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7/29/2019 HISTOIRE DE LA TUNISIE TOME1 : ANTIQUITE
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HISTOIRE GNRALE DE LA TUNISIE
TOME I
Hdi Slim Ammar MahjoubiKhaled Belkhoja Abdelmajid Ennabli
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HISTOIRE GNRALE DE LA TUNISIE
TOME I
L ' a n t i q u i t
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CHEZ LE MME DITEUR
MEZGHANI Ali, Lieux etnon-lieu de l'identit, Tunis 1998.
MANSTEIN-CHIRINSKY Anastasia, La dernire escale, le sicle d'uneexile russe Bi^erte, Tunis 2000.
SMIDA Mongi, /lux origines du commerce franais en Tunisie, Tunis2001.
JABI Fadhel, Les amoureux du Caf dsert (thtre), Tunis 1977.
FONTAINE Jean , Propos sur la littrature tunisienne, Tunis 1998.
KHAYAT Geroges, Sfax, ma jeunesse, Tunis 1997 .
KARIM Houda, Lzardes (roman), Tunis 1999.
RAMDOM Michel, Maivlana, le Soufisme et la Danse, Postface :Maurice Bjart, Tunis 1980.
CHEMKHI Sonia, Cinma tunisien nouveau, parcours autres, Tunis 2 0 0 2
KRIDIS Noureddine, Communication etfamille, Tunis 2002
GHARBI Jalel, Le pote que je cherche lire, Lissai surl'uvre de MichelDeguj, Tunis 2002
Demandez le catalogue de nos publications en arabe
et en franais l'adresse suivante :
Sud ditions, service commercial
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HISTOIRE GNRALE DE LA TUNISIE
TOME I
L'antiquitHdi SLIM Ammar MAHJOUBI
Directeur de recherche Professeur Emerite des UniversitsAncien Conservateu r du site de Thysdr us Ancien Direc teur de l'Ecol e No rm ale Suprieure
Kl je m de Tunis
Khaled BELKHODJAAncien Professeur l 'Universi t de Tunis
Ancien Professeur l 'Universi t de Moncton - Canada
106 illustrations - 24 cartes et plansrunis et comments par
Abdelmajid ENNABLIDirecteur de recherche
Ancien Conservateur du site de Carthage
Sud ditions - Tunis
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Sud Editions - Tunis Mars 2010sud ,edition@planet .tn
Tous droits de reproduction, de traduction
et d'adaptation sont rservs
pour toutes les langues et tous les pays
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Avant-propos de l'diteur
Il y a plus d'une trentaine d'annes un groupe de jeunes his-toriens et archologues tunisiens, stimuls par l'Autorit nationale,avaient publi une Histoire de la Tunisie en quatre volumes.L'ouvrage fut bien accueilli, car il rpondait une attente ; l'en-
semble tait bien document, rigoureux, clair et bien rdig. Ce livreaurait d faire une longue carrire mais il ne fut pas rdit et dis-
parut des librairies.
Convaincus de l'utilit d'une rdition, nous nous sommesadresss aux auteurs, devenus pour la plupart les grands matres del'Histoire et de l'Archologie en Tunisie aujourd'hui. Ils accueillirent
favorablement l'ide et beaucoup acceptrent d'apporter leurcontribution ce projet.
Il est certain que, trente ans aprs sa premire publication,l'ouvrage ne pouvait tre rdit sans les mises jour rendues nces-saires en raison des progrs de la recherche historique. Pour ce pre-mier volume, consacr l'Antiquit, les fouilles, notamment la cam-
pagne internationale de fouille de Carthage parraine parl'UNESCO et les moissons annuelles de textes pigraphiques ontclair, et parfois corrig, nos connaissances.
Notre vision du site de Carthage par exemple a chang fon-damentalement. Aussi les auteurs ont-ils t amens autant quencessaire corriger et complter leurs textes.
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C'est ainsi que dans ce volume les professeurs Hdi Slimpour l'poque punique et Ammar Mahjoubi pour l'poque romaine
ont rcrit plus d'un chapitre, et ralis une vritable synthse destravaux les plus rcents, dans les domaines de l'archologie et del'histoire ancienne de la Tunisie. Le professeur Khaled Belkhodja aapport son texte initial des retouches de forme. Il a prfr, pourcette nouvelle dition prsenter un tat de la question danslequel il a consign (voir p. 421) les principaux apports de larecherche relatifs l'Antiquit tardive. Il invite ainsi le lecteur prendre en considration les lumires nouvelles que les chercheursont apportes ces dernires annes sur la situation particulire, enAfrique, des villes du Bas-Empire.
La prsente dition se distingue aussi de l'ancienne par ladocumentation illustre qu'elle propose au lecteur. Cette tche tconfie Abdelmajid Ennabli, ancien conservateur du site deCarthage. Cent six documents photographiques, ds au talent de
Nicolas Fauqu, et relatifs la vie conomique, sociale, culturelle etartistique, vingt-quatre cartes et plans, tous accompagns delgendes appropries, enrichissent le texte. Ils compltent les expo-ss des historiens et permettent au lecteur ce contact privilgi avecle document, matriau essentiel de la connaissance historique.
C'est donc un livre nouveau destin un large public ; il estaussi, par ses apports indits, par sa riche iconographie et par sesannexes un outil de travail apprciable pour les chercheurs.
M. Masmoudi
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Le cadre naturel
Les conditions naturelles sont parmi les facteurs essentiels qui
dterminent les pripties de l'histoire de tout pays. Cela est parti-
culirement vident pour la Tunisie.
Ce pays occupe la partie orientale de l'Afrique du Nord et sesitue presque gale distance du dtroit de Gibraltar et de Suez. Sa
faade nord - ouverte sur le bassin occidental de la Mditerrane -et sa faade sud - qui s'ouvre sur le bassin oriental - dveloppent
plus de 1200 km de ctes offrant des plages et des criques appr-cies, depuis les temps les plus reculs, par les navigateurs. Si la merdlimite au nord et l'est les frontires du pays, on chercherait envain, l'ouest et au sud, quelque lment naturel qui marquerait lalimite entre le territoire tunisien et celui des pays voisins.
Le relief
La Tunisie est partie intgrante de l'Afrique du Nord : on yretrouve en effet les lments du relief qui structurent celle-ci. C'est
ainsi que les deux grandes chanes de l'Atlas tellien et de l'Atlassaharien viennent ici se rencontrer.
L'Atlas tellien s'achve au nord de la Mejerda par les Monts deKhroumirie et les Mogods. L'Atlas saharien occupe un espace beau-coup plus important. Depuis la valle de la Mejerda au nord et ladpression des chotts au sud, il dveloppe une srie de massifs
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10. L'ANTIQUIT
montagneux qui forment la Dorsale. Ces massifs sont dirigs sud-ouest, nord-est et vont s'achever dans la rgion de Tunis et au CapBon. Ils ne sont pas trs levs (le point culmunant, le Chambiatteint peine 1544 m) et ne sont nulle part impntrables.
Depuis cette Dorsale on passe progressivement des terresmoins leves (hautes steppes) et une succession de plaines quicommencent dans la rgion de Tunis et de Grombalia et occupent
tout le centre et le sud du pays. Ces vastes plaines qui s'ouvrent surla mer sont de temps en temps interrompues par des systmes col-linaires, comme le Sahel, et plus souvent pas des dpressions danslesquelles l'coulement endogne des eaux a form au cours dessicles des lacs sals ou sebkhas (Kelbia, Sidi Hni...)
Au niveau de Matmata au sud, affleure le vieux socle continental
africain, il prend sous l'effet de l'rosion l'aspect d'une chane demontagne dnude et sauvage malgr sa faible altitude.
C'est son relief que la Tunisie doit cette particularit d'trepermable aux influences extrieures, climatiques et historiques.
Le climat :
Situe entre la Mditerrane et le Sahara, la Tunisie subit l'in-fluence des masses d'air frais et humide de la premire et celle desmasses d'air chaud et sec du second. Les variations des tempra-tures, de la pluviomtrie, de l'hydrographie et de la vgtation natu-relle s'expliquent par cette double influence. D'autres facteurs inter-viennent aussi, comme l'altitude et l'loignement par rapport la
mer.Fondamentalement, ce climat est caractris par des ts chauds
et sans pluies et par des hivers froids et pluvieux. Mais dans cetableau trop gnral, il faut introduire beaucoup de nuances.
C'est ainsi que la moyenne des tempratures annuelles les plus
basse n'est pas dans l'extrme nord, elle est Maktar (14,2) et la
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LE CADRE NATUREL 11
moyenne des tempratures les plus leves est Tozeur (21,3) ausud mais loin de la cte. Il faut aussi corriger ces moyennes, sommetoute abstraites, en signalant que la thermomtre peut descendretrs bas l'hiver (-9 Thala) et monter trs haut l't (+54 Kbili).Ni Thala, ni Kbili ne profitent de l'effet modrateur de la mer, etd'une faon gnrale la faade orientale du pays jouit, malgr descontrastes vidents, d'un climat plutt doux.
On constate les mmes contrastes pour la pluviomtrie. Ici lesreliefs jouent un rle plus net. Les rgions les plus arroses sesituent au nord de la Mejerda (An Drahem == 1500 mm/an Tabarka = 1000 mm/an).
Dans leur ensemble, les rgions situes au nord de la Dorsalereoivent entre 400 et 600 mm par an. Nous sommes ici dans le
Tell, rgion dont les hauteurs sont couvertes de belles futaies dechnes lige et chnes zen. De mme les cultures annuelles sont
plus rgulires et gnralement assures et l'arboriculture est pros-pre.
Les cours d'eau oueds coulent toute l'anne avec des tiagestrs faibles certes, mais arrivent jusqu' la mer. La Mejerda, princi-
pal cours d'eau du pays (460 km de longueur), prend sa source enAlgrie 1200 m d'altitude. Elle reoit des affluents qui descendentde l'Adas tellien et du versant nord de l'Adas saharien, et termineson cours dans la plaine ctire de la rgion de Tunis, charriantchaque anne des matriaux qui au cours des sicles ont modifi ledessin de la cte. Utique qui aux poques punique et romaine tait
un port actif se trouve aujourd'hui 12 km de la mer.Entre Le Dorsale et la dpression des chotts , la Tunisie centra-
le (haute et basse steppe) reoit entre 200 et 400 mm an. Ici la vg-tation est moins dense ; nous sommes davantage dans le domainede l'alfa que dans celui de l'arbre. Les oueds qui descendent des ver-sants sud de la Dorsale, dversent leurs eaux en priode de crues
qui peuvent tre trs fortes dans la sebhka (Kelbia et Sidi Hni).
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12 L'ANTIQUIT
Exceptionnellement ces eaux atteignent la mer par Oued El Menfesqui joint la Kelbia la mer.
Ici on cultive davantage l'orge que le bl ; l'olivier et l'amandiersont aussi cultivs en raison de leur rsistance la scheresse.
