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Universit Cheikh Anta Diop de Dakar
Facult des Sciences et Technologies de l'Education et de la Formation
FASTEF
DEPARTEMENT HISTOIRE - GEOGRAPHIE
Centre dApplication, dEtude et Ressources en Apprentissage Distance
DOSSIER
DOCUMENTAIRE
THEME :
LES CONSEQUENCES DE LA GREVE SUR LES ELEVES ET LA NECESSITE DE NOUVELLES STRATEGIES POUR LES
EPARGNER
PRESENTATION :
CHEIKH NIANG
ANNEE ACADEMIQUE
2011 - 2012
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Thme dtude :
Les consquences de la grve
des enseignants sur leS
ELEVES et la ncessit de
nouvelles stratgies pour les
pargner.
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INTRODUCTION
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Depuis une dcennie, le systme ducatif sngalais est plus que
menac par les grves cycliques des enseignants regroups au sein des
syndicats comme le SAES (Syndicat Autonome des Enseignants du
Suprieur) au niveau du suprieur, lUES (Union des Enseignants du
Sngal), le SAEMS- CUSEMS (Syndicat Autonome des Enseignants du
Moyen Secondaire- Cadre Unitaire des Syndicats des Enseignants du
Moyen Secondaire), le REEL ( Rassemblement des Educateurs et
Enseignants libres) dans le moyen- secondaire, le SELS (Syndicat des
Enseignants Libres du Sngal), le SNEEL (Syndicat National de
lEnseignement Elmentaire), lOIS (Organisation des Instituteurs du
Sngal) dans llmentaire, lUDEN (Union Dmocratique des
Enseignantes et des Enseignants du Sngal) etc.
Et parmi les trois niveaux prcits, la crise est beaucoup plus
ressentie dans le Moyen- Secondaire. Tout se passe comme si les
diffrents acteurs du monde ducationnel (et surtout lautorit centrale et
les syndicats enseignants) se plaisent laisser la situation pourrir.
Les syndicats denseignant prsentent firement leur plateforme
revendicative dans laquelle leurs griefs sont notifis, droulent leurs
stratgies de grve en usant comme arme principale larrt systmatique
des cours, renforce parfois par le boycott des devoirs et composition et la
rtention de notes.
LEtat joue le dilatoire avec les syndicats denseignants en signant
des accords qui tardent tre appliqus ou parfois qui ne le sont mme
pas.
Les parents dlves, un peu dpasss par la situation, ont une
marge de manuvre trs rduite et demeurent trs loigns des
instances de dcision et de ngociations entre syndicats et Etat pour
influer sur la balance.
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Les lves, quant eux, nont aucune autre solution que de voir le
temps leur filait sous leurs yeux pour se retrouver face aux examens,
dminus de comptences dapprentissage. Et en guise de raction
dsespre, ils font des marches et des sit-in devant les gouvernances ou
les Inspections dAcadmie pour demander larrt des grves et le retour
des professeurs dans les classes.
Stratgie efficace ou non1 , elle traine derrire elle des mandres qui
laissent apparaitre un lot de dsastres du ct des apprenants (angoisse,
dsuvrement), des parents dlves anims par une inquitude
grandissante sur lavenir des leurs enfants et un angoisse terrifiant, des
enseignants tiraills entre le respect scrupuleux des mots dordre de grve
et le tort quils font subir aux lves qui ne font plus cours , les heures
perdues sans tre rattrapes tout en percevant intgralement leur
salaire.
Face ce lot de dsastres qui pratiquement affecte tous les
partenaires de lducation, directement les moins concerns par le duel
entre Etat- Syndicats enseignants, cest-- dire les lves et les parents
dlves, et indirectement lEtat (administration scolaire et centrale) et les
enseignants, un changement de comportement ou de stratgie de lutte ne
simpose-t-il pas du ct des enseignants ? Est- ce que cest parce que la
constitution leur confre le droit de grve2 quils peuvent en jouir sans
tenir compte ou respecter le droit des autres (les lves par exemple) ?
Larrt des cours, stratgie combien chre aux enseignants, ne devrait-
elle pas tre revue pour la fois rclamer leur d tout en protgeant les
1 Aucune tude scientifique nest faite pour mesurer lefficacit de la stratgie en jaugeant les avantages et les inconvnients dans le systme ducationnel.
2Larticle 25 alina 4 de la nouvelle loi fondamentale qui consacre le droit de grve, est ainsi conu : Le droit de grve est reconnu. Il sexerce dans le cadre des lois qui le rgissent. Il ne peut en aucun cas ni porter atteinte la libert de travail, ni mettre lentreprise en pril.
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droits des autres et en vitant de leur causer de prjudices ? Le capital
angoisse secrt par le boycott des devoirs et compositions nest-il plus
pesant psychologiquement sur tous les partenaires de lducation (surtout
sur les lves) si nous mesurons les consquences dsastreuses quil
charrie derrire lui3 pour tre adopt comme tactique de confrontation
avec le gouvernement?
Autant de questions souleves qui, si elles trouvent des rponses,
peuvent tre regroupes en autant de rubriques. Ces dernires mettent en
exergue le panel de stratgies de grve prsent par les syndicats sans
pour autant oublier les consquences quentranent chacune des stratgies
sur le monde ducationnel et en particulier les lves et les parents
dlves. Ltude aura appesantir aussi sur les apprciations de la
socit sur la grve des enseignants et surtout le capital angoisse que
cette dernire produit sur les lves et les parents dlves. A la longue,
les recherches prouveront que la grve cause plus de dgts aux lves et
aux parents dlves quaux enseignants. Faute dtre taxs dgostes,
une innovation simpose dans la lutte syndicale imprativement. Et coup
sr, le syndicat qui russira la fois juguler une stratgie qui prendra
en compte ses intrts, ceux des parents dlves et surtout ceux des
lves aura gagn la bataille du sicle.
3 Tout le travail de ladministration scolaire et centrale reste bloqu. Les notes constituent lessentiel pour la bonne marche du systme.
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PREMIERE PARTIE: La grve des enseignants et les ractions des lves et parents dlves
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Chapitre I: Lvolution historique de la grve enseignante
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1. Des annes 1960 2000
La grve a toujours t la forme de protestation la plus utilise par
les syndicats des travailleurs. Depuis la rvolution industrielle, les
proltaires, regroups au sein des associations syndicales, rclamaient des
conditions de vie et travail satisfaisantes aux bourgeois. Pour se faire, ils
utilisaient dans le meilleur des cas larrt du travail et dans le pire des cas,
ce sont des rvoltes, des casses dans les lieux de travail. Ce qui a valu
aux grvistes les dnominations que les historiens leur ont donn : les
rformistes et les rvolutionnaires .
Cette mthode de grve fut aussi la donne utilise en Afrique aprs
la seconde guerre mondiale, priode qui concide avec la prise de
conscience des peuples africains, symbolise par la cration des partis
politiques, des syndicats de travailleurs Dans les colonies
lpoque, un proltariat et mme un sous- proltariat stait constitu, compos de
manuvres mal pays, mal nourris, mal logs, incertains du lendemain . Cest dans
une telle atmosphre que larme de la grve a t considre par ce
proltariat comme tant le seul et unique moyen de rgler leurs
problmes. Il sensuivit des grves violentes et gnralises4. La grve
des cheminots de lA.O.F vers les annes 40 (du 10 Octobre 1947 au 19
Mars 1948) vient tout aussi nous rappeler que larrt du travail comme
mthode de grve fut trs prise par les travailleurs pour rclamer
lobtention dun statut de cheminot que leur refusait ladministration
coloniale.
Au Sngal, le plus grand mouvement de contestation dans le
monde ducationnel aprs les indpendances a concid avec les
vnements de Mai 1968. Toutes les forces sociales en effervescence
4 Il sagit de la grve gnrale du 3 Novembre 1952 pour protester contre la lenteur du vote dfinitif du code du travail des TOM, des grves dAot Novembre 1953 dans tous les territoires coloniaux, pour lobtention dun relvement des salaires horaires compensant lintroduction de la semaine de 40 heures.
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taient debout comme un seul homme face lEtat central. Au milieu de
cette force de contestation, se remarquaient les tudiants qui animaient
les bats. Mme si lcole sngalaise tait secoue, le monde des
enseignants navait pas ravi la vedette aux autres secteurs. La premire
exigence du mouvement de contestation des annes 68- 69 fut la rforme
de lcole et des enseignements, de manire adapter ceux-ci aux ralits nationales et
africaines 5. Cette exigence fut dailleurs prise en compte lors des
engagements endosss par lEtat sngalais. Le texte de la loi
dorientation n71-036 du 03 Juin 1971 le rsume bien dans son essence
mme: lever le niveau culturel de la population, fournir des hommes et des
femmes libres, capable de crer les conditions de leur panouissement tous les
niveaux, de contribuer au dveloppement de la science et de la technique, et dapporter
des solutions efficaces au problme de dveloppement national 6.
De 1971 1973, les crises scolaires ne se sont pas tues. Le SES
mena une confrontation farouche avec lEtat pour le non respect de ses
engagements et la meilleure prise en charge des conditions de travail. En
outre cette rforme de 1971 se rpercuta sur lcole Normale William
Ponty et sur lEcole Normale des jeunes filles quelle dtourna de leur
vocation originelle. Il convient de rappeler que lanne 1971 a dbut par
des troubles graves : les principaux dirigeants au SES avaient t arrts,
une grve de la faim qui amne le syndicat dclencher une grve
gnrale en janvier et en fvrier, de lourdes sanctions frapprent les
grvistes avec la dissolution du SES en 1973.
