Download - Dossier Enseignement du 6 juin 2012 LLB
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Supplément à La Libre Belgique du 6 juin 2012
ENSEIGNEMENT
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2 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 3Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Enseigner, une partie de plaisir ?h Un professeur del’UCL s’est penché surla composante“plaisir” dansl’enseignement.
h Une des clés, selonlui, pour “tenir” dansle métier.
Alors que de nombreux jeunes enseignants quittent lemétier après quelques annéesd’exercice seulement, pourd’autres, la motivation resteintacte. Ghislain Carlier estprofesseur à la faculté desSciences de la motricité del’UCL. Il a publié une étudeintitulée “Plaisir d’enseigner :la quête du Graal” qui se penche sur la composante “plaisir” dans l’acte d’enseignerchez les professeurs d’éducation physique et sportive(EPS). “Mais j’espère que cetteétude peut être extrapolée auxprofesseurs qui enseignentd’autres disciplines”, ditil. “Lanotion de plaisir me semble incontournable et au cœur de la
pratique du métier. On ne restepas dans l’enseignement si l’onn’éprouve pas de plaisir. La persévérance, c’est une façade. Je neblâme pas ceux qui sont restéssur ce terrain mais j’essaie demettre en place des élémentsd’action et de réflexion pourpermettre aux élèves et aux professeurs d’admettre que le plaisir est également une clé de laréussite des élèves. Il faut oser le
dire.”Ghislain Carlier détaille une
typologie des enseignantsd’EPS liée au plaisir. “Dans unmonde en perpétuelle transformation, ils reconnaissent queles adolescents ne sont pas lesseuls qui ont changé. Ils repèrent les aspects positifs destransformations de valeurs individuelles et collectives chezleurs élèves. Ils s’y intéressent,
voire s’y initient”, écritil.Cette typologie montre éga
lement que ces enseignantsprivilégient le contact humain avec leurs classes. “Ilscommuniquent vers leurs élèves, verbalement ou non, àl’aide de routines avérées, élégantes et efficaces, génératriced’action. Ils responsabilisentleurs élèves en leur confiant desrôles judicieux et ils ne traitent
pas leur classe comme un troupeau. Au contraire, ils caractérisent avec finesse les groupesd’élèves. Ils se sentent gratifiéspar les retours positifs des élèveset ils l’expriment.”
Les professeurs qui partagent du plaisir avec leurs élèves s’impliquent dans la viede leur école, en devenantformateurs, en participant àdes activités extrascolaires,des projets interdisciplinaireset en cultivant les liens avecleurs collègues. Le maître motdéfinissant les enseignantsmus par le plaisir estil l’humanisme ? “Oui mais ce n’estpas un humanisme gratuit caril s’accompagne des missions detransmission des savoirs et desocialisation”, précise GhislainCarlier.
Mais alors, les professeursqui prennent du plaisir à enseigner sontils forcément debons profs ? “Cela devrait fairepartie de la définition mais ilfaudrait interroger les élèves àce sujet. Si on injectait la notionde plaisir dans les tests Pisa (visant à mesurer les performances des systèmes éducatifs dedifférents pays, NdlR), on obtiendrait peutêtre des résultatsbien différents. En tout cas, leplaisir est lié à la connivence etaux interactions avec les élèves,à une approche non dictatoriale de la transmission des savoirs; ce qui, a priori, sont deséléments englobés dans le concept de bon prof”, déclarel’auteur.
Ghislain Carlier plaide encore pour que le plaisir soit aucœur de la formation des futurs enseignants. “On ne metpas suffisamment cette notion en avant alors qu’on estcensé préparer les étudiants àexercer un métier quasimentimpossible. J’invite donc lesformateurs à repérer les pépites de plaisir et à les faire fructifier”, conclutil.Isabelle Lemaire
UL’étude de Ghislain Carliers’insère dans un ouvrageintitulé “Le plaisir”, publié en2011 aux éditions EP&S.
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Quelques ouvrages
Des auteurs ont évoqué leplaisir d’enseigner dans lesouvrages suivants :
“Le plaisir d’enseigner” parBernard Defrance, 1997,publié aux éditions Syros ;
“N’oublions pas les bonsprofs”, de Nicolas Mascret,2012, chez Anne Carrière
“Le bon prof”, de DavidSolway, 2008, aux éditionsBellarmin.
Ces professeursqui ont gardé le feu sacréh Des enseignants qui aimentpassionnément leur métiertémoignent.
h Ils ont 10, 20 et même 40ans de carrière et éprouventtoujours le même plaisir àêtre prof.
Ils ont choisi ce métier et ne voudraienten changer pour rien au monde. Modestes, ils ont tous tenu à conserver uncertain anonymat, “pour ne pas me mettre en avant par rapport aux collègues”,affirmentils.
Philippe, 34 ans, est prof de maths depuis 10 ans dans une école secondairede la banlieue liégeoise. “Une matièreingrate car abstraite, souvent détestéepar les élèves”, ditil. “Au début de ma carrière, j’étais ultra motivé et je le suis toujours. Les maths, c’est mon truc et je voulais transmettre cette passion. L’approchedes mathématiques, telle qu’on la conçoit
habituellement, peut être rébarbative cartrès théorique. J’ai décidé d’aller a contrario de cela et de rendre cette matière vivante, via des exemples concrets applicables dans la vie de tous les jours, des petitsjeux, des travaux de groupe. Je veille également à ne laisser personne au bord duchemin. Il n’y a rien de pire pour un élèveen difficulté de se sentir abandonné parson prof. J’ai vécu cela moimême étantadolescent avec un prof de néerlandaisqui concentrait toute son attention sur lesélèves doués. C’est vraiment tout ce qu’ilne faut pas faire.”
Les élèves de Philippe, âgés de 12 à 15ans, semblent apprécier ce professeurenthousiaste. “Je me sens à l’aise dans lescontacts humains et j’aime ce que je fais.Je pense que mes élèves le ressentent.L’ambiance en classe est souvent très détendue. Un respect mutuel s’instaure et jeconstate d’année en année que le tauxd’échec dans mon cours est très faible. Jecrois que pour être bon dans ce métier, ilfaut que cette orientation professionnellene soit pas un choix par défaut. Je connaisun prof de sciences qui voulait se consacrer à la recherche, un travail pointu etplutôt solitaire. Son rêve n’est pas devenu
réalité et il a “échoué dans l’enseignement” comme il dit. Il ne prend aucunplaisir à enseigner, est incapable de vulgariser les matières qu’il dispense et décompte les années avant sa mise à la retraite. C’est malheureux d’en arriver là etil ne faut pas s’étonner si ses élèves le détestent.”
Sylvie est institutrice primaire depuis21 ans dans une petite école près deBastogne. Elle apprend à lire, écrire etcompter à des petits bouts de 6 ans. “Undéfi passionnant et quelle responsabilité”,clametelle. “Je leur inculque les savoirsde base alors, il ne faut pas se louper; c’estd’une importance capitale et aussi trèsvalorisant.” Le sourire vissé aux lèvres,Madame Sylvie entame chaque journéede cours avec la même énergie. “C’estun métier qui peut être épuisant mais lesenfants m’apportent tellement que celaefface les mauvais côtés. Etre institutriceprimaire, c’est un métier varié, aussi biendu fait des nombreuses matières que l’onenseigne, que par ses àcôtés créatifs (lespetits spectacles que l’on monte pour lafête de l’école, les bricolages pour lesparents…) et la dimension humaine. J’aibeaucoup de chance car j’exerce le plus
beau métier du monde.”JeanClaude prendra sa pension en
juin, après une carrière de 40 ans dansl’enseignement supérieur. Il a enseignéla littérature ou la sémiologie dans plusieurs établissements et a vu défiler desgénérations d’étudiants. “Les choses ontbeaucoup changé depuis le début de macarrière, le rapport à l’autorité notamment. Les jeunes d’aujourd’hui ne sontplus du tout impressionnés par le statutde l’enseignant et ils n’hésitent pas à vousle faire savoir. La clé, c’est d’être capablede s’adapter, de se remettre en question.En fin d’année, je soumets à mes étudiantsun petit questionnaire de satisfaction. Enfonction de ce qu’ils m’apprennent, jen’hésite pas à modifier aussi bien le contenu de mes cours que ma manière de lesdispenser. Rester humble et à l’écoute deson public, c’est primordial. Outre le faitque j’ai gardé intacte cette passion detransmettre des savoirs et ma motivationà exercer ce métier, c’est sans doute celaqui m’a permis de garder le feu sacréaprès toutes ces années. Je sais que je n’aipas réussi à intéresser tous mes étudiantsmais c’est la règle du jeu.”I. L.
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3Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Ces professeursqui ont gardé le feu sacréh Des enseignants qui aimentpassionnément leur métiertémoignent.
h Ils ont 10, 20 et même 40ans de carrière et éprouventtoujours le même plaisir àêtre prof.
Ils ont choisi ce métier et ne voudraienten changer pour rien au monde. Modestes, ils ont tous tenu à conserver uncertain anonymat, “pour ne pas me mettre en avant par rapport aux collègues”,affirmentils.
Philippe, 34 ans, est prof de maths depuis 10 ans dans une école secondairede la banlieue liégeoise. “Une matièreingrate car abstraite, souvent détestéepar les élèves”, ditil. “Au début de ma carrière, j’étais ultra motivé et je le suis toujours. Les maths, c’est mon truc et je voulais transmettre cette passion. L’approchedes mathématiques, telle qu’on la conçoit
habituellement, peut être rébarbative cartrès théorique. J’ai décidé d’aller a contrario de cela et de rendre cette matière vivante, via des exemples concrets applicables dans la vie de tous les jours, des petitsjeux, des travaux de groupe. Je veille également à ne laisser personne au bord duchemin. Il n’y a rien de pire pour un élèveen difficulté de se sentir abandonné parson prof. J’ai vécu cela moimême étantadolescent avec un prof de néerlandaisqui concentrait toute son attention sur lesélèves doués. C’est vraiment tout ce qu’ilne faut pas faire.”
Les élèves de Philippe, âgés de 12 à 15ans, semblent apprécier ce professeurenthousiaste. “Je me sens à l’aise dans lescontacts humains et j’aime ce que je fais.Je pense que mes élèves le ressentent.L’ambiance en classe est souvent très détendue. Un respect mutuel s’instaure et jeconstate d’année en année que le tauxd’échec dans mon cours est très faible. Jecrois que pour être bon dans ce métier, ilfaut que cette orientation professionnellene soit pas un choix par défaut. Je connaisun prof de sciences qui voulait se consacrer à la recherche, un travail pointu etplutôt solitaire. Son rêve n’est pas devenu
réalité et il a “échoué dans l’enseignement” comme il dit. Il ne prend aucunplaisir à enseigner, est incapable de vulgariser les matières qu’il dispense et décompte les années avant sa mise à la retraite. C’est malheureux d’en arriver là etil ne faut pas s’étonner si ses élèves le détestent.”
Sylvie est institutrice primaire depuis21 ans dans une petite école près deBastogne. Elle apprend à lire, écrire etcompter à des petits bouts de 6 ans. “Undéfi passionnant et quelle responsabilité”,clametelle. “Je leur inculque les savoirsde base alors, il ne faut pas se louper; c’estd’une importance capitale et aussi trèsvalorisant.” Le sourire vissé aux lèvres,Madame Sylvie entame chaque journéede cours avec la même énergie. “C’estun métier qui peut être épuisant mais lesenfants m’apportent tellement que celaefface les mauvais côtés. Etre institutriceprimaire, c’est un métier varié, aussi biendu fait des nombreuses matières que l’onenseigne, que par ses àcôtés créatifs (lespetits spectacles que l’on monte pour lafête de l’école, les bricolages pour lesparents…) et la dimension humaine. J’aibeaucoup de chance car j’exerce le plus
beau métier du monde.”JeanClaude prendra sa pension en
juin, après une carrière de 40 ans dansl’enseignement supérieur. Il a enseignéla littérature ou la sémiologie dans plusieurs établissements et a vu défiler desgénérations d’étudiants. “Les choses ontbeaucoup changé depuis le début de macarrière, le rapport à l’autorité notamment. Les jeunes d’aujourd’hui ne sontplus du tout impressionnés par le statutde l’enseignant et ils n’hésitent pas à vousle faire savoir. La clé, c’est d’être capablede s’adapter, de se remettre en question.En fin d’année, je soumets à mes étudiantsun petit questionnaire de satisfaction. Enfonction de ce qu’ils m’apprennent, jen’hésite pas à modifier aussi bien le contenu de mes cours que ma manière de lesdispenser. Rester humble et à l’écoute deson public, c’est primordial. Outre le faitque j’ai gardé intacte cette passion detransmettre des savoirs et ma motivationà exercer ce métier, c’est sans doute celaqui m’a permis de garder le feu sacréaprès toutes ces années. Je sais que je n’aipas réussi à intéresser tous mes étudiantsmais c’est la règle du jeu.”I. L.
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4 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 5Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Jeunes profs :le désamour du métierh De nombreux jeunesenseignants quittent lemétier endéans les cinq ans.
h Une chercheuse se penchesur les raisonsde cette désaffection.
Le constat est interpellant : selon uneétude flamande datant de 20032004(il n’existe pas de chiffres plus récentsmais une étude est en cours en Fédération WallonieBruxelles), le tauxd’abandon des jeunes enseignantsaprès cinq années de métier est de 44 %dans l’enseignement fondamental ordinaire, 64 % dans le fondamental spécialisé, 62 % dans le secondaire ordinaire et de 31 % dans le secondaire spécialisé. Et les enseignants débutantsprésentent deux fois plus de troublesnévrotiques que les débutants en insertion dans d’autres professions.
Comment en eston arrivé à cette situation ? C’est ce qu’Anne Floor, chargée d’études et d’analyses à l’Ufapec(Union des fédérations des associations de parents de l’enseignement catholique) a voulu comprendre. En2011, elle a publié un dossier intitulé“Jeune enseignant : pourquoi tu pars ?”(1) dans lequel elle se penche sur cephénomène inquiétant, d’autant plusdans ce contexte de pénurie de professeurs que connaît la Belgique.
Anne Floor entame son étude avecune contextualisation. “L’image de l’enseignant a perdu de sa superbe, son statutsocial ne fait plus rêver et l’école n’est plusl’unique source de savoirs”, écritelle. Lafaute à Internet, la télévision maisaussi au jugement parfois négatif de lafamille sur l’institution scolaire. Unproblème de génération et d’époquequi ne devrait pas s’arranger du jour aulendemain. “La solution se trouve sansdoute dans le positionnement des adultesface au savoir et à la manière dont il estdispensé. Il faut aider les jeunes à développer un esprit critique et former les futurs enseignants à une prise de recul faceà ces savoirs disponibles ailleurs qu’àl’école”, déclaretelle.
Mais les causes du désamour du métier sont aussi à chercher au sein mêmedu fonctionnement de l’école. “Le métier est solitaire et le prof débutant se retrouve, en début de carrière, avec les mêmes responsabilités qu’un enseignant expérimenté. La charge de travailadministrative est écrasante. Il n’y a pasde période d’essai, de régime de faveur nid’espace de parole où les jeunes profs peuvent exprimer leurs problèmes. Et rien,dans leur formation, ne les prépare à cesdifficultés.”
Anne Floor décrit une profession oùl’on rencontre peu d’esprit de corps,où l’entraide se fait rare. “Il y a un tel
vaetvient dans les écoles (intérims, mutations…) que des liens entre collègues deviennent compliqués à nouer.”
Malgré tout, les enseignants interrogés ne pointent pas la solitude commecause première de difficulté à exercerce métier. “Ils soulignent plutôt la gestion de leur classe et de la discipline ainsique l’évaluation et la planification desapprentissages”, ditelle.
Le manque de cours axés sur la psychologie de l’enfant, les troubles del’apprentissage et de variété dans leslieux de stage qui permettraient unemeilleure connaissance, non seulement des différents types d’enseignement et d’établissements, mais aussides milieux culturels et sociologiquesdont sont issus les élèves sont également des éléments qui posent problème. “Les classes les plus difficiles sontdonnées aux enseignants débutants puisque ce sont les profs expérimentés quichoisissent en premier leur affectation”,explique Anne Floor, qui relève au passage un “système de nominations insécurisant pour les jeunes professeurs et rigide, qui participe à rendre leur vie bien
compliquée”.Alors, que faire pour rendre le goût
du métier à ceux et celles qui ont choisila voie de l’enseignement ?
Plusieurs pistes sont évoquées parl’auteur et par les enseignants euxmêmes. “Il faudrait allonger et enrichir laformation, notamment en ce qui concerne l’accompagnement des élèves dysapprenants. Je suggère d’inclure en fin decursus une année tampon, faite de stageet de formation, pour faciliter l’insertiondes jeunes profs. Les stages d’observationdoivent être plus approfondis et plus variés. Je plaide également pour l’instauration d’un tutorat formalisé entre profconfirmé et débutant, afin d’aider ce dernier à trouver sa place au sein de l’établissement scolaire. Il faut aussi stabiliserles emplois. Et enfin, il faut permettre auxdirections d’encadrer les jeunes enseignants. Ils veulent le faire mais ils n’enont pas le temps.”
Isabelle LemaireU(1) Consultable sur www.ufapec.beonglet “Nos analyses & études”
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L’un cherche à fuir etl’autre veut y arriverPierre (prénom d’emprunt) a une vingtaine d’années. Ce licencié en histoire
souhaitait devenir prof dans le secondaire et ses motivations à embrasser cettecarrière étaient plutôt nobles.
“On commence à voter à 18 ans. J’estime donc que toute personne mérite d’êtreformée, informée et de développer un esprit critique”, ditil. Mais il a vite déchanté.“A cause du statut temporaire des profs débutants, j’ai été affecté dans une école différente par année scolaire. J’ai dû enseigner le français, la géographie, la religion ettout de même l’histoire. C’est la galère pour obtenir un poste fixe et sa nomination.Cela peut prendre des années.” Pierre a connu des établissements scolaires variés, dont une école réputée difficile. “J’ai été amené à porter plainte contre unélève qui avait créé un faux compte Facebook à mon nom où il avait publié des photos personnelles ainsi que des commentaires à caractère sexuel”, expliquetil, touten précisant qu’il s’agitlà d’un cas isolé.
Des commentaires désobligeants sur le métier de prof, il en a entendu souvent. “Enseignants fainéants, qui se plaignent tout le temps, voilà ce qu’on nous dit.”Il décrit un métier parfois abrutissant, avec une charge de travail à domicile importante. “J’ai perdu la flamme et ma motivation à donner cours. Je cherche activement à quitter le métier.”
A contrario, Julien Pierrard, ingénieur de formation, a fait le choix de devenirprof. “J’ai volontairement quitté un boulot d’ingénieur pour passer l’agrégation etdevenir prof de sciences en septembre dernier”, déclaretil. De l’enthousiasme àenseigner, il en a à revendre. “J’aime les échanges (humains et pédagogiques) avecles jeunes, leur transmettre un savoir, les motiver à apprendre une matière qu’ilsn’aiment pas toujours. C’est un vrai challenge.”
Julien Pierrard donne actuellement cours dans une école bruxelloise où il arapidement trouvé ses marques. “J’ai été très bien accueilli par l’équipe enseignante et il y a beaucoup d’élèves agréables.” Les problèmes, il ne les occulte pasmais ils ne lui font pas peur. “Je suis optimiste. L’attente de la nomination, lacharge de travail, les problèmes de comportements de certains élèves, les préjugéssur les profs, il faut juste apprendre à gérer cela car ça fait partie du métier”, déclaretil.I.L.
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5Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Jeunes profs :le désamour du métier
vaetvient dans les écoles (intérims, mutations…) que des liens entre collègues deviennent compliqués à nouer.”
Malgré tout, les enseignants interrogés ne pointent pas la solitude commecause première de difficulté à exercerce métier. “Ils soulignent plutôt la gestion de leur classe et de la discipline ainsique l’évaluation et la planification desapprentissages”, ditelle.
