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Licence de Sciences et Technologies
Première année – Cycle dʼintégration
UE 1C001
Chimie : Structure et réactivité
Partie II : Molécules
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SOMMAIRE
A. Structure électronique de la liaison chimique 5
I. La liaison de Lewis 5 I.1. Représentation de la liaison covalente de Lewis 5
I.2. Ordre de liaison 5
I.3. Longueur de liaison 6
I.4. Énergie de liaison 7
I.5. Moment dipolaire électrique dʼune liaison covalente 8
II. Orbitales moléculaires 9
II.1. Molécules diatomiques à deux orbitales moléculaires 9
II.1.a. Molécules homonucléaires 9
Diagramme moléculaire de H2 9
Diagrammes moléculaires de H2+, He2
+ et He2 13
II.1.b. Molécules hétéronucléaires : diagramme moléculaire de LiH 14
II.2. Molécules diatomiques à n orbitales moléculaires 16
II.2.a. Construction des diagrammes moléculaires 16
II.2.b. Diagramme moléculaire de HF 17
II.2.c. Diagramme moléculaire de O2 21
II.2.d. Diagramme moléculaire de F2 28
II.2.e. Diagramme moléculaire de N2 28
B. Structure spatiale des molécules 32 I. Schémas de Lewis 32
I.1. Valence des éléments chimiques 32
I.1.a. Valence des atomes 32
I.1.b. Règle du duet 32
I.1.c. Règles de lʼoctet et de lʼoctet réduit 32
I.1.d. Limites de la règle de lʼoctet 34
Hypercoordination (ou hypervalence) 34
Règle des 18 électrons 34
Les radicaux 34
I.2. Charges réelles et charges formelles 34
I.3. Construction des schémas de Lewis 36
I.4. Mésomérie 40
I.5. Relations schéma de Lewis–réactivité 42
I.5.a. Effets inductifs 42
Effet inductif attracteur –I 42
Effet inductif donneur +I 42
3
Influence de lʼeffet inductif sur la stabilité des édifices moléculaires 43
I.5.b. Effets mésomères 43
Effet mésomère attracteur –M 43
Effet mésomère donneur +M 44
Influence des effets mésomères sur la stabilité des édifices moléculaires 44
I.5.c. Acides et bases de Lewis 45
I.5.d. Électrophiles et nucléophiles 46
I.5.e. Relations avec les diagrammes des orbitales moléculaires 46
II. Le modèle VSEPR 47
II.1. Principe du modèle VSEPR 48
II.2. Détermination de la géométrie dʼune molécule 49
II.3. Angles théoriques vs. angles réels 50
II.4. Exemples 51
II.5. Limite de la méthode VSEPR 53
III. La polarité des molécules 53
IV. Le modèle de lʼhybridation des orbitales atomiques 55
IV.1.a. Présentation du modèle 55
IV.1.b. Hybridation sp3 de lʼatome de carbone 55
IV.1.c. Hybridation sp2 de lʼatome de carbone 56
IV.1.d. Hybridation sp de lʼatome de carbone 57
IV.1.e. Correspondance hybridation–géométrie 57
C. Stéréochimie 59 I. Formules brute, développée, semi-développée, et topologique 59
II. Isomérie de constitution 60
III. Stéréoisoméries de conformation et de configuration 60
IV. Représentation des molécules 61
IV.1. Représentation de Cram 61
IV.2. Représentation de Newman 62
V. La chiralité 63
V.1. Définition 63
V.2. Énantiomérie 64
V.3. Chiralité centrée 65
V.3.a. Règles séquentielles de Cahn–Ingold–Prelog 65
V.3.b. Descripteurs (R) et (S) 68
V.3.c. Composé méso 68
V.3.d. Diastéréoisomères (diastéréomères) 69
V.4. Chiralité axiale et atropoisomérie 70
4
D. Forces intermoléculaires 72 I. Définitions 72
II. Forces de Keesom 72
III. Forces de Debye 73
IV. Forces de London 73
V. Liaisons hydrogène 75
Les représentations des orbitales moléculaires apparaissant dans ce fascicule ont été réalisées grâce
au site OrbiMol développé par Patrick Chaquin et Franck Fuster (P. Chaquin et F. Fuster, OrbiMol,
Laboratoire de Chimie Théorique, UPMC Univ Paris 06 –UMR CNRS 7616, Paris –
http://www.lct.jussieu.fr/pagesperso/orbimol/).
5
A. Structure électronique de la liaison chimique
I. La liaison de Lewis
I.1. Représentation de la liaison covalente de Lewis
La plupart des atomes sʼassocient pour former des molécules, cʼest-à-dire des entités discrètes
constituées dʼatomes liés entre eux. Les gaz nobles quant à eux demeurent la plupart du temps sous
forme monoatomique même si des édifices moléculaires impliquant lʼargon (Ar), le krypton (Kr) et le
xénon (Xe) ont récemment été synthétisés. Les liaisons entre atomes dans les molécules sont
appelées liaisons covalentes. Elles sont formées par la mise en commun dʼélectrons de valence
des atomes. On doit à Archibald Couper, en 1858, lʼintroduction de la représentation des liaisons par
des traits entre les atomes repris dans le formalisme de Lewis. Ce trait matérialise lʼexistence dʼun
doublet dʼélectrons entre les atomes, appelé doublet liant. Les électrons proviennent chacun dʼun
des deux atomes, A et B, impliqués dans la liaison : un des électrons provient de lʼatome A, lʼautre
électron provient de lʼatome B. Ces deux électrons mis en commun entre A et B sont partagés par les
deux atomes : dans la molécule, cʼest comme sʼils appartenaient à A et à B, et sont comptabilisés
comme électrons de valence pour les deux atomes.
Les électrons de valence des atomes ne sont pas tous impliqués dans des liaisons chimiques. Les
électrons de valence qui ne participent pas aux liaisons sont aussi regroupés par deux et sont
représentés par deux points (représentation recommandée par lʼUnion Internationale de Chimie Pure
et Appliquée, IUPAC) ou un trait, au-dessus ou à côté de lʼatome : on parle de doublet non liant.
Lʼexistence de ces doublets non liants conditionne la forme dans lʼespace des molécules. Il ne faut
surtout pas les oublier en dessinant les molécules.
I.2. Ordre de liaison
Deux atomes A et B peuvent être liés par des liaisons simples ou des liaisons multiples. Il existe en
effet des liaisons doubles, dans lesquelles chaque atome apporte deux électrons pour mener à la
constitution de deux doublets liants, et des liaisons triples, dans lesquelles chaque atome apporte
trois électrons pour mener à la constitution de trois doublets liants. Chacun des doublets liants est
représenté par un trait entre les atomes. Dans la molécule résultante, tous ces électrons sont partagés
par les deux atomes. On définit l'ordre de liaison correspondant au nombre de liaisons chimiques
établies entre une paire d'atomes. Il sʼagit dʼun nombre entier positif :
Ø Un ordre de liaison de 1 correspond à une liaison simple (A–B).
Ø Un ordre de liaison de 2 correspond à une liaison double (A=B).
Ø Un ordre de liaison de 3 correspond à une liaison triple ( ).
A B A B
A B A B
A B A B
= A B
= A B
= A B
A B = A B = A B
A B
A B
C C
C CC D
A A B B
A A
B B
HO N
HO O
HN NHN O
A B A B
A B A B
A B A B
= A B
= A B
= A B
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I.3. Longueur de liaison
La longueur rAB de la liaison entre deux atomes A et B correspond au minimum de l'énergie potentielle
du système constitué par les deux atomes :
La longueur de liaison rAB est la distance moyenne entre les noyaux des deux atomes liés par la
liaison chimique. Elle correspond, en première approximation, à la somme des rayons de covalence
des deux atomes. Donc, plus le rayon de covalence des atomes est grand, plus la longueur de la
liaison est importante.
Même si elle est généralement comparable, la longueur de la liaison rAB entre deux atomes A et B
donnés dépend de la molécule où ils se trouvent. La longueur de la liaison est généralement exprimée
en picomètres (1 pm = 10–12 m) ou en angströms (1 Å = 10–10 m).
Liaison Rayon de covalence (Å) Longueur de liaison (Å)
rH = 0,34 et rC = 0,77 1,09
rH = 0,34 et rGe = 1,22 1,53
rC = 0,77 et rSi = 1,11 1,85
rI = 1,33 et rPb = 1,47 2,79
Distance internucléaire!0!
D°!
rAB!
Ep!
!!
"#
!
#
!!$!
$!
Atome A! Atome B!
rAB ≈ rA + rB"
!! !!
rA " rB "
Atome A" Atome B" Liaison A–B"
!!!!
C H
Ge H
C Si
Pb I
7
Pour deux atomes A et B donnés, Il y a également une corrélation étroite entre lʼordre de liaison et la
longueur de la liaison rAB : plus lʼordre de liaison est grand, plus la liaison est courte.
Liaison Ordre de liaison Longueur de liaison (Å)
1 1,54
2 1,34
3 1,20
1 1,47
2 1,29
3 1,16
I.4. Énergie de liaison
La formation d'une liaison entre deux atomes A et B est une réaction exothermique. Lʼénergie libérée
lors de cette formation est la variation dʼenthalpie ΔrH° mesurée dans les conditions standards (en
phase gazeuse, sous une atmosphère de pression et à 298 K) par des méthodes calorimétriques :
A (gaz) + B (gaz) → A–B (gaz)
ΔrH° est une grandeur thermodynamique macroscopique, exprimée en kJ.mol–1, négative puisque la
molécule formée est plus stable que le système constitué des deux atomes isolés. Plus la liaison
formée est stable, plus lʼénergie libérée est grande. On appelle énergie de la liaison A–B, notée D°AB,
lʼénergie quʼil faut fournir à la liaison pour quʼelle se rompe :
A–B (gaz) → A (gaz) + B (gaz)
Par définition lʼénergie de liaison D°AB, exprimée en kJ.mol–1, est positive et égale à –ΔrH°. Plus la
liaison A–B est stable (forte), plus D°AB est grande, et inversement. Pour deux atomes A et B
donnés, Il y a une étroite corrélation entre la longueur de la liaison rAB et lʼénergie D°AB de cette
liaison. En effet, plus la liaison est courte (plus lʼordre de liaison est grand), plus lʼénergie de
liaison est grande.
Liaison Ordre de liaison Longueur de liaison (Å) D° (kJ.mol–1)
1 1,54 346
2 1,34 602
3 1,20 835
1 1,47 305
2 1,29 615
3 1,16 887
1 2,05 226
2 1,49 425
C CC CC C
C NC N
C N
C C
C C
C C
C N
C N
C N
S S
S S
8
I.5. Moment dipolaire électrique dʼune liaison covalente
Les atomes tendent à acquérir la configuration électronique du gaz noble le plus proche en établissant
une ou des liaisons. Une liaison entre deux atomes peut se former :
Ø Par le transfert dʼélectrons de valence de lʼatome le plus électropositif vers lʼatome le plus
électronégatif : il sʼagit dʼune liaison ionique (formation dʼanions et de cations).
Ø Par le partage mutuel dʼélectrons de valence par les deux atomes : il sʼagit dʼune liaison
covalente.
Il y a une transition continue entre le caractère ionique et le caractère covalent dʼune liaison. Le
caractère ionique dʼune liaison dépend de la différence dʼélectronégativité (Δχ) entre les deux atomes
liés par cette liaison. Une liaison nʼest jamais purement ionique ou covalente.