Il faut attendre les annes 80 pour voir le seul syndicat des
enseignants de lpoque, le SUDES, secouer le monde de lducation en
arrtant les cours le 13 Mai 1980 et en convaincant 70% des enseignants
de tous les niveaux suivre le mouvement. Cette grve, trs organise,
5 Momar Coumba DIOP, Sngal, trajectoires dun Etat, Karthala, Paris, 1990
6 Ibidem
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couronne par un succs retentissant, avait comme toile de fonds la
revalorisation de la fonction enseignante droule par la plate forme
revendicative axe sur les points suivants : relvement et extension de
lindemnit de logement tous les enseignants ; relvement de lindemnit
denseignement de 20% 50% ; relvement du point indiciaire ; rvision du taux des
heures supplmentaires et des indemnits de dplacement, de transport, de sujtion et
de risque ; rgularisation de toutes les situations administratives des enseignants :
nomination, titularisation, avancement ;organisation des lections aux commissions
administratives paritaires ; amlioration des conditions de travail et dtude dans les
tablissements ; mise sur pieds dune commission nationale de rforme avec la
participation de toutes les organisations denseignants 7. Ainsi, il sen est suivi des
sanctions allant des suspensions, des mutations, des rtentions de
salaires aux licenciements : suspension de trente-huit militants du SUDES
en juin 1980 parmi eux des inspecteurs, rtention de lintgralit du
salaire de trente-cinq enseignants en juillet 1980 et de soixante-quinze en
aot 1980, rvocation de vingt-huit enseignants et suspension de trente-
huit autres en septembre 1980, affectation doffice de cinq cents
instituteurs, licenciement de tente et un enseignants en octobre, mutation
doffice de deux cents professeurs en novembre et dcembre 1980.
Lautre priode sensible de la crise universitaire et scolaire concide
avec les annes lectorales de 1988- 89. Cette crise ducative, bien des
gards teinte de politique (la majeure partie des dirigeants des syndicats
et des tudiants taient dans lopposition), tait le fait des tudiants et
des professeurs du suprieur. Ces derniers taient regroups dans le
SUDES8 et le SAES9. Leur union en Octobre 1988 a permis davoir une
plate forme revendicative et un plan daction unitaires et communs les 6
et 22 Dcembre 1988. Les pravis dposs en Juin 1989 ont ouvert une
7 A. SYLLA Luttes enseignantes et crise sociale au Sngal
8 SUDES : Syndicat Unique et Dmocratique des Enseignants du Sngal est cr le 26 Avril 1976.
9 SAES : Syndicat Autonome des Enseignants du Suprieur qui deviendra plus tard Syndicat Autonome de lEnseignement du Suprieur.
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srie de grves (arrt des cours) ponctue de ngociations de Fvrier
Avril 1989. A lissue des ngociations, lEtat du Sngal a pris les
engagements suivants : laugmentation du budget de lenseignement
suprieur, la construction et lquipement de nouveaux locaux, lextension
de la bibliothque universitaire, louverture de luniversit de Saint- Louis,
laffectation de nouveaux locaux luniversit (camp Jrmy, BRGM),
laugmentation de la prime de recherche de 55 75 000f CFA.
A travers ces engagements signs entre lEtat et les syndicats
prcits, nous pouvons y remarquer tout lgosme des enseignants quand
il sagit de dfendre leurs intrts. Ce sentiment sera plus confirm par les
consquences ngatives de larrt des cours sur les lves avec lanne
blanche que la crise a occasionne.
2. La lutte enseignante sous lre de lalternance
Ces grves rcurrentes qui secouent le monde ducatif atteignent
leur apoge vers les annes 2000 surtout dans le cycle moyen-
secondaire. Cette priode de lalternance politique au Sngal symbolise
lespoir prouv par les sngalais. Ce vent despoir a effectivement
souffl dans le monde de lenseignement avec le recrutement massif de
3500 volontaires et de 150 vacataires par an10, la construction de
nouveaux tablissements11 (collges et lyces de proximit, cases des
tout-petits). Le budget de lducation est rehauss hauteur de 40% de
celui national12. Cette revue deffectif de lducation a eu comme rsultat
10 Malick BOMSEL, LImpact de lconomie de la craie , Dossier sur Le Monde de lEducation, n10, Spciale rentre, Oct., Nov., Dc. 2011, p 8-9.
11 De 2000 2005, on a not une augmentation de 124 collges en zone rurale. En 2010, 36165 salles de classes pour le Public, 6527 pour le Priv, soit un total de 42692 salles de classes ont t construites travers le Sngal. (Malick BOMSEL, Limpact de lconomie de la craie )
12 De 30% en 2000 (105 milliards de francs CFA), le budget de lducation est pass 42% (385 milliards de francs CFA) de celui national en 2010- 2011. 70% du budget de lducation reprsente la masse salariale, les 30% le fonctionnement. (Idem)
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la naissance de nouveaux syndicats denseignants. Depuis 2006, ce sont
les enseignants du moyen et du secondaire runis autour du Cadre
Unitaire des Syndicats de l'Enseignement Moyen et Secondaire (CUSEMS)13
et les instituteurs du primaire et du prscolaire (SELS : Syndicat des
Enseignants Libres du Sngal) qui ont entam un conflit avec l'Etat pour
la satisfaction de leurs revendications. Pour les premiers, les points de
discorde tournent autour de la question de la rforme du statut des
volontaires, vacataires et contractuels ; de la rationalisation de la carte scolaire et
universitaire ; de l'amlioration des conditions d'apprentissage et d'enseignement ; de la
promotion de l'habitat social et du payement des indemnits de dplacement 14. Et
face aux lenteurs administratives qu'ils reprochent au gouvernement, les
enseignants ont progressivement radicalis leur mouvement de
protestation au point o on s'interroge encore sur la validit et la
crdibilit du baccalaurat de 2006, vus les nombreux dysfonctionnements
dans l'organisation des examens. Car, outre ces dfectuosits, ces
derniers ont, face au mutisme du gouvernement, procd la rtention
des notes et au boycott des conseils de classe. Depuis lors, les annes
scolaires se suivent et se ressemblent, prolongeant le malaise du systme
ducatif. Entre octobre 2007 et mars 2008 les enseignants en taient dj
prs de deux mois de grve et donc autant d'heures de cours en moins
pour les lves. Celle de 2008-2009 connat aussi de nombreuses
perturbations, au total prs de cinq mois d'arrt des cours dans le public.
Les seconds, quant eux, rclament l'Etat une indemnit de
recherche documentaire (IRD) de 60 000 F Cfa (environ 91) et pour
obtenir la satisfaction de leurs revendications, ils ont tout bonnement
13 Cadre Unitaire des Syndicats de l'Enseignement Moyen et Secondaire. Un des derniers ns des syndicats denseignants (2006), il se particularise par son radicalisme.
14 Ndye Maty Diagne, Des grves scolaires et universitaires rptition dans Nettali du Jeudi 19 Mars 2009, Source : Ministre des finances.
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arrt de dispenser les cours. De sorte que du prscolaire au secondaire
c'est tout le systme qui est bloqu.
Jusquaux annes 2005, des grves certes avaient eu lieu, mais
jamais elles navaient autant menac lanne scolaire. Gnralement, elles
nexcdaient pas une dure dun mois et elles ntaient pas totalement
respectes par les enseignants, le manque de formation syndicale aidant.
A partir de 2006, une re nouvelle de grve enseignante souvre
avec la venue dans lespace syndical du CUSEMS. Rejoins par beaucoup
denseignants du moyen-secondaire lorsquil a dcroch les indemnits
compensatoires de surcharge horaire, le dit syndicat a apport une touche
radicale dans ses mthodes revendicatives avec larrt total des cours, la
rtention des notes et le boycott des compositions et examens (BFEM et
BAC). Ainsi, la force de frappe du CUSEMS vient dans le respect des mots
dordre de ses plans daction, mot dordre dont une grande part est dicte
par la base mais aussi dans son fameux slogan du jusquaboutisse 15.
Lanne 2011- 2012 souffre du slogan du jusquauboutisme .
Ainsi, lcole sngalaise, depuis Novembre 2011 est en marche ralentie,
les enseignants croisent les bras et boudent les classes, les lves sont
dans la rue, le gouvernement est en campagne lectorale. Le droit des
lves est bafou, les parents dlves sont en colre contre les
enseignants gostes qui ne pensent qu leurs propres intrts et
aussi contre le gouvernement qui ne dit mot comme si la situation
larrangeait. Cette atmosphre non moins chaotique est installe par la
mthode de protestation adopte par les syndicats enseignants.
15 Un slogan qui veut dire jusqu la satisfaction de tous les points revendicatifs de la plate- forme droule, donc jusquau bout
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Chapitre II : Mthode de Revendication des enseignants
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Depuis la cration des syndicats enseignants au Sngal (SES,
SUDES, SNEEL, SYPROS, UDEN, SAES, UES, CUSEMS, SELS)16, les
revendications de ces derniers ont t satisfaites pour une large part
surtout avant 2000. Les mthodes revendicatives nont pas t les plus
tendres. La principale, la plus prise, est larrt des cours avec ses lots de
consquences (anne blanche, invalide, programme tronqu).
Malheureusement, les mfaits de la grve enseignante sont plus ressentis
par les lves et les parents dlves, ceux-l mme qui ne sont nullement
concerns par le bras de fer entre syndicats enseignants et Etat central et
qui demandent seulement recevoir un enseignement digne de ce nom.
Les questions qui vaillent dtre poses sont : pourquoi les lves ne
sont pris en compte dans les grves par les enseignants ? Pourquoi les
syndicats enseignants nont jamais cherch innover dans leur mthode
de lutte qui se fige sur larrt des cours ? Quelle partie y trouve plus
dintrts ? Nexiste-t-il pas une voie de sortie pour les syndicats pour
pargner les apprenants tout en dfendant leurs intrts et faire face au
gouvernement ?
Lintervention du ministre de lducation Kalidou DIALLO lors de
louverture du sixime congrs ordinaire de lUnion Dmocratique des
Enseignantes et Enseignants du Sngal doit inciter plus dun rflchir
sur ses propos et obliger le monde enseignant innover leur arsenal de
combat contre lautorit centrale. Ainsi, il dclare que laction syndicale,
cest pour alerter lopinion ; mais elle na jamais consist nuire les lves . Il
raffirme que avant, la grve dstabilisait le gouvernement, mais pas
aujourdhui 17.