Le manque de cours axés sur la psychologie de l’enfant, les troubles del’apprentissage et de variété dans leslieux de stage qui permettraient unemeilleure connaissance, non seulement des différents types d’enseignement et d’établissements, mais aussides milieux culturels et sociologiquesdont sont issus les élèves sont également des éléments qui posent problème. “Les classes les plus difficiles sontdonnées aux enseignants débutants puisque ce sont les profs expérimentés quichoisissent en premier leur affectation”,explique Anne Floor, qui relève au passage un “système de nominations insécurisant pour les jeunes professeurs et rigide, qui participe à rendre leur vie bien
compliquée”.Alors, que faire pour rendre le goût
du métier à ceux et celles qui ont choisila voie de l’enseignement ?
Plusieurs pistes sont évoquées parl’auteur et par les enseignants euxmêmes. “Il faudrait allonger et enrichir laformation, notamment en ce qui concerne l’accompagnement des élèves dysapprenants. Je suggère d’inclure en fin decursus une année tampon, faite de stageet de formation, pour faciliter l’insertiondes jeunes profs. Les stages d’observationdoivent être plus approfondis et plus variés. Je plaide également pour l’instauration d’un tutorat formalisé entre profconfirmé et débutant, afin d’aider ce dernier à trouver sa place au sein de l’établissement scolaire. Il faut aussi stabiliserles emplois. Et enfin, il faut permettre auxdirections d’encadrer les jeunes enseignants. Ils veulent le faire mais ils n’enont pas le temps.”
Isabelle LemaireU(1) Consultable sur www.ufapec.beonglet “Nos analyses & études”
L’un cherche à fuir etl’autre veut y arriverPierre (prénom d’emprunt) a une vingtaine d’années. Ce licencié en histoire
souhaitait devenir prof dans le secondaire et ses motivations à embrasser cettecarrière étaient plutôt nobles.
“On commence à voter à 18 ans. J’estime donc que toute personne mérite d’êtreformée, informée et de développer un esprit critique”, ditil. Mais il a vite déchanté.“A cause du statut temporaire des profs débutants, j’ai été affecté dans une école différente par année scolaire. J’ai dû enseigner le français, la géographie, la religion ettout de même l’histoire. C’est la galère pour obtenir un poste fixe et sa nomination.Cela peut prendre des années.” Pierre a connu des établissements scolaires variés, dont une école réputée difficile. “J’ai été amené à porter plainte contre unélève qui avait créé un faux compte Facebook à mon nom où il avait publié des photos personnelles ainsi que des commentaires à caractère sexuel”, expliquetil, touten précisant qu’il s’agitlà d’un cas isolé.
Des commentaires désobligeants sur le métier de prof, il en a entendu souvent. “Enseignants fainéants, qui se plaignent tout le temps, voilà ce qu’on nous dit.”Il décrit un métier parfois abrutissant, avec une charge de travail à domicile importante. “J’ai perdu la flamme et ma motivation à donner cours. Je cherche activement à quitter le métier.”
A contrario, Julien Pierrard, ingénieur de formation, a fait le choix de devenirprof. “J’ai volontairement quitté un boulot d’ingénieur pour passer l’agrégation etdevenir prof de sciences en septembre dernier”, déclaretil. De l’enthousiasme àenseigner, il en a à revendre. “J’aime les échanges (humains et pédagogiques) avecles jeunes, leur transmettre un savoir, les motiver à apprendre une matière qu’ilsn’aiment pas toujours. C’est un vrai challenge.”
Julien Pierrard donne actuellement cours dans une école bruxelloise où il arapidement trouvé ses marques. “J’ai été très bien accueilli par l’équipe enseignante et il y a beaucoup d’élèves agréables.” Les problèmes, il ne les occulte pasmais ils ne lui font pas peur. “Je suis optimiste. L’attente de la nomination, lacharge de travail, les problèmes de comportements de certains élèves, les préjugéssur les profs, il faut juste apprendre à gérer cela car ça fait partie du métier”, déclaretil.I.L.
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
6 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 7Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Enseignants inspectés? Of courseh Les professeursbritanniques sont évalués parleur directeur.
Les inspecteurs, eux, sechargent de contrôler l’école
Les stéréotypes associent volontiers“l’anglitude” à l’amour des lois et la sévérité. L’enseignement faitil exceptionà ces valeurs fondamentales que chérissent les habitants d’outreManche ? Lemoins que l’on puisse dire est que cesecteur est hiérarchisé et réglé commedu papier à musique. Sur l’île britannique, point d’inspecteur extérieur pourévaluer les professeurs, mais un système interne solidaire et productif.
Résultat : une adaptation publique dela sphère privée où chaque acteur a laparole, des directeurs aux différentsprofesseurs, en passant par les élèves.“Nous ne sommes jugés que par nos pairs”,annonce d’emblée Ros Smith. Professeur de mathématiques dans un collègedu Somerset pendant près de quinzeans, elle explique le fonctionnement del’établissement. “Tous les professeurs seregroupent par aptitudes, qu’elles soientlittéraires, scientifiques, sportives ouautres. Chaque filière est régie par un professeur nommé titulaire du département.Entre chaque ‘sousgroupe’ d’enseignants,nous nous aidons régulièrement pouraméliorer nos compétences.”
Cette entraide peut d’ailleurs s’avérerformelle ou informelle. “Il n’est pas rarequ’un collègue assiste au cours pour s’inspirer ou pour donner des idées. Mais enparallèle à ces assistances amicales et occasionnelles, nous sommes observés aumoins une fois par an par notre titulaire etnotre directeur”, poursuitelle.
De cette évaluation annuelle, en découle un entretien qui se veut surtoutconstructif. “Nous établissons les pointsfaibles et forts de l’enseignement donné ettentons d’établir un programme de soutien en cas de problème”, explique cetteenseignante.
Une exception pour le cycle secondaire ? Non, tous les niveaux d’éducation fonctionnent de cette manière. Etsur quels critères les professeurs sontils évalués ? Tout dépend de la charte deperformance établie par le directeur luimême. Dans une réelle position prédominante, le chef d’établissement estmême apte à octroyer des primes auxenseignants compétents. Si d’ordinaire,des plafonds salariaux existent, il estnéanmoins le seul à pouvoir décider dela promotion des professeurs sous sonautorité. Cette souveraineté n’est cependant pas totale, puisque le directeur,en tant que représentant de son établissement, est à son tour jugé par une inspection supérieure. Ce groupement extérieur, appelé l’Ofsted (The Office forStandards in Education), remplit, lui,une mission globale. Son rôle : contrôlerl’école dans son ensemble, la qualité deson enseignement, la gestion, le comportement, la réussite, la sécurité et lebienêtre des élèves.
“L’inspection de l’établissement peutprendre quelques jours ou plusieurs se
maines selon les manquements”, souligneune collègue de Ros Smith, enseignantedans le cycle primaire.
Chaque domaine peut alors passersous la loupe des inspecteurs, et cela, àrépétition si nécessaire. “Il s’agit d’unmoment stressant où chaque membre del’école subit une forte pression. Tout peutêtre contrôlé, et ce, sans avertissementpréalable”, continuetelle. Pour les établissements plus faibles, des mesuresspéciales peuvent même être prises afinde remonter la pente. Dans ces rares cas,certains membres de l’établissementpeuvent être remis en cause et, éventuellement, remplacés. Une situationexceptionnelle, tant les entretiensd’embauche sont sélectifs. En effet, seprétendre professeur n’est pas une sinécure au RoyaumeUni, puisque le candidatenseignant doit avant tout faire sespreuves. “Après une sélection drastiquepar CV, les personnes retenues sont invitées à donner une leçon dans une classe etsont ensuite interrogées sur leurs compétences”, détaille Ros. Aucun enseignantde tout niveau ne coupe à cette sélectionà l’entrée, et cette évaluation continueau cours de la carrière. “Une manière derester motivé et attentif”, concluent lesenseignantes.Fanny Leroyà Bristol
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3 QUESTIONS À STÉPHANE CORNET
Porteparole de laministreMarieDominique Simonet (CDH), encharge de l’Enseignement obligatoire. Des primes aumérite pourraientelles apparaître comme des solutions à la baisse demotivationdes enseignants ? Ce système n’est pas prévu par la FédérationWallonieBruxelles, et nous n’y sommes pas favorables. Quel enseignant neserait pasméritant ? Il serait très difficile de fixer des critères objectifstenant compte des spécificités et d’assurer une égalité de traitement.Ce système lancerait unmauvais signal en créant des disparités. Desdirecteurs d’école plus puissants ne sont donc pas à envisager ? Non,l’accompagnement prévu actuellement cadre parfaitement avec laDéclaration de politique communautaire qui insiste sur l’autonomied’action dont bénéficient les établissements scolaires, laquelle devraitleur permettre de rencontrer les objectifs assignés au système éducatifenmatière d’acquisition de compétences, et ce, en tenant compte deleurs réalités particulières. De plus, l’inspection actuelle est exercéepar des personnes qui rencontrent les enseignants à la fois en tant quepairs et experts d’une discipline. En cas demanquement, les professeurs se sententils suffisamment soutenus ? L’action de l’inspectionest complémentaire à celle réalisée par les conseillers pédagogiques.Elle contribue indéniablement à soutenir les établissements dans leurautoévaluation et à faciliter l’accompagnement des équipes éducativesdans leur travail de clarification et d’amélioration de leurs pratiqueséducatives.F.L.
Épinglé
Un pas plus loinPolémique. Soucieux d’optimiser sanscesse son enseignement, le Royaume-Unienvisage d’accélérer les procédures delicenciement des prof incompétents dès larentrée 2012. Une annonce du secrétaire àl’Education, Michael Gove, qui a eu lepouvoir de créer la polémique. “Unesage-femme qui ne fait pas bien son travailne reste pas en position, pourquoi n’enserait-il pas de même pour un professeur?”, lance le politicien. Et d’ajouter, “je suispersuadé qu’avec un bon soutien, nombred’enseignants peuvent s’améliorer, mais sice n’est pas le cas, il doit être possible deles remplacer en moins d’un an”. Même s’ilsouligne que les lois du travail resterontrespectées, l’annonce inquiète les syndi-cats des professeurs britanniques. “Cettemesure est draconienne et attaque leprofessionnalisme des enseignants”,souligne Christine Blower, secrétairegénérale de la National Union of Teachers.Pour leurs collègues titulaires, ce change-ment est à voir dans l’intérêt du corpsprofessoral. “Un système clair et un mana-gement performant sont les clés pourconstruire une réputation profession-nelle”, affirme le secrétaire générale de laNational Association of Head Teachers.F. L.
107OBJECTIFS MANQUÉSAu long de l’année scolaire 20102011, 107 écoles secondaires sur 3300 n’ont pas atteint les objectifs fixés par le département de l’Enseignement britannique. Pour pallier ces manquements, les écolesconcernées subissent actuellement un accompagnement intensif dela part de l’Ofsted, l’organe chargé d’inspecter les divers établissements de la péninsule britannique. Coups de sonde sans avertissement, mais aussi soutien et aide leur sont accordés.
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
7Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Enseignants inspectés? Of coursemaines selon les manquements”, souligneune collègue de Ros Smith, enseignantedans le cycle primaire.
Chaque domaine peut alors passersous la loupe des inspecteurs, et cela, àrépétition si nécessaire. “Il s’agit d’unmoment stressant où chaque membre del’école subit une forte pression. Tout peutêtre contrôlé, et ce, sans avertissementpréalable”, continuetelle. Pour les établissements plus faibles, des mesuresspéciales peuvent même être prises afinde remonter la pente. Dans ces rares cas,certains membres de l’établissementpeuvent être remis en cause et, éventuellement, remplacés. Une situationexceptionnelle, tant les entretiensd’embauche sont sélectifs. En effet, seprétendre professeur n’est pas une sinécure au RoyaumeUni, puisque le candidatenseignant doit avant tout faire sespreuves. “Après une sélection drastiquepar CV, les personnes retenues sont invitées à donner une leçon dans une classe etsont ensuite interrogées sur leurs compétences”, détaille Ros. Aucun enseignantde tout niveau ne coupe à cette sélectionà l’entrée, et cette évaluation continueau cours de la carrière. “Une manière derester motivé et attentif”, concluent lesenseignantes.Fanny Leroyà Bristol
3 QUESTIONS À STÉPHANE CORNET
Porteparole de laministreMarieDominique Simonet (CDH), encharge de l’Enseignement obligatoire. Des primes aumérite pourraientelles apparaître comme des solutions à la baisse demotivationdes enseignants ? Ce système n’est pas prévu par la FédérationWallonieBruxelles, et nous n’y sommes pas favorables. Quel enseignant neserait pasméritant ? Il serait très difficile de fixer des critères objectifstenant compte des spécificités et d’assurer une égalité de traitement.Ce système lancerait unmauvais signal en créant des disparités. Desdirecteurs d’école plus puissants ne sont donc pas à envisager ? Non,l’accompagnement prévu actuellement cadre parfaitement avec laDéclaration de politique communautaire qui insiste sur l’autonomied’action dont bénéficient les établissements scolaires, laquelle devraitleur permettre de rencontrer les objectifs assignés au système éducatifenmatière d’acquisition de compétences, et ce, en tenant compte deleurs réalités particulières. De plus, l’inspection actuelle est exercéepar des personnes qui rencontrent les enseignants à la fois en tant quepairs et experts d’une discipline. En cas demanquement, les professeurs se sententils suffisamment soutenus ? L’action de l’inspectionest complémentaire à celle réalisée par les conseillers pédagogiques.Elle contribue indéniablement à soutenir les établissements dans leurautoévaluation et à faciliter l’accompagnement des équipes éducativesdans leur travail de clarification et d’amélioration de leurs pratiqueséducatives.F.L.
Épinglé
Un pas plus loinPolémique. Soucieux d’optimiser sanscesse son enseignement, le Royaume-Unienvisage d’accélérer les procédures delicenciement des prof incompétents dès larentrée 2012. Une annonce du secrétaire àl’Education, Michael Gove, qui a eu lepouvoir de créer la polémique. “Unesage-femme qui ne fait pas bien son travailne reste pas en position, pourquoi n’enserait-il pas de même pour un professeur?”, lance le politicien. Et d’ajouter, “je suispersuadé qu’avec un bon soutien, nombred’enseignants peuvent s’améliorer, mais sice n’est pas le cas, il doit être possible deles remplacer en moins d’un an”. Même s’ilsouligne que les lois du travail resterontrespectées, l’annonce inquiète les syndi-cats des professeurs britanniques. “Cettemesure est draconienne et attaque leprofessionnalisme des enseignants”,souligne Christine Blower, secrétairegénérale de la National Union of Teachers.Pour leurs collègues titulaires, ce change-ment est à voir dans l’intérêt du corpsprofessoral. “Un système clair et un mana-gement performant sont les clés pourconstruire une réputation profession-nelle”, affirme le secrétaire générale de laNational Association of Head Teachers.F. L.
107OBJECTIFS MANQUÉSAu long de l’année scolaire 20102011, 107 écoles secondaires sur 3300 n’ont pas atteint les objectifs fixés par le département de l’Enseignement britannique. Pour pallier ces manquements, les écolesconcernées subissent actuellement un accompagnement intensif dela part de l’Ofsted, l’organe chargé d’inspecter les divers établissements de la péninsule britannique. Coups de sonde sans avertissement, mais aussi soutien et aide leur sont accordés.
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8 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 9Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
“On essaie qu’ils se sentent comme chez eux”h La vie en internat, ce n’estpas toujours ce que l’on croit.Visite d’un petitétablissement liégeois àl’ambiance très familiale.
Ils sont une soixantaine d’élèves, âgésde 12 à 20 ans, à être accueillis à l’internat libre du cœur de Liège. Cet établissement catholique mixte présenteun profil plutôt atypique, comparé auxinternats traditionnels.
La petite structure regroupe des adolescents poursuivant une scolaritédans diverses écoles liégeoises. Parmieux, on trouve beaucoup de sportifs dehaut niveau (footballeurs au club duStandard et joueurs de badminton dela Ligue francophone), mais aussi desnéerlandophones ou des germanophones venus apprendre le français, et desélèves mis en internat pour des raisonsplus classiques (distance géographique, parents qui souhaitent un encadrement renforcé ou qui travaillenttard).
L’équipe se compose de sept éducateurs, tous également professeurs (institutrice ou logopède), de deux hommes d’entretien, d’une cuisinière (quijoue un rôle particulier dans la vie de lamaison, nous y reviendrons) et d’uneaide cuisinière.
C’est la directrice, Christine La Mattina, qui nous fait faire le tour du propriétaire. “Chaque élève dispose d’unechambre individuelle, avec sa propre clé,qu’il décore comme il veut. Il y a une sallecommune de loisirs. L’internat ouvre ledimanche dès 21h, et accueille les jeunesen semaine de 16h30 à 8h du matin. Iln’y a pas d’éducateurs présents en journée et, donc, pas de garde assurée. Les élèves rentrent de l’école par leurs propresmoyens, sauf les sportifs qui sont convoyés par leur fédération, en raison deleurs horaires décalés. A leur arrivée, lespensionnaires prennent un goûter, puisils peuvent se détendre avant l’étude obligatoire de 17 à 19h. Filles et garçons sontséparés dès 21h, et extinction des feux à22h30.”
Si le règlement semble strict, il sebase aussi sur la liberté que les parentssont prêts à accorder à leurs enfants.“Ce sont eux qui décident si les jeunespeuvent quitter l’établissement ou non,pour des activités extrascolaires, parexemple. De notre côté, nous tâchons detrouver un équilibre entre les règles à respecter et un climat familial que nous souhaitons instaurer pour que les élèves sesentent comme chez eux. J’essaie de créerun climat de confiance, de privilégier ledialogue avec les internes et leurs parents. Je ne suis pas que la personne quisanctionne, mais je dois préciser que noussommes gâtés, car notre public (les sportifs) est sain, poli et drillé. Souvent, les parents me remercient quand je pose dessanctions.”
L’équipe éducative rencontre finalement peu de problèmes de disciplineet d’adaptation à la vie en internat,
comme l’expliquent Bertrand et Caroline, deux des sept éducateurs, euxmêmes anciens internes. “Même si, cha
que année, il y a l’un ou l’autre renvoi définitif, l’ambiance est vraiment bonne. Ilfaut rester cool, mais ferme, et tout baser
sur le respect. Tout le monde connaît toutle monde et l’entraide est grande entre lesinternes”, déclare Bertrand. “La petite
taille de l’internat le permet. On reçoitbeaucoup de confidences et on garde souvent le contact avec les anciens”, ajoute
Caroline. Mais s’il y a bien une personne qui est l’âme et le cœur de cetinternat liégeois, c’est Christine Cor
nélis, la cuisinière. Grâce à sa générosité, sa chaleur humaine et ses talentsde cordonbleu, elle a su gagner l’affec
tion et l’estime de tous. “Certains internes m’appellent maman. Ils viennent mefaire un bisou quand ils rentrent del’école”, ditelle des larmes d’émotiondans les yeux. “Quand j’étais petite, auCongo, j’allais à l’école à 200 km de chezmoi, alors, je sais ce que c’est l’éloignement affectif.” La cuisinière préparetous les jours de bons petits plats équilibrés, adaptés au régime des sportifsou à ceux des musulmans. Elle faitmême des suggestions de menus auxélèves. “Je reçois beaucoup de remerciements et de félicitations de leur part, despetits mots qu’on me laisse en cuisine. Lesparents aussi m’en envoient”, précisetelle, un grand sourire aux lèvres. “Certains me disent : “Tu cuisines mieux quema mère!” C’en est presque gênant…”
Le jour de son anniversaire, les élèveslui ont organisé une petite fête et luiont offert un cadeau. Ces momentsprécieux aident Christine Cornélis àsurmonter le caractère difficile de sonmétier (elle travaille du lundi au jeudide 12 à 21h30).
