoercibles ou une

souffrance interminable, par exemple, où l’euthanasie pourrait être considérée

comme l’étape ultime, nécessaire pour assurer, jusqu’à la fin, des soins de

qualité (l’euthanasie et non le suicide assisté).

Dans des situations exceptionnelles où la mort est imminente et inévitable, il

pourrait être approprié de vouloir écourter une agonie difficile (que le patient

soit apte ou inapte).

1. Voir « l’aide médicale à mourir » comme un soin,

approprié dans certaines situations exceptionnelles

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Une perspective médicale

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Les soins appropriés et le processus décisionnel

Les soins sont plus appropriés lorsqu’ils sont le terme d’un processus

décisionnel bien mené.

Ce qui est approprié pour un cas ne l’est pas nécessairement pour

l’autre.

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Le processus décisionnel en situation clinique

En situation clinique, le médecin offre, en raison de ses compétences, les soins qu’il juge le plus objectivement possible appropriés d’un point de vue médical.

Le patient reste évidemment celui qui décide puisqu’il s’agit de sa vie. Pour des raisons subjectives aussi bien qu’objectives, il accepte, refuse* ou demande autre chose que les soins proposés.**

Face à cette réaction du patient, le médecin demeure toutefois responsable des actes qu’il posera. Il accepte de donner suite à la demande du patient, refuse (le cas extrême étant l’objection de conscience) ou propose autre chose, auquel cas la dynamique reprend son cours.***

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Le processus décisionnel : un nouveau paradigme

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L’euthanasie

N’y pensez même pas

Le processus décisionnel

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Une perspective médicale

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Une perspective relativement nouvelle

« Le médecin doit agir de telle sorte que le décès d’un

patient qui lui paraît inévitable survienne dans la dignité. Il

doit assurer à ce patient le soutien et le soulagement

appropriés. »

Code de déontologie des médecins, art. 58

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Une perspective ne faisant pas l’unanimité chez les médecins

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Une perspective ayant ravivé le débat au Québec

Page 13: CRISE- INSTITUT 2013 ÉTÉ - Michèle Marchand - La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir »

Une perspective ayant ravivé le débat au Québec

Page 14: CRISE- INSTITUT 2013 ÉTÉ - Michèle Marchand - La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir »

Le débat sur l’euthanasie et l’argument de l’éthique médicale

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Le débat sur l’euthanasie et l’argument de l’éthique médicale

Les arguments pour Les arguments contre

1. Respecter l’autonomie de patients.

2. Soulager la souffrance

Deux contre-arguments :

On peut la soulager autrement (la sédation)

Une expérience positive.

3. Il est toujours mal de tuer (le double effet).

4. Ce serait contraire à l’éthique médicale.

5. Les dérives

Prévisibles

Prouvées

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2. Dans cette perspective, la souffrance du patient joue un rôle déterminant au plan de la justification morale

Les arguments pour Les arguments contre

1. Respecter l’autonomie de patients.

2. Soulager la souffrance

Deux contre-arguments :

On peut la soulager autrement (la sédation)

Une expérience positive.

3. Il est toujours mal de tuer (le double effet).

4. Ce serait contraire à l’éthique médicale.

5. Les dérives

Prévisibles

Prouvées

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La bienfaisance commande de soulager la douleur, la souffrance et les autres

symptômes réfractaires.

Le choix des moyens :

Les avantages vs Les inconvénients

Soulager Rendre inconscient

Écourter la vie

Les volontés du patient et de ses proches

Partout où l’aide médicale à mourir est permise, la présence de douleurs et

de souffrances inapaisables est considérée comme une condition nécessaire

(mais non suffisante).

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Les conditions retenues par la Commission sur la question

de mourir dans la dignité

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Les souffrances inapaisables

13. La Commission recommande que les lois pertinentes soient modifiées afin de reconnaître

l’aide médicale à mourir comme un soin approprié en fin de vie si la demande formulée par

la personne respecte les critères suivants, selon l’évaluation du médecin :

• La personne est résidente du Québec selon les dispositions de la Loi sur l’assurance

maladie;

• La personne est majeure et apte à consentir aux soins au regard de la loi;

• La personne exprime elle-même, à la suite d’une prise de décision libre et éclairée, une

demande d’aide médicale à mourir;

• La personne est atteinte d’une maladie grave et incurable;

• La situation médicale de la personne se caractérise par une déchéance avancée de ses

capacités, sans aucune perspective d’amélioration;

• La personne éprouve des souffrances physiques ou psychologiques constantes,

insupportables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu’elle juge

tolérables.

