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Que les relations interpersonnelles sont difficiles! Pourquoi est-ce que je réagis si mal quand je me sens rabaissé? Comment mettre un terme au cercle vicieux de l'agression?

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Page 1: DIEU, LES AUTRES ET MOI
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David Shutes

Dieu, les autres et moi

Page 3: DIEU, LES AUTRES ET MOI

Les textes bibliques sont tirés de la Bible Segond revue,Nouvelle Edition de Genève, 1979

© et édition La Maison de la Bible, 2001, 2011Ch. de Praz-Roussy 4bisCH-1032 Romanel-sur-Lausanne

E-mail: [email protected]: www.maisonbible.net

ISBN édition imprimée 978-2-8260-3382-0ISBN format epub 978-2-8260-0080-8ISBN format pdf 978-2-8260-9811-9

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Table des matières

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1. Le cercle vicieux de l’agression . . . . . . . . . . . . . . . .

2. Les yeux sur Christ et la paix entre nous . . . . . . . . . .

3. Aimer jusqu’au bout . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

4. Le renouvellement de l’intelligence . . . . . . . . . . . . .

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1Le cercle vicieuxde l’agression

Introduction

Le schéma du "cercle vicieux de l'agression" tente de décrire unmécanisme qui provoque, plus que toute autre chose, des diffi-cultés dans les relations personnelles. La compréhension de cemécanisme nous aidera à mieux savoir (d'un point de vue théo-rique du moins) comment le déjouer, en vue d'établir des rela-tions personnelles satisfaisantes ou de rétablir des relationsdevenues tendues.

Ce mécanisme se base, dans l'ensemble, sur le problèmeque j'appelle l'infériorité, c’est-à-dire les sentiments d'insuffi-sance quant à notre valeur personnelle. La solution du cerclevicieux de l'agression présuppose donc que l'on sache surmon-ter plus ou moins les sentiments d'infériorité. C’est pourquoi ilest utile, en introduction, de passer brièvement en revue lesgrandes lignes de ce problème et de sa solution.

Une solution à l'inférioritéL'infériorité est un problème inné chez l'homme pécheur. Faitspour vivre en communion avec Dieu, nous avons dans notrenature ce besoin de participer à l'infinie grandeur que l'on ne

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peut connaître qu'auprès de Dieu. Mais par le refus de Dieuqu'est le péché, l'homme se sépare de cette grandeur et seretrouve avec sa seule valeur personnelle. Il serait faux de pen-ser que l'homme, en lui-même, ne vaille rien. Pourtant, notrevaleur innée est bien insuffisante pour remplacer la gloire deDieu, perdue à cause du péché. Cela est d'autant plus vrai que,par le péché, l'homme est encore inférieur à ce qu'il était avant.

Le plus souvent, on essaie de remédier à ce problème parses propres efforts, par la valeur que l'on tire de l'appréciationdes amis, etc. Toutes ces tentatives sont vouées à l'échec. Com-ment l'homme, avec ses propres capacités, pourra-t-il comblerson besoin de valeur, alors que ce besoin provient du fait qu’ila perdu le droit de participer à la gloire d'un Dieu infini?L'homme qui essaie de se valoriser par ses propres moyens, deprouver qu'il est "quelqu'un", qu'il est "bien", vit précisémentselon la nature pécheresse. Il veut prendre en main sa proprevie, plutôt que de vivre sous la dépendance de Dieu.

Cette remarque est vraie pour le chrétien aussi. La tenta-tion est parfois grande de vouloir penser que nous sommes"mieux que les autres", qu'il y a par conséquent en nous unevaleur plus élevée que chez ceux qui n’ont pas été régénérés.C'est faux. Nous ne valons pas plus qu'eux. Nous ne sommespas meilleurs qu'eux. Il serait faux de dire que l'amour de Dieupour nous démontre que nous avons une valeur en nous-mêmes.Cela reviendrait à dire que la faveur de Dieu est méritée, et doncà nier totalement le principe de la grâce.