“Les enfants sont très gentils. Ils sontma force et ils m’aident à tenir.”
A mille lieues des clichés du pensionnat strict et déshumanisant qued’aucuns ont connu, l’internat libre ducœur de Liège a su tirer parti de sa petite taille pour recréer un petit coconoù chaque pensionnaire trouve saplace et peut s’épanouir, tant dans sascolarité que dans la vie en groupe.
“La séparation avec les parents n’estpas trop pesante pour les enfants, grâce àChristine”, affirme la directrice. “Nousavons des élèves qui passent toute leurscolarité chez nous, et nos éducateurschoisissent de revenir d’année en année.Certains sont là depuis 20 ans.”
Preuve, s’il en est, que l’internat, cen’est pas toujours ce que l’on croit.
Isabelle Lemaire
PHOT
ONEW
S
L’internat, entre rires et larmesh Des internes et anciens internestémoignent de leur expérience.
Ils ont entre 15 et 20 ans. Tous sont passés (de gré ou deforce) par la case internat et ils en gardent des souvenirscontrastés. C’est un problème de discipline et de manque derespect de l’autorité qui a conduit les parents de Thomas, 20ans aujourd’hui, à le placer en internat. “Je filais un mauvaiscoton”, admetil. “J’avais des résultats médiocres en classe, etj’étais un chahuteur. J’avais doublé ma troisième, et je manquaistotalement de motivation pour poursuivre mes études. Les rapports avec mes parents et mes profs étaient difficiles. J’étais enpleine crise d’adolescence, et je n’obéissais à rien ni personne.Mes parents, à court d’idées et très inquiets pour mon avenir,ont décidé de m’inscrire dans un internat de la région de Charleroi. Je n’y suis pas allé de gaîté de cœur…”
Pour Thomas, l’acclimatation fut difficile, dans les premiers temps en tout cas. “On débarque dans une nouvelle
école, et il faut se faire une place. Certains internes étaient là depuis des années, et ils se comportaient comme des petits chefs.Puis, on apprend à se connaître et on se fait des amis. Les éducateurs faisaient du bon travail avec nous. L’encadrement étaitbien meilleur que dans mon ancienne école, plus humain, pluspersonnalisé. Cela m’a permis de reprendre confiance en moi etde mieux travailler en classe. Je suis resté un an à l’internat, etj’ai réussi mon année scolaire. J’ai changé d’école, car mes proches me manquaient, même mes parents, finalement. C’est uneexpérience que je considérerai toujours comme positive, car ellem’a remis sur les rails.”
Julie (prénom d’emprunt), 15 ans, est une ancienne interne d’un établissement de la banlieue liégeoise. Elle a trèsmal vécu cette période de deux ans, loin de sa famille. “Jen’avais que 10 ans quand j’ai atterri à l’internat, suite au divorce de mes parents. Je n’ai pas compris la décision de mamère de m’y placer, et cela a été terrible. Les premiers mois, jepleurais constamment, en cachette la plupart du temps. J’étaistrès timide, et je n’osais pas aller vers les autres filles. Mes notesont chuté, tellement j’avais le moral à zéro. Tous les weekends,
je suppliais ma mère de me garder à la maison, mais c’était impossible pour elle, avec son boulot d’infirmière. Je me suis accrochée pendant ces deux années, et je n’ai tenu que grâce à une éducatrice quis’est montrée très gentille avec moi. Elle était la seule présence réconfortante entre ces murs. Je crois qu’être interne quand on est àl’école primaire, c’est dur pour beaucoup d’enfants, même s’ils crânent et ne montrent pas toujours qu’ils souffrent.”
A contrario, pour Alex, 17 ans, élève dans une école bruxelloise, la vie en internat, c’est l’occasion de faire les 400 coups. “Jesuis d’un naturel blagueur et meneur. Quand j’ai débarqué à 14 ans,je n’ai eu aucun mal à me faire des amis, peutêtre pas très fréquentables, mais bon… Très vite, on a formé une petite bande d’inséparables, toujours prêts à s’amuser. Rien de bien méchant, je précise. Onse faufile le soir de chambre en chambre; on passe des nuits blanchesà discuter. On fait quelques blagues qui font tourner les éducateursen bourrique. Les règles de vie sont strictes, mais il y a moyen de lescontourner. Franchement, je serai triste de quitter l’internat en juin(si je réussis mon année !). J’y ai vécu des moments vraiment inoubliables.”I.L.
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9Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
“On essaie qu’ils se sentent comme chez eux”
taille de l’internat le permet. On reçoitbeaucoup de confidences et on garde souvent le contact avec les anciens”, ajoute
Caroline. Mais s’il y a bien une personne qui est l’âme et le cœur de cetinternat liégeois, c’est Christine Cor
nélis, la cuisinière. Grâce à sa générosité, sa chaleur humaine et ses talentsde cordonbleu, elle a su gagner l’affec
tion et l’estime de tous. “Certains internes m’appellent maman. Ils viennent mefaire un bisou quand ils rentrent del’école”, ditelle des larmes d’émotiondans les yeux. “Quand j’étais petite, auCongo, j’allais à l’école à 200 km de chezmoi, alors, je sais ce que c’est l’éloignement affectif.” La cuisinière préparetous les jours de bons petits plats équilibrés, adaptés au régime des sportifsou à ceux des musulmans. Elle faitmême des suggestions de menus auxélèves. “Je reçois beaucoup de remerciements et de félicitations de leur part, despetits mots qu’on me laisse en cuisine. Lesparents aussi m’en envoient”, précisetelle, un grand sourire aux lèvres. “Certains me disent : “Tu cuisines mieux quema mère!” C’en est presque gênant…”
Le jour de son anniversaire, les élèveslui ont organisé une petite fête et luiont offert un cadeau. Ces momentsprécieux aident Christine Cornélis àsurmonter le caractère difficile de sonmétier (elle travaille du lundi au jeudide 12 à 21h30).
“Les enfants sont très gentils. Ils sontma force et ils m’aident à tenir.”
A mille lieues des clichés du pensionnat strict et déshumanisant qued’aucuns ont connu, l’internat libre ducœur de Liège a su tirer parti de sa petite taille pour recréer un petit coconoù chaque pensionnaire trouve saplace et peut s’épanouir, tant dans sascolarité que dans la vie en groupe.
“La séparation avec les parents n’estpas trop pesante pour les enfants, grâce àChristine”, affirme la directrice. “Nousavons des élèves qui passent toute leurscolarité chez nous, et nos éducateurschoisissent de revenir d’année en année.Certains sont là depuis 20 ans.”
Preuve, s’il en est, que l’internat, cen’est pas toujours ce que l’on croit.
Isabelle Lemaire
L’internat, entre rires et larmesje suppliais ma mère de me garder à la maison, mais c’était impossible pour elle, avec son boulot d’infirmière. Je me suis accrochée pendant ces deux années, et je n’ai tenu que grâce à une éducatrice quis’est montrée très gentille avec moi. Elle était la seule présence réconfortante entre ces murs. Je crois qu’être interne quand on est àl’école primaire, c’est dur pour beaucoup d’enfants, même s’ils crânent et ne montrent pas toujours qu’ils souffrent.”
A contrario, pour Alex, 17 ans, élève dans une école bruxelloise, la vie en internat, c’est l’occasion de faire les 400 coups. “Jesuis d’un naturel blagueur et meneur. Quand j’ai débarqué à 14 ans,je n’ai eu aucun mal à me faire des amis, peutêtre pas très fréquentables, mais bon… Très vite, on a formé une petite bande d’inséparables, toujours prêts à s’amuser. Rien de bien méchant, je précise. Onse faufile le soir de chambre en chambre; on passe des nuits blanchesà discuter. On fait quelques blagues qui font tourner les éducateursen bourrique. Les règles de vie sont strictes, mais il y a moyen de lescontourner. Franchement, je serai triste de quitter l’internat en juin(si je réussis mon année !). J’y ai vécu des moments vraiment inoubliables.”I.L.
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Garçons et filles àl’école, une évidence ?
h La mixité scolaire estobligatoire en Communautéfrançaise depuis 1997.
h Désormais perçue commela normalité, la questioncontinue de diviser.
Les écoliers d’un côté, les écolières del’autre. Il est bien loin le temps où lespetits garçons et les jeunes filles enfleurs pouvaient jouer et s’amuser entoute innocence (naïveté ?), à l’abri desregards apparemment condescendants,mais en réalité tellement attendrissantsde leurs camarades.
Aujourd’hui, la mixité sexuelle àl’école s’impose littéralement commenorme, est accueillie par la sociétécomme quelque chose d’incontestable,d’inébranlable… Bref, de tellement indéboulonnable que d’aucuns s’étonneront peutêtre de voir leur journal yconsacrer une double page et ce, àl’aube de l’année 2012. Et pourtant, lesujet passionne et divise toujoursautant les professeurs, pédagogues etautres psychiatres. Emergeant ici et làdès 1960, la mixité scolaire se généralise chez nous dans le courant des an
nées septante. A l’époque, il n’existeaucune législation belge en la matière. Ilfaut attendre 1997 pour voir la Communauté française en faire une obligation légale, du moins dans les écoles quilui sont rattachées.
“C’était essentiellement une façon d’officialiser les choses, de faire évoluer les comportements des quelques dernières écolesnon mixtes – notamment catholiques– quisubsistaient encore. Car dans les faits, lechangement s’était déjà opéré massivement avant cette date théorique”, expliqueton au cabinet de la ministre del’Enseignement obligatoire, MarieDominique Simonet (CDH). Une disposition – coulée dans le marbre – dontl’ambition était de faire de la mixitésexuelle à l’école un gage d’égalité. Egalité des sexes, égalité des chances. Undiscours hypocrite aux yeux de certains,un échec selon d’autres. “La mixité scolaire a échoué, puisque l’égalité des sexesn’est toujours pas assurée”, écrit MichelFize (1), sociologue français et spécialiste des questions de l’adolescence.Pour lui, au contraire, ce mélange génère des inégalités. A certains âges, particulièrement à 11, 12 ans, les filles etgarçons se distinguent tellement les unsdes autres – notamment par leur développement physique et psychique –qu’il paraît peu sensé de les éduquer ensemble. Un point de vue que partage to
talement une quinquagénaire et “rescapée” de l’école non mixte : “Nous, lesfilles, vivions comme dans un cocon. Ongrandissait ensemble sans se soucier de lagent masculine. Pour ma part, j’aurais ététotalement perturbée de côtoyer le sexe opposé à l’école durant mon adolescence.”Avant d’ajouter : “Et inversement, je penseque les garçons auraient eu l’attention fortement détournée par notre présence.”
Car il est là le nœud du problème. Selon de nombreuses études anglosaxonnes menées sur la question, lamixité sexuelle à l’école constitueraitun frein, une entrave à l’apprentissagescolaire. Et ce, davantage du côté dusexe dit “fort”. Les jeunes hommes obtiendraient ainsi de moins bons résultats que les demoiselles. “Les garçonsjouent les durs pour affirmer leur virilité”,raconte Marie DuruBellat (2), sociologue française et spécialiste de la psychologie sociale. Qui poursuit : “Certainsvont jusqu’à rejeter purement et simplement l’école, pensant peutêtre qu’il s’agitlà d’un acte digne d’un mâle, d’un vrai.”
Un élève de 6e secondaire témoigne :“Sans doute que la présence de filles enclasse en a perturbé plus d’un, que certainsauraient été plus performants s’ils avaientété séparés de leurs camarades féminins.Mais, finalement, je ne pense pas que lesrésultats soient la chose la plus importanteà l’école.”
Pour ses défenseurs, la mixité scolairedoit surtout apprendre aux jeunes à vivre ensemble et ce, dès les premièresannées de leur existence. “C’est un véritable projet de société. Il s’agit de favoriserune vision d’une école non discriminatoireà références démocratique, universaliste etpluraliste”, estime JoséLuis Wolf, professeur et coordinateur du service desSciences de l’Education à l’ULB. “Personnellement, j’ai beaucoup souffert de lanonmixité”, avoue une ancienne écolière. Qui poursuit : “Je n’avais pas defrère et je ne voyais plus mon père. J’ignorais tout du sexe masculin. Cela a suscitéchez moi une forme de crainte de l’étranger.” Et un directeur de conclure : “L’institution scolaire se doit de donner aux élèves une image représentative de ce qu’estla société, à savoir un mélange d’hommeset de femmes.”
La mixité sexuelle à l’école, un gaged’égalité ? Un nonsens à l’adolescence ?Une entrave aux performances scolaires? Ou un véritable projet de société ?Le débat reste ouvert…A.D.U(1) “Les pièges de la mixité scolaire”,Michel Fize, Presses de la Renaissance,2003, 274 pp.(2) “Ce que la mixité fait aux élèves”,Marie Duru-Bellat, Revue de l’OFCE,n°114, 2010/3.
PHOT
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S10 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
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12 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 13Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
L’école entre quatre mursh Comment poursuivre sascolarité lors d’un placementen IPPJ ?
h Regards croiséssur les systèmesmis en place à SaintServaiset à Jumet.
Décrochage, renvois, absentéisme, démotivation, échecs, les adolescents placés en IPPJ ont bien souvent derrièreeux un parcours scolaire très chaotique. Pour ces mineurs enfermés, l’écolereste obligatoire, comme pour toutjeune de moins de 18 ans. La missiondu personnel enseignant des IPPJ est deles aider à se remettre sur les rails de lascolarité afin de leur offrir une perspective de réinsertion à la sortie. L’IPPJ deSaintServais accueille des filles de 12 à18 ans.
La moitié des adolescentes n’ont pasleur CEB. L’institution dispense descours intramuros. Sa directrice, MarieChristine Delbovier, nous expliquecomment les cours s’organisent. “Nousavons sept classes de cinq ou six élèves, découpées par aptitude et section : une classesas (d’accueil), une du premier degré différencié, une autre de général et technique et quatre classes de professionnel(coiffure, vente, services sociaux et enseignement spécialisé). A leur arrivée,les jeunes filles sont évaluées puis orientées vers la classe qui leur convient lemieux.”
Onze enseignants à temps plein travaillent à l’IPPJ. “Des professeurs ayantune grande motivation à enseigner dansce cadre très particulier, qui offrent unevraie capacité d’écoute et d’aide aux élèves”, souligne la directrice.
En section éducation, 29 heures decours par semaine sont données. “A
cela, s’ajoutent une heure d’étude chaquesoir et une aide renforcée à la préparationdes examens, en temps voulu.”
Et en section fermée, réservée à desséjours de six semaines maximums,des cours généraux sont dispensés lematin. “Ici, il s’agit surtout d’alphabétisation et d’un maintien des acquis.”
Toutes les jeunes filles sont inscritesdans une école de la région, ce qui permet de valider les examens. Et des contacts sont pris avec leur école d’origineou un nouvel établissement pour assurer une continuité dès la sortie. Lesliens qui se tissent entre élèves et profssont souvent très forts et les problèmesrencontrés pas si différents de ceux quel’on trouve ailleurs. “La principale difficulté, c’est la concentration des problèmes, car toutes les filles en ont. Mais celas’estompe vite grâce au cadre qui les rassure, à l’attention soutenue qu’on leurporte et à un programme de cours personnalisé. Nous avons mobilisé beaucoup demoyens pour dire aux jeunes à quel pointl’école, c’est important. Le taux de réussiteaux examens de juin est de 50 %, maisaprès la sortie, ça ne tient pas la route.C’est décourageant et choquant, parceque cela signifie qu’on manque de moyensà l’extérieur pour un encadrement sur lelong terme.”
A l’IPPJ de Jumet, réservée aux garçons, la scolarité se déroule extramuros. L’équipe se charge de trouver uneécole pouvant accueillir les mineursplacés. “Nous avons créé un excellent ré
seau avec une cinquantaine d’établissements du bassin de Charleroi, indique ledirecteur, JeanPierre Blairon. Nous neplaçons qu’un seul jeune par école et seulsle directeur et un éducateur sont mis aucourant de sa situation. Certains jeunesarrivent en cours d’année scolaire, mais lesystème mis en place permet des inscriptions tardives”.
Concrètement, l’IPPJ et le mineurplacé scolarisé s’engagent dans un contrat de confiance, avec, toutefois, unpeu de surveillance. “Le matin, nous lesconduisons à l’école, à charge pour eux derentrer par leurs propres moyens (nousleur fournissons des tickets de bus oude train). Un éducateur téléphone àl’école matin, midi et soir pour vérifierque le jeune s’y trouve bien. En cas de problème, nous pouvons intervenir rapidement, sur demande. Si l’élève est renvoyétemporairement, il intègre une classe derattrapage à l’IPPJ, sur base des coursfournis par l’école. En cas de renvoi définitif, on lui trouve un autre établissement.Le soir, les élèves ont minimum une heured’étude dans leur chambre, en compagnied’un éducateur ou d’un enseignant. Nousorganisons également des remédiationset des weekends pédagogiques à l’approche des examens, où les jeunes doiventrester à l’institution.”
La philosophie développée par l’institution est claire : renouer avec l’école
et préparer le retour à une réinsertionscolaire à la sortie.
En 2007, Ingrid Gilles, criminologueet assistante sociale du Service droitdes jeunes de Namur, a consacré sonmémoire à la scolarisation en IPPJ.
Dans son travail, elle donne la paroleà des jeunes enfermés à Jumet (1). Ilsévoquent leur parcours scolaire antérieur difficile et à quel point l’école n’apas été “pensée pour eux”.
Quand ils arrivent à l’IPPJ et qu’ilsdoivent se plier à l’obligation scolaire,les réactions sont contrastées, allant dela révolte à la satisfaction. L’étude d’Ingrid Gilles montre que, globalement,au bout de quelque temps, l’absentéisme recule et que les relations profsélèves s’améliorent.
L’auteur conclut que l’effet positifjoué par l’encadrement adapté – offertpar le système développé à Jumet – nedure pas à la sortie. Et elle plaide pourla nécessité de créer de nouvelles formes d’apprentissage à destination de cepublic particulier.
Isabelle Lemaire
U (1) “La scolarisation au départ de l’IPPJde Jumet : qu’en disent les jeunes ?”,consultable sur www.sdj.be, onglet“banques de données”. L’école obligatoire,c’est aussi en IPPJ.
REPO
RTER
S
Épinglé
Et en prison ?Carences. Le droit à la formation enprison est reconnu par la loi et est un desoutils préparant la réinsertion desdétenus. Les cours dispensés (alphabéti-sation, formation préqualifiante, remiseà niveau, promotion sociale…) ne sontpas du luxe, puisqu’une large part de lapopulation carcérale dispose seulementdu CEB ou n’a pas de diplôme du tout.Mais dans les faits, l’éducation et laformation en prison sont délaissées parles pouvoirs publics, comme le souli-gnent régulièrement la Ligue des droitsde l’homme et des associations deterrain. Manque de locaux adaptés, dematériel, de personnel enseignant, definancement, attitude parfois hostile desgardiens sont autant d’obstacles à lamise en place d’un véritable systèmeéducatif. L’éducation en prison varieénormément d’un établissement péniten-tiaire à l’autre. Dans certaines prisons,seuls les détenus vivant dans des ailesprécises ou ceux qui ne travaillent pasont le droit de suivre des cours. Depuisdes années, les associations plaidentpour un engagement plus fort et pluscohérent en la matière de la part de l’Etatet des entités fédérées, sans grandrésultat à ce jour.
Quels profsavec quelleformation ?h Le point sur la législationen vigueur.
Il existe cinq IPPJ et un centre fédéralfermé en Belgique francophone, quiaccueillent 182 mineurs délinquants,âgés de 12 à 18 ans, pour une durée allant de quelques jours à un an.