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La question de l’imminence de la mort

13. La Commission recommande que les lois pertinentes soient modifiées afin de reconnaître

l’aide médicale à mourir comme un soin approprié en fin de vie si la demande formulée par

la personne respecte les critères suivants, selon l’évaluation du médecin :

• La personne est résidente du Québec selon les dispositions de la Loi sur l’assurance

maladie;

• La personne est majeure et apte à consentir aux soins au regard de la loi;

• La personne exprime elle-même, à la suite d’une prise de décision libre et éclairée, une

demande d’aide médicale à mourir;

• La personne est atteinte d’une maladie grave et incurable;

• La situation médicale de la personne se caractérise par une déchéance avancée de ses

capacités, sans aucune perspective d’amélioration;

• La personne éprouve des souffrances physiques ou psychologiques constantes,

insupportables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu’elle juge tolérables.

Page 21: CRISE- INSTITUT 2013 ÉTÉ - Michèle Marchand - La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir »

La question de l’aptitude et du consentement

13. La Commission recommande que les lois pertinentes soient modifiées afin de reconnaître

l’aide médicale à mourir comme un soin approprié en fin de vie si la demande formulée par

la personne respecte les critères suivants, selon l’évaluation du médecin :

• La personne est résidente du Québec selon les dispositions de la Loi sur l’assurance

maladie;

• La personne est majeure et apte à consentir aux soins au regard de la loi;

• La personne exprime elle-même, à la suite d’une prise de décision libre et éclairée,

une demande d’aide médicale à mourir;

• La personne est atteinte d’une maladie grave et incurable;

• La situation médicale de la personne se caractérise par une déchéance avancée de ses

capacités, sans aucune perspective d’amélioration;

• La personne éprouve des souffrances physiques ou psychologiques constantes,

insupportables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu’elle juge tolérables.

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3. Dans cette perspective, l’euthanasie est plus facile à justifier que le suicide médicalement assisté

Le médecin, comme agent moral prêt à assumer jusqu’au bout ses

responsabilités face à un patient souffrant, ira plus facilement vers

l’euthanasie que vers le suicide médicalement assisté.

Il en va de même pour les patients lorsqu’ils ont le choix (seul le suicide assisté

est permis en Suisse et dans certains états américains).

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Voir le débat autrement : cesser les dichotomies

Les arguments pour Les arguments contre

1. Respecter l’autonomie de patients.

2. Soulager la souffrance

Deux contre-arguments :

On peut la soulager autrement (la sédation)

Une expérience positive.

3. Il est toujours mal de tuer (le double effet).

4. Ce serait contraire à l’éthique médicale.

5. Les dérives

Prévisibles

Prouvées

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Voir le débat autrement : miser sur le processus décisionnel

En situation clinique, le médecin offre, en raison de ses compétences, les soins qu’il juge le plus objectivement possible appropriés d’un point de vue médical.

Le patient reste évidemment celui qui décide puisqu’il s’agit de sa vie. Pour des raisons subjectives aussi bien qu’objectives, il accepte, refuse* ou demande autre chose que les soins proposés.**

Face à cette réaction du patient, le médecin demeure toutefois responsable des actes qu’il posera. Il accepte de donner suite à la demande du patient, refuse (le cas extrême étant l’objection de conscience) ou propose autre chose, auquel cas la dynamique reprend son cours.***

Page 25: CRISE- INSTITUT 2013 ÉTÉ - Michèle Marchand - La souffrance comme justification à une « aide médicale à mourir »

L’euthanasie

Le processus décisionnel

On peut toujours en discuter

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La question des patients inaptes

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La question des patients inaptes (suite)

Écourter la vie de patients qui ne sont pas forcément aptes est une pratique

médicale qui se fait rarement, mais qui se fait partout et qui ne se fait pas

nécessairement bien :

L’utilisation d’opiacées ou de sédatifs

Le consentement des proches qui n’est pas toujours

recherché.

Même dans les endroits où l’euthanasie est dépénalisée, cette

pratique n’est pas rapportée par les médecins et elle est considérée

comme une dérive.

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L’objection de conscience

« Le médecin doit informer son patient de ses convictions personnelles qui

peuvent l'empêcher de lui recommander ou de lui fournir des services

professionnels qui pourraient être appropriés, et l'aviser des conséquences

possibles de l'absence de tels services professionnels.

Le médecin doit alors offrir au patient de l'aider dans la recherche d'un autre

médecin. »

Code de déontologie des médecins, art. 24

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Plusieurs perspectives, un choix de société