Au sud de la dpression des chotts, la Tunisie saharienne a un cli-mat beaucoup plus sec (100 200 mm par an) et les chaleurs del't, loin des ctes sont trs leves. Kbili la moyenne du mois
le plus chaud atteint 32,4 degrs alors qu' Gabs qui est sensible-ment la mme latitude, mais situ au bord de la mer, cette moyen-ne tombe 27,5 degrs.
C'est du reste dans cette partie orientale de la Tunisie subdser-tique que la culture de l'olivier reste possible (Zarzis). Ailleurs seulesles sources artsiennes ont permis depuis une antiquit recule
l'existence d'oasis rputes par leurs cultures tages : le palmierdattier, l'ombre duquel pousse l'arbre fruitier, qui son tour pro-tge les cultures potagres.
Ces caractristiques du relief et du climat, voqus ici grandstraits semblent avoir t sensiblement les mmes au cours destemps historiques. Il est vrai que l'arme carthaginoise utilisait les
lphants, que la Carthage romaine approvisionnait Rome en bl eten animaux sauvages pour les jeux du cirque ; il est vrai aussi que ledernier lion aurait t tu en Tunisie au milieu du sicle dernier. Lesforts ont du tre s'il faut croire les gographes arabes plus ten-dues et plus denses. Mais toutes ces volutions semblent tre le faitde l'homme plus que le fait d'un changement climatique.
C'est donc dans un cadre naturel sensiblement comparableau ntre qu'ont vcu les hommes des poques antiques.
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PREMIRE PARTIE
L'POQUE PUNIQUE
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CHAPITRE PREMIER
Les temps prhistoriques
Les conditions gnrales
Lorsque vers le milieu du XIXe s., Jacques Boucher de Perthesdcouvrit, au milieu d'ossements d'animaux appartenant desespces disparues depuis fort longtemps, des pierres dont lesformes trop rgulires ne pouvaient avoir t faonnes par la natu-
re, il mit l'hypothse que l'homme existait depuis des centaines demillnaires. Le monde savant se montra trs sceptique : il tait gn-ralement admis que les premiers hommes ne remontaient pas plushaut que les premires civilisations connues comme celles de Sumeret de l'Egypte.
La dcouverte de Boucher de Perthes allait marquer la nais-
sance d'une science qui donnera l'histoire de l'humanit une nou-velle dimension.Cependant, de cette longue et obscure priode qui prcda
l'histoire, seules de rares traces subsistrent, permettant de projeterde vagues lueurs sur l'humanit primitive. Quelques squelettes, desossements d'animaux ayant servi de nourriture nos premiersanctres, des outils grossirement taills dans le silex et des gravures
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16. L'ANTIQUIT
rupestres laissent quelqu peu entrevoir certains genres de vie et
certaines croyances. L'absence totale de documents crits ne permetpas d'atteindre une plus grande prcision. Il est vident que dans cesconditions la seule approche qu'on peut esprer concernera lesgenres de vie essentiellement conditionns, d'ailleurs, par les don-nes gographiques et climatiques. Certaines rgions dotes d'unclimat plus doux que d'autres, semblent avoir t plus tt habites.Dans l'tat actuel de nos connaissances, l'Afrique est considre
comme le berceau de l'humanit : c'est en effet prs de Dar Es-Salem (Soudan) que le squelette le plus ancien - vieux de deux mil-lions d'annes parait-il - a t dcouvert. Le bassin de la Mditerra-ne a galement fourni, de trs bonne heure, un cadre propice audveloppement de l'homme. La Tunisie, qui est incontestablementun domaine privilgi de la recherche en matire d'archologie clas-
sique, offre un aussi vaste champ de prospection aux prhistoriens.Tour tour, Giuseppe Bellucci (1875), G. Schweinfurth (1906), Col-lignon Couillault, Paul Boudy, Jacques de Morgan, Marcel Solignac,Etienne Dumon, Gruet, Schoumovitch, Diard, Harson, Bardin,explorent les stations prhistoriques tunisiennes. Mais le grandhomme de la recherche prhistorique sur la Tunisie demeure leDocteur E. Gobert qui entreprit ses premiers travaux Rdeyef
vers 1920 et dont l'inlassable activit se poursuivit sans relche clai-rant chaque jour davantage un domaine des plus complexes.D'autres grands savants, tels R. Vaufrey ou L. Balout, travaillantchacun dans son secteur, contriburent leur tour nous fairemieux connatre notre prhistoire. Depuis, la relve a t assure parune quipe tunisienne, trs active, comprenant notamment Mouni-
ra Harbi-Riahi, Abderrazek Gragueb, Ali Mtimet et Jamel Zoughla-mi.
Cependant, en dpit des efforts conjugus de ces minentssavants, beaucoup reste encore faire dans le domaine de la fouilleet de la recherche avant de prtendre voir clair dans la prhistoiredu pays. Car c'est peine si quelques lumires commencent suc-
cder une nuit presque totale. D'autre part, une plus grande explo-
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POQUE CARTHAGINOISE 17
ration du sol nous rservera sans doute de nouvelles dcouvertesqui, chaque instant, pourront remettre en cause plus d'une hypo-
thse. Le prhistorien, comme l'a si bien dit Charles-Andr Julien,btit son fragile difice sur un sol mouvant. Aussi les vrits d'au-jourd'hui ne peuvent-elles tre considres comme immuables, eton ne peut prtendre faire davantage qu'une mise au point assez
provisoire.
Ceci dit, le premier fait frappant auquel des savants apparte-
nant diverses disciplines aboutirent aprs de longues recherches,est que les donnes climatiques et gographiques de l'ensemble del'Afrique du Nord ont considrablement chang et ce, plusieursreprises au cours des temps prhistoriques. Il est par exemple admisque nos premiers anctres vcurent dans une Tunisie bien diffren-te de la ntre. Non pas que l'aspect gnral du relief ait beaucoupchang depuis, les fluctuations de paysages n'ayant affect que des
aspects secondaires et souvent limites aux ctes, mais c'est le cli-mat qui, tantt trs sec et tantt humide, a conditionn les zonesd'occupation humaine et les genres de vie. Au gr de ces variations,la vie se concentrait autour des sources et points d'eau ou se dis-persait sur de plus vastes zones. Paysages et genres de vie subis-saient d'ailleurs largement l'influence du Sahara qui de son ctconnut de notables changements climatiques tout au long des mil-lnaires de la Prhistoire. Il est surtout noter qu' certainespoques, il y fit moins chaud et plus humide qu'aujourd'hui. Par-couru par de grands oueds, le Sahara offrait l'aspect d'une vastesteppe.
C'est dans ce contexte prcis que vcurent les chasseurs d'au-truches et de girafes que nous reprsente l'art rupestre qui voque
galement des guerriers, des pasteurs, des agriculteurs et divers ani-maux, comme les lphants, les hippopotames, les rhinocros, lesgirafes et les autruches. Ces diverses reprsentations attestent desconditions de vie rvolues et une grande humidit dans des rgionsaujourd'hui totalement sches. Les conditions actuelles ne se sonten effet que progressivement tablies, partir du Xe millnaire au
plus tt.
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18. L'ANTIQUIT
Ainsi, il n'y a rien d'tonnant ce que la Tunisie prhistorique,subissant diverses influences, connt certaines priodes un climat
plus humide, de plus grandes prcipitations et une rosion plus acti-ve. Tout cela se rpercutait sur la flore et au cours de multiplesinvestigations, on n'a pas manqu de relever des traces de vgtauxdisparus depuis longtemps (le lac Ichkeul en fournit bien des
preuves.) La faune tait galement bien plus riche que celle d'au-jourd'hui. Le Sahara, ne jouant pas le rle de barrire qu'on lui
connut par la suite, favorisait les changes zoologiques entrel'Afrique du Nord et le reste de l'Afrique. Ce n'est qu'avec le dess-chement du Sahara que ces changes cessrent et que certainesespces animales coupes de l'Afrique tropicale prirent l'aspectd'une faune rsiduelle et isole. Conditions climatiques et histo-riques se conjugurent par la suite pour en hter la disparition.
Quant aux premiers hommes, ils connurent, comme partout
ailleurs, des conditions de vie fort pnibles. Exposs toutes lesintempries, vivant dans l'inscurit la plus totale, n'obissant qu'leur instinct de survivre, condamns de perptuels dplacements,ils erraient, la recherche d'une nourriture incertaine et semblaientpresque perdus au milieu d'immensits vides. Ils taient trop peunombreux et trop isols pour entretenir des rapports fconds et
profitables. Cela explique l'extrme lenteur des progrs qui caract-risrent leur volution au cours des ges. Il suffit de savoir, pours'en convaincre, qu'il fallut plus d'un million d'annes l'homme
pour passer de la technique de la pierre taille celle de la pierrepolie.
Les principales phases de la prhistoire
La prhistoire se divise en plusieurs priodes de dure fortvariable, mais de moins en moins longues au fur et mesure qu'onse rapproche de l'histoire. C'est l'image mme du rythme des pro-grs raliss par l'homme. L'ge le plus recul, caractris par lafabrication d'outils en pierre taille, s'appelle le palolithique. Il
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Hermaon d'El Guettar
II s'agit d'un amoncellent d'objets prhistoriques remontant plus de 40 000 anset constitu de pierres sphriques, de silex taills,de dents et d'ossements d'animaux qui ont t rassembls
intentionnellement auprs d'une source. Cet amas est considrcomme l'une des premires manifestations religieuses de l'homme.
Il a t trouv dans le gisement d'El Guettar situ 20 km l'est deGafsa. Ce site est rput en raison de la longue occupation qu 'il a connu
travers le temps, du palolithique au nolithique.
Pierre sculpte
(civilisation capsienne)
Elle provient du gisement capsiend'El Mekta situ proximit de Gafsa.
En calcaire tendre, de forme conique,cette sculpture reprsente une figure
humaine. Les traits du visage ne sontpas indiqus, mais la face portequelques incisions. En revanche lachevelure, qui est longue, est
particulirement bien traite :une frange paisse, soigneusementcoupe au-dessus du front estassocie deux lourdes massesde cheveux descendant de chaque
ct en cachant les oreilles.
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20. L'ANTIQUIT
semble que les premires traces de ce palolithique ancien soient ces
galets taills qui ont t trouvs mls des ossements de tigres etd'lphants gants dans l'extrme sud tunisien, aux environs deKbili. D'autres traces aussi anciennes auraient t repres enTunisie centrale.
L'Acheulen (vers 300 000 100 000 avant J.-C.)