Le projet pédagogique prévoit que“l’enseignant participe à l’observationcontinue des élèves. Il évalue leurs acquispédagogiques, leurs capacités, et dispenseune formation adaptée, qu’elle soit d’initiation, de remédiation ou de perfectionnement. Il effectue un suivi cognitif etéducatif. Il organise des activités diversesà caractère culturel, sportif, récréatif, artistique… et inculque les attitudes scolaires et/ou professionnelles adéquates”.
Cinquantesix enseignants effectifssont employés, et 53 d’entre eux sontdiplômés de l’enseignement supérieur,dans les catégories sociales, pédagogiques, techniques, économiques, agricoles, paramédicales ou artistiques detype court, condition pour pouvoir enseigner en IPPJ.
Avant 1996, un diplôme de l’ensei
gnement secondaire supérieur étaitsuffisant pour y être éducateur ou formateur. Pour les formateurs professionnels, un diplôme de l’enseignement professionnel était au minimumrequis. La législation actuelle ne prévoit pas d’enseignants ni d’activitésd’enseignement pour les jeunes placéspour une durée inférieure à 42 jours.
Toutefois, une forme de prise encharge scolaire existe, qui peut comporter une préparation à la présentation d’examens, un maintien des acquis scolaires ou une remise à niveauponctuelle. Les activités scolaires varient selon le régime auquel le jeuneest soumis (ouvert ou fermé).
Les cours généraux en IPPJ sont confiés à des titulaires de diplômes d’instituteurs, régents ou agrégés de l’enseignement secondaire inférieur. Ce sontdes éducateurs spécialisés qui dispensent les autres activités de formation etateliers, un choix justifié, notamment,par la nécessité de disposer d’agentsexpérimentés dans la conduite d’ungroupe de jeunes ayant commis des infractions.
I.L.
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13Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
L’école entre quatre murs
et préparer le retour à une réinsertionscolaire à la sortie.
En 2007, Ingrid Gilles, criminologueet assistante sociale du Service droitdes jeunes de Namur, a consacré sonmémoire à la scolarisation en IPPJ.
Dans son travail, elle donne la paroleà des jeunes enfermés à Jumet (1). Ilsévoquent leur parcours scolaire antérieur difficile et à quel point l’école n’apas été “pensée pour eux”.
Quand ils arrivent à l’IPPJ et qu’ilsdoivent se plier à l’obligation scolaire,les réactions sont contrastées, allant dela révolte à la satisfaction. L’étude d’Ingrid Gilles montre que, globalement,au bout de quelque temps, l’absentéisme recule et que les relations profsélèves s’améliorent.
L’auteur conclut que l’effet positifjoué par l’encadrement adapté – offertpar le système développé à Jumet – nedure pas à la sortie. Et elle plaide pourla nécessité de créer de nouvelles formes d’apprentissage à destination de cepublic particulier.
Isabelle Lemaire
U (1) “La scolarisation au départ de l’IPPJde Jumet : qu’en disent les jeunes ?”,consultable sur www.sdj.be, onglet“banques de données”. L’école obligatoire,c’est aussi en IPPJ.
Épinglé
Et en prison ?Carences. Le droit à la formation enprison est reconnu par la loi et est un desoutils préparant la réinsertion desdétenus. Les cours dispensés (alphabéti-sation, formation préqualifiante, remiseà niveau, promotion sociale…) ne sontpas du luxe, puisqu’une large part de lapopulation carcérale dispose seulementdu CEB ou n’a pas de diplôme du tout.Mais dans les faits, l’éducation et laformation en prison sont délaissées parles pouvoirs publics, comme le souli-gnent régulièrement la Ligue des droitsde l’homme et des associations deterrain. Manque de locaux adaptés, dematériel, de personnel enseignant, definancement, attitude parfois hostile desgardiens sont autant d’obstacles à lamise en place d’un véritable systèmeéducatif. L’éducation en prison varieénormément d’un établissement péniten-tiaire à l’autre. Dans certaines prisons,seuls les détenus vivant dans des ailesprécises ou ceux qui ne travaillent pasont le droit de suivre des cours. Depuisdes années, les associations plaidentpour un engagement plus fort et pluscohérent en la matière de la part de l’Etatet des entités fédérées, sans grandrésultat à ce jour.
Quels profsavec quelleformation ?h Le point sur la législationen vigueur.
Il existe cinq IPPJ et un centre fédéralfermé en Belgique francophone, quiaccueillent 182 mineurs délinquants,âgés de 12 à 18 ans, pour une durée allant de quelques jours à un an.
Le projet pédagogique prévoit que“l’enseignant participe à l’observationcontinue des élèves. Il évalue leurs acquispédagogiques, leurs capacités, et dispenseune formation adaptée, qu’elle soit d’initiation, de remédiation ou de perfectionnement. Il effectue un suivi cognitif etéducatif. Il organise des activités diversesà caractère culturel, sportif, récréatif, artistique… et inculque les attitudes scolaires et/ou professionnelles adéquates”.
Cinquantesix enseignants effectifssont employés, et 53 d’entre eux sontdiplômés de l’enseignement supérieur,dans les catégories sociales, pédagogiques, techniques, économiques, agricoles, paramédicales ou artistiques detype court, condition pour pouvoir enseigner en IPPJ.
Avant 1996, un diplôme de l’ensei
gnement secondaire supérieur étaitsuffisant pour y être éducateur ou formateur. Pour les formateurs professionnels, un diplôme de l’enseignement professionnel était au minimumrequis. La législation actuelle ne prévoit pas d’enseignants ni d’activitésd’enseignement pour les jeunes placéspour une durée inférieure à 42 jours.
Toutefois, une forme de prise encharge scolaire existe, qui peut comporter une préparation à la présentation d’examens, un maintien des acquis scolaires ou une remise à niveauponctuelle. Les activités scolaires varient selon le régime auquel le jeuneest soumis (ouvert ou fermé).
Les cours généraux en IPPJ sont confiés à des titulaires de diplômes d’instituteurs, régents ou agrégés de l’enseignement secondaire inférieur. Ce sontdes éducateurs spécialisés qui dispensent les autres activités de formation etateliers, un choix justifié, notamment,par la nécessité de disposer d’agentsexpérimentés dans la conduite d’ungroupe de jeunes ayant commis des infractions.
I.L.
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14 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Feu vert au durableh Les offres d’emploi liéesau secteur du développementdurable explosent.
h Les formations supérieuresrépondentellesà cette nouvelle niche ?
Consultant en environnement, responsable technique en énergie renouvelable,… Les offres d’emploi verdissentpour répondre aux réalités environnementales. Un nouveau marché crucialet florissant qui demande connaissanceet expertise.
Mais sortil suffisamment d’étudiantsformés des établissements supérieurs ?“Non, pense Thierry Vandebroek, administrateurdélégué de l’ASBL “Poseco”,un organisme chargé de valoriser l’économie dite “positive”. “L’enseignementest globalement ouvert et attentif à ces récents enjeux mais il manque de moyens etde connaissances pour développer son potentiel. Pourtant, de nouveaux métiers liésà l’environnement apparaissent sanscesse et il convient de ne pas rater le cochepour continuer à faire évoluer correctement ce milieu” , ajoutetil.
Forte de sa volonté d’accentuer les valeurs humaines dans le monde de l’économie, “Poseco” projette notamment
d’organiser de plus en plus de rencontres entre professeurs, étudiants et entrepreneurs engagés. “Le corps professoral doit entrer en contact avec la réalitéde terrain afin d’adapter au mieux lesétudes”, précise Thierry Vandebroek,tout en soulignant l’intérêt vif et grandissant du secteur éducatif.
Une démarche proactive et adaptéequi a notamment été enclenchée àl’Université catholique de Louvain oùs’organisent des masters complémentaires en science et gestion de l’environnement. Ouverte à tous les diplômés de second cycle, la formation entend clairement répondre à desnouvelles demandes du marché du travail. “Nous initions nos étudiants aux disciplines liées à l’environnement afin qu’ilsles cernent, les comprennent et puissentles vulgariser. Ils doivent obligatoirementtester leurs nouveaux acquis lors de stageen entreprises, ONG ou organes gouvernementaux. Des structures qui nous présentent chaque année plus d’offres destage que nous n’avons d’étudiants”, explique Patrick Gerin, coordinateur de laformation. Un succès que perçoit parfois mal le monde scientifique, avide deperfectionnisme. “L’idée n’est pas defaire sortir des spécialistes mais bien despersonnes aux compétences pluridisciplinaires susceptibles d’être les maillons quirelient plusieurs problématiques ou acteurs environnementaux”, insistetil.
Si la formation, créée il y a plus de dixans, était au départ plébiscitée par lesscientifiques, ce public lui a
aujourd’hui tourné le dos contrairement à celui des sciences humaines,voire des adultes soucieux de fortifierou réorienter leur carrière. Pour les instances extérieures à l’enseignement,cette formation est un plus mais l’impulsion est encore à propager. “Il convient de travailler en amont afin de répondre aux besoins des nouvelles entreprises”, précise Thierry Vandebroek.
Pour Geoffroy Hecquet, conseiller enorientation et en insertion professionnelle au CIO de LouvainlaNeuve, ladémarche devrait même être pousséeplus loin. “Le développement durable estaujourd’hui un enjeu sociétal reconnu. Ence sens, cette perspective devrait être intégrée à toutes les études afin d’offrir unéventail de compétences variées pour servir le secteur d’emploi”, imaginetil.Membre actif du centre d’informationaux études, Geoffroy Hecquet est àmême d’écouter les envies des jeunes.“Après les humanités, les élèves sont idéalistes. Au sortir de leurs études, ils deviennent réalistes. Peu d’entre eux sont pourtant capables de faire correctement valoirleur diplôme. Une formation supplémentaire a l’avantage de les mettre en confiance”, ajoutetil.
Montrer la voie et les sillons créés parcertains pionniers pour rendre les novices confiants, telle l’une des missionsde “Poseco”. Chaque jour, son portaillié à l’entreprenariat positif génère 800visites. “Nous divulguons des conseilspour accompagner les entrepreneurs quisouhaitent répondre à des valeurs et à de
nouveaux besoins économiques et environnementaux. Nous encourageons aussiles étudiants à creuser ces secteurs”, détaille Thierry Vandebroek.
Depuis trois ans, “Poseco” a d’ailleurslancé le Student Positive Award, unprix à décerner aux meilleurs travauxde fin d’étude liés à l’économie positive.
“Les écoles de business sont aujourd’huidemandeuses de participer à cette organisation. Par ce biais, nous souhaitons encourager les jeunes à affiner la qualité deleur mémoire et pousser les professeurs àse mettre à niveau”, continuetil. Maiscette remise en question qui vise uneréforme plus verte n’est pas l’uniqueapanage de l’enseignement supérieurcomme le souligne l’administrateurdélégué de l’ASBL.
“Le milieu de l’alimentation durablemanque par exemple cruellement de personnes formées. Le potentiel d’adaptationpar rapport au développement durabledes écoles techniques est totalement sousestimé. Pourtant cette visée peut être porteuse et motivante pour ces élèves.”
Se soucier des enjeux d’aujourd’hui etde demain… Tel est aussi le rôle despouvoirs politiques. “Les autorités publiques cherchent à créer une spirale positivemais ce sont d’abord les acteurs de l’enseignement qui doivent prendre consciencede ce tournant. Le gouvernement a, lui,tout intérêt à créer des stimuli pour vitaliser ces challenges”, conclut Thierry Vandebroek.Fanny Leroy
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Les kots passentau passifMercator I. En 10 ans, la populationuniversitaire présente sur la ville deLouvainlaNeuve a enflé, passant de15 000 étudiants à quelque 20 000jeunes. Sans compter le mouvement defréquentation similaire constaté dansles écoles supérieures alentour, le siten’offre aujourd’hui plus suffisammentde logements à loyer réduit.Une problématique prise à braslecorps par l’Université catholique deLouvain notamment qui a enclenché laconstruction de 600 logements supplémentaires d’ici l’horizon 2013.Le plus : ces nouveaux toits sont prêts àrespecter les normes environnementales. Aussitôt décidé, presque aussitôtmis en route, le projet Mercator I accueille déjà, depuis la rentrée 2011,plus de 119 locataires.Le bâtiment, à basse énergie, cumuleles consignes passives, avec notammentdes panneaux solaires ou un parc àvélos.Une initiative prise pour répondreconjointement au boom de populationétudiante mais aussi aux exigencesenvironnementales et adoptée pard’autres établissements comme l’Institut Paul Lambin à WoluweSaintLambert.Quaranteneuf nouvelles chambressont ainsi mises à disposition des étudiants depuis 2011. Avec un tel engagement, l’Institut offre la possibilité auxétudiants de réduire par quatre leurconsommation énergétique globale.F. L.
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15Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
“Il faut changer l’ensembledu système éducatif”h “Ecole, toutrepenser. Pistes pourreconstruire”, Débatde la revue “Politique”
Jacques Cornet ensera l’intervenantprincipal.
Déficit de mixité sociale, inégalités sociales, compétitionentre élèves et entre écoles,élitisme,… Le système scolaireest régulièrement mis sous lefeu des critiques. Ne fautilpas, dès lors, repenser l’école,examiner les pistes pour reconstruire le système scolaire,trouver des solutions pour endiguer les inégalités sociales ?Telles sont les grandes questions abordées le 14 mars lorsdu débat “Ecole, tout repenser.Pistes pour reconstruire” organisé par la revue “Politique”,en collaboration avec l’Athénée Léonie de Waha. Le sociologue, formateur d’enseignants et membre du mouvement sociopédagogique“Changement pour l’égalité”(CGé), Jacques Cornet, y prendra part en tant qu’intervenant principal. Interview.
Le débat s’intitule “Ecole, toutrepenser”. Faut-il vraiment toutreconsidérer dans notre systèmescolaire ?
Oui et non. Bien sûr, il y ades initiatives et des expériences qui sont menées etqui sont intéressantes.Dans la majorité des écoles,il y a bien toujours un profqui fait des choses extraordinaires. Et dans la massedes écoles, il y en a toujoursl’une ou l’autre qui a desprojets collectifs plus intéressants. Donc, évidemment, il y a du positif. Maisce qui est remis en question, c’est l’ensemble dusystème. Même dans lesécoles, il commence à yavoir ce sentiment qu’il serait temps d’essayer dechanger quelque chose.
C’est-à-dire ?Tous les indicateurs subjectifs sont au rouge : le tauxd’abandon de la professiondans les cinq premières années d’enseignement, l’ennui des élèves sur les bancsde l’école. Mais cela ne touche pas seulement la Belgique. Des enquêtes menéesaux PaysBas et en Italieont ainsi révélé que les en
seignants deviennent laprofession la plus touchéepar les congés de maladiepour raisons psychiatriques, de stress, etc. Quantaux indicateurs objectifs,Pisa montre bien que notresystème scolaire fabriqueénormément d’inégalités :environ un quart des jeunes de 16 ans n’ont pas unniveau en lecture efficacepour se débrouiller dans lavie. Que vont devenir cesgosses ? C’est du gibier deCPAS ! On ne peut donc pascontinuer comme ça.
Que manque-t-il en Communautéfrançaise pour vaincre les inéga-lités ?
Si l’on décide que, toutd’un coup, l’enseignementobligatoire est un tronccommun jusqu’à 16 ans,sans aucune différence entre les écoles, cela va casserce lien entre trajectoire socioprofessionnelle et trajectoire scolaire. Si l’on ditque l’école n’a pas pourmission de préparer à l’emploi, mais de faire entrerdans la culture et de formerà la citoyenneté, à la participation à la société, et quel’on charge la formationprofessionnelle de se faireaprès et en dehors, en alternance ou en collaboration avec les entreprises,c’est sûr que les choseschangeraient. Mais au moment où je le dis, je n’ycrois pas moimême. Et ce,pour des raisons qui tiennent à la sociologie et àl’évolution de la société : laclasse moyenne (environ80 % de la population) esttrès angoissée et s’inquièteénormément pour ses enfants. Et avec la crise, cen’est pas maintenant quel’on va pouvoir découplerl’école de la formation professionnelle des jeunes.
Une étude d’ampleur a étémenéesur la formation initiale des pro-fesseurs. Le ministre de l’Ensei-gnement supérieur Jean-ClaudeMarcourt (PS) souhaite la fairepasser de 3 à 5 ans. En tant queformateur d’enseignants, qu’enpensez-vous ?
Passer de 3 à 5 ans, ce n’estpas nouveau; c’est unevieille recommandation. Ilest évident que plus de formation et une formationdifférente sont nécessaires.Mais je ne suis pas sûrqu’on aille vers ça, entreautres, parce que Bologneoriente la formation d’unemanière qui ne me semble
pas favorable. Surtout, former en 5 ans va donnerlieu aux grandesmanœuvres, c’estàdireaux bagarres entre les universités et les Hautes écolespour savoir qui va fairequoi, qui va prendre quoi,etc.
Et sur la formation en elle-même,y a-t-il des changements à appor-ter ?
Il y a, en effet, quelquesprincipes fondamentauxque l’on n’entend guère,malheureusement, dansles discours sur la formation. Il y a d’abord la règlede l’isomorphisme, c’estàdire que les enseignants nefont pas ce qu’on leur a dit,mais ce qu’on a fait aveceux. Donc, si l’on veut queles enseignants ne répètentpas ce qu’ils ont toujoursconnu, il faut que, dansleur formation, ils aient desexpériences de formation
qui soient telles que cellesque l’on voudrait qu’ilsaient avec leurs élèves, etcela, pas seulement dans lediscours, mais égalementdans la pratique. Mais là,on est loin du compte. Pourmoi, c’est très important,parce qu’on ne peut pasfaire de formation d’enseignants sans penser la formation comme une véritable transformation identitaire.
Comment y parvenir ?Cela nécessite des expériences éducatives très fortes : il faut que les jeunessoient pris dans des chosesqui comptent pour eux etqui les amènent à changer,parce qu’il y a une série dechoses qui sont énormes àchanger. Exemple ? Modifier le rapport aux savoirs.Aujourd’hui, dans l’enseignement, les savoirs sontpratiquement toujours
présentés comme des savoirs donnés ou révélés. Or,il faudrait les concevoircomme des savoirs qui sontconstruits, car s’ils sontconstruits, cela veut direqu’on peut les déconstruire, qu’ils ne sont pas finis, qu’ils se poursuivent,etc.
Quels sont les autres chantiers àentamer dans la formation desenseignants ?
Il y a un travail plus classique à mener, notammentsur la didactique des disciplines : chaque discipline aune didactique propre. Demême, si l’on veut que lesenfants de milieux populaires réussissent, il y a toutun travail à réaliser sur lesrapports au savoir de cesmilieux, ce qui n’est pratiquement pas enseigné, nidans les écoles normales nià l’université.
Stéphanie Bocart
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16 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 17Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
L’orthographe, trop compliquée ?h L’orthographe françaiseest l’une des plus difficilesau monde.
h Le Conseil de la languefrançaise plaidepour sa rationalisation.
EntretienStéphanie Bocart
Une rencontredébat “grammaire etenseignement”, s’est tenue au mois demai dernier à Bruxelles à l’initiative duConseil de la langue française et de lapolitique linguistique (CLFPL), de l’Administration générale de l’enseignementet de la recherche scientifique, et del’Administration générale de la cultureet de son Service de la langue française.
L’occasion pour “La Libre” d’élargir lepropos à l’enseignement de la languefrançaise dans nos écoles, avec GeorgesLegros, professeur émérite aux Facultésuniversitaires NotreDame de la Paix àNamur (FUNDP).
Ancien membre reconduit du Conseilde la langue française et président de lacommission “Enseignement”, il s’est notamment occupé de réformes orthographiques.
Il se dit régulièrement qu’il y a un nivelle-ment par le bas dans l’apprentissage de lalangue française. Qu’en pensez-vous ?
Ce que nous essayons de prôner auConseil de la langue française et departager dans des journées commecelle de mercredi, c’est un changement de point de vue. Il nous semblequ’il faut essayer de déplacer le curseur sur deux points fondamentaux.