16 SNEEL : Syndicat National des Enseignants de lElmentaire. SYPROS : Syndicat des Professeurs du Secondaire. UDEN : Union Dmocratique des Enseignants. UES : Union des Enseignants du Sngal. SELS : Syndicat des Enseignants Libres du Sngal
17 SENENEWS.COM, 27 dcembre 2011
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Pourtant ses affirmations du ministre ( avant, la grve dstabilisait le
gouvernement ) sont corrobores par la situation chaotique que la grve
du SUDES avait installe au sein du gouvernement de Senghor dalors en
Avril 1980. Aprs la fameuse journe du 13 Avril 1980 marque par un
arrt des cours par le SUDES qui lanait un avertissement aux autorits,
la situation deviendra beaucoup plus critique lorsquune batterie de
stratgies de lutte a t prsente par le dit syndicat pour riposter face au
panel de sanctions dont ses militants taient victimes. Ainsi, le syndicat
prconisa, entre autres mesures, la rtention des notes des feuilles de
composition du second semestre, le boycottage du travail administratif
(remplissage des registres de notes, des livrets scolaires, participation aux
conseils de classes) et le boycottage des examens et concours de fin
danne (entre en sixime, diplme de fin dtudes moyennes (DFEM),
baccalaurat)18. Cette priode du dbut des annes 80 marque la fin
politique de Senghor et la naissance de celle dAbdou DIOUF mais aussi un
bras de fer chaud entre le SUDES et le gouvernement senghorien. Par le
biais des stratgies trs sages que le SUDES avait adoptes, stratgies19
qui clouent au sol lautorit centrale et qui permettent aux enseignants de
mener bien lexercice de leur fonction dans les classes, la quasi-totalit
de la plate forme revendicative a t satisfaite (ou du moins le
gouvernement dA. DIOUF a pris des engagements fermes de les satisfaire
comme lavait prcis le ministre de lducation de lpoque : le
gouvernement prend acte de toutes les propositions 20 position corrobore plus
tard par Abdou DIOUF venu au pouvoir le 31 Dcembre 1980 en
remplacement de Lopold Sdar SENGHOR, dmissionnaire. Les
diffrentes runions (le 12 Mars 1981, les 9 et 17 Avril 1981) organises
18 A. SYLLA, Luttes enseignantes et crises sociales au Sngal .
19 Notons quaussi quen 1971, le SES (Syndicat des Enseignants du Sngal), travers ses dirigeants arrts, avait adopt la grve de la faim pour rclamer leur libration
20 A. SYLLA
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entre syndicats et gouvernement se sont soldes par les dcisions
suivantes paraphes par le chef de lEtat : leve de toutes les mesures de
rvocation, de licenciement et de suspension ; annulation de toutes les
autres mesures: blmes, avertissements ; annulation des mesures
dexclusion frappant cent huit lves-matres du centre de formation
spciale de This ; dcision de reporter dj plusieurs mesures de
mutation(cas mdicaux, mutations tardives) et retour dans leur fonction
dinstituteurs-professeurs de collge, dinspecteurs qui ont fait lobjet de
sanctions arbitraires (pour activits syndicales) ; extension de lindemnit
de logement tous les enseignants sans exclusive ; engagement du
gouvernement chigner toutes les injustices dcoulant de lharmonisation
telle quelle est applique ; organisation des lections aux commissions
administratives paritaires le vendredi 29 mai 1981. Ces lections aux CAP
ont t effectivement organises, pour la premire fois depuis
lindpendance, le 29 mai, sur lensemble du territoire national ; adoption
dun projet de loi rectificatif de la loi 68-01 du 01 Janvier 1968 pour
autoriser la communication de la note administrative aux intresss :
acceptation du principe de relvement des grilles indiciaires de tous les
corps21.
En replongeant dans lhistoire de la lutte syndicale des enseignants,
on se rend compte que certes larrt des cours fut utilis comme stratgie
de lutte face lEtat, mais il na jamais ravi la vedette aux autres
stratgies comme par exemple la rtention de notes, le boycottage des
tches administratives stratgies dailleurs qui ont eu plus deffets sur
les autorits centrales et qui ont valu la satisfaction des plates formes
revendicatives des enseignants.
21 Ibidem
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Plus encore, lhistoire rcente de la lutte syndicale enseignante a
donn une preuve tangible aux affirmations susmentionnes. La victoire la
plus clatante quun syndicat enseignant a obtenue durant la dcennie
2000 est lobtention des indemnits compensatoires de surcharge horaire
dcroches par le CUSEMS en 2008. Durant cette poque, le dit syndicat
avait par ailleurs adopt diffrentes stratgies de lutte contre lEtat en
procdant par larrt des cours, puis la rtention des notes et enfin le
boycottage des examens du BFEM et du Bac. Le premier procd avait fini
par smousser car les enseignants commenaient boycotter les mots
dordre et les cours se droulaient normalement. Le mouvement dhumeur
a commenc par reprendre de vigueur lorsque les mots dordre de
rtention de notes, de boycott des examens du BFEM et du Bac ont t
notifis aux enseignants. La consigne fut rigoureusement respecte par
les militants du CUSEMS et les consquences ont t nettement senties
sur le travail de ladministration et le droulement des examens de fin
(BFEM, Bac). En effet, la plupart des cusmois avait dcid de bloquer
la remise des notes ladministration, ce qui a perturb la confection des
bulletins de fin de second semestre des lves. Certains tablissements
ont mme calcul les moyennes de passage des apprenants sans tenir
compte des notes de matires tenues par les professeurs grvistes. Les
tches administratives relevant de la comptence des professeurs comme
la participation au conseil de classes de fin danne, lapprciation des
livrets scolaires sont boycottes. A la longue, une bonne partie du travail
administratif restait bloque. De plus, lors de lexamen du Baccalaurat
(2007- 2008), des tudiants de lUniversit de Dakar ont t convoqus
pour corriger les copies du Bac dans les centres dexamens Dakar. Dans
dautres rgions (comme Kaolack), des professeurs, aprs avoir corrig
leurs copies de Bac dans leurs centres respectifs, sont redploys dans
dautres centres, dans dautres rgions, pour remplacer leurs collgues
grvistes dans les tches qui leur taient dvolues. A Louga, lInspecteur
Baba Ousseynou LY avait convoqu des professeurs de la commune pour
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aller corriger des copies du BFEM This, comblant le manque criard de
professeurs, tous en grve, suivant le mot dordre du CUSEMS. Ainsi, la
fin de cette anne trs perturbe, le CUSEMS, aprs dpres ngociations
avec le gouvernement, a eu gain de cause.
Lhistoire de la lutte syndicale des enseignants a montr que la
stratgie de confrontation la plus utilise par les syndicats demeure larrt
systmatique des cours. Efficace ou non, elle trane derrire elle des
consquences redoutes retentissantes sur les lves et malheureusement
pas ressenties sur le gouvernement : programme bcle, valuations
tronques, anne invalide ou blanche Les seules fois o les enseignants
ont obtenu gain de cause dans leur lutte ont concid avec ladoption des
stratgies de rtention de notes, le boycott des devoirs et composition,
des examens, des tches administratives car leur impact est trs ressenti
sur le travail de ladministration qui aura du mal faire remonter les
informations vers lEtat central en passant par les inspections. Devant cet
tat de fait, pourquoi adopter ou miser sur une stratgie qui cause moins
deffets sur le gouvernement (larrt systmatique des cours) au
dtriment des autres (rtention de notes, le boycott des devoirs et
composition, des examens, des tches administratives) beaucoup plus
contraignantes lgard du pouvoir central? Le terme de grve est
ressass maintes reprises dans notre tude mais il serait important de
chercher lorigine de leur rcurrence dans lcole.
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Chapitre III : La rcurrence des grves des enseignants
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Lopinion publique a, tout de mme, beau jet lopprobre sur les
enseignants, trs gostes selon elle, et privilgiant larrt des cours
comme stratgie vedette, mais lacteur principal, qui nest pas le moindre,
de la scne dramatique, est vritablement le gouvernement sngalais.
Depuis la publication de la plate forme revendicative par le CUSEMS le 18
Octobre 2011, lEtat sngalais a dni rencontrer le syndicat concern
pour trouver un terrain dentente sur les points soulevs axs sur le
doublement de lindemnit de documentation compensatrice de surcharge
horaire et la dtermination consensuelle de lutilisation de lune des trois
heures la prsence dans les cellules pdagogiques, lalignement de
lindemnit de logement des professeurs du moyen-secondaire sur celle
des agents de lEtat de mme niveau de recrutement et extension aux
professeurs contractuels, le relvement du taux horaire des vacataires de
1906 25OO et versement du salaire sur douze mois, loctroi
dindemnits substantielles aux Inspecteurs gnraux de lducation
nationale, aux Inspecteurs de lenseignement moyen secondaire, aux
administrateurs scolaires et aux conseillers pdagogiques, la
matrialisation de tous les accords signs, larrt de la remise en cause
de la gestion dmocratique du personnel et institutionnalisation du second
mouvement de mutation22. Le mpris manifeste de lEtat lgard des
enseignants na fait que cristalliser les relations entre ce dernier et les
syndicats enseignants et revigorer la lutte avec comme mot dordre la
rtention des notes, le boycottage des devoirs et compositions. Ainsi, il va
falloir attendre Mardi 10 Janvier 2012 pour voir se concrtiser une
rencontre entre les ministres de lEducation et de la fonction publique en
loccurrence Kalidou DIALLO et Khadim GUEYE, une rencontre solde par
aucun engagement de la part de lEtat.