L'Acheulen qui est la dernire phase du palolithique inf-rieur ou ancien se trouve en gnral la base des reliefs. L'industriede cette priode produite par l'espce dite pithcanthrope (homme-singe) est caractrise par ces bifaces aux patines rougetres trouvsau pied de la colline d'El Mekta, mais aussi par ceux recueillis Rdeyef et Gafsa. On a remarqu que ces industries se trouventen gnral localises vers le parallle de Gafsa. Les seuls vestiges decette poque, trouvs ailleurs, l'ont t dans un gisement prs duKef, Sidi Zin, o on a pu dterminer la prsence d'animaux commel'lphant, le rhinocros, le zbre, la gazelle et l'antilope, ce quidnote un climat chaud et humide.
Le Moustrien (100 000 35 000 avant J.-C.)
Le Moustrien, civilisation du palolithique moyen, se trouvetrs troitement circonscrit au contact immdiat des sources, ce quilaisse supposer que la Tunisie traversait alors une phase d'aridit tel-le que les hommes cherchrent refuge prs des seuls points d'eau.Cinq gisements sont signaler : Oued Akarit prs de Gabs ; ElGuettar prs de Gafsa ; Ain Metherchem au Nord-Ouest du Cham-
bi ; An Mrhotta prs de Kairouan et enfin Sidi-Zin.L'outillage moustrien, essentiellement constitu de pointes et
de racloirs, forme une industrie clats qui diffre, par la techniquede la taille, de l'industrie acheulenne. Mais le gisement le plus int-ressant provient d'El Guettar o on a trouv, prs d'une source fos-sile, un amoncellement conique form de boules, de plus de 4000
silex et d'ossements d'animaux, rsultant de dpts successifs d'of-
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POQUE CARTHAGINOISE 21
frandes au gnie de la source. Cet hermaon , datant d'environ40 000 ans avant J.-C. est considr comme le plus vieil difice
religieux du monde.
L'Atrien (35 000 25 000 avant J.-C.)
Bir El Ater, au Nord-Est de Constantine, a donn son nom une industrie caractristique du palolithique rcent dont les tracescouvrent toute l'Afrique du Nord depuis l'Atlantique jusqu' la val-
le du Nil. L'Atrien drive de la tradition moustrienne enrichied'apports nouveaux ; sa large diffusion travers toute la Tunisie tra-duit un climat beaucoup plus clment que celui du Moustrien. Eneffet, l'Atrien affleure partout, sur les croupes dnudes, sur lesdunes, sur les rivages et plus exactement dans les rgions de Tozeur,Gafsa, Gabs, Monastir, Hergla, Bizerte etc... L'industrie atrienne
se caractrise en gros par la forme pdoncule de ses outils dontl'auteur est l'homo-sapiens, proche de l'homme actuel.
L'Ibromaurusien (25 000 8 000 avant J.-C.)
Antrieure au IXe millnaire, la civilisation ibromaurusiennese caractrise par un outillage riche en lamelles, pauvre en silex go-
mtriques. Avec le Capsien qu'il prcde, l'Ibromaurusien appar-tient l'pipalolithique du Maghreb.
Le Capsien (7 000 4 500 avant J.-C.)
C'est ensuite le Capsien qui retient l'attention, tant il a t plus
marquant que d'autres phases comme l'Ibromaurusien. Ce Capsiena suscit un engouement tel parmi les savants que le DocteurGobert n'a pas hsit parler de mirage du Capsien . C'est deGafsa, autrefois Capsa, qu'il tire son nom, et c'est Jean de Morganqui le signala le premier. La civilisation capsienne semble pourtantvenue de loin : on en a trouv des traces dans une grotte de Cyr-naque. Il n'est pas possible, dans l'tat actuel des connaissances, de
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prciser ses origines exactes. On pense cependant qu'elle a gagn laTunisie par l'est ; son aire d'expansion est assez tendue et le peu-
plement qu'elle a suscit a t particulirement dense dans la rgionde Gafsa-Tbessa o elle a laiss de trs nombreuses traces prser-ves de l'usure par l'asschement du climat. Il semble bien, en effet,que la civilisation capsienne se soit droule dans un paysage trs
proche du ntre. On a galement pens que le Capsien a envahil'Afrique puis l'Europe et sa vogue fut telle qu'on a voulu le voir
partout, aussi bien en Espagne qu'en Egypte et mme dans l'Inde.Il semble aujourd'hui plus raisonnable d'abandonner ces points devue.
Des charbons capsiens provenant d'El Mekta soumis desanalyses de laboratoire se rvlrent vieux de quelque 8 000 ans.C'est grce au carbone 14, dont la destruction s'effectue suivant un
processus rgulier, qu'on a pu dater, avec une relative prcision, ces
tmoins de la civilisation capsienne.Le Capsien est essentiellement caractris par les escargotires
ou rammadyat, sorte de monticules artificiels de 10 mtres de hautet dont les dimensions fort variables atteignent parfois jusqu' 50mtres de large et 150 mtres de long.
Ces monticules se sont forms sur l'emplacement des campe-ments d'autrefois et par suite de l'accumulation de cendres, d'outilsdivers, d'ossements humains et animaux et surtout de coquilles d'es-cargots dont l'homme du Capsien semble avoir fait une abondanteconsommation. Il y aurait peut-tre un rapport entre l'existence desescargotires et des noms de lieux tels que : Ramada, An Babouchetc...
On distingue sur le plan de l'outillage deux formes de Capsien :
le Capsien typique caractris par des burins et des lames bordrabattu et le Capsien suprieur riche en formes gomtriques etd'une manire plus particulire remarquable par la prsence degrandes quantits de microburins qu'on a ramasss dans les cen-taines d'escargotires qui jalonnent l'Afrique du Nord. Leshommes, vivant exclusivement de chasse et de cueillette, en taientencore au stade de l'conomie destructive mais on note chez eux
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Outillage prhistorique
Divers types d'outils prhistoriques : a) biface du Palolithique ;b) flches pdoncules de l'Atrien et
c) pierres tailles du Capsien. Ces derniers ont t recueillissur le site de El Mekta, gisementprinceps de cette
priode de la prhistoire en Tunisie. Ce sont des grattoirs,burins, grosses lames et petites lamelles tailles finement dans le silex.
Ce matriel est extrait des gisements capsiens dnommsramadya ou escargotires en raison de la
prsence de cendres et de coquilles d'escargots, dbrisdes foyers d'occupation de ces hommes du Capsien qui ont vcu dansla rgion de Gafsa Tbessa, proximit de points d'eau.
Haouanet(pluriel de hanout)
C'est le nom donn des tombesayant la forme de chambres cubiquescreuses dans le roc et s'ouvrant surles parois de certaines collines. Leurdatation est encore mal assure,
s'tendant de la protohistoire lapriode punique. Leur localisation,surtout dans le nord-est de laTunisie, montre une influencevenue des les mditerranennes,en particulier de la Sicile.
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l'veil de la sensibilit artistique comme le montre, en particulier
une figurine fminine dont la chevelure encadre le front et les deuxcts du visage mais dont les traits n'ont pas t fixs.
Nolithique (4500 2000 environ avant J.-C.)
Le Nolithique ou ge de la pierre polie commence asseztard pour la Tunisie. Traditions locales et apports extrieurs se
conjuguent pour donner au pays un nouveau visage et, ct desformes volues du Capsien, on trouve des outils en pierre polie etdes poteries. Ce Nolithique se prolongera jusqu' l'arrive des Ph-niciens et mme au-del puisqu'on continuera pendant longtemps utiliser des flches en pierre et des modes de spulture nolithiqueset proto-historiques comme les mgalithes, les dolmens et leshaouanets creuss aux flancs des rocs et particulirement abondantsdans le Cap Bon. Le plus grand changement l'poque nolithiquec'est le desschement du climat qui devient peu prs ce qu'il estaujourd'hui. Certaines espces animales comme l'hippopotame et lerhinocros disparaissent, par contre les animaux domestiques com-me le chien et le cheval font leur apparition.
Bien que notre connaissance des temps nolithiques demeure
incomplte, il ne semble pas que l'on puisse dater de cette poquel'apparition d'une vraie agriculture. St. Gsell se contente, pour sapart, d'affirmer prudemment que les indignes de l'Afrique duNord n'ont pas attendu la venue des Phniciens pour pratiquer l'le-vage et l'agriculture. D'autres savants, comme G. Camps, tout enadmettant que l'agriculture nord-africaine est ancienne, hsitent lafaire remonter au Nolithique. Ils fondent leur doute sur l'absence
de graines et de plantes cultives dans les gisements nolithiques. Ilsconsidrent que certaines scnes de vannage ou de broyage repr-sentes sur des peintures rupestres peuvent tout aussi bien se rap-
porter au traitement de graines sauvages que de graines de crales.Les documents archologiques et historiques permettent unique-ment d'affirmer, que l'agriculture apparat et commence s'organi-
ser entre la fin du Nolithique et l'poque punique. C'est une agri-
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culture protohistorique qui ne doit rien aux Carthaginois. Le pro-blme est complexe et seules de nouvelles dcouvertes et une
meilleure connaissance du Nolithique permettront de le rsoudre.Contentons nous donc, en attendant, d'affirmer ce qui parat acquis :aucune certitude absolue en ce qui concerne l'existence d'une agri-culture rellement Nolithique mais des donnes incontestables,confirmes notamment par l'archologie et la linguistique, et mon-trant que les autochtones de la protohistoire pratiquaient des cul-
tures antrieurement la pntration phnicienne.Parmi les cultures les plus anciennement connues en Afriquedu Nord, on peut citer le bl dur auquel les Berbres donnent lenom de irden. E. Laoust a montr que ce mme mot est employpar tous les Berbres depuis l'oasis Siouah ( l'est de l'Egypte) jus-qu'aux les Canaries. Cela prouverait l'anciennet de l'appartenancedu bl l'conomie nord-africaine. Les botanistes pensent que ce
bl tait venu d'Abyssinie, ce qui confirmerait quelque peu le pointde vue des anthropologistes qui tendent rattacher l'origine desBerbres l'Afrique orientale. Des arguments du mme genre peu-vent montrer que l'orge, les crales secondaires et certains fruits oulgumes prexistaient la conqute phnicienne. Ainsi on peutaffirmer que les fves, l'ail, les pois chiches, les melons, les courgeset les navets sont trs anciennement connus.
Les Berbres de la protohistoire ne cultivaient peut tre pasl'olivier, mais les anciens habitants de Djerba savaient dj tirerl'huile de l'olivier sauvage et le vin des fruits du jujubier. L'amandier,le figuier, la vigne et le palmier sont aussi trs anciens. De mmel'utilisation de la houe, de l'araire et de certains autres instrumentsde travail de la terre ne semble pas tre due une quelconque
influence trangre.Parmi les vestiges les plus intressants du Nolithique et de la
protohistoire nous trouvons les gravures rupestres, tantt creusesau silex et reprsentant des sujets aux traits rguliers, tantt gros-sirement pointilles et trs schmatiques. Certains animaux aux-quels on semble avoir vou un culte ont t plus volontiers repr-sents que d'autres. Les quelques portraits humains qu'on y trouve
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sont gnralement ceux de personnages vtus de peaux de btes etportant l'tui phallique. Dans certains cas, ils ont la tte couverted'une couronne de plumes, ou bien ils portent des colliers et des
bracelets ou sont arms d'arcs, de flches et de boomerangs.Les ufs d'autruche furent utiliss comme bouteilles, coupes
et parures depuis le Capsien. Souvent ils prsentent aussi un dcorgrav ou peint fait de motifs gomtriques et parfois, comme Redeyef, de motifs figuratifs.