Quels sont-ils ?Le premier concerne le niveau. En1995, le ministère de l’Education, enFrance, a mené une grande enquêtecomparative entre les performances à
l’écrit des élèves français de 12 à 14ans de 1995 et ceux de 1925. Il avaitmesuré que les élèves de 1995 faisaient 2,5 fois plus de fautes d’orthographe que les élèves de 1925 – on adonc là une baisse de niveau chiffrée–, mais, en même temps, ils avaientbeaucoup mieux réussi l’épreuve derédaction. Il faut donc changer l’idéequ’il y a un et un seul niveau, et qu’ilest constamment en baisse. Visàvisdu grand public, il faut déplacer cettereprésentation fantasmatique du niveau : il y a des performances quibaissent, il y a même des choses quidisparaissent de la langue (comme ladéclinaison latine), tandis qued’autres choses se mettent en place,et ce n’est pas nécessairement unebaisse de niveau. Second point, auConseil de la langue, nous avons priscomme philosophie l’idée que la langue doit être au service des usagers etnon l’inverse, c’estàdire qu’il ne fautpas toujours faire porter le poids desratés ou des échecs sur l’usager. S’il y ades fautes d’orthographe, on dira quec’est parce que les gens ne connaissent pas l’orthographe. Nous, nousdisons que c’est aussi la faute de l’orthographe, parce qu’elle est inutilement compliquée. Après tout, rien nenous l’impose. On pourrait peutêtrela changer ou en changer une partie.
L’orthographe française est, en effet, l’unedes plus difficiles au monde…
Oui, si pas, peutêtre, la plus difficilede toutes. En espagnol, par exemple,où l’orthographe est infiniment plussimple, très régulièrement, l’Académie espagnole de Madrid, en concertation avec toutes les Académies dumonde hispanophone, met à jourl’orthographe et publie cette mise àjour. Par contre, en français, où l’orthographe est archicompliquée, dèsque l’on parle d’une toute petite miseà jour d’une toute petite rectification,comme en 1990, cela soulève passions et querelles. Et personne n’enveut. Il y a donc une tradition paraly
sante qui nous bloque dans une orthographe horriblement compliquée.
Il y a eu des rectifications de l’orthographefrançaise en 1990. Faudrait-il aller plus loinavec une “vraie” réforme ?
Oui, parce que l’orthographe française est très difficile, sans véritableraison ou bénéfice, et que les élèvesjeunes en souffrent. Jusqu’au pleinmilieu du XVIIIe siècle et encore plustard dans beaucoup d’endroits, onapprenait à lire en latin, parce qu’enlatin, l’orthographe est facile. Etquand on savait lire, on apprenait petit à petit des textes français, ce quiétait beaucoup plus compliqué.D’ailleurs, au XVIIIe et jusqu’au milieu du XIXe siècle, on a régulièrement réformé l’orthographe française. C’est après que cela s’est figé.Donc, il faut essayer de simplifierl’orthographe parce qu’elle cause degrosses difficultés de lecture et, surtout, d’écriture. Donc, elle coûte trèscher à l’apprentissage et installe chezles élèves un sentiment d’insécuritélinguistique – cette fameuse hantisede la faute d’orthographe est si typique des francophones. Il faudraitdonc avoir le courage, comme pourd’autres langues, de rationaliser etsimplifier l’orthographe.
Un écrivain belge reconnu s’émouvait ré-cemment qu’il recevait parfois des courriersde professeurs de français truffés de fautesd’orthographe. Que pensez-vous de la for-mation que reçoivent nos enseignants engrammaire et en orthographe ?
Il y a tout d’abord un paramètre d’ordre sociologique. Sans avoir aucun jugement méprisant, il semble que lacarrière d’enseignant n’attire plusmajoritairement les premiers declasse. Ensuite, au niveau de la formation des enseignants, c’estàdire del’enseignement supérieur, il y a desaspects que l’on considère comme acquis – l’orthographe ne s’enseignepas à l’unif –; or, ils ne sont pas acquis.Les formateurs font ce qu’ils peuvent
avec le matériel qu’ils ont et le tempsdont ils disposent, et, en effet, on nepeut pas du tout dire que tous les enseignants de français sont des virtuoses de l’orthographe ni, en général, dela norme.
Précisément, que devient la norme ortho-graphique ?
Toute notre société, depuis quelquesdécennies, a affaibli l’idée même denorme dans tous les domaines, ycompris dans la langue. On trouvequ’il faut parler, se faire comprendre,éventuellement être un virtuose de lacommunication, mais la norme orthographique… Ce n’est plus la mêmesociété qu’il y a 50 ou 60 ans. Et donc,les enseignants baignent aussi dansce climatlà : quand bien même ils essaieraient d’être normatifs, ils se retrouveraient devant un public qui résisterait plus qu’il y a 50 ans. L’enseignement luimême a changé : en2005, il a été mesuré qu’il y avait unebaisse des performances orthographiques depuis quelques dizainesd’années. On est bien obligé de convenir que cela tient pour partie au faitqu’on n’enseigne plus l’orthographecomme on le faisait jadis.
Les programmes de grammaire et d’ortho-graphe sont-ils moins exigeants qu’aupara-vant ?
Non. Ils sont devenus beaucoup plusexigeants, mais pas sur les mêmeschoses. Nos classes sont de plus enplus multiculturelles : il y a des changements imposés par les publics. Parailleurs, l’orthographe a été enseignée pendant longtemps comme lesommet de la formation en primairepar la mémorisation de listes de mots,des exercices de dictée, etc. Puis, ons’est rendu compte que cela n’apprenait pas beaucoup à écrire, c’estàdire à composer des textes, ni à parler. Et on s’est montré beaucoup plusexigeant : on a voulu que les élèves sachent lire et comprendre les textesqu’ils lisaient; écrire, c’estàdirecomposer; et connaître des contenus.Pour des raisons idéologiques, on adonc voulu changer de forme d’enseignement et on a trop renoncé àl’exercice. Mais quoi qu’il en soit, sil’on veut conserver un enseignementdavantage de communication, d’expression ainsi que des enseignementsdans des disciplines différentes, lesjournées sont limitées. On ne pourrapas revenir à l’ancien état, parcequ’on n’a plus la même école, lamême société, ni les mêmes objectifspour l’école.
Dans notre société de la communication, lamontée en puissance du langage SMS et desréseaux sociaux appauvrit-elle la languefrançaise ?
Il est vraisemblable que cela n’améliore pas l’orthographe normée, maisle tout premier effet, c’est que celamultiplie d’une façon exponentiellele recours à l’écrit. Aujourd’hui, tousles gens lisent et écrivent comme celan’a jamais été le cas. Quant aux SMS,ils introduisent un autre type de dis
cours qui s’ajoute aux précédents (notes de cours, résumés, télégrammes,sténo,…). C’est donc plutôtun enrichissement des pratiques langagières. Il faut leprendre comme unechance d’accroître la diversité des moyens de com
munication et d’apprendreaux élèves qu’il faut adapter sa communication auxsituations et aux moyensplutôt que de croire que cemode de communicationva déteindre unilatéralement et appauvrir la langue.
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Conseil de la langue française :kezako ?Avis et sensibilisation. Installé en septembre 2007, le Conseil de lalangue française et de la politique linguistique remplace l’ancienConseil supérieur de la langue française créé en 1985. Il est investi dedeux missions.Primo, donner des avis : – sur toute question relative à la politiquelinguistique et à la francophonie autant en Communauté française quesur le plan international; – sur l’évolution de la situation linguistiqueen Communauté française et la place de la langue française par rap-port aux autres langues pratiquées en Communauté française; – surl’évolution de l’usage de la langue française et son enrichissement.Secundo, proposer toute action de sensibilisation à la langue fran-çaise. Le Conseil de la langue française est composé de 19 membreseffectifs avec voix délibérative nommés par le gouvernement de laCommunauté française ainsi que de membres avec voix consultatives.
Nouvelle orthographeLe 3 mai 1990, les rectifications orthographiques proposées par leConseil supérieur de la langue française sont approuvées à l’unani-mité par l’Académie française et publiées dans le “Journal officiel dela République française” le 6 décembre 1990. Elles ont été diverse-ment accueillies. Exemples: Evènement. Devant une syllabe contenantun “e” muet, on écrit “è” et non “é” : avènement, cèdera, lèvera, etc.Traitre, bruler. Il n’y a pas d’accent circonflexe sur les lettres “i” et“u” : boite, aout, chaine,… Les solos, les maximums. Les noms que lefrançais a empruntés à d’autres langues font leur pluriel comme lesautres mots français : les matchs, des cowboys, etc. Corole. La finale-olle est remplacée par la finale -ole sauf colle, folle, molle.
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17Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
L’orthographe, trop compliquée ?
cours qui s’ajoute aux précédents (notes de cours, résumés, télégrammes,sténo,…). C’est donc plutôtun enrichissement des pratiques langagières. Il faut leprendre comme unechance d’accroître la diversité des moyens de com
munication et d’apprendreaux élèves qu’il faut adapter sa communication auxsituations et aux moyensplutôt que de croire que cemode de communicationva déteindre unilatéralement et appauvrir la langue.
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Conseil de la langue française :kezako ?Avis et sensibilisation. Installé en septembre 2007, le Conseil de lalangue française et de la politique linguistique remplace l’ancienConseil supérieur de la langue française créé en 1985. Il est investi dedeux missions.Primo, donner des avis : – sur toute question relative à la politiquelinguistique et à la francophonie autant en Communauté française quesur le plan international; – sur l’évolution de la situation linguistiqueen Communauté française et la place de la langue française par rap-port aux autres langues pratiquées en Communauté française; – surl’évolution de l’usage de la langue française et son enrichissement.Secundo, proposer toute action de sensibilisation à la langue fran-çaise. Le Conseil de la langue française est composé de 19 membreseffectifs avec voix délibérative nommés par le gouvernement de laCommunauté française ainsi que de membres avec voix consultatives.
Nouvelle orthographeLe 3 mai 1990, les rectifications orthographiques proposées par leConseil supérieur de la langue française sont approuvées à l’unani-mité par l’Académie française et publiées dans le “Journal officiel dela République française” le 6 décembre 1990. Elles ont été diverse-ment accueillies. Exemples: Evènement. Devant une syllabe contenantun “e” muet, on écrit “è” et non “é” : avènement, cèdera, lèvera, etc.Traitre, bruler. Il n’y a pas d’accent circonflexe sur les lettres “i” et“u” : boite, aout, chaine,… Les solos, les maximums. Les noms que lefrançais a empruntés à d’autres langues font leur pluriel comme lesautres mots français : les matchs, des cowboys, etc. Corole. La finale-olle est remplacée par la finale -ole sauf colle, folle, molle.
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18 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 19Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
MERCREDIS DES MATHSLe professeur BenNaoum a,aussi, mis sur pied les Mercredis desmathématiques. Il serend dans les écoles secondaires volontaires, pourmontrercomment les maths sont enseignées à l’Ecole polytechnique,depuis la réforme de 2000.L’activité consiste à l’apprentissage par problème, à lamanièrede ce qui sera fait en bac ingénieur à l’UCL, mais sur la basedes connaissances du secondaire. Les élèves se penchentsur un problème qui a pourprincipal but, en travaillant à sarésolution, d’acquérir desconnaissances, des attitudes etdes comportements, viséscomme objectifs par les auteursdu problème. Trois séances de1h30 sont prévues pendanttrois mercredis successifs.
MATIÈRE DÉCISIVEPlaisir. Si onmanque d’élèvesen sciences appliquées ou eningénieur civil, c’est aussi enraison de cemanque de plaisirressenti dans les cours demaths en secondaire, estime leprofesseur BenNaoum : “Lesmaths, c’est aussi une matièredécisive, présente dans beaucoupde filières. Même en psycho, il y ades statistiques… Ces élèves, quiparticipent à “Dédramathisons,quand ils arrivent à l’unif, ils ontsix mois d’avance…”
Le petit “Dédramathisons”et son grand frère françaish Toutes les écolesont été invitéesà “Dédramathisons”.Six ont accepté.
C’est d’un exemple français que Kouider BenNaoum, professeur à l’EPL, s’estinspiré pour lancer, voici 4 ans, “Dédramathisons”. En France, “Math. en.Jeans” vient de réunir 1 200 élèves del’Hexagone pour sa 23e édition, à laquelle deux écoles belges ont participé(le Collège SaintMichel à Bruxelles et le
Collège SaintLaurent à MarcheenFamenne).
Pour la Communauté française, “leprincipe est simple, explique KouiderBenNaoum. En début d’année, l’Université catholique de Louvain envoie une lettre aux écoles, tous réseaux confondus. Lesprofesseurs concernés sollicitent la participation des élèves intéressés, et les groupesse forment autour d’un projet proposé soitpar le prof, soit par les élèves”.
Le 19 avril dernier, ils sont venus présenter le résultat de leur travail. “C’est, àchaque fois, un moment plein d’humour etde dextérité. Ils sont étonnants !”
Les groupes, cette année, venaient de
Bastogne (Institut NotreDame Séminaire), d’Etterbeek (Collège SaintMichel), de LouvainlaNeuve (LycéeMartin V), de MarcheenFamenne(Institut SaintLaurent), d’Uccle (Athénée royal Uccle I) et de WatermaelBoitsfort (Collège SaintHubert). Seulessix écoles ont donc répondu à un envoide lettres massif.
Un échec ? Non, pour Kouider BenNaoum. “C’est sur base volontaire. Je distoujours aux profs que si euxmêmes n’ontpas envie, ou que si leurs élèves n’ont pasenvie, ça ne sert à rien. En outre, la première année, on avait 200 élèves. Pourcette 4e édition, on est à 450.”
Et il ne s’agit pas forcément d’écolesélitistes, assure l’enseignant. “Sinon,j’aurais raté mon coup! ”
Son souhait serait que l’initiative accueille aussi les élèves qui n’ont paschoisi l’option “math forte”. Il aimeraitégalement étendre l’opération aux classes de cinquième, quatrième, ou mêmeplus tôt. L’initiative belge a remporté, en2010, le Prix Wernaers accordé par leFNRS à des personnes ou des groupesqui font preuve de créativité pour communiquer leurs connaissances aux professeurs, étudiants, élèves ou au grandpublic.So.De.
Fini de “subir” les math ématiquesh Le professeurBenNaoum veutcasser la mauvaiseimage des mathsauprès des rhétos.h Avec“Dédramathisons”,il promeutl’apprentissage parprojets et problèmes.
Tangente, sécante, fonction…Les termes suscitent sansdoute chez certains – mêmeaprès la fin de leurs étudessecondaires – des sueurs froides. Pas chez Jonathan, Ibrahim, Michaël, Nils et Antoine, élèves au Lycée MartinV de LouvainlaNeuve, quise sont réunis, une fois parsemaine pendant six mois,pour traquer la meilleureméthode afin de trouver uneracine de fonction. Pendantce temps, des élèves de MarcheenFamenne ont cherché à gagner au jeu de stratégie Nim, en misant sur lathéorie des graphes. Tandisque le collège SaintHubertde WatermaelBoitsfort achoisi la géométrie pouraider un rugbyman à effectuer un tir optimal. Le collègeSaintMichel a, lui, associésudoku et calcul…
Ces problèmes mathématiques, les élèves de quelquesécoles s’étaient lancé le défide les résoudre, avant de présenter leurs conclusions,jeudi, au colloque “Dédramathisons”, à l’UCL. Le slo
gan de l’initiative : “Ne subissezplus les maths, vivezles.” L’idée:faire découvrir que les mathématiques, cela peut être aussiludique et concerner la vie detous les jours.
“Avec ce projet, on s’est marrédu début à la fin”, confirment
les cinq élèves du Lycée MartinV, tous en math “8 heures”.“C’était un vrai challenge, desdécouvertes; on en apprenaittous les jours. On a aussi approfondi un domaine. On a fait çapour le plaisir, car c’était en dehors des cours ! On a trouvé
l’inspiration, choisi le sujet nousmêmes… Le prof n’était là quepour nous parrainer. Alors qu’enclasse, normalement, le profdonne la matière, et nous, onprend…”
Le professeur BenNaoum,de l’Ecole polytechnique de
Louvain, qui a mis sur pied cecolloque à destination des rhétos, veut casser les clichés surce cours “prise de tête” et “magistral” : “Les maths sont malaimées, les enfants en ont peur,les parents stressent à propos dece cours… Moi, je veux montrer
qu’il y a un plaisir à faire desmaths… Ici, avec cette initiative,il n’y a pas d’interro, pas d’examen… Et quand on les défie, lesjeunes peuvent passer des heuressur un problème de maths ! Dansle cadre scolaire, on est dans latransmission. Or, il faut défierles élèves. Ici, les élèves planchentsur un problème, travaillent engroupe, rédigent la solution… Lesmaths sont à faire, pas à regarder ! Ils parlent aussi devantleurs pairs : ça développe descompétences transversales…”
L’initiative a aussi pour butd’illustrer les avantages del’apprentissage par projets etproblèmes.
Une méthode mise en placepar l’Ecole polytechnique deLouvain, qui a réformé l’enseignement de ses ingénieurs civils en ce sens en 2000. “On lesmet en situation. Ils ne travaillent jamais seuls. Et, dès lapremière année, les étudiantsdoivent travailler en groupe surun projet: cette année, c’étaitréaliser un robot qui peut ramasser les déchets nucléaires !Ça fédère les matières : maths,physique, informatique… Et no
tre méthode d’apprentissage parproblèmes s’inspire de l’écoleprimaire, où on contextualise leschoses : quand vous apprenez lesmultiplications aux petits, vousparlez de pommes et de marché...Partir d’une situation concrète,ça parle aux élèves...”
L’idéal, selon le professeurBenNaoum, serait que l’apprentissage par problèmes etprojets se retrouve aussi dansles classes de maths en secondaire.
Voir les profs importer dansleurs cours la méthode appliquée lors de “Dédramathisons”, estce possible ? “Cela sefait régulièrement dans notreécole, au niveau des maths, indique Philippe Janssens, prof demath au Lycée Martin V, venuassister au colloque avec sesélèves de 5e. Ça permet de creuser une matière. Mais même engroupe, il y aura 4 ou 5 acteursdans la classe. Et le reste “recevra” quand même la matière...Et puis, on fait en deux heures, cequ’un enseignant mettra uneheure à transmettre. On a aussides contraintes “horaires” fortes: le programme math 7 h est
devenu math 6 h, avec le mêmevolume de matière. Donc, c’esttrès bien dans l’idée, mais trèsdifficile à mettre en place.”
Pourtant, convientil, lapure transmission et le manque de temps pour “concrétiser” les choses jouent probablement sur le dédain des élèves face aux maths. “Si on peutadopter cette démarche, partird’une situation pratique, etchercher les outils, comment lesdévelopper, recréer la démarchemathématique, ça donne sensauprès des élèves...”
La théorie et le drill restentcependant nécessaires, estimeson collègue de 6e, StéphanHolemans. “Et on ne peut pasdonner un sens pratique à tout,en maths. Mais pour beaucoupd’aspects, c’est possible. Si onavait le temps… On est coincéspar la matière à voir. On peutfaire découvrir la matière parles exemples, mais on n’a plus detemps alors pour la matière…Mais travailler sur les problèmes, c’est le plus amusant. Lereste, c’est de la technique, çabarbe les élèves! Et on a encoremoins de temps pour autre chose
que de la technique dans les options “faibles”. C’est un cerclevicieux !”
Kouider BenNaoum, lui, sedit bien conscient que lesprofs sont tenus par un programme. Mais pourquoi nepas introduire l’apprentissagepar problèmes et projets déjà àpetite dose? “Je crois que lesprofesseurs vont y venir, de toutefaçon : viser un objectif, et à partir d’un problème, arriver auconcept…”
Autre inconvénient pour lesprofs, selon lui : trouver une situation concrète – comme letir du rugbyman –, concevoirun problème, pour démarrerl’étude d’un concept mathématique, peut prendre beaucoup de temps et être difficile.Et il n’existe (encore) aucunouvrage pour guider les profssur le sujet.