Pour une liaison donnée, on peut définir un pourcentage dʼionicité δ qui est compris entre 0 et 1
(entre 0 et 100% dʼionicité). La polarisation dʼune liaison covalente faire apparaître deux charges
partielles (δ × e)+ et (δ × e)–, où e représente la charge élémentaire (e = 1,60 × 10–19 C). Ces deux
charges sont donc égales en valeur absolue mais de signes opposés, et sont portées par les deux
atomes de la liaison. Plus la liaison est polarisée plus la valeur absolue des charges
partielles⏐δ × e⏐est grande. Ces charges sont souvent notées simplement δ+ et δ–. Les deux
charges partielles δ+ et δ– sont séparées par une distance r égale à la longueur de la liaison et
constituent un dipôle électrique. Le dipôle électrique dʼune liaison covalente est caractérisé par un
vecteur appelé moment dipolaire électrique, noté µ!
et orienté, par convention, de lʼélément le
Différence dʼélectronégativité"
100%!
0%!0! 2!1!
0 ! "# < 0,4 !0,4 ! "# < 2""# > 2 !"Ca
ract
ère
ioni
que!
0,4!
!"
!"
C–C"C–H"Liaisons homonucléaires"
Halogène–C"O–C, N–C!
C–Métal"O–Métal"N–Métal!
(! $ e)–!
(! $ e)+ –! +!
covalence « pure » "covalence polarisée"caractère ionique prépondérant""
!"+"
9
plus électronégatif vers lʼélément le moins électronégatif (cʼest à dire de la charge partielle
négative vers la charge partielle positive).
La norme du moment dipolaire électrique dʼune liaison covalente de longueur r et de pourcentage
dʼionicité δ est égale à :
Cette norme est exprimée en coulomb.mètre (C.m). Cependant, comme les valeurs ainsi obtenues
sont très faibles (de lʼordre de 10–30 C.m), une autre unité, le Debye (D), est couramment utilisée,
avec 1 D = 3,33564 ×10–30 C.m.
Lʼhydrure de lithium LiH par exemple possède une liaison de longueur r = 1,59 Å et un moment
dipolaire de norme µ = 6,00 D. On peut en déduire que la liaison Li–H a un caractère ionique de
78,5% :
! = µ
e ! r = 6,00 ! 3,33 !10–30
1,61!10–19 !1,59 !10–10 = 0,780 dʼoù les charges partielles +0,780Li–H –0,780
Pour une même longueur de liaison r, plus la liaison est polarisée plus la norme du moment dipolaire
électrique µ et le caractère ionique δ sont importants :
r (Å) Δχ µ (D) δ
1,35 1,43 1,41 0,217
1,34 0,38 0,70 0,109
1,34 0 0 0
II. Orbitales moléculaires
Les schémas de Lewis permettent de représenter la liaison chimique simplement. Cependant, ils ne
sont fondés que sur le décompte des électrons de valence, déduit des configurations électroniques. Ils
ne prennent pas en compte l'énergie de ces électrons, ni le fait que la zone de l'espace dans laquelle
leur probabilité de présence est élevée est variable. Une description moderne de la liaison chimique a
ainsi été mise au point à partir de la notion d'orbitale atomique : il s'agit de la notion d'orbitale
moléculaire.
II.1. Molécules diatomiques à deux orbitales moléculaires
II.1.a. Molécules homonucléaires
Diagramme moléculaire de H2
La molécule H2 est obtenue par formation dʼune liaison covalente entre deux atomes dʼhydrogène.
Cette liaison résulte du recouvrement en phase des orbitales atomiques de valence des deux atomes
dʼhydrogène impliqués dans la liaison. Les orbitales atomiques de valence des deux atomes
Li–H !Li = 0,97
" µ
!+ "
!– !H = 2,20 Li–H
0,785– 0,785+ dʼoù les charges partielles"
C F C F+0,217 –0,217
H S H S+0,109 –0,109
C C
µ = ⏐δ × e⏐× r
10
dʼhydrogène ϕ1s(A) et ϕ1s(B) se combinent linéairement (théorie LCAO pour « Linear Combination of
Atomic Orbitals ») pour donner deux nouvelles orbitales : deux orbitales moléculaires ψ+ et ψ– .
L'approximation pour décrire les orbitales moléculaires à l'aide d'une combinaison linéaire d'orbitales
atomiques a été introduite en 1929 par John Lennard-Jone. Elle consiste à envisager deux façons de
combiner les deux orbitales atomiques : une façon constructive (recouvrement liant), et une façon
destructrice (recouvrement anti liant) :
Recouvrement liant : ψ+ = Aϕ1s(A) + Bϕ1s(B)
Recouvrement anti liant : ψ– = Aϕ1s(A) – Bϕ1s(B)
Dans ces expressions, A et B sont deux constantes positives. La normalisation des fonctions dʼondes
conduit ensuite aux expressions :
Recouvrement liant : ψ+ = 1
2 (1 + S )(ϕ1s(A) + ϕ1s(B))
Recouvrement anti liant : ψ– = 1
2 (1 – S )(ϕ1s(A) – ϕ1s(B))
Dans ces expressions (qui ne sont pas à connaître), S est lʼintégrale de recouvrement, nombre positif
tel que 0 ≤ S < 1. Lʼintégrale de recouvrement S donne une mesure de l'interpénétration des deux
orbitales atomiques : S = !1S(A)espace! !1S(B) dv
Quand les deux atomes sont très éloignés, ils sont suffisamment séparés pour qu'on puisse négliger
leur recouvrement. L'intégrale de recouvrement est nulle car les deux fonctions ϕ1s(A) et ϕ1s(B) ne sont
jamais simultanément non nulles.
Quand les deux atomes se rapprochent, les deux orbitales atomiques ϕ1s(A) et ϕ1s(B) prennent des
valeurs simultanément non nulles dans la zone de liaison autour du centre de la molécule. Lʼintégrale
de recouvrement est non nulle, et généralement S = 0,5–0,6. Dans la limite de fusion des deux
noyaux, les deux orbitales deviennent identiques et l'intégrale de recouvrement est égale à la norme
d'une orbitale 1s portée par un noyau comportant deux protons : alors S = 1.
Si on considère lʼaspect ondulatoire des électrons constituant la liaison, la formation de la liaison
procède, selon ce point de vue, de l'interaction entre deux ondes atomiques ou encore de leur
S!!"#!1s(A)! 1s(B)!S!!"#!1s(A)! 1s(B)!
S ≠ 0!
1s(A)!1s(B)!
11
interférence quantique Les deux orbitales moléculaire formées ψ+ et ψ– ont pour énergies respectives
E+ et E– . Ces énergies sont telles que :
E+ = !H + !1 + S
et E– = !H – !1 – S
Dans ces expressions (qui ne sont pas à connaître), αH et β sont deux nombres négatifs. Comme par
définition 0 ≤ S <1, on déduit que E+ < E– .
En dʼautres termes, cela signifie que lʼorbitale moléculaire liante ψ+ est plus basse en énergie
que lʼorbitale moléculaire anti liante ψ– ou encore que ψ+ est plus stable que ψ– . Les orbitales
moléculaires ψ+ et ψ– correspondent à des régions de lʼespace, autour des deux noyaux,
dans lesquelles la probabilité de présence de lʼélectron est ≥95%.
Le terme αH est proche de lʼénergie de lʼélectron occupant l'orbitale atomique 1s dans l'atome
dʼhydrogène isolé à lʼétat fondamental, soit –13,6 eV. Le terme β représente lʼintégrale de résonance
ou d'échange et donne une mesure de la force de la liaison. Sa valeur est d'autant plus grande que le
recouvrement S entre les deux orbitales atomiques est grand. Lʼapproximation de Wolfsberg–
Helmholz appliquée à une molécule diatomique homonucléaire relie β à S et αH par lʼégalité β = kαHS,
où k est le coefficient de proportionnalité, en général égal à 1,75. On en tire alors les expressions des
énergies suivantes :
E+ = !H (1 + 1,75 S )1 + S
< αH et E+ = !H (1 – 1,75 S )1 – S
> αH
On en déduit donc que les orbitales moléculaires ψ+ et ψ– sont respectivement plus basse et
plus haute en énergie que les orbitales atomiques initiales 1s.
Dʼautre part, la différence dʼénergie entre les orbitales moléculaires obtenues, ψ+ et ψ– , et les orbitales
atomiques 1s initiales est telle que :
ΔE+ = E+ – αH = 0,75 !HS1 + S
et ΔE+ = E+ – αH = –0,75 !HS1 – S
La stabilisation de lʼorbitale moléculaire liante ψ+ est donc moins importante que la
déstabilisation de lʼorbitale moléculaire anti liante ψ– .
Pour H2, les orbitales moléculaires ψ+ et ψ– sont obtenues par recouvrement de deux orbitales
atomiques 1s : il sʼagit dʼorbitales moléculaires dont la symétrie est invariante par rotation autour de
l'axe de la liaison. Lʼaxe de révolution de cette orbitale moléculaire est l'axe (Oz) défini comme lʼaxe
internucléaire. Lʼorbitale moléculaire liante ψ+ est invariante par rapport à son centre de symétrie. Elle
correspond au recouvrement en phase des deux orbitales atomiques 1s, et on la note σ :
!H = –13,6 eV!
E– =!!! !""#1 – S!
E+ =!
$"#= !*!
$$#= !#
"E+!
"E–!
Énergie!
!H +""#1 + S!
Énergie!
!H = –13,6 eV!
Orbitale moléculaire !!(molécule homonucléaire)!
Orbitale moléculaire !*!(molécule homonucléaire)!
12
Lʼorbitale moléculaire anti liante ψ– change de signe par rapport à son centre de symétrie. Elle
correspond au recouvrement en opposition de phase des deux orbitales atomiques 1s, et on la
note σ* :
Le diagramme des orbitales moléculaires de H2 est construit en reliant les orbitales moléculaires σ et
σ* aux orbitales atomiques 1s de chaque atome dʼhydrogène à partir desquelles elles sont formées.
Sur le diagramme moléculaire, plutôt que la représentation des orbitales σ et σ*, le couplage (en
phase ou en opposition de phase) entre les orbitales atomiques 1s est représenté à côté des niveaux
énergétiques correspondants. Dans le cas de la molécule H2, le recouvrement en phase et en
opposition de phase entre deux orbitales atomiques 1s apparaîtra donc à la place de la forme des
orbitales moléculaires σ et σ * :
À ce stade, le diagramme des orbitales moléculaires de H2 est construit. Il reste à y placer les
électrons de valence. Les mêmes règles de remplissage que celles utilisées pour les orbitales
atomiques sont appliquées aux orbitales moléculaires : principe dʼAufbau, principe dʼexclusion de
Pauli et règle de Hund. Le dihydrogène H2 possède deux électrons de valence, dʼoù le diagramme
des orbitales moléculaires suivant :
La formation de la molécule H2 sʼexplique par un gain en stabilité du système : la mise en commun de
deux électrons par les deux atomes dʼhydrogène conduit à une stabilisation de ΔE = 2ΔE+ par
rapport aux deux atomes isolés. À lʼétat fondamental, la molécule H2 a donc la configuration
électronique (σ)2. On définit également lʼindice de liaison i l tel que :
!H = –13,6 eV!
E– =!!! !""#1 – S!
E+ =!
$"#= !*!
$$#= !#
"E+!
"E–!
Énergie!
!H +""#1 + S!
Énergie!
!H = –13,6 eV!
Orbitale moléculaire !!(molécule homonucléaire)!
Orbitale moléculaire !*!(molécule homonucléaire)!
!H = –13,6 eV!
E– =!!! !""#1 – S!
E+ =!
$"#= !*!
$$#= !#
"E+!
"E–!
Énergie!
!H +""#1 + S!
Énergie!
!H = –13,6 eV!
Orbitale moléculaire !!(molécule homonucléaire)!
Orbitale moléculaire !*!(molécule homonucléaire)!