Pourtant cette plate forme ne date pas daujourdhui. Elle fut
22 CUSEMS/ SG /519/D, Dakar le 18 octobre 2011
-
23
dpose depuis Novembre 2009.Et daprs le CUSEMS, en Mars 2010, le
gouvernement leur avait mme demand dattendre la fin de ltude de
lI.S.P.E initie par le Ministre des Finances pour corriger les carts
salariaux dans la fonction publique. Donc, cette demande montre que
lEtat jugeait les revendications plausibles et justifies et voulait se donner
un temps pour tudier la faisabilit de la question. Non seulement il joue
le dilatoire avec les enseignants mais les nargue la limite en augmentant
pour des raisons lectoralistes les indemnits de logement de certains
corps de la fonction publique comme les policiers, les magistrats, les
militaires ceux-l qui ne lont mme pas demandes mais seulement ils
ont le privilge dintervenir dans le contrle du processus lectoral. Cette
situation a touch lamour propre des enseignants qui se sentent
clochardiss par rapport ces corps prcits. Et portant si on tudie le
tableau des diplmes obtenus par ces corps, ces derniers ont les mmes
diplmes que les enseignants du moyen secondaire ou parfois mme des
diplmes de moindre degr.
Cadre Unitaire Syndical des Enseignants du Moyen et du Secondaire (CUSEMS) 13, CITE IMPOTS et DOMAINES
face Agence EXPRESSO Tel 30 108 17 91 / 77 608 46 78/ 77 575 02 01 [email protected] Rcpiss N00256 INT
CI / DAGAT/DAPS /// 008044/MINT
Enseignement
Titre Niveau dtudes Indemnits de logement
Instituteurs/Institutrices BFEM+ 1 an
Bac + 1 an
60 000 F
PCEM
PEM
PES
Bac + 2 ans
Licence + 1 an
Maitrise + 2 ans
60 000 F
mailto:[email protected]
-
24
Police
Titre Niveau dtudes Indemnits de logement
Agent de police CFEE 75 000 F
Inspecteur Brevet 100 000 F
Officier Bac 150 000 F
Commissaire Licence + 2 ans
200 000 F
Magistrature
Titre Niveau dtude Indemnits de logement
Magistrat Maitrise + 2 ans 100 000 F depuis 1974
Magistrat Maitrise + 2 ans 200 000 F partir de Janvier
2012
Autres
Titre Niveau dtude Indemnits de logement
Inspecteurs de lAdministration
financire
Maitrise + 2 ans 200 000 F
Contrleurs de lAdministration
financire
Bac + 2 ans
150 000 F
Greffiers en chef (Cour suprme,
Cours dappel et Administration
centrale)
100 000 F
Greffiers en chef (tribunaux
dpartementaux)
85 000 F
Greffiers (tribunaux des rgions) 80 000 F
Propositions du CUSEMS
Titre Niveau dtude Indemnits de logement
PC/VAC titulaires du Bac Bac 100 000 F
PCEM /PC / Vacataires dun DUEL
/ DUES
DUEL /DUES + 1 an / Bac + 2 ans 100 000 F
PEM / Vacataires titulaires
Maitrise
Licence + 1 an
Bac + 4 ans
150 000 F
PES / PC titulaires du CAES Maitrise +2 ans / Bac + 6 ans 200 000 F
Source : CUSEMS
Autant de paramtres encouragent la rcurrence des grves dans le
monde ducationnel. La plate forme revendicative actuelle du CUSEMS
-
25
date de 2009. Elle fut toujours brandie par les enseignants travers des
grves courtes par la signature dun accord de principe entre Etat et
syndicats denseignants. Mais malheureusement, la satisfaction des
engagements tardait tre mise en uvre par le gouvernement
sngalais qui utilisait le dilatoire comme cheval de bataille. Cette
situation a beaucoup impact sur les causes des grves cycliques.
Pourtant si nous interrogeons les recherches axes sur ce thme, les
causes de la grve sont beaucoup plus profondes et demeurent mmes
structurelles au systme ducatif. Depuis les annes 1990, prcisment
en 1996, Abdou Karim NDOYE, matre-assistant lUniversit Cheikh Anta
Diop de Dakar avait prsent une thse qui essayait danalyser le capital
satisfaction des professeurs du Moyen- Secondaire sur le mtier quils
exercent. Les observations quil a faites rsument en tout les diffrents
problmes qui ont donn naissance la situation que vive actuellement
pour une large part le monde ducationnel. Tous les griefs des syndicats
en grve ne sortent pas de son rpertoire. En voici une partie de sa
description : il note des locaux vtustes et insalubres, des effectifs nombreux, des
emplois du temps surchargs, bref, des conditions de travail difficiles pour les
professeurs du second degr. Il remarque aussi que ces derniers, pour viter les
contraintes que lenvironnement scolaire leur impose, adoptent des attitudes diverses :
raccourcis dans la ralisation des programmes, horaires de cours amputs, retards
frquents, absentisme et grves cycliques qui mnent un vritable dlitement de
lenseignement moyen secondaire (...). Les professeurs enseigneraient dans des salles
mal quipes qui ne disposent pas de matriels didactiques, dappareils scientifiques e
dautres articles essentiels la situation denseignement apprentissage. Ils se
sentiraient mal laise au sein des classes nombreuses o ils seraient peu disponibles
pour un vritable encadrement pdagogique. En labsence dassistants sociaux,
dorthophonistes, danimateurs socioculturels, dducateurs et de psychologues scolaires
dans les tablissements scolaires, ils seraient obligs de grer des problmes
socioconomiques et /ou affectifs qui accroissent leurs charges de travail(...). De plus ils
supporteraient difficilement que la faiblesse de leurs traitements salariaux oblige
-
26
beaucoup dentre-eux sreinter occuper un deuxime, voire un troisime emploi 23.
En terme beaucoup plus clair, la description exhaustive des conditions de
travail et causes dinsatisfaction des professeurs est rsume par les
termes avancement, mutations, effectif, conditions physiques du milieu
scolaire (le bruit, lclairage, la salubrit), salaire, soutien
lenseignement (matriels pdagogiques, locaux ou le mobilier) qui
gangrnent lducation. Cette analyse pointue rsume tout le nud du
problme de lcole sngalaise. Sur toutes les grves qui se sont
dclenches durant la dcennie 2000, les griefs des syndicats ont pous,
si non moins, la totalit des points susmentionns, causes de
linsatisfaction des enseignants.
Donc, le problme de lcole sngalaise ne doit pas tre interprt
au regard de la situation actuelle uniquement. Elle prsente deux
particularits : lune conjoncturelle (le dilatoire du gouvernement libral
sngalais avec les syndicats denseignant pour tenir ses engagements),
lautre structurelle (la centralit de lapprenant au dtriment de
lenseignant dans le systme ducatif). Notons tout simplement que le
systme ducatif est un ensemble dont les composantes sont lies. Le
virus de la grve des enseignants peut contaminer les lves quand la
situation perdure.
23 Abdou Karim Ndoye, L'insatisfaction au travail des professeurs du second degr du Sngal , Revue des sciences de l'ducation, vol. 26, n 2, 2000, p. 439-462.
-
27
Chapitre IV: Ractions spontanes des lves face la grve
-
28
La grve des enseignants a dmarr vers la fin du mois de
Novembre 2011. Elle tait due des retards de salaires (nouveaux
vacataires surtout), de paiement des indemnits du bac et du BFEM. Au
mois de Dcembre 2011, le CUSEM-SAEMS a publi une liste nationale
des diffrentes Inspections dAcadmie24 qui staient acquittes des
indemnits susmentionnes. La plupart dentre-elles ne les avaient pas
encore payes.
Il a fallu attendre la surchauffe de latmosphre syndicale pour voir
la situation commence se rtablir avec laide des tablissements
financiers qui ont anticip sur les tats de paiement pour renflouer le
compte des enseignants concerns par les indemnits.
Malheureusement, le paiement des indemnits na pas suffi pour
apaiser la tension syndicale car derrire elles, les syndicats droulent un
chapelet de revendications qui toutes, sont lies au rgime statutaire,
socio-conomique de lenseignant: lalignement de lindemnit de logement au
mme niveau que les autres agents de lEtat de mme hirarchie, la prime scolaire, de
loctroi des parcelles aux enseignants, de la validation des annes de vacatariat, de la
gnralisation du crdit au logement pour tous les enseignants, du versement des
cotisations lIpres et du vote par le Parlement de la loi sur lautorit parentale, la
fonctionnalit des centres de formation rgionaux et leur implication dans la gestion de
lenveloppe de 800 millions allous aux enseignants dans le cadre de leur projet
immobilier 25. Rien de nouveau dans la plateforme revendicative car la
majeure partie des points dfendus datent de 2009. Depuis lors, malgr
laccord du gouvernement, ce dernier a dni respecter ses engagements
et comme laffirme dailleurs le porte-parole de la CUSE Mamadou DIOUF,
il faut reprendre les armes et pousser le gouvernement respecter ses
engagements . Ainsi, le signal du cycle infernal des grves est donn.
24 Le CUSEMS a publi une liste dans laquelle toutes les IA du pays y sont reprsentes avec ltat de paiement des indemnits du Bac et du BFEM. Source : CUSEMS
25 Wal Fadjri, En grve , Samedi 29 Janvier 2011 01 :28
-
29
Comme le malheur ne vient jamais seul, les lves, partenaires non
moins important de lducation, indirectement lis la lutte dualiste entre
lEtat et les enseignants, ont commenc manifester leur humeur froisse
pour dnoncer la situation. Dans toutes les crises scolaires qui ont svi
aux Sngal, ils ont toujours jou leur partition. Sils ne sont pas
lorigine des perturbations, ils prennent souvent le train en marche. En
196826, les lycens et les collgiens avaient rejoint les tudiants dans la
grve pour apporter leur soutien car disaient- ils, les revendications de
leurs ans les concernaient plus dun titre dautant plus quils sont
appels les rejoindre dans un proche avenir luniversit. Ainsi, pour
mieux soutenir ces propos, quelques pices tmoignant de la vracit du
soutien des lves aux tudiants ont t choisies dans les dclarations
prononces par les comits de grves des lyces Blaise DIAGNE, Maurice
DELAFOSSE et John Fitzgerald KENNEDY les 27 et 28 Mai 1968 : Pour
nous lves du Lyce Blaise DIAGNE, il sagit non seulement de manifester notre
solidarit nos frres tudiants sngalais, mais aussi et surtout de porter la
connaissance de nos parents les conditions difficiles dans lesquelles nous faisons nos
tudes 27; le comit de grve du lyce technique M. DELAFOSSE
renchrit en affirmant : Aprs avoir entendu les dlgus de chaque classe (),
les lves du lyce technique M. DELAFOSSE souscrivent sans rserve aux dolances des
tudiants 28. Mme chant de cloche est entendu chez les lves du lyce
John F. KENNEDY qui ont dcid une grve gnrale et illimite des cours partir
du 27 mai 1968. Elles entendent ainsi apporter leur soutien aux justes revendications des
tudiants en matire dattribution de bourses 29.