So.De.
U L’opération“Dédramathisons”veut montrer que les maths, quifont peur à beaucoup, peuventêtre ludiques.
REPO
RTER
S
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
19Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
MERCREDIS DES MATHSLe professeur BenNaoum a,aussi, mis sur pied les Mercredis desmathématiques. Il serend dans les écoles secondaires volontaires, pourmontrercomment les maths sont enseignées à l’Ecole polytechnique,depuis la réforme de 2000.L’activité consiste à l’apprentissage par problème, à lamanièrede ce qui sera fait en bac ingénieur à l’UCL, mais sur la basedes connaissances du secondaire. Les élèves se penchentsur un problème qui a pourprincipal but, en travaillant à sarésolution, d’acquérir desconnaissances, des attitudes etdes comportements, viséscomme objectifs par les auteursdu problème. Trois séances de1h30 sont prévues pendanttrois mercredis successifs.
MATIÈRE DÉCISIVEPlaisir. Si onmanque d’élèvesen sciences appliquées ou eningénieur civil, c’est aussi enraison de cemanque de plaisirressenti dans les cours demaths en secondaire, estime leprofesseur BenNaoum : “Lesmaths, c’est aussi une matièredécisive, présente dans beaucoupde filières. Même en psycho, il y ades statistiques… Ces élèves, quiparticipent à “Dédramathisons,quand ils arrivent à l’unif, ils ontsix mois d’avance…”
Fini de “subir” les math ématiquesqu’il y a un plaisir à faire desmaths… Ici, avec cette initiative,il n’y a pas d’interro, pas d’examen… Et quand on les défie, lesjeunes peuvent passer des heuressur un problème de maths ! Dansle cadre scolaire, on est dans latransmission. Or, il faut défierles élèves. Ici, les élèves planchentsur un problème, travaillent engroupe, rédigent la solution… Lesmaths sont à faire, pas à regarder ! Ils parlent aussi devantleurs pairs : ça développe descompétences transversales…”
L’initiative a aussi pour butd’illustrer les avantages del’apprentissage par projets etproblèmes.
Une méthode mise en placepar l’Ecole polytechnique deLouvain, qui a réformé l’enseignement de ses ingénieurs civils en ce sens en 2000. “On lesmet en situation. Ils ne travaillent jamais seuls. Et, dès lapremière année, les étudiantsdoivent travailler en groupe surun projet: cette année, c’étaitréaliser un robot qui peut ramasser les déchets nucléaires !Ça fédère les matières : maths,physique, informatique… Et no
tre méthode d’apprentissage parproblèmes s’inspire de l’écoleprimaire, où on contextualise leschoses : quand vous apprenez lesmultiplications aux petits, vousparlez de pommes et de marché...Partir d’une situation concrète,ça parle aux élèves...”
L’idéal, selon le professeurBenNaoum, serait que l’apprentissage par problèmes etprojets se retrouve aussi dansles classes de maths en secondaire.
Voir les profs importer dansleurs cours la méthode appliquée lors de “Dédramathisons”, estce possible ? “Cela sefait régulièrement dans notreécole, au niveau des maths, indique Philippe Janssens, prof demath au Lycée Martin V, venuassister au colloque avec sesélèves de 5e. Ça permet de creuser une matière. Mais même engroupe, il y aura 4 ou 5 acteursdans la classe. Et le reste “recevra” quand même la matière...Et puis, on fait en deux heures, cequ’un enseignant mettra uneheure à transmettre. On a aussides contraintes “horaires” fortes: le programme math 7 h est
devenu math 6 h, avec le mêmevolume de matière. Donc, c’esttrès bien dans l’idée, mais trèsdifficile à mettre en place.”
Pourtant, convientil, lapure transmission et le manque de temps pour “concrétiser” les choses jouent probablement sur le dédain des élèves face aux maths. “Si on peutadopter cette démarche, partird’une situation pratique, etchercher les outils, comment lesdévelopper, recréer la démarchemathématique, ça donne sensauprès des élèves...”
La théorie et le drill restentcependant nécessaires, estimeson collègue de 6e, StéphanHolemans. “Et on ne peut pasdonner un sens pratique à tout,en maths. Mais pour beaucoupd’aspects, c’est possible. Si onavait le temps… On est coincéspar la matière à voir. On peutfaire découvrir la matière parles exemples, mais on n’a plus detemps alors pour la matière…Mais travailler sur les problèmes, c’est le plus amusant. Lereste, c’est de la technique, çabarbe les élèves! Et on a encoremoins de temps pour autre chose
que de la technique dans les options “faibles”. C’est un cerclevicieux !”
Kouider BenNaoum, lui, sedit bien conscient que lesprofs sont tenus par un programme. Mais pourquoi nepas introduire l’apprentissagepar problèmes et projets déjà àpetite dose? “Je crois que lesprofesseurs vont y venir, de toutefaçon : viser un objectif, et à partir d’un problème, arriver auconcept…”
Autre inconvénient pour lesprofs, selon lui : trouver une situation concrète – comme letir du rugbyman –, concevoirun problème, pour démarrerl’étude d’un concept mathématique, peut prendre beaucoup de temps et être difficile.Et il n’existe (encore) aucunouvrage pour guider les profssur le sujet.
So.De.
U L’opération“Dédramathisons”veut montrer que les maths, quifont peur à beaucoup, peuventêtre ludiques.
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20 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 21Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Retour sur les b ancsh Près de 2 000 adultespar an décrochentun diplôme universitaireà l’UCL.
h Tandis qu’une soixantaineen Communauté françaisepasse le CEB.
Pendant près de quatre années, Véronique Quinet n’a pas été qu’une épouse,une maman de quatre enfants et unesecrétaire… Blocus, notes de cours, travaux de groupe et rédaction d’un mémoire se sont introduits dans son quotidien. A 40 ans, cette Namuroise a décidé d’entamer un master universitaireen politique économique et sociale àl’Université catholique de Louvain(UCL).
Un important investissement personnel pour un nouveau tremplin professionnel. En possession de son diplômede secondaire supérieur, Véronique aenchaîné divers postes administratifspendant vingt ans. Avant qu’une collègue ne l’encourage à poursuivre sa for
mation.“Il m’a fallu suivre des cours préparatoi
res pour me remettre à niveau et passerun examen pour valoriser mon expérience”, expliquetelle. Parée enmacroéconomie et en analyse de texte,Véronique a ensuite consacré une journée entière par semaine et une soirée àses cours et ses travaux. “Il a fallu réorganiser la vie de famille et faire preuve debeaucoup de solidarité”, confietelle.Quant au temps rogné sur son travaildans une asbl, près de 120 heures ontété couvertes par le congé éducationissu “d’un fonds constitué par l’ensembledes entreprises”, définit Joseph Godeau,conseiller en gestion de la formationcontinue à l’UCL.
Hormis ce coup de pouce, Véronique apioché dans son quota d’heures supplémentaires et de congés annuels pourparvenir à boucler ses charges de courset son mémoire. Un travail final qu’ellea voulu directement en rapport avec laréalité sectorielle qui est la sienne.“Mon mémoire à peine défendu, mes supérieurs m’ont proposé un emploi en tantque secrétaire de direction. Un poste quirépondait non seulement à mes attentes,mais qui rencontrait aussi mes nouvellescompétences acquises”, raconte Véroni
que. Un succès accompagné d’une augmentation salariale pour cette mère defamille comme pour plus de 2 000 étudiantsadultes inscrits chaque année àl’UCL.
Leur profil ? “Nombreux sont les jeunesde 25 à 26 ans qui se remettent aux études après avoir travaillé quelques années.A la trentaine ou quarantaine, certainssouhaitent aussi donner une nouvelle progression à leur carrière, acquérir plusd’aisance dans leur milieu professionnelou encore prendre une revanche sur lepassé”, concède Joseph Godeau.
Informés des sacrifices à fournir, ilsrentrent gagnants dans la formation, teln’importe quel étudiant sortant d’humanités. “A côté de l’offre des masters,l’UCL propose aussi des certificats de typeplus court et des attestations d’assistance.Le minerval est identique, tout comme lesaides sociales et les bourses mises à disposition”, détaille Joseph Godeau.
Et ces formations balayent de nombreux secteurs comme la gestion, lessciences sociales, politiques, économiques ou de l’éducation. “Au vu des prérequis nécessaires, l’offre ne s’étend cependant pas à tous les domaines comme lamédecine ou les programmes d’ingénieur”, continue le conseiller. Mais
quelle que soit l’option choisie, l’organisation demeure un cassetête.
“L’horaire et la pédagogie se doiventd’être adaptés. Les professeurs sont ainsiamenés à faire émerger les questions desétudiants tout en maintenant le lien avecleurs expériences professionnelles actuelles et antérieures”, explique Joseph Godeau.
Des enseignants issus du monde universitaire ou non, amenés à assumerdes charges supplémentaires et à gérerde nombreux travaux de groupe. “J’aiconstamment été encouragée à travailleravec d’autres étudiants, aux expériencesdiverses et enrichissantes. Des personnesavec lesquelles je reste aujourd’hui encoreen contact”, raconte Véronique. Cetterécente diplômée affirme que tous sessoutiens familiaux, professionnels etrelationnels l’ont sensiblement amenéeà relever ce défi personnel. Mais teln’est pas toujours le cas pour un autretype d’élèves, adultes eux aussi, prétendants à l’obtention du certificat d’étudede base (CEB).
En 20102011, ils étaient 77 en Communauté française à être inscrits, 66 àprésenter l’examen et 60 à décrocher lediplôme. “Chaque réussite est une grandejoie, car il s’agit toujours d’un nouveau
début dans la vie du candidat”,souligne Serge Crochet, inspecteur coordinateur. Et depréciser, “il n’y a pas valeurdifférente au CEB, que l’on lepasse à 12 ans ou après 18 ans.Le résultat est exactement lemême. A l’entrée de l’adolescence, il s’agit d’une suite logique. A l’âge adulte, cela offreune deuxième, voire une troisième chance”.
Seule change la manière del’obtenir. Pour les adultes, iln’est, en effet, plus questionde répondre à une série dequestions pratiques sur papier. “Il s’agit d’une épreuveorale au thème libre que l’onpeut apparenter à une élocution. Une série de questionssont ensuite posées par le jury,composé de deux inspecteurs,afin de déceler la part de connaissances personnelles del’élève”, explique Serge Crochet.
Réussi, le CEB peut ainsiouvrir de nouvelles portes.“Certains métiers recommandent ce diplôme comme celui de
jardinier, de travailleur en bâtiments, de gardien, etc. Et puis,il peut être le début d’une longue série de formations supplémentaires dans des écoles depromotion sociale, par exemple”, continue l’inspecteur.
Les élèves que Serge Crochet évalue sont en généralâgés de 18 à 25 ans, ontconnu de longues périodesd’échec ou bien sont d’origine étrangère. “Des organismes d’alphabétisation ou encore des prisons encouragentaussi des jeunes à s’inscrire àcette épreuve totalement gratuite. Certains sont ainsi soutenus par des personnes extérieures et stimulés à la réussite. Si ladémarche peut se répéter unnombre incalculable de fois jusqu’à la réussite, elle ne peut êtreacceptée que sur demande volontaire”, terminetil.
La volonté, tel semble êtrele leitmotiv commun du succès de ces élèves d’un âge plusavancé, tout niveau confondu.Fanny Leroy
REPO
RTER
S
La soif d’apprendreh L’Universitédes Aînés (UDA)fêtera, l’an prochain,ses 35 ans.
Jacqueline, 67 ans, ancienneenseignante de latin et degrec, a fait l’acquisition, avecson mari, d’un appartement àLouvainlaNeuve. Pour lepiétonnier agréable de la villecertainement, mais aussi etsurtout pour l’Université desAînés (UDA) qui dispense sescours sur le site universitaire.
Depuis douze ans, cette retraitée dynamique est une fidèle de cette école d’un genreparticulier. “L’UDA fêtera ses35 ans l’an prochain. Elle a vule jour grâce à Jacques Lefèvre,professeur de sociologie qui acommencé à donner des courset conférences pour les adultescurieux de continuer à apprendre”, explique Diane Platteeuw, directrice de l’UDA.Aujourd’hui, l’organe compteprès de 4 000 membres répartis sur ses sites de LouvainlaNeuve et de Woluwé.
L’éventail de l’offre des programmes s’est donc fortement élargi. Plus de 300cours, formations et atelierssont aujourd’hui dispensés.Jacqueline, elle, a débuté parde la gymnastique adaptée àson âge, avant de goûter à lascience, à la géopolitique, àl’histoire de l’art ou des religions. Un appétit de savoirsqui n’arrive jamais à satiété.“J’ai envie de continuer à apprendre et à découvrir des matières qui me sont inconnues.Toutes ces connaissances mepermettent, par exemple, devoir l’actualité avec des yeuxnouveaux”, expliquetelle.
Avant d’ajouter sur le ton del’humour, “et de partager avecmon mari des discussions surdes sujets autres que domestiques”. Si Jacqueline s’assiedhabituellement à côté de personnes de sa tranche d’âge,elle partage aussi parfois lesauditoires de jeunes étudiants. “J’y ai déjà retrouvéd’anciens élèves. Et je constate,en quelques années, que la prisede notes est fortement facilitéepar l’usage de Power Point”, remarquetelle.
Lorsqu’elle ne prolonge passes cours par des lectures, Jacqueline participe aussi à desvoyages organisés par l’UDA.En Arménie, notamment, oùl’ancien recteur, BernardCoulie, a servi de guide augroupe. “Il a vraiment fait vivre les pierres. C’était passionnant”, se souvientelle. La passion caractérise bien cette retraitée qui a soifd’engagement. Tous les ans,elle donne des coups depouce aux étudiants en corrigeant la forme de leur mémoire et un jour par semaine,elle s’engage comme bénévole auprès du secrétariat del’UDA. “Cette implication desvolontaires et la motivation desmembres sont précieuses”,avoue la directrice. Des motivations variées, mais toujourstenaces. “Certains souhaitentapprendre une langue étrangère, d’autres se tenir à jour desnouvelles technologies ou encore maintenir vives leurs capacités intellectuelles”, conclutDiane Platteeuw.F. L.U Infos surwww.universitedesaines.be
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
21Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Retour sur les b ancsdébut dans la vie du candidat”,souligne Serge Crochet, inspecteur coordinateur. Et depréciser, “il n’y a pas valeurdifférente au CEB, que l’on lepasse à 12 ans ou après 18 ans.Le résultat est exactement lemême. A l’entrée de l’adolescence, il s’agit d’une suite logique. A l’âge adulte, cela offreune deuxième, voire une troisième chance”.
Seule change la manière del’obtenir. Pour les adultes, iln’est, en effet, plus questionde répondre à une série dequestions pratiques sur papier. “Il s’agit d’une épreuveorale au thème libre que l’onpeut apparenter à une élocution. Une série de questionssont ensuite posées par le jury,composé de deux inspecteurs,afin de déceler la part de connaissances personnelles del’élève”, explique Serge Crochet.
Réussi, le CEB peut ainsiouvrir de nouvelles portes.“Certains métiers recommandent ce diplôme comme celui de
jardinier, de travailleur en bâtiments, de gardien, etc. Et puis,il peut être le début d’une longue série de formations supplémentaires dans des écoles depromotion sociale, par exemple”, continue l’inspecteur.
Les élèves que Serge Crochet évalue sont en généralâgés de 18 à 25 ans, ontconnu de longues périodesd’échec ou bien sont d’origine étrangère. “Des organismes d’alphabétisation ou encore des prisons encouragentaussi des jeunes à s’inscrire àcette épreuve totalement gratuite. Certains sont ainsi soutenus par des personnes extérieures et stimulés à la réussite. Si ladémarche peut se répéter unnombre incalculable de fois jusqu’à la réussite, elle ne peut êtreacceptée que sur demande volontaire”, terminetil.
La volonté, tel semble êtrele leitmotiv commun du succès de ces élèves d’un âge plusavancé, tout niveau confondu.Fanny Leroy
REPO
RTER
S
La soif d’apprendreh L’Universitédes Aînés (UDA)fêtera, l’an prochain,ses 35 ans.
Jacqueline, 67 ans, ancienneenseignante de latin et degrec, a fait l’acquisition, avecson mari, d’un appartement àLouvainlaNeuve. Pour lepiétonnier agréable de la villecertainement, mais aussi etsurtout pour l’Université desAînés (UDA) qui dispense sescours sur le site universitaire.
Depuis douze ans, cette retraitée dynamique est une fidèle de cette école d’un genreparticulier. “L’UDA fêtera ses35 ans l’an prochain. Elle a vule jour grâce à Jacques Lefèvre,professeur de sociologie qui acommencé à donner des courset conférences pour les adultescurieux de continuer à apprendre”, explique Diane Platteeuw, directrice de l’UDA.Aujourd’hui, l’organe compteprès de 4 000 membres répartis sur ses sites de LouvainlaNeuve et de Woluwé.
L’éventail de l’offre des programmes s’est donc fortement élargi. Plus de 300cours, formations et atelierssont aujourd’hui dispensés.Jacqueline, elle, a débuté parde la gymnastique adaptée àson âge, avant de goûter à lascience, à la géopolitique, àl’histoire de l’art ou des religions. Un appétit de savoirsqui n’arrive jamais à satiété.“J’ai envie de continuer à apprendre et à découvrir des matières qui me sont inconnues.Toutes ces connaissances mepermettent, par exemple, devoir l’actualité avec des yeuxnouveaux”, expliquetelle.
Avant d’ajouter sur le ton del’humour, “et de partager avecmon mari des discussions surdes sujets autres que domestiques”. Si Jacqueline s’assiedhabituellement à côté de personnes de sa tranche d’âge,elle partage aussi parfois lesauditoires de jeunes étudiants. “J’y ai déjà retrouvéd’anciens élèves. Et je constate,en quelques années, que la prisede notes est fortement facilitéepar l’usage de Power Point”, remarquetelle.
Lorsqu’elle ne prolonge passes cours par des lectures, Jacqueline participe aussi à desvoyages organisés par l’UDA.En Arménie, notamment, oùl’ancien recteur, BernardCoulie, a servi de guide augroupe. “Il a vraiment fait vivre les pierres. C’était passionnant”, se souvientelle. La passion caractérise bien cette retraitée qui a soifd’engagement. Tous les ans,elle donne des coups depouce aux étudiants en corrigeant la forme de leur mémoire et un jour par semaine,elle s’engage comme bénévole auprès du secrétariat del’UDA. “Cette implication desvolontaires et la motivation desmembres sont précieuses”,avoue la directrice. Des motivations variées, mais toujourstenaces. “Certains souhaitentapprendre une langue étrangère, d’autres se tenir à jour desnouvelles technologies ou encore maintenir vives leurs capacités intellectuelles”, conclutDiane Platteeuw.F. L.U Infos surwww.universitedesaines.be
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
22 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 23Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Mens sana in corp ore sanoh Préparer l’enfant à recevoirun apprentissage,c’est l’objectif de “Félicitée”.
h Une méthode,un jeu de 47 cartesqui entend libérerl’élèveet apaiser l’enseignant.
Auvelais. Ecole SaintFrançois.Il est 8h30. Dans la cour de récré’, les
parents et instituteurs discutent, lesenfants s’amusent. Comme chaquematin, l’excitation est à son paroxysme. On retrouve ses petits camarades, on court, on saute, on se cache,on débat du dernier dessin animé de laveille ou, pour les moins jeunes d’entreeux, on se réjouit d’être le second jourde la semaine pour regarder, en rentrant le soir à la maison, son émissionhebdomadaire musicale préférée.