De cette mme poque semblent dater des poteries de factu-re certes mdiocre mais tmoignant d'un certain souci esthtique etquelques statuettes d'aspect primitif.
Au total nos connaissances sur les modes de vie, les croyances,les gots et la production de cette poque demeurent bien vagues.
Les Berbres
On dispose de ressources plus faibles encore quand il s'agitd'tudier les hommes qui habitrent notre pays avant l'arrive desPhniciens. Quelle que soit la priode de la prhistoire laquellenous tentons de nous placer pour dgager des donnes prcisesnous nous heurtons de srieux obstacles. On a beaucoup de pei-
ne tirer la moindre conclusion claire de toutes les tudes,anciennes ou rcentes, consacres ce difficile problme. Il estcependant admis que les Berbres ne sont, l'origine, que des tran-gers venus, vers le Nolithique, se fixer dans un pays jusqu'alorspeupl d'hommes sur lesquels nous ne possdons presque pas derenseignements sinon qu'ils ont t mtisss d'lments plus oumoins ngrodes vers l'poque capsienne. L'hypothse la plus vrai-
semblable, dans l'tat actuel des tudes, considre les Berbres com-me une race d'hommes proto-mditerranens analogues aux popu-lations mditerranennes actuelles d'Orient ou d'Europe. Apparusau VIIIe millnaire, ils sont les auteurs de la civilisation capsienne.Toutefois c'est l'Orient qui semble avoir jou le rle principal pources Berbres dont la langue se rattache au groupe chamito-smi-tique du Proche-Orient. Leur nom de Berbres (ou Barbares), leur
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a t donn par les Grecs et les Romains qui avaient l'habitude dequalifier ainsi tous les trangers leur civilisation.
Les peuples anciens les appelaient aussi les Libyens. Ce nomsemble driver du mot gyptien Lebu utilis ds le XIIIe s. avantJ.-C. pour dsigner un peuple africain, puis tendu par les Grecs tous les Berbres.
Plus tard, seuls les habitants de l'Afrique du Nord-Est conser-vrent ce nom avant de devenir les Afri des Latins, et leur pays
l'Africa. Cependant, comme l'a not G. Camps, il se peut que le vri-table nom du peuple berbre provienne de la racine MZG ou MZKqui se retrouve dans les noms des Mazices, Mazaces, Mazazeces desRomains, Maxyes d'Hrodote, Mazyes d'Hecate, et Meshwesh desgyptiens. Il semble ainsi que les Imuzagh de l'ouest du Fezzan, lesImagighen de l'Air, les Imazighen de l'Aurs, du Rif et du HautAtlas ne soient que des survivances d'un mme nom ancien donn
aux Berbres.Avec la formation de peuples, puis de royaumes berbres, les
distinctions et les nuances se multiplient chez les auteurs anciens.C'est ainsi que les Berbres, sujets de Carthage, conservrent lenom de Libyens ; ceux du Maghreb central furent appels Numides,et ceux du Maroc Maures. Dans le Sud de ces pays vivaient des Ber-
bres appels Gtules. Cependant certains auteurs parlent de Pha-rusiens au Sud du Maroc, de Garamantes au Fezzan.
Les uns et les autres semblent avoir parl une langue commu-ne qui est probablement l'origine des dialectes berbres moderneset qui semble tre de la mme famille que l'gyptien ancien.D'ailleurs l'Afrique du Nord de cette poque a subi l'influence del'Egypte pharaonique qui fut un des premiers berceaux de la civili-
sation. Ce fait peut tre mis en rapport avec les multiples tentativesde pntration libyenne en gypte commences ds 3300 avantJ.-C. et qui aboutirent la conqute du Delta vers 950.
Il semble enfin que notre pays fut, au lendemain du Noli-thique, en relation avec la Sicile, la Sardaigne et mme le Sud del'Italie. C'est par ces relations que l'on explique la diffusion au CapBon de ces haouanets qui taient connus en Sicile et en Sardaigne
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depuis l'ge du bronze. De mme les dolmens de la rgion de l'En-fida et du Cap Bon seraient venus d'Italie et d'Orient avec un relais Malte. On a not galement certaines similitudes entre la cra-mique et la poterie peinte de ce pays et celles de l'Italie de l'ge dubronze et du fer.
En dfinitive malgr ces contacts, ces influences et certainsprogrs rels, la Tunisie, la veille de l'histoire, demeure par sonconomie et sa civilisation un pays modeste et quelque peu attard.
L'arrive des Phniciens vers la fin du second millnaire va incon-testablement hter son volution. Il faut d'ailleurs prciser que seulsde rares endroits privilgis favorisrent, au dbut de l'histoire, ledveloppement de brillantes civilisations. Il s'agit essentiellementdes valles des grands fleuves subtropicaux qui, grce leur fertili-t exceptionnelle, avaient procur aux hommes, en plus de leurnourriture indispensable, une marge de confort assez large stimu-
lant toutes sortes de progrs.
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CHAPITRE II
Les Phniciens et la fondationde Carthage
Les chelles phniciennes
La Tunisie tait encore dans sa phase protohistorique et vivaitdonc l'cart des grands courants de la civilisation mditerranen-ne, lorsque vers la fin du XIIe s. avant l're chrtienne, les premiersPhniciens vinrent s'y installer.
Si les nouveaux venus sont relativement bien connus, les condi-tions et les tapes de leur installation demeurent, par contre, obscures.
Ils paraissent avoir fond leur plus ancienne colonie, Utique, vers1101 avant J.-C. L'absence de donnes chronologiques prcises nousempche d'avancer des dates pour leurs divers autres tablissements.On peut cependant admettre que, ds cette poque lointaine, les Ph-niciens avaient tabli un rseau de stations et d'escales le long desrivages tunisiens afin de pouvoir relcher chaque soir aprs une ta-pe de quarante kilomtres environ. Ces abris concidaient sou-
vent avec des points d'eau o ils pouvaient se ravitailler et en mmetemps rparer leur navire, ou se rfugier en cas de tempte.
Pour ces grands navigateurs doubls de commerants habiles,la Tunisie ne constituait pas une fin en soi. Rien de prime abord, nepouvait les y attirer. Le sous-sol n'tait dot d'aucun mtal prcieux,et si le sol tait riche de possibilits, il tait exploit d'une maniresi rudimentaire qu'il ne livrait encore aucun produit agricole sus-
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ceptible de les intresser au point de les faire venir d'aussi loin. Enfait, l'Espagne tait le but ultime de cette aventure phnicienne en
Mditerrane occidentale. Le pays de Tartessos, vritable Eldoradodu monde antique, fournissait, en abondance, l'tain et le cuivredont le transfert en Orient constituait une des bases de la richesse
phnicienne. Les rivages de l'Afrique du Nord taient providentiels,parce que, d'une part ils rendaient l'accs l'Espagne singulire-ment facile en supprimant les alas de la navigation en haute mer, une poque o on ne pratiquait que le cabotage, et d'autre part, ils
permettaient de surveiller et de contrler la route du mtal prcieux.Le site d'Utique, se trouvant mi-chemin entre le point de
dpart et le point d'arrive de ce long parcours eut le privilge desusciter le premier grand tablissement phnicien en Tunisie. Cettegrande cit antique ne cessera de jouer un rle important que le jouro la Medjerda aura entirement combl ses ports de nombreuses
alluvions qui modifieront le paysage ctier de toute la rgion.
Elissa et la fondation de Carthage
Carthage ne devait voir le jour que de nombreuses annesaprs Utique. Plus jeune galement qu'Hadrumte, semble-t-il, elleest plus vieille que Rome, puisque divers textes indiquent qu'elle a
t fonde en 814 avant J.-C.Son site est trs avantageux, car il se trouve dans un golfe
ouvert sur le dtroit qui unit les deux bassins, occidental et orien-tal, de la Mditerrane. D'autre part, des lagunes sparent la zonede Carthage du continent et lui assurent une certaine scuritcontre les attaques pouvant venir de l'intrieur. La tradition place,d'ailleurs, un premier tablissement, phnicien, antrieur Cartha-
ge et sur son emplacement mme. Dans l'tat actuel des fouillesarchologiques ce fait ne peut tre confirm. Pendant longtempson s'est fond sur l'archologie qui n'avait pas fourni de documentsantrieurs la deuxime moiti du VIII e s., pour avancer la date dela fondation de la cit la deuxime moiti du VIIIe s. ou au dbutdu VIP s. Mais les dcouvertes rcentes tendent confirmer la datede 814 avant J.-C.
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En ce qui concerne les origines et les circonstances de la fon-dation de Carthage, nous disposons de plusieurs textes anciens,
mais la ralit s'y mle troitement la lgende. Les rcits les pluscirconstancis nous rapportent que le roi de Tyr avait institu com-me hritiers son fils Pygmalion et sa fille Elissa. Celle-ci, carte dutrne au profit de son frre, pousa Acherbas, prtre de Melquartet, de ce fait, second personnage du royaume aprs le souverain.Acherbas tait de surcrot immensment riche. Ses richesses ne tar-
drent pas veiller la convoitise du jeune roi Pygmalion qui, dansl'espoir de s'en emparer, se dbarrassa d'Acherbas en le tuant. Labelle Elissa conut contre son frre une haine implacable. Elle dci-da de fuir en compagnie de quelques puissants citoyens qui avaientaccumul contre Pygmalion autant de haine que sa propre sur.Celle-ci dcida d'agir avec prudence : elle informa son frre de sondsir de s'installer chez lui et de quitter la maison de son mari quilui rappelait trop son triste deuil. Pygmalion s'empressa d'accepterdans l'espoir de voir arriver en mme temps que sa sur l'or pourlequel il n'avait pas hsit tuer son beau-frre. Il mit la disposi-tion d'Elissa de fidles serviteurs, chargs de l'aider transporter sesbiens. Le soir, Elissa fit embarquer ses biens, gagna la haute mer etl elle obligea les serviteurs du roi jeter dans les flots des sacs
pleins de sable leur faisant croire qu'ils renfermaient la fortuned'Acherbas. Elle manuvra ensuite si habilement que les serviteursse crurent menacs des plus cruels supplices s'ils retombaient sousla main de leur redoutable matre qui n'avait pas hsit tuer unproche parent pour s'emparer de ces mmes richesses qu'ilsvenaient de jeter la mer. Ils n'eurent alors rien de plus press que
d'accompagner Elissa dans sa fuite. Ils ne tardrent pas trerejoints par tous ceux qui dsiraient fuir et qui taient au courant duprojet d'Elissa. Aprs un sacrifice Melqart, le convoi se dirigeavers Chypre. Dans cette le, les fugitifs embarqurent avec eux legrand prtre de Junon-Astart ainsi que quatre-vingts jeunes filles,enleves au moment o elles venaient sur le rivage pour offrir leurvirginit Vnus et se constituer une dot, comme c'tait la coutu-
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me Chypre. Cette opration tait destine procurer des femmesaux jeunes gens parmi les fugitifs phniciens et une abondante pro-gniture leur future ville.
Aprs un long priple, les Phniciens dbarqurent sur le sitede Carthage o ils ne tardrent pas tablir de bonnes relations avecles autochtones. Les coutumes locales interdisaient l'acquisition parles trangers de terrains plus vastes qu'une peau de buf. Elissadcoupa la peau en lanires si minces qu'elles suffirent cerner les
plus vastes espaces. Elle russit, grce cette ruse, tourner la loiet avoir autant de terrain qu'elle voulait.Il ne restait plus alors qu' fonder la ville pour laquelle ces
Phniciens taient venus de si loin. C'tait l'acte le plus importantque l'on pt accomplir dans un monde antique domin par la super-stition. Les origines de Rome ou d'Athnes ont, selon les Anciens,continuellement pes sur le destin de ces grandes mtropoles, et le
premier acte dans la fondation d'une ville est toujours considrcomme un prsage.
Les premiers travaux de fondation de la nouvelle coloniemirent au jour une tte de buf, symbole d'une vie de labeur et deservitude que ne souhaitaient ni Elissa ni ses compagnons. Ils creu-srent le sol plus loin et dterrrent une tte de cheval, prsage d'undestin belliqueux et puissant qui correspondait aux vux des fon-
dateurs. Le choix se fixa donc sur ce deuxime emplacement.Cependant Hiarbas, roi autochtone, bloui par l'clatante
beaut et la vive intelligence d'Elissa, voulut l'pouser et dclara auxCarthaginois qu'il leur ferait la guerre si l'illustre princesse lui refu-sait sa main. Prvenue des intentions d'Hiarbas, Elissa se trouva fortembarrasse, partage qu'elle tait entre le dsir de demeurer fidle la mmoire de son premier mari et le souci d'pargner sa jeune
patrie les dures preuves d'une guerre qui pourrait lui tre fatale.Elle dcida nanmoins d'accepter la proposition d'Hiarbas etordonna ses hommes d'entamer les prparatifs de la crmonie demariage. Quand tout fut prt, elle fit dresser un bcher pour effacerpar un dernier sacrifice le souvenir de son ancien mari ; puis, aprsavoir immol de nombreuses victimes, elle monta sur le bcher etse jeta dans le feu aprs avoir dclar qu'elle allait rejoindre son
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poux comme le voulaient ses compatriotes. Ce geste lui valut
d'tre, par la suite, honore comme une divinit.Plus tard, le pote latin Virgile l'associant Ene, en fit unehrone de l'Enide sous le nom de Didon. Ce nom semble d auxLibyens pour les nombreuses prgrinations d'Elissa. Il semblesignifier en langue punique femme virile , voire meurtrire deBal , gnie protecteur du bien , ou celle qui donne .
Virgile situe ainsi son histoire longtemps avant la date tradi-
tionnelle de la fondation de Carthage et ceci, dans le but de rendrepossible la rencontre entre les deux personnages, impliqus dans lafondation des deux villes destines se disputer l'hgmonie dumonde mditerranen.
Lgende et ralit
En tout cas, le premier rcit de la fondation de Carthagesemble s'tre constitu dans un milieu culturel grec ou carthaginoishellnis. Ce rcit, en dpit de son caractre lgendaire, contient uncertain nombre de donnes historiques telles que l'importance duculte vou Melqart Tyr, l'existence d'une aristocratie carthagi-noise originaire de Tyr et la mention du lieu appel Byrsa.
Cependant le recours la ruse de la peau de buf semblereposer sur un jeu de mots : Byrsa , signifiant peau de buf engrec, existait en phnicien mais avait un sens tout fait diffrent(forteresse ?).
De mme, l'pisode de la tte de cheval dterre lors des tra-vaux de fondation et considre comme un bon prsage sembleavoir t invent aprs coup et inspir par la prsence sur les mon-
naies carthaginoises d'une tte de cheval. En tout cas, on peut pen-ser que, malgr la lgende, qui entoure sa fondation, Carthage estdue l'initiative de Phniciens venus de Tyr. Plusieurs facteurs seconjugurent pour les pousser raliser cette fondation : attrait desmtaux prcieux d'Espagne sur des commerants ; pression dmo-graphique Tyr ; pression tyrannique des Assyriens ; avantage du
site...
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Aucun lment ne permet de confirmer qu'Elissa, la sur dePygmalion, ait particip la fondation de Carthage. Cette ville aunom prestigieux (Qart Hadasht signifie capitale nouvelle) connutdes dbuts assez modestes.
Longtemps, tout comme Utique et les autres comptoirs ph-niciens, elle vcut sous la dpendance de Tyr, lui payant des dmeset faisant des offrandes au temple d'Hrakles (Melqart). L'archolo-gie, pour sa part, confirme des liens troits avec l'Orient et l'Egyp-
te (poteries d'Orient et divers bijoux et amulettes d'Egypte).
Mdaillon en terre cuite.Muse de Carthage
Ce mdaillon trouv dans la ncropole punique de Carthage,reprsente un cavalier arm d'une lance et d'un
bouclier. Sont reprsents galement unchien, une fleur de lys ainsi que le disque solaire
et le croissant lunaire.
VI
e
s. av. J.-C.
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CHAPITRE III
Formation de l'empire carthaginoiset conflit avec les Grecs
L'empire carthaginois
Grce sa position avantageuse et l'esprit d'entreprise de sa
puissante aristocratie reprsente par la famille des Magons, Car-thage ne tarda pas se dvelopper.
Favorise par sa position, aurole de ses prestigieuses ori-
gines, servie par des hommes politiques de grande valeur comme
Malchus et les Magonides, Carthage, demeure l'cart des grandscataclysmes qui secourent l'Orient et les cits phniciennes, profi-
ta du dclin de Tyr (qui n'chappa aux Babyloniens que pour
retomber sous la coupe des Perses) et recueillit l'hritage impres-
sionnant de la malheureuse mtropole. Non seulement elle se tailla
un immense empire maritime en Mditerrane occidentale, en
regroupant sous son hgmonie toutes les cits phniciennes d'Oc-cident, chose que Tyr n'a jamais russi raliser en Orient, mais elles'assura l'exclusivit du transit vers l'Orient. En mme temps, elle
amora un mouvement d'expansion appuy par une inlassable
action militaire et diplomatique en vue d'occuper des positions stra-
tgiques un peu partout en Mditerrane occidentale, ce qui tait de
nature favoriser le dveloppement de son commerce.
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36. L'ANTIQUIT
Elle prit pied d'abord en Sicile : en croire Thucydide, l'ins-
tallation des Phniciens dans cette le aurait t antrieure celle desGrecs. Ceux-ci, arrivs plus tard, n'avaient fait que refouler les Ph-
niciens vers l'ouest de l'le o ils auraient conserv simplement une
mince frange ctire. Si l'archologie confirme la prsence des Ph-
niciens ds le VIP s. Moty et dans d'autres endroits de l'ouest de
l'le, aucune trace, par contre, n'a t trouve dans l'est ou dans le
sud-est de la Sicile qui soit de nature prouver que les Phniciens
s'y taient installs avant les Grecs. On est donc oblig de douter de
l'affirmation de Thucydide tant que les fouilles n'auraient pas mis au
jour un niveau phnicien au-dessous du niveau grec.
A la fin du VIe s., Carthage s'installa en Sardaigne. Les dcou-
vertes archologiques le prouvent bien ; et il serait prudent de rete-
nir cette date plutt que celle plus lointaine de 654 avant J.-C. que
nous donne la tradition mais que rien ne confirme.
C'est vers la mme poque, galement, qu'elle s'installe aux
Balares (Ibiza) et au sud-est de l'Espagne. Les Phocens qui avaient
fond Massalia (Marseille) vers 600 avant J.-C. et qui connurent la
plus rapide des ascensions, se prsentaient comme de srieux rivaux
des Carthaginois. Puissants militairement et conomiquement grce
un commerce florissant, ils s'installrent en Corse et tentrentd'essaimer en Mditerrane. Ils se heurtrent Carthage qui stoppa
brutalement leur expansion la suite de la fameuse bataille d'Alalia
(535). Chasss de Corse, ils furent aussi limins d'Espagne et se
confinrent au seul golfe du Lion.
Ainsi, la fin du VIe s. avant J.-C., la puissance carthaginoise
s'tendait sur toutes les colonies phniciennes d'Afrique, depuis laTripolitaine jusqu' l'Atlantique, et avait des points stratgiques en
Sicile, en Sardaigne, en Corse, aux Balares et en Espagne. Sa posi-
tion tait renforce par un trait d'alliance qu'elle avait sign avec les
trusques, une autre puissance de l'poque.
Cependant, dans cette politique d'expansion militaire et co-
nomique, tendant lui assurer l'exclusivit du commerce en Occi-
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38. L'ANTIQUIT
dent, Carthage finit par se trouver face face avec son premier
grand rival mditerranen : les Grecs.
La bataille d'Himre et ses consquences
L'expansion carthaginoise se heurte donc aux Grecs et un
long conflit se dveloppa pendant plusieurs annes avant de dg-nrer en choc sanglant qui mit aux prises les deux puissances enSicile, le jour mme, semble-t-il, o la marine grecque affrontait cel-le des Perses Salamine.
Les Grecs parlrent d'une arme carthaginoise de 300 000hommes, habitus qu'ils taient parler de hordes barbares .Pour la critique moderne, les effectifs carthaginois, composs essen-
tiellement de Libyens, de Corses, d'Ibres et de Sardes et comman-ds par le Magonide Amilcar, ne dpassaient gure 30 000 hommes. en croire les sources grecques cette expdition se solda par unevritable catastrophe militaire, l'arme et la flotte carthaginoisesayant t quasiment ananties par Glon prs d'Himre en 480avant J.-C.
Dans le mme temps, les Grecs triomphaient Salamine et lesdeux vnements furent lis et interprts comme le symbole dutriomphe des lumires sur les forces de la barbarie. Les Grecs,imbus de la supriorit de leur civilisation et griss par l'importan-ce de leurs succs en Occident et en Orient, exagrrent, bienentendu, leur triomphe et eurent l'impression de vivre un momentexaltant. Mais, mme si la dfaite d'Himre n'eut pas sur Carthage
les consquences catastrophiques qu'on s'est plu mettre en relief,elle n'en constitua pas moins un tournant dans son histoire.
La main mise de plus en plus grande des Grecs sur les deuxbassins de la Mditerrane qui eurent tendance se fermer au com-merce punique, entrana des changements affectant un grandnombre de secteurs. La transformation la plus importante sembletre une austrit draconienne qui caractrisa le mode de vie des
Carthaginois cette poque. Les archologues ont t frapps par
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Sarcophage du PrtreMuse de Carthage
Sarcophage statue dit du Prtre trouv dans un caveau de la ncropole punique de Carthage.
Le couvercle, double pente, est sculpt en haut-reliefle personnage reprsente probablement un prtre appartenant l'aristocratie carthaginoise.
Vtu d'une longue tunique sacerdotale, son visage, encadr d'unechevelure et d'une barbe, dgage une expression de srnit
majestueuse. La main gauche, qu 'on ne voit pas sur la photographie,tient une boite encens.
La main droite est leve en signe de bndiction. Ce sarcophageen marbre blanc, trouv en compagnie d'un autre sarcophage (voir p. 84)
reprsentant une prtresse, illustre travers l'art, les changes fructueux queCarthage entretenait avec le monde grec.L'uvre est probablement grecque, mais le destinataire est bien carthaginois.
(Fin du IV' - dbut du IIIe s. av. J.-C.)
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40. L'ANTIQUIT
la pauvret relative des tombes carthaginoises du Ve s. o les objets
imports comme les cramiques corinthiennes ou attiques et autresobjets gyptiens deviennent assez rares.Le got du luxe semble avoir t banni et les riches donnrent
mme l'exemple : des lois somptuaires limitrent le faste des noceset on rglementa les dpenses des funrailles. Mme les bijoux fabri-qus sur place sont rares dans les tombes de cette poque. Cet effortd'austrit n'pargna pas le domaine religieux, et on constate que
monuments et offrandes perdent de leur faste et de leur richesse.D'autre part, son isolement et le tarissement de son commer-
ce posaient Carthage de graves problmes de ravitaillement : ellene recevait plus certaines denres indispensables sa vie. Pour seprocurer tout cela et, en mme temps, rorganiser ses forces etventuellement faire face de probables assauts grecs, Carthage se
mit en devoir de conqurir un arrire-pays qui correspond en grosau territoire tunisien actuel.
Cette conqute se fit au prix de durs combats avec les autoch-tones, mais dota l'aristocratie carthaginoise de vastes domaines agri-coles. Dion Chrysostome, voquant plus tard ce phnomne, parlade transformation des Carthaginois, de Tyriens qu'ils taient, en Africains .
Ces multiples difficults avec les Grecs et l'isolement qui enrsulta poussrent Carthage chercher de nouveaux dbouchs et intensifier son commerce avec les populations primitives dans letemps mme o ses importations de produits grecs ou gyptiens serarfiaient. Elle entendait consacrer les profits tirs de ce nouveaucommerce refaire les bases de sa puissance. En effet, les Cartha-ginois changrent avec les peuples primitifs des objets fabriqus
sans grande valeur contre d'importantes quantits de mtal prcieuxou de l'ivoire. Hrodote nous a dcrit le procd pittoresque que lesCarthaginois utilisaient dans ce commerce fort lucratif : ils descen-dent leurs marchandises et les rangent le long du rivage puis, aprsavoir fait beaucoup de fume, ils remontent sur leurs vaisseaux ; lesautochtones avertis par la fume viennent apprcier la marchandise,
dposent la quantit d'or qui leur parat correspondre la valeur de
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la marchandise propose, puis s'en vont. Si cette quantit d'or parat
satisfaisante aux Carthaginois, ils l'emportent et s'en vont aprsavoir laiss la marchandise aux autochtones, sinon ils attendent de
nouvelles offres. Personne ne touche rien avant l'accord total des
deux parties. La plus grande loyaut semble avoir prsid ce pro-
cd de troc muet qui s'est d'ailleurs prolong sur la cte africaine
jusqu'au XIXe s. L'enjeu tait si considrable que nul n'eut song
tricher.
Les priples de Hannon et de Himilcon
C'est la recherche de tels profits, la fois considrables et
faciles, que Hannon entreprit vers le milieu du Ve s. un fameux
priple dont il a dcrit les tapes et dont les Grecs nous ont conser-v une traduction.
Relation de Hannon, roi des Carthaginois, sur les contres libjques au
del des colonnes d'Hracls, qu'il a ddie dans le temple de Kronos et dont voi-
ci le texte :
1-11 a paru bon aux Carthaginois qu 'Hannon navigut en dehors desColonnes d'Hracls et fondt des villes liby-phniciennes. Il navigua donc,emmenant 60 vaisseaux 50 rames, une multitude d'hommes et de femmes, aunombre d'environ 30 000, des vivres et d'autres objets ncessaires.
2- Aprs avoir pass le long des Colonnes et avoir navigu au del pen-dant deux jours, nous fondmes une premire ville que nous appelmes Thj-
miatrion ; au-dessous d'elle tait une grande plaine.3- Unsuite, nous dirigeant vers l'Occident, nous parvnmes au lieu dit
Soloeis, promontoire libyque couvert d'arbres.
4- A\yant tabli l un sanctuaire de Posidon, nous navigumes dans ladirection du soleil levant pendant une demi-journe aprs laquelle nous arri-vmes une lagune situe non loin de la mer, couverte de roseaux abondants et
levs ; des lphants et d'autres animaux, trs nombreux y paissaient.
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5- Aprs avoir dpass cette lagune et navigu pendant unejourne, nous
fondmes sur la mer des colonies (,nouvelles?) appeles le Mur Carien, Gytt,Ara, Melita et Arambys.6- tant partis de l, nous arrivmes au grandfleuve Lixos qui vient de
la Libye. Sur ses rives, des nomades, les Lixites faisaient patre des troupeaux.Nous restmes quelque temps avec ces gens, dont nous devnmes les amis.
7- Au-dessus d'eux, vivaient des Ethiopiens inhospitaliers, habitant uneterre pleine de btes froces, traverse par des grandes montagnes, d'o sort, dit-
on, le Lixos. On dit aussi qu'autour de ces montagnes vivent des hommes d'unaspectparticulier, les Troglodytes ; les Lixites prtendent qu'ils sontplus rapides la course que des chevaux.
8- Ayant pris des interprtes chez les Lixites, nous longemes le dsert,dans la direction du Midi, pendant un jour. Alors nous trouvmes, dans l'en-
foncement d'un golfe, une petite le, ayant une circonfrence de cinq stades ; nousl'appelmes Cern et nous y laissmes des colons.
D'aprs notre voyage, nous jugemes qu'elle tait situe 1'opposite deCarthage. Car il fallait naviguer autant pour aller de Carthage aux Colonnesque pour aller des Colonnes Cern.
9- De l, passant par un grand fleuve, le Chrts, nous arrivmes unlac qui renfermait trois les plus grandes que Cern. Variant de ces les, nous
fmes un jour de navigation et arrivmes au fond du lac que dominaient de trsgrandes montagnes pleines d'hommes sauvages, vtus de peaux de btes qui, nous
lanant des pierres, nous empchrent de dbarquer.10- De l, nous entrmes dans un autre fleuve, grand et large, rempli de
crocodiles et d'hippopotames. Puis nous rebroussmes chemin et nous retour-nmes Cern.
11- Nous navigumes de l vers le Midi, pendant douze jours, en lon-geant la cte toute entire occupe par des Ethiopiens qui fuyaient notreapproche. Ils parlaient une langue incomprhensible, mme pour les Lixites quitaient avec nous.
12- Le dernier jour nous abordmes des montagnes leves couvertesd'arbres dont les bois taient odorifrants et de diverses couleurs.
13- Ayant contourn ces montagnes pendant deuxjours, nous arrivmesdans un golfe immense, de l'autre cte duquel il y avait une plaine ; l nousvmes, la nuit, des feux s'levant de tous cts par intervalles avec plus ou moins
d'intensit.
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17- A partir de l, nous longemes, pendant trois jours, des flammes, etnous arrivmes au golfe nomm la Corne du Sud. Dans l'enfoncement tait unele, semblable la premire, contenant un lac, l'intrieur duquel, il y avait uneautre le, pleine d'hommes sauvages. Les femmes taient de beaucoup les plusnombreuses. Elles avaient le corps velu et les interprtes les appelaient gorilles.
Nous poursuivmes des mles, sans pouvoir en prendre aucun, car ils taientbons grimpeurs et se dfendaient. Mais nous nous emparmes de trois femmesmordant et gratignant ceux qui les entranaient ; elles ne voulaient pas les
suivre. Nous les tumes et nous enlevmes leur peau que nous apportmes Carthage. Car nous ne navigumes pas plus avant, faute de vivres.
Ce texte a t diversement comment par les nombreuxsavants qui ont eu l'examiner. Il semble acquis qu'il ait t origi-nellement falsifi par Hannon lui-mme qui ne voulait communi-quer aucune donne prcise sur la fameuse route de l'or.
Il n'a probablement publi que ce qui tait de nature flatterl'immense orgueil qu'avaient retir les Carthaginois de cette lointai-ne expdition sans toutefois compromettre l'exclusivit de l'accs une zone prodigieusement enrichissante. Dans ces conditions, denombreuses identifications de lieux demeurent hasardeuses et leschiffres de navires ou de passagers sont fortement sujets caution.
D'autre part, si certains historiens admettent que Hannon par-vint jusqu'au Golfe de Guine en vue du volcan Cameroun, beau-coup tendent limiter dans l'espace la porte de cette expdition.Les prochaines annes pourraient nous apporter de nouvelleslumires concernant ce fameux priple.
A la mme poque, rpondant aux mmes proccupationsconomiques, un autre Carthaginois, Himilcon, a explor la cte
atlantique de l'Europe de l'Ouest la recherche de l'tain et de l'ar-gent. Il semble que ce deuxime priple ait conduit les Carthaginoisjusqu'aux les britanniques.
Ces efforts gigantesques entrepris dans les divers domaines del'conomie carthaginoise et les changements survenus dans la viesociale, religieuse et politique donnrent Carthage un aspect nou-veau et la hissrent au rang de grande puissance mditerranenne.
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14- Aprs avoir fait provision d'eau, nous continumes notre navigationle long de la terre pendant cinq jours, au bout desquels nous arrivmes un
grand golfe que les interprtes nous disent s'appeler la Corne de l'Occident.Dans ce golfe se trouvait une grande le et, dans l'le, une lagune, qui renfermaitune autre le. Y tant descendus, nous ne vmes, le jour, qu'une fort, mais, lanuit, beaucoup de feux nous apparurent et nous entendmes des sons de fltes,un vacarme de cymbales et de tambourins et un trs grand bruit, la peur nous
prit et les devins nous ordonnrent de quitter l'le.
15- Nous partmes donc en hte de ce lieu, et nous longemes une contre
embrase pleine de parfums ; des ruisseaux de flammes sortaient et venaient sejeter dans la mer. Tm. terre tait inaccessible cause de la chaleur.
16- Saisis de crainte, nous nous loignmes rapidement. Pendant quatrejournes de navigation, nous vmes, la nuit, la terre couverte de flammes ; au
milieu tait un feu lev, plus grand que les autres et qui paraissait toucher lesastres. Mais le jour, on reconnaissait que c'tait une trs grande montagne appe-
le le char des dieux.
Priples d'Hannon et d'Himilcon
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CHAPITRE IV
L'apoge de Carthageet le premier conflit avec Rome
Battue par les Grecs, carte de la Mditerrane orientale, Car-thage avait russi rtablir une situation chancelante et, grce la
nouvelle orientation de son empire et de son conomie, elle revint,peu peu, en surface et commena de nouveau faire figure degrande puissance sur l'chiquier de la politique mditerranenne.Exploitant les querelles entre les cits grecques, elle essaya de recon-qurir les positions qu'elle avait perdues en Sicile et parvint contrler une bonne partie de l'le malgr l'hostilit de Denys deSyracuse et de ses successeurs qui tentrent plusieurs reprises demettre un frein son expansion.
L'essor de Carthage
La fin du IVe s. voit Carthage reprendre pied dans le bassin
oriental de la Mditerrane en nouant des relations commercialesintenses avec les nouveaux Etats d'Orient issus de la conquted'Alexandre et, en particulier, avec le royaume des Ptolmes d'E-gypte qui fondait sa nouvelle monnaie sur l'talon phnicien, lemme donc que celui adopt par Carthage o l'apparition des mis-sions montaires proprement carthaginoises n'est gure antrieureau milieu du IVe s. Sa puissance conomique s'en trouva singulire-
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ment renforce. Au cours de la dernire dcennie du IVe s. Cartha-ge connut une brve mais srieuse alerte due un nouveau tyran
syracusian, Agathocle, qu'elle contribua, au dbut, installer solide-ment au pouvoir. Ds qu'il se sentit fort, Agathocle s'empressad'empiter sur le territoire sicilien de Carthage. Au prix d'un grandeffort militaire celle-ci russit refouler Agathocle vers Syracuse etl'y assigea. Mais le tyran syracusain tenta une diversion hardie quisera plus tard reprise par les Romains : trompant le blocus carthagi-nois, il russit, la tte de 14 000 hommes, s'chapper de Syracu-se et dbarqua dans le sud du Cap Bon en 310. Il brla sa flotte vrai-semblablement pour enlever ses soldats tout espoir de retour,
puis, grce ses talents militaires, il parvint se maintenir pendanttrois ans dans le pays o il s'empara de plusieurs cits ; mais n'ayant
pas russi inquiter Carthage, bien en scurit l'abri de ses rem-parts, il vit bientt sa tentative tourner court. Agathocle eut l'intel-
ligence de ne pas s'enfermer trop longtemps dans cette conqutesans issue et prfra traiter avec les Carthaginois aprs avoir regagndiscrtement la Sicile. Carthage put ainsi conserver sa province sici-lienne. L'entreprise d'Agathocle, mme si elle s'tait solde par unchec, avait eu le mrite de relcher quelque peu la pression puniquesur Syracuse sans compter qu'elle constitua un dangereux prcdentque les Romains n'hsitrent pas suivre lors de la premire, puis
de la deuxime guerre punique. Agathocle avait peut-tre l'intentionde reprendre la lutte contre Carthage, mais sa mort en 289 l'emp-cha de raliser ses projets. Les Carthaginois en profitrent pourconsolider leur position d'autant plus que les dissensions entre citsgrecques de Sicile favorisrent leurs interventions et ils s'imposrentsouvent en arbitres de la situation. En 278, ils bloqurent Syracusequi ne fut dlivre que grce l'intervention de Pyrrhus, roi d'pi-re et champion d'un hellnisme occidental en pleine dcadence.
Pyrrhus russit nanmoins reconqurir toutes les posses-sions carthaginoises de Sicile sauf Lilybe. Cependant les citsgrecques commencrent se mfier de Pyrrhus, voyant en lui untyran en puissance, et certaines d'entre elles se rallirent Carthage.Devant cette hostilit dclare, Pyrrhus abandonna en 276 l'le, et
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Monnaie punique
Sur la face est reprsente unette de femme pouvant tre celle de
Cor, desse des moissons. Deuxpis de bl dcorent ses cheveux,
elle est pare d'un collier et deboucles d'oreilles. Au revers sont
reprsents un cheval et un globerayonnant flanqu de deux cobras.
Cette pice est date du milieudu IIIe s. av. J.-C. Elle est en lectrum,
alliage d'or et d'argent dans lesproportions d'un tiers et deux tiers.
Les motifs reproduits sont desemblmes de Carthage.
Collier puniqueMuse de Carthage
Dcouvert dans une tombe deCarthage. Il est constitu de
nombreux lments dematires et de formesdiverses : or et pierres
prcieuses tels que lapis,turquoise, hyacinthe et
perles. Notez en particulierdeux pendentifs l'un circulaire,l'autre rectangulaire. Tousces lments jouent le
rle d'amulettes protectrices.Datable du VIT s. av. J.-C.
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48. L'ANTIQUIT
les Carthaginois purent reprendre leurs positions. Puis profitant nouveau des rivalits, jamais teintes entre les diverses cits
grecques de Sicile, ils ne tardrent pas tendre leur influence dansle reste de l'le. Un effort militaire vigoureux aurait permis aux Car-thaginois l'occupation rapide de l'le bien avant le dbut du IIIe s.Carthage ne le fit pas et, lorsqu'en 269 elle s'installa Messine, ellese trouva face face avec la nouvelle force mditerranenne :Rome.
La premire guerre punique
La cause directe de la guerre qui va se dclencher a t l'appel
lanc Rome par les Mamertins. Ceux-ci, bloqus Messine par le
syracusain Hiron, demandent d'abord du secours aux Puniques qui
accdent leur sollicitation mais pour occuper aussitt la ville ; un
deuxime parti mamertin, mcontent de cette occupation punique,fait appel aux Romains.
Rome avait, cette poque-l, russi imposer son hgmo-
nie toute l'Italie et venait galement de s'installer Rhgion, de
l'autre ct du dtroit.
Beaucoup d'historiens, repensant l'histoire aprs coup, en
conclurent que cette situation mettant deux imprialismes face face, devait fatalement dgnrer en choc qui aboutirait ncessaire-
ment la disparition d'une des deux forces en prsence. C'est une
vue trs sduisante, coup sr, mais qui ne tient pas assez compte
de la complexit de la situation car le dclenchement du conflit avait
quelque chose de paradoxal : les deux puissances qui n'allaient pas
tarder se transformer en forces hostiles, avaient eu jusque-l des
rapports pacifiques et amicaux. La puissance maritime et commer-
ciale de Carthage ne pouvait gner la puissance terrestre et agricole
de Rome. Les deux tats semblaient s'tre engags dans deux voies
parallles sinon complmentaires.
Plusieurs traits dont le premier remonterait 509 avant J.-C.
avaient dj concrtis une volont assez nette de coexistence fon-
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de sur une limitation raisonnable des ambitions et la ncessit delutter contre l'ennemi commun : les Grecs, la veille de la premi-re guerre punique, la dcadence de l'hellnisme occidental suppri-mait certes un facteur important d'entente mais ne rendait nulle-ment le conflit invitable, car un clivage de la Mditerrane en deuxdomaines suffisamment distincts aurait bien pu rsoudre le probl-me. Carthage en tout cas ne pouvait, cette poque, engager unepolitique vritablement imprialiste. C'tait incompatible avec son
rgime politique et son organisation militaire. Tout ceci expliquel'extrme lenteur qui marquera le dbut de la guerre. De mme, Rome on hsita longuement avant de se rsoudre engager les hos-tilits : deux partis, l'un pacifiste, l'autre belliqueux, le premier repr-sent par la puissante famille des Claudii, le second par celle des
Fabii s'affrontrent sur la scne politique. Les snateurs ne parve-
naient pas se mettre d'accord, et l'affaire, d'aprs Polybe, fut por-te devant le peuple qui vota en faveur d'une intervention en Sicile.En fait, conformment des usages tablis, il appartenait au Snatet non au peuple de dcider. Mais mme si le peuple n'a pas dcidseul, en l'occurrence, il a d faire pression sur le Snat pour le pous-ser ratifier l'expdition de Sicile. Les Fabii agitaient devant l'opi-nion populaire la menace d'un imprialisme punique envahissant et
apptaient les foules par l'vocation des trsors fabuleux que dte-naient les cits siciliennes ; enfin, ils avaient russi convaincre lesRomains que la guerre serait rapide et limite. Il faut aussi tenircompte du fait que les grandes familles romaines d'origine campa-nienne taient pour la guerre, car la fermeture du dtroit de Messi-ne par les Puniques aurait t nfaste pour l'industrie et le commer-
ce capouan ; or le consul Appius Claudius Caudex, champion du par-ti de la guerre, tait entirement li l'aristocratie capouane par desintrts et par certaines parents. En 264, il tint garnison Messine.Jusque-l il n'y avait eu aucune dclaration de guerre, mais celle-ciparaissait difficilement vitable, en dpit des hsitations de Cartha-ge qui semblait vouloir viter le conflit et qui ragissait mollementdevant les initiatives romaines.
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C'est ainsi, par exemple, que l'amiral punique Hannon, crai-
gnant d'aggraver la tension entre les deux tats punique et romainet n'ayant pas reu d'instructions prcises de la part de son gouver-nement, vacua Messine. Cette attitude fut juge trop conciliantepar Carthage qui crucifia son amiral puis s'entendit avec Hiron deSyracuse pour bloquer le dtroit et isoler les Romains dans la cita-delle de Messine. Une premire ngociation entre les deux bellig-rants choua et fut suivie par une tentative romaine de forcer le blo-
cus. Les Carthaginois, dcidment trop conciliants et voulant garderpour eux le bon droit, se contentrent de repousser le convoiromain et allrent jusqu' rendre leurs ennemis les navires pris aucours de l'engagement. De nouveau, ils prfrrent la ngociation la guerre et ils eurent beau avertir les Romains qu'en cas de rupture ils ne pourraient mme plus se laver les mains dans la mer, ils ne purent
viter la guerre. Celle-ci dura 23 ans (264-241). Elle peut se diviser,dans ses grandes lignes, en quatre phases assez distinctes.
La premire se situe entre 264 et 260. Peu de faits saillantshormis le passage de Hiron de Syracuse dans le camp romain, cequi eut pour effet d'isoler les Puniques, la prise d'Agrigente par lestroupes romaines, et enfin la dcision que s'imposa le Snat romainde construire une flotte. Jusque-l, les Romains n'avaient eu qu'une
marine tout fait rudimentaire. Grce au concours de nombreuxallis aguerris dans le domaine de la navigation, tels les Syracusains,et une quinqurme punique prise en 264 qui servit de modle, lesRomains purent improviser une flotte de cent quinqurmes etvingt trirmes.
Avec la construction d'une flotte romaine, la guerre entra dans
sa seconde phase et fut rapidement marque par l'important avan-tage pris par les Romains sur leurs adversaires. En effet, la flotteromaine improvise va s'attaquer une des flottes les plus rputesdu monde antique, et, grce un stratagme qui consista pourvoirles navires de grappins et de passerelles de manire pouvoir mon-ter l'abordage des bateaux ennemis, le consul Duilius surprit les
Carthaginois et russit les battre prs de Mylae (Milazzo), en 260.
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Stle punique votive
Muse de Carthage
Cette stle provient du tophetde Carthage.
Dans le fronton, est grav le signedit de Tanit. Dans le premier registre,reprsentation d'une proue denavire anne d'un peron en trident.
Dans le registre infrieur, estgrave la ddicace votive.
de 35 36 m et large de 5 5,50 m, le navire tait manuvr par170 rameurs rpartis sur trois rangs superposs par bord.L'ensemble de l'quipage, rameurs et matelots, atteignait les 200 hommes.C'tait un vritable cuirass, arm d'un peron trilame destin enfoncer la coque des navires adverses. La trirme sera supplante partir du IIIe s. par la quinqurme ou pentre qui sera le navire
de la premire guerre punique. Longue de 37 m, large de 7 m,elle comporte cinq rangs de rameurs superposs et ncessite300 hommes rpartis par deux pour chaque aviron.
Elle embarque aussi 120 soldats. L'abordage du navireadverse tait prfr 1 'peronnage.
La trire (ou trirme) tait le navire de guerrepar excellence du V au III' s. av. J.-C. Long
Restitution d'une galre antique
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52. L'ANTIQUIT
Ce fut une cruelle dsillusion pour les Puniques qui perdirentquarante cinq navires sans que toutefois leur potentiel guerrier soitsrieusement entam. Du ct romain, l'effet moral de la victoirefut considrable mais l'opration a t fort coteuse sur le planfinancier, et les Romains montraient malgr tout une certaine rpu-gnance pour les expditions maritimes. Aussi une certaine accalmiesuccda-t-elle cette premire grande offensive maritime et il fallutattendre l'anne 256 pour voir les Romains mrir puis excuter un
projet de dbarquement en Afrique destin surtout pousser lesCarthaginois relcher leur effort en Sicile en branlant les basesquelque peu fragiles de leur empire africain. Suivant la voie dj tra-ce par Agathocle, les lgions romaines, diriges par Regulus, dbar-qurent prs de Clupea (Klibia). Le Cap Bon fut razzi, les Ber-
bres commencrent se soulever et Carthage connut des difficul-ts de ravitaillement. Mais un officier Spartiate la solde de Cartha-
ge, Xanthippe, rorganisa l'arme punique et parvint presque craser les 15 000 romains dont 2 000 seulement russirent s'chapper. L'expdition d'Afrique dirige par Ikegulus tourna courtet Rome se rsolut concentrer ses efforts en Sicile.
La guerre entra alors dans sa troisime phase qui devait durerde 255 247 et qui fut marque par une nouvelle tactique romainetendant arracher aux Puniques leurs places fortes siciliennes.
Panorme commena par succomber aux Romains qui purent alorsporter leurs efforts sur Lilybe qu'ils bloqurent. Mais, au cours del'anne 249, les Romains allaient subir coup sur coup, une srie dedsastres qui les affaiblirent tant sur le plan matriel que moral.Voulant attaquer la flotte punique Drepane, les Romains subirentun premier dsastre auquel vingt sept navires seulement chapp-rent ; les Puniques s'emparrent quelque temps aprs d'un convoi
de transport romain se dirigeant vers Lilybe. Une tempte fit ensui-te le reste, et la flotte romaine se retrouva en 249 avec vingt naviresseulement. Carthage venait de rtablir une incontestable suprioritsur mer et dtenait une chance exceptionnelle sinon de forcer la vic-toire, du moins d'obtenir une paix avantageuse. Mais pour des rai-sons de politique intrieure, Carthage ne fit pas l'effort qui s'impo-sait, permettant ainsi son ennemi de reconstituer ses forces.
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L'anne 247 inaugura la dernire phase de la premire guerrepunique marque par l'entre en scne d'Amilcar Barca qui menacontre les Romains une habile guerre de harclements, les inqui-tant srieusement plusieurs reprises, mais qui, faute de moyens etde renforts, ne put emporter la dcision. Les oprations tranrenten longueur. Rome russit imposer ses riches un lourd sacrificefinancier qui lui permit d'accrotre ses forces et de porter auxPuniques, puiss par une guerre trop longue, le coup dcisif au lar-
ge des les Aegates en 241. Carthage n'eut plus d'autre alternativeque la paix et Amilcar reut les pleins pouvoirs pour la ngocier.
Au terme de cette guerre, Carthage dut vacuer la Sicile, aban-donner les les Aegates et Lipari, accepter de payer une indemnitde 3 200 talents en trois ans et s'engager ne plus recruter de mer-cenaires en Italie et chez les allis de Rome.
Il est remarquable de noter que Rome n'avait pas cherch ruiner irrmdiablement un rival gnant son imprialisme puis-qu'elle n'exigea pas de Carthage de dtruire ou de livrer sa flotte etqu'elle ne toucha pas son empire, mise part la Sicile que lesRomains voulaient contrler.
Il serait galement intressant d'analyser les causes de l'checcarthaginois dans cette guerre qui tait presque exclusivement mari-
time alors mme que les Puniques passaient pour les matres de lamer.
Beaucoup d'historiens qui se sont penchs sur la question ontattribu la victoire finale des Romains sur les Puniques aux qualitsmorales dont les premiers ont fait preuve ; suivant en cela la tradi-tion ancienne, ils n'ont pas dout de la supriorit d'une arme de
citoyens anime de patriotisme sur une arme de mercenaires dilet-tantes. Mais on peut penser aussi l'attrait du butin et des primesqui constituait un extraordinaire stimulant pour des soldats demtier, des professionnels de la guerre, suprieurement exprimen-ts et ayant au plus haut point le got du risque et de l'aventure. Aucours des oprations et en dpit de leur courage indniable, les sol-dats romains n'ont fait preuve d'aucune qualit guerrire exception-
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54. L'ANTIQUIT
nelle. Xanthippe qui avait du talent et des moyens n'a pas eu beau-
coup de peine tailler en pices l'arme de Regulus. Certes les ami-
raux romains purent remporter quelques victoires sur la flotte
punique en la surprenant par des procds insolites, mais les mmes
amiraux prouvrent leur inexprience des choses de la mer en lais-
sant la tempte dtruire leur flotte trois reprises et, d'une manire
gnrale, la supriorit des cadres carthaginois sur ceux de Rome
parut vidente. En ralit ce qui a caus la perte de Carthage, c'est
en premier lieu un dfaut de coordination flagrant entre l'appareilgouvernemental et le commandement militaire. Si l'on excepte
Amilcar, tous les chefs de l'arme punique semblrent timors et se
cantonnrent souvent dans une attitude dfensive laissant toute
l'initiative des oprations leurs adversaires. Ils taient vraisembla-
blement paralyss par la crainte d'un tribunal extraordinaire qui,
Carthage, jugeait impitoyablement toute dfaillance dans la condui-te de la guerre. C'est ainsi qu'ils ratrent de multiples occasions de
pousser plus loin certains avantages acquis sur le terrain de la lutte
et qu'ils perdirent de prcieux allis comme Hiron de Syracuse.
D'autre part, ces mmes gnraux manqurent de renforts et de
soutiens dans les moments les plus dcisifs ; et les raisons d'une tel-
le faille sont rechercher dans la structure mme du systme poli-tique carthaginois o une caste de nobles dominant la situation s'est
toujours mfie des gnraux vainqueurs et, de ce fait, prestigieux et
susceptibles de tenter de s'appuyer sur les mercenaires pour s'em-
parer du pouvoir. Ce sont donc les contradictions mmes du rgi-
me carthaginois qui expliquent, en grande partie, la carence des
Puniques. Cette longue guerre branla srieusement l'conomie deCarthage. Le commerce fut paralys et les ressources manqurent
quand il fallut payer les mercenaires. Le paiement de ces merce-
naires crait de vritables hmorragies budgtaires occasionnant
Carthage de multiples difficults de trsorerie qui eurent leur poids
dans l'volution de la guerre. Rome, n'ayant pas eu affronter de
tels obstacles, eut beaucoup plus de souffle.
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POQUE CARTHAGINOISE 55
La rvolte des mercenaires et l'entre-deux-guerres
Certaines difficults rapidement entrevues au cours de la guer-re prirent une acuit tout fait dramatique pour Carthage au lende-
main de sa dfaite. Ces difficults vont dgnrer en crise qui, en
mme temps qu'elle rvlera tous les vices de l'tat carthaginois,
branla terriblement les fondements de la puissance punique.
En effet, Carthage qui avait payer les indemnits de guerre
dut, en plus, faire face une situation gnrale pouvantable. Laguerre, en entravant le trafic et le commerce, avait tari les sources
mmes de la prosprit. L'expdition de Regulus avait ravag le plus
riche des territoires puniques, le Cap Bon. La rvolte grondait par-
mi les paysans berbres durement exploits par Carthage qui, de
surcrot, n'avait pas pu payer la solde de ses mercenaires. Ceux-ci au
nombre de 20 000 taient concentrs Lilybe et attendaient lerglement de leurs arrirs. En 241, ils furent ramens en Afrique
en vue d'tre pays puis dmobiliss. Normalement, on aurait d
payer les contingents au fur et mesure de leur arrive puis les
licencier. Mais le trsor de Carthage tant vide, le gouvernement les
concentra tous prs de Sicca (Le Kef) et voulut ngocier avec eux
pour obtenir une rduction de solde ou quelque arrangement qui luiaurait accord un certain rpit. Mais des contestations s'levrent,
accentues par la diversit des origines, des ethnies et des langues.
Cela ne tarda pas dgnrer en mouvement de masses qui prit, de
jour en jour, de plus en plus d'ampleur. Carthage comptait prcis-
ment sur les diversits ethniques qui empchaient les contingents de
s'entendre et sur les cadres subalternes forms d'officiers indignes,
souvent conciliants, pour maintenir la discipline et imposer son
point de vue. Or tous ses calculs s'avrrent faux, et elle ne tarda pas
raliser l'imprudence commise en oprant le rassemblement de
plus de 20 000 hommes qui avaient de srieuses raisons de lui en
vouloir et qui, le cas chant, n'prouveraient aucun scrupule fai-
re valoir leur droit par la force.
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56. L'ANTIQUIT
Le mercenaire qui vit en marge de la socit, est tout naturel-lement port se rvolter contre une autorit qui n'a pas respectles engagements pris son gard. D'autre part l'arme puniq