Lorsque la crise scolaire30 de lanne 1980 occasionne par le
26 Abdoulaye BATHILY, Mai 68 Dakar ou la crise universitaire et la dmocratie, Editions Chaka, Paris, Aot 1992, 192p.
27 Ibidem, p72.
28 A. BATHILY, p73
29 Ibidem, p74
30 1973 marque une anne de grve pour les lves. La grve a clat peu de temps aprs celle des professeurs du SES.
-
30
SUDES a clat, les lves se sont fait entendre en sinvitant dans le bras
de fer opposant le SUDES et lEtat. De par leurs ractions, sans risque de
se tromper, on peut affirmer quils se sont rangs du ct de leurs
professeurs pour les appuyer dans la lutte. Ainsi, le succs de la grve fut
assur par la mobilisation des lves et tudiants qui, dans bien des
tablissements, empchrent les non grvistes, Sngalais et Franais de
lassistance technique de dispenser normalement leurs cours toute la
journe du 13 mai 1980. Donc, lissue de cette rtrospective des
mouvements dhumeurs dlves, on note toujours une invitation force
des potaches dans la crise scolaire, quils en soient les prcurseurs ou pas.
Cette mme attitude des lves des annes 70 et 80, quon peut qualifier
de constante, est toujours observe aujourdhui chez les lves avec bien
sr des proccupations diffrentes (la variable), proccupations trahies
par les cris dalerte qui schappe de la masse : nous voulons tudier .
Face la situation de grve non moins ennuyeuse pour les lves,
ces derniers, se sentant menacs (anne blanche qui ronde, examens qui
se rapprochent, programme inachev..), le font savoir avec les moyens du
bord. Lors dune marche pacifique tenue jusqu'au niveau de la police des
Parcelles, envahissant nouveau les artres de la banlieue pour
exprimer leur ras-le-bol face au bras de fer entre gouvernement et
enseignants, les potaches scandaient : Nous voulons tudier. Et si a continue,
nous allons dconner 31. Depuis deux semaines, mme si la grve des
enseignants continuait, celle des lves fait la une de lactualit scolaire.
De la capitale nationale (Dakar) aux capitales rgionales (De Tamba
Saint- Louis en passant par Kaolack et Louga), les lves sortent dans la
rue soit pour manifester pacifiquement, soit en usant la manire forte
avec des altercations avec les forces de lordre (jets de pierres, pneus
brls).
31 Le Matin, Vendredi 4 Mars 2011
-
31
Ces manifestations, pacifiques ou violentes, sont colores par les
slogans lancs par les lves, slogans qui trahissent lobjectif des sorties
des lves dans les rues : Nous voulons tudier . Et la nouveaut dans
ce dml est lapparition dun phnomne tout fait imprvu secrt par
limagination des lves dos au mur, dsorients. Au lieu des marches, les
lves ont adopt une nouvelle tactique. Jugeant la situation
abracadabrante, ils utilisent des cadenas pour fermer les salles de classes
et le portail de lcole pour signifier aux autorits quelles ont
expressment ferm lcole avant son terme. Cette situation a t
observe aux parcelles assainies Dakar ainsi qu Louga, au lyce Malick
SALL avec une moindre mesure. Dans ce cas prcis, les lves sentassent
devant le portail de lcole, empchant tout lve dy entrer32 et ne
laissant passer que les professeurs et le personnel administratif.
La grve ne profite personne et incite mme les antagonistes
porter atteinte aux droits de certains (les lves) ou ne pas sacquitter
convenablement des tches dvolues (Etat, professeurs). Elle empche
non seulement les lves de jouir pleinement de leur droit lducation,
mais incite aussi les professeurs remettre en cause leur statut
denseignant tout en percevant la fin du mois lintgralit de leur salaire,
vritable cas de conscience pour beaucoup dentre- eux. LEtat, trs
laxiste, au lieu de chercher satisfaire les revendications des syndicats,
rsolution ne pas mesurer sous langle des enseignants mais sous le
sceau de la bonne marche du systme ducatif sngalais, rejette toute la
responsabilit des perturbations sur le dos des enseignants surtout quand
travers la presse les parents dlves vituprent sur les stratgies des
syndicats. Cette situation de duel interpos incite les potaches sortir
dans la rue pour extrioriser leur ras-le-bol en procdant par des marches
pacifiques ou violentes et fermant eux-mmes avec des cadenas les
32Cest la forme de grve quon appelle piquet de grve
-
32
portes des classes comme cest la cas aux parcelles assainies Dakar ou
bloquant toute ente dans ltablissement aux lves en sentassant
devant le portail (lyce Malick SALL de Louga).
Quand la grve se dclenche, tous les esprits schauffent et tout un
chacun commence dj mesurer les consquences ngatives si minimes
soient-elles. Chaque protagoniste cherche situer le tort de lautre ct.
Ce quil faut noter tout de mme, est que la vritable origine des grves
rcurrentes se trouve dans le non respect des engagements de lEtat
sngalais pour la satisfaction des revendications des syndicats
enseignants. Lorsque la grve clate, les parents dlves, partie
intgrante du systme ducatif, sont laisss en rade mais pourtant ils
jouent un rle sans commune mesure dans la recherche de solutions la
crise.
-
33
Chapitre V : Les Parents dlves
dans les crises scolaires
-
34
1. De lorganisation de la FENAPES
La FENAPES est une organisation qui regroupe des A.P.E
(Association des Parents dElves) avec un bureau fdral, un Secrtariat
excutif et des unions rgionales et dpartementales.
Elle a comme objectif la dfense des intrts de lcole et de
luniversit, des lves, des tudiants et des enseignants33. Elle est aussi
destine assurer, avec les diffrents partenaires, une synergie la plus
large possible.
La FENAPES regroupe en son sein des A.P.E. du public comme du
priv, du lac comme du confessionnel.
Seulement, depuis le congrs de Tambacounda en 2003, la FENAPES
rencontre plusieurs difficults qui constituent un frein pour atteindre ses
objectifs.
Ces problmes rsident surtout au niveau de lorganisation qui trane
beaucoup de lacunes parmi lesquelles : des APE qui ne sont pas encore
montes dans certaines coles, des APE montes mais non affilies la
FENAPES, des structures rgionales et dpartementales en lthargie, un
plan daction bloqu faute de moyens logistiques et financiers.
Le renouveau du mouvement passe par une politique
organisationnelle qui prenne en compte une vritable mobilisation sociale
en vue dune adhsion massive des parents dlves.
La stratgie pour y parvenir repose sur la mise sur pied, au niveau
de chaque tablissement (Ecole primaire- CEM- Lyce- Universit) dune
A.P.E. forte, la scurisation juridique des A.P.E. afin de sauvegarder leur
autonomie qui attnue lomniprsence des autorits scolaires, la mise en
rseau des A.P.E. locales autour des unions dpartementales et
rgionales, le renforcement financier par une politique de cotisation
33 Article 3 du rglement intrieur de la FENAPES
-
35
rationnelle, lamlioration de leur fonctionnement par la formation des
responsables tous les niveaux, la mise en uvre dune action continue
pour linformation et la formation des parents avec recours aux mdias, la
valorisation constante des actions des APE en rendant plus visible leurs
contributions et leurs ralisations dans tous les domaines.
2. La participation constructive des parents dlves
Partenaires non moins importants de la famille ducative, les
parents dlves ont toujours jou leur partition dans la rsolution des
tensions scolaires. Leur prsence fut signale dans toutes les rencontres
que lEtat a organises et qui mettent au premier plan les intrts de
lcole. Durant les vnements de Mai 1968, les parents dlves travers
la Fdration Nationale des Parents dElves du Sngal (FENAPES), ont
activement particip la recherche de solutions ngocies et ont marqu
de leur empreinte toutes les rencontres entre Etat et UDES,34 la structure
reprsentante des tudiants. Lors de la toute premire ngociation
officielle du 5 septembre 1968 entre le gouvernement reprsent par le
ministre de lducation et des membres de son cabinet ( Abdoulaye
NIANG, et Thierno BAH, respectivement directeur de cabinet et conseiller
technique n1) et les tudiants, une dlgation de lUNTS35 dirige par
Alioune CISSE et comprenant Iba Der THIAM secrtaire du SUEL36, Sga
Seck FALL, secrtaire gnral du SPAS37 et une dlgation de la
Fdration Nationale des Parents dElves du Sngal (FENAPES) sont
invites aux ngociations avec un statut dobservateurs et de
modrateurs. Mais trs vite leur apport fut tellement consquent quelles
34 UDES : Union Dmocratique des Etudiants du Sngal
35 UNTS : Union Nationale des Travailleurs du Sngal
36 SUEL : Syndicat Unique de lEnseignement Lac
37 SPAS : Syndicat des Professeurs Africains du Secondaire
-
36
finissent par jouer un rle actif dans les changes et disaient-elles
trouver une solution dans lintrt national et la paix sociale .
Lorsque la grve universitaire et scolaire sest dclenche, elle fut
mte par les forces de scurit avec une svrit extrme. Les tudiants
sont perscuts jusque dans leurs chambres, leurs matriels dtruits ou
vols, les matelas incendis38. Cette rpression dmesure des autorits
augmenta le capital de sympathie dont bnficiaient les tudiants auprs
de la population. Ce qui les mettait en pole position par rapport au
gouvernement surtout aprs les accords du 12 juin 1968. Mais la
FENAPES, soucieuse de la rsolution de la crise scolaire et universitaire
lamiable, se range du ct de lEtat sngalais et son poids a pes sur le
rapport de force entre le gouvernement et les tudiants. Ainsi, lopinion
commence se lasser aprs quatre mois daffrontement et de tension. La
FENAPES aspire jouer pleinement son rle pour une rsolution apaise
de la crise. Elle jouira de sa force de pression lors des ngociations du 13
Septembre 1968 entre Gouvernement et UDES. Lors de la rencontre,
lUDES avait recommand la participation effective des reprsentants des
lves aux ngociations ; ce que le gouvernement refusa
catgoriquement. La FENAPES, du mme avis que lEtat, dnia la
participation des lves aux dbats sous prtexte quils ne sont majeurs et
affirme quelle pourrait reprsenter valablement leurs enfants . Ainsi,
neut t leur intervention, les ngociations entre Gouvernement et UDES
auraient capotes.
Durant tout le droulement des vnements de Mai 68, les parents
dlves ont jou un rle actif dans la recherche de solutions apaises la
crise. Parfois, en fonction des circonstances, leur poids a toujours chang
les rapports de force entre Gouvernement et UDES. Quand la rpression
38 Mmorandum de lUED sur les vnements des 27, 28 et 29 Mai lUniversit
-
37
policire fut dmesure et insupportable jusqu suscite lindignation,
lopinion publique sest range du ct des brims. Cette mme opinion
publique travers la structure des parents dlves (la FENAPES) na pas
hsit dfendre les positions du gouvernement lors de la rencontre du
13 Septembre 1968 pour que les ngociations aboutissent et sauver les
meubles dans lintrt de lcole et de la paix sociale.
Leur participation constructive dans les tats gnraux de
lducation et de la formation de 1981 leur a permis dtre renforcs par
lEtat sngalais et dasseoir leur prsence au sein des tablissements.
Ainsi, les pouvoirs publics exprimrent leur volont dassocier davantage
les parents dans luvre de redressement de notre systme ducatif
notamment dans le financement des investissements : construction et
quipement de classes, rfection et entretien, gardiennage, prise en
charge des factures deau, de tlphone et dlectricit, achat de
fournitures scolaires, pour ne citer que ceux l.
Au rsultat, linfluence grandissante des parents dlves dans le
systme scolaire nest plus dmontrer. Le rle quils ont jou dans la
recherche de solutions durant les crises scolaires des annes 60 et 70 a
encourag leur institutionnalisation dans le milieu scolaire. Ainsi, les
Associations des Parents dElves (A.P.E.) se forment et se structurent
aux niveaux local et national. Une grande part du financement des tudes
des apprenants est prise en charge par elles. Du coup, elles deviennent de
vritables plaques tournantes dans la bonne marche de la vie scolaire.
Cependant, leur prsence nest pas un gage de stabilit dans le milieu
scolaire. Les grves continuent de plus belle et charrient derrire elles ses
lots de mfaits impactant sur le systme ducatif.
-
38
Deuxime Partie :
Les consquences de la grve et
la ncessit de nouvelles
stratgies de lutte pour
pargner les apprenants
-
39
CHAPITRE I :
LES DIFFFERENTES
STRATEGIES DE
LUTTE ET LEURS
CONSEQUENCES
-
40
I/ La grve
A/ Dfinition
La grve se dfinit comme un arrt concert et collectif du travail
observ par les travailleurs dans lentreprise pour obtenir la satisfaction
des revendications professionnelles. Depuis 1970, il a t consacr par la
constitution de 1970 comme un droit. Ainsi, il y est notifi : Le droit de
grve est reconnu. Il sexerce dans le cadre des lois qui le rgissent (article 20,
alina3). Cest une libert individuelle exerce collectivement. Elle fut la
mthode de combat utilise par les travailleurs contre leurs employeurs
pour faire pression sur eux et demander la satisfaction de leurs
revendications.
Elle revt plusieurs formes : la grve de piquet, la grve sur le tas.
Ce sont des arrts de travail accompagns dune occupation des lieux de
lextrieur et de lintrieur. Le piquet de grve consiste la prsence des
grvistes la porte de l'entreprise o se droule le conflit collectif afin de
dissuader leurs collgues ou camarades de travail de rejoindre leurs
postes et de les inviter regagner le mouvement de grve. S'il s'agit tout
simplement pour les grvistes d'informer leurs camarades et de les inviter
se joindre au mouvement, le piquet, sous cet aspect, est licite. S'il s'agit
au contraire de faire obstacle l'exercice de la libert de travail, il est
irrgulier. Le piquet de grve se pratique en dehors du lieu de travail
contrairement la grve sur le tas.
Cette dernire consiste en l'occupation des lieux de travail (
lintrieur) par les grvistes pendant les heures de service.
La grve perle est une baisse des cadences ou une excution du
travail au ralenti sans toutefois quil y ait arrt total de toute activit. Ce
sont des mouvements de brve dure : quelques heures, une heure, une
demie, voire un quart dheure. Elle est connue sous le nom de dbrayage.
Au Sngal, il est utilis par les enseignants comme forme de grve en
-
41
guise davertissement au dbut des mouvements dhumeur. Parfois, il est
altern avec larrt systmatique des cours. A chaque fois que cest le cas,
les heures du dbrayage sont utilises par les enseignants pour tenir leur
assemble gnrale afin dvaluer la situation de la grve et
ventuellement prparer un nouveau plan daction. Toutefois, son illicit
ou son licit devant la loi pose problme car cest une forme de grve
que le lgislateur navait pas prvue dans la jurisprudence do limbroglio
juridique constat.
A la diffrence de la grve simple (arrt du travail concert et
collectif), les deux formes prcites portent atteintes lexercice de la
libert de travail si dans lentreprise existent des non grvistes. La grve
perle ou dbrayage, fait inconnu dans la lgislation sngalaise, pose un
problme juridique. Certes, faire la grve est un droit, mais lexercice de
la libert de travail en est un autre. Pour mieux prvenir et prendre en
charge certaines divagations lies la pratique de grve non prvues par
la loi, le texte sur le droit de grve fut complt.
B/ Les limites du droit de grve
Dans la nouvelle constitution de 2001 vote par le peuple
sngalais, un rajout a t fait sur le texte en rapport avec le droit de
grve. Ainsi, il a t prcis que le droit de grve est reconnu. Il sexerce dans le
cadre des lois qui le rgissent. Il ne peut en aucun cas ni porter atteinte la libert de
travail, ni mettre lentreprise en pril . La dernire partie du texte vient un peu
restreindre le champ de libert quoctroyait lancien texte de 1970. Il
essaie de protger les non grvistes et lentreprise. Ce quil faut noter est
que latteinte lexercice de la libert de travail nest pas trop remarque
dans les lieux de travail en priode de grve surtout dans le cadre de
lducation. Puisque les enseignants sont regroups dans plusieurs
syndicats; certains, de concert entre-eux, peuvent aller en grve au
moment o dautres ne le sont pas. Ce qui veut dire que certains
-
42
enseignants font cours, et dautres sont en grve, sans aucune atteinte
lexercice de la libert de travail.
La deuxime partie du texte relatif au droit de grve exhorte
les ayant droit ne pas mettre en pril lentreprise . Pour mieux comprendre
cette expression, il serait intressant de sarrter sur la notion de
pril .Il se dfinit dans le dictionnaire juridique comme une situation de
danger imminent et grave, une situation hauts risques qui menace une personne, un
bien, la socit et cre un tat durgence. Il y a donc pril lorsque sa vie, sa sant ou ses
intrts sont menacs . Pour la grve enseignante, les menaces sont une
anne blanche ou invalide, un quantum horaire au rabais, un programme
inachev, une baisse du niveau des lves, bref une anne perdue pour
les lves Ainsi, son exercice ne peut-il pas tre jug anormal quand la
dsorganisation quelle cre est disproportionne par rapport aux rsultats
attendus de la grve par les enseignants ? Plus encore, les consquences
de la grve enseignante ne sont-elles pas plus ressenties par les autres
partenaires de lducation (lves, parents dlves) que lemployeur lui-
mme (lEtat) ? Pour ce cas prcis, lentreprise est symbolise par le
systme ducatif partag entre lEtat, les professeurs, les lves et les
parents dlves. Entre-eux, lEtat est le partenaire qui souffrent le moins
de la lutte car les effets le touchent indirectement. Les vrais perdants sont
les lves et les parents dlves, trangers la source du duel. Ce qui
peut, bien des gards, tre en porte--faux avec lobjectif de la grve39.
La nouvelle constitution de 2001 a prcis les limites du droit de
grve contrairement celle de 1970 o le champ de libert tait beaucoup
plus largi. Ainsi, un dbat souvre sur lapplication stricte de lexercice du
droit de grve. Selon le professeur Roche Gnahoui David, lexercice normal
du droit de grve connat une limite supplmentaire au nom de lintrt de lentreprise, la
survie de lentreprise ou mieux sa prennit alors que le Pr Abdoulaye SAKHO
39 Lintention de nuire lemployeur qui anime les grvistes comme le prjudice que cause la grve lentreprise sont inhrents au droit
de grve lui-mme. (Henri-Jol TAGUM FOMBENO Docteur dEtat en droit, Propos sur le droit de grve dans la nouvelle constitution du
Sngal )
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affirme quil sagit l dune restriction constitutionnelle au droit de grve
au profit de lintrt de lentreprise. Mais, lexercice du droit de grve dans
le cas des enseignants dcoule aussi sur une violation du droit dautrui
(droit lducation des enfants) do la complexit de ce cas de figure.
Il serait incomprhensible pour certains daccepter lide selon
laquelle les enseignants grvistes encourent des effets ngatifs sur leur
situation tant la grve est ancre dans le quotidien de lcole depuis les
annes 2000. Lune des consquences qui touchent foncirement les
enseignants en cas de grve est labattement de salaire. Largent est le nerf
de la grve .En effet, par le biais de largent, lemployeur (lEtat) essaie de
sanctionner les enseignants aprs quil et recours la grve. Cest pour
cela que la lgislation interdit toute sanction pcuniaire lendroit des
salaris en grve. Selon larticle 129 du code du travail sngalais, il est
interdit lemployeur dinfliger des amendes . Toutefois la conception du mot
amende peut tre perue diffremment selon les statuts
(employeur/employer).Ce que lemployeur comprend travers
amende nest rien dautres que le nombre dheures de travail non
effectues par le travailleur et dfalques en espce du salaire total
initialement d. Cette raction de lemployeur peut se comprendre
dautant plus quil est bien nonc dans ce mme code du travail qui
interdit les amendes que le salaire est peru aprs service effectu. Donc,
le salari (lenseignant) qui fait grve accepte de perdre une partie de sa
rmunration, cela en vertu du principe selon lequel pas de travail, pas de
salaire. Ainsi, cette rgle qui relve du bon sens, est en ralit un moyen
efficace de pression pour lEtat qui lutiliser pour indisposer les grvistes.
Gnralement cest le cas quand les enseignants se lancent dans des
grves tournantes, grves bouchon ou grves courtes et rptes.
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C/ Les consquences de larrt des cours
1. Grve et arrt des cours
La grve se dfinit comme un arrt concert et collectif du travail du
travail observ par les travailleurs. Chez les enseignants, la grve est
assimile larrt des cours, mthode la plus prise et la plus utilise. La
socit a cette mme apprhension de la grve. Ainsi dans notre tude, le
pourcentage des lves contre la grve (59,15%) vient confirmer
lopposition manifeste de ces derniers larrt des cours. Toutefois, cette
opposition la grve enseignante nest pas gratuite. Elle est motive par
beaucoup dapprciations ou raisons formules par les lves qui
impactent sur leur avenir en gnral et sur leur tude en particulier.
2. Les mfaits de larrt des cours sur les lves
Les consquences de la grve sont nombreuses et impactent
beaucoup sur lavenir et ltude des apprenants. Si toute la communaut
ducative semble les apprhender, les lves en sont beaucoup plus
conscients. Malgr cet tat de fait, les rponses des lves sur la question
si ils sont daccord avec les enseignants qui sont en grve sont plutt partages
entre le oui et le non .
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Fig.1 Effectifs par ge des lves de Terminale
Moyenne dge= 20 ans
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
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Fig.2 Effectifs par ge des lves de Premire
Moyenne dge= 19 ans
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
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Fig.3 Effectifs par ge des lves de Seconde
Moyenne dge= 18 ans
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
Fig.4 Moyenne dge= 16 ans
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
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Fig.5 Moyenne dge= 15 ans
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
Fig.6 Moyenne dge= 14 ans
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Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
Fig.7 Moyenne dge= 16 ans
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
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Fig.8 Moyenne dge= 18 ans
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour
les pargner, commune de Louga.
Fig.9 Les rponses des lves des six niveaux sur la question n5 du questionnaire
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de
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lutte pour les pargner, commune de Louga.
Nous notons quau premier cycle, les lves sont foncirement
contre la grve des enseignants. Le pourcentage des avis rpondant
au non est non ngligeable : en classe de Troisime, il est de
66,66%, en Quatrime 71,42% et en Cinquime 63,63%. Dans le
cycle moyen, les lves ne sont pas encore trs rflchis (lge
moyen des lves interrogs tournent autour de 15 ans) ; ils
demeurent tout fait gostes car ils ne pensent qu leurs tudes et
sont contre tout intrus qui menacerait ou perturberait leur
enseignement.
Par contre, dans le second cycle, les avis favorables la grve
lemporteraient lgrement mme si nous notons un ballotage entre
le oui et le non en classe de terminale (75% en Seconde,
100% en Premire et 50% en Terminale). Est- ce cause de la
maturit des lves du lyce plus aptes comprendre les causes et
les enjeux des grves ? La question reste entire. Mais ltude des
raisons donnes par les apprenants permettront de mieux analyser
les avis entre le oui et le non sur la grve enseignante.
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Fig.10
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de
lutte pour les pargner, commune de Louga.
2.1. Lanalyse qualitative des avis contre la
grve
Dans le premier cycle, les lves sont trs critiques lgard des
enseignants. Les observations formules sur la grve pousent plusieurs
thmes axs sur lanne blanche, les classes dexamen, les programmes
courts suivis dun niveau faible, le redoublement, le dcouragement des
lves bref, un avenir hypothqu. Lgosme des enseignants qui ne
dfendent que leurs intrts congrgationnistes sans tenir compte des
lves, la politique qui souille parfois les mouvements dhumeur sont
entre autres avis formuls par les lves du premier cycle pour critiquer la
grve enseignante. Certains lves poussent mmes le bouchon plus loin.
Ils dclarent catgoriquement tre opposs la grve car cette dernire
nest pas la solution efficiente et de nouvelles stratgies de grve doivent
tre utilises.
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En somme, les raisons dclines par les lves du moyen cycle sont
plus que valables pour fustiger la grve enseignante. Programme inachev
suivi dun niveau faible mnent le plus souvent vers des redoublements,
des difficults lexamen, le dcouragement des lves. Les mfaits
peuvent dpasser le cadre personnel de llve quand la grve gangrne
le systme avec une anne blanche qui plane et lavenir des lves en jeu.
Malgr tous ces mfaits qui menacent le systme ducatif, les
lycens sont plus favorables la grve des enseignants. Le pourcentage
des lves contre les mouvements dhumeur est moins marqu et est de
31%. Mais malgr cette tendance favorable la grve, cette position
nocculte en rien les griefs formuls par lautre tendance rticente. Ces
griefs sont inscrits dans les diffrentes phrases formules par les lves
dans leurs rponses : Les professeurs aiment la facilit, ils doivent limiter leurs
besoins car lEtat ne peut pas tous les satisfaire ou les professeurs nous empchent
de jouir de nos droits sont entre autres avis sans compter ceux
susmentionns par leurs cadets du cycle moyen (programme inachev,
niveau faible, difficults lexamen).
2.2. Les avis favorables la grve
Si nous considrons les affirmations ressorties par les lves des
deux cycles, nous constatons que les apprenants du lyce sont plutt
consentants la grve (69%) que leurs cadets (33%).Cette position est
due au fait que les lycens sont beaucoup plus matures et plus rflchis.
Leur moyenne dge qui tourne autour de 20 ans confirme bien des
gards le constat, et devant la loi, ils sont tout fait majeurs mme sils
ne sont pas encore luniversit. Ainsi, avec cet ge de maturit, les
lycens sont plus aptes comprendre tous les enjeux qupouse la grve
enseignante. De plus, la politique de communication mene par les
syndicats denseignement auprs des autres acteurs de la communaut
ducative pour expliquer et justifier les mouvements dhumeur a port ses
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fruits et a permis aux lves du secondaire, puisque le dbat stait pos
dans les classes entre lves et professeurs, de mieux apprhender les
contours du duel entre syndicats enseignants et lEtat. A travers les
supports mdiatiques (dbat travers la TFM par exemple), les
responsables syndicaux ont largement dbattu sur les causes de la grve
et sa radicalisation. Cest pourquoi les arguments apports par les lycens
et les collgiens cadrent bien avec ceux clams devant lopinion publique
par les syndicalistes. Ils sont axs sur un meilleur traitement salarial avec
un alignement des indemnits au mme niveau que les autres
fonctionnaires de lEtat ayant les mmes diplmes queux, un
rehaussement du statut de lenseignant en lui accordant tous les droits
affrant la fonction (formation, avancement), bref, le rtablissement
dune justice sociale.
Il semblerait incomprhensible que certains lves soient favorables
la grve, mais les arguments donns sont plausibles et rflchis pour
soutenir dun pied les enseignants dans leur lutte. Toutefois, aprs la
prsentation des avis partags entre le pour et le contre la grve,
il serait judicieux daller au-del des prjugs et des ides partisanes pour
mieux jauger la situation conflictuelle et lanalyser avec objectivit,
marquer dun trait les vritables plaies qui gangrneraient le systme
ducatif et causes par la grve enseignante sur lducation.
2.3. Le capital motion secrt par larrt
des cours chez les lves
Lanalyse des questionnaires des lves a rvl les mfaits de
larrt des cours comme forme de grve sur le systme ducatif et plus
prcisment sur les lves. La baisse continue du niveau des lves, les
programmes inachevs, les taux de redoublement levs entre autres
forment le long chapelet de consquences ngatives sur lenseignement.
Malheureusement, la situation na pas fini de crer son lot de difficults.
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Le capital motion secrt par larrt des cours mine
psychologiquement les apprenants avec les diffrents sentiments ngatifs
qui les animent dans leur for intrieur. A travers un rpertoire dmotions
propos dans un questionnaire, chaque lve a coch le sentiment
prouv quand il a rat un cours cause de larrt des cours. Ainsi, au
lyce, 37,5% des lves sont mcontents (Tle= 62,5%, Pre= 00%, 2nde=
25%), 62,5% angoisss (Tle= 37,5%, Pre= 100%, 2nde= 75%) ; par
contre au collge, le mcontentement gagne 65,45% des collgiens (3e
=70%, 4e =64,28%, 5e =54,54%), langoisse 29,09% (3e =30%, 4e
=28,57%, 5e =27,27%). 3,63% des collgiens sont contents et 1,81%
dentre-eux restent impassibles face la grve.
Fig.11 Le capital motion des lves dans les six niveaux (de la Terminale la Cinquime) en %
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de lutte pour les pargner, commune de Louga.
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Fig.12 Le capital motion des lves dans chaque cycle en %
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles stratgies de
lutte pour les pargner, commune de Louga.
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Fig.13
Source : NIANG Cheikh, Enqute 2012 sur les consquences de la grve sur les lves et la ncessit de nouvelles
stratgies de lutte pour les pargner, commune de Louga.
A travers cette analyse quantitative du capital motionnel des
lves, nous sentons nettement le poids psychologique de larrt des
cours sur les lycens et les collgiens.
Par niveau ou par classe
Les donnes statistiques prsentes disent longs sur le choc
psychologique prouv par les lves. En sappesantissant sur les classes
dexamen de la terminale au second cycle et de la troisime au premier, le
degr de mcontentement secrt par les grves est trs lev et atteigne
respectivement 62,5% et 70%. Les Terminales et les Troisimes
constituent les classes de fin de cycle partir desquelles les examens
nationaux sont organiss pour harmoniser le passage des apprenants vers
un cycle suprieur. Pour cela, tout un travail prparatoire sexcute en
amont durant lanne scolaire dans les classes. Les programmes sur
lesquels se portent les preuves des examens nationaux de fin danne
(Baccalaurat, BFEM) sont drouls, les leons tudies, les exercices, en
guise de renforcement, traits et corrigs, les valuations excutes pour
des remdiassions aux apprentissages sans compter les heures
denseignement en dehors des heures normales ou officielles. Bref, cest
tout un processus avec des tapes de travail bien huiles quil faut
excuter pour garder ses chances de russite lexamen.
Malheureusement, ce processus est bris par les grves cycliques des
enseignants qui perturbent non seulement lenseignement des lves mais
clouent aux piloris le systme ducatif. Ainsi, depuis une dizaine danne,
les candidats aux examens du Bac et du BFEM, partent lexamen
dmoraliss, la peur dans le ventre car soient ils nont pas termin leur
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programme, soit le peu denseignement acquis nest pas bien matris,
faute de quantum horaire non atteint. Cette situation a secrt une forte
motion ngative chez les candidats qui subissent les contrecoups dun
duel entre syndicats enseignants et lEtat dont ils sont trangers et
demeurent les premiers victimes, do le fort taux de mcontentement
observ respectivement 62,5% et 70% dans ces deux niveaux.
Langoisse est plus ressenti par les lves du second cycle plus
prcisment ceux de la Premire et de la Seconde. Pourquoi ? Pour
rpondre cette question, nous serons tents de donner une dfinition
smantique des deux termes motionnellement trs proches mais
diffrents.
Le mcontentement se dfinit comme une motion ngative
prouve dans une situation qui contrarie ses aspirations et dans laquelle
linjustice peut y jouer un rle. Lindividu mcontent est mis devant le fait
accompli quand la situation injuste se produit ou quand il narrive pas
trouver une solution la situation injuste, anormale. Cette assertion du
mcontentement peut bien expliquer dans une moindre mesure le fort
taux des mcontents chez les lves de Terminale et de Troisime,
candidats potentiels aux examens nationaux de fin danne. Quen est-il
de langoisse ?
Cest une motion ngative, plus nuance que le mcontentement.
Elle est assimile la peur, lanxit, linquitude. Langoisse ne de la
probabilit dun fait, dune situation prvisionnelle qui peut porter
prjudice sil a lieu. En Premire et en Seconde, le taux est
respectivement de 100% et de 75%. En effet, ces niveaux sont des
classes prparatoires lexamen du Bac et gardent un dcalage temporel
dau moins dune anne avant la Terminale. Quelque soit le retard accus
sur les programmes des disciplines, les professeurs et les lves pourront
samender pour faire un travail de rquilibrage afin de cibler les priorits
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et prparer les examens avec lorganisation des cours de renforcement
lcole travers les clubs dtude, dans les maisons en dehors des heures
officielles avec les cours particuliers . Donc llve a peur de ne pas
terminer le programme mais garde toujours un espoir de rattraper le
temps perdu avant les chances futures.
62,5% et 70% reprsentent respectivement les taux de
mcontentement dans les classes de Terminale et Troisime. Cette
importante charge motionnelle ngative sexplique par le statut
transitoire entre cycle quincarnent les deux niveaux prcits. Un travail
prparatoire se doit dtre excut durant lanne scolaire (programme
terminer, valuations faire). Il sy ajoute les examens nationaux de fin
danne, dernier acte pour passer dans le cycle suivant (cycle suprieur
pour les lves de Terminale, cycle secondaire pour ceux de la Troisime).
Quant langoisse, elle est plus ressentie par les classes de Seconde et de
Premire, beaucoup moins soucieuses des examens qui les attendent dans
un ou deux ans.
Par cycle
Une analyse comparative des donnes statistiques montre
indubitablement que le mcontentement (65,45%), motion ngative,
passionnelle, est beaucoup plus ressentie chez les collgiens que chez les
lycens, anims par langoisse (62,5%). En dehors de largumentaire
prsent ci-dessus pour prouver le sentiment motif prouv par les
lves de Terminale et Troisime (cf. 2.3. Le capital motion de
larrt des cours chez les lves; Par niveau ou par classe), la
maturit des apprenants y joue un rle non moins dcisif. Au second
cycle, les lves sont majeurs (biologiquement et lgalement). Leur
moyenne dge tourne autour de 20 ans. Ainsi, ils sont plus rceptifs et
plus rflchis pour comprendre les enjeux de la grve, les raisons qui
motivent les grvistes, les responsabilits des diffrentes parties
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intresses. Leurs avis sur le pour ou le contre la grve
tmoignent ses propos dautant plus que le pourcentage des favorables
atteint 68,75%. Ils sont gagns par une grande inquitude de peur de ne
pas terminer leurs programmes, de voir leur niveau dtude baisser
cause de la grve, tout de mme justifie et justifiable par eux (68,75%).
Du coup, ils ne peuvent manifester un mcontentement lgard des
enseignants en grve.
Contrairement aux lves du second cycle, ceux du premier cycle
sont plus anims par le mcontentement (65,45%). Tout dabord, ils ont
mis un avis dfavorable la grve (67,27%). Ils sont plutt proccups
par leffectivit de leurs cours que de chercher comprendre les raisons
de la grve, de situer les responsabilits des parties en conflit. Ils voient
les enseignants comme les auteurs de leur mal de par leurs arguments
formuls pour fustiger la grve. Larrt des cours occasionne des
programmes inachevs, suivi dun affaiblissement du niveau des lves
qui conduit un fort taux de redoublement, dchec et dabandon des
lves, bref, un avenir hypothqu. En plus, leur gosme se justifie par
leur degr de maturit. Lgalement et biologiquement, les collgiens sont
toujours des mineurs et les statistiques affichent une moyenne dge
hauteur de 16 ans.
Si nous considrons les lves tous cycles confondus, le capital
motion est trs remarqu. Le mcontentement, en ple position,
(59,15%) et langoisse (36,61%) dominent le sentiment des lves. Les
raisons ne sont pas chercher ailleurs mais travers largumentaire
dvelopp prcdemment dans les deux dernires sous-parties ayant trait
au capital motion par classe et par cycle.
En somme, laffectation des motions (mcontentement, angoisse)
tel cycle ou tel niveau rpond une logique normative lie la maturit
des lves. Ainsi, plus llve est mature, rflchi, responsable, plus il est
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rceptif aux enjeux de la grve enseignante. Cest pourquoi, les lycens
sont beaucoup plus angoisss que leurs cadets collgiens, plus immatures,
plus gostes et prouvent un sentiment de mcontentement cause de la
grve.
3. Lanalyse des consquences ngatives de larrt des cours sur
les apprenants
La grve enseignante, avec sa forme la plus expressive qui est larrt
des cours, na pas fini de faire des ravages sur le systme ducatif en
gnral et en particulier sur les tudes des apprenants. En effet, lanalyse
du questionnaire adress aux lves a bien tay les divers mfaits
prsents par les collgiens et les lycens qui sapent indubitablement leur
avenir travers un quantum horaire biais, un programme scolaire
inachev avec comme corollaire un abaissement du niveau des lves, un
taux de redoublement, dchec, dexclusion et dabandon lev et la
psychose dune anne blanche ou invalide pesant sur la tte des lves
comme une pe de Damocls. En plus, une tude psychologique des
lves a laiss apparaitre un capital motion trs significatif qui
imprime une empreinte motionnelle ngative sur les apprenants avec un
mcontentement et une angoisse qui colorent leur comportement.
a. Le quantum horaire est un nouveau paramtre pdagogique pris en
compte dans les critres de qualit des enseignements- apprentissages
des apprenants. Il est de 900 heures par anne officiellement. Mais cette
barre nest malheureusement pas du tout atteinte au niveau rgional
daprs les propos recueillis de M. SABALY, Inspecteur de vie scolaire
lInspection dAcadmie de Louga. La premire des raisons est certes la
grve des enseignants qui a eu un impact sans commune mesure sur le
quantum horaire, vue sa dure et la perte dheures des enseignements-
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apprentissages40. Cependant, une nuance doit tre faite sur le respect du
quantum horaire entre classes intermdiaires (6e, 5e, 4e au moyen ; 2nde,
1re au secondaire) et classes dexamen (3e, Tle). Ces dernires, daprs
M. SABALY, ne souffrent pas trop des perturbations car le quantum
horaire de ces classes dexamen est dpass de loin par les professeurs.
Des cours de rattrapages sont organiss en dehors des heures officielles
et mme au-del du 30 Juin pour renforcer les enseignements-
apprentissages des futurs candidats au BFEM et au BAC. Cependant, cest
tout le contraire pour les classes intermdiaires. Selon lInspecteur de vie
scolaire, le quantum horaire souffre plus dans ses diffrents niveaux car
en cas de grve des enseignants comme des lves, aucun rattrapage des
heures des enseignements- apprentissages nest organis pour combler le
gap horaire. Au niveau des classes dexamen, les rsultats sont en
dessous de la moyenne ou atteignent peine le taux de cinquante pour
cent malgr le dpassement du quantum horaire. Par contre dans les
classes intermdiaires, les rsultats sont satisfaisants eu gard la non
atteinte du quantum horaire. Cette situation plutt contradictoire met en
exergue la problmatique des valuations sommatives et normatives dans
les classes intermdiaires, conclut M. SABALY.
En dehors de la grve, le quantum horaire est secou par dautres
paramtres socio-scolaires comme le dmarrage tardif des
enseignements- apprentissages au dbut de lanne, les anticipations des
ftes de fin de premier trimestre auxquels il faut tenir compte dans la non
atteinte du quantum horaire. Latteinte du quantum horaire est
troitement lie au droulement d