8h40, il est l’heure de rentrer enclasse. D’un pas assuré, Madame Dominique s’approche de son petit trou
peau. “Deux par deux”, s’écrietelle immédiatement. Le ton est donné, les 23petits bouts s’exécutent et se mettentsurlechamp en rang d’oignons. Encore un petit détour par les vestiaireset voilà les élèves de troisième B qui investissent leur lieu de travail. Dans cetespace confiné, le brouhaha initialement supportable se mue soudainement en une véritable cacophonie. Ilest grand temps d’apaiser tout ce petitmonde. “Guillaume, reprends les enquêtes de lectures s’il te plaît. Zoé, veuxtubien ramasser les devoirs de calculs ? Onva commencer la méthode.”
Inutile d’en dire davantage, chacunse met en place. Tandis que Léa fermela porte de la classe, ses camarades selèvent en chœur. Désormais postésderrière leurs bancs, les 23 petits corpss’immobilisent.
“Tout le monde boit une grande gorgéed’eau”, ordonne l’institutrice. Quelques rythmes africains en toile de fondet c’est parti pour six minutes de “Félicitée”. “Mouvements croisés”, lance Madame Dominique.
A ces mots, 24 jambes se lèvent soudainement en l’air pour venir aussitôtformer un X avec les membres inférieurs laissés au sol. Les genoux se
plient, les mains s’agitent, les épauless’enroulent puis se déroulent.
“Et maintenant, on réveille le corps”,poursuit la maîtresse d’école, une carterose à la main.
Les 23 gamins attrapent alors les lobes de leurs deux petites oreilles et semettent à les masser. “Carte verte, rondsdu bassin, on fait circuler l’énergie”, enchaînetelle. L’assemblée s’exécute.L’institutrice s’exclame ensuite : “Carterouge pour enraciner”.
Revêtant soudainement des alluresde guerriers, les enfants lancent àl’unisson un grand “Oh” avec force. Unmoment exutoire qu’ils apprécientparticulièrement, nous confiera Dominique Robaux ultérieurement. “Orange: exprimer, libérer, on y va”, annoncetelle plus calmement. “Heureuse”, “bien”,“agressif”, “endormi”, “amoureuse”…chacun fait part de son émotion, deson ressenti du jour.
Un parfum de quiétude emplit progressivement la pièce.
“Lucas, quelle est la couleur de ton cerceau ?” lui demande Madame Dominique.
“Bleu clair”, répond immédiatementle garçon.
En effet, la carte mauve entend mobi
liser l’imaginaire de l’enfant, lui fairedéfinir les contours de son espace. Laséance touche à sa fin. Avec la cartebleu foncé, on s’étire, on s’assied, on sedétend et on travaille sur l’estime desoi. Les six minutes sont maintenantécoulées. Un calme impressionnant règne désormais en maître dans la classede troisième B. Mais pour combien detemps ? “Cela fait son effet pendant unebonne demiheure”, estime l’institutrice. Qui commente : “C’est énormepour des enfants de cet âgelà (78 ans).Chez les toutpetits, je pense que cela dureencore moins longtemps.”
Madame Caroline, institutrice endeuxième maternelle, le confirme.“Avec des petits bouts de 23 ans, la méthode est efficace pendant environ 15minutes après la dernière carte.” Et depoursuivre: “Je la pratique tous les jours,c’est devenu un vrai petit rituel. Et un besoin aussi. Pour eux comme pour moi.”Car, si “Félicitée” a été conçue – sous laforme ludique d’un jeu de 47 cartes decouleurs – pour générer chez l’enfantun bienêtre global et pour favoriserainsi une utilisation plus performantede ses capacités d’apprentissage àl’école, c’est aussi pour aider les professeurs à se sentir mieux dans leur corps
qu’elle a été imaginée.“Moi, je ne saurais plus m’en passer”,
avoue Dominique Robaux. “Depuis quej’ai suivi la formation il y a un peu plusd’un an avec la conceptrice du projet, Catherine Delhaise, je la pratique quotidiennement”, constatetelle. Et d’estimer :“Mais c’est une question de convictionpersonnelle. Vous ne pouvez pas forcer unenseignant à utiliser “Félicitée”. Cela n’apas de sens.”
Ici, à SaintFrançois, la quasitotalitédes instituteurs maternels adhère etutilise la méthode. Dans le cycle primaire par contre, beaucoup restent réticents à l’idée de tester de nouvelleschoses.
“Pour ma part, je n’accroche pas du toutà ce genre de pratique. Je sais que je neprendrais pas le temps de le faire chaquematin. Pour être honnête, je crois quej’aurais l’impression d’être ridicule devant mes élèves. C’est une question de caractère, c’est tout”, témoigne GaëtaneJoiris, institutrice en sixième primaire.
Pour Marc Busard, directeur del’école, opter ou non pour la méthodeFélicitée, c’est effectivement une question de tempérament. “C’est un exercicequi requiert que l’on fasse beaucoup degestes et de mouvements. Or certains pro
fesseurs n’apprécient pas cette formed’extraversion. Il faut respecter cela.”
Ainsi, si le corps professoral sembleencore relativement timide face à lanouvelle méthode, du côté des enfantselle semble faire l’unanimité. “Si on nefait pas l’exercice, je suis un peu énervéesur ma feuille et je ne parviens pas à travailler”, raconte Léa. “Et moi, je suismoins concentrée”, complète immédiatement Zoé. “La méthode me permetd’être moins fatiguée”, constate Tonia.Quant à Aloane, c’est l’étape du verred’eau qui a retenu son attention.
“Le cerveau, c’est comme une éponge,nous dit Madame Dominique. Il absorbe l’eau qu’on boit. Grâce à cela, onpeut mieux apprendre et mieux écouter.”
Aujourd’hui en Fédération WallonieBruxelles, pas moins de 2 500 enseignants sont formés à la méthode Félicitée. Huit cent vingt d’entre euxl’utilisent désormais régulièrement àl’école.
Un chiffre vraiment non négligeablequi interpelle, une pratique grandissante qui fait du bien... au corps et à latête.
ReportageAlice Dive
REPO
RTER
S
3 QUESTIONS ÀCATHERINE DELHAISEDiplômée en gestion des ressources humaines, Catherine Delhaise est la conceptricede laméthode Félicitée. Elle s’est formée à la kinésiologie et à la psychologie corporelle intégrative.
Votre projet est arrivé àmaturité en janvier 2010. Quelle était votre intentionen créant une telleméthode ?Je désirais mettre au jour des techniques permettant aux élèves de l’enseignement fondamental – âge d’or de la motricité – de mieux apprendre à l’école. Bien sûr, il m’a fallu dutemps pour concrétiser ce projet. Au départ, j’ai travaillé avec des enfants en consultationsindividuelles, rencontres au cours desquelles j’ai pratiqué plusieurs méthodes. Par la suite, jeme suis rapprochée des écoles en leur proposant des animations. C’est là que l’idée deconcevoir une méthode sous la forme d’un jeu de 47 cartes de couleurs a jaillie. Chaquesemaine, les élèves doivent piocher neuf cartes. Deux d’entre elles sont systématiques :“boire de l’eau” et les “mouvements croisés”. Les sept autres correspondent chacune à uneactivité précise. “Félicitée” est construite sur base d’une courbe de Gauss : vous commencezpar des exercices dynamiques, vous exprimez ensuite vos colères et frustrations via l’enracinement – pic situé aumilieu de la courbe – enfin, vous revenez progressivement au calme.
Concrètement, quels sont les effets escomptés de “Félicitée” ?Immédiatement après la méthode (qui prend une dizaine deminutes enmoyenne), onconstate unemise au travail plus rapide, unemeilleure concentration et une plusgrande réceptivité de l’élève. Ce dernier est aussi plus actif pendant le cours, canalisedavantage son énergie et gère mieux son stress. Du point de vue de l’enseignant, onobserve une diminution de la gestion des conflits, ce qui est positif pour lui. Globalement, l’ambiance est plus agréable en classe.
“Félicitée”, une explication à ce label ?En fait, il s’agit du nom de l’étoile. Elle est présente sur chaque carte du jeu. C’est aussi lelogo de notre ASBL. C’est celle qui est descendue du ciel pour aider les enfants à mieuxutiliser leur potentiel. Elle a deux bras mais aussi deux jambes. C’est donc une étoile qui abien les pieds sur terre. J’ai opté pour cette image parce que je voulais un personnageunisexe qui plaise autant aux filles qu’aux garçons.
Al. D.
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
23Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Mens sana in corp ore sanoqu’elle a été imaginée.
“Moi, je ne saurais plus m’en passer”,avoue Dominique Robaux. “Depuis quej’ai suivi la formation il y a un peu plusd’un an avec la conceptrice du projet, Catherine Delhaise, je la pratique quotidiennement”, constatetelle. Et d’estimer :“Mais c’est une question de convictionpersonnelle. Vous ne pouvez pas forcer unenseignant à utiliser “Félicitée”. Cela n’apas de sens.”
Ici, à SaintFrançois, la quasitotalitédes instituteurs maternels adhère etutilise la méthode. Dans le cycle primaire par contre, beaucoup restent réticents à l’idée de tester de nouvelleschoses.
“Pour ma part, je n’accroche pas du toutà ce genre de pratique. Je sais que je neprendrais pas le temps de le faire chaquematin. Pour être honnête, je crois quej’aurais l’impression d’être ridicule devant mes élèves. C’est une question de caractère, c’est tout”, témoigne GaëtaneJoiris, institutrice en sixième primaire.
Pour Marc Busard, directeur del’école, opter ou non pour la méthodeFélicitée, c’est effectivement une question de tempérament. “C’est un exercicequi requiert que l’on fasse beaucoup degestes et de mouvements. Or certains pro
fesseurs n’apprécient pas cette formed’extraversion. Il faut respecter cela.”
Ainsi, si le corps professoral sembleencore relativement timide face à lanouvelle méthode, du côté des enfantselle semble faire l’unanimité. “Si on nefait pas l’exercice, je suis un peu énervéesur ma feuille et je ne parviens pas à travailler”, raconte Léa. “Et moi, je suismoins concentrée”, complète immédiatement Zoé. “La méthode me permetd’être moins fatiguée”, constate Tonia.Quant à Aloane, c’est l’étape du verred’eau qui a retenu son attention.
“Le cerveau, c’est comme une éponge,nous dit Madame Dominique. Il absorbe l’eau qu’on boit. Grâce à cela, onpeut mieux apprendre et mieux écouter.”
Aujourd’hui en Fédération WallonieBruxelles, pas moins de 2 500 enseignants sont formés à la méthode Félicitée. Huit cent vingt d’entre euxl’utilisent désormais régulièrement àl’école.
Un chiffre vraiment non négligeablequi interpelle, une pratique grandissante qui fait du bien... au corps et à latête.
ReportageAlice Dive
Épinglé
3 QUESTIONS ÀCatherine Delhaise3 QUESTIONS À
CATHERINE DELHAISEDiplômée en gestion des ressources humaines, Catherine Delhaise est la conceptricede laméthode Félicitée. Elle s’est formée à la kinésiologie et à la psychologie corporelle intégrative.
Votre projet est arrivé àmaturité en janvier 2010. Quelle était votre intentionen créant une telleméthode ?Je désirais mettre au jour des techniques permettant aux élèves de l’enseignement fondamental – âge d’or de la motricité – de mieux apprendre à l’école. Bien sûr, il m’a fallu dutemps pour concrétiser ce projet. Au départ, j’ai travaillé avec des enfants en consultationsindividuelles, rencontres au cours desquelles j’ai pratiqué plusieurs méthodes. Par la suite, jeme suis rapprochée des écoles en leur proposant des animations. C’est là que l’idée deconcevoir une méthode sous la forme d’un jeu de 47 cartes de couleurs a jaillie. Chaquesemaine, les élèves doivent piocher neuf cartes. Deux d’entre elles sont systématiques :“boire de l’eau” et les “mouvements croisés”. Les sept autres correspondent chacune à uneactivité précise. “Félicitée” est construite sur base d’une courbe de Gauss : vous commencezpar des exercices dynamiques, vous exprimez ensuite vos colères et frustrations via l’enracinement – pic situé aumilieu de la courbe – enfin, vous revenez progressivement au calme.
Concrètement, quels sont les effets escomptés de “Félicitée” ?Immédiatement après la méthode (qui prend une dizaine deminutes enmoyenne), onconstate unemise au travail plus rapide, unemeilleure concentration et une plusgrande réceptivité de l’élève. Ce dernier est aussi plus actif pendant le cours, canalisedavantage son énergie et gère mieux son stress. Du point de vue de l’enseignant, onobserve une diminution de la gestion des conflits, ce qui est positif pour lui. Globalement, l’ambiance est plus agréable en classe.
“Félicitée”, une explication à ce label ?En fait, il s’agit du nom de l’étoile. Elle est présente sur chaque carte du jeu. C’est aussi lelogo de notre ASBL. C’est celle qui est descendue du ciel pour aider les enfants à mieuxutiliser leur potentiel. Elle a deux bras mais aussi deux jambes. C’est donc une étoile qui abien les pieds sur terre. J’ai opté pour cette image parce que je voulais un personnageunisexe qui plaise autant aux filles qu’aux garçons.
Al. D.
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
24 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 25Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
My English is very badh L’enseignement des languesest un échec
h C’est ce qu’affirme unlicencié en languesgermaniques et doctorantaux Facultés de Namur
Entretien Isabelle LemaireDans un pamphlet intitulé “Il faut en
finir avec l’enseignement des langues”(1), Eloy RomeroMuñoz, doctorant enlinguistique éducationnelle aux facultésuniversitaires de Namur, n’y va pas parquatre chemins pour dénoncer lafaillite des méthodes traditionnellesd’enseignement des langues.
Sous ce titre volontairement provocateur, l’auteur expose les raisons de cetéchec et propose des pistes de solutions.Rencontre.
Pourquoi l’enseignement des langues est-ilun échec ?
Pour trois raisons. La première estscientifique. Les recherches démontrent que les méthodes traditionnelles ne fonctionnent pas. On se basesur une connaissance déclarative (acquérir des bases en étudiant des règles, des listes de mots) alors quepour parler une langue, il faut apprendre les mots en contexte, fairedes associations. La deuxième est affective : les élèves sont réticents à apprendre des règles et on n’en tientpas compte. La troisième est que cesrègles que l’on enseigne sont simplifiées, au point que l’on se retrouveavec une tonne d’exceptions, malénoncées et non conformes à la réalité. Par exemple, le slogan d’unechaîne de fastfood, “I’m loving it”,est considéré comme grammaticalement erroné alors que, dans la langue parlée, on l’utilise.
La grammaire, justement, vous n’êtes pastendre envers une approche inflexible.
Elle est prépondérante dans les manuels scolaires et elle est enseignéeavec une mauvaise méthodologie.Elle doit rester un outil au service dela communication alors que, de parson aspect abstrait et systématique,elle sert surtout à renforcer les inégalités entre les élèves. Il y a une vraieréflexion à faire à ce sujet, convaincreles profs qu’elle est trop normative,changer la perspective du “gramma
ticalement correct” qui fait de certains élèves des complexés de la langue qui n’osent pas s’exprimer.
Quelles sont les solutions que vous propo-sez ?
Tout d’abord, je tiens à souligner queles professeurs font des miracles avecce qu’ils ont. Mais leur formationn’est pas à la hauteur. Je plaide pourque les enseignants deviennent descoachs qui aident les élèves à atteindre leurs objectifs. Il faudrait pourcela ajuster les méthodes d’appren
tissage au profil de l’élève, proscrireles évaluations chiffrées en coursd’année qui encouragent la culturede la performance plutôt que l’apprentissage, favoriser l’autonomiedans le travail scolaire en utilisantdes plateformes informatiques gratuites du type “Claroline” et réduirela taille des classes.
Est-ce compatible avec les programmes offi-ciels ?
Oui mais il faut vaincre les réticenceset les habitudes bien ancrées. On
pourrait démarrer avec des expériences pilotes, leur donner du créditet assurer un suivi scientifique. Lespolitiques doivent enfin prendreleurs responsabilités face à ce constatd’échec.
U (1) “Il faut en finir avecl’enseignement des langues”, EloyRomeroMuñoz. Presses universitairesde Namur. 61 p. 5 euros etwww.ensaignement.be
REPO
RTER
S
Problèmesen pagailleArticles 20. Dany Etienne, professeur de langues dans le secondaire et le supérieur, a consacré sa thèse à l’apprentissage des langues étrangères en Communauté française.
En février 2011, les pages Enseignement de “La Libre” s’enfaisaient l’écho. Programmes flous, manque d’équipements,classes surpeuplées, pénurie de profs…, le constat dressé parle chercheur est terrible. Le pouvoir politique était également pointé du doigt pour ses programmes d’apprentissagedes langues qui a imposé aux enseignants une méthodologie plutôt qu’un contenu.
La ministre de l’Enseignement obligatoire, MarieDominique Simonet (CDH), avait répondu aux critiques formulées par Dany Etienne par quelques annonces : inscriptionde la Communauté française dans le programme d’échangelinguistique Comenius et au Pisa des langues, adaptationdes programmes et des référentiels et recours à l’informatique pour pallier à la pénurie de profs de langues.
Cette pénurie qui perdure et conduit à l’engagement de
plus en plus d’Articles 20, ces enseignants n’ayant pas les titres requis (4 111 Articles 20 engagés en 20082009), poursouvent “boucher des trous” dans des horaires et avec à la cléune rémunération inférieure à celle des agrégés.
Situation que dénonce ouvertement Eloy RomeroMuñozdans son pamphlet : “Il faut arrêter de faire croire aux gensque pour être professeur de langues, il suffit de connaître leslangues. […] Vous accepteriez que l’infirmière en charge du blocopératoire se charge de faire votre anesthésie ? Probablementpas. C’est pourtant ce que l’on fait dans l’enseignement lorsqu’on autorise des secrétaires ou des hôtesses de l’air à enseigner. Dans une école bruxelloise réputée, j’ai rencontré un professeur de néerlandais, ambulancier de formation, qui, pourtoute qualification, avait étudié en Flandre quelques années. Jen’en veux pas à ces personnes qui sont, pour la plupart, debonne volonté mais plutôt au système qui autorise ce genre depratiques”, écritilI.L.
L’immersion, difficileà mettre en place ?h Cette méthoded’apprentissage seraitpourtant très efficace.
Robert Briquet est lepionnier de l’immersionlinguistique en Communautéfrançaise.
En 1989, il obtient des pouvoirs publics l’autorisation d’expérimenter
cette méthode dans la section primairedu lycée Léonie de Waha à Liège. En2006, il a écrit un livre sur le sujet,“L’immersion linguistique”, publié chezLabo et il donne encore des conférencesà ce sujet. Aujourd’hui, l’immersion estpratiquée dans 250 écoles wallonnes etbruxelloises (soit moins de 10 % des établissements) mais reste difficile à mettre en place. “En Flandre, elle est interditeet chez nous, les barrages sont multiples :la force d’inertie de l’administration, l’inspection qui n’en comprend pas le bienfondé, les syndicats hostiles car on engagedu personnel étranger et beaucoup d’enseignants (de français notamment) qui y
sont réfractaires car ils craignent de sevoir ôter des heures de cours , indique Robert Briquet. Pourtant, elle donne de trèsbons résultats et le personnel enseignantqui se lance sérieusement dans l’aventuredevient très vite convaincu. Pour apprendre une langue étrangère, il faut commencer jeune et avoir beaucoup d’heures decours. Avec l’immersion, la langue sert devéhicule de communication puisque lesautres cours sont dispensés en langueétrangère. La langue est donc plus vivanteet appliquée. Les enfants immergés atteignent rapidement un niveau lexical etgrammatical élevé dans la langue étudiée,sans que cela compromette leur niveau en
français, au contraire. Attention toutefoisà éviter quelques dérives : les classes d’immersion mal organisées et utilisées par lesétablissements comme argument publicitaire.”
Et sur bien des points, Robert Briquetrejoint Eloy RomeroMuñoz dans sa critique des méthodes traditionnellesd’enseignement des langues étrangères:“Notamment les manuels scolaires quisont effectivement assez figés, comme leslivres de “Martine”. Ils n’évoluent pas assez vite avec leur époque. Il faudrait vraiment mettre en place des méthodes d’apprentissage plus efficaces.”I. L.
“Objectif 30 juin” ou leparcours du combattantRoman. Dur dur d’être directeur d’école, c’est en substance lemessage du roman écrit par Robert Briquet, “Objectif 30juin”. Ce livre plein d’humour dépeint les petits bonheurs etles gros pépins auxquels est confronté un jeune chef d’établissement nouvellement nommé, pendant une année scolaire : “J’ai moimême assumé cette fonction pendant des annéeset j’ai adoré cela. Mais avec ce roman, j’ai voulu souligner les difficultés que rencontrent les directeurs : diversité des tâches àprendre en charge, solitude… Dans sa formation, les futurs chefsd’établissement ne sont pas préparés aux 1 001 problèmes auxquels ils doivent faire face. Alors, on se débrouille, on apprend surle tas”, explique l’auteur.
Outre ses fonctions officielles, un directeur doit effectivement assumer tous les rôles : assistant social, chef de chantier,secrétaire, psychologue, gendarme, imprimeur ou DRH. “Ob
jectif 30 juin” décrit avec bonheur toutes les facettes de cemétier pour le moins exigeant. Mais s’agitil vraiment d’unroman ? “Oui et non. Dans les écoles, le personnel enseignant sedit toujours qu’il faudrait faire un livre de toutes les histoires quinous arrivent. C’est ce que j’ai fait. J’ai compilé des anecdotes réelles et je les ai mises en forme. Quasiment tout ce que je décris dansle livre est arrivé, à moi ou à d’autres. Evidemment, il s’agit d’unecaricature et le trait est un peu forcé.”
Le roman a déjà visiblement fait mouche auprès des principaux concernés. “Des directeurs d’école l’ayant lu m’ont ditqu’ils se reconnaissaient dans le personnage principal”, souligneRobert Briquet. Un livre drôle et féroce qui offre un regardcomplet sur ce métier difficile.I.L.U“Objectif 30 juin”, Robert Briquet. Bénévent. 232 pp. 20 €.
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
25Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
My English is very bad
pourrait démarrer avec des expériences pilotes, leur donner du créditet assurer un suivi scientifique. Lespolitiques doivent enfin prendreleurs responsabilités face à ce constatd’échec.
U (1) “Il faut en finir avecl’enseignement des langues”, EloyRomeroMuñoz. Presses universitairesde Namur. 61 p. 5 euros etwww.ensaignement.be
Problèmesen pagailleArticles 20. Dany Etienne, professeur de langues dans le secondaire et le supérieur, a consacré sa thèse à l’apprentissage des langues étrangères en Communauté française.
En février 2011, les pages Enseignement de “La Libre” s’enfaisaient l’écho. Programmes flous, manque d’équipements,classes surpeuplées, pénurie de profs…, le constat dressé parle chercheur est terrible. Le pouvoir politique était également pointé du doigt pour ses programmes d’apprentissagedes langues qui a imposé aux enseignants une méthodologie plutôt qu’un contenu.
La ministre de l’Enseignement obligatoire, MarieDominique Simonet (CDH), avait répondu aux critiques formulées par Dany Etienne par quelques annonces : inscriptionde la Communauté française dans le programme d’échangelinguistique Comenius et au Pisa des langues, adaptationdes programmes et des référentiels et recours à l’informatique pour pallier à la pénurie de profs de langues.
Cette pénurie qui perdure et conduit à l’engagement de
plus en plus d’Articles 20, ces enseignants n’ayant pas les titres requis (4 111 Articles 20 engagés en 20082009), poursouvent “boucher des trous” dans des horaires et avec à la cléune rémunération inférieure à celle des agrégés.
Situation que dénonce ouvertement Eloy RomeroMuñozdans son pamphlet : “Il faut arrêter de faire croire aux gensque pour être professeur de langues, il suffit de connaître leslangues. […] Vous accepteriez que l’infirmière en charge du blocopératoire se charge de faire votre anesthésie ? Probablementpas. C’est pourtant ce que l’on fait dans l’enseignement lorsqu’on autorise des secrétaires ou des hôtesses de l’air à enseigner. Dans une école bruxelloise réputée, j’ai rencontré un professeur de néerlandais, ambulancier de formation, qui, pourtoute qualification, avait étudié en Flandre quelques années. Jen’en veux pas à ces personnes qui sont, pour la plupart, debonne volonté mais plutôt au système qui autorise ce genre depratiques”, écritilI.L.
“Objectif 30 juin” ou leparcours du combattantRoman. Dur dur d’être directeur d’école, c’est en substance lemessage du roman écrit par Robert Briquet, “Objectif 30juin”. Ce livre plein d’humour dépeint les petits bonheurs etles gros pépins auxquels est confronté un jeune chef d’établissement nouvellement nommé, pendant une année scolaire : “J’ai moimême assumé cette fonction pendant des annéeset j’ai adoré cela. Mais avec ce roman, j’ai voulu souligner les difficultés que rencontrent les directeurs : diversité des tâches àprendre en charge, solitude… Dans sa formation, les futurs chefsd’établissement ne sont pas préparés aux 1 001 problèmes auxquels ils doivent faire face. Alors, on se débrouille, on apprend surle tas”, explique l’auteur.
Outre ses fonctions officielles, un directeur doit effectivement assumer tous les rôles : assistant social, chef de chantier,secrétaire, psychologue, gendarme, imprimeur ou DRH. “Ob
jectif 30 juin” décrit avec bonheur toutes les facettes de cemétier pour le moins exigeant. Mais s’agitil vraiment d’unroman ? “Oui et non. Dans les écoles, le personnel enseignant sedit toujours qu’il faudrait faire un livre de toutes les histoires quinous arrivent. C’est ce que j’ai fait. J’ai compilé des anecdotes réelles et je les ai mises en forme. Quasiment tout ce que je décris dansle livre est arrivé, à moi ou à d’autres. Evidemment, il s’agit d’unecaricature et le trait est un peu forcé.”
Le roman a déjà visiblement fait mouche auprès des principaux concernés. “Des directeurs d’école l’ayant lu m’ont ditqu’ils se reconnaissaient dans le personnage principal”, souligneRobert Briquet. Un livre drôle et féroce qui offre un regardcomplet sur ce métier difficile.I.L.U“Objectif 30 juin”, Robert Briquet. Bénévent. 232 pp. 20 €.
© S.A. IPM 2012. Toute représentation ou reproduction, même partielle, de la présente publication, sous quelque forme que ce soit, est interdite sans autorisation préalable et écrite de l'éditeur ou de ses ayants droit.
26 Enseignement 6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE 27Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Crédits résiduels :quand le cadeau de vient fardeauh Permettre à un étudiantqui n’a pas réussitous ses examens d’accéderà l’année supérieure estune arme à double tranchant.
h Fautil revoir le système ?
Depuis quelques années, en HauteEcole ou à l’université, il n’est plus nécessaire de réussir tous ses examenspour passer dans l’année supérieure.La réussite à 48 crédits (sur 60, voir cidessous) fait partie de ces mesuresd’aide à la réussite prévues par la réforme de Bologne, surtout destinéesaux étudiants de premier baccalauréat.Les cours ratés (pour un maximumd’un cinquième de la matière) sont
alors reportés à l’année suivante, lorsde laquelle ils devront absolument êtreréussis. Un système qui a ses avantages(on évite l’échec et son impact psychologique) et ses inconvénients (l’échecrisque d’être simplement reporté).
“Mais”, pointe JeanFrançoisVanwelde, exprésident de l’Union desétudiants de la Communauté française(Unecof), “rater sa deuxième plutôt quesa première constitue un véritable problème. La première année sert à se tester,ditil. Postposer l’échec à la deuxième,c’est postposer le moment de réflexion surle choix de ses études. L’étudiant croyaitêtre lancé, il s’est trompé. La chute en estplus lourde.”
Prenons le cas de Tristan (1), qui étudie dans une Haute Ecole bruxelloise.Ou plutôt, qui étudiait. En premièreannée, il avait réussi tous ses examens,sauf deux. Il a pu passer en deuxième,avec des crédits résiduels. Sa deuxièmeannée s’en retrouvait d’autant plus
chargée. Et les sessions d’examens “hyperchargées”. “J’ai eu quatre examens lemême jour, dont un des crédits résiduelsde première. Je savais que si je le ratais, jeloupais mon année.” C’est ce qui est arrivé.
Après deux ans d’études, son escarcelle était donc toujours vide. Et laperspective de recommencer à nouveau, et “de repasser des examens pourla cinquième ou sixième fois” ne le réjouissait pas. Il a donc arrêté ses études.“J’étais à bout, complètement déboussolé.”
Judith (1) a également eu maille àpartir avec la réussite à 48 crédits. Ellepasse en deuxième avec des crédits résiduels, les réussit l’année suivante,mais rate son année. Elle ne doit dèslors plus repasser ses crédits résiduelssauf un cours parce qu’elle n’avait que11/20 (et la dispense est à 12). Puis elleréussit sa deuxième Bac 2 sauf… lecours en question (9/20), qu’elle avait
pourtant réussi l’année précédente.Elle loupe donc une seconde fois sa bac2. Des cas comme ceuxlà sont nombreux.
Davantage en Haute Ecole (où près de10 % des étudiants sont concernés parles crédits résiduels, surtout en première), qu’à l’université (bon an, malan, 4 à 5 %). Car en Haute Ecole, la réussite à 48 crédits est un droit pour l’étudiant, pour autant que les cours ratésne soient pas considérés comme desprérequis pour l’année suivante. Al’université, par contre, le jury est souverain : c’est lui qui juge s’il est opportun d’accorder ou non la réussite à 48crédits. Et la situation varie fortementd’une faculté à l’autre.
Il y a quelques années, le Conseil général des Hautes Ecoles avait mené uneétude sur la question, au terme de laquelle il avait émis quelques recommandations. Parmi cellesci, calquer lapratique des Hautes Ecoles sur celle
des universités (“la souveraineté du jurydoit être assurée”) et, concernant lesprérequis, soit les supprimer, soit lesfaire établir par une instance supérieure afin d’éviter des incohérences etune certaine rivalité entre les établissements et de faciliter la mobilité desétudiants.
A l’université catholique de Louvain,on est en tout cas persuadé que c’estune bonne chose que le jury reste souverain. “Les crédits résiduels sont à utiliser au cas par cas, avec parcimonie”, estime Philippe Parmentier, directeur del’administration de l’enseignement etde la formation. “Les jurys sont très prudents”, confirme Piotr Sobieski, président des jurys des ingénieurs polytechniciens. “En bac 1, surtout, car leprogramme de bac 2 est lourd, et il nes’agit pas d’envoyer les gens au cassepipe. Si l’étudiant a un bon profil, avecjuste un trou dans une matière, OK. Maissi on a des doutes sur les perspectives de
réussite, alors… C’est une question de bonsens. En bac 2, on est davantage libéral,car les étudiants ont appris à travailler.Cela vaut la peine de les faire avancer. Eten bac 3, on limite à nouveau les cas,pour éviter des problèmes juridiques liésà l’anticipation de cours de masters.”
En master, par contre, la politique està nouveau plus libérale. A l’UCL, on aégalement observé ce que devenaientensuite les étudiants. Sur les 319 étudiants de bac 2 qui avaient des créditsrésiduels à repasser en 20102011,123 ont réussi et ont donc pu passer enbac 3 (soit 38,56 %), 176 ont échoué (etrestent en bac 2 avec des crédits résiduels de bac 1 à repasser (55,17 %) et20 ont abandonné (6,27 %).
“On peut analyser cela de deux manières, commente Philippe Parmentier.Soit le verre est à moitié vide, soit il est àmoitié plein : 40 % de réussite, c’est peu,en bac 2, où le taux de réussite est normalement plus élevé. Mais on peut aussi sedire que pour 40 % des étudiants, c’est salutaire.”
Autre constat : ce sont (logiquement)les étudiants qui ont peu de crédits àrepasser qui réussissent le mieux.“Douze crédits, cela représente trois ouquatre cours. Ce n’est pas anodin. Un oudeux, c’est plus abordable. Le seuil dedouze crédits n’estil pas trop élevé ?”JeanFrançois Vanwelde partage cetteinterrogation. Il prône une diminutiondu nombre de crédits résiduels possi
bles de 12 à 10, voire 8. Il insiste également sur l’importance de faire prendreconscience aux étudiants qu’ils sonttoujours dans l’année inférieure tantqu’ils n’ont pas réussi leurs crédits résiduels, quitte à les autoriser à suivrel’entièreté des cours de deuxième en“crédits anticipés”. Enfin, il rappellequ’auparavant, les jurys laissaient passer les étudiants avec trois points debalance et qu’il serait bon qu’ils se souviennent de cette règle tacite, désormais moins usitée. Quelques pistespour, peutêtre, revoir et améliorer lapratique des crédits résiduels.Laurent GérardU(1) Prénom d’emprunt.
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Réussir avec crédits
Une année d’études supérieures comportegénéralement 60 crédits, représentant unnombre variable de cours ou de travaux,selon l’institution (en Haute Ecole, les courssont plus nombreux qu’à l’unif) et la faculté(en ingénieur, les cours sont plus gros etmoins nombreux). La réussite à 48 crédits, etson corollaire, les crédits résiduels, sont régispar une réglementation précise, rappeléedans une circulaire ministérielle adresséechaque année aux Hautes Ecoles. Elle dit ceci: “En seconde session, le jury prononce la réussited’une année d’études non diplômante (donc pasla 3e bac ni la 2e master) dès que l’étudiant,n’ayant pas réussi sur décision du jury, a acquisdurant cette année d’études un ensemble d’aumoins 48 crédits (ou, le cas échéant, le nombrede crédits de l’année d’études moins 12 si elleporte sur plus ou moins de 60 crédits) pourchacun desquels il a obtenu au moins 50 % despoints et pour l’ensemble desquels il a totalisé aumoins 60 % des points pour autant qu’aucun des12 crédits résiduels n’ait été défini commeprérequis nécessaire à la poursuite des études,peu importe que cet étudiant ait présenté ou nonl’ensemble des examens de l’épreuve. Les prérequis nécessaires à la poursuite des études sontarrêtés annuellement par les autorités de laHaute Ecole et mentionnés dans le programmedes études de l’année académique. La réussite à48 crédits est prononcée, sauf cas tout à faitexceptionnel, en seconde session.”L’année suivante, “le solde des crédits doit êtreintégralement obtenu au cours de l’année d’études en cause. Ces crédits sont délibérés avecl’ensemble des crédits de cette année d’études.”Dans cette nouvelle année, la réussite à 48
crédits est de nouveau possible, à conditionqu’il n’existe plus aucun échec dans les crédits résiduels. e
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27Enseignement6 JUIN 2012 - SUPPLÉMENT À LA LIBRE BELGIQUE
Crédits résiduels :quand le cadeau de vient fardeau
des universités (“la souveraineté du jurydoit être assurée”) et, concernant lesprérequis, soit les supprimer, soit lesfaire établir par une instance supérieure afin d’éviter des incohérences etune certaine rivalité entre les établissements et de faciliter la mobilité desétudiants.
A l’université catholique de Louvain,on est en tout cas persuadé que c’estune bonne chose que le jury reste souverain. “Les crédits résiduels sont à utiliser au cas par cas, avec parcimonie”, estime Philippe Parmentier, directeur del’administration de l’enseignement etde la formation. “Les jurys sont très prudents”, confirme Piotr Sobieski, président des jurys des ingénieurs polytechniciens. “En bac 1, surtout, car leprogramme de bac 2 est lourd, et il nes’agit pas d’envoyer les gens au cassepipe. Si l’étudiant a un bon profil, avecjuste un trou dans une matière, OK. Maissi on a des doutes sur les perspectives de
réussite, alors… C’est une question de bonsens. En bac 2, on est davantage libéral,car les étudiants ont appris à travailler.Cela vaut la peine de les faire avancer. Eten bac 3, on limite à nouveau les cas,pour éviter des problèmes juridiques liésà l’anticipation de cours de masters.”
En master, par contre, la politique està nouveau plus libérale. A l’UCL, on aégalement observé ce que devenaientensuite les étudiants. Sur les 319 étudiants de bac 2 qui avaient des créditsrésiduels à repasser en 20102011,123 ont réussi et ont donc pu passer enbac 3 (soit 38,56 %), 176 ont échoué (etrestent en bac 2 avec des crédits résiduels de bac 1 à repasser (55,17 %) et20 ont abandonné (6,27 %).
“On peut analyser cela de deux manières, commente Philippe Parmentier.Soit le verre est à moitié vide, soit il est àmoitié plein : 40 % de réussite, c’est peu,en bac 2, où le taux de réussite est normalement plus élevé. Mais on peut aussi sedire que pour 40 % des étudiants, c’est salutaire.”
Autre constat : ce sont (logiquement)les étudiants qui ont peu de crédits àrepasser qui réussissent le mieux.“Douze crédits, cela représente trois ouquatre cours. Ce n’est pas anodin. Un oudeux, c’est plus abordable. Le seuil dedouze crédits n’estil pas trop élevé ?”JeanFrançois Vanwelde partage cetteinterrogation. Il prône une diminutiondu nombre de crédits résiduels possi
bles de 12 à 10, voire 8. Il insiste également sur l’importance de faire prendreconscience aux étudiants qu’ils sonttoujours dans l’année inférieure tantqu’ils n’ont pas réussi leurs crédits résiduels, quitte à les autoriser à suivrel’entièreté des cours de deuxième en“crédits anticipés”. Enfin, il rappellequ’auparavant, les jurys laissaient passer les étudiants avec trois points debalance et qu’il serait bon qu’ils se souviennent de cette règle tacite, désormais moins usitée. Quelques pistespour, peutêtre, revoir et améliorer lapratique des crédits résiduels.Laurent GérardU(1) Prénom d’emprunt.
Réussir avec crédits
Une année d’études supérieures comportegénéralement 60 crédits, représentant unnombre variable de cours ou de travaux,selon l’institution (en Haute Ecole, les courssont plus nombreux qu’à l’unif) et la faculté(en ingénieur, les cours sont plus gros etmoins nombreux). La réussite à 48 crédits, etson corollaire, les crédits résiduels, sont régispar une réglementation précise, rappeléedans une circulaire ministérielle adresséechaque année aux Hautes Ecoles. Elle dit ceci: “En seconde session, le jury prononce la réussited’une année d’études non diplômante (donc pasla 3e bac ni la 2e master) dès que l’étudiant,n’ayant pas réussi sur décision du jury, a acquisdurant cette année d’études un ensemble d’aumoins 48 crédits (ou, le cas échéant, le nombrede crédits de l’année d’études moins 12 si elleporte sur plus ou moins de 60 crédits) pourchacun desquels il a obtenu au moins 50 % despoints et pour l’ensemble desquels il a totalisé aumoins 60 % des points pour autant qu’aucun des12 crédits résiduels n’ait été défini commeprérequis nécessaire à la poursuite des études,peu importe que cet étudiant ait présenté ou nonl’ensemble des examens de l’épreuve. Les prérequis nécessaires à la poursuite des études sontarrêtés annuellement par les autorités de laHaute Ecole et mentionnés dans le programmedes études de l’année académique. La réussite à48 crédits est prononcée, sauf cas tout à faitexceptionnel, en seconde session.”L’année suivante, “le solde des crédits doit êtreintégralement obtenu au cours de l’année d’études en cause. Ces crédits sont délibérés avecl’ensemble des crédits de cette année d’études.”Dans cette nouvelle année, la réussite à 48
crédits est de nouveau possible, à conditionqu’il n’existe plus aucun échec dans les crédits résiduels. e
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