(1s) –13,6 eV!
E– !
E+!
Énergie!
!E = 2!E+ < 0!
Énergie!
–13,6 eV (1s)!
"*!!
"!
13
il = électrons dans ! – électrons dans ! *! !
2
Pour la molécule H2 on a un indice de liaison non nul il = 2– 0
2 = 1 ce qui indique bien la formation
dʼune liaison (de type σ) assurée par deux électrons de valence, comme pour la liaison de Lewis.
Diagrammes moléculaires de H2+, He2
+ et He2
Les orbitales moléculaires de H2+, He2
+ et He2 sont issues, comme précédemment, du recouvrement
dʼorbitales atomiques 1s. Pour ces espèces, des orbitales moléculaires de type σ et σ* vont aussi être
obtenues. Les mêmes règles de remplissage que celles utilisées pour les orbitales atomiques sont
appliquées aux orbitales moléculaires : principe dʼAufbau, principe dʼexclusion de Pauli et règle
de Hund. Pour lʼion moléculaire H2+ il nʼy a quʼun seul électron de valence à disposer dans les deux
orbitales moléculaires. Le diagramme des orbitales moléculaires de H2+ est donc le suivant :
À lʼétat fondamental, lʼion moléculaire H2
+ a donc la configuration électronique (σ)1. La formation de
lʼion moléculaire H2+ sʼexplique par un gain en stabilité du système : la mise en commun de lʼélectron
par les deux atomes dʼhydrogène conduit à une stabilisation de ΔE = ΔE+ par rapport aux deux
atomes isolés. Pour lʼion moléculaire H2+ on a un indice de liaison non nul il = 1– 0
2 = 0,5 ce qui
indique bien la formation dʼune liaison assurée avec un seul électron de valence (ce que nʼexplique
pas le modèle de Lewis). Lʼindice de liaison de lʼion moléculaire H2+ est donc plus petit que celui de la
molécule H2. Or plus lʼindice de liaison est grand, plus la liaison est courte et plus elle est
stable (donc plus lʼénergie de liaison est grande). Cʼest ce que lʼon vérifie expérimentalement :
Molécule il Longueur de liaison (Å) Énergie de liaison (kJ.mol–1)
H2 1 0,74 457
H2+ 0,5 1,06 255
Lʼion moléculaire He2+ possède trois électrons de valence. Ses orbitales moléculaires proviennent du
recouvrement des orbitales atomiques 1s de deux atomes dʼhélium dʼénergie αHe = –25,0 eV : il sʼagit
aussi dʼorbitales moléculaires liante σ et anti liante σ* mais dʼénergies différentes de celles obtenues à
partir dʼatomes dʼhydrogène.
(1s) –13,6 eV!
!*!
!!
Énergie! Énergie!
–13,6 eV (1s)!
E– !
E+!
"E = "E+ < 0!
14
À lʼétat fondamental, lʼion moléculaire He2
+ a donc la configuration électronique (σ)2 (σ*)1. On
trouve un indice de liaison il = 2– 12
= 0,5 analogue à celui de H2+. Expérimentalement, pour He2
+ on
trouve effectivement une longueur et une énergie de liaison comparables à celles de H2+ :
Molécule il Longueur de liaison (Å) Énergie de liaison (kJ.mol–1)
H2+ 0,5 1,06 255
He2+ 0,5 1,09 237
La molécule He2 quant à elle possède quatre électrons de valence. Ses orbitales moléculaires
liante σ et anti liante σ* sont donc saturées. Cela correspond à une variation dʼénergie positive par
rapport au système constitué des deux atomes isolés à lʼétat fondamental, car ⏐ΔE– ⏐> ⏐ΔE+⏐, et à un
indice de liaison tel que il = 2– 22
= 0. À lʼétat fondamental, la molécule He2 nʼexiste donc pas.
II.1.b. Molécules hétéronucléaires : diagramme moléculaire de LiH
La théorie LCAO peut être appliquée aux molécules diatomiques hétéronucléaires. Dans le cas de LiH
on est ainsi confronté au recouvrement entre une orbitale 1s et une orbitale 2s de deux atomes
différents. Les orbitales moléculaires de LiH ont, comme pour les molécules précédentes, lʼaxe (Oz)
comme axe de révolution : il sʼagit dʼune orbitale moléculaire liante σ et dʼune orbitale moléculaire anti
liante σ*. On obtient ainsi un diagramme dissymétrique à deux orbitales moléculaires.
(1s) –25,0 eV!
E– !
E+!
Énergie!
!E = 2!E+ + !E– < 0!
Énergie!
–25,0 eV (1s)!
"*!!
"!
(1s) –25,0 eV!
E– !
E+!
Énergie!
!E = 2!E+ + 2!E– > 0!
Énergie!
–25,0 eV (1s)!
"*!!
"!
15
Les orbitales moléculaires σ et σ* sont elles-mêmes dissymétriques en raison de la différence
dʼélectronégativité des deux atomes. Lʼorbitale atomique 1s de lʼhydrogène contribue en effet plus que
lʼorbitale atomique 2s du lithium à la formation de lʼorbitale moléculaire liante σ. Lʼorbitale
moléculaire liante σ est ainsi plus développée au voisinage de lʼélément le plus électronégatif
(ici lʼatome dʼhydrogène).
La forme de lʼorbitale moléculaire liante σ indique une forte probabilité de présence de lʼélectron au
voisinage de lʼatome dʼhydrogène : cela correspond bien à une charge partielle δ– sur lʼatome
dʼhydrogène et une charge partielle δ+ sur lʼatome de lithium. De façon analogue, lʼorbitale atomique
2s du lithium contribue plus que lʼorbitale atomique 1s de lʼhydrogène à la formation de lʼorbitale
moléculaire anti liante σ*. Lʼorbitale moléculaire anti liante σ* est ainsi plus développée au
voisinage de lʼélément le moins électronégatif (ici Li).
La molécule LiH possède deux électrons de valence à distribuer dans le diagramme ainsi établi, ce qui
donne, en appliquant les règles habituelles de remplissage, le diagramme des orbitales
moléculaires ci-après. À lʼétat fondamental, la molécule LiH a donc la configuration électronique
(σ)2. Les énergies E+ et E– des deux orbitales moléculaires dépendent des paramètres αH et αLi des
deux atomes, cʼest à dire en première approximation de lʼénergie de lʼélectron occupant l'orbitale
atomique 1s dans l'atome dʼhydrogène isolé à lʼétat fondamental (–13,6 eV), et de celle de lʼélectron
occupant lʼorbitale atomique 2s dans l'atome de lithium isolé à lʼétat fondamental (–5,4 eV).
!!"
Énergie!
!"
"E ="2"E+ < 0!
!H = –13,6 eV (1s)!
(2s) !Li = –5,4 eV!
!Li +!("!–!!Li S)2!!Li – !H!
!H +!("!– !H S)2!!H – !Li!
E– =!"
E+ =!"
Énergie!
!!"
Énergie!
!"
–13,6 eV (1s)!
(2s) –5,4 eV!
Énergie!
Li! H!
Orbitale moléculaire !!(molécule hétéronucléaire)!
Orbitale moléculaire !*!(molécule hétéronucléaire)!
!!"
Énergie!
!"
–13,6 eV (1s)!
(2s) –5,4 eV!
Énergie!
Li! H!
Orbitale moléculaire !!(molécule hétéronucléaire)!
Orbitale moléculaire !*!(molécule hétéronucléaire)!
16
Dʼaprès son expression littérale (qui nʼest pas à connaître), on constate que ΔE+ est proportionnelle à
S2 et inversement proportionnelle à la différence dʼénergie ⎢αH – αLi ⎢ entre les orbitales atomiques :
ΔE+ = (! – !H S )
2
!H – !Li Cela peut être généralisé : plus la différence dʼénergie ⎢α1 – α2 ⎢ entre les deux orbitales atomiques
est grande, moins la différence dʼénergie ΔE+ est grande. Cela signifie que la stabilisation (ΔE+) est
dʼautant plus importante, et donc que la liaison est dʼautant plus forte, que la différence
dʼénergie entre les deux orbitales atomiques est faible :
II.2. Molécules diatomiques à n orbitales moléculaires
II.2.a. Construction des diagrammes moléculaires
Les règles de construction appliquées aux molécules diatomiques possédant deux orbitales
moléculaires peuvent être étendues aux molécules diatomiques à n orbitales moléculaires :
!!"
Énergie!
!"
–13,6 eV (1s)!
(2s) –5,4 eV!
Énergie!
Li! H!
Énergie!Énergie!Énergie!Énergie!
Forte stabilisation! Faible stabilisation!
!E+!!E+!
On considère généralement comme négligeable le recouvrement entre deux orbitales
atomiques dont la différence dʼénergie est supérieure à 12 eV.
17
Ø Pour la construction des diagrammes moléculaires, on ne considère que les orbitales
atomiques de valence. Les orbitales atomiques des électrons de cœur, internes à l'atome,
donnent lieu à des recouvrements calculables, mais très faibles. Dans la théorie LCAO :
n orbitales atomiques de valence → n orbitales moléculaires de valence
Ø On peut généraliser la notion dʼindice de liaison pour des molécules à n orbitales moléculaires.
On définit lʼindice de liaison de la molécule comme suit :
il = électrons dans les orbitales liantes – électrons dans les orbitales anti liantes! !
2
Ø Toute interaction impliquant des orbitales atomiques dont la différence dʼénergie est
supérieure à 12 eV est négligeable et nʼest donc pas prise en compte.
Ø Plus un atome est électronégatif, plus les énergies de ses orbitales atomiques de valence
sont basses.
II.2.b. Diagramme moléculaire de HF
Il faut tenir compte des configurations électroniques de valence de lʼhydrogène (1s1) et du fluor (2s2
2p5). La molécule HF possède donc 8 électrons de valence. Au total, 5 orbitales atomiques de
valence sont impliquées : la molécule HF possède donc 5 orbitales moléculaires de valence.
Comme la différence dʼénergie entre lʼorbitale atomique 1s de lʼatome dʼhydrogène (–13,6 eV) et
lʼorbitale atomique 2s de lʼatome de fluor (–42,8 eV) est supérieure à 12 eV, leur interaction peut être
négligée. Lʼorbitale atomique 2s de lʼatome de fluor ne peut donc pas coupler et se retrouve
inchangée dans la molécule. Elle se retrouve dans le diagramme moléculaire de HF sous la forme
dʼune orbitale moléculaire non liante. On peut donc commencer la construction du diagramme des
orbitales moléculaires de la molécule HF comme suit :
(1s) –13,6!
Énergie (eV)!
–42,8 (2s)!
Énergie (eV)!
–19,9 (2px, 2py, 2pz)!
2s!
H! F!
18
Pour des raisons énergétiques, seule lʼinteraction de lʼorbitale 1s de lʼatome dʼhydrogène (dʼénergie
–13,6 eV) avec les trois orbitales dégénérées 2px, 2py et 2pz de lʼatome de fluor (dʼénergie –19,9 eV)
sont à prendre en considération. Par convention, lʼaxe (Oz) est lʼaxe internucléaire :
Le recouvrement de lʼorbitale 1s de lʼatome dʼhydrogène avec lʼorbitale 2pz de lʼatome de fluor se fait
donc selon lʼaxe internucléaire (Oz). Ce recouvrement qui sʼeffectue selon lʼaxe de symétrie de
lʼorbitale atomique 2pz est non nul. Ces deux orbitales atomiques se combinent pour donner deux
nouvelles orbitales moléculaires : une orbitale moléculaire liante, plus basse en énergie que lʼorbitale
atomique 2pz, et une orbitale moléculaire anti liante plus haute en énergie que lʼorbitale atomique 1s.
Le couplage entre une orbitale atomique s et une orbitale atomique p le long de lʼaxe de
symétrie cette dernière conduit à des orbitales moléculaires de symétrie σ . On les note σp et
σp*. On peut à ce stade compléter le diagramme des orbitales moléculaires de HF en y plaçant donc
ces deux nouvelles orbitales moléculaires :
Lʼorbitale moléculaire liante σp est proche en énergie de lʼorbitale 2pz de lʼatome de fluor : elle possède
donc une densité électronique plus grande au voisinage de lʼatome de fluor :
z!
y!
x!
z!
y!
x!
(1s) –13,6!
Énergie (eV)!
–42,8 (2s)!
Énergie (eV)!
–19,9 (2px, 2py, 2pz)!
2s!
H! F!
!p!
!p*!
2pz!
z!
!p*!
x!
z!
y!
z!
x!
z!
!p!
y!
19
Inversement, lʼorbitale moléculaire anti liante σp* étant plus proche en énergie de lʼorbitale 1s de
lʼatome dʼhydrogène, elle possède une densité électronique plus grande au voisinage de lʼatome
dʼhydrogène :
Regardons maintenant le couplage de lʼorbitale 1s de lʼatome dʼhydrogène avec lʼorbitale 2px de
lʼatome de fluor. Lʼorbitale 2px présente un plan nodal contenant l'axe (Oz) de la liaison : elle est
perpendiculaire à cet axe. Son couplage avec lʼorbitale 1s, qui possède de la densité électronique sur
l'axe de la liaison, est par conséquent nul. Les deux orbitales restent inchangées. Lʼorbitale 2px de
lʼatome de fluor ne peut pas se combiner avec lʼorbitale 1s de lʼatome dʼhydrogène pour des
raisons de symétrie. Pour les mêmes raisons de symétrie, le couplage entre lʼorbitale 1s de lʼatome
dʼhydrogène et lʼorbitale 2py de lʼatome de fluor est également nul.
On en déduit donc que les deux orbitales atomiques 2px et 2py se retrouvent inchangées dans le
diagramme des orbitales moléculaires de HF. Elles constituent deux nouvelles orbitales
moléculaires non liantes.
z!
!p*!
x!
z!
y!
z!
x!
z!
!p!
y!
z!
!p*!
x!
z!
y!
z!
x!
z!
!p!
y!
y!
z!
S = 0!
x!x!
z!
y!
x!
y!
(1s) –13,6!
Énergie (eV)!
–42,8 (2s)!
Énergie (eV)!
–19,9 (2px, 2py, 2pz)!
2s!
H! F!
2px 2py!
!p!
!p*!
20
À ce stade, partant de 5 orbitales atomiques, nous avons construit 5 orbitales moléculaires. La
construction du diagramme des orbitales moléculaires de la molécule HF est donc terminée. Il reste à
y placer les 8 électrons de valence de la molécule. À lʼétat fondamental, les mêmes règles de
remplissage que celles utilisées pour les orbitales atomiques sont appliquées aux orbitales
moléculaires. On commence donc par remplir les orbitales moléculaires par ordre dʼénergie croissante
(principe dʼAufbau) en disposant au maximum deux électrons par orbitale moléculaire (principe
dʼexclusion de Pauli). Pour des orbitales moléculaires dégénérées (de même énergie), la configuration
la plus stable correspond au spin total le plus élevé (règle de Hund). On en déduit le diagramme des
orbitales moléculaires suivant :
À lʼétat fondamental, la molécule HF a donc la configuration électronique (2s)2 (σp)2 (2px 2py)4.
Dans la définition de lʼindice de liaison dʼune molécule diatomique nʼinterviennent pas les électrons
dans des orbitales moléculaires non liantes. Pour la molécule HF, on trouve donc un indice de
liaison il = 1. La liaison est assurée par les seuls électrons dans lʼorbitale σp :
il = 2 électrons dans ! p – 0 électron dans ! * p
2 = 1
La liaison H–F est la plus polarisée des liaisons impliquant un atome dʼhydrogène avec un atome
dʼhalogène. Il est intéressant de noter quʼelle est également la liaison la plus stable de toutes :
Liaison HF HCl HBr HI
D° (kJ.mol–1) 562 428 364 295
Δχ 1,78 0,96 0,76 0,46
Toutes ces liaisons sont obtenues par recouvrement de lʼorbitale atomique 1s de lʼhydrogène avec
lʼorbitale atomique de valence npz de lʼhalogène pour donner une orbitale moléculaire de type σp.
(1s) –13,6!
Énergie (eV)!
–42,8 (2s)!
Énergie (eV)!
–19,9 (2px, 2py, 2pz)!
2s!
H! F!
2px 2py!
!p!
!p*!
21
Lʼintégrale de recouvrement S est dʼautant plus importante que les orbitales atomiques qui
interagissent ont des volumes semblables. La stabilisation (ΔE+) est dʼautant plus importante, ie
la liaison est dʼautant plus forte (D° grande), que le recouvrement implique des orbitales
atomiques de volumes semblables.
II.2.c. Diagramme moléculaire de O2
Les mêmes règles de construction que pour HF sont appliquées. Il faut tout dʼabord tenir compte de la
configuration électronique de valence de lʼoxygène (2s2 2p4) qui indique que la molécule O2 possède
12 électrons de valence. Au total, 8 orbitales atomiques de valence sont impliquées : la molécule O2
possède donc 8 orbitales moléculaires de valence. Comme la différence dʼénergie entre les
orbitales atomiques 2s (–33,8 eV) et 2p (–17,2 eV) est supérieure à 12 eV, leur couplage peut être
négligé. On en déduit que pour des raisons énergétiques : (i) lʼorbitale atomique 2s dʼun oxygène
ne se combine quʼavec lʼorbitale atomique 2s de lʼautre atome dʼoxygène ; (ii) les orbitales
!H = –13,6 eV!
Énergie!Énergie!
!E+!
!F = –19,8 eV (2pz)!
"E+!
!Cl = –13,8 eV (3pz)!!H = –13,6 eV!
Énergie!Énergie!
!E+!
22
atomiques 2p dʼun atome dʼoxygène ne peuvent interagir quʼavec les orbitales atomiques 2p
de lʼautre atome dʼoxygène.
Il est donc possible de décomposer la construction du diagramme en étudiant le couplage des
niveaux 2s indépendamment du couplage des niveaux 2p. Comme dans les cas de H2, H2+, He2
+
et LiH, les deux orbitales atomiques 2s peuvent se combiner pour donner deux nouvelles orbitales
moléculaires liante et anti liante de symétrie σ. Provenant du couplage dʼorbitales atomiques s, elles
sont respectivement notées σs et σs*. À ce stade, on peut commencer à construire le diagramme des
orbitales moléculaires de O2 en y plaçant les deux orbitales σs et σs* :
Les deux orbitales moléculaires σs et σs* sont parfaitement symétriques car impliquant les orbitales
atomique 2s de deux atomes identiques :
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!s!
!s*!
–33,8 (2s)!
–17,2 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –17,2!
(2s) –33,8!
z!
y!
x!
z!
y!
x!
z!
x!
y!
z!
x!
y!
!s!
!s*!
23
Il faut maintenant étudier le recouvrement de chaque orbitale 2px, 2py et 2pz dʼun atome dʼoxygène
avec celles de lʼautre atome dʼoxygène :
Débutons par les orbitales 2pz alignées sur l'axe (Oz) de la liaison. Comme pour les orbitales
atomiques 2s, le recouvrement en phase des deux orbitales atomiques 2pz contribue à renforcer la
densité électronique entre les noyaux avec création dʼune orbitale moléculaire liante. En revanche, le
recouvrement en opposition de phase des deux orbitales atomiques 2pz contribue à diminuer la
densité électronique entre les noyaux avec création dʼune orbitale moléculaire anti liante.
Comme dans le cas des orbitales 2s, le recouvrement entre deux orbitales 2pz s'effectue le long de
l'axe de la liaison (recouvrement axial) conduisant à la formation de deux nouvelles orbitales
moléculaires liante et anti liante de symétrie σ . Provenant dʼorbitales atomiques p elles sont
respectivement notées σp et σp*. Il est à noter que le recouvrement axial est le mode de
recouvrement le plus efficace entre orbitales atomiques de type p, cʼest à dire celui qui stabilise le plus
les orbitales moléculaires liantes et déstabilise le plus les orbitales moléculaires anti liantes.
Que se passe-t-il maintenant entre lʼorbitale atomique 2pz dʼun atome dʼoxygène et les deux autres
orbitales atomiques 2px et 2py de lʼautre atome dʼoxygène ? Les orbitales atomiques 2px et 2py
présentent un plan nodal contenant l'axe de la liaison : elles sont perpendiculaires à cet axe. Leur
couplage avec lʼorbitale 2pz de lʼautre atome qui possède de la densité électronique sur l'axe de la
liaison est par conséquent nul. Il n'est pas possible de combiner Les orbitales atomiques 2px et 2py
avec lʼorbitale 2pz. En dʼautres termes, pour des raisons de symétrie une orbitale atomique 2pz
dʼun atome ne peut coupler quʼavec une orbitale 2pz dʼun autre atome.
z!
y!
x!
z!
y!
x!
z!z!
z!z!
!p!
!p*!
z!z!
z!z!
!p!
S = 0!!!
"!
z!
!p*!
z!
24
À ce stade, nous pouvons donc compléter le diagramme des orbitales moléculaires de la molécule de
O2 comme suit :
Il reste à étudier les interactions entre les orbitales atomiques 2px et 2py dʼun atome avec celles de
lʼautre atome. Lorsque les noyaux se rapprochent, le recouvrement entre les orbitales 2py ne se fait
pas sur l'axe (Oz) de la liaison, mais perpendiculairement à celui-ci. Il sʼagit dʼun recouvrement
latéral des orbitales atomiques qui conduit à des orbitales moléculaires de symétrie π . Le
recouvrement latéral en phase conduit à une orbitale moléculaire liante π et le recouvrement
latéral en opposition de phase à une orbitale moléculaire anti liante π*. Ici, provenant des
orbitales atomiques 2py on notera ces orbitales πy et πy*. Le recouvrement latéral est moins efficace
que le recouvrement axial. En partant dʼorbitales atomiques de même énergie, les orbitales
moléculaires π sont donc moins stabilisées que les orbitales moléculaires σ , et les orbitales
moléculaires π* moins déstabilisées que les orbitales moléculaires σ*.
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!s!
!s*!
!p!
! p*!
–33,8 (2s)!
–17,2 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –17,2!
(2s) –33,8!
2pz!
y! y!
!y!
!y*!
y! y!
25
On a vu que lʼorbitale atomique 2py dʼun atome dʼoxygène ne couple pas avec lʼorbitale atomique 2pz
de lʼautre atome dʼoxygène. Pour les mêmes raisons de symétrie, une orbitale atomique 2py dʼun
atome ne peut coupler avec lʼorbitale atomique 2px dʼun autre atome, les deux orbitales ayant des
axes perpendiculaires. Donc seul le recouvrement latéral entre les deux orbitales 2py est non nul. À ce
stade, le diagramme moléculaire comporte 6 orbitales moléculaires sur les 8 prévues :
Il reste à étudier ce qui se passe pour les deux orbitales atomiques 2px. Compte-tenu de ce qui a été
vu auparavant, celles-ci ne peuvent coupler quʼentre elles pour des raisons de symétrie. Le couplage
est de même nature que pour les orbitales 2py. Il y a un recouvrement latéral avec formation de deux
orbitales moléculaires de symétrie π. On les note πx et πx* car provenant dʼorbitales 2px.
Ces deux orbitales moléculaires sont identiques en énergie et en taille aux orbitales πy et πy* mais sont
dans un plan perpendiculaire au plan contenant ces dernières. Ces dernières orbitales moléculaires πx
et πx* permettent de terminer la construction du diagramme des orbitales moléculaires de la molécule
diatomique O2 :
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!s!
!s*!
!p!
! p*!
"y!
"y*!
–33,8 (2s)!
–17,2 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –17,2!
(2s) –33,8!
2py!2py! 2pz!2pz!
x!x!
x! x!
!x!
!x*!
26
À ce stade, partant de 8 orbitales atomiques, nous avons construit 8 orbitales moléculaires. La
construction du diagramme moléculaire de O2 est donc terminée. Il reste à y placer les 12 électrons de
valence de la molécule en respectant les règles de remplissage habituelles :
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!s!
!s*!
!p!
! p*!
"x "y!
"x* "y*!
–33,8 (2s)!
–17,2 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –17,2!
(2s) –33,8!
2py! 2pz!2px!2px!2py!2pz!
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!s!
!s*!
!p!
! p*!
"x "y!
"x* "y*!
–33,8 (2s)!
–17,2 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –17,2!
(2s) –33,8!
27
À lʼétat fondamental, la molécule diatomique homonucléaire O2 a donc la configuration électronique
(σs)2 (σs*)2 (σp)2 (πx πy)4 (πx* πy*)2. On trouve un indice de liaison il = 8 – 4 2
= 2. Il est possible de
décomposer cet indice de liaison en une somme dʼindices de liaison partiels :
il = il (niveau σs) + il (niveau σp) + il (niveau π)
Cette décomposition permet dʼaller plus loin dans la description de la liaison à partir du diagramme
des orbitales moléculaires :
Ø Les niveaux σs et σs* sont globalement non liants car ils conduisent à un indice de liaison partiel
il (niveau σs) nul :
il (niveau σs) = 2 électrons dans !s – 2 électrons dans !* s2
= 0
Les 4 électrons de ces niveaux ne participent donc pas à lʼétablissement de la liaison entre les
deux atomes dʼoxygène.
Ø Les niveaux σp et σp* participent à lʼétablissement dʼune liaison σ entre les deux atomes dʼoxygène
car ils conduisent à un indice de liaison partiel il (niveau σp) = 1 :
il (niveau σp) = 2 électrons dans !p – 0 électron dans !* p
2 = 1
Ø Les niveaux πx, πy, πx* et πy* participent à lʼétablissement dʼune liaison π entre les deux atomes
dʼoxygène car ils conduisent à un indice de liaison partiel il (niveau π) = 1 :
il (niveau π) = 4 électrons dans !x,y – 2 électrons dans !* x,y
2 = 1
Les 6 électrons de ces niveaux participent à lʼétablissement dʼune liaison π entre les deux atomes.
Tout se passe donc comme si 4 électrons ne participaient pas à lʼétablissement de liaison.
On peut donc en déduire que les deux atomes dʼoxygène sont liés par une liaison σ et une liaison π et
que 8 électrons ne participent pas à la liaison en ayant un comportement non liant. Le diagramme
présente également un électron célibataire sur les deux orbitales π*x et πy*. Ces deux électrons
célibataires expliquent les propriétés magnétiques de O2. Comme on peut le voir sur certaines photos,
le dioxygène liquide est en effet retenu dans l'entrefer d'un aimant (voir la vidéo :
http://www.firecold.com/videos/paramagnetism-of-oxygen).
À lʼaide du diagramme établi, il est possible dʼexpliquer la variation de la longueur de la liaison entre
les deux atomes dʼoxygène dans différents édifices. En ajoutant des électrons de valence (conduisant
à des anions), les orbitales anti liantes (π*x et π*y) sont de plus en plus peuplées. L'indice de liaison
chute alors passant de 8 – 4 2
= 2 pour O2 à 8 – 5 2
= 1,5 pour O2– (ion superoxyde), puis 8 – 6
2= 1
pour O22– (ion peroxyde). Inversement, en enlevant des électrons de valence (conduisant à des
cations) les orbitales anti liantes (π*x et π*y) sont de moins en moins peuplées. Lʼindice de liaison
28
augmente passant de 2 pour O2, à 8 – 3 2
= 2,5 pour O2+. On le vérifie expérimentalement, la liaison
étant dʼautant plus longue que lʼindice de liaison est petit :
O2+ O2 O2
– O22–
Longueur de la liaison (pm) 112 121 128 149
II.2.d. Diagramme moléculaire de F2
Le problème se traite exactement de la même façon que dans le cas de O2. Les niveaux dʼénergie
entre les orbitales 2s (–42,8 eV) et 2p (–19,9 eV) sont éloignées de plus de 12 eV, si bien quʼil est
possible de décomposer la construction du diagramme en étudiant le couplage des niveaux 2s
indépendamment du couplage des niveaux 2p. On obtient ainsi un diagramme moléculaire de la
même allure que celui de O2. Seul le nombre dʼélectrons de valence, les niveaux énergétiques des
orbitales atomiques et des orbitales moléculaires changent. Les orbitales sont plus basses en énergie
du fait de la plus grande électronégativité de lʼatome de fluor.
À lʼétat fondamental, la molécule F2 a donc la configuration électronique (σs)2 (σs*)2 (σp)2 (πx πy)4
(πx* πy*)4. On trouve de plus un indice de liaison il = 8 – 6 2
= 1. Comme précédemment, la
décomposition de cet indice de liaison en indices de liaison partiels nous donne également dʼautres
informations sur cette molécule :
Ø Les niveaux σs et σs* sont globalement non liants car ils conduisent à un indice de liaison partiel
il (niveau σs) nul :
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!s!
!s*!
!p!
! p*!
"x "y!
"x* "y*!
–42,8 (2s)!
–19,9 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –19,9!
(2s) –42,8!
29
il (niveau σs) = 2 électrons dans !s – 2 électrons dans !* s2
= 0
Les 4 électrons de ces niveaux ne participent donc pas à lʼétablissement de la liaison entre les
deux atomes de fluor.
Ø Les niveaux σp et σp* participent à lʼétablissement dʼune liaison σ entre les deux atomes de fluor
car ils conduisent à un indice de liaison partiel il (niveau σp) = 1 :
il (niveau σp) = 2 électrons dans !p – 0 électron dans !* p
2 = 1
Ø Les niveaux πx, πy, πx* et πy* sont globalement non liants car ils conduisent à un indice de liaison
partiel il (niveau π) nul :
il (niveau π) = 4 électrons dans !x,y – 4 électrons dans !* x,y
2 = 0
On peut donc en déduire que les deux atomes de fluor sont liés par une liaison σ et que 12 électrons
ne participent pas à la liaison en ayant globalement un comportement non liant.
II.2.e. Diagramme moléculaire de N2
Dans le cas de la molécule N2, les niveaux dʼénergie entre les orbitales 2s (–25,7 eV) et 2p (–15,4 eV)
ne sont cette fois-ci plus suffisamment éloignés pour négliger leur interaction. En particulier, lʼorbitale
atomique 2s dʼun atome dʼazote peut interagir avec lʼorbitale atomique 2s de lʼautre atome dʼazote
mais également avec lʼorbitale atomique 2pz de cet autre atome dʼazote. On parle de diagramme
moléculaire corrélé. Pour des raisons qui ne seront pas expliquées ici, le couplage 2s–2pz conduit à
une stabilisation des orbitales moléculaires σs et σs* ainsi quʼà une déstabilisation des orbitales
moléculaires σp et σp*. Cela se traduit par une inversion des niveaux (πx πy) et σp : lʼorbitale σp
devient plus haute en énergie que les orbitales (πx πy).
Dans la pratique, les diagrammes corrélés du type N2 ne seront pas à construire,
contrairement aux diagramme non corrélés du type H2, O2 et F2. En revanche, il vous sera
demandé de savoir les remplir (en distribuant les électrons de valence dans les niveaux
énergétiques) et de savoir en tirer les informations nécessaires (nature des orbitales
atomiques, symétrie et nature des orbitales moléculaires, et calcul de lʼindice de liaison).
Pour les raisons de symétrie évoquées plus avant, lʼorbitale atomique 2s dʼun atome dʼazote ne peut
pas se combiner avec les orbitales atomiques 2px et 2py de lʼautre atome dʼazote. Les couplages sont
cependant plus complexes que dans les cas précédents. Dans le cas de la molécule N2, les orbitales
2s et 2pz contribuent à la formation des orbitales σ. Dans une telle situation, on préfère donc identifier
les orbitales atomiques σ à lʼaide de numéros : σ1, σ1*, σ2 et σ2*. Ces orbitales moléculaires ont des
formes différentes (hors programme) de celles des orbitales σs, σs*, σp et σp*. En revanche, les
orbitales moléculaires π et π* ont quant à elles la même allure que pour O2 et F2, mais avec des tailles
30
et des énergies différentes. On en déduit alors le diagramme corrélé des orbitales moléculaires
suivant :
La molécule N2 possède au total 10 électrons de valence quʼil faut disposer dans le diagramme
précédent à lʼaide des règles de remplissage classiques :
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!1!
!1*!
!2!
! 2*!
"x "y!
"x* "y*!
–25,7 (2s)!
–15,4 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –15,4!
(2s) –25,7!
Énergie (eV)! Énergie (eV)!
!1!
!1*!
!2!
! 2*!
"x "y!
"x* "y*!
–25,7 (2s)!
–15,4 (2px, 2py, 2pz)!(2px, 2py, 2pz) –15,4!
(2s) –25,7!
31
À lʼétat fondamental, la molécule diatomique homonucléaire N2 a donc la configuration électronique
(σ1)2 (σ1*)2 (πx πy)4 (σ2)2. Pour N2, on trouve de plus un indice de liaison il = 8 – 2 2
= 3. Comme
précédemment, la décomposition de cet indice de liaison en indices de liaison partiels nous indique
également que :
Ø Les niveaux σ1 et σ1* sont globalement non liants car ils conduisent à un indice de liaison partiel
il (niveau σ1) nul :
il (niveau σ1) = 2 électrons dans !1 – 2 électrons dans !* 12
= 0
Les 4 électrons de ces niveaux ne participent donc pas à lʼétablissement de la liaison entre les
deux atomes dʼazote.
Ø Les niveaux πx, πy, πx* et πy* participent à lʼétablissement de deux liaisons π entre les deux atomes
dʼazote car ils conduisent à un indice de liaison partiel il (niveau π) = 2 :
il (niveau π) = 4 électrons dans !x,y – 0 électron dans !* x,y
2 = 2
Ø Les niveaux σ2 et σ2* participent à lʼétablissement dʼune liaison σ entre les deux atomes dʼazote car
ils conduisent à un indice de liaison partiel il (niveau σ2) = 1 :
il (niveau σ2) = 2 électrons dans !2 – 0 électron dans !* 22
= 1
On peut donc en déduire que les deux atomes dʼazote sont liés par une liaison σ et 2 liaisons π et que
4 électrons ne participent pas à la liaison en ayant un comportement globalement non liant.
32
B. Structure spatiale des molécules
I. Schémas de Lewis
I.1. Valence des éléments chimiques
I.1.a. Valence des atomes
Comme on lʼa vu dans le chapitre précédent, les atomes atteignent leur stabilité maximale lorsque leur
configuration électronique de valence est identique à celle du gaz noble le plus proche dans le tableau
périodique. Dans ce but, un atome peut ainsi établir une ou plusieurs liaisons avec un ou plusieurs
autres atomes.
Le nombre de liaisons que peut établir un atome dépend de sa valence. On définit la valence dʼun
atome comme le nombre maximal de liaisons covalentes de Lewis (où chaque atome apporte
un électron) quʼil peut former avec dʼautres atomes. La valence des éléments des deux premières
périodes de la classification périodique peut facilement être déduite de leur schéma de Lewis. Elle
correspond au nombre dʼélectrons célibataires (ou non appariés dans une paire) présents dans la
couche de valence de lʼatome. Pour construire facilement des molécules simples, il est nécessaire de
retenir la valence des éléments les plus courants :
I.1.b. Règle du duet
Lʼatome dʼhydrogène possède 1 électron de valence et chercher à atteindre la configuration
électronique de valence de lʼatome dʼhélium (He) à 2 électrons. Il sʼagit de la règle du duet. Pour
cela, il doit mettre en commun son électron avec un électron de valence dʼun autre atome. Le doublet
formé constitue une liaison covalente. Lʼatome dʼhydrogène forme donc 1 liaison avec dʼautres
atomes : on dit quʼil est monovalent.
I.1.c. Règles de lʼoctet et de lʼoctet réduit
Les atomes du bloc p appartenant aux colonnes du carbone (C), de lʼazote (N), de lʼoxygène (O) et du
fluor (F) possèdent respectivement 4, 5, 6 et 7 électrons de valence et doivent se rapprocher de la
configuration électronique de valence à 8 électrons du gaz noble le plus proche, le néon. Pour cela, ils
doivent mettre en commun, tous ou certains de leurs électrons de valence avec un ou plusieurs
électrons de valence dʼautres atomes. Les atomes du bloc p seront le plus souvent entourés de 8
électrons, pour ressembler aux gaz nobles. Il sʼagit de la règle de lʼoctet.
Les éléments de la colonne du carbone ont besoin de 4 électrons de valence pour compléter leur
configuration électronique à 8 électrons et ainsi acquérir la configuration électronique stable du néon.
Ils doivent donc gagner 4 électrons en mettant chacun de leurs 4 électrons de valence en commun
H B C N O F Ne
monovalent trivalent trivalent monovalent
tétravalent divalent
He
H
33
avec un électron de valence dʼun autre atome pour former une liaison. Ces éléments de la colonne 14
de la classification périodique forment donc 4 liaisons avec des atomes voisins : on les dit
tétravalents :
Les éléments de la colonne de lʼazote ont besoin de 3 électrons de valence pour compléter leur
configuration électronique à 8 électrons. Ils doivent donc gagner 3 électrons en mettant chacun de
leurs 3 électrons de valence en commun avec un électron de valence dʼun autre atome pour former
une liaison. Ces éléments forment donc 3 liaisons avec des atomes voisins : on les dit trivalents. On
remarque que sur les 5 électrons de valence de départ, 2 ne sont pas impliqués dans les liaisons : ils
constituent un doublet non liant :
Les éléments de la colonne de lʼoxygène (les chalcogènes) complètent leur configuration
électronique de valence par 2 électrons provenant dʼautres atomes. Ils forment donc 2 liaisons
covalentes avec leurs voisins : on les dit divalents. Ils possèdent également 2 doublets non liants
dans leur couche de valence :
Les éléments de la colonne du fluor (les halogènes), doivent gagner 1 électron pour atteindre 8
électrons de valence. Cela est atteint en formant 1 liaison covalente avec un autre atome. Comme
lʼhydrogène, les halogènes sont monovalents. Ils possèdent également 3 doublets non liants dans
leur couche de valence :
Les atomes de la colonne du bore ne possèdent que 3 électrons de valence. Lorsquʼils les mettent
en commun avec les électrons de valence dʼautres atomes, ils ne peuvent donc former au maximum
que 3 liaisons : on les dit trivalents. Cela correspond après établissement des liaisons à un total de 6
électrons de valence dans leur environnement. Bien que la configuration obtenue ne soit pas celle
dʼun gaz noble, ces molécules sont cependant stables. Il sʼagit de la règle de lʼoctet réduit. Il
manque donc 2 électrons de valence à ces éléments pour avoir 8 électrons dans leur couche de
valence. Ces éléments possèdent un caractère lacunaire symbolisé par une lacune électronique
dans leur couche de valence. Une lacune électronique correspond à lʼabsence dʼune paire
électronique (pour atteindre 8 électrons de valence) et est représentée par un rectangle vide.
Dʼune façon générale, la règle de lʼoctet ne sʼapplique strictement que pour les éléments de la
2e période du tableau périodique. Dans tous les cas, ces éléments pourront avoir moins de 8
électrons de valence mais ne pourront en aucun cas en avoir plus de 8.
C C C C Si Ge
N N N P
O O S
F Cl I
B Al
34
I.1.d. Limites de la règle de lʼoctet
Hypercoordination (ou hypervalence)
La règle de l'octet est insuffisante pour expliquer la réactivité des éléments au-delà de la 2e période.
Au-delà de la 2e période, il existe en effet des éléments qui en ne respectent pas cette règle. Ces
éléments se combinent dans des édifices moléculaires stables et ont plus de 8 électrons de valence :
on parle dʼhypercoordination ou dʼhypervalence. Ces atomes peuvent donc créer plus de liaisons
que ne le prévoit la règle de lʼoctet, comme par exemple SF6 et PCl5.
Règle des 18 électrons
La règle de lʼoctet présente un large champ dʼapplication qui couvre assez correctement les propriétés
des éléments des deux premières périodes de la classification périodique. Enoncée à une époque où
la notion dʼorbitale atomique était inconnue, elle est insuffisante pour décrire en particulier les édifices
moléculaires des éléments au-delà de la 3e période. Puisque la réactivité de tout élément repose
fondamentalement sur la recherche de la structure énergétiquement la plus stable, les gaz nobles
constituent encore une fois une réponse possible au problème de ces éléments. La configuration des
gaz nobles au-delà de lʼargon (Z = 18) ont tous leur dernière couche électronique en ns2 (n –1)d10 np6
soit 18 électrons. En application du principe de Lewis, on peut substituer une règle des 18 électrons
à celle de lʼoctet : à partir de la 4e période (Z >18), un élément tend à constituer des doublets
covalents en nombre tel quʼils confèrent 18 électrons à sa dernière couche électronique.
PtCl62– 78Pt : [Xe] 6s1 4f14 5d9 17Cl : [Ne] 3s2 3p5 Deux charges négatives
→ 10 Électrons de valence. → Monovalent : apporte un électron de valence à Pt. → Deux électrons de valence en plus à Pt. →18 Électrons dans la couche de valence de
lʼatome de platine.
Il y a cependant beaucoup dʼexception à cette règle des 18 électrons et de nombreux complexes de
métaux de transition ont moins de 18 électrons dans leur dernière couche électronique.
Les radicaux
Lorsqu'une molécule ou un ion possède un nombre total d'électrons de valence impair, il est
impossible de satisfaire à la règle de l'octet pour chaque atome : un électron de valence est
célibataire (non apparié). Un radical désigne un atome ou une molécule qui possède un ou plusieurs
électrons de valence célibataires. Un radical ne respecte pas la règle de l'octet et est donc caractérisé
par une grande instabilité : il a une durée de vie très courte et réagit avec de nombreux composés.
I.2. Charges réelles et charges formelles
Il existe des cas où lʼatome de bore établit 4 liaisons. Il a alors une coordinence de 4, supérieure
dʼune unité à sa valence. Il a alors établi une liaison en acceptant deux électrons de valence dʼun
même atome et en nʼen apportant aucun. Lʼatome de bore porte alors une charge formelle négative.
N O
B
35
De la même manière, les atomes dʼazote, dʼoxygène et dʼhalogènes (autres que lʼatome de fluor)
peuvent avoir une coordinence supérieure dʼune unité à leur valence en établissant respectivement 4,
3 et 2 liaisons avec des atomes voisins. Ces atomes établissent alors une liaison supplémentaire en
donnant un doublet dʼélectrons à un atome qui nʼen apporte aucun : ils portent une charge
formelle positive.
Ces charges formelles, qui ne reflètent pas nécessairement des charges réelles, résultent dʼun
ensemble de règles arbitraires. Ainsi, pour déterminer les charges formelles des deux atomes dʼune
liaison de Lewis on suppose que la paire dʼélectrons mise en commun pour la formation de
cette liaison est équitablement répartie entre les deux atomes. Les électrons des doublets non
liants sont attribués à lʼatome sur lequel ils sont localisés. La charge formelle CF dʼun atome est la
charge nette qui lui est attribuée à lʼaide de la relation :
C F = NV – NNL –NL
2
Dans cette expression, Nv est le nombre dʼélectrons de valence dans lʼatome isolé, NNL le nombre
dʼélectrons de valence de lʼatome engagés dans les doublets non liants, et NL le nombre dʼélectrons
de valence de lʼatome engagés dans des liaisons. La somme de toutes les charges formelles dʼune
molécule est toujours égale à la charge réelle de cette molécule.
Molécule Atome NV N
NL N
L C
F
B 3 0 8 –1 →
→
H 1 0 2 0
C 4 0 6 +1 →
→ H 1 0 2 0
N 5 0 8 +1
→
→
O 6 6 2 –1
H 1 0 2 0
La charge réelle CR est la charge effective de lʼédifice moléculaire. Elle est égale à la somme des
charge formelle mais peut aussi être calculée en faisant la différence entre le nombre total dʼélectrons
de valence de lʼensemble des atomes pris isolément et le nombre total dʼélectrons de valence dans la
molécule :
CR = Σ(Nv)atomes isolés – (Nv)molécule
O ON N N Cl
B HHH
HB HHH
HB HHH
H
C HHH
C HHH
C HHH
N HHH
ON HHH
ON HHH
O
36
∑(NV)atomes isolés = 3 + 4 = 7 (NV)molécule = 8 → CR = –1
∑(NV)atomes isolés = 5 + 3 + 6 = 14 (NV)molécule = 14 → CR = 0
Bien que ne correspondant pas à des charges réelles, la connaissance des charges formelles dʼune
molécule est indispensable pour comprendre et prédire sa réactivité.
I.3. Construction des schémas de Lewis
Le dessin dʼune molécule faisant figurer lʼintégralité des doublets liants et non liants sʼappelle un
schéma de Lewis. Il existe plusieurs façons dʼarriver au schéma de Lewis dʼune molécule à partir de
sa composition atomique. La série de règles suivantes, à appliquer rigoureusement, permet de
dessiner les molécules les plus simples ou les plus compliquées de la chimie.
1 Calcul du nombre de doublets électroniques
1.1 Chercher le nombre dʼélectrons de valence pour chaque atome de la molécule.
1.2 Faire la somme de tous les électrons de valence dans la molécule.
1.3 Tenir compte de la charge réelle de la molécule sʼil y a lieu : retrancher un électron de valence
par charge positive et ajouter un électron de valence par charge négative.
1.4 Diviser par deux le nombre dʼélectrons obtenu pour obtenir le nombre total de doublets
électroniques (liants et non liants) à faire figurer sur le schéma.
2 Représentation de la molécule avec des liaisons simples
2.1 Dessiner lʼatome central puis, autour de lui, les atomes périphériques.
2.2 Tracer un doublet liant entre lʼatome central et chaque atome périphérique.
2.3 En déduire le nombre de doublets restants, à partir du nombre de doublets total calculé en 1.4.
2.4 Compléter les atomes périphériques avec 3 doublets non liants pour que ceux-ci respectent la
règle de lʼoctet.
2.5 Sʼil reste des doublets, les placer comme doublets non liants sur lʼatome central.
2.6 Calculer la (ou les) éventuelle(s) charge(s) formelles. Leur somme doit être égale à la charge
réelle de la molécule.
2.7 Représenter la (ou les) éventuelle(s) lacunes électroniques sur lʼatome central.
3 Représentation de la molécule avec des liaisons multiples
3.1 Minimiser le nombre de charges formelles et de lacunes électroniques en transformant des
doublets non liants présents sur les atomes périphériques en doublets liants avec lʼatome central.
Apparaissent ainsi des liaisons doubles ou triples.
B HHH
HB HHH
H
N HHH
ON HHH
O
37
3.2 Si lʼatome central est B, C, N ou O, vérifier que la règle de lʼoctet est toujours respectée.
Si ce nʼest pas le cas (si lʼatome central est entouré de plus de 8 électrons), alors il faut revenir
en arrière et sʼarrêter au schéma précédent.
3.3 Réaffecter les charges formelles aux différents atomes comme en 2.6.
3.4 Recommencer lʼapplication de 3.1 jusquʼà ce que le nombre de charges formelles écrites sur le
schéma de Lewis soit le même que celui de la formule de la molécule, ou soit minimal.
CH4
1.1–4
C 4 électrons de valence4 H 4 électrons de valence
8 électrons de valencesoit 4 doublets électroniques
2.1–5HCHH
H
2.6C : CF = 4 – = 08
2
H : CF = 2 – = 022
Tous les doublets sont attribués et l'atome de carbone
respecte la règle de l'octet.
Aucune charge formelle.
NH3
N 5 électrons de valence3 H 3 électrons de valence
8 électrons de valencesoit 4 doublets électroniques
2.1–4 NHH
H
2.6N : CF = 5 – 2 – = 06
2
H : CF = 2 – = 022
Il manque un doublet.Les atomes d'hydrogène ont
leur couche de valence pleine.
Aucune charge formelle.
2.5 NHH
H Tous les doublets sont attribués et l'atome d'azote respecte la règle de l'octet.
BF3
B 3 électrons de valence3 F 21 électrons de valence
24 électrons de valencesoit 12 doublets électroniques
BFF
F
2.6B : CF = 3 – = 06
2
Il manque 9 doublets.L'atome de bore respecte la
règle de l'octet.
Aucune charge formelle.
2.4 BFF
F Tous les doublets sont attribués. L'atome de bore respecte la règle
de l'octet.
2.7BFF
F
1.1–4
1.1–4 2.1–3
F : CF = 7 – 6 – = 022
L'atome de bore porte une lacune électronique.
38
SF6
1.1–4
S 6 électrons de valence6 F 42 électrons de valence
48 électrons de valencesoit 24 doublets électroniques
2.1–3
2.6S : CF = 6 – = 012
2
Il manque 18 doublets.
Aucune charge formelle.
CO32–
C 4 électrons de valence3 O 18 électrons de valence
24 électrons de valencesoit 12 doublets électroniques
2.1–3
2.6O : CF = 6 – 6 – = –12
2
C : CF = 4 – = +16
Il manque 9 doublets.
Charges formelles.
2.4Tous les doublets sont
attribués.Les atomes d'oxygène
respectent la règle de l'octet.
1.1–4OCO O
OCO O
2.7 L'atome de carbone porte une lacune électronique.
OCO O
3.1–3Il y a formation d'une liaison
double. La règle de l'octet est respectée. Il y a minimisation des
charges formelles.
OCO O
FSF F
2.4Tous les doublets sont
attribués.L'atome de soufre appartient à la 3e période : ll n'est pas tenu de respecter la règle de l'octet.
FF
F
FSF FFF
F
F : CF = 7 – 6 – = 022
2– 2 électrons de valence
2
39
NO3–
1.1–4N 5 électrons de valence3 O 18 électrons de valence
24 électrons de valencesoit 12 doublets électroniques
2.1–3
2.6
1 électron de valence1–
ONO O
2.4ONO O
2.7ONO O
3.1–3ONO O
2
ONO O3.4
N : CF = 5 – = +262
O : CF = 6 – 6 – = –122
Il manque 9 doublets.
Charges formelles.
Tous les doublets sont attribués. Les trois atomes
d'oxygène respectent la règle de l'octet.
Il y a formation d'une liaison double.Tous les atomes respectent la règle
de l'octet.
Dans ce schéma, Il y a une seule charge formelle mais
l'atome d'azote ne respecte plus la règle de l'octet.
L'atome d'azote possède une lacune électronique.
SO32–
1.1–4S 6 électrons de valence3 O 18 électrons de valence
26 électrons de valencesoit 13 doublets
2.1–3
2.6
2 électrons de valence2–
OSO O
2.4OSO O
2.7
3.1–3
O : CF = 6 – 6 – = –122
Il manque 10 doublets.
Charges formelles.
Il manque un doublet. Les atomes d'oxygène respectent
la règle de l'octet.
L'atome de soufre porte une charge formelle positive.
Il y a formation d'une liaison double. L'atome de soufre appartient à la 3e
période et il n'est pas tenu de repecter la règle de l'octet. Il y a une minimisation des charges formelles.
OSO O
Le dernier doublet est attribué à l'atome de soufre.
S : CF = 6 – 2 – = +162
OSO O
OSO O
2.5
40
I.4. Mésomérie
On peut parfois écrire plusieurs schémas de Lewis pour un même assemblage d'atomes. Dans ces
cas, la molécule n'est pas correctement décrite à lʼaide dʼun seul de ces schémas. Les différents
schémas de Lewis possibles sont nommés formes limites de résonance. On désigne par
mésomérie le passage dʼune structure limite de résonance à une autre par des mouvements de
doublets dʼélectrons symbolisés à lʼaide de flèches courbes. La mésomérie est symbolisée
par une double flèche 1 entre les différentes formes limites de résonance à ne pas confondre
avec les flèches dʼéquilibres chimiques D .
Lʼion formiate HCO2
– peut être représenté par deux schémas de Lewis. Le passage dʼun schéma à
lʼautre sʼeffectue par le mouvement de paires dʼélectrons : il sʼagit de deux structures limites de
résonance.
La réalité est représentée par la structure hybride de résonance définie comme la moyenne
pondérée de toutes les structures limites de résonance. Dans lʼion formiate, les deux liaisons
carbone–oxygène son identiques. Il nʼy a quʼune seule longueur de liaison carbone–oxygène égale à
1,26 Å et intermédiaire entre une liaison simple (1,43 Å) et une liaison double (1,23 Å), et chaque
atome dʼoxygène porte une demi charge formelle négative. Dans la réalité les deux atomes dʼoxygène
de lʼion formiate sont donc indiscernables.
Forme hybride de résonance de lʼion formiate (les traits en pointillés représentent des liaisons incomplètes).
Forme hybride de résonance de lʼion formiate qui montre que les deux atomes dʼoxygène portent la même charge formelle.
La mésomérie implique la conservation de la charge réelle de la molécule. Elle se rencontre dans
différents cas de figure. En particulier il est possible dʼécrire de la mésomérie, lorsque que dans une
molécule on rencontre :
Ø Une alternance liaison multiple–liaison simple–liaison multiple.
Ø Une alternance doublet non liant–liaison simple–liaison multiple.
C OHO
C OHO
C OHO
C OHO
12
12
C C C C CHH
HHO
C C C C CHH
HHO
N C CH
H
H H
HN C C
H
H
H H
H
41
Ø Une alternance doublet non liant–liaison simple–lacune électronique.
Ø Une alternance liaison multiple–liaison simple–lacune électronique.
Dans de très nombreux cas, les structures limites de résonance nʼont pas toutes le même poids dans
la structure hybride de résonance. Connaître la (les) structure(s) limite(s) de résonance la (les) plus
contributive(s) peut permettre dʼexpliquer et/ou prédire la réactivité dʼune molécule. Les règles
suivantes permettent de déterminer la ou les structures limites de résonance les plus contributives :
Ø Les formes limites de résonance respectant la règle de lʼoctet sont les plus contributives à la
structure hybride de résonance.
Seule la forme limite de résonance de droite respecte règle de lʼoctet : cʼest la plus contributive des
deux.
Ø Si la règle de lʼoctet ne permet pas de choisir, les formes limites de résonance avec le moins de
charges formelles sont les plus contributives. On limite au maximum lʼapparition de charges
formelles à partir de liaisons multiples (apparition dʼune séparation de charges formelles positive et
négative).
Les deux formes limites de résonance respectent la règle de lʼoctet pour tous les atomes. Celle de
gauche est la plus contributive car elle correspond à une minimisation des charges formelles.
Ø Si il est toujours impossible de choisir, les formes limites de résonance pour lesquelles les charges
formelles positives sont sur les atomes les plus électropositifs et/ou les charges formelles
négatives sur les atomes les plus électronégatifs, sont les plus contributives.
Les deux formes limites de résonance respectent la règle de lʼoctet pour tous les atomes et ont le
même nombre de charges formelles. Celle de droite est la plus contributive car elle place la charge
formelle négative sur lʼatome dʼoxygène qui est plus électronégatif que lʼatome de carbone.
O CHH
HO CH
H
H
C CH CH
HC CH C
H
H
CN
HHCN
HH
H H
C ONH
HH C O
NH H
H
C C OHH
HC C O
H
H
H
42
Ø Dans tous les cas, il faut éviter de concentrer plusieurs charges sur un même atome afin de
minimiser les répulsions électrostatiques.
Les trois formes limites de résonance respectent la règle de lʼoctet pour tous les atomes et ont le
même nombre de charges formelles quʼelles disposent sur des atomes de même nature. La forme du
milieu est la plus contributive car cʼest la seule qui ne concentre pas deux charges formelles sur un
même atome.
I.5. Relations schéma de Lewis–réactivité
I.5.a. Effets inductifs
Lʼeffet inductif est un phénomène de transmission de la polarisation dʼune liaison tout au long des
liaisons dʼune chaîne dʼatomes, en général une chaîne dʼatomes de carbone. Plus la différence
dʼélectronégativité entre les deux atomes dʼune liaison est grande (plus la polarisation est
importante) plus lʼeffet inductif est important. Lʼeffet inductif diminue rapidement : il devient
généralement négligeable, voire inexistant, après une suite de trois liaisons covalentes. La
notion dʼeffet inductif est très utilisée pour expliquer la réactivité en chimie organique.
Effet inductif attracteur –I
Les atomes qui ont une électronégativité plus élevée que celle du carbone (χ = 2,55) ont un effet
inductif attracteur noté –I. De la même manière, un groupe fonctionnel (groupe d'atomes qui a des
propriétés chimiques similaires chaque fois qu'il est présent dans des composés différents)
globalement plus électronégatif que le carbone possède un effet inductif attracteur.
Les éléments des colonnes 15 (N, P), 16 (O, S), et 17 (F, l, Br, I) ont un effet inductif attracteur vis-à-
vis du carbone. Parmi les groupes fonctionnels inductifs attracteurs on trouve CF3, CCl3, NO2 et NH3+.
Effet inductif donneur +I
Un atome qui a une électronégativité plus faible que celle du carbone (χ = 2,55) a un effet inductif
donneur noté +I. De la même manière, un groupe fonctionnel globalement plus électropositif que le
carbone possède un effet inductif donneur.
Les alcalins (Li : χ = 0,93 / Na : χ = 0,93 / K : χ = 0,82 ), les alcalino-terreux (Mg : χ = 1,31 / Ca : χ =
1,00 ), les métaux de transition (bloc d : χ ≈ 1,2–2,4 ) ainsi que les groupements carbonés (du type
CnH2n+2 comme CH3, CH3CH2) ont un effet inductif donneur vis-à-vis du carbone.
N N N N N N2
NNN2
C YCCC!–
!1+
!2+
!3+
C YCCC!+
!1–
!2–
!3–
43
Influence de lʼeffet inductif sur la stabilité des édifices moléculaires
Les atomes ou groupes fonctionnels inductifs attracteurs stabilisent les espèces excédentaires en
électrons (anions, carbanions) :
Plus la différence dʼélectronégativité entre lʼhalogène et le carbone est grande, plus lʼeffet inductif
attracteur –I est important et plus le carbanion est stabilisé. Les effets inductifs attracteurs –I se
cumulent et sʼamenuisent avec la distance :
C I Br Cl F
χ 2,55 2,66 2,96 3,16 3,98
Δχ 0,11 0,41 0,61 1,43
Les atomes ou groupes fonctionnels inductifs donneurs stabilisent les espèces déficientes en
électrons (cations, carbocations). Les effets inductifs donneurs +I se cumulent et sʼamenuisent
avec la distance.
I.5.b. Effets mésomères
Un effet mésomère est un phénomène de délocalisation électronique impliquant les doublets non
liants ou des liaisons multiples (doubles ou triples) de certains atomes ou groupes fonctionnels. Il
caractérise la propriété d'un atome ou d'un groupe fonctionnel à céder ou accepter un doublet
d'électrons permettant la délocalisation de celui-ci. Au même titre que lʼeffet inductif, lʼeffet
mésomère peut permettre dʼexpliquer et prévoir la stabilité et la réactivité dʼune molécule. Lʼeffet
mésomère est plus puissant que lʼeffet inductif.
Effet mésomère attracteur –M
Un groupe fonctionnel capable d'attirer et de porter un doublet électronique (doublet non liant, ou
doublet liant de liaisons double ou triple) pour former des formes limites de résonance possède un
H
CHH
I
CHH
Br
CHH
ClCHH
F
CHH
F
CFH
F
CFF
Stabilité
F
CHH
F
CHH
C
H
H
F
CHH
C
H
HC
H
H
Stabilité
H
CHH
CH3CHH
CH3CH3CH
CH3CH3CCH3
Stabilité
44
effet mésomère attracteur noté –M. Les groupes fonctionnels constitués dʼatomes électronégatifs (N,
O, S) engagés dans des liaisons multiples sont mésomères attracteurs –M vis-à-vis du carbone :
CO2Me, CO2H, CHO, C(O)Me, CN, NO2, SO3H, SO2Me…
Le groupe fonctionnel C=O a un effet mésomère
attracteur –M.
Le groupe fonctionnel C≡N a un effet mésomère
attracteur –M.
Effet mésomère donneur +M
Un atome ou groupe fonctionnel porteur dʼun doublet non liant capable de le céder pour former
des structures limites de résonance possède un effet mésomère donneur noté +M. Les
éléments des colonnes 15 (N, P), 16 (O, S) et 17 (F, Cl, Br, I) possèdent des effets mésomères
donneurs. Il est à noter que ces éléments sont inductifs attracteurs –I et mésomères donneurs +M vis-
à-vis du carbone.
Lʼatome de chlore a un effet mésomère donneur +M.
Le groupe fonctionnel OH a un effet mésomère
donneur +M.
Influence des effets mésomères sur la stabilité des édifices moléculaires
À lʼinverse de lʼeffet inductif qui diminue rapidement avec la distance, lʼeffet mésomère se propage à
longue distance le long des chaînes carbonées. Il peut y avoir mésomérie (et donc écriture de
plusieurs structures limites de résonance) lorsque dans un schéma de Lewis il y a une conjugaison,
cʼest à dire une alternance de liaisons simples et de liaisons multiples (doubles ou triples). On parle de
systèmes conjugués.
C C OHH
HC C O
H
H
H
C C N C C NH
H
H
H
C C Cl
HH
HH C C Cl
HH
HH
C C OHH
HH C C O
HH
HH
HC C C C C C
H H HCH
H
H
HC C C C C C
H H HCH
H
H
HC C C C C C
H H HCH
H
H
HC C C C C C
H H H HCH
H
H
45
Plus il est possible dʼécrire des structures limites de résonance par mésomérie, plus la
molécule est stable. On parle de stabilisation par résonance. Un effet mésomère attracteur –M
stabilise un carbanion. La stabilisation est beaucoup plus importante que celle due à un effet inductif
attracteur –I.
Un effet mésomère donneur +M stabilise un carbocation. La stabilisation est beaucoup plus
importante que celle due à un effet inductif donneur +I.
I.5.c. Acides et bases de Lewis
Une molécule dont un des atomes possède au moins une lacune électronique est un acide de Lewis.
Un acide de Lewis peut former une liaison covalente de coordination. On obtient une molécule dont un
des atomes apporte les deux électrons de la liaison (base de Lewis). Il s’agit d’une distinction
artificielle, les liaisons covalentes de coordination étant de même nature que les autres liaisons
covalentes. Il se forme alors un adduit de Lewis :
Acide de Lewis Base de Lewis Adduit de Lewis
Le mouvement du doublet dʼélectrons de la base de Lewis dans la lacune électronique de lʼacide
de Lewis permettant la création de la liaison covalente est représenté par une flèche pleine partant
du doublet :
H
CHH
Stabilité
H
CNH
H
H
H
CNH
O
OEffet –I de NH2 Effet –M de NO2
H
CHH
Stabilité
H
CCH
HH
H
H
CNH
H
H
Effet +I de CH3 Effet +M de NH2
BHH
HH B HH
H
H
CH
HH Cl C
H
HH Cl
H O H O HH
AlCl
Cl
ClCl AlCl
Cl
ClCl
46
I.5.d. Électrophiles et nucléophiles
Un électrophile (littéralement «qui aime les électrons») est un composé déficient en électrons. Il est
caractérisé par sa capacité à former une liaison avec un autre composé en acceptant un doublet
électronique de celui-ci. Cet autre composé, excédentaire en électrons, est appelé nucléophile
(littéralement «qui aime les noyaux»). Un atome électrophile porte une charge partielle positive ou
une lacune électronique. Un atome nucléophile porte une charge partielle négative ou un
doublet non liant. Un acide de Lewis est donc un électrophile, et une base de Lewis un nucléophile.
La réaction entre un nucléophile et un électrophile correspond à la transformation dʼun doublet non
liant du nucléophile en un doublet liant entre le nucléophile et lʼélectrophile. La formation de cette
liaison covalente sʼaccompagne souvent de la rupture hétérolytique dʼune liaison covalente à partir
de lʼatome électrophile. Dans tous les cas, il y a conservation de la charge totale.
Il y a formation d'une liaison covalente O–H accompagnée de la rupture hétérolytique de la liaison
H–Cl afin que l'atome d'hydrogène nʼait pas plus de deux électrons de valence. Lʼatome de chlore
part avec les deux électrons de la liaison covalente H–Cl. Des charges formelles apparaissent sur les
deux produits de la réaction.
Il y a formation d'une liaison covalente N–C accompagnée de la rupture hétérolytique de la liaison
C–O afin que l'atome de carbone respecte la règle de l'octet. Lʼatome d'oxygène récupère les deux
électrons de la liaison covalente C–O qui se rompt. Une charge formelle apparaît sur l'atome
d'oxygène dans le produit.
Il y a formation d'une liaison covalente F–Si. L'atome de silicium appartenant à la 3e période de la
classification périodique, il n'est pas tenu de respecter la règle de l'octet. Il y a alors formation d'un
atome de silicium hypercoordiné (hypervalent) portant une charge formelle négative.
I.5.e. Relations avec les diagrammes des orbitales moléculaires
Les schémas de Lewis permettent de représenter la liaison chimique simplement sans prendre en
compte l'énergie de ces électrons, ni le fait que la zone de l'espace dans laquelle leur probabilité de
présence est élevée est variable. Certaines correspondances peuvent cependant être notées entre le
schéma de Lewis dʼune molécule et son diagramme des orbitales moléculaires.
H ClCH
HH O H!+ !–
!'+ !'–CH
HH O H
H+ Cl
C O
NH H!+ !–
CH
HO
H
H NH
H
Si F!–
F
HH
!+
HSi F
!–HH
HF
47
Par exemple, le schéma de Lewis de la molécule HF donne un ordre de liaison de 1 et fait apparaître
3 doublets non liants autour de lʼatome de fluor. Le diagramme moléculaire, obtenu pour cette
molécule dans le chapitre II.1.2.2.2, donne, lui, un indice de liaison de 1, en accord avec lʼordre de
liaison du schéma de Lewis, et indique lʼexistence de 3 orbitales moléculaires non liantes entièrement
peuplées. On retrouve donc en quelque sorte les 3 doublets non liants du schéma de Lewis. En
revanche, contrairement au diagramme moléculaire, le schéma de Lewis ne renseigne pas sur la
nature de la liaison entre les deux atomes et ne permet pas de savoir quʼun des doublets non liants
est beaucoup plus bas en énergie que les deux autres.
Schéma de Lewis Diagramme moléculaire
Voir chapitre II.1.2.2.2
Ordre de liaison = 1 → Indice de liaison il = 1
? → Une liaison σ
3 doublets non liants → 3 orbitales moléculaires non liantes peuplées
? → 1 orbitale non liante plus basse en énergie
On retrouve aussi une certaine correspondance entre le schéma de Lewis de la molécule O2 et son
diagramme moléculaire. Dʼun côté, le schéma de Lewis donne un ordre de liaison de 2 et fait
apparaître 2 doublets non liants sur chaque atome dʼoxygène. De lʼautre côté, le diagramme
moléculaire, obtenu pour cette molécule dans le chapitre II.1.2.2.3, donne un indice de liaison de 2, en
accord avec lʼordre de liaison du schéma de Lewis, et indique lʼexistence de 8 électrons ne participant
pas à la liaison. Lʼaction de ces 8 électrons est donc globalement non liante et on retrouve une
certaine concordance avec les 4 doublets non liants du schéma de Lewis. Là encore, contrairement
au diagramme moléculaire le schéma de Lewis ne renseigne cependant ni sur la nature de la liaison
entre les deux atomes ni sur le niveau énergétique des doublets non liants. Dʼautre part, en aucun cas
le schéma de Lewis ne prédit le comportement paramagnétique de la molécule O2 dû à la présence de
deux électrons célibataires dans les orbitales moléculaires occupées les plus hautes en énergie.
Schéma de Lewis Diagramme moléculaire
Voir chapitre II.1.2.2.3
Ordre de liaison = 2 → Indice de liaison il = 2
? → Une liaison σ et une liaison π
4 doublets non liants → 8 électrons ne participent pas à la liaison
? → Paramagnétisme
II. Le modèle VSEPR
Vous venez dʼapprendre à dessiner des molécules sous forme de schémas de Lewis prenant en
compte la totalité des électrons de valence. Ces schémas ont été tracés de façon à faire apparaître
H F
O O
48
tous les doublets électroniques, mais sans considérer leur position réelle dans lʼespace et lʼorientation
des liaisons : par exemple, les trois oxygènes de lʼion carbonate CO32– forment en réalité un triangle
parfaitement équilatéral. Or connaître la forme d'une molécule est extrêmement important. Cette forme
détermine les propriétés physiques ou chimiques du composé considéré.
La détermination de la forme dʼune molécule à partir de son schéma de Lewis sʼobtient grâce au
modèle VSEPR (Valence Shell Electron Pair Repulsion pour Répulsion des Paires dʼElectrons de la
Couche de Valence) qui fait l'objet de ce chapitre et qui s'applique tant à des molécules organiques
(construites sur des squelettes carbonés) qu'à des molécules inorganiques (construites sur des
atomes centraux ou sur des squelettes non carbonés).
II.1. Principe du modèle VSEPR
Ce modèle proposé par Gillespie et Nyholm repose sur un postulat très simple. Les doublets
constitués dʼélectrons sont tous négativement chargés et donc se repoussent par effet électrostatique.
Les doublets électroniques autour dʼun atome, quʼils soient liants ou non, se répartissent
dans les zones de lʼespace les plus éