Le 7 septembre 2012
UNIVERSITE DE PARIS 1 – PANTHEON SORBONNE
INSTITUT DE RECHERCHE ET D’ÉTUDES SUPÉRIEURES DU TOURISME
ANNÉE UNIVERSITAIRE 2011–2012
L’ACCESSIBILITÉ DU PATRIMOINE BÂTI PROTÉGÉAUX PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP
Mémoire professionnel présenté par Laure TABARIES
Sous la direction de Marie BERDUCOU
MASTER 2 Professionnel mention « TOURISME »Spécialité : GESTION DES SITES DU PATRIMOINE CULTUREL ET NATUREL
ET VALORISATION TOURISTIQUE
Membres du Jury : Mme Marie Berducou
Session de Septembre 2012
2IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Remerciements :
Je tiens tout d'abord à remercier toutes les personnes qui m’ont soutenue et aidée, et sans lesquelles
ce mémoire n’aurait pu voir le jour :
Marie Berducou, pour ses conseils avisés et son aide dans mes recherches.
Catherine Coulon-Chevalier, pour m’avoir patiemment expliqué tant de choses sur l’accessibilité.
Annie Coutantic et Sylvie Coch, pour m’avoir ouvert les portes et les coulisses de la Basilique de
Saint-Denis.
Michel Perugien, pour avoir pris le temps de répondre à toutes mes interrogations.
Anne-Sophie Daumont, pour m’avoir si bien accueillie et fourni tant de documents sur le Palais du
Tau lors de l'évènement « Monuments pour Tous ».
Jacqueline Maillé, qui m'a aiguillée dans le choix de ma problématique grâce à ses précieux
conseils.
Serge Santos, pour avoir été si disponible et m'avoir accordé un entretien aussi riche qu'improvisé.
Claude Godard, pour m’avoir reçue et m’avoir fourni tant d’éléments d’explication sur le
fonctionnement du Centre des Monuments Nationaux et sa politique d'accessibilité.
Sandrine Broussaud, Lamya Debira et Gilles Carbone, pour leur aide généreuse et sans faille.
Et enfin mes proches pour leur soutien, et plus particulièrement mon père, pour ses conseils et ses
relectures.
Sommaire :
L’accessibilité du patrimoine bâti protégé
aux personnes en situation de handicap
Remerciements............................................................................................................................3
1. Introduction……………………………………………………………………….5
L’évolution de la définition du handicap………………………………………………5
Les enjeux de l’accessibilité……………………………………………………………8
La loi du 11 février 2005, « loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation
et la citoyenneté des personnes handicapées »..............................................................9
2. Les axes de réflexion………………………………………………………….....13
Le Centre des Monuments Nationaux, sa politique d’accessibilité et son partenariat.15
Le label Tourisme et Handicap……………………………………………………….18
3. La méthodologie employée…………………………………...............................19
Première partie : Les handicaps moteurs………………………………………............22
A. Les contraintes spécifiquement liées à ce type de handicap
1. La définition du handicap moteur et ses conséquences……………………….22
2. Les règles de la protection du patrimoine………………………………...........22
3. Le contexte légal et associatif...............................................................................25
B. Les aménagements physiques mis en place
1. Les aménagements physiques palliant à la situation de handicap
moteur.......27
La Basilique de Saint-Denis....................................................................................27
Le Palais du Tau......................................................................................................30
2. Les mesures de compensation..............................................................................34
Deuxième partie : Les handicaps sensoriels…………..................................................37
A. Le handicap visuel………………………………………………………….................37
1. La définition du handicap visuel et ses conséquences........................................37
2. Le contexte légal et associatif...............................................................................37
3. Les outils de médiation adaptés...........................................................................41
B. Le handicap auditif……………………………………………………………..…......44
1. La définition du handicap auditif et ses conséquences......................................44
2. Le contexte légal et associatif...............................................................................44
3. Les outils de médiation adaptés...........................................................................46
C. Les ateliers et visites spécifiques..................................................................................48
Troisième partie : Les handicaps mentaux et psychiques....................................54
A. Les spécificités de ce type de handicap
1. La définition du handicap mental et du handicap psychique...........................54
2. Le contexte légal et associatif...............................................................................55
B. Les manières de pallier à cette situation de handicap
1. Les installations ....................................................................................................58
2. Les outils de médiation adaptés...........................................................................60
3. Les ateliers et visites spécifiques..........................................................................61
Conclusion : ............................................................................................................................64
Bibliographie............................................................................................................................70
Contacts et entretiens effectués.................................................................................................74
« L’université n’entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émisesdans les mémoires et thèses. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leursauteurs »
5IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
L'ACCESSIBILITÉ DU PATRIMOINE BATI PROTÉGÉ
AUX PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP
1. Introduction
La mise en tourisme d'un site induit, de manière évidente, son accès au public, qui comprend
notamment des personnes atteintes d’un ou plusieurs handicaps. Or, derrière le terme même de
« handicap » se cache une grande diversité de situations.
L’évolution de la définition du handicap:
Ce terme a donc fait l'objet de réflexions menées dans différents pays depuis la fin des
années 1960. Elles ont abouti, en 1980, à la première Classification Internationale des Handicaps1
de l'Organisation Mondiale de la Santé2. Puis, en 2001, l'OMS propose la Classification
Internationale du Fonctionnement du handicap et de la santé3, qui se substitue alors à la CIH et dont
elle est la révision. Enfin, la loi du 11 février 2005 introduit une définition du handicap inspirée de
cette CIF, en mettant surtout l'accent sur la diversité des handicaps à prendre à compte.
Or, l'analyse historique et anthropologique qu’H-J. Stiker4 a effectuée sur le rapport entre les
personnes handicapées et la Société, place le début du mouvement de « réadaptation » dès la fin de
la première guerre mondiale. En effet, tout au long de cette guerre, de nombreux hommes furent
blessés, et restèrent handicapés moteur ou sensoriel, ce qui entraîna une véritable explosion du
nombre de personnes handicapées en France. Pour la première fois dans l'histoire, la Société
réfléchit donc à la façon de réintégrer les infirmes en son sein. Dès lors, l'infirmité de ces derniers
est perçue comme un handicap à compenser. L'entreprise de réadaptation vise donc à réintégrer ces
personnes en essayant de les « normaliser », sans revenir pour autant sur les normes régissant
l'organisation de cette Société.
Puis, l'idée d'« accessibiliser l'environnement bâti » a émergé en France, au milieu des
années 1960, notamment dans le cadre des revendications formulées par de nombreuses
1 CIH.2 OMS.3 CIF.4 Corps infirmes et sociétés, essais d'anthropologie historique, ed. Dunod, coll. Action sociale, Paris, 2005, 264 p.
6IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
associations de personnes handicapées physiques. L'« accessibilisation » renverse alors l'ancien
modèle d'intégration, qui était essentiellement fondé sur la normalisation des individus. Au
contraire, avec l'accessibilité il s'agit d'adapter les différents milieux de vie à l'ensemble de la
population, en prenant en compte leurs particularités. L'avènement de cette accessibilité va
d'ailleurs s'accompagner d'un changement de conception sur les handicaps. Ainsi, P. Minaire5
propose la notion de « handicap de situation », insistant sur le caractère relatif du handicap, qui n'est
alors plus une constante liée à un individu en particulier, mais devient une variable dépendante des
situations et de l'environnement des personnes concernées.
Parallèlement à cela, la loi d'orientation du 30 juin 1975 a institué l'obligation d'accessibilité
pour les bâtiments ouverts au public6, notamment lors de tous travaux d'aménagement au cours
desquels les spécificités des publics handicapés doivent être prises en compte. Dès lors,
l'accessibilité est instituée par la loi. En dépit du caractère laborieux et très imparfait de l'application
de cette loi, l'accessibilité a tout de même sensiblement progressé depuis cette date. Cependant, il
faut admettre que certains obstacles tendent à freiner, ralentir ou même, dans certains cas, remettre
en cause l'extension de cette accessibilité, malgré le fait qu'elle soit clairement revendiquée par les
associations de personnes handicapées, et souhaitée par la plus grande partie des personnes non
concernées directement. D'une manière générale, l'accessibilité a buté, bien entendu sur des
problèmes de financement, mais également sur un certain nombre de problèmes techniques,
notamment au moment de sa mise en application. Seule l'élaboration progressive d'une réelle
« culture de l'accessibilité » permettrait de surmonter ces obstacles.
Malgré ces progrès en matière d’accessibilité, la Classification Internationale des Handicaps
de 19807 que nous avons évoquée plus haut, et qui intervient donc 5 ans après la loi d'orientation du
30 juin 1975, présente encore les personnes handicapées à travers les notions de déficience, ou
d'incapacité8. Ainsi, le handicap, selon cette définition, concerne toutes les personnes qui sont dans
l’incapacité d’assurer par elles-mêmes, même partiellement ce que nécessite une vie sociale
normale, du fait d’une déficience de leurs capacités physiques ou mentales. Il faut dont attendre
5 Proposition d'une nouvelle méthodologie dans l'évaluation du handicap, Médias et handicapés, maison de l'Unesco,25-28 septembre 1978, ADEP Documentation, Paris, 1980.
6 Loi n°75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées, Article 49 : Les aménagementsdes espaces publics en milieu urbains doivent être tels que ces espaces soient accessibles aux personneshandicapées, abrogé par l’ordonnance n°2000-1249 du 21 décembre 2000, Article 4.
7 Genève, World Health Organization, 1980, International Classification of impairments, Disabilities and Handicaps.A manual of classification relating to the consequences of disease.
8 Classification internationale des handicaps, Les conséquences des maladies, définitions, « Handicap ou Désavantagesocial : dans le domaine de la santé, le désavantage social pour un individu donné résulte d’une déficience ou d’uneincapacité qui limite ou interdit l’accomplissement d’un rôle normal (en rapport avec l’âge, le sexe, les facteurssociaux et culturels ».
7IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
2001 pour que la nouvelle classification de l'OMS9, au-delà de la notion de handicap, prenne en
compte la capacité de ces personnes à participer pleinement à la vie sociale, à condition que leur
environnement le leur permette10. Ce sont, dès lors, les facteurs identifiés comme de possibles
obstacles à la vie sociale normale des handicapés, qui sont considérés comme générateurs de
« situations de handicaps ». On retrouve donc, dans cette définition, la fameuse notion apportée par
P. Minaire 40 ans plus tôt. La personne handicapée est considérée comme un acteur à part entière, et
non plus comme un objet de soin.
Enfin, dès le mois de décembre 2000, les principaux ministères concernés par la question de
l'accessibilité, dont le ministère de la Culture et de la Communication, adoptèrent un texte qui
définit cette notion ainsi : « L'accessibilité du cadre bâti, de l'environnement, de la voirie, et des
transports publics ou privés, permet l'usage sans dépendance par toute personne qui, à un moment
ou à un autre, éprouve une gêne du fait d'une incapacité permanente (handicap sensoriel, moteur ou
cognitif, vieillissement...) ou temporaire (grossesse, accident...) ou bien encore de circonstances
extérieures (accompagnement d'enfants en bas âge, poussette...) ». D’ailleurs, aujourd’hui, la notion
d’accessibilité s’efface de plus en plus, pour laisser la place à la notion d’accessibilité universelle.
Celle-ci ne s’applique plus uniquement aux personnes en situation de handicap, mais bien à la
population dans son ensemble. Ainsi, l’Association des Paralysés de France la définit comme
« l’accès à tout pour tous ». C’est donc le propre d’un environnement aménagé de manière à
répondre aux besoins de toute la population en prenant en compte les spécificités de chacun.
En fait, selon la définition adoptée par le comité de suivi du Chantier Accessibilité
Universelle du sommet de Montréal : « Le concept d’accessibilité universelle est avant tout un
concept d’aménagement qui favorise, pour tous les usagers, une utilisation similaire des possibilités
offertes par un bâtiment ou un lieu public. En pratique, l’accessibilité universelle permet d’accéder
à un bâtiment ou à un lieu public, de s’y orienter, de s’y déplacer, d’en utiliser les services offerts à
tous et de pouvoir y vivre les mêmes expériences que tous les autres usagers, et ce en même temps
et de la même manière ». Les personnes en situation de handicap ne sont donc plus les seules au
cœur du concept d’accessibilité universelle, puisque c’est l'ensemble de la population qui est prise
en compte.
9 Genève, World Health Organization, 2001, International classification of functioning, disability and health.10 J. E. Bickenbach, S. Chatterji, E. M. Badley, T.B. Üstün, Models of disablement, universalism and the international
classification of impairments, disabilities and handicaps, Social Science and Medicine, 48, (1999) 1173-1187, traduiten français : « Ceux qui étudient le handicap soutiennent depuis longtemps que ce qu’on appelle “handicap”physique ou mental n’est pas simplement un attribut de la personne mais une collection complète d’états, d’activitéset de relations dont beaucoup sont créés par l’environnement social ».
8IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Les enjeux de l'accessibilité
Il faut donc garder à l'esprit que le handicap peut toucher tout le monde, de manière
définitive comme de manière temporaire. Par conséquent la démarche d'accessibilisation générale
vers laquelle tend de plus en plus notre Société ne se concentre plus uniquement sur les quatre
grands types de handicap traditionnellement cités : les handicaps visuels, auditifs, moteurs et
mentaux. Ainsi, pour A. Dessertine, magistrat devenu le président de l'ALGI11, créée en 1959,
« l'action d'accessibilisation peut profiter à tous, handicapés temporaires, mères de famille,
cardiaques et vieillards ». En effet, une circulaire du ministère de l'Urbanisme et du Logement du 4
octobre 1982 précisait qu'« au-delà du problème des personnes circulant en fauteuil roulant, ces
dispositions visent à améliorer la qualité d'un espace qui a trop longtemps été conçu pour l'homme
adulte idéal et non pour l'ensemble de la population dans toute sa diversité. Ces dispositions
répondent donc, non seulement aux besoins des personnes handicapées moteur, mais aussi à ceux
des personnes âgées, des femmes enceintes, des enfants, des accidentés, des malades aux
symptômes non apparents ». Cette dernière catégorie de handicap est ce que l'on appelle les
handicaps non visibles, souvent résultant de maladies invalidantes, qui surviennent la plupart du
temps avec l'âge, comme les maladies cardio-vasculaires, ou encore les maladies respiratoires.
Or, comme la plupart des grands pays industrialisés, on sait que la France connaît dès
aujourd'hui une évolution démographique sans précédent en terme de vieillissement de sa
population, situation qui devrait encore s'accroître dans les prochaines années. En effet, la part des
personnes âgées de plus de 60 ans est passée de 18% en 1970 à 21% en 2000. De même, de 12,1
millions en 2005, on prévoit qu'elles seront 17 millions en 2020, soit à peu près 27% de la
population. De plus, cette augmentation du nombre de personnes âgées s'accompagne d'un
allongement généralisé de la durée de vie. Or, le nombre de personnes handicapées va continuer de
croître en parallèle au nombre des personnes âgées, puisque que beaucoup d'entre elles sont en
situation de mobilité réduite, ou encore atteintes de difficultés visuelles et auditives, et donc
considérées comme handicapées moteur, ou sensoriel. En France, les pouvoirs publics distinguent
traditionnellement les personnes âgées des personnes handicapées, mais la loi du 11 février 2005
contribue à réduire cette césure. Ainsi, selon l'enquête de l'HID12 de l'Insee13, réalisée entre 1998 et
2001, 13,4% de la population française, soit environ 8 millions de personnes, présentent une
déficience motrice, 11,4% souffrent d'une déficience sensorielle, et 6,6% d'un handicap mental.
11 Association pour le Logement des Grands Infirmes.12 Handicaps-Incapacités-Dépendances.13 Institut National de la Statistique et des Études Économiques.
9IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Le handicap est donc une situation individuelle de difficulté, temporaire ou définitive. Mais
cette difficulté peut être atténuée si la personne concernée évolue dans un environnement favorable
et adapté à son handicap. Cette façon de décrire le handicap montre bien la diversité des moyens qui
peuvent être mis en œuvre pour répondre à cette situation particulière. La question de l'accessibilité
est, dès lors, une composante essentielle de tout équipement culturel soucieux d'offrir un meilleur
confort d'usage à son public, qui profitera des différents aménagements mis en place.
Cependant, de nombreuses difficultés, qu'elles soient d'ordre technique, budgétaire ou
légale, apparaissent lorsqu'il s'agit de faire d'un monument historique protégé un lieu adapté aux
personnes handicapées.
La loi du 11 février 2005, « loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la
citoyenneté des personnes handicapées »
Comme nous l'avons vu précédemment, la loi d'orientation du 30 juin 1975 en faveur des
handicapés avait déjà posé un certain nombre de principes généraux, notamment l'accès à
l'ensemble de la population des institutions ouvertes au public. Mais la loi du 11 février 2005 va
plus loin puisqu'elle est fondée sur le principe de non-discrimination, répondant ainsi à la volonté
des personnes en situation de handicap d'être des citoyens à part entière, et d'avoir, à ce titre, accès à
tous les équipements et services existants, comme tout un chacun.
Dans ce but, la loi de 2005 propose trois grands axes de réforme :
tout d'abord, garantir aux personnes handicapées le libre choix de leur projet de vie, notamment
en fournissant les aides nécessaires à sa mise en œuvre. Elle introduit donc la notion de « droit à
la compensation du handicap ». Cette compensation vise à pallier les désavantages liés au
handicap, afin de rétablir l'égalité entre les citoyens, et favoriser le maintien des personnes
handicapées en milieu ordinaire.
Ensuite, cette loi doit permettre aux personnes atteintes d'un handicap de participer activement
à la vie sociale grâce à l'organisation de la cité autour du principe d'accessibilité généralisée. Ce
principe s'applique à tous les secteurs de la vie sociale : la scolarité, la culture, ou encore
l'emploi. Elle implique donc que la mise en accessibilité des différents espaces publics ou privés
fasse l'objet d'une réflexion globale, menée par l'ensemble des acteurs concernés.
Enfin, elle doit placer la personne handicapée au centre des dispositifs qui la concernent.
10IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Pour cela, cette loi donne une définition bien plus large du handicap que les lois précédentes
puisqu'on peut y lire, dès l'article 2 : « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute
limitation d'activité ou de restriction de participation à la vie en société subie dans son
environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une
ou plusieurs fonctions, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un
trouble de santé invalidant ».
Ainsi, l'accessibilité généralisée estompe le handicap dont il est question, car une personne
est considérée comme étant en situation de handicap uniquement par rapport à son environnement
immédiat. Plus cet environnement sera adapté à ses besoins et moins cette personne sera en
difficulté et donc en situation de handicap. Or, l'accès à la culture est bien évidemment un enjeu
majeur dans cette volonté d'accessibilité générale.
Dans la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des
personnes handicapées, ce sont les articles 41, 42 et 43 qui se concentrent plus spécifiquement sur
l'accessibilité des établissements recevant du public, dont les institutions culturelles font partie.
Ainsi, l'article 41 de cette loi précise que l'article L. 111-7 du Code de la construction et de
l'habitation est désormais remplacé par cinq articles : L. 111-7 à L. 111-7-414. Or, au sein de ces
articles, une distinction entre les établissements neufs et les établissements existants est formulée :
les nouvelles constructions doivent d'office répondre aux critères d'accessibilité fixés par décrets,
tandis que ceux qui existent déjà doivent permettre aux personnes handicapées d'accéder aux
différentes parties du bâtiment ouvertes au public et d'y recevoir l'information correspondante15,
mais cela dans un délai préétabli. Or, le délai fixé pour la mise en accessibilité de ces bâtiments
construits avant 2005, sur lesquels notre travail de recherche se concentrera, varie en fonction du
type d'établissement et de sa catégorie16, mais ne peut excéder les 10 ans. Donc, tous les travaux de
mise aux normes devront être achevés avant le 1er janvier 201517.
Par ailleurs, si d'autres types de travaux sont entrepris sur ces bâtiments avant cette date
14 Extrait de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, Titre IV Accessibilité, Chapitre III Cadre bâti, transport etnouvelles technologies.
15 Code de la construction et de l’habitation, Article L. 111-7-3 : Les établissements existants recevant du publicdoivent être tels que toute personne handicapée puisse y accéder, y circuler et y recevoir les informations qui y sontdiffusées, dans les parties ouvertes au public.
16 Catégorie 1 : ERP recevant plus de 1500 personnes par jour, Catégorie 2 : entre 701 et 1500 personnes, Catégorie 3 :entre 301 et 700 personnes, Catégorie 4 : moins de 300 personnes par jour, Catégorie 5 : petits ERP dont le seuilvarie en fonction de la nature de l’activité.
17 Code de la construction et de l’habitation, Article L. 111-7-3 : Les établissements recevant du public existantsdevront répondre à ces exigences dans un délai, fixé par décret en Conseil d’État, qui pourra varier par type etcatégorie d’établissement, sans excéder 10 ans à partir de la publication de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
11IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
butoir, alors deux cas de figure sont envisagés :
si ces travaux portent exclusivement sur des volumes préexistants, ils doivent au moins
permettre de maintenir les dispositifs d'accessibilité déjà en place. Par conséquent, toute
régression est exclue.
Au contraire, si ces travaux impliquent la construction de nouveaux volumes, ceux-ci devront
respecter les principes d'accessibilité énoncés dans les articles R. 111-19-1 à R. 111-19-418.
La mise en accessibilité des bâtiments neufs, comme des bâtiments préexistants à la loi de
2005, est donc fortement encadrée. Elle doit ainsi répondre à différentes dispositions légales,
auxquelles doivent se conformer les personnes en charge de ces établissements.
De la même manière, la sous-section 4 de la section III du chapitre Ier du titre Ier du livre
Ier du Code de la construction et de l'habitation est remplacée par les articles R. 111-19 à R. 111-19-
619, qui précisent que tous les établissements recevant du public20 doivent être accessibles à
l'ensemble de la population, y compris aux personnes en situation de handicap, et ce quel que soit
leur type de handicap21. Ces personnes doivent donc pouvoir accéder aux bâtiments concernés et
pouvoir y circuler librement, avec la plus grande autonomie possible, et avec un confort d'usage
équivalent à celui d'une personne ordinaire22.
Ces différentes évolutions témoignent donc d'une volonté croissante, de la part de la Société,
18 Code de la construction et de l’habitation, Article R. 111-19-8 : Les travaux de modification ou d’extension réalisésdans les établissements recevant du public et les installations ouvertes au public existants doivent être tels,lorsqu’ils ne s’accompagnent pas d’un changement de destination, que : s’ils sont réalisés à l’intérieur des volumesou surfaces existants, ils permettent au minimum de maintenir les conditions d’accessibilité existantes, et s’ilsentraînent la construction de surfaces ou de volumes nouveaux, les parties de bâtiment ainsi créées respectent lesdispositions prévues aux articles R. 111-19-1 à R. 111-19-4.
19 Extrait du décret n° 2006-555 du 17 mai 2006, relatif à l’accessibilité des établissements recevant du public, desinstallations ouvertes au public et des bâtiments d’habitation et modifiant le Code de la construction et del’habitation.
20 Code de la construction et de l’habitation, Article R. 123-2 : Constituent des établissements recevant du public tousbâtiments, locaux et enceintes dans lesquels des personnes sont admises, soit librement, soit moyennant unerétribution ou une participation quelconque , ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou surinvitation, payante ou non.
21 Code de la construction et de l’habitation, Article R. 111-19-1 : Les établissements recevant du public définis àl’article R. 123-2 et les installations ouvertes au public doivent être accessibles aux personnes handicapées, qu’elque soit leur handicap. L’obligation d’accessibilité porte sur les parties extérieures et intérieures des établissementset installations et concerne les circulations, une partie des places de stationnement automobile, les ascenseurs, leslocaux et les équipements.
22 Code de la construction et de l’habitation, Article R. 111-19-2 : Est considéré comme accessible aux personneshandicapées tout bâtiment ou aménagement, permettant dans des conditions normales de fonctionnement, à despersonnes handicapées, avec la plus grande autonomie possible, de circuler, d’accéder aux locaux et équipements,d’utiliser les équipements, de se repérer, de communiquer et de bénéficier des prestations en vue desquelles cetétablissement ou cette installation a été conçu. Les conditions d’accès des personnes handicapées doivent être lesmêmes que celles des personnes valides, ou à défaut, présenter une qualité d’usage équivalente.
12IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
de mieux prendre en compte les spécificités de chacun. Cependant, elles mettent une forte pression
sur l'ensemble des acteurs du secteur culturel, à qui on demande de concilier l'amélioration générale
de l'accessibilité avec la conservation et la diffusion du patrimoine. Or, c'est là que réside toute la
difficulté de l'exercice, même si on sait que des dérogations pourront être accordées au cas où il
serait impossible de concilier les contraintes évoquées ci-dessus.
Cependant, il faut garder à l'esprit que de telles dérogations devrait rester exceptionnelles
puisque la loi de 2005 prévoit qu’elles ne pourront être accordées qu’après un avis de la
commission consultative départementale de la sécurité et de l’accessibilité allant dans ce sens. Pour
cela différents motifs peuvent être retenus : une impossibilité technique, des contraintes liées à la
préservation du patrimoine architectural, ou encore des disproportions manifestes entre les
améliorations apportées et leur conséquences. Enfin, pour les établissements remplissant une
mission de service public, toute dérogation doit s’accompagner de la mise en place de mesures de
substitution23, qui font souvent appel aux nouvelles technologies.
Mais, le fait de rendre accessible tous les sites historiques et culturels français, en dehors de
répondre à une obligation légale, ou même à une approche éthique de la situation, peut également
être un argument de compétitivité économique. Ainsi, si ces aménagements coûtent cher, ils font de
toutes les personnes atteintes d'un handicap, quel qu'il soit, des visiteurs potentiels du site. Or,
comme nous l'avons vu plus haut, la notion de handicap inclut notamment de très nombreuses
personnes, comme les femmes enceintes, les personnes accidentées, ou encore les personnes âgées,
qui, dans la plupart des sites culturels, s'acquittent toutes d'un droit d'entrée, contrairement aux
personnes possédant une carte d'invalidité, pour qui la gratuité est généralement octroyée.
D'autre part, l'accessibilité s'intègre de manière évidente dans une démarche de
développement durable. En effet, depuis plusieurs années on assiste à une prise de conscience
mondiale, lancée à l'occasion de différents sommets internationaux portants sur l'environnement, et
nationale depuis l'adoption des différentes lois Grenelle en France. Cette dynamique s'applique
également à l'accessibilité, qui fait partie intégrante de ce mouvement. Ainsi, en améliorant d'une
manière générale la qualité de vie des citoyens et la qualité d'usage des équipements publics,
23 Code de la construction et de l’habitation, Article L. 111-7-3 : Ces décrets, pris après avis du Conseil nationalconsultatif des personnes handicapées, précisent les dérogations exceptionnelles qui peuvent être accordées auxétablissements recevant du public après démonstration de l’impossibilité technique de procéder à la mise enaccessibilité ou en raison de contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural ou lorsqu’il y adisproportions manifeste entre les améliorations apportées et les conséquences. Ces dérogations sont accordées aprèsavis conforme de la commission départementale consultative de la protection civile, de la sécurité et del’accessibilité, et elles s’accompagnent obligatoirement de mesures de substitution pour les établissements recevantdu public et remplissant une mission de service public.
13IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
notamment culturels, l'accessibilité participe pleinement aux évolutions liées au développement
durable.
Il est donc évident que l'accessibilisation des monuments historiques fait partie intégrante,
non seulement de ce mouvement, mais également de la mission de service publique qui leur est
confiée, puisqu'elle permet, de fait, une diffusion plus large de la culture. Dès lors, la fréquentation
de l'établissement culturel est alors, non seulement élargie aux personnes handicapées, mais
également à leur entourage familial ou institutionnel.
Par ailleurs, il est indéniable que les efforts de médiation qui sont entrepris dans le but de
rendre une offre culturelle accessible aux personnes atteintes d’un handicap sensoriel ou mental,
peuvent bénéficier un autre type de public, voire à l’ensemble des visiteurs du site. Ainsi, les outils
de médiation spécifiques au handicap mental sont également utilisables en faveur des groupes
scolaires ou des enfants individuels, et les outils de médiation destinés aux handicaps sensoriels
permettent à tous les visiteurs de découvrir le monument à travers une autre approche, tactile ou
olfactive par exemple. De même, les touristes ne maîtrisant pas la langue du pays qu'ils visitent,
seront également à la recherche d'informations simplifiées, notamment à travers la signalétique, ou
des expériences sensorielles.
2. Les axes de réflexion:
La mise en accessibilité d’un site culturel tel qu’un monument historique suppose donc la
mise en place de différents aménagements qu'il faut concilier avec les principes et les règles de
protection du patrimoine architectural, ce qui est la spécificité des monuments historiques classés.
On peut donc se demander dans quelle mesure et par quels moyens l'adaptation aux
différents handicaps existants des parcours de visite proposés au sein des Monuments Historiques,
est-elle possible, de manière à prendre en compte l'ensemble des publics potentiels d'un site ?
Le sujet choisi tend donc à montrer que parmi la multiplicité des solutions existantes
permettant l'accès d'un bâtiment aux personnes handicapées, certaines sont particulièrement
adaptées dans le cadre d'un monument historique, lieu éminemment culturel. En effet, la mise en
accessibilité d'un monument est, par bien des aspects, différente de la mise en accessibilité d'un
musée. Les matériaux, les odeurs ou encore les sons peuvent être exploités pour permettre à des
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publics spécifiques d'appréhender le monument de la manière la plus adaptée à leur type de
handicap. Ainsi, si le problème juridique évident que pose la loi du 11 février 2005, ne peut se
résoudre par des solutions techniques autres que non destructives, des moyens alternatifs existent,
permettant à tous d'avoir un accès à notre patrimoine, sans pour autant dénaturer le bâtiment en
question. La possibilité d'obtenir un dérogation, qui doit rester la dernière solution envisagée, ne
condamne donc pas un site à rester inaccessible aux personnes atteintes d'un handicap.
D'autre part, comme nous l'avons vu précédemment, cette volonté de rendre les équipements
publics accessibles à tous n'est pas nouvelle, et certains sites se sont lancés dans cette démarche
depuis plusieurs années déjà. On constate, d'une manière générale, une amélioration indéniable de
l'accessibilité des sites culturels aux publics à besoins spécifiques. Les démarches de mise en
accessibilité du patrimoine bâti protégé ont donc évoluées et se sont perfectionnées. De plus, que ce
soit l'accessibilité en elle-même ou les mesures de compensation prévues quand les règles de
préservation d'un monument interdisent la mise en place d'aménagements adaptés, font largement
appel aux nouvelles technologies, qui, comme on le sait, deviennent vite obsolètes.
Il parait donc utile de se demander de quelle manière les travaux de mise en accessibilité
effectués au sein de monuments historiques ont évolués ces dernières années ?
Ainsi, pour étudier les différents moyens de rendre accessible un site historique protégé, il
semble intéressant de comparer deux monuments qui ont eu une politique d'accessibilité très active,
mais à quelques années d'écart. C'est pourquoi, dans cette optique, nous étudierons, d'une part, la
Basilique-Cathédrale de Saint-Denis. Celle-ci fut choisie comme site pilote pour le développement
de l'accueil des visiteurs en situation de handicap par le Ministère de la Culture et de la
Communication. En effet, l'équipe de ce monument mena une réelle politique de mise en
accessibilité à partir de 2002, dont le but était d'en faire le premier géré par le Centre des
Monuments Nationaux labellisé Tourisme & Handicap pour les quatre types de handicap.
D'autre part, nous étudierons le Palais du Tau à Reims, dont les travaux de mise en
accessibilité se déroulèrent entre 2009 et 2011, et qui fut au cœur de la manifestation « Monuments
pour tous » organisée par le Centre des Monuments Nationaux cette année. Ce monument devient,
de fait, le premier site géré par le CMN24 complètement accessible pour tous les publics.
24 Centre des Monuments nationaux.
15IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Nous nous demanderons donc, à travers l'étude de ces deux cas pratiques, si des évolutions
apparaissent entre un projet de mise en accessibilité mené, pour la majeure partie, entre 2002 et
2004, et un projet plus récent, réalisé entre 2009 et 2011. Si ces différences existent, quelles sont-
elles ? Sont-elles liées à la configuration du monument et à ses règles de protection particulières, ou
à une évolution plus globale de la réflexion sur la mise en accessibilité des monuments publics ?
Enfin, est-ce que le projet en lui-même, dans sa conception et la manière dont il a été mis en œuvre,
peut avoir une influence sur le résultat obtenu, et dans quelle mesure ?
Le Centre des Monuments Nationaux, sa politique d'accessibilité et son partenariat
Tous les sites précédemment cités, et qui feront l'objet d'une étude approfondie dans le cadre
de ce mémoire sont gérés par le Centre des Monuments Nationaux, établissement public
administratif placé sous la tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication. Il gère près de
100 monuments appartenant à l'État, parmi lesquels les monuments les plus emblématiques du
patrimoine culturel français, et pour lesquels différentes missions lui sont assignées :
la gestion de ces différents sites, qui comprend la conservation, la restauration et l'entretien de
ces monuments,
la mise en valeur de ce patrimoine, qui inclut l'ouverture au public et donc le développement de
l'accessibilité au plus grand nombre,
et une mission de diffusion de la culture, qu'elle remplit à travers l’édition de différents
ouvrages, sous la marque des Éditions du patrimoine.
A l'origine, les différentes Directions Régionales des Affaires Culturelles, assurait la maîtrise
d'ouvrage des travaux de restauration. Pour sa part, le Centre des Monuments Nationaux assurait
cette fonction uniquement pour les travaux d'aménagement nécessaires à l'accueil des publics.
Mais, depuis le 1er juin 2009, l'ensemble des travaux réalisés sur les monuments appartenant à
ce réseau, sont gérés par la Direction de la Maîtrise d'Ouvrage du CMN, ce qui donne à
l'établissement public plus d'autonomie et de liberté. Toutefois, il faut préciser que l’État a
souhaité conserver la maîtrise d’ouvrage concernant les Cathédrales.
L'engagement du CMN, qui a fait de l'accessibilité un axe prioritaire de sa politique
d'établissement, et ce depuis plusieurs années, s'inscrit donc pleinement dans le cadre des
différentes missions de service public qui lui est confiées. En effet, les visiteurs en situation de
handicap sont une catégorie de public spécifique vers laquelle le CMN doit s'ouvrir. Ainsi, dès
16IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
2005, cet établissement a mis en place toute une série de formations sur l'accueil de ces publics,
réalisées notamment par des membres des cinq grandes associations représentatives de personnes en
situation de handicap partenaires du CMN. D'autre part, depuis le 10 mars 2005, le CMN a mis en
ligne un site internet « Accueil pour tous », destiné aux visiteurs en situation de handicap, et les
éditions du patrimoine ont commencé à travailler, à peu près à la même date, à la création de deux
collections adaptées. En tout, le CMN propose des visites et animations accessibles aux personnes
en situation de handicap, ainsi qu'à leur entourage dans près de cinquante monuments de son réseau.
La difficulté particulière à laquelle doit faire face le Centre des Monuments Nationaux
réside dans le fait que cet établissement gère une centaine de monuments très hétérogènes. Par
conséquent, chaque solution apportée est unique et ne peut s'appliquer qu'à un seul site. De plus, le
budget consacré à cette mise en accessibilité est multiplié par le nombre de sites concernés. En règle
générale on compte au minimum 1 million d'euros pour l'ensemble des travaux et aménagements
d'un seul projet de mise en accessibilité complète.
Pour cela, on sait que le Centre des Monuments Nationaux, dans le cadre de son action
« L'accueil pour tous dans les monuments nationaux », a signé un protocole de partenariat avec cinq
grandes associations représentatives des personnes en situation de handicap :
l'Association des Paralysés de France25, dont l'objectif est l'insertion des personnes handicapées
moteur dans un milieu de vie ordinaire,
l'Association Valentin Haüy26, au service des personnes mal et non voyantes,
la Fédération Nationale des Sourds de France27, dont le but est de soutenir les intérêts des
personnes sourdes en France,
le Groupement pour l'Insertion des personnes Handicapées Physique28, qui s'attache à l'insertion
sociale des personnes en situation de handicap physique,
et l'Union Nationale des Associations de Parents d'Enfants Inadaptés29, qui regroupe 750
associations accueillant et accompagnant les personnes déficientes mentales, ainsi que leurs
familles.
Ces associations ont été choisies pour leurs capacités représentatives au sein du territoire
français, le but étant d'avoir des délégations départementales auxquelles les équipes des monuments
25 APF.26 AVH.27 FNSF.28 GIHP.29 UNAPEI.
17IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
pourraient s'adresser directement. Le protocole d'accord de ce partenariat a été signé en 2003, et
renouvelé le 18 octobre 2010 pour trois ans. Ce partenariat porte sur des missions de conseil,
d'information, et de communication en faveur de l'accueil des personnes en situation de handicap,
au sein des monuments nationaux. Ainsi, afin de développer les outils permettant au Centre des
Monuments Nationaux de se conformer aux obligations de la loi du 11 février 2005, ces
associations collaborent à l'élaboration de projets de mise en accessibilité des monuments,
participent à la conception de visites ou de projets d'offres culturelles adaptées, aident à la diffusion
d'informations sur les possibilités offertes par le monuments auprès des publics concernés, et enfin,
favorisent la mise en relation du CMN avec divers partenaires, comme des associations de
proximité. Ces actions sont coordonnées par la Direction du Développement Culturel et des Publics
du CMN, qui assure la mise en œuvre de la politique d'accessibilité en direction des publics
spécifiques. Ainsi, comme nous le précisait Claude Godard lors de notre entretien, le but de ce
partenariat est notamment de permettre aux administrateurs des différents monuments gérés par le
CMN de pouvoir s'appuyer sur ce réseau d'associations partenaires, afin de les rendre plus
autonomes dans la poursuite de leurs projets de mise en accessibilité.
En effet, l'administrateur de chaque site est responsable de son projet d'établissement qui
définit plusieurs axes prioritaires. Cependant, son pouvoir d'action se limite aux aménagements
légers et aux outils de médiation, puisque les travaux sur le cadre bâti sont en principe décidés et
programmés uniquement par le siège. S'il le désire, il peut demander au siège un budget spécifique
pour la mise en place d'un circuit de visite adapté, ainsi qu'un soutient méthodologique afin de
bénéficier de l'expérience acquise lors de la mise en accessibilité d'autres monuments. Mais parfois,
c'est le siège, dans le cadre de ses grands chantiers, qui s'intéresse à un monument en particulier,
comme ce fut le cas récemment pour le Palais du Tau. C'est d'ailleurs ce qui explique en partie
qu'une offre adaptée soit plus développée au sein de certains monuments. Les actions peuvent donc
être soit mises en place par l'administrateur d'un monument qui mènera son projet de manière
autonome ou en collaboration avec le siège, soit lancées directement par le siège.
Ainsi, à travers l'étude de chacun de ces deux cas de figure :
le Palais du Tau dont le projet de mise en accessibilité a été décidé par le siège,
la Basilique de Saint-Denis, dont la politique d'accessibilité a été portée par l'équipe du
monument,
nous verrons de quelle manière et dans quelle mesure ces différents types d'action ont eu une
influence sur la réalisation finale de ces projets.
18IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Remarquons que le siège joue également un rôle de mobilisateur en sensibilisant les
administrateurs de chaque site sur les différentes actions à mener dans cette démarche globale de
mise en accessibilité du parc patrimonial du CMN. Ainsi, c'est le rôle du siège de tenir informer ses
administrateurs sur les enjeux de l'obtention d'un label Tourisme & Handicap et les moyens d'y
parvenir. Cependant, certains sites entreprennent cette démarche d'eux-mêmes car ils sont
directement sollicités par les Comités Départementaux du Tourisme ou les offices de tourisme.
Le label Tourisme & Handicap
Le label Tourisme & Handicap30 est une marque appartenant au Secrétariat d'État en charge
du Tourisme. Créée en 2001 et déposée en 2003 par le ministère chargé du Tourisme dans le cadre
de sa politique d'accès aux vacances pour tous et d'intégration des personnes handicapées, elle
identifie les équipements et les sites touristiques accessibles aux personnes atteintes de handicap
moteur, visuel, auditif ou mental. L'association qui gère ce label est composée de professionnels du
tourisme, d’associations représentantes des personnes en situation de handicap et de différents
organismes de formation. Elle a également pour mission de sensibiliser les professionnels sur
l’accessibilité, à travers des formations, des colloques, ou des publications. Enfin, elle assure les
formations des évaluateurs qui visiteront les sites candidats.
Tout professionnel du tourisme peut demander à être labellisé, pour un ou plusieurs types de
handicap, mais nous nous intéresserons ici exclusivement aux labellisations des sites culturels, et
plus particulièrement des Monuments Historiques. Cette démarche est donc volontaire et gratuite.
Chaque label est attribué pour une durée de 5 ans, période au terme de laquelle il pourra être
renouvelé, après vérification du maintien des critères d’accessibilité et d’accueil.
En effet, le site labellisé signe une charte d’engagement dans laquelle sont définies ses
obligations. En cas de non-respect, le label peut être retiré. Ainsi, chaque site culturel peut librement
demander une évaluation pour la labellisation T&H. Celle-ci sera réalisée par un binôme
d'évaluateurs formés à cette tâche, afin qu'ils puissent apprécier l'accessibilité du site en fonction de
critères nationaux, et ce en remplissant une grille d'évaluation. Par la suite, en se basant sur cette
grille, la commission régionale Tourisme & Handicap émet un avis, le but n'étant pas de labelliser
des situations d'accessibilité parfaite mais bien des prestations offrant le plus d'autonomie possible.
30 T&H.
19IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Enfin, c'est la commission nationale de l'association T&H qui statut définitivement sur l'attribution
ou non du label, de manière à ce qu'une certaine uniformité soit respectée. Dès lors, si un ou
plusieurs labels sont attribués, le prestataire signe une charte d'engagement et l'association propose
la location d'une ou plusieurs plaques signalétiques à apposer sur le site concerné.
Ces évaluations sont donc basées sur la constatation du respect ou non des critères
incontournables définis par T&H. Toutefois, ayant assisté à une de ces évaluations, nous pouvons
dire qu'elles dépendent en grande partie de la subjectivité des évaluateurs. En effet, nous avons eu la
chance d'assister à l'évaluation de la Galerie de Paléontologie et d'Anatomie Comparée du Muséum
National d'Histoire Naturelle, qui se trouve dans un bâtiment classé Monument Historique depuis
1993. A cette occasion nous avons pu constater la difficulté de l'exercice, du fait de l'imprécision de
certains des critères objectifs constituant la grille d'évaluation. De ce fait, l'interprétation subjective
des évaluateurs rentre en compte pour une part non négligeable.
Ceci étant, les personnes en situation de handicap peuvent tout de même s’appuyer sur une
information fiable et normée à l’échelle nationale, même si cette action repose avant tout sur
l’engagement des professionnels du tourisme et leur volonté de s’investir dans cette démarche.
Mais, au-delà de garantir aux visiteurs un accueil adapté à leurs besoins spécifiques, ainsi qu’une
certaine autonomie, le label Tourisme & Handicap fonctionne également comme une
reconnaissance des efforts réalisés par le site en matière d’accessibilité. En effet, l'obtention d'un ou
plusieurs labels constitue la preuve d'un engagement concret. Cette reconnaissance lui permet alors
de se démarquer de la concurrence, qu’elle soit nationale ou internationale, tout en bénéficiant
d’une certaine mise en lumière, à travers la communication que diffuse le Comité Régional du
Tourisme Paris Ile-de-France ou les Comités Départementaux du Tourisme. En effet, ces derniers
valorisent les sites labellisés à travers leurs brochures et leur site internet.
La méthodologie employée
La méthodologie basée sur la comparaison des deux projets précédemment explicités, nous
permettra d'étudier d'une part, la politique d'accessibilité mise en place au sein des deux
monuments, et d'autre part, quelles ont étés les actions et installations qui en ont découlées. Pour
cela, il nous faudra étudier, de manière approfondie :
tout d'abord le contexte dans lequel s'inscrivent ces projets, à travers les obligations légales
énoncées dans l'arrêté ministériel du 1er août 2006, et les préconisations développées par
20IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
l'association Tourisme & Handicap.
Puis, les réalisations effectivement mises en place.
Enfin, les visites et ateliers spécifiquement développés en parallèle au parcours de visite
ordinaire.
Cette étude sera donc une comparaison de ce qui a été réalisé au sein des deux monuments
choisis, et cela pour les quatre grands types de handicap. A cet effet, nous avons contacté Serge
Santos, responsable du public handicapé au sein de la Basilique-Cathédrale de Saint-Denis, Sylvie
Koch, responsable du service pédagogique, Annie Coutantic et Michel Perugien, tous deux
animateurs pédagogiques du patrimoine au sein du même monument. D'autre part, nous avons
également rencontré Anne-Sophie Daumont, responsable du service éducatif et de la
communication du Palais du Tau, ainsi que plusieurs agents d'accueil et de surveillance. Enfin, nous
nous sommes entretenus avec Claude Godard, chargée des publics spécifiques et handicapés au
siège du Centre des Monuments Nationaux.
Les sites étudiés
La Basilique-Cathédrale de Saint-Denis :
Fondée vers 475 sur un ancien mausolée du IVème siècle, cette abbatiale porte le nom du
premier évêque de Paris qui y fut inhumé vers l’an 630. Elle devient nécropole royale vers 638-639,
date de la mort de Dagobert Ier, premier roi des Francs à y reposer, mais elle n’obtiendra
l’exclusivité des inhumations royales que sous les capétiens. Au niveau architectural, l’édifice a
beaucoup évolué à travers les siècles, et c’est durant la seconde moitié du XIIème siècle que l’abbé
Suger, conseiller des rois Louis VI, puis Louis VII, entreprit de rénover et d’agrandir la vieille
église carolingienne. L’abbatiale fut consacrée en 1144, inaugurant du même coup le francigenum
opus, qui sera qualifié plus tard d’art « gothique ». Un siècle plus tard, le monument fut
complètement remanié, pour ne conserver finalement que la façade et la partie basse du chevet de
l’église datant du XIIème siècle. Le bâtiment subit encore diverses transformations, notamment au
cours du XVIIIème siècle. Mais elle fut également l'objet de diverses restaurations durant le XIXème
siècle, dont l'une lui coûta sa tour et sa flèche nord, qui culminait à 86 mètres de hauteur. Enfin,
c’est en 1966 que la basilique accède au rang de cathédrale, lors de la création du diocèse de Saint-
Denis. Cet édifice est classé au titre de Monument Historique depuis 1862.
21IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
La mise en accessibilité de ce monument a été lancée en 2002, de manière à ce qu'elle puisse
être effective en 2004, à l'occasion de l'exposition « Basilique secrète ». Située dans la crypte de
l'édifice, cet événement nécessita la mise en place de différents aménagements afin de la rendre
accessible au plus grand nombre.
Or, quand nous avons pris contact avec Jacqueline Maillé afin de l'entretenir sur les projets
qu'elle avait conduits à la Basilique de Saint-Denis, elle nous a indiqué que cette accessibilité
partielle était devenue, avec le temps, en partie obsolète comparé aux projets mis en œuvre plus
récemment, notamment au Palais du Tau à Reims.
Le Palais du Tau de Reims :
C’est l'ancienne demeure de l’archevêque de Reims, construite entre 1498 et 1509. Elle doit
son nom à son plan, qui prenait au Moyen Age la forme d’un T, lequel se prononce Tau en grec.
C’était également la résidence des rois de France au moment de leur sacre, qui avait lieu au sein de
la cathédrale de Reims, et cela dès le début du IXème siècle. Le palais fut également largement
remanié et modifié au cours des siècles, notamment après l’incendie qui le frappa en septembre
1914. Ce monument, abritant la statuaire déposée de la cathédrale, plusieurs tapisseries, ainsi que
certains objets précieux qui servaient pendant les sacres, est géré depuis 1972 par le Centre des
Monuments Nationaux. D'autre part, il est classé Monument Historique depuis 1886 et inscrit sur la
liste du patrimoine mondial de l’UNESCO31 depuis 1991.
Le projet de mise en accessibilité complète a été lancé à l'initiative du siège du Centre des
Monuments Nationaux en 2006, avec la réalisation d’une étude préalable par l'architecte en chef des
monuments historiques en charge du Palais archiépiscopal. Les travaux préconisés ont été réalisés
entre 2009 et 2011, soit cinq ans après les travaux menés à la Basilique de Saint-Denis. Ce
programme complet de mise en accessibilité a donc fait de ce monument une référence en matière
de lutte contre l'exclusion des personnes en situation de handicap.
31 Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture.
22IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Première partie : Les handicaps moteur
A. Les contraintes spécifiquement liées à ce type de handicap
1. La définition du handicap moteur et ses conséquences
C'est souvent le type de handicap qui paraît le plus évident et auquel on pense
instantanément quand on parle d'accessibilité, mais il est trop souvent réduit, dans l'imaginaire
collectif, à une personne se déplaçant en fauteuil roulant.
En fait, les personnes en situation de handicap moteur peuvent se déplacer en fauteuil
roulant, avec un déambulateur, une canne, des béquilles ou être simplement mal marchantes. En
effet, ce type de handicap consiste en des troubles de la motricité, qui signifient une atteinte
partielle ou totale de la mobilité, entrainant une limitation de déplacement.
De plus, comme nous l'avons vu précédemment, les équipements adaptés à ce type de
handicap peuvent servir aussi bien aux personnes qui en sont atteintes de manière permanente
comme temporaire, qu'aux visiteurs se trouvant dans une autre situation de difficulté, telles que les
personnes à grande fatigabilité, ou encore les adultes se déplaçant avec une poussette par exemple.
Or, pour la mise en accessibilité d’un monument aux personnes à mobilité réduite, il existe des
contraintes propres à la législation française, et plus particulièrement à son droit du patrimoine.
2. Les règles de la protection du patrimoine
En effet, en l'espace de deux siècles, l'État Français s'est doté d'un arsenal juridique
complexe destiné à sauvegarder son patrimoine. Progressivement, la notion de patrimoine n'a cessé
de s'étendre pour toucher de nouveaux espaces. C'est la loi du 31 décembre 1913 qui fixe, encore
aujourd'hui, les principes fondamentaux de la protection des monuments historiques.
23IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
La protection au titre des monuments historiques classés:
Le classement est réservé aux « immeubles dont la conservation présente du point de vue de
l'histoire ou de l'histoire de l'art, un intérêt public »32. Cette définition est suffisamment extensive
pour permettre de protéger tout immeuble, que ce soit en raison de son intérêt pour l'histoire,
l'histoire de l'art ou l'architecture. Sont aussi susceptibles de protection les immeubles
monumentaux tels que les églises ou les châteaux, mais également les éléments significatifs du
patrimoine industriel, dont on mesure de plus en plus l'intérêt.
Le régime des monuments classés a donc, pour l'essentiel, été fixé dès 1913, même si
certaines précisions ont été apportées au fil du temps, et ces effets perdurent tant que l'immeuble n'a
pas été déclassé. La conséquence essentielle de ce classement est de soumettre à autorisation
préalable toutes les opérations ayant des incidences sur la conservation de l'immeuble en question.
Ainsi, on peut lire dans l'article 9 de la loi du 31 décembre 1913 qu'un monument classé ne peut
« être détruit ou déplacé, même en partie, ni être l'objet d'un travail de restauration, de réparation ou
de modification quelconque, si l'autorité compétente n'y a donné son consentement ». La liste de ces
travaux est fixée de façon très précise et a été étendue par l'article 10 du décret de 192433. Seuls les
simples travaux d'entretien ou de nettoyage, qui n'ont aucune incidence sur le monument, échappent
à cette obligation. L'autorisation est donnée par le Préfet de Région, après consultation de
l'Architecte en Chef des Monuments Historiques et du Conservateur du Patrimoine, spécialisé dans
les Monuments Historiques. A défaut de réponse dans un délai de quatre mois, le projet est
automatiquement considéré comme rejeté. L'administration est donc chargée d'autoriser les travaux
à effectuer, ce qui la conduit logiquement à contrôler l'exécution de ces travaux et à poursuivre les
éventuelles infractions commises.
Les bâtiments qualifiés de « Monuments historiques » sont donc, en France, des monuments
protégés du fait de leur intérêt historique, artistique ou architectural. Ils reçoivent à ce titre un statut
juridique spécifique, destiné à les protéger. Cependant, la loi du 11 février 200534, précise que
l'ensemble des établissements recevant du public, ce qui comprend notamment les bâtiments
protégés, doivent, d'ici janvier 2011, avoir réalisé un diagnostic global de leur accessibilité, et d'ici
32 Article 1 de la loi du 31 décembre 1913, modifié par la loi 62-824 du 21 juillet 1962, puis la loi 200-1208 du 13décembre 2000, abrogé par l'ordonnance 2004-178 du 20 février 2004: Les immeubles dont la conservationprésente, au point de vue de l'histoire ou de l'art, un intérêt public, sont classés comme monuments historiques entotalité ou en partie par les soins du ministre chargé des affaires culturelles.
33 Article 10, nouveau, du décret de 1924 : le propriétaire du monument ou la personne habilitée doit décrire et justifierles travaux projetés, communiquer le projet architectural ou l'avant-projet définitif, en fournissant un rapport deprésentation détaillé, ainsi que l'ensemble des documents graphiques et photographiques nécessaires.
34 Loi n° 2005-102 du 11 février 2005, pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté despersonnes handicapées.
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2015, être en mesure d'accueillir toutes les personnes souhaitant les visiter, notamment les
personnes handicapées. De plus, si l’obligation de prendre en compte les différents dispositifs
relatifs à l’accessibilité d’un site dans tous les types de travaux entrepris, qu’ils soient
d’aménagement ou d’agrandissement, existe depuis la loi d’orientation de 197535 , elle fut renforcée
par celle de 2005. Ainsi, pour tous les travaux qui ont débuté après la promulgation de cette loi, et
qui sont soumis à l’obtention d’un permis de construire, le maître d’ouvrage doit fournir une
attestation de la prise en compte des règles d’accessibilité, établie soit par un contrôleur technique,
soit par un architecte autre que celui du maître d’ouvrage36.
La question de l'accessibilité des personnes handicapées se pose donc d'une manière
particulière en ce qui concerne le patrimoine bâti protégé. Cela pose donc d'emblée un problème en
ce qui concerne les handicapés moteur, qui nécessitent des aménagements spécifiques, trop souvent
en contradiction avec la protection et la conservation des Monuments Historiques.
Selon Florent Orsoni37, qui travaille depuis plusieurs années sur les problèmes posés par la
mise en accessibilité du patrimoine bâti protégé, la plus grande difficulté liée à ce sujet, reste les
trop nombreuses dérogations accordées au nom de la conservation du patrimoine, dans le but de
pallier aux incompatibilités techniques existantes. Ainsi, si la loi de 2005 prévoit l'octroi de
dérogations dans le cas d'une réelle impossibilité d'application, cette solution doit rester
exceptionnelle. Cette loi aurait pu d'emblée exempter les bâtiments protégés au titre de Monument
Historique, si les législateurs avaient estimé qu'elle entrerait systématiquement en conflit avec le
droit du patrimoine. Mais des solutions existent, et permettent d'assurer la mise en accessibilité de
certains établissements, tout en respectant les principes de protection du patrimoine monumental,
comme par exemple le principe de « réversibilité », permettant aux éléments ajoutés ultérieurement
à la construction d'un bâtiment, d'être enlevés sans laisser de traces.
C'est pourquoi, si avant la loi de 2005, les monuments protégés bénéficiaient de fait d'une
dérogation dans le cadre de la préservation de leur cadre bâti, depuis 2005 il faut prouver que la
dérogation est nécessaire en raison d'une incompatibilité entre cette loi et la protection du
patrimoine monumental en question. Pour cela, il faut commander une étude de faisabilité à
35 Loi n° 75-534 du 30 juin 1975, d’orientation en faveur des personnes handicapées.36 Code de la construction et de l’habitation, Article L. 111-7-4 : Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans
lesquelles, à l’issue de l’achèvement des travaux prévus aux articles L. 111-7-1, L. 111-7-2 et L. 111-7-3 et soumis àpermis de construire, le maître d’ouvrage doit fournir à l’autorité qui a délivré ce permis un document attestant de laprise en compte des règles concernant l’accessibilité. Cette attestation est établie par un contrôleur technique visé àl’article L. 111-23 ou par une personne physique ou morale satisfaisant à des critères de compétence etd’indépendance déterminés par ce même décret.
37 Salon du Patrimoine 2010, Conférence sur l'accessibilité du patrimoine bâti protégé.
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l'architecte en chef des Monuments Historiques chargé du bâtiment, qui démontrera que la
dérogation est indispensable. Mais, toute attribution de dérogation reste subordonnée à la mise en
place de mesures de substitution accessibles au public en situation de handicap.
3. Le contexte légal et associatif
Ainsi, si le droit du patrimoine prévoit de nombreuses mesures et règles pour protéger le
patrimoine bâti, d’autres règles imposent des mesures très précises afin que chaque bâtiment puisse
être accessible par n’importe quelle personne en situation de handicap moteur. En effet, ce sont les
arrêtés ministériels qui fixent de manière très précise les obligations auxquelles doit se soumettre
chaque établissement recevant du public, et ce avant le 1er janvier 201538.
Ainsi, l'article 2 de l'arrêté du 1er août 2006, fixant les dispositions nécessaires à la mise en
accessibilité des établissements recevant du public, stipule que le cheminement extérieur comme le
cheminement intérieur de ces bâtiments doivent être plats et sans reliefs, et que lorsqu'une
dénivellation ne peut être évitée une rampe doit être mise en place. Dans ce cas, le degré du niveau
d’inclinaison de cette rampe est précisé, de manière à ce que les personnes atteintes d’un handicap
moteur puisse la franchir sans difficulté39. De la même manière, la largeur ainsi que la nature du
cheminement accessible sont décrites de manière précise40. Cet arrêté ne laisse donc rien au hasard
38 Code de la construction et de l’habitation, Article R. 111-19-3 : Le ministre chargé de la construction, le ministrechargé des personnes handicapées et, le cas échéant, le ou les ministres intéressés fixent, par arrêté, les obligationsparticulières auxquelles doivent satisfaire, dans le but d’assurer leur accessibilité, les établissements et installationsrecevant du public assis, les établissements disposant de locaux d’hébergements ouverts au public, lesétablissements et installations comportant des douches, des cabines d’essayage, d’habillage ou de déshabillage et lesétablissements et installations comportant des caisses de paiement disposées en batterie. Article R. 111-19-4 : Desarrêtés du ministre chargé de la construction et, selon le cas du ministre chargé des sports ou du ministre chargé de laculture définissent, si nécessaire, les caractéristiques supplémentaires applicables aux établissements recevant dupublic ou installations ouvertes au public suivant : les enceintes sportives et les établissements de plein air, ou lesétablissements conçus en vue d’offrir au public une prestation visuelle ou sonore.
39 Arrêté du 1er août 2006 fixant les dispositions prises pour l’application des articles R. 111-19 à R. 111-19-3 et R.111-19-6 du code de la construction et de l’habitation relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées desétablissements recevant du public et des installations ouvertes au public lors de leur construction ou de leur création,Article 2 : Le cheminement accessible doit être horizontal et sans ressaut. Lorsqu’une dénivellation ne peut êtreévitée, un plan incliné de pente inférieure ou égale à 5%doit être aménagée afin de la franchir. Les valeurs de pentesuivantes sont tolérée exceptionnellement : jusqu’à 8% sur une longueur inférieure ou égale à 2 mètres, jusqu’à 10%sur une longueur inférieure ou égale à 0,50 mètres.
40 Arrêté du 1er août 2006 fixant les dispositions prises pour l’application des articles R. 111-19 à R. 111-19-3 et R.111-19-6 du code de la construction et de l’habitation relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées desétablissements recevant du public et des installations ouvertes au public lors de leur construction ou de leur création,Article 2 : La largeur minimale du cheminement accessible doit être de 1,40 m libre de tout obstacle afin de faciliterles croisements. Lorsqu'un rétrécissement ponctuel ne peut être évité, la largeur minimale du cheminement peut, surune faible longueur, être comprise entre 1,20 m et 1,40 m, de manière à conserver une possibilité de croisemententre un piéton et une personne en fauteuil roulant. Le sol ou le revêtement de sol du cheminement accessible doitêtre non meuble, non glissant, on réfléchissant et sans obstacle à la roue.
26IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
puisque tout y est explicité au centimètre près, dans une volonté des ministères concernés de créer
des normes précises à respecter. Les critères incontournables du label Tourisme & Handicap
reprennent certaines de ces normes et les intègrent à leurs exigences en matière d'accessibilité. On
peut donc y lire par exemple : « Les cheminements extérieurs et intérieurs doivent être en
revêtements durs et plats (ou compensés par des plans inclinés de faible déclivité) non glissants et
sans obstacle ».
Toutefois, aucune largeur minimum de ces cheminements n'est imposée dans les critères
incontournables, et la seule disposition qui limite la taille des entrées fixe la largeur de leur passage
utile à 77 cm, tandis que la loi impose des portes de 140 cm minimum si elles desservent des zones
pouvant accueillir plus de 100 personnes, soit le double. Ainsi, on constate en ce qui concerne le
handicap moteur, que les critères incontournables du label Tourisme & Handicap sont moins
exigeants que l'arrêté ministériel qui définit les obligations des établissements recevant du public
puisque les règles légales prévoient que chaque porte soit assez large pour laisser passer de front
une personne en fauteuil et un visiteur mobile, alors que la labellisation ne prévoit qu'une ouverture
assez grande pour laisser passer un visiteur en fauteuil roulant.
De la même manière, les guichets d'accueil sont règlementés par l'arrêté du 1er août 2006,
puisqu'il y est précisé qu'ils doivent être accessibles aussi bien par un personne en position assise
que par une personne debout. La hauteur de cette borne d'accueil ne doit donc pas excéder 0,80 cm.
Or, aucune précision de ce type n'est indiquée dans les critères incontournables à une labellisation.
On peut donc supposer que les critères incontournables ne précisent pas certaines
dispositions, tel que le pourcentage de la pente des plans inclinés par exemple, car ils s'alignent sur
ceux exprimés dans l'arrêté ministériel. Ainsi l'association partirai du principe qu'en théorie, tous les
établissements recevant du public devront, d'ici l'année 2015, respecter les dispositions légales, et
donc pouvoir obtenir le label Tourisme & Handicap concernant le handicap moteur. Toutefois, les
personnes chargées de l'évaluation d'un site en vue de l'attribution d'un ou plusieurs labels sont
formées très succinctement par l'association en question. Il est donc plus que probable qu'ils ne
connaissent pas toutes les dispositions prévues par la loi et détaillées au sein de l'arrêté ministériel
étudié. On peut donc en conclure que si les dispositions qui n'ont pas été réaffirmées dans les
critères incontournables n'apparaissent pas dans la grille d'évaluation, ils ne seront pas pris en
compte. Or, cette grille étant confidentielle puisque les sites touristiques ne peuvent y avoir accès, il
nous sera impossible de savoir si elles sont bien prises en compte pour l'obtention de ce label.
27IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
B. Les applications physiques mises en place:
1. Les aménagements physiques palliant à la situation de handicap moteur
Après avoir fait un point sur les dispositifs imposés par la loi ou requis pour une
labellisation Tourisme & Handicap, voyons de quelle manière elles sont appliquées concrètement.
Dans la pratique, la mise en accessibilité d'un monument historique peut s'avérer problématique. En
effet, du fait même des règles de protection que nous avons succinctement décrites plus haut,
certaines dispositions ne peuvent être réalisées. Par exemple, certains passages des cheminements
ne peuvent, à l'intérieur d'un monument classé, tout simplement pas être agrandis jusqu'à atteindre
1,40 m de largeur. De la même manière, les inclinaisons des pentes ne peuvent pas toujours être
respectées, faute de place.
La Basilique-Cathédrale de Saint-Denis :
La Basilique-Cathédrale de Saint-Denis n'a jamais obtenu le label T&H pour le handicap
moteur. En effet, différentes rampes installées à l'intérieur de ce monument ne sont pas aux normes
légales, puisqu’elles sont bien trop abruptes. De plus, le parcours réservé aux visiteurs en situation
de handicap moteur ne permet aucune autonomie. On sait également que le guichet d'accueil et de
vente n'est pas accessible pour une personne en fauteuil. Cependant, on constate que la plaque
certifiant que le site est accessible pour les visiteurs en situation de handicap moteur est tout de
même affichée au guichet d'accueil de la Basilique41, tandis que celle pour le handicap visuel, que le
site a normalement obtenu n'y figure pas. Est-ce une confusion, ou un parti pris par les responsables
du monument, contre l'avis de l'association Tourisme & Handicap ?
Quoi qu'il en soit, l'équipe travaillant au sein de cet établissement a donc préféré, faute de
pouvoir installer une rampe correspondant aux exigences légales, mettre en place ces pentes, certes
quelque peu difficile à franchir, mais qui permettent toutefois à une personne en fauteuil roulant
d'accéder aux différentes parties du monument. Finalement, seul le chœur reste complètement
inaccessible aux visiteurs en situation de lourd handicap moteur. Mais, si une personne se déplaçant
en fauteuil roulant peu accéder au reste du monument, c'est-à-dire la nef, le transept et la crypte,
41 Cf. annexe A, photo 1.
28IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
tous ces espaces ne sont pas pour autant considérés comme accessibles, ni au sens de la loi, ni au
sens du label Tourisme & Handicap.
En effet, après avoir franchi les rampes qui ne respectent pas les normes de l'accessibilité,
l'une à l'entrée de la Basilique42, et l'autre à l'intérieur du bâtiment43, une rampe répondant aux
exigences de l'arrêté du 1er août 200644 permet aux visiteurs d'arriver au point d'accueil et de vente.
On note que l'installation de cette pente douce correspond au principe de réversibilité, qui garantit,
lorsque des travaux sont menés au sein d'un monument historique, que les aménagements effectués
pourront être démontés sans laisser de trace sur la structure architecturale protégée.
Puis, une fois arrivé devant le guichet d'accueil, qui est lui-même situé bien trop haut pour
une personne assise45, les visiteurs en fauteuil devront revenir sur leurs pas afin qu'un agent
d'accueil ouvre les grilles leur permettant d'accéder à la partie du transept où se trouvent plusieurs
tombeaux parmi lesquels certains des plus prestigieux. Il est donc évident que le circuit destiné aux
visiteurs mobiles est beaucoup plus cohérent et continu que celui imposé aux visiteurs en fauteuil.
Parallèlement à cela, pour accéder à la crypte, un visiteur à mobilité réduite devra se faire
accompagner pour longer le chevet de l'église, parcours semé d'obstacles puisqu'il lui faudra, non
seulement franchir plusieurs petites passerelles bombées46, installées au-dessus des creux
d'écoulement des eaux, mais également différentes parties du sol où certains pavés se décèlent de
l'ensemble47. Enfin, il arrivera en face du vitrail derrière lequel l'attend l'élévateur48 lui permettant
d'atteindre le niveau de la crypte. En effet, ces derniers, pour visiter la partie du transept où se
trouvent plusieurs tombeaux parmi lesquels certains des plus prestigieux, devront aller jusqu'au
guichet d'accueil, où un billet d'entrée leur sera délivré, avant de revenir sur leurs pas pour qu'un
agent leur ouvre les grilles, leur permettant ainsi d'accéder à l'espace désiré49.
Malgré le résultat imparfait de ce projet, on sait que l'équipe du monument, sous la direction
de l'administratrice de l'époque, Jacqueline Maillé, s'est donné beaucoup de mal pour que cette
installation soit réalisée. En effet, il a été difficile de faire accepter par l’architecte des Bâtiments de
France en charge du monument la mise en place de cet élévateur, cette installation étant considérée
par ce dernier comme un élément dénaturant l’esthétique du monument. Finalement, après plusieurs
42 Cf. annexe A, photo 2.43 Cf. annexe A, photo 3.44 Cf. annexe A, photo 4.45 Cf. annexe A, photo 5.46 Cf. annexe A, photo 6.47 Cf. annexe A, photo 7.48 Cf. annexe A, photo 8.49 Cf. annexe A, photo 9.
29IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
refus, et devant l’insistance de l’équipe, il a été décidé que cet élévateur serait construit mais
uniquement à titre provisoire, pour l’évènement « Basilique secrète ». Cette exposition, qui s’est
tenue dans la crypte du 22 octobre 2004 au 15 mai 2005, présentait les très nombreux trésors
trouvés au cours des fouilles archéologiques de la Basilique et de ses abords. C'était un évènement
d’autant plus important qu'elle était la première exposition patrimoniale organisée dans le
monument. Or, par la suite, au moment où l’élévateur aurait dû être démonté, cette installation avait
déjà été largement médiatisée, et la Basilique Saint-Denis avait été choisie comme « site pilote »
pour l’accueil des visiteurs en situation de handicap par le Ministère de la Culture et de la
Communication. L’élévateur a donc été maintenu, contre l’avis de l’architecte des Bâtiments de
France, et fonctionne encore aujourd’hui, même si l’on commence à voir les limites d’une telle
installation.
Non seulement une personne en situation de handicap moteur ne pourra pas visiter la
Basilique Saint-Denis de manière autonome puisqu'elle aura impérativement besoin qu'une
personne de l'équipe d'accueil l'accompagne pour lui ouvrir les portes donnant sur la petite cour à
l'arrière de l'église, mais le parcours alors emprunté n'est pas sécurisé. Or, on peut lire sur le site
internet du Centre des Monuments Nationaux, dans la rubrique « confort de visite » de la Basilique
Saint-Denis que « la majeure partie de son circuit de visite peut être fait en totale autonomie »50.
De plus, Michel Pérugien, responsable de l'équipe d'accueil et de surveillance, a estimé que
l'on mettait en moyenne 7 minutes pour faire descendre ou monter une personne en fauteuil roulant
par l'élévateur. Ainsi, en pratique, si deux personnes atteintes d'un handicap moteur lourd souhaitent
participer à une visite du monument au sein d'un groupe de visiteurs mobiles, ce qui arrive très
fréquemment, il faut faire patienter ce groupe un quart d'heure avant de continuer la visite dans la
crypte. Il est donc préférable, en règle générale, d'isoler les personnes invalides et de leur réserver
une visite spécifique. Cela qui va toutefois à l'encontre des principes d'égalité énoncés dans la loi de
2005, puisque ce traitement particulier stigmatise les personnes qui ne peuvent, du fait d'un
environnement inadaptée, participer comme tout un chacun à une visite ordinaire.
Pour autant, ce parcours, avec tous les problèmes qu'il soulève, notamment éthique puisque
le monument ne peut accueillir tous ses visiteurs dans les mêmes conditions d'égalité, et encore
moins en offrant à tous un confort d'usage équivalent, permet de manière pratique à certains
visiteurs de visiter une partie de la Basilique qu'ils n'auraient jamais pu découvrir sans. Dans
50 http://handicap.monuments-nationaux.fr/fr/Visiteurs_a_mobilite_reduite/basilique-de-saint-denis/presentation-generale/
30IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
l'ensemble, les visiteurs se déplaçant en fauteuil roulant se déclarent largement satisfaits des
aménagements qui leur permettent d'accéder à cette crypte. Par ailleurs, ils estiment qu'au Château
de Versailles, qui est pourtant labellisé pour les quatre types de handicap, le fait de se déplacer sur
des graviers au sein des jardins est plus pénible que de traverser les quelques passerelles présentes à
Saint-Denis. D’ailleurs, on constate que la Basilique accueil très régulièrement des visiteurs en
situation de handicap moteur, et notamment en fauteuil roulant.
Il faut également préciser que des espaces de repos ont été prévus pour les visiteurs à grande
fatigabilité, dans la nef de l'édifice, mais également à l'intérieur de la salle d'interprétation. D'autre
part, tous les cartels explicatifs sur le monument ont été installés de manière à ce qu’une personne
en position assise puisse les lire51.
On peut donc considérer que la Basilique-Cathédrale de Saint-Denis est accessible aux
personnes en situation de handicap, mais à certaines conditions, puisque le visiteur reste dépendant
d'un agent d'accueil. De plus, les parcours de visite empruntés n'offrent pas une qualité d'usage
équivalente à celle d'un visiteur mobile. Toutefois, il faut garder à l'esprit que la mise en
accessibilité de la Basilique s'est surtout faite au cours des années 2002-2004, donc avant la
promulgation de la loi du 11 février 2005. D'autre part, la Basilique de Saint-Denis est un édifice
particulièrement précieux, aussi bien au niveau historique, puisqu'il renferme la plupart des
tombeaux des rois de France, qu'au regard de l'histoire de l'art, car c'est une des premières
expressions de l'art gothique. Il est donc tout naturellement bien plus protégé qu'un autre
monument. Voyons maintenant la mise en accessibilité physique qui a été réalisée au Palais du Tau
de Reims, ces dernières années.
Le Palais du Taus de Reims :
L’étude préalable sur la mise en accessibilité :
Cette étude préalable de mise en accessibilité que chaque établissement recevant du public
est censé avoir réalisé depuis janvier 201152, ce qui, dans certains cas n’a pas été fait, par manque de
51 Cf. annexe A, photo 10.52 Code de la construction et de l'habitation, Article R. 111-19-9 : Au plus tard le 1er janvier 2011, les établissements
recevant du public existants, classés dès les quatre premières catégories au sens de l'article R. 123-19, doivent avoirfait l'objet, à l'initiative de l'administration intéressée ou de l'exploitant, d'un diagnostic de leurs conditionsd'accessibilité. Ce diagnostic analyse la situation de l'établissement ou de l'installation au regard des obligationsdéfinies par la présente sous-section, décrit les travaux nécessaires pour respecter celles qui doivent être satisfaites
31IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
temps et de moyens humains ou financiers, concerne surtout le handicap moteur, puisque ce sont les
aménagements concernant ce type de handicap qui sont les plus contraignants. D’ailleurs, ces
études sont effectuées par un architecte en chef des Monuments Historiques car c’est bien de
l’architecture du bâtiment dont il est question, extérieure comme intérieure, tandis que les
dispositifs destinés aux personnes en situation de handicap sensoriel ou mental sont souvent
beaucoup moins lourds et ne modifient pas l’architecture d’un monument.
Ainsi, l’étude préalable concernant le Palais du Tau a été réalisée par l’architecte en chef des
Monuments Historiques Lionel Dubois, et se concentre largement sur l’accessibilité physique du
bâtiment. Elle s’appuie en fait sur l’étude préliminaire, menée en 2002 par l’architecte en chef
Dominique Moufle, qui avait déjà préconisé les principales solutions permettant de rendre
accessible la quasi-totalité de l’ensemble monumental. Cette nouvelle étude comprend donc, tout
d’abord, une description accompagnée de photos du monument illustrant chaque partie qui le
compose, puis un état des lieux de l’accessibilité physique des différents espaces ouverts au public,
également accompagné de photos, qui répertorient toutes les dénivellations ou obstacles que l’on
rencontre en suivant le parcours principal destiné aux visiteurs.
On sait donc qu’au mois de juillet 2006, date à laquelle l’étude a été menée, les personnes à
mobilité réduite ne peuvent accéder qu’à l’accueil du Palais du Tau, puisqu’il est situé au rez-de-
chaussée du bâtiment53, ainsi qu'au Centre d’interprétation situé plus loin dans la seconde cour. Pour
cela, les visiteurs atteints d'une déficience motrice doivent ressortir du bâtiment et parcourir une
partie du trajet sur un sol gravillonné, ce qui peut être extrêmement pénible, notamment pour les
personnes en fauteuil roulant. De plus, il est précisé qu’aucun sanitaire n'est adapté à ce type de
handicap. Enfin, l’accès à la salle basse reste subordonné à la possibilité pour la personne
handicapée de pouvoir entrer dans la cathédrale, puisque la plateforme repliable qui lui permet
d’arriver au niveau correspondant n’est accessible qu’à partir du bras du transept sud54.
Or, la cathédrale elle-même reste largement inaccessible, étant donné que la seule entrée du
monument qui soit de plein pied se situe au niveau du portail du bras nord du transept. Mais, celle-
ci reste habituellement fermée. L'unique manière de la franchir est donc de se faire ouvrir la porte
par une personne qui en détient la clé, ce qui écarte d’office le principe d’autonomie des visiteurs,
indispensable à la notion d’accessibilité d’un bâtiment. C’est pourquoi le Président du Centre des
Monuments Nationaux de l’époque, tout comme la Direction Régionale des Affaires Culturelles de
avant le 1er janvier 2015 et établit une évaluation du coût de ces travaux.53 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 16.54 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 26.
32IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Champagne-Ardenne, ont souhaité que les travaux de mise en accessibilité du Palais du Tau
incluent un accès pour les personnes atteintes d’un handicap moteur à la cathédrale.
D’autre part, le Directeur Régional des Affaires Culturelles a également souhaité la mise en
place d’une concertation avec les associations locales représentantes de personnes handicapées, afin
de mieux cerner leurs attentes et leurs besoins. Ainsi, ces réunions de concertation ont permis de
définir deux principes à respecter : séparer le moins possible les circuits de visite des visiteurs
valides de ceux des visiteurs à mobilité réduite, et éviter de rompre ces circuits en obligeant les
visiteurs en situation de handicap moteur à revenir sur leurs pas afin d’accéder au dispositif leur
permettant de franchir un obstacle. Il a donc été déterminé que la mise en place de deux ascenseurs
et deux élévateurs permettrait aux visiteurs atteints d’un handicap physique de visiter la quasi-
totalité des bâtiments55, et cela sans déroger aux principes précédemment énoncés.
Les travaux d’accessibilité réalisés au Palais du Tau :
Ces travaux furent dirigés par l’architecte en chef des Monuments Historiques ayant effectué
l’étude préliminaire de 2006. Ils furent menés à bien entre 2009 et 2011, pour un coût total de
1 490 000 € TTC, contre 1 300 000 € prévus et furent financés en totalité par le Centre des
Monuments Nationaux. Ils portèrent essentiellement sur l’intérieur du bâtiment, et ne modifièrent
donc pas son apparence extérieure. Ces aménagements ont permis un accès aux salles ouvertes à la
visite situées dans les ailes Sud et Est, sur trois niveaux différents.
En fait, on sait que le Palais fut largement reconstruit dans les années 1950-1960, suite aux
destructions engendrées par les bombardements de septembre 1914, ce qui a limité les mesures de
protection concernant notamment certains sols, plafonds et murs de l’édifice, permettant ainsi
l’installation de ces ascenseurs et élévateurs. Toutefois, on sait que le Palais du Tau, a été inscrit au
patrimoine mondial de l'Unesco en 1991, et bien que cela n'apporte aucune protection légale
supplémentaire au monument, des règles très précises sont à respecter pour ne pas risquer d'être
déclassé. Cependant, ces règles portent, pour l'essentiel sur l'environnement du site, ou les travaux
risquant de dénaturer complètement l'ensemble monumental. Cette inscription n'a donc pas
réellement ajouté de difficultés au projet mené.
55 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 35.
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Si les règles de protection, moins contraignantes du fait de la reconstruction partielle du
bâtiment au cours du XXème siècle, ont facilité l'installation de ces aménagements permettant une
circulation verticale aux personnes à mobilité réduite, le respect de l'esthétisme du monument a
empêché la mise en place de certains dispositifs trop lourds. En effet, l'installation d'un troisième
monte-personne au niveau de l'escalier d'honneur a été abandonnée, car il aurait été trop gênant
pour la compréhension architecturale du monument56.
D'autre part, des rampes ont été mises en place, l'une au sein du couloir d’accueil57 que
chaque visiteur empruntera, qu’il soit valide ou non non-valide, et l'autre à l’intersection des deux
ailes principales58. Ainsi, l’espace des sanitaires situé à l’intérieur de la zone A est devenu
accessible59 et a été équipé de toilettes adaptées, et un autre espace de ce type fut créé au sein de la
zone B. Toutes ces rampes ont également été installées selon les principes de réversibilité, tout
comme à la Basilique Saint-Denis. Ainsi, on constate clairement que la rampe et les mains-
courantes qui y sont associées ne touchent à aucun moment le mur du bâtiment60. En effet, si les
pierres avaient été percées en vue d'y encastrer une main-courante, cela aurait forcément laissé des
traces sur le monument. Par ailleurs, dans la zone C du plan, qui est un dégagement donnant accès à
la salle basse, et duquel on peut voir le dépôt lapidaire situé dans la crypte de la chapelle qui n’est
pas visitable, c’est le niveau du sol qui fut abaissé, afin de faire disparaître les quelques marches
qu’il fallait franchir pour y accéder61.
De cette manière, le dégagement atteint le même niveau que celui de la salle basse. Alors, la
mise en place d’un monte-personne permet aux visiteurs en fauteuil roulant d’accéder à la cave,
ainsi qu'à l’ascenseur installé au milieu de l’aile Est situé entre la zone B et la zone C62. Cet
ascenseur conduira donc les personnes en situation de handicap moteur au 1er étage de l’aile Est63,
tandis que les personnes valides emprunteront les escaliers. La seconde plateforme motorisée est
installée dans la salle du Goliath, où sont déposées les sculptures de la cathédrale. Elle est insérée
au centre des marches donnant accès à cet espace64, de sorte que l’escalier est divisé en deux
parties. De cette manière, la personne en fauteuil roulant n'est pas contrainte d’effectuer une
56 Cf. annexe B, Rapport d’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 50 et 51.57 Cf. annexe B, Rapport d’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 38, zone A du plan58 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du palais du Tau de Reims, p. 38, zone B du plan.59 Cf. annexe C, photo 1.60 Cf. annexe B, Rapport d’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 38.61 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, simulation d’abaissement du niveau du sol
du dégagement, p. 43.62 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 44.63 Cf. annexe C, photo 2.64 Cf. annexe C, photo 3.
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manœuvre compliquée dans un espace restreint pour s’installer dans le monte-personne65. Enfin, le
deuxième ascenseur fut installé tout au sud de l’aile Est, pour desservir le sous-sol où se trouve
notamment la salle voûtée, dite « salle basse ».
D’autre part, de nombreux bancs ont été installés tout au long du parcours de visite, de telle
sorte que les personnes mal-marchantes ou à grande fatigabilité puissent régulièrement se reposer66.
Tous ces bancs ont été installés en face d’un écran diffusant des films sur le monument, que nous
analyserons plus particulièrement dans la partie sur les handicaps sensoriels.
Ces travaux permettent donc à tous les visiteurs du monument, qu’ils soient valides ou
invalides, de suivre la visite sans difficulté et dans les mêmes conditions de confort, en leur
permettant d’accéder à toutes les salles ouvertes à la visite, de se déplacer d’un point à un autre de
manière autonome, et de satisfaire leurs besoins élémentaires. De plus, afin de faciliter le trajet entre
les différents transports en commun et le monument en lui-même, des aménagements ont été mis en
place dans les gares et le quartier aux alentours de la cathédrale. Ainsi, on peut lire dans le Recueil
des belles pratiques et bons usages en matière d'accessibilité de la Cité qu'une « personne en
fauteuil roulant peut se déplacer de la gare située dans le centre-ville au parvis de la cathédrale,
notamment en empruntant le tramway ». En effet, en 2006, au moment de la réalisation de l'étude
préalable du Palais du Tau, le parvis de la cathédrale a fait l'objet d'importants travaux de rénovation
urbaine, plaçant les personnes à mobilité réduite au cœur de ce projet. L’accessibilité a donc été
pensée de manière globale, au niveau de la ville et non du monument uniquement, ce qui nous
permet notamment de penser que le palais du Tau obtiendra le label Tourisme & Handicap pour le
handicap moteur.
2. Les mesures de compensation
Cependant, certains monuments ou parties de monument, du fait de leur architecture et des
protections juridiques qui y sont liées, ne peuvent et ne pourront jamais être rendus accessibles pour
certains visiteurs, notamment ceux en situation de handicap moteur. Ainsi, les deux monuments
étudiés ci-dessus abritent une partie restée inaccessible aux visiteurs en fauteuil roulant. Mais les
équipes de ces deux monuments ont réagi différemment face à cette difficulté.
65 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du Palais du Tau de Reims, p. 46-47.66 Cf. annexe C, photo 4.
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D'une part, la Basilique de Saint-Denis, malgré tous les efforts déployés, reste accessible en
partie uniquement puisque pour entrer dans le chœur de la cathédrale il faut franchir plusieurs
marches, ce qui n'est pas envisageable pour une personne se déplaçant en fauteuil roulant. Des
mesures compensatoires devraient donc être mises en place afin permettre à ces personnes
d'appréhender cet espace même s'ils n'y ont pas accès. Ainsi, on peut imaginer une tablette
numérique qui diffuserait les images des vitraux de l'abside tels que l'on peut les voir du chœur,
c’est-à-dire en contre plongée.
Or, aucune mesure visant à compenser cette perte n'est prévue car un autre projet est en
cours de réflexion. Effectivement, le Centre des Monuments Nationaux, en accord avec l'architecte
en chef des Monuments Historiques en charge de la Cathédrale, prévoit la mise en place d'un
ascenseur à l'intérieur de la salle d'interprétation, qui desservirait le chœur ainsi que le niveau
intermédiaire entre le chœur et la crypte. Cela permettrait d'éviter aux visiteurs en situation de
handicap d'aller jusqu'à la billetterie avant faire le même trajet en sens inverse pour revenir dans la
nef. Cet ascenseur offrirait donc une bien plus grande autonomie de circulation, ainsi qu'un meilleur
confort de visite au public ciblé. Cependant, ce projet est pour l'instant encore à l'état d'ébauche.
D'autre part, le Palais du Tau, n'a pas pu faire les travaux nécessaires pour rendre accessible
sa chapelle palatine, puisque quelques marches doivent toujours être montées afin d'y pénétrer. En
effet, la petite salle sur laquelle donne l'entrée de cette chapelle n'offre pas le recul suffisant pour y
installer une rampe. L'équipe du monument a donc décidé de fermer à la visite cette chapelle.
Aujourd'hui, les portes de la chapelle restent ouvertes, afin que l'on puisse tout de même admirer les
magnifiques vitraux qui ornent ses différentes lancettes, une chaîne en interdisant l'entrée à tous les
visiteurs67. Ainsi, aucune mesure visant à compenser une éventuelle inégalité entre un visiteur
ordinaire et un visiteur en situation de handicap n'est à prévoir. Dans ce cas précis il n'y a pas de
disparité puisque la restriction de visite de la chapelle s'applique à tous les visiteurs, sans exception.
Il est donc clair, à travers cette décision, que la volonté qui a animé l'équipe de ce monument
était de pouvoir offrir une visite analogue à tous les visiteurs avec le même confort d'usage.
Cependant, on ne peut ignorer le fait que cette mesure radicale, si elle était appliquée de manière
systématique, priverait un grand nombre de personnes de la visite de nombreux monuments
historiques, car aujourd'hui encore, la grande majorité de ce type de site culturel reste inaccessible
aux personnes atteintes d'un handicap moteur.
67 Cf. annexe C, photo 5.
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On voit donc bien que pour ce qui est de l'accessibilité des visiteurs en situation de handicap
moteur, le Palais du Tau a un projet bien mieux structuré et plus complet que celui de la Basilique
Saint-Denis. En effet, les installations effectuées au sein du Palais du Tau ont été pensées de
manière à ce que l'ensemble du monument puisse être accessible, tout en offrant un parcours de
visite cohérent, tandis qu'à la Basilique de Saint-Denis, les installations n'offrent pas le même
confort. Toutefois, il est évident que les budgets, tout comme les capacités d'intervention ne sont pas
les mêmes pour les deux sites.
En les comparants il faut donc garder à l'esprit que les contextes de mise en accessibilité de
ces deux monuments sont très différents, étant donné que le projet du Palais du Tau a été totalement
mené par le siège du Centre des Monuments Nationaux, en partenariat avec l'État et les collectivités
locales, tandis que les travaux effectués à Saint-Denis ont été portés uniquement par la volonté de
son administratrice et de son équipe, avec le soutien du siège du Centre des Monuments Nationaux.
Ainsi, les budgets n'étaient bien sûr pas les mêmes, et les résistances aux projets non plus. En effet,
on voit bien qu'au Palais du Tau l'architecte en chef des monuments historiques a travaillé pour le
projet, puisque c'est lui qui a mené toute la réflexion préalable au lancement des travaux. Au
contraire, à Saint-Denis, l'architecte des bâtiments de France était hostile au projet, puisque
finalement, la mise en place d'un élévateur a été réalisée contre son avis. Ainsi, la mise en
accessibilité du cadre bâti protégé est beaucoup plus imparfaite à la Basilique Saint-Denis, mais
révèle une réelle volonté d'engagement.
Enfin, il ne faut pas oublier non plus que les capacités d'intervention étaient bien plus larges
au Palais du Tau, étant donné qu'une grande partie du monument a été détruite au cours de la
première guerre mondiale et reconstruite à l'identique durant la seconde moitié du XXème siècle.
L'architecte en chef des monuments historiques bénéficiait donc d'une marge de manœuvre
beaucoup plus importante. Au contraire, à la Basilique Saint-Denis, les contraintes étaient bien plus
fortes, dans la mesure où les dernières grandes modifications ayant étés effectuées sur le bâtiment et
susceptibles de le transformer en profondeur ont étés menés au milieu du XIXème siècle. Les
parties remaniées à cette époque par Eugène Viollet-le-Duc ont donc depuis été communément
acceptées comme faisant partie de l'histoire du monument et à ce titre également protégées par la
loi.
37IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Deuxième partie : Les handicaps sensoriels
A. Le handicap visuel
1. La définition du handicap visuel et ses conséquences
Le handicap visuel touche toutes les personnes qui ont une acuité visuelle faible ou
nulle. Ainsi, parmi les déficiences visuelles il faut distinguer les personnes malvoyantes des
personnes non-voyantes. Les malvoyantes perçoivent différemment leur environnement en fonction
de leur type de vision, qu'elle soit floue, assombrie ou avec un champ visuel réduit. Les personnes
non-voyantes, elles, ont une cécité totale, et appréhendent le monde uniquement à travers leurs
autres sens : le goût, l'odorat, l'ouïe et surtout le toucher.
Par ailleurs, certaines personnes non-voyantes ou malvoyantes ont appris à lire en
braille, cette écriture en relief mise au point en 1829 par Louis Braille, lui-même atteint de cécité.
En braille chaque caractère est représenté par un à six points en relief, positionnés sur deux
colonnes de trois points. Mais la signification de chaque symbole dépend de la langue utilisée, ce
procédé ayant été exporté dans la plupart des pays du monde. Ainsi, les braille japonais, coréen ou
encore cyrillique sont différents du braille français par exemple. Cependant, les langues utilisant
l'alphabet latin emploient, dans la plupart des cas, le même codage pour les lettres de base. Seules
les lettres accentuées et parfois certains signes de ponctuation diffèrent.
2. Le contexte légal et associatif
Le handicap visuel est largement évoqué au sein de l’arrêté du 1er août 2006. En effet,
c'est l'un des handicaps qui fait l'objet du plus grand nombre de mesures à respecter, et il est vrai
que c'est sûrement le type de handicap auquel on pense le plus souvent, après le handicap moteur,
lorsque l'on parle d'accessibilité. De même, le logo correspondant au handicap visuel apparaît 35
fois dans le texte des critères incontournables concernant les caractéristiques générales68 et celles
correspondant aux sites touristiques, tels que les musées, salles d'expositions ou encore
68 Cf. annexe D, Les critères incontournables à une labellisation, Tourisme & Handicap, Caractéristiques générale, p. 1à 5.
38IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
monuments69 . En comparaison, le pictogramme du handicap auditif n'est présent qu'une quinzaine
de fois.
Ainsi, à travers ces deux textes, on constate que les contrastes visuels sont très
importants pour les personnes malvoyantes, puisqu'ils leurs permettent de repérer différents
éléments, tels que les pictogrammes nécessaires à l'orientation, ou encore la présence de marches
qui peuvent être dangereuses si elles ne sont pas signalées. Les textes législatifs et associatifs
précisent donc, tous deux à leur manière, que les cheminements doivent être contrastés
visuellement.
Cependant, pour ce qui est des pictogrammes, seuls les critères incontournables énoncent
de manière précise qu'ils doivent être contrastés70. De même, ils précisent que des bandes de
couleur contrastée doivent être apposées sur toutes les portes vitrées, et ce à deux hauteurs
différentes71, tandis que la loi se contente d'énoncer que « les portes comportant une partie vitrée
importante doivent être repérables (...) à l'aide d'éléments visuels contrastés par rapport à
l'environnement immédiat ». C'est donc ici l'association Tourisme & Handicap qui se charge de
normer cette obligation légale. On constate que ces dispositions ont bien été respectés au Palais du
Tau, puisque non seulement les cheminements extérieurs et intérieurs ont été contrastés, mais
également les pictogrammes. Par exemple, l’entrée est facilement identifiable72, conformément à ce
qu'est précisé dans l’article 2 de l’arrêté ministériel de 2006.
De la même manière, la rampe du couloir d’entrée est d’une couleur plus foncée que
celle du sol de l’accueil de manière à ce que le contraste visuel informe les visiteurs malvoyants
d’un changement entre les parties plates et les parties inclinées73. Enfin, devant l'emmarchement de
l'escalier principal, un tapis gris a été disposé74 afin de créer un contraste signalant aux visiteurs
malvoyants la présence de marches. Au contraire, à la Basilique de Saint-Denis, la présence de
marches n'est à aucun moment signalé75. Par contre, les pictogrammes, ainsi que les panneaux sont
69 Cf. annexe D, Les critères incontournables à une labellisation, Tourisme & Handicap, Gestionnaire des sitestouristiques, 2.1.1. Les musées, salles d'expositions et monuments, p. 7.
70Les critères incontournables à la labellisation, Tourisme & Handicap : Pour offrir un meilleur confort visuel à tous etplus particulièrement aux personnes malvoyantes, cette signalétique présente un contraste de couleur entre lesupport et le panneau et entre le panneau et l’inscription
71 Les critères incontournables à la labellisation, Tourisme & Handicap : Afin d'éviter tout danger, en particulier pourles personnes malvoyantes, des bandes adhésives de couleur contrastée doivent être posées sur les portes vitrées àdeux hauteurs différentes (0,70 m et 1,70 m).
72 Cf. annexe C, photo 6.73 Cf. annexe B, Rapport de l’Étude préalable du palais du Tau de Reims, p. 38.74 Cf. annexe C, photo 7.75 Cf. annexe A, photo 11.
39IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
contrastés et visibles de loin76 car rédigés en gros caractères.
Afin de pouvoir distinguer ces contrastes, l'éclairage doit être maitrisé de manière à
apporter assez de lumière, sans pour autant éblouir les visiteurs. Cette fois, le dispositif d'éclairage
doit correspondre à des normes légales, telles qu'elles sont décrites dans l'article 14 de l'arrêté
ministériel77. Mais on sait également que le Guide pratique de l'accessibilité, édité par le Ministère
de la Culture et de la Communication, préconise un éclairage supérieur à 300 lux, dans l'ensemble
des espaces ouverts au public78, tandis que l'association Tourisme & Handicap se contente de
préciser que la lumière du jour doit être maîtrisée, afin d'éviter une trop forte exposition durant la
journée79. On observe donc des contradictions entre les différentes préconisations.
Une fois de plus, cette disposition est respectée par le palais du Tau, qui a mis en place dans
toutes ses salles ouvertes au public, des stores micro-perforés permettant de tamiser l’éclairage de
manière à ne pas gêner les visiteurs malvoyants, mais également à ne pas endommager les
tapisseries qui sont exposées. Au sein de la nécropole royale, l'éclairage est également assez doux,
puisqu'il est filtré par les vitraux présents dans toutes les baies de l'édifice. Aucune disposition
particulière n'était donc utile.
Au contraire des personnes malvoyantes, pour les visiteurs non-voyants, les repérages se
font uniquement de manière tactile, en touchant un plan en relief, des écritures en braille, ou encore
en passant leur canne sur un système de marquage au sol. Ainsi, les obstacles en hauteur ne
comportant aucun prolongement au sol doivent être proscrits ou suspendus à une hauteur minimum
de 2,20 m, comme il est précisé dans l'article 2 de l'arrêté du 1er août 200680. Dans ce cas-là, les
critères du label Tourisme & Handicap sont moins précis que les obligations législatives, puisqu'ils
précisent uniquement que « les obstacles à hauteur de visage doivent être supprimés », ou que « les
obstacles susceptibles (...) de présenter un danger pour les personnes en situation de handicap visuel
76 Cf. annexe A, photo 12.77 Arrêté du 1er août 2006, Article 14 : Le dispositif d'éclairage doit répondre aux dispositions suivantes : il doit
permettre d'assurer des valeurs d'éclairage mesurées au sol d'au moins 20 lux en tout point du cheminementextérieur accessible, 200 lux au droit des postes d'accueil, 100 lux en tout point des circulations intérieureshorizontales, et 150 en tous points de chaque escalier et équipement mobile.
78 Culture et handicap, Guide pratique de l'accessibilité, 2007, p. 33 : Par ailleurs, un niveau d'éclairage d'au moins300 lux doit être assuré. Il aide les personnes sourdes qui lisent sur les lèvres, ainsi que les malvoyants.
79 Les critères incontournables à la labellisation, Tourisme & Handicap : Pour le confort de tous, et en particulier despersonnes malvoyantes, la lumière du jour doit être gérée par des stores, rideaux, volets, voilages, vitres teintées...un éclairage indirect ou semi-direct (diffus) doit être privilégié afin d'éviter tout éblouissement.
80 Arrêté du 1er août 2006, Article 2 : Afin d'être repérables, les éléments éventuels qui ne peuvent pas être mis endehors du cheminement doivent répondre aux exigences suivantes : s'ils sont suspendus au-dessus du cheminement,laisser un passage libre d'au moins 2,20 m de hauteur au-dessus du sol, s'ils sont implantés sur le cheminement,qu'elle que soit leur hauteur, ou en saillie latérale de plus de 15 cm sur le cheminement, comporter un élément decontraste visuel par rapport à leur environnement immédiat et un rappel tactile ou un prolongement au sol.
40IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
(...) doivent être neutralisé ». Les caractéristiques permettant d’identifier tel ou tel obstacle comme
dangereux pour ce type de visiteur sont donc laissés à l'appréciation de chacun, tout comme les
moyens de les « neutraliser ». Certaines préconisations restent donc assez imprécises, puisqu’avec
ce critère incontournable, on peut se demander ce qu’est la hauteur d’un visage, et si un obstacle à
hauteur de poitrine n’est pas tout aussi dangereux.
Enfin, que ce soit pour les personnes non-voyantes ou malvoyantes, les mains-courantes
sont indispensables. Alors, ces visiteurs pourront s'appuyer dessus, et se repérer grâce à elles.
L’association précise qu’elles doivent être mises en place à « chaque rupture de niveau », puis
reprend les dispositions énoncées dans la loi. Ainsi, les textes s'accordent pour estimer qu'une
rupture de niveau est effective à partir de 3 marches, et que la main-courante qui y est associée doit
commencer avant la première marche et se terminer après la dernière81. Cependant, le texte émanant
de l'association estime que la longueur de ce prolongement doit être entre 30 et 40 cm, tandis que la
loi ne précise rien dans ce sens. Des mains-courantes ont donc été apposées sur tous les escaliers de
plus de trois marches du Palais du Tau. L’escalier d’honneur situé dans le hall d’accueil, considéré
comme dangereux pour les visiteurs malvoyants, car précédé d’un emmarchement plus large que
l’escalier et non contrasté par rapport au reste du sol, a d'ailleurs bénéficié d’un allongement de sa
main-courante82. A la Basilique de Saint-Denis, au contraire, les mains courantes qui existent sont
celles qui ont été construites en même temps que l'escalier. Elles ne se prolongent donc pas 40 cm
après la dernière marche, elles s'arrêtent même deux marches avant la fin des escaliers83.
Le texte de loi relatif aux dispositions à prendre pour une mise en place d'une accessibilité
générale est donc très précis en ce qui concerne certains éléments inhérents au handicap visuel, mais
sur certains autres points, il laisse une grande place à l'interprétation. Le label Tourisme &
Handicap, sans reprendre les parties les plus précises du texte de loi, apporte donc un complément
d'informations, et de règles à respecter. Mais, ces règles sont obligatoires uniquement si le but de la
mise en accessibilité du monument est d'être certifié accessible aux personnes en situation de
handicap visuel. Au contraire, si le monument se contente de respecter la loi, certaines dispositions
indispensables ne seront pas mises en place.
81 Arrêté du 1er août 2006, Article 7 : Toute main courante doit répondre aux exigences suivantes : être située à unehauteur comprise entre 0,80 m et 1,00 m (...), se prolonger horizontalement de a longueur d'une marche au-delà de lapremière et de la dernière marche volée sans pour autant créer d'obstacle au niveau des circulations horizontales, êtrecontinue, rigide et facilement préhensible, être différenciée de la paroi support grâce à un éclairage particulier ou àun contraste visuel.
82 Cf. annexe C, photo 7.83 Cf. annexe A, photo 11.
41IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
D’autre part, si en théorie le non-respect d'une ou plusieurs dispositions énoncées dans les
critères incontournables ne permet pas la labellisation du site en question, on sait qu'en pratique ce
n'est pas toujours le cas. La Basilique de Saint-Denis a d’ailleurs obtenu le label Tourisme &
Handicap pour le handicap visuel, même si la plaque correspondante n'est pas affichée, alors que le
site ne respecte pas certains critères obligatoires. On voit donc clairement que l'attribution du label
dépend en partie de la subjectivité des évaluateurs qui réalisent l'évaluation du monument.
3. Les outils de médiation adaptés
Mais, au-delà de permettre aux visiteurs en situation de handicap visuel d'accéder aux
espaces ouverts au public, de pourvoir s'y repérer et s'y déplacer de manière autonome, la mise en
accessibilité d'un monument doit intégrer l'adaptation de son circuit de visite à tous ses publics. Or,
différents dispositifs existent et peuvent être mis en place dans ce but. Au sein même du circuit de
visite destiné à tous, ces éléments enrichiront l'expérience des visiteurs ordinaires et permettront à
un public particulier ayant des attentes et des besoins spécifiques, tel que le public en situation de
handicap visuel, de visiter le monument de manière autonome.
Ainsi, pour les personnes non-voyantes et malvoyantes, de nombreux dispositifs ont été mis
en place au Palais du Tau de Reims, afin de leur permettre d’appréhender le monument comme ses
collections.
Deux maquettes tactiles, conçues notamment pour les personnes en situation de handicap
visuel, ont donc été insérées dans le parcours de visite du monument. La première maquette
interactive présente le quartier de la cathédrale tel qu’il était au XVIIIème siècle, dans lequel s’insère
le Palais du Tau, et est située dans le hall d’accueil de l’édifice. La seconde, qui est une
reproduction en 3D de la Cathédrale Notre-Dame de Reims84 se trouve dans la salle du Goliath, où
sont exposées les statues déposées de cet édifice. Ces deux maquettes possèdent une légende en
braille français, mais elles sont également interactives, puisqu’elles intègrent des fichiers audio
adaptés, qui se déclenchent si l’on presse un bouton, et qui expliquent la maquette en question en
audio-description. Ainsi, les personnes non-voyantes qui ne maitrisent pas le braille, et qui sont en
fait la très grande majorité des personnes en situation de handicap visuel, peuvent tout de même
comprendre ce qu'ils touchent. De même, toute la visite peu se faire en audio-description et cela à
grâce à des audio-guides spécifiques pour les personnes en situation de handicap visuel. Mais, ces
84 Cf. annexe C, photo 8.
42IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
dispositifs d'audio-description n'existent qu'en français, tout comme les commentaires audio des
maquettes précédemment présentées.
D’autre part, trois autres maquettes tactiles, n’intégrant aucun fichier audio cette fois, sont
réparties au sein du parcours de visite et présentent différentes partie de l’ensemble monumental. La
première se trouve dans la salle basse et figure une voûte sur croisée d’ogives85, la seconde est
visible à l’entrée de la chapelle palatine et représente le chevet de cette chapelle, et la dernière se
trouve dans la salle du Tau et est une maquette tactile en écorché du Palais86, c’est-à-dire que l’aile
Est du Palais est coupée en deux dans le sens de sa hauteur, permettant ainsi de voir l’intérieur de
certaines pièces. Toutes ces maquettes contiennent bien sûr une légende en braille, permettant aux
visiteurs français sachant lire cette écriture tactile de comprendre ce qu’ils touchent. De la même
manière, tous les cartels explicatifs multilingues sont écrits en gros caractères pour les visiteurs
malvoyants et sont traduits en braille français pour les personnes non-voyantes.
De plus, toutes les statues exposées peuvent être touchées par les visiteurs en situation de
handicap visuel. Dans certains cas ce sont des moulages, conçus à cet effet, mais les statues
originales se plient également à cette règle. En effet, le problème de conservation évident que pose
le fait que les visiteurs puissent toucher les statues originales de la cathédrale, déposées au musées
de l’œuvre du Palais, est en fait tempéré par le nombre très faible des personnes en situation de
handicap visuel qui visitent le monument.
De la même manière, à la Basilique Saint-Denis, certains dispositifs, s'ils profitent à tous
les visiteurs, sont spécialement conçues pour les personnes en situation de handicap visuel. Mais,
contrairement au Palais du Tau, une seule maquette tactile est présentée dans la nef de la
Cathédrale, et elle n'est tactile que si la cloche en plastique qui la recouvre n'est soulevée par un
agent de l'équipe d'accueil87. Ce dispositif n'est donc pas non plus utilisable de manière autonome,
et cette reproduction miniature de l'ancienne abbaye royale ne contient pas de légende en braille. De
plus, elle n'est pas interactive, puisqu'aucun fichier audio n'y est intégré. Cependant, les cartels de
présentation sont doublés en braille, ainsi que la légende d'une seconde maquette qui se trouve dans
la salle d'interprétation, non tactile cette fois. En effet, cette reproduction du quartier de l'abbaye est
non seulement trop fragile pour être touchée, mais elle n'est de toute manière pas accessible car elle
s'étend sur une trop grande surface88.
85 Cf. annexe C, photo 9.86 Cf. annexe C, photo 10.87 Cf. annexe A, photo 13.88 Cf. annexe A, photo 14.
43IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Par ailleurs, certains gisants ont également été désignés pour pouvoir être touchés par les
visiteurs déficients visuels, mais il est fréquent, au moment où une personne non-voyante ou
malvoyante découvre tactilement une sculpture, que tous les visiteurs se mettent à la toucher, ce qui
devient alors compliqué à gérer. Toutefois, cela révèle bien le fort désir qui est alors exprimé de la
part de tous les visiteurs : celui de pouvoir toucher et sentir, c'est-à-dire découvrir le monument et
ses collections à travers tous ses sens.
Enfin, des visio-guides adaptés aux personnes non-voyantes, intégrant donc un système
d'audio-description, également disponibles uniquement en français, sont loués à l'accueil.
Les deux monuments ont donc prévus des aménagements spécifiques à ce type de
handicap, mais il est évident que le Palais du Tau a beaucoup plus développé le côté technologique
de ses dispositifs. En effet, l'interactivité des maquettes tactiles ne se retrouve pas à la Basilique de
Saint-Denis. Or, ces deux projets de mise en accessibilité ont été réalisés à plusieurs années d'écart,
celui de la nécropole royale étant plus vieille d'au moins cinq ans que celui du Palais archiépiscopal.
On peut donc supposer que cette différence s'explique par le fait qu’en 2004, les nouvelles
technologies étaient encore assez peu intégrées aux outils de médiation, contrairement à ce qui se
faisait en 2009.
Mais la différence de budget entre les deux projets ne pourrait-elle également expliquer
cette disparité? En effet, il est clair que de manière générale tout ce qui touche à la technique audio-
visuelle coûte très cher, et on sait que le projet de Saint-Denis a été monté et mis en place par
l'équipe du monument, bien qu'il ait été soutenu par le siège du Centre des Monuments Nationaux,
au contraire du projet du Palais du Tau, qui a été directement imaginé et mis en œuvre par le siège.
Le second projet a donc bénéficié d'un budget bien plus important et largement mécèné, qui a pu
intégrer, sans difficultés aucunes, différents éléments de technologie auditive.
44IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
B. Le handicap auditif
1. La définition du handicap auditif et ses conséquences
Le handicap auditif consiste en l'inexistence ou la perte, qu'elle soit totale ou partielle à
des degrés variables, de l'acuité auditive. La principale difficulté de ce handicap est liée à la
perception des messages sonores, comme la parole. Cependant, il faut différencier la personne
sourde de la personne malentendante. La personne malentendante dispose d'un reste auditif
exploitable. Ainsi, elle peut bénéficier d'aides sonores, à travers des prothèses auditives qui
amplifient les sons. En revanche, la personne qui n'a pas d'ouïe, qu'elle soit née comme ça ou qu'elle
l'ai perdue au cours de sa vie, ne peut pas entendre, et ne peut être aidée que par des techniques
visuelles, notamment la langue des signes.
Il faut savoir que la langue des signes n'est pas universelle. Cependant, par la proximité
de leur grammaire et des différents signes utilisés, deux personnes souffrant d'un handicap auditif
qui ne parlent pas la même langue des signes peuvent tout de même avoir une compréhension
avancée l'une de l'autre. Il existe donc une langue des signes française (LSF), qui est officiellement
reconnue en tant que « langue à part entière » par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits
et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Enfin, il existe une
langue des signes internationale (LSI), également appelée Gestuno. Cette langue ne possède pas
réellement d'alphabet dactylologique de A à Z, car certaines langues, comme le chinois par exemple,
n'en possède pas non plus. Elle est dominée par la langue des signes américaine (ASL), cette
dernière restant la langue la plus utilisée dans le monde.
2. Le contexte légal et associatif
Au contraire du handicap visuel, le handicap auditif est très peu présent dans l'arrêté du
1er août 2006, et la plus part des fois où il apparaît, les mesures énoncées concernent l'ensemble des
handicaps sensoriels et non uniquement le handicap auditif. De plus, les dispositions à respecter
afin que le bâtiment en question soit considéré comme étant accessible aux personnes atteintes
d'une déficience auditive sont très imprécises et relèves en fait, d'une manière générale, de la
préconisation. Ainsi, on peut y lire, dans l'article 2 : « Le cheminement accessible permet
45IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
notamment à une personne ayant une déficience visuelle ou auditive de se localiser, s'orienter et
atteindre le bâtiment en sécurité ». Le handicap auditif y est donc traité parmi d'autres types de
handicaps, et s'il y est précisé la finalité à atteindre, les moyens permettant d'y arriver n'y figurent
pas toujours clairement.
Cependant, certaines dispositions sont plus spécifiquement centrées sur le handicap
auditif, et plus précises dans leur application, comme par exemple le fait que « toute information
strictement sonore nécessaire à l'utilisation normale du point d'accueil doit faire l'objet d'une
transmission par des moyens adaptés ou être doublée par une information visuelle ». On retrouve la
même préconisation dans les critères incontournables à la labellisation Tourisme & Handicap, mais
les moyens pour y arriver sont décrits de manière légèrement plus précise. Ainsi, « la transmission
par des moyens adaptés » devient dans les critères incontournables « un dispositif d'aide à
l'audition », et le fait de doubler une information sonore par une information visuelle est interprétée
comme le fait que « l'opérateur s'engage à écrire les renseignements donnés oralement ou traduits en
langages des signes, même les plus anodins ».
Toutefois, on ne peut pas estimer que les critères incontournables sont, d'une manière
générale, plus précis que l'arrêté correspondant, car, pour ce qui est de cet exemple, on peut lire un
peu plus loin dans l'article 5, que « lorsque l'accueil est sonorisé, il doit être équipé d'un système de
transmission du signal acoustique par induction magnétique, signalé par un pictogramme », tandis
que le document de Tourisme & Handicap se contentait de décrire un « dispositif d'aide à
l'audition ». On distingue donc ici les personnes malentendantes, pour qui un dispositif
amplificateur de son lui permettra d'entendre et de comprendre les informations délivrées, des
personnes sourdes pour lesquelles une traduction en langue des signes, ou à défaut, si l'agent
d'accueil ne maîtrise pas ce moyen de communication, une version écrite de l'information exprimée,
est nécessaire. Cependant, on sait que certaines personnes atteintes d'un handicap auditif, quel qu'en
soit le degré, peuvent comprendre une information énoncée à l'orale en lisant sur les lèvres de son
interlocuteur, mais partir du postulat que tous les visiteurs d'un monument en situation de handicap
auditif peuvent faire cela serait réducteur et discriminatoire pour les personnes n'en étant pas
capable.
Enfin, on remarque que si la plupart des thèmes autour desquels sont organisés les
articles de l'arrêté ministériel se retrouvent dans les découpages effectués au sein du texte de
l'association Tourisme & Handicap, ce dernier a tout de même une sous-partie « sécurité » qui
n'existe pas dans le texte légal, et qui précise des dispositions qui nous semble indispensable à un
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établissement pouvant accueillir des visiteurs en situation de handicap auditif. Ainsi, il y est écrit
qu'il faut « pour les personnes sourdes ou malentendantes ne percevant pas une alarme incendie
sonore, installer un système d'alerte visuel clignotant, dans les espaces où la personne peut se
retrouver seule », comme les sanitaires. Au sens de la loi, puisque rien n'y est précisé de manière
claire et incontestable, un établissement peut donc être considéré comme étant accessible aux
personnes en situation de handicap auditif même s'il ne peut assurer leur sécurité dans toutes les
parties de ses bâtiments. Les deux monuments étudiés possèdent ce type d'alarmes89, puisque la
Basilique de Saint-Denis a obtenu le label pour le handicap auditif, et le Palais du Tau l'a sollicité.
En ce sens, on peut considérer que si, sur certains points, l'arrêté ministériel énonce
clairement certains dispositifs que les critères incontournables à une labellisation Tourisme et
Handicap pour le handicap auditif ne fait qu'évoquer, sur d'autres points, tel que la sécurité des
visiteurs en situation de handicap, le texte associatif complète, de manière indispensable le texte
juridique.
3. Les outils de médiation adaptés
Pour adapter son circuit de visite aux attentes spécifiques des personnes en situations de
handicap auditif, le Centre des Monuments Nationaux a mis en place différents outils de médiation,
tels que des écrans diffusant des films sous-titrés en français et retranscrits en langue des signes
française, ou encore des boucles magnétiques permettant, grâce à une transmission magnétique,
d’intensifier les sons captés, en changeant le mode sélectionné sur les prothèses auditives des
personnes malentendantes.
Ainsi, le Palais du Tau dispose de visio-guides pour les personnes sourdes, dont les
commentaires sont diffusés à la fois en langue des signes française, mais également en français
écrit. D'autre part, ces visiteurs spécifiques, pourront, tout au long son parcours de visite s'arrêter
pour visionner un film sous-titré en langue des signes française. Au premier étage, on trouve donc
deux écrans diffusants un film traduit en langue des signes françaises et sous-titré en français.
Les plans interactifs que nous avons décrits précédemment possèdent également une
traduction de leurs commentaires en langue des signes française. C'est pourquoi un écran est
disposé derrière le plan reproduisant le quartier de la cathédrale tel qu'il était au XVIIIème siècle.
89 Cf. annexe A, photo 15.
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De la même manière, la maquette en 3D de la cathédrale qui se trouve dans la salle du Goliath
possède une traduction en langue des signes française.
Et, pour toutes les personnes malentendantes qui ne parlerait pas la langue des signes, sont
également mises à disposition des boucles magnétiques permettant d'amplifier les sons grâce à une
transmission par ondes magnétiques.
En tout, l’installation de l’ensemble des outils de médiation, destinés au handicap auditif,
mais également visuel, au sein du Palais du Tau a coûté en tout 180 000 €, financé à 70% par trois
mécènes : la Fondation EDF Diversiterre, la Fondation Orange et la Caisse d’Épargne Lorraine
Champagne-Ardenne, qui sont engagés depuis de nombreuses années contre l’exclusion et pour
l’accès à la culture à tous.
Pour ce qui est de la Basilique royale, seul un écran diffuse un film traduit en langue des
signes, et il se trouve à l'intérieur de la salle d'interprétation90. Toutefois, le monument dispose
également de visio-guide proposant deux parcours différents aux visiteurs en situation de handicap
auditif.
Enfin, en plus de ces outils de médiation spécifiques, des visites en langue des signes
française ou internationale sont également proposées aux groupes de plus de 5 personnes, et cela
dans tous les monuments gérés par le Centre des Monuments Nationaux. Cependant une réservation
d'un mois minimum est indispensable.
D'une manière générale, la mise en accessibilité des sites gérés par le Centre des
Monuments Nationaux, et plus particulièrement les deux monuments étudiés, excluent totalement
les visiteurs étrangers en situation de handicap sensoriel du parcours de visite classique. En effet,
l'ensemble des dispositifs de médiation adaptés sont traduits en braille français ou en langue des
signes française uniquement, alors qu'on sait que ce sont deux monuments prestigieux et connus
dans le reste du monde. D'ailleurs, le Centre des Monuments Nationaux estime que près de la
moitié des 150 000 visiteurs que la basilique Saint-Denis accueil chaque année sont des touristes
étrangers.
Cependant, il faut tout de même garder à l'esprit que traduire chaque cartel ou légende
en plusieurs langues étrangères, mais également en braille français, ainsi qu'en braille anglais et
90 Cf. annexe A, photo 16.
48IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
peut-être espagnol, serait non seulement d'une grande complexité, mais également quelque peu
contreproductif, puisque la multiplicité des informations délivrées les rendraient inefficaces.
Toutefois, le problème est beaucoup moins compliqué à résoudre pour ce qui est du handicap auditif
étant donné qu'il existe une langue des signes internationale.
C. Les ateliers et visites spécifiques
Les outils de médiation adaptés intégrés tout au long du parcours de visite, que nous venons
d'étudier, sont plutôt destinés, d’une manière générale, aux visiteurs individuels en situation de
handicap, contrairement au matériel pédagogique créé spécifiquement pour les visites de groupes ou
organisées. Toutefois, il faut préciser qu'à la Basilique de Saint-Denis, cette mallette, étant à
disposition des animateurs du patrimoine, est également fréquemment utilisée pour une personne
individuelle en situation de handicap sensoriel.
Les outils présentés lors de ces ateliers sont généralement axés sur une approche spécifique
en lien avec le monument, et non sur l’édifice en lui-même. Ainsi, lors de ces ateliers, le groupe de
personnes en situation de handicap découvre la sculpture du Moyen Age à travers les gisants et les
tombeaux de la nécropole royale de Saint-Denis, tandis que c’est l’art de la tapisserie qui est
explorée au Palais du Tau.
En effet, la mallette multi-sensorielle de la Basilique Saint-Denis présente différents
éléments de la cathédrale, qui permettent de présenter l’évolution de la sculpture funéraire royale du
XIIème siècle au XVIème siècle, à travers différents moulages de taille réduite.
Tout d’abord, une maquette tactile du plan de la Basilique91 est présentée afin de donner une
vue d’ensemble sut le monument et de situer les tombeaux les plus emblématiques, grâce à une
matière particulière qui lui est associée et que l’on retrouve dans la légende à côté du nom de son
propriétaire en braille et en alphabet romain. Sur cette maquette, la partie du chœur et du chevet de
l’église se soulève, ce qui permet de découvrir le plan de la crypte funéraire.
Puis, une présentation des principales matières utilisées pour ces sculptures est effectuée de
manière à ce que les personnes participant à l’atelier puissent se familiariser avec l’aspect, aussi
91 Cf. annexe A, photo 18.
49IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
bien tactile que visuel du marbre, et de la pierre calcaire92.
Ensuite, les différentes reproductions miniatures des gisants sélectionnés sont sorties et
montrées aux visiteurs. Certains de ces petits moulages ont une activité qui leur est associé : le
gisant de Bertrand Du Guesclin possède des éléments de son armure à replacer dessus93, celui
d’Isabelle d’Aragon invite à lui rendre ses insignes de royauté et autres accessoires. D’autres sont
présentés avec un tombeau car ils font partie d’un ensemble monumental, ce qui est le cas des
transis de François Ier et Claude de France, dont les sculptures sont proposés individuellement ou
recouvert du monument funéraire entier.
D’autre part, 16 cartels explicatifs, ainsi qu’une fiche historique sont disponibles en braille
et en alphabet ordinaire, pour expliquer les évolutions constatés, en fonction des époques et des
commanditaires.
Mais, cette mallette multi-sensorielle, comme son nom l’indique, fait participer tous les sens
à l’atelier. L’ouïe sert à découvrir une sélection de musiques du Moyen Age à la Renaissance, pour
les personnes en situation de handicap visuel, tandis que l’odorat est sollicité pour reconnaître les
odeurs associés notamment aux cérémonies funéraires et donc à la Basilique Saint-Denis : l’encens,
largement utilisée lors des messes, et la cire d’abeille, dans laquelle sont confectionnés les cierges et
bougies en général94. Seul le goût n’est pas mis à contribution.
Cette exposition multi-sensorielle itinérante fut créée par Jacqueline Maillé,
l’administratrice du monument de l’époque, Serge Santos, responsable des publics spécifiques du
monument, un expert du Centre National de Recherche Scientifique, et des membres d’une
association représentative de personnes en situation de handicap visuel partenaire du projet,
l’Association Valentin Haüy. Elle fut réalisée en quatre exemplaires : l’une est gérée par
l’Association Valentin Haüy de Nice, qui la fait découvrir à d’autres association de la région, une
autre se déplace dans différents monuments du Centre des Monuments Nationaux pour une
programmation ponctuelle, et les deux dernières se trouvent dans la Basilique, l’une pour servir aux
visites et au ateliers, l’autre pour pouvoir être prêtée aux associations et institutions qui en feraient
la demande dans le but de pouvoir préparer ou approfondir la visite.
92 Cf. annexe A, photo 19.93 Cf. annexe A, photo 17.94 Cf. annexe A, photo 20.
50IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
La création de ces quatre mallettes, en 2008, a coûté près de 120 000 €, financé en partie par
le Centre des monuments Nationaux, en partie par la Région Ile-de-France et en partie par un
mécénat spécifique de la Caisse d’Épargne.
La mallette multi-sensorielle associée au Palais du tau, elle, est centrée sur la tapisserie et
son art, mais elle n’est pas associée uniquement au Palais archiépiscopal de Reims. En effet, cette
exposition présente des versions tactiles de plusieurs tapisseries se trouvant dans 12 sites différents,
dont 11 sont gérés par le Centre des Monuments nationaux :
- le château d’Angers,
- le palais du Tau,
- le château d’Aulteribe,
- le château d’Azay-le-Rideau,
- le château de Cadillac,
- le château de Carrouges,
- le château de Châteaudun,
- le palais Jacques Cœur à Bourges,
- le château de Gramont,
- le château de Montal,
- le château de Villeneuve-Lembron,
- ainsi que la manufacture des Gobelins à Paris.
Ainsi, une carte de France en relief, et donc tactile, est tout d’abord montrée de manière à ce
que les participants puissent situer les lieux où sont exposés les tapisseries, comme la tapisserie de
l’apocalypse à Angers, ou encore le couronnement de Clovis à Reims. Puis sont présentés différents
éléments liés à la pratique de tisser, tel que des échantillons tissés de plusieurs couleurs, des fils de
différentes matières, ou encore une maquette de métier à tisser95.
Ensuite, une fois que la technique a été abordée, ce sont les œuvres qui sont présentées aux
visiteurs. Alors, pour chaque œuvre, deux planches thermoformées sont exposées et peuvent être
touchées, l’une représentant l’œuvre entière, et l’autre indiquant quel endroit de la tapisserie â été
agrandie pour être reproduite en tableaux tactiles96. Puis les tableaux tactiles en question sont
dévoilés et peuvent être appréciés aussi bien tactilement que visuellement par les visiteurs
95 Cf. annexe C, photo 11.96 Cf. annexe C, photo 12.
51IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
participants à l’atelier97.
Les tapisseries qui ont été sélectionnées et ainsi présentées sont les plus emblématiques
historiquement, mais également les mieux conservées. Ainsi, on y trouve la tenture de
l’apocalypse98, du château d’Angers, qui est une des plus célèbres, le couronnement de Clovis,
Louis XIV visitant les Gobelins, ou encore la verdure aux chardons99.
Enfin, comme pour toutes les mallettes, l’ouïe et l’odorat sont également mis à contribution.
C’est pourquoi un CD est prévu pour fournir des explications sur la technique de tissage en général
et les tapisseries reproduites en particulier. Une boîte contenant les différents colorants les plus
fréquemment utilisés permet également de découvrir cette pratique de manière olfactive.
On voit donc bien que ces expositions multi-sensorielles sont destinées à tous les types de
handicap sensoriels, c’est-à-dire aussi bien aux personnes en situation de handicap auditif que celles
en situation de handicap visuel. En effet, le fait qu’elles fassent appel à plusieurs sens leur permet
d’être transposable : les visiteurs ne pouvant se servir de leur ouïe utiliserons les éléments destinés
au toucher, à la vue, et à l’odorat, tandis que les personnes ne pouvant compter sur leur vue,
développerons les activités liées à l’odorat, au toucher et à l’ouïe.
En tout, il existe cinq mallettes de ce type crées par le Centre des Monuments nationaux. La
première fut celle réalisée en 2003, sur le décor peint du cloître de la cathédrale de Fréjus, puis vint
celle sur les vitraux de la Sainte-Chapelle de paris un an plus tard. Ensuite, c’est celle de la
Basilique Saint-Denis qui est mise en place en 2008, la même année que celle centrée sur
l’architecture de l’abbaye de Cluny ainsi que sur la vie monastique au Moyen Age. Enfin, c’est la
mallette sur l’art de la tapisserie qui est créée en 2010.
Toutefois, on constate également une évolution dans la réalisation de ces mallettes puisque si
les premières éditions étaient centrées sur un édifice en particulier, la dernière édition, créée en
2010, présente une technique, celle de la tapisserie, en s’appuyant sur des exemples précis abrités et
exposés dans différents monuments du Centre des Monuments Nationaux. Or, en sachant que les
groupes de personnes en situation de handicap sont très peu à se déplacer à la Basilique-Cathédrale
de Saint-Denis, on peut supposer que la volonté des concepteurs de la dernière mallette était de
pouvoir la faire circuler dans différents monuments, de manière à ce qu’elle puisse potentiellement
97 Cf. annexe C, photo 13.98 Cf. annexe C, photo 14.99 Cf. annexe C, photo 15.
52IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
être utilisée de manière plus régulière, et à ce qu’elle touche géographiquement plus de gens. En
effet, si la mallette de Saint-Denis, présentant initialement la sculpture funéraire et ses évolutions,
avait choisis ses exemples auprès de gisants situés dans d’autres monuments à travers la France,
telle que l’abbaye de Fontevraud par exemple, elle aurait pu circuler et ainsi intéresser certaines
associations représentatives de personnes en situation de handicap basées dans la région des Pays de
la Loire.
Par ailleurs, en plus de ces éléments prévus et destinés à être utilisés au sein d’une visite, il
existe également deux collections d’ouvrages édités par le Centre des Monuments Nationaux, pour
permettre aux personnes en situation de handicap visuel ou auditif de préparer ou d’approfondir leur
visite. Ces outils se divisent donc en deux catégories : la collection Sensitinéraires, destinée aux
personnes déficientes visuelles, et la collection Lex’signes, créée pour les personnes utilisant la
langue des signes.
La collection Sensitinéraires permet une approche tactile et auditive de certains monuments
gérés par le Centre des Monuments Nationaux, tel que la Sainte Chapelle de Paris, le Panthéon, la
Cité de Carcassonne, l’Abbaye de Cluny, et bientôt le Château d’Angers et sa tenture de
l’apocalypse. Créée en 2005, cette collection a donc développé en très peu de temps de nombreux
ouvrages, tous assez complexes puisqu’ils présentent en moyenne une soixantaine d’images tactiles,
accompagnés de texte en braille et en gros caractère, ainsi qu’un CD audio. Le but de ces ouvrages
est donc de permettre au public visé d’appréhender, par un autre moyen que l’approche visuelle, le
patrimoine architectural français, à travers la découverte de sites emblématiques. Les dimensions,
les décors, les formes et les caractéristiques de chaque monument sont décrit grâce au CD et
expliqué à travers des planches tactiles réalisées en gaufrage, avec différents niveaux de reliefs.
La collections Lex’signes, quant à elle, a pour but d’enrichir la langue des signes française
d’un vocabulaire spécifique à l’histoire ou à l’histoire de l’art. En effet, au cours d’une visite d’un
monument historique il est fréquent que des mots incompréhensibles pour les non-initiés soient
utilisés car ils désignent des parties précises de l’architecture. C’est pourquoi, on sait que dans
toutes les brochures de monuments gérés par le Centre des Monuments Nationaux, un lexique est
intégré, afin de définir certains mots indispensables à la compréhension du site et du bâtiment qui
s’y trouve. Cette collection est donc élaborée par un groupe de travail composé de professionnels
sourds ou malentendants, tels que des guides conférenciers, et des linguistes. Trois ouvrages sont
déjà parus : un centré sur la Préhistoire, un autre sur l’Antiquité et un dernier sur le Moyen Age, le
prochain se concentrant sur la Renaissance. Ainsi, le Lex’signes concernant le Moyen Age pourrait
53IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
donc être utilisé à la fois pour préparer une visite de la Basilique Saint-Denis, mais également du
Palais du Tau, dont une partie date de cette époque.
Les handicaps sensoriels, qui regroupent le handicap visuel et le handicap auditif, ont donc
été, d'une manière générale, largement pris en compte dans les deux projets de mise en accessibilité
des monuments étudiés. Toutefois, on constate que les dispositifs destinés aux visiteurs en situation
de handicap visuel sont tout de même plus nombreux que ceux destinés aux personnes en situation
de handicap auditif. Mais, cela peut s'expliquer par la nature même du handicap, puisque la visite
d'un monument et de ses collections se fait en grande partie de manière visuelle, l'architecture ou
encore les statues étant des œuvres que l'on admire. Les visiteurs malvoyants ou non-voyants sont
donc dans une situation de handicap accrue dans un tel lieu, de la même manière qu'une personne
sourde serait plus gênée pour profiter d'un concert qu'une personne aveugle, car si l'on regarde
également ce type de spectacle, on l'écoute surtout.
Toutefois, malgré le soucis particulier du CMN de prendre en compte ces publics
spécifiques, et malgré la multiplicité des moyens à mettre en œuvre, il nous faut préciser qu’une
étude de Culture et Handicap conclut qu'en moyenne dans les lieux culturels, deux fois moins
d'activités sont proposées à ces visiteurs qu'au public handicapé moteur100.
D'autre part, il est clair que le parcours offrant la plus grande autonomie de visite est, une
fois encore celui du Palais du Tau, puisqu'à la Basilique Saint-Denis un agent d'accueil est requis ne
serait-ce que pour mettre à disposition la seule maquette tactile de l'édifice. Cependant, dans le cas
de la nécropole royale, la mallette multi sensorielle est sur place, ce qui permet de faire des visites
adaptées à tous les visiteurs en situation de handicap sensoriel, qu'ils soient en groupe ou
individuels. En effet, si en théorie il faut réserver pour avoir une visite sensorielle de la Basilique,
en pratique cette visite est dispensée à tous les visiteurs atteints d'une déficience visuelle ou
auditive, mais également mentale, à partir du moment où un animateur du patrimoine est disponible.
100 De Fonclare, A., Bonnin, L., Les sites culturels sur la voie de l'accessibilité pour tous, Revue Espaces, n°252, Paris,Octobre 2007, p. 40-47.
54IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Troisième partie : Les handicaps mentaux et psychiques
A. La définition et les spécificités de ces handicaps
1. La définition du handicap mental et du handicap psychique
Le handicap mental limite les capacités mentales des personnes qui en sont atteintes, et se
manifeste à travers des troubles, plus ou moins importants de la compréhension, de la réflexion, de
la communication, de la décision, et de la conceptualisation. Il consiste donc en une déficience
intellectuelle, qui se traduit par une incapacité d'adaptation aux exigences culturelles et sociales de
la société. Par déficiences intellectuelles, on entend donc une limitation significative, persistante et
durable des fonctions intellectuelles, caractérisé par un retard mental. Il est important de préciser
que les personnes illettrées, analphabètes ou ne maîtrisant pas la langue du pays dans lequel elles se
trouvent seront, tout comme les personnes atteintes de ce type de handicap, à la recherche
d'informations simplifiées, qu'elles soient visuelles ou sonores.
Dans ce mémoire, nous intégrerons au handicap mental le handicap psychique, dû à une
maladie psychotique ou névrotique, bien qu’ils soient tous deux très différents, car les outils de
médiation utilisés pour permettre à un groupe de visiteurs en situation de handicap mental
d’appréhender un monument sont les même que ceux utilisés pour les groupes de personnes
atteintes d’une maladie psychique. Ainsi, les capacités mentales et intellectuelles des personnes
atteintes de ce type de handicap restent intactes, mais sont perturbées par les symptômes de leur
maladie. En France, ces troubles touchent chaque année 1 million d'adultes et 500 000 jeunes.
Le handicap mental est en fait un des plus complexe à traiter, étant donné la multiplicité des
situations existantes, puisque c'est un handicap aux origines multi factorielles, parfois inconnues, et
qui peut atteindre une personne selon différents degrés. Trois types de facteurs interviennent
majoritairement dans la cause d'une déficience mentale : les facteurs organiques, psychologiques et
environnementaux. Toutefois, malgré cette disparité, on constate que la grande majorité des
personnes concernées présentes des difficultés de conceptualisation, d'orientation dans le temps et
dans l'espace, de communication, des problèmes de mémoire à court, moyen et long terme, ou
encore des angoisses entraînant parfois des troubles du comportement. Ces symptômes communs,
55IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
permettent d'identifier des besoins inhérents à ce type de handicap, desquels découlent la nécessité
de mettre en place certains dispositifs permettant de rendre accessible, d'une manière générale un
établissement culturel, et plus particulièrement ici un monument historique.
Or, la pratique culturelle est très importante pour les personnes en situation de handicap
mental ou psychique, tout d'abord parce que le fait de se déplacer sur un site culturel leur permet
d'entrer en contact avec d'autres membres de la société, ce qu'ils n'ont pas toujours l'occasion de
faire, surtout quand ils vivent dans des centre spécialisés, tels que des instituts médico-éducatifs ou
encore des services de psychiatrie. De plus, elle répond à un besoin particulier, qui est de s'inscrire
dans la vie sociale comme tout un chacun.
2. Le contexte légal et associatif
Le pictogramme associé au handicap mental est celui qui apparaît le moins souvent au sein
du document rédigé par l’association Tourisme & Handicap, destiné à rassembler toutes les
indications relatives aux aménagements indispensables à une labellisation. En effet, il n'est accolé
qu'à 9 préconisations, contre 19 pour le handicap moteur et 49 pour les handicaps sensoriels, qui
regroupent le handicap auditif et le handicap visuel. De la même manière, il est assez peu présent
dans les obligations légales auxquelles les établissements recevant du public doivent se conformer
avant la date du 1er janvier 2015, puisque l'on ne relève que deux phrases s'appliquant uniquement à
ce type de handicap. On pourrait donc en conclure que très peu de choses peuvent être faites afin de
rendre un espace ouvert au public accessible à ces visiteurs. Or, ce n'est pas le cas.
En fait, de nombreux aménagements servant aux visiteurs en situation de handicap mental
ou psychique servent également à d'autres formes de handicap, ou à d'autres publics. C'est pourquoi
toutes les fois où le pictogramme représentant le handicap mental apparaît dans le texte des critères
incontournables, il est associé à un autre type de handicap. De même, la grande majorité des
obligations légales s'appliquant à ces visiteurs concernent également un autre type de public
spécifique.
Ainsi, le fait de contraster une grande partie des éléments intégrés au parcours de visite
permettra, non seulement aux visiteurs malvoyants de distinguer ces éléments, mais également aux
personnes handicapées mentaux de se repérer tout au long du circuit. En effet, ces contrastes
aideront ces visiteurs à se sentir rassurer, en leur apportant des points de repère, et ce dans tous les
56IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
espaces visités. Donc si la couleur choisie n'a pas d'importance pour les visiteurs déficients visuels,
elle fonctionnera comme un code couleur qui s'appliquera de manière continue pour les personnes
déficientes mentales. On constate d'ailleurs, que dans le document de l'association Tourisme &
Handicap, si les contrastes préconisés le long des cheminements intérieurs et extérieurs sont d'abord
pensés pour l'accessibilité du handicap visuel, qui est le seul pictogramme à figurer à côté101, il est
précisé entre parenthèses que ce dispositif est également utile pour les visiteurs atteints d'une
déficience mentale. Par contre, au niveau légal, cette disposition n'est prévue que pour pallier à une
situation de handicap visuel puisqu'il est précisé, dans son article 2, que le repère tactile et
visuellement contrasté a pour but « de faciliter le guidage des personnes malvoyantes ».
De la même manière, l'installation de mains-courantes, qui sera très utile pour les personnes
en situation de handicap visuel, aura un effet rassurant sur les visiteurs en situation de handicap
mental. C'est une manière de leur suggérer le chemin à suivre. Ainsi, ils n'auront plus qu'à se laisser
guider le long de cette rampe, tout comme les personnes déficientes visuelles. Mais, cette fois-ci, le
document associatif n'associe pas du tout le handicap mental à cette disposition, considérée comme
utile uniquement aux personnes non-voyantes ou malvoyantes et aux personnes en situation de
handicap moteur. L'arrêté du 1er août 2006, lui, reste muet sur la destination de cet aménagement.
L'apparition d'obstacles au sein du circuit de visite peut également être une source d'angoisse
pour une personne atteinte d'une déficience intellectuelle, et ainsi provoquer une réaction
inattendue. Il est donc important de veiller à ce que les différents passages soient dégagés. Dans le
cas d'une impossibilité, il faudra signaler cet obstacle avec une couleur différente ou en l'entourant
d'une barrière de protection. Une fois encore, cette disposition qui est également utile pour les
personnes atteintes d'un handicap visuel, n'est pas considérée comme un critère incontournable pour
une labellisation du handicap mental, car l'association Tourisme et Handicap ne retient que l'utilité
aux personnes non-voyantes et malvoyantes102.
Enfin, l'éclairage est aussi un élément important pour ces publics spécifiques. En effet, s'il
permet à un visiteur en situation de handicap visuel de pouvoir distinguer les éléments du parcours
de visite, de manière plus ou moins imparfaite en fonction du degré de handicap dont il est atteint,
un éclairage bien maîtrisé permet aux personnes en situation de handicap mental de leur éviter de se
101 Les critères incontournables à la labellisation, Tourisme & Handicap : Les cheminements extérieurs et intérieurs (...)doivent être bien délimités tactilement et de couleur différenciées pour les personnes en situation de handicap visuel(également recommandé pour les personnes handicapées mentales).
102 Les critères incontournables à la labellisation, Tourisme & Handicap : Les obstacles susceptibles d'entraver lacirculation ou de représenter un danger pour les personnes en situation de handicap visuel (...) doivent êtreneutralisés.
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retrouver au sein d'une atmosphère ressentie comme angoissante. En effet, les zones d'ombres, les
éblouissements ou encore les contrastes trop violents peuvent provoquer une réaction inattendue
chez une personne atteinte d'une déficience intellectuelle. Il est donc important de privilégier les
éclairages indirects et diffus. Dans les obligations légales à respecter, rien n'est précisé sur la finalité
des mesures à mettre en œuvre pour l'éclairage. Il n'est pas précisé si elles sont destinées à une
situation de handicap spécifique ou si elles doivent être appliquées pour tous les visiteurs de
manière générale. Toutefois, on constate qu'il est clairement énoncé qu'une extinction de la lumière
doit se faire de manière temporisée et progressive. Ainsi, on peut penser que cette mesure s'applique
à tous, afin que la pupille des visiteurs puisse avoir le temps de s'habituer à l'obscurité, mais
également qu'elle est particulièrement recommandée pour les personnes en situation de handicap
psychique ou mental, afin qu'elles ne soient pas surprises de se retrouver brutalement dans le noir,
ce qui pourrait provoquer un sentiment de panique. Pour les critères incontournables, l'éclairage ne
concerne que le handicap visuel, et n'est utile à aucune autre situation.
Par ailleurs, tous les dispositifs permettant aux visiteurs de se repérer et de s'orienter au sein
du monument sont indispensables pour ces personnes. Pour rendre un monument physiquement
accessible aux personnes atteintes d'une déficience intellectuelle, il est donc très important de
faciliter le repérage des lieux, notamment avec une signalétique adaptée et uniforme sur l'ensemble
du site, puisque le fait de ne pas pouvoir se repérer au sein d'un espace peut créer une situation
génératrice d'angoisse. Cette signalétique, doit donc permettre à un visiteur atteint d'un handicap
mental de repérer immédiatement le point d'accueil ainsi la billetterie, afin de ne pas rester trop
longtemps confronté à un espace renfermant différentes informations éparpillées.
Une signalétique directionnelle qui doit également être mise en place tout au long du
parcours de visite, afin que les visiteurs ayant des besoins spécifiques puissent se diriger de manière
autonome. Mais elle doit être cohérente et harmonisée afin de ne pas déstabiliser les personnes
déficientes intellectuellement. Ainsi, on peut lire dans le document de Tourisme & handicap « qu'il
convient d'utiliser des pictogrammes simples et aisément compréhensibles », associés à des
« panneaux d'information (...) situés de façon homogène sur le site ». Or, ces préconisations sont les
premières que l'on cite et qui sont spécifiquement associées au handicap mental, avec le
pictogramme correspondant sur le côté.
On remarque donc que la très grande majorité des préconisations faites pour rendre
accessible un établissement aux personnes en situation de handicap mental, ont déjà étaient
développées pour d'autres types de handicap. Ainsi, les normes concernant la luminosité, l'absence
58IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
d'obstacles tout au long du parcours de visite, la mise en place de mains-courantes, l'utilisation des
contrastes visuels ou encore le fait de rédiger les informations écrites en gros caractères,
s'appliquent aussi au handicap visuel. De même, le doublage sonore des informations, a été évoqué
pour le handicap auditif, tandis que le revêtement des sols antidérapants, la gêne occasionnée par les
pentes trop abruptes, ou encore l'abaissement des comptoirs d'accueil et billetterie renvoi aux
dispositions nécessaires à l'accessibilité des personnes en situation de handicap moteur.
On peut donc en déduire qu'un parcours de visite qui serait totalement adapté à la fois au
handicap moteur, au handicap auditif et au handicap visuel, serait d'office accessible aux personnes
en situation de handicap mental et psychique, puisque ces visiteurs se servent des dispositifs
destinés aux autres visiteurs. Mais, il ne faut pas oublier que c'est le seul type de handicap qui altère
les capacités mentales. Il faudra donc prévoir une information spécifique, simplifiée avec des
phrases courtes et des mots compréhensibles par tous, que l'on pourra toutefois également utilisée
auprès des enfants.
Enfin, pour ce qui est du repérage géographique, il n'est ni abordé dans les préconisations de
l'association Tourisme & Handicap, ni dans le texte législatif. Toutefois, il est conseillé dans le
guide pratique de l'accessibilité destiné au handicap mental, d'utiliser la perspective cavalière pour
les plans, puisqu'en se rapprochant plus de l'esthétique de la maquette, elle offre une meilleur
compréhension que les plans au sol. De même, le recours à des pictogrammes pour situer certains
services sur un plan y est conseillé. Ils serviront aux personnes éprouvant des difficultés à lire, ainsi
qu'aux personnes ne maîtrisant pas la langue du pays dans lequel ils se trouvent.
B. Les manières de pallier à cette situation de handicap
1. Les installations
Comme nous l'avons développé précédemment, les installations permettant aux visiteurs
en situation de handicap mental ou psychique de se sentir allaise dans un monument historique,
correspondent aux installations destinées aux personnes en situation de handicap moteur, auditif et
surtout visuel. Ainsi, que ce soit au Palais du Tau ou à la Basilique de Saint-Denis, l'installation de
pentes douces pouvant être empruntées à la place des marches qui peuvent être, pour certaines
59IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
personnes, assez angoissantes, est utile à la fois aux personnes ayant des difficultés physiques, mais
également aux visiteurs ayant des difficultés psychologiques à franchir ces obstacles. De même, la
présence de mains-courantes le long des escaliers ou des pentes inclinées, au Palais du Tau comme à
la Basilique, a un effet rassurant pour les personnes atteintes d'une déficience mentale.
Par ailleurs, le fait que les cheminements intérieurs soient contrastés par rapport au reste
de l'espace au Palais du Tau, permet à ce public spécifique d'identifier plus facilement le parcours
de visite et de ne pas s'égarer dans le parcours de visite. A la Basilique Saint-Denis, les sols étant
également protégés, un circuit contrasté n'a pas pu être réalisé, d'autant plus que cela aurait gêné la
compréhension esthétique du monument.
D'autre part, la luminosité est également importante pour créer une atmosphère de
confiance dans un lieu inconnu des visiteurs en situation de handicap mental. Or, nous avons précisé
que la lumière était maîtrisée par des stores au Palais archiépiscopal. Ces stores auront donc une
triple efficacité puisqu'ils permettront de contrôler la lumière qui éclaire les espaces visités à la fois
pour les personnes en situation de handicap visuel, mais également pour la préservation des tentures
exposées dont les couleurs ne supporteraient pas longtemps un éclairage trop intense, et enfin pour
les visiteurs en situation de handicap mental, afin de pas les agresser avec une luminosité
éblouissante, mais sans les plonger non plus dans une certaine obscurité qui pourrait être
inquiétante. Or, à l'intérieur de la Basilique, la lumière est déjà atténuée grâce aux vitraux colorés
présents dans les baies du monument. La mise en place de stores, rideaux ou volets priverait donc
les visiteurs de ce spectacle, d'autant plus que ce ne serait pas efficace, puisque ces dispositifs
diminueraient encore l'intensité lumineuse à l'intérieur du monument, qui n'est déjà pas très élevée.
Dans la crypte, des lumières tamisées permettent d'éclairer les salles naturellement très obscures.
Enfin, l'utilisation de pictogrammes clairs et contrastés est également importante pour ce
public comme pour les visiteurs malvoyants ou les touristes étrangers. On voit donc que cette
réflexion a été intégrée aux travaux menés au Palais du Tau, puisque la flèche située sur le côté de la
porte d'entrée103 permet, à la fois aux visiteurs malvoyants, mais aussi aux personnes atteintes d'une
déficience mentale de repérer immédiatement l'accès au hall d'accueil. Par contre, à la Basilique de
Saint-Denis, aucun pictogramme ne permet d'identifier l'entrée dans le bâtiment, ou le point
d'accueil104, contrairement à la signalétique directionnelle mise en place, qui est non seulement
contrastée mais également clair et rédigée en gros caractères.
103 Cf. annexe C, photo 6.104 Cf. annexe A, photo 21.
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2. Les outils de médiation adaptés
Il est communément admis que les personnes en situation de handicap mental ou
psychique possèdent une sensibilité spécifique et souvent bien plus développée que les personnes
ordinaires. Il parait donc approprié de prévoir des outils de médiations faisant appels aux différents
sens que nous possédons, car ces visiteurs seront particulièrement réceptifs face à ce type
d'approche.
Pour ce qui est de la localisation et du repérage géographique, s'il est conseillé de
privilégier la perspective cavalière pour les plans des bâtiments, puisqu'elle offre un intermédiaire
entre le plan et la maquette, c'est directement la forme de maquette qui a été retenue, aussi bien à la
Basilique de Saint-Denis qu'au Palais du tau. Ainsi, les différentes maquettes tactiles mises à
disposition des visiteurs au sein des deux monuments étudiés permettront aux personnes atteintes
d'une déficience mentale de mieux comprendre la configuration du bâtiment dans lequel ils se
trouvent et ainsi de pouvoir se situer à l'intérieur.
Par ailleurs, toutes les informations auditives permettront, grâce à une cohérence entre
ces dernières et les informations visuelles et tactiles, d'assimiler certains concepts et ainsi
d'appréhender dans les meilleures conditions possibles la visite et les connaissances qui y sont
associées. Ainsi, les différents films explicatifs diffusés au Palais du Tau comme à la Basilique
Saint-Denis, captent largement l'attention de ces publics, ce qui développe leur intérêt pour le
monument, et qui, de manière générale, les incitent à se concentrer sur une source d'information
précise, afin d'éviter tout éparpillement de leur attention. Toutefois, au sein de la nécropole royale
aucune information sonore spécifique n'est prévue pour les personnes en situation de handicap
mental ou psychique, puisque les maquettes ne possèdent pas de commentaires audio intégrés, et les
audio-guides n'ont pas un contenu simplifié adaptable à cette situation. Seuls les ateliers
pédagogiques prévoient un contenu adapté au handicap mental dans ce monument.
On voit donc bien que la mise en accessibilité de la Basilique de Saint-Denis n'a pas
réellement développé les outils de médiation qui permettraient à des visiteurs en situation de
handicap mental ou psychique d'effectuer une visite individuelle, et cela de manière autonome,
contrairement au projet de mise en accessibilité du Palais du Tau, qui à travers ces installations
destinées à d'autres types de handicap, facilite une telle pratique. Pourtant, on sait que la Basilique
61IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
de Saint-Denis a été labellisée pour le handicap mental. On peut alors supposer que cette
labellisation a plus été accordée pour les ateliers organisés pour ce public, plutôt que pour le
parcours de visite individuel.
Cependant, il faut préciser que ces sorties culturelles sont, en pratique, très souvent
organisées en groupe, par des associations ou des éducateurs spécialisés, et beaucoup plus rarement
par des personnes individuelles en totale autonomie. Les visites guidées et ateliers spécialisés ont
donc une importance toute particulière dans la mise en accessibilité d'un monument historique à la
situation de handicap mental.
3. Les ateliers et visites spécifiques
En théorie, il est fortement conseillé d'organiser une réunion préparatoire entre les
médiateurs culturels et les responsables de groupe, afin de déterminer les thèmes qui seront abordés
et les attentes liées à cette visite. Ce sera également l'occasion de prévenir le conférencier de toute
situation particulière, de manière à éviter que le guide se retrouve démuni face à une réaction
inattendue. D'autre part, il est également recommandé, au moment de cette rencontre, d'organiser
une visite préalable de l'établissement, afin que les organisateurs se familiarisent avec les lieux et
puissent avoir une idée du déroulé de la visite, leur permettant ainsi d’anticiper tout problème.
Enfin, la mise à disposition, en amont de la visite, du matériel qui y sera présenté, permettra aux
futurs visiteurs de se familiariser avec et ainsi de préparer l’atelier avec l'aide d'un éducateur
spécialisé ou d'un enseignant. Or, on sait que la Basilique Saint-Denis possède deux mallettes multi-
sensorielle qui servent d'outils pédagogiques pendant les visites de groupes de personnes
handicapées mentales. C'est justement dans ce but que cette mallette a été réalisée en plusieurs
exemplaires, afin de pouvoir en prêter une aux institutions ou associations représentative de tout
type de handicap qui le demanderait. Mais dans les faits, elle n'a quitté la Basilique que très peu de
fois.
Dans le cas où un déplacement d'un des membres de l'équipe d'encadrement n'est pas
possible, une fiche de renseignements remplie, reprenant les informations indispensables au bon
déroulement de l'atelier, devrait être transmise à l'établissement culturel chargé d'effectuer la visite.
Or, dans la pratique, on constate qu'un réel problème de compréhension existe entre les
acteurs culturels et les personnes responsables de groupes de personnes handicapées mentale, telle
62IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
que les éducateurs ou enseignants spécialisés. En effet, Annie Coutantic, animatrice de visites
adaptées aux publics spécifiques à la Basilique Saint-Denis, déplore le fait que dans la plupart des
cas ces groupes viennent sans prévenir au préalable, ou en minimisant largement le degré de
handicap dont les membres du groupe sont atteints. Ainsi, les conditions de visite du groupe ne sont
pas optimum, car si le handicap est minimisé, la visite dispensée ne peut être adaptée aux réels
besoins de l’auditoire. De la même manière, si le créneau de visite n’est pas réservé, il y a de fortes
chances pour que la personne en charge d’animer l’atelier soit déjà occupée auprès d’un autre
groupe, comme un groupe scolaire par exemple. De plus, comme nous l'avons expliqué
précédemment, en dehors du fait de prévenir l'équipe du site culturel, il est très important de
préparer ce type de visite en amont avec les accompagnateurs responsables de la gestion du groupe,
afin de connaître les points de vigilance particuliers éventuels, et de définir les attentes et besoins
des différents membres du groupe.
Malgré cette évidence, si la plupart des responsables de groupe ne préviennent pas de
leur visite alors qu'ils connaissent l'importance de cette préparation en amont, c'est tout simplement
parce qu'ils anticipent le fait que les équipes du monument leur refusent la visite sous prétexte
qu'aucun outil de médiation en place n'est adapté à ce type de handicap ou que le personnel
d'accueil n'est pas formé pour cela. Ainsi, Corinne Sauvadé, chef de service de l'Institut Médico-
éducatif Les peupliers, expliquait qu'après avoir essuyé de nombreux refus au sein de différents
établissements culturels de la région parisienne, elle préférait maintenant se présenter sans prévenir
et réaliser la visite guidée elle-même.
Toutefois, quelques institutions, ayant l'habitude de travailler avec l'équipe de la Basilique
Saint-Denis préviennent de leur intention de visiter le site, et quand des groupes arrivent tout de
même sans avoir prévenue, la mallette multi-sensorielle, à disposition est également utilisée.
En effet, le fait de pouvoir toucher, sentir, gouter ou écouter, en plus de regarder les objets
ou scènes dont il est question améliorera les capacités de concentration d’une personne déficiente
mentale. Ainsi, le visiteur atteint d'un handicap mental pourra retenir plus facilement ce qu'il aura
appris lors de la visite, qui ne relèvent pas forcément des connaissances historiques, ou artistiques,
mais qui est plus souvent une manière de faire ou d'être : identifier les informations, reconnaître les
comportements ou encore interagir avec les autres. Enfin, le fait de les faire participer et ainsi
d'avoir une position active au sein du groupe, participe à un apprentissage social de la vie, en leur
demandant d'appliquer certaines règles de vie en communauté, et cela en dehors de leur cadre de vie
habituel.
63IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Alors, les membres du groupe découvrent le gisant de Bertrand Du Guesclin et certaines
parties de son armure à repositionner par-dessus, le tombeau de François Ier et de Claude de France,
une maquette tactile de la nécropole permettant de localiser les différentes tombes, de la même
manière que les visiteurs en situation de handicap visuel ou auditif le feraient. Mais, une autre partie
de cette mallette a spécialement été pensée et créée pour les personnes en situation de handicap
mental, ce sont les 18 planches de bande dessinées qui sont un outil ludique pour découvrir les
principaux personnages liés à ce monument. Des personnages historiques, tels que Saint Denis105,
Dagobert, ou encore Catherine de Médicis, mais aussi des personnes importantes pour l'histoire de
l’art, comme Viollet-le-Duc qui a restauré le monument au milieu du XIXème siècle, ou Alexandre
Lenoir qui a sauvé certains tombeaux royaux du vandalisme révolutionnaire sont alors présentés.
Sur ces plaquettes l'information est largement simplifiée de manière à ce que les participants à
l'atelier ne soient pas submergés d'informations qu'ils ne comprendraient qu'en partie afin qu'ils ne
retiennent que l'essentiel.
Au contraire, on constate qu’aucune médiation spécifiquement adaptée à ce handicap ne
complète la mallette présentant l’art de la tapisserie. En fait, ces planches de bande dessinées
n’existent qu’à la Basilique de Saint-Denis, et ont été développés par certains membres de l’équipe
du monument, en même temps que le reste de la mallette.
Le handicap mental est donc la situation de handicap la plus difficile à pallier, et
paradoxalement on constate que c'est le type de handicap pour lequel les aménagements spécifiques
sont le moins nombreux. En fait, la mise en accessibilité d'un monument historique, et plus
généralement d'un site culturel, au handicap mental se fait à travers les mesures prévues pour les
autres types de handicap, ou pour les enfants. Or, si ces dispositifs leur permettent d'appréhender
beaucoup plus facilement la visite de ces monuments, ils ne sont pas encore complètement adaptés à
leurs attentes et besoins propres. Ainsi, ni le Palais du Tau, ni la Basilique Saint-Denis n'ont mis en
place des bandes de couleurs colorés permettant d'identifier, grâce à un code, que telle couleur se
rapporte à telle partie du bâtiment, comme on peut le voir par exemple à la Cité des Sciences de
Paris. Or, on peut supposer que si ces dispositifs n'ont pas été mis en place c'est en partie parce
qu'ils serviraient uniquement aux personnes en situation de handicap mental.
105 Cf. annexe A, photo 22.
64IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Conclusion
Tout d'abord, une chose ressort très clairement de notre travail de recherche : le fait que le
label Tourisme & Handicap se pose en complément de l'arrêté ministériel du 1er août 2006 qui reste
parfois assez imprécis. En fait la loi est loin d'être exhaustive en termes de dispositions à mettre en
œuvre et d'aménagements à réaliser pour rendre accessible un site. Malgré cette volonté de
compléter les dispositions légales, les critères incontournables de l’association entrent parfois en
contradiction avec la loi. Ainsi, les préconisations touchant à l'intensité de l'éclairage, ou encore à la
largeur des cheminements dits « accessibles » ne sont pas du tout harmonisées, ce qui ajoute une
difficulté à la démarche entreprise. Pour que ces critères ou règles légales puissent être pris en
considération sans ambiguïté, il faudrait une coordination effective entre les deux. Dans les faits,
ces préconisations sont plutôt interprétées comme des axes de réflexion, autour desquels les projets
de mise en accessibilité devront s'articuler, tout en développant de nouvelles pratiques qui ne seront
pas exigées légalement mais qui demeureront à l'initiative des acteurs concernés. Ces pratiques, si
elles s'avèrent efficaces, pourront alors être diffusées afin que d'autres acteurs engagés dans la
même démarche puissent s'en inspirer.
Dans cette optique, différents types de reconnaissance des initiatives prises par les sites
culturels en matière d'accessibilité ont émergé, et cela sous diverses formes. Ainsi, le « Recueil des
belles pratiques et des bons usages », créé par le Ministère de l'Écologie, du Développement durable
et de l'Énergie, récompense depuis peu les réalisations exemplaires en matière d'accessibilité. Les
projets sélectionnés sont inscrits dans ce recueil, de manière à être diffusés auprès des acteurs de
l'accessibilité et ainsi partager l'expérience acquise. Il rassemble des exemples aussi divers que des
projets d'accessibilité qui émanent d’établissements recevant du public, des secteurs du logement,
de la voirie ou encore des transports. Cette année, c'est le Palais du Tau qui fut lauréat dans la
catégorie ERP106. En effet, on sait que le projet mené par le Centre des Monuments Nationaux au
Palais du Tau a été réalisé dans le cadre d’une démarche de développement durable. Les entreprises
associées aux travaux bénéficiaient toutes d’une norme ISO107 qui définit les lignes directrices à
suivre par toute organisation cherchant à avoir un comportement éthique, notamment en se
responsabilisant vis-à-vis de ses impacts sur l'environnement et la Société. De plus, tous les
éclairages installés sont à basse consommation, de la même manière que tous les documents de
visite sont imprimés sur du papier recyclé provenant de forêts gérées de façon durable. Enfin, les
sacs plastiques utilisés par la boutique sont oxobiodégradables. Ces quelques exemples montrent
106 Établissement recevant du public.107 International Organization for Standardization.
65IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
que l'équipe du Palais du Tau, parallèlement à cette mise en accessibilité, s'est engagée dans une
démarche éco-responsable.
D'autre part, on voit apparaître dans le paysage associatif les trophées d'accessibilité qui ont
également pour objectif de valoriser les bonnes pratiques et les réalisations exemplaires. Mais ici,
c'est l'ensemble de la chaîne d'accessibilité qui est mise en valeur. Co-organisés par le Conseil
National Handicap et l'association Accès pour tous, ces trophées récompensent les démarches et
initiatives qui s'inscrivent dans la durée, et qui traduisent ainsi une véritable évolution des
comportements vis-à-vis du traitement réservé aux personnes en situation de handicap. Huit
trophées sont décernés chaque année, et en 2012, le Palais du Tau a reçu celui dévolu aux ERP.
On voit donc bien, à travers des associations telles que Tourisme & Handicap ou Accès pour
tous, l'importance de la démarche associative au sein du mouvement d'accessibilisation des villes,
même si on constate que l'État y est de plus en plus associé, notamment à travers ses différents
ministères. Ces associations représentatives de personnes en situation de handicap ont été, comme
nous l'avons vu au cours de notre étude, largement associées aux deux projets de mise en
accessibilité, d'une part en participant à des réunions afin de définir les principes du projet mis en
œuvre au Palais du Tau, et d'autre part en participant à l'élaboration de la mallette multi-sensorielle
de la Basilique de Saint-Denis. C'est pourquoi le partenariat du Centre des Monuments Nationaux
avec cinq grandes associations est important, car il permet de mener des démarches participatives,
permettant d’éviter la création d’aménagements dont les personnes en situation de difficulté seraient
exclues, comme au Musée du Quai Branly par exemple, où tout le projet de construction avait été
pensé « accessible », mais qui s'est finalement révélé en pratique être un échec.
De plus, on constate que la tendance est à la valorisation d'un projet complet faisant partie
d'une chaîne d'accessibilité au sein de laquelle chaque maillon contribue à une meilleure qualité
d'usage. D'ailleurs, le label Tourisme & Handicap lui-même s'inscrit dans ce mouvement puisque
l’année 2010 a vu la création du label « Destination pour tous », qui valorise des territoires entiers
engagés dans une démarche d'accessibilité et qui souhaitent la développer à l'avenir. Ces
destinations mènent donc à leur échelle une réflexion globale sur l’accessibilité, et développent des
projets coordonnés et harmonisés sur l’ensemble de ce territoire.
Ensuite, il est évident aux vues des différents textes que nous avons étudiés, que tous les
handicaps ne sont pas traités à parts égales, aussi bien par le label que par la loi. Pour expliquer cet
état de fait, nous avons avancé quelques hypothèses permettant de comprendre par exemple le fait
66IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
les dispositifs liés à une déficience visuelle étaient bien plus nombreux que ceux liés au handicap
auditif. Mais ces éléments de réponse ne suffisent pas, car on sait également qu'au sein des lieux
culturels en général, deux fois plus de parcours sont adaptés aux visiteurs à mobilité réduite qu'aux
personnes en situation de handicap sensoriel. Or, le grand oublié de ces mises en accessibilité est,
comme nous l'avons précisé, les handicaps mentaux et psychiques. On peut supposer que la
surreprésentation des autres types de handicap face à ce dernier est due, en partie du moins, au fait
que les moyens pensés pour atténuer les difficultés liées à une déficience intellectuelle se recoupent
presque tous avec la mise en accessibilité des autres handicaps, tel que le visuel ou le moteur. Mais,
cela ne suffit pas à tout expliquer. En effet, c'est également la méconnaissance profonde de ce type
de déficience et les difficultés qui y sont liées, dues à la grande diversité de situations existantes, qui
permet également de comprendre cette situation. Un travail dans ce sens nous semble donc essentiel
pour la réalisation des futurs projets d'accessibilité, tout comme pour l'amélioration de ceux
existants, qui pourra en grande partie s'appuyer sur le Guide d'accessibilité édité par le Ministère de
la Culture et de la Communication. Cet ouvrage présente d’une manière générale le handicap
mental et donne des exemples précis de certaines réalisations effectuées dans d’autres
établissements culturels.
De la même manière, la plupart des écrits ou des récompenses qui encouragent les
démarches de mise en accessibilité ont pour but de diffuser le plus largement possible des axes de
réflexions menées autour de cette question, et de partager l'expérience acquise au sein de différents
lieux. En fait, il faut garder à l'esprit que chaque situation est particulière, et à plus grande raison
quand il s'agit de monuments historiques. C'est pourquoi des exemples précis sont sélectionnés et
diffusés, afin que chacun puisse identifier de manière précise les dispositifs qui pourraient être
appliqués, en totalité ou en partie, à sa situation précise. Appliquer la loi ne signifie donc pas avoir
rendu accessible un bâtiment, mais bien au contraire avoir mis en place les dispositifs minimum
permettant au public en situation de handicap de pouvoir commencer à appréhender un monument.
Le perfectionnement de cette accessibilité doit être constant, et amélioré en fonction des évolutions
constatées au sein de la Société, mais également au sein d’autres sites culturels. Ainsi, on voit bien
que la Basilique de Saint-Denis, monument pour lequel nous avons le plus de recul, le projet de
mise en accessibilité s'est conduit sur plusieurs années, puisque c'est en 2004 que l'élévateur
donnant accès à la crypte du monument fut installé, tandis que la mallette multi-sensorielle n'a été
réalisée qu'en 2008. Cet engagement sur la durée révèle bien un souci de perfectionnement de la
part de l'équipe du monument, indispensable à une mise en accessibilité globale d'un lieu.
67IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
Or, cette mise en accessibilité globale nécessite des budgets conséquents, notamment pour
tous les aménagements lourds permettant d'accessibiliser physiquement un lieu, mais également
pour l'installation de certains outils de médiation innovants, qui font largement appel aux nouvelles
technologies. La différence des budgets alloués aux deux projets étudiés explique donc en partie le
fait que les résultats obtenus soient si contrastés. En effet, l'accessibilité de la Basilique de Saint-
Denis est bien plus partielle que celle mise en œuvre au sein du Palais du Tau, où le parcours de
visite a totalement été repensé, ce qui a été permis grâce à des travaux importants. Au contraire, à
Saint-Denis, les installations ont étés intégrées au parcours préexistant, ce qui n'a pas permis
d'harmoniser le circuit destiné aux personnes à mobilité réduite, avec celui destiné aux visiteurs
ordinaires. Le contexte de conception et de réalisation de chaque projet, induisant la hauteur des
budgets alloués, mais également les moyens mis en œuvre pour le mener à bien, expliquent donc
cette disparité.
D'autre part, on relève également une différence dans les réflexions mêmes menées autour
de ces deux projets, celui plus récent du Palais du Tau s'inscrivant au sein de problématiques plus
actuelles, telles que le développement durable ou encore la mise en place d'une véritable chaîne
d'accessibilité. Cependant, d'autres problèmes sont soulevés par la mise en accessibilité du Palais du
Tau, telle que la condamnation de la chapelle haute. Ainsi, celle-ci a été supprimée du parcours de
visite des personnes mobiles, de manière à ce que le monument puisse répondre aux exigences
légales de non-discrimination sans avoir à installer des mesures de compensations. Il faut donc
garder à l'esprit que le monument accessible idéal n'existe pas, chaque solution choisie pouvant faire
l'objet d'un débat.
Enfin, un dernier élément, assez surprenant ressort de notre travail de recherche : le fait que
les touristes étrangers sont totalement écartés de la mise en accessibilité des deux monuments
étudiés, mais également, d'une manière plus générale de tous les monuments gérés par le Centre des
Monuments Nationaux. Seuls les visiteurs étrangers en situation de handicap auditif peuvent
bénéficier d'une visite en langue des signes internationale, mais pour cela ils doivent la réserver un
mois à l'avance. Or, quel touriste réserve une visite adaptée un mois avant de se déplacer dans un
autre pays ? Les autres personnes étrangères en situation de handicap doivent maîtriser le français
pour visiter les monuments du CMN, en excluant les visiteurs atteints d'une déficience motrice,
pour lesquels le problème ne se pose pas puisque, si la visite leur est accessible, les cartels
explicatifs sont traduits en différentes langues. On sait que le Centre des Monuments Nationaux
gère les sites les plus emblématiques du patrimoine français, qui accueillent à ce titre une large part
de public étrangers. Ces derniers devraient donc être automatiquement pris en compte dans tous les
68IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
projets de médiation menés à bien.
De plus, la France est un des pays fondateur de l'Union Européenne, et si pour le moment
aucun règlement européen ne s'applique en ce qui concerne l'accessibilité, la tendance est tout de
même à l'uniformisation des lois, allant toutes dans le sens de l'égalité des conditions d'accès à la
culture au niveau européen. Ainsi, la gratuité appliquée aux visiteurs ayant moins de 26 ans dans les
musées et monuments historiques français a dû être étendue à tous les ressortissants de l'Union
Européenne, car Bruxelles a estimé que si cette mesure ne s'appliquait qu'aux résidents français il y
avait discrimination. On peut donc s'attendre à ce que la Cour européenne statue également sur les
conditions de la mise en accessibilité du patrimoine français, et plus généralement des
établissements recevant du public, afin que tous les européens soient pris en compte. D’autant plus
qu'une telle décision irait dans le sens du mouvement d'accessibilité universelle, qui se définit par
« l'accès à tout pour tous ».
Sans compter que dans le contexte actuel mondial, où l'on voit émerger des classes sociales
moyennes dans de nombreux pays comme la Chine, ou encore le Brésil, et dont beaucoup viennent
visiter l'Europe, ne pas prendre en compte la part de ces populations en situation de handicap, pose
un réel problème auquel il faudra remédier tôt ou tard. Or, à ce moment il faudra changer tous les
cartels et films qui seront encore récents, ce qui coûtera forcément plus cher que si le braille en
langue étrangère ou les traductions en langue des signes internationale y avaient été intégrés
d'office. Ainsi, on peut dire qu'une anticipation de l'évolution des règles d'accessibilité aurait été
moins coûteux et en accord avec la mission de diffusion du patrimoine délégué au Centre des
Monuments Nationaux, qui ne s'arrête bien sûre pas aux frontières de l'hexagone.
Cependant, il faut reconnaître que d'une manière pratique, il serait assez compliqué de
traduire tous les cartels explicatifs à la fois en langues étrangères, mais également en braille français
et en braille anglais, espagnol ou allemand. Alors, la somme d'information que pourrait contenir un
cartel de ce type, qui n'est pas extensible à l'infini, serait largement réduite, ce qui poserait la
question du passage de la diffusion au grand public à la simplification à outrance, en empruntant
des raccourcis peu rigoureux. De plus, la multiplication des langages utilisés pour délivrer une
information précise nuirait à la clarté du dispositif. Or, on sait que d'une manière générale, si les
dispositifs d'informations ne sont pas clairs, ils sont rarement lus ou écoutés. Toutefois, nous
pensons qu'il aurait été possibles de mener une réflexion sur le sujet, qui aurait conduite à
l'identification de certaines solutions, avec un code couleur par exemple, permettant d'intégrer les
touristes étrangers aux différents projets de mise en accessibilité.
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Mais, si cette réflexion n'a pas été menée, c'est peut être, non pas parce que les personnes
ayant élaborées ces projets ne se sont pas posé la question, mais parce que la part de visiteurs
étrangers en situation de handicap est si faible qu'il n'a pas été considéré comme utile d'intégrer ce
public au projet. En effet, on retrouve cette idée dans la loi du 11 février 2005, qui précise qu'une
dérogation à une mise en accessibilité peut être accordée s'il est prouvé qu'il existe des
« disproportions manifestes entre les améliorations apportées et leur conséquences ». Or, on sait que
la part de visiteurs en situation de handicap est très faible à la Basilique de Saint-Denis, malgré les
aménagements mis en place, comme nous le confirmait Serge Santos lors de notre entretien. On
peut donc logiquement supposer que le nombre de visiteurs étrangers en situation de handicap
sensoriel ou mental est vraiment minime, voire nulle.
D'autre part, le label Tourisme & Handicap, dont le nom comporte le mot « tourisme »
n'intègre pas du tout cette réflexion au sein de ses exigences indispensables à une labellisation. Les
touristes étrangers en situation de handicap sont donc écartés, à travers les préconisations de
l'association référente dans ce domaine, les dispositions prévues par la loi, mais également par les
pratiques qui se développent, de la mise en accessibilité générale en France.
On peut donc légitimement se demander si un site culturel, touristique par essence, peut se
contenter de respecter les dispositions découlant de la loi de 2005, ou doit tenter d'aller plus loin, en
s'inscrivant notamment dans une volonté de développement durable, ou encore s'ancrant dans un
contexte plus large, européen et même mondial ?
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II. Les articles et revues :
DELVOLVÉ, P., Un statut très particulier: les statuts des architectes en chef des monuments
historiques (décret n° 2007-1405 du 28 septembre 2007), Revue Française de Droit
administratif, n°6, Paris, 2007, 1227 p.
DE FONCLARE, A., BONNIN, L., Les sites culturels sur la voie de l'accessibilité pour
tous, Revue Espaces, n°252, Paris, Octobre 2007, p. 40-47.
FRIER, P-L., Le cadre juridique de l'aménagement intérieur des cathédrales, Revue Les
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Petites Affiches, n° 111, Paris, 1994.
GIVRY, L., Comprendre le handicap pour appliquer la loi, Le Moniteur, 6 décembre 2006.
L'union sociale pour l'habitat, Prendre en compte le vieillissement et le handicap dans les
interventions sur le patrimoine, coll. d'actualités habitat, éd. les cahiers, n°98, septembre
2005.
MORAND-DEVILLER, J., Les procédures spécifiques de protection du patrimoine culturel,
Rev. adm., Paris, 1985.
MORAND-DEVILLER, J., Protection du patrimoine architectural, le débat esthétique
n'aura pas lieu, Revue Française de Droit administratif, n° 2, Paris, 1994, 310 p.
PARENT, M., La problématique du patrimoine architectural légal, les « monuments
historiques », Revue art, n° 49, 1980, 84 p.
PONTIER, J-M., La protection du patrimoine monumental, Revue Française de Droit
administratif, Paris, 1989, p. 757.
PONTIER, J-M., Le statut et le pouvoir des architectes en chef des monuments historiques,
Revue la semaine juridique, Paris, 2009.
PONTIER, J-M., Monuments historiques: une nouvelle étape, l'assistance à maîtrise
d'ouvrage, Revue la semaine juridique, Paris, 2001.
Recevoir les handicapés, Musées et collections publiques de France, bulletin trimestriel de
l'association générale des conservateurs de collections publiques de France, Paris, 1997,
n°214. (évoque l'invention de l'accessibilité)
III. Les mémoires et thèses :
FORNEROD, A., Le régime juridique du patrimoine culturel: affectation cultuelle,
protection et valorisation des édifices cultuels monuments historiques, thèse, univ. Paris-Sud
11, Faculté Jean Monet, 2006.
IV. Les conférences et colloques:
DREYER, Pascal (sous la direction de), Créer, recréer le musée. Mémoire, patrimoine et
création: le rôle et la place des personnes handicapées dans les musées, Actes du colloque
21-23 juin 1995, Handicap International, Lyon, 1997, 216 p. (introduction sur la notion de
handicap et des publics handicapés, réflexion sur les thèmes du patrimoine)
ORSINI, Florent, La mise en accessibilité du patrimoine bâti protégé, Salon du patrimoine
2011.
73IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
V. Les sites internet:
Le site de la Mitra :
www.pro.rhonealpes-tourisme.com/thematique, consulté pour la dernière fois le
15 janvier 2012.
Le site Tourisme et handicap : www.tourisme-handicaps.org/, consulté pour la dernière fois
le 3 septembre 2012.
Le site du Centre des Monuments Nationaux : www.monuments-nationaux.fr, consulté pour
la dernière fois le 16 août 2012.
Le site du Centre des Monuments Nationaux destiné aux publics handicapés :
www.handicap.monuments-nationaux.fr, consulté pour la dernière fois le 2 septembre 2012.
La brochure du Centre des Monuments Nationaux sur le Palais du Tau :
http://www.monuments-
nationaux.fr/fichier/m_docvisite/63/docvisite_fichier_05A.palais.du.tau.F.pdf, consulté pour
la dernière fois le 26 août 2012.
Le rapport d'activité 2012 du Centre des Monuments Nationaux :
http://www.west-info.eu/files/document_dossier_fr_dp.mpt_.valida.pdf, consulté pour la
dernière fois le 30 août 2012.
La commission nationale culture et handicap, consultable en ligne :
http://www.culture.gouv.fr/culture/actualites/communiq/donnedieu/DPhandicap.pdf,
consulté pour la dernière fois le 15 mai 2012.
La présentation des outils de médiations adaptés du Centre des Monuments Nationaux :
http://handicap.monuments-nationaux.fr/fr/Menu_generique/produits-adaptes/outils-d-aide-
a-la-visite/#para_nb_6, consulté pour la dernière fois le 5 septembre 2012.
L'arrêté du 1er août 2006, fixant les dispositions prises pour l'application des articles R. 111-
19 à R. 111-19-3 et R. 111-19-6 du code de la construction et de l'habitation relatives à
l'accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public et des
installations ouvertes au public lors de leur construction ou de leur création, consultable en
ligne :
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000821682&dateTex
te=&categorieLien=id, consulté pour la dernière fois le 5 septembre 2012.
74IREST – Paris 1 / Master Professionnel « Tourisme » M2 GSVT / Mémoire 2012 – Laure Tabariès
CONTACTS ET ENTRETIENS EFFECTUÉS :
APF : Association des Paralysés de France :
Contact : [email protected]
Marie-Claire Sourdillon : [email protected] : entretien non enregistré
AVF : l'Association Valentin Haüy
Jacques Fournier : [email protected] : contact téléphonique
Martine Scalabre : [email protected] : contact téléphonique et rencontre
CMN : Centre des Monuments Nationaux
[email protected] : entretien non enregistré
[email protected] : entretien enregistré
[email protected] : entretien non enregistré
[email protected] : échange de mails
Annie Coutantic : rencontre à la Basilique de Saint-Denis
Sylvie Koch : contact téléphonique
Michel Pérugien : rencontre à la Basilique de Saint-Denis
GIHP : le Groupement pour l'Insertion des personnes Handicapées Physiques
UNAPEI : l'Union nationale des associations de personnes handicapées mentales, de leurs
parents et amis
T&H : Tourisme et Handicap
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L'ACCESSIBILITÉ DU PATRIMOINE TOURISTIQUEAUX PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP
La mise en tourisme d'un site induit,de manière évidente son accès au public, quicomprend notamment des personnes atteintesd’un ou plusieurs handicaps. Or, derrière leterme même de « handicap » se cache unegrande diversité de situations.
Ce terme a donc fait l'objet deréflexions menées dans différents pays depuisla fin des années 1960. Elles ont abouti, en1980, à la première ClassificationInternationale des Handicaps1 del'Organisation Mondiale de la Santé2. Puis, en2001, l'OMS propose la ClassificationInternationale du Fonctionnement duhandicap et de la santé3, qui se substitue alorsà la CIH et dont elle est la révision. Enfin, laloi du 11 février 2005 introduit une définitiondu handicap inspirée de cette CIF, en mettantsurtout l'accent sur la diversité des handicapsà prendre à compte.
Dès lors, la mise en accessibilité del'ensemble des espaces, publics commeprivés, devient un enjeu national, permettant àtous les citoyens français d'accéder, dans lesmêmes conditions, à l'ensemble desaménagements qui leurs sont destinés. Laquestion de l'accessibilité est, donc unecomposante essentielle de tout équipementculturel soucieux d'offrir un meilleur confortd'usage à son public.
1 CIH.2 OMS.3 CIF.
Les différents projets menés au seind’un site culturel tel qu’un monumenthistorique suppose donc la mise en place dedifférents aménagements qu'il faut concilieravec les principes et les règles de protectiondu patrimoine architectural, ce qui est laspécificité des monuments historiquesprotégés.
Malgré certaines contraintessupplémentaires les monuments historiquespeuvent être rendu accessibles et différentsexemples nous le prouvent. La Basilique deSaint-Denis, a été choisie en 2004 par leMinistère de la Culture et de laCommunication comme site pilote pourl'accueil des visiteurs en situation dehandicap.
En effet, à l'occasion de l'exposition« Basilique secrète », qui s’est tenue dans lacrypte du 22 octobre 2004 au 15 mai 2005,plusieurs aménagements y ont été effectuésafin de faciliter l'accès de ces publics àbesoins spécifiques à ses espaces. En effet, unélévateur a été installé dans sa cryptepermettant ainsi aux personnes se déplaçanten fauteuil roulant d'y accéder. D'autre part,une rampe d'accès a été installée ouvrant ainsiun accès à la nef de la cathédrale. JacquelineMaillé, ancienne administratrice dumonument, qui fut à l'initiative del’installation de ces dispositifs se rappelle qu'« il existait déjà un accueil attentif aux
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besoins de ces personnes », et qu'elle a voulule « développer pour en faire une véritablepolitique d’accessibilité pour tous ».
On constate donc que les premiersprojets permettant une meilleure accessibilitédu patrimoine bâti étaient particulièrementconcentrés sur les attentes des personnes ensituation de handicap moteur, qui reste lehandicap le plus évident lorsque l'on pense àune mise en accessibilité d'un ensemblearchitectural.
Or, dans un monument de ce type, lesmatériaux, les odeurs ou encore les sonspeuvent être exploités afin de permettreégalement à des personnes en situation dehandicap sensoriel d'appréhender cepatrimoine architectural, ainsi que sescollections. En 2008, on voit doncl'émergence d'une mallette multi-sensorielle,destinée à faire découvrir la Basilique, ainsique les tombeaux et gisants qui s'y trouventaux personnes atteintes d'une déficiencesensorielle, mais également aux visiteurs ensituation de handicap mental.
Ces projets n'ont donc pas été menésde manière coordonnée au sein d'un projetplus global de mise en accessibilité dumonument à tous les publics spécifiques. Ilsétaient indépendant l'un de l'autre, et c'estsûrement ce qui explique la réussite, certesnotable, mais tout de même partielle de lamise en accessibilité de la Basilique. En effet,l’autonomie de ces visiteurs à besoinsspécifiques est inexistante au sein de laBasilique puisqu'ils doivent êtresystématiquement pris en charge par un agent,que ce soit à travers un accompagnement ouune animation dont la mallette multi-sensorielle dépend.
C'est pourquoi, ce monument n'a pasété labellisé par l'Association Tourisme &Handicap pour le handicap moteur. Toutefois,il a reçu le label pour les visiteurs en situationde handicap mentale, auditive et visuelle,même si l'on sait que les dispositifs déployésne sont pas tous conformes aux critèresincontournables énoncés.
Arrêtons-nous maintenant sur unprojet de mise en accessibilité plus récent, etsurtout plus global d'un monument : celui duPalais du Tau à Reims. Ici, le projet d’unemise en accessibilité complète a été lancé àl'initiative du siège du Centre des MonumentsNationaux en 2006, avec la réalisation d'uneétude préalable par l'architecte en chef desmonuments historiques en charge du Palaisarchiépiscopal. Les travaux alors préconisésont été réalisés entre 2009 et 2011, soit cinqans après les travaux menés à la Basilique deSaint-Denis.
La réflexion menée a intégrée toutesles situations de handicap, ce qui a permisd'en faire le premier monument géré par leCentre des Monuments Nationauxcomplètement accessible. Ainsi, desdispositifs de toute sorte ont été installés, quipermettent à chacun, selon ses besoinsspécifiques, de visiter et d'appréhender lemonument dans son ensemble, ainsi que sescollections. Ce programme complet de miseen accessibilité a donc fait de ce monumentune référence en matière de lutte contrel'exclusion des personnes en situation dehandicap.
On voit donc bien que le Palais du Taua un projet bien mieux structuré et pluscomplet que celui de la Basilique Saint-Denis.Les différentes installations effectuées en sonsein ont été harmonisées et coordonnées lesunes par rapport aux autres, et offrent ainsi unparcours de visite cohérent et indifférenciépour tous les visiteurs, qui ne demandeaucune prise en charge particulière. Toutefois,il est évident que les budgets, tout comme lescapacités d'intervention n'étaient pas lesmêmes pour les deux sites.
En effet, l'architecture du Palaisarchiépiscopal est beaucoup moins protégéeque celle de Saint-Denis du fait de ladestruction partielle du monument au cours dela première guerre mondiale, ce qui a facilitél'installation de différents ascenseursnotamment. Toutefois, malgré les contraintesplus fortes au sein de la Basilique, un projet
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prévoyant un ascenseur est tout de même encours de réflexion.
Des solutions existent donc, même sil'exercice de mise en accessibilité est renduplus difficile au sein d'une architectureprotégée. D'autre part, les textes référents enla matière ne simplifient pas une démarchedéjà non aisée. En effet, le label Tourisme &Handicap, qui se pose en complément del'arrêté ministériel du 1er août 2006, entreparfois en contradiction avec celui-ci.
Ainsi, les dispositions touchant àl'intensité de l'éclairage, ou encore à la largeurdes cheminements dits « accessibles » nes’accordent pas entre les différents textes, cequi ajoute une difficulté supplémentaire à ladémarche compliquée entreprise. En fait, cespréconisations lancent plutôt des axes deréflexion, autour desquels les projets de miseaccessibilité devront s'articuler, tout endéveloppant de nouvelles pratiques qui neseront pas exigées légalement, mais qui serontà l'initiative des acteurs concernés. Cespratiques, si elles s'avèrent efficaces, pourrontalors être diffusées afin que d'autres acteurspuissent s'en inspirer.
Par ailleurs, la diversification desmoyens de médiation s'intensifie dans tous lesdomaines de la culture. Et il est indéniableque les efforts de médiation qui sont entreprisdans le but de rendre une offre culturelleaccessible aux personnes atteintes d’unhandicap sensoriel ou mental, peuventbénéficier un autre type de public, voire àl’ensemble des visiteurs du site. Ainsi, lesoutils de médiation spécifiques au handicapmental sont également utilisables en faveurdes groupes scolaires ou des enfantsindividuels, et les outils de médiation destinésaux handicaps sensoriels permettent à tous lesvisiteurs de découvrir le monument à traversune autre approche, tactile ou olfactive parexemple. De même, les touristes ne maîtrisantpas la langue du pays qu'ils visitent, serontégalement à la recherche d'informationssimplifiées, notamment à travers lasignalétique, ou des expériences sensorielles.
D’autre part, à la suite de l’évolutiondes définitions successives du « handicap »,on assiste à une réflexion sur la notion mêmed'accessibilité. N’étant pas figée, elle a doncégalement évoluée ces dernières années.Ainsi, elle devient de plus en plus« universelle » puisqu'elle n'est plusuniquement associée aux quatre grands typesde handicap traditionnels, mais bien àl'ensemble des citoyens. Déjà, en 2000, lesprincipaux ministères concernés par laquestion de l'accessibilité, dont le ministèrede la Culture et de la Communication,adoptèrent un texte élargit déjà la notiond’« accessibilité » à un grand nombre depersonnes, puisqu’on peut y lire:« L'accessibilité du cadre bâti, del'environnement, de la voirie, et des transportspublics ou privés, permet l'usage sansdépendance par toute personne qui, à unmoment ou à un autre, éprouve une gêne dufait d'une incapacité permanente (handicapsensoriel, moteur ou cognitif,vieillissement...) ou temporaire (grossesse,accident...) ou bien encore de circonstancesextérieures (accompagnement d'enfants en basâge, poussette...) ».
L'accessibilité universelle nes’applique plus uniquement aux personnes ensituation de handicap, mais bien à lapopulation dans son ensemble, puisqu'il fautgarder à l'esprit que le handicap peut touchertout le monde, de manière définitive commede manière temporaire. Ainsi, l’Associationdes Paralysés de France définit la notiond'accessibilité universelle comme « l’accès àtout pour tous ». C’est donc le propre d’unenvironnement aménagé de manière àrépondre aux besoins de toute la populationen prenant en compte les spécificités dechacun.
Un autre concept émergent est illustrépar cette citation, c'est celui de la « chaîned'accessibilité ». Rendre un bâtimentaccessible à tous ne suffit plus, aujourd'huil'accessibilité est pensée de manière globale,réflexion au sein de laquelle tous les maillons
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d'une chaîne de déplacement participent àaméliorer une qualité d’usage générale. Lehandicap est donc une situation individuellede difficulté, temporaire ou définitive. Maiscette difficulté peut être atténuée si lapersonne concernée évolue dans unenvironnement favorable et adapté à sonhandicap. Cette façon de décrire le handicapmontre bien la diversité des moyens quipeuvent être mis en œuvre pour répondre àcette situation particulière.
Dès lors, le handicap ne peut plus êtreenvisagé comme un état figé et perpétuel,mais bien comme une situation dynamiquereposant sur l'interaction entre la personne etson environnement. Or, l'accès à la culture estbien évidemment un enjeu majeur dans cettevolonté d'accessibilité générale.
L'évolution récente de ces réflexionsautour de l'accessibilité, s'inscrit depuis peuau sein de problématiques plus larges, tellesque l'aménagement des territoires, maiségalement le développement durable. Eneffet, l'accessibilité concerne tous les acteurs,aussi bien publics que privés, puisqu'ellebénéficiera à tous, et contribue donc àl’élaboration d’une vision durable de laSociété. Or, c'est ensemble que ces acteursdoivent mener une réflexion globale quiaboutira à un projet commun d'accessibilitétotale. Toutefois il faut garder à l'esprit qu'ilexiste autant de solutions que de situations, etqu'un projet, aussi global qu'il soit ne pourraêtre parfait.
C'est pourquoi on voit apparaîtrel'émergence de diverses récompenses quiencouragent les démarches de mise enaccessibilité, dans le but de diffuser le pluslargement possible des axes de réflexionsmenées autour de cette question, et ainsi departager l'expérience acquise au sein dedifférents lieux. Il faut donc garder à l'espritque chaque situation est particulière, et à plusgrande raison quand il s'agit de monumentshistoriques que l'on veut rendre accessibles àtous, c'est pourquoi des exemples précis sont
sélectionnés et diffusés, afin que chacunpuisse identifier de manière précise lesdispositifs qui pourraient être appliqués, entotalité ou en partie, à sa situation précise.
Appliquer la loi ne signifie donc pasavoir rendu accessible un bâtiment, mais bienau contraire avoir mis en place les dispositifsminimum permettant au public en situation dehandicap de pouvoir commencer àappréhender un monument. Leperfectionnement de cette accessibilité doitêtre constant, et améliorée sur la durée, enfonction des évolutions constatées au sein dela Société, mais également au sein d’autreséquipements culturels.
Ainsi, on voit bien qu’à la Basiliquede Saint-Denis, monument pour lequel nousavons le plus de recul, le projet de mise enaccessibilité s'est conduit sur plusieursannées, puisque c'est en 2004 que l'élévateurdonnant accès à sa crypte a été installé, tandisque la mallette multi-sensorielle n'a étéréalisée qu'en 2008. Cet engagement sur ladurée révèle bien un souci deperfectionnement de la part de l'équipe dumonument, indispensable à une mise enaccessibilité générale d'un lieu.
L'accessibilité est donc au cœur desproblématiques actuelles, au sein d'unesociété qui se doit de prendre en comptel'ensemble des citoyens dans toute leurdiversité. Or, cette question se pose d'unemanière particulière pour le patrimoine bâtiprotégé, qui intègre des contraintes spécifiques'ajoutant aux difficultés posées parl'adaptation d'un espace à des personnes aussinombreuses que différentes.
Mais, les monuments historiquesrecèlent également des ressourcesparticulièrement exploitables pour un projetde mise en accessibilité, telle que lesmatières, les odeurs ou encore les sons. Dessolutions existent, mais il faut garder à l'espritqu'elles ne sont pas transposables sansadaptations. A chaque monument sa solution,qui n'est d'ailleurs ni totale ni parfaite, maisqui tend à le rendre accessible de la manière
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la plus complète possible.
Or, les acteurs s'engageants dans cettedémarche ont besoins d'un accompagnement,aussi bien de la part des associations que despouvoirs publics. Les conseils, préconisationset réglementations ont donc besoins d'êtreharmonisées, de manière ne pas rendre encoreplus confuse une démarche d'embléecompliquée.
Enfin, une mise en accessibilité doit êtrepensée de manière globale si on veut qu'ellesoit cohérente. La chaîne d'accessibilité estune notion primordiale dans cette réflexion.Pour cela, les différents acteurs doiventtravailler en commun. Aujourd'hui, on voitl'émergence de territoires entiers s'organiseren ce sens, notamment à travers le label« Destination pour tous ».
L'accessibilité est au cœur des problématiques actuelles, au sein d'une société qui se doit de
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prendre en compte l'ensemble des citoyens dans toute leur diversité. Cette question se pose d'une
manière particulière pour le patrimoine bâti protégé qui intègre des contraintes spécifiques
s'ajoutant aux difficultés posées par l'adaptation d'un espace à des personnes aussi nombreuses que
différentes. Mais, les monuments historiques offrent également un potentiel particulièrement
exploitable au sein d’un projet de mise en accessibilité, tel que les matières, les odeurs ou encore les
sons. Des solutions existent, mais il faut garder à l'esprit qu'elles ne sont pas transposables sans
adaptations. A chaque monument sa solution, qui n'est d'ailleurs ni totale ni parfaite, mais qui tend à
le rendre accessible de la manière la plus complète possible. Or, les acteurs s'engageant dans cette
démarche ont besoin d'un accompagnement, aussi bien de la part des associations que des pouvoirs
publics. Les conseils, préconisations et réglementations ont donc besoin d'être harmonisés, de
manière ne pas rendre encore plus confuse une démarche d'emblée compliquée. Enfin, une mise en
accessibilité doit être pensée de manière globale si l’on veut qu'elle soit cohérente. La chaîne
d'accessibilité est une notion primordiale dans cette réflexion. Pour cela, les différents acteurs
doivent travailler en commun. Aujourd'hui, on voit émerger des territoires entiers qui s'organisent
en ce sens, notamment à travers le label « Destination pour tous ».
The accessibility is in the heart of current problems, within a society which needs to take into
account all the citizens in all their diversity. This problem is formulate in a particular way for the
protected built heritage, which integrates specific constraints which are added to difficulties
involved with the adaptation of a space to persons as many as different. But, historic monuments
also hold a potential particularly that can be exploited to ensure accessibility, such as materials,
smells or sounds. Solutions exist, but it is necessary to keep to keep in mind they are not relevant
without adaptations. For each monument a solution, which is not perfect, but tends to make it
accessible in a most complete possible way. Yet, the actors went into the accessibility aspect need a
support, as well association as public authorities. The advices, recommandations, the préconnisation
and principles need to be harmonized, in a way not to make even more confuse an approach still
complicated. Finally, the accessibility must be thought in a global way if we want it to be coherent.
The chain of accessibility is an essential notion into this reflection. For that purpose, the actors have
to work together. Today, we can see the emergence of whole territories getting organized in this
way, and particularly through the label «Destination for all».