La véritable valeur de chaque être humain provient effec-tivement du fait qu’il est aimé de Dieu. Néanmoins, noussommes aimés d'une façon inconditionnelle, et non à caused'une quelconque valeur propre. Dieu nous aime à cause de cequ'il est, lui, et non à cause de ce que nous sommes. En fait, toutêtre humain est aimé de la même façon par Dieu: "Dieu a tantaimé le monde..." (Jean 3:16). Il a payé le prix fort pour sauver

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le monde entier. Non que le monde entier soit sauvé pourautant, mais la Parole de Dieu est claire en nous disant qu'aumoins le prix a été payé (1 Jean 2:2).

L'amour de Dieu pour nous fait donc que nous avons déjà,sans aucun besoin de l'établir ni de le prouver, une valeur infi-nie. Dans la mesure où nous comprenons cela, cette assurancereprésente une solution au problème de l'infériorité. Seulement,il faut bien comprendre que cette valeur est auprès de Dieu etnon en nous. Nous avons cette valeur pour lui, et non parce qu'ily aurait en nous quoi que ce soit qui nous confère une valeurquelconque. Essayer, à partir de l'amour de Dieu pour nous, denous approprier une valeur personnelle, innée, ce n'est qu'unefaçon un peu subtile de manifester le péché. C'est toujours vou-loir être, en soi-même, quelqu'un de suffisant.

Même en tant que chrétiens, nous ne le sommes pas. Notrevaleur est en Dieu seul, et le principe du Psaume 34:6 joue par-faitement dans ce domaine, comme dans tant d'autres: "Quandon tourne vers lui les regards, on est rayonnant de joie." Lechrétien équilibré, apte à surmonter le problème de l'infériorité,est celui qui se préoccupe constamment de Dieu et non de sapropre personne. Nous avons une valeur infinie pour Dieu(même si nous ne le savons pas), mais ce n'est que lorsque noussommes imprégnés de lui que nous en jouissons. (Paradoxale-ment, c'est aussi à ce moment-là que nous sommes le moinsconscients de notre valeur, puisque nous sommes préoccupéspar Dieu. Mais le problème est réglé, au moins pour le temps oùnous sommes tournés vers lui.)

Le "moteur" du cercle vicieux de l'agression réside dansune absence de compréhension de ces points. Dans la mesureoù je veux établir et défendre ma propre valeur, j'agirai tout àfait selon les principes de la chair, principes qui produisent sys-tématiquement les réactions décrites par notre schéma. Nousexaminerons un certain nombre de possibilités de sortir du

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cercle vicieux, mais toutes, sans exception, présupposent qu'ily ait au moins un début de solution au problème d'infériorité, àce désir (irréalisable) d'établir par moi-même ma propre valeur.Sans cela, l'homme est condamné à vivre le cercle vicieux del'agression chaque fois qu'il se sent attaqué par autrui.

Note sur la présentationLe schéma de l'ensemble du cercle vicieux de l’agression, avectous les éléments du problème et des solutions, est assez com-plexe. Cette complexité est inévitable, puisque les relations per-sonnelles sont complexes. Prétendre qu'elles peuvent êtrereprésentées fidèlement par un schéma simple est une approchetrop simpliste et par conséquent sans grande valeur. Elle nenous ferait pas comprendre suffisamment le véritable fonction-nement de la motivation humaine et ne nous aiderait donc pasbeaucoup.

En vue de comprendre la complexité du mécanisme, nousallons le "construire" par petites étapes. Les neuf schémas pré-sentés dans cette section se succèdent, chacun ajoutant au pré-cédent pour représenter un aspect supplémentaire du méca-nisme. Il est conseillé de suivre au fur et à mesure sur les sché-mas les explications données dans le texte. De cette manière, leschéma de l'ensemble (le dernier, numéro 9, page 69) doit deve-nir, peu à peu, compréhensible et donc utile.

Le mécanisme de l’agression mutuelle

Se revaloriser face à l'agressionLe schéma 1 représente une suite logique, mais pas forcémentchronologique. Plusieurs des étapes qui y figurent se déroulent,normalement, de façon plus ou moins simultanée. Si le schémales présente comme des étapes successives, c'est afin de décom-poser la réaction normale face à l'agression, et de comprendrele raisonnement sous-jacent.

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(le dernier, numéro 9, page 71)

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Le cercle v ic ieux de l ’agression

Schéma 1

J'ai besoin d'avoirle sentiment de

valoir quelque chose

Je veux défendrema valeur

Je trouve un moyende me revaloriser

Je rabaisse l'autre

J'en déduis quel'autre me méprise

Je ressensune agression

Je n'appréciepas la chose

Acte mal-intentionné

«Celui qui n'aimepas...»

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Il faut savoir aussi que ce "raisonnement" n'est pour ainsidire jamais explicite. Il serait erroné de penser que la personneordinaire choisit consciemment de suivre ce raisonnement.Toutefois, comprendre les étapes décrites explicitement icinous aidera à comprendre la réaction plus ou moins spontanéede chacun de nous en pareille situation. En effet, même uneaction "spontanée" ne se fait pas sans raison.

Commençons avec le principe de l'amour dans le sensdivin, le sens le plus profond que la Bible lui donne: aimer, c'estnon seulement vouloir mais encore rechercher activement lebien-être d’autrui. C'est comprendre que le bien-être de l'autreest aussi important, sinon plus, que mon propre bien-être. Parconséquent, une personne qui n'est pas motivée par l'amourn'agira pas en vue du bien-être des autres. "Celui qui n'aimepas"1 va donc – et cela relativement souvent – agir d'une façonmalintentionnée.

Un acte malintentionné, précisons-le, est un acte dontl’auteur cherche son propre bonheur aux dépens de celui desautres. Le simple fait de chercher à être heureux n'est pas, ensoi, un acte malintentionné; c'est lorsque je sais que larecherche de mon bien-être fera du mal à autrui que mon acteest malintentionné. Précisons aussi que tout ce qui est désa-gréable à l’autre ne lui fait pas forcément du mal. Souvent, lebien passe par une peine temporaire. Quand mon dentiste m'ar-rache une dent, par exemple, il me fait mal. Pourtant, son butultime est mon bien, et son geste n'est nullement malinten-tionné. De même, une personne en autorité qui me reprend peutavoir tout à fait raison de le faire, sans que cela me fasse plaisir.Un acte peut être qualifié de malintentionné seulement quand ilva faire du mal à autrui sur le plan global, pour le bien-être deson auteur.

1. Est citée la phrase célèbre de 1 Jean 4:8, même s'il est vrai qu'ici nous ne faisonspas du tout référence au sujet dont il est question dans le contexte de cette phrase.

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Si je suis victime d'un acte malintentionné, en règle géné-rale je ne l'apprécierai pas. Cela n'a rien d'étonnant; noussommes tous constitués ainsi. Il est plus important de savoirpourquoi je ne l'apprécie pas. Ce n'est pas simplement que lachose me soit désagréable; je trouve tout aussi désagréable lemal que me fait mon dentiste, mais dans un certain sens j'ap-précie son acte (au moins suffisamment pour le payer!). Il sepeut même que quelque chose nous arrange, sans que nous l'ap-préciions pour autant. Si par exemple je me sens obligé derendre visite à une personne désagréable, et si la visite ne peutpas avoir lieu parce que l'autre me fait bien comprendre qu'il nedésire pas me voir, cela m'arrange de ne pas y aller. Mais jetrouverai tout de même désagréable son refus de me voir.

Ce qui gêne, en fait, n'est pas tellement le côté "désa-gréable" de l’acte – le fait qu’il m'arrange ou non sur le moment– mais l'agression qui y est contenue. C'est quand je me sensagressé que je n'apprécie pas quelque chose. Si je supporte(plus ou moins bien...) une visite chez le dentiste, c'est parceque je ne me sens pas agressé par lui, même s'il me fait mal. Sije n'apprécie pas que l'autre refuse de me voir, même si celam'arrange, c'est parce que je me sens agressé. L'agression noustrouble bien plus que la douleur.

L’agression peut prendre beaucoup de formes. Elle peutaller du flagrant (un coup de poing à la figure) au subtil (quel-qu'un ne nous dit pas bonjour, quand nous pensons qu'il auraitdû le faire). Il y a une quantité presque illimitée de typesd'agression; n'importe quel événement qui nous "chiffonne"entre dans cette catégorie, même si nous ressentons assezvaguement l'irritation qui l'accompagne.

Si une agression me trouble, c'est parce que je comprendsque l'autre me méprise, qu'il ne m'estime pas suffisamment.Peut-être que son mépris est subtil, mais cela me gêne tout demême. Et le fait que j'ai, de façon innée, un problème dans ce

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domaine, m'oblige à réagir. En effet, j'ai un besoin profond (etvalable) de me sentir comme quelqu'un de bien, quelqu'un quia une valeur.

Comme je ne peux pas accepter d'être méprisé, puisquecela met en cause ma valeur, je dois défendre ma valeur. Je dois,par un moyen ou un autre, montrer que je suis quelqu'un, quecelui qui m'a agressé n'avait pas le droit d'agir ainsi. Il faut doncque je trouve un moyen de me revaloriser. Cela ne veut pas direque je vais forcément passer du temps à réfléchir sur la ques-tion. Souvent, la réaction est plus ou moins instantanée, pour lasimple raison que chacun a ses habitudes, ses "moyens dedéfense" usuels. Certains réfléchissent longtemps pourrépondre à la question: "Qu'est-ce que je pourrais bien luifaire?" Mais très souvent, la réaction est immédiate: "Idiot!""Idiot, toi-même!"

Le but est de rétablir une sorte de "balancier" de valeursrelatives. Si j'ai l'impression que l'autre s'élève au-dessus demoi, mon but sera de le "remettre à sa place". Je vais le rabais-ser jusqu'à un niveau qui me semble approprié. Le plus souvent,cela veut dire un niveau inférieur au mien. La preuve qu'il estinférieur, c'est qu'il m'a fait ce qu'il m'a fait. Je n'accepte doncpas de le ramener simplement à mon niveau. C’est la raisonpour laquelle apparaît, dans de telles réactions, une tendanceassez marquée à "surenchérir", c’est-à-dire à faire en retourquelque chose d'encore plus fort que ce qu’on m’a fait. Le butest de bien marquer le coup, de faire comprendre à l'autre quenon seulement il n'est pas meilleur que moi, mais il vaut mêmemoins que moi.

La méthode variera énormément selon les personnalités,les situations et les convictions. Une façon très directe et bru-tale de remettre à sa place quelqu'un qui m’insulte, parexemple, serait de l'assommer sur-le-champ. Mais si je ne veuxpas aller jusque-là, il y a d'autres moyens, et tous ne sont pas

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violents. Se mettre en colère ou rendre l’insulte sont aussi desexemples de répliques violentes, bien qu’à un degré moindre.Mais je peux aussi me revaloriser en expliquant calmement àmon interlocuteur que ce n'est pas vrai, que c'est plutôt lui quiest fautif et qu'il n'agirait pas comme cela s'il était bien élevé. Ily a des moyens très subtils de rabaisser l'autre, de le "remettreà sa place" avec une telle douceur qu'il ne pourra guère critiquermon acte, tout en étant sûr qu'il a bien compris que c'est lui quiest en tort et est donc inférieur. Ces diverses méthodes sontidentiques sur le fond: mon but est de rétablir ma valeur, pourmontrer à l'autre qu'il a tort de me mépriser. Ainsi, je pourrai mesentir bien dans ma peau après avoir été rabaissé.

La boucle se fermeNous avons l'impression, chaque fois que nous réagissons ainsi,que le problème a été réglé: nous avons remis l'agresseur à saplace en lui faisant comprendre que ce n'est pas une façond'agir; comme cela, il ne recommencera plus! Seulement, celamarche très rarement. En fait, il arrive trop souvent que le pro-blème, au lieu de se calmer, s'aggrave. Pourquoi?

C'est très simple: l'autre (qui a, dans le fond, les mêmesproblèmes et les mêmes motivations psychologiques que moi)risque de prendre mal ce que j'ai fait pour me revaloriser parrapport à lui. Il va le considérer comme un acte malintentionné.D'ailleurs, il n'a pas tort: tout acte qui cherche à produire lebien-être de son auteur, tout en faisant du mal à autrui, est unacte malintentionné. Si je veux rabaisser quelqu’un pour réta-blir ma propre valeur, il est indiscutable que je vise mon bien,et non le sien. Le fait qu'il mérite d'être rabaissé n'y change rien;c'est toujours ce que je veux faire.

Si l’autre n'apprécie pas mon acte, c'est qu'il le prendcomme une agression. Ma façon d’agir signifie que je leméprise, que je cherche à minimiser sa valeur. (Il n'a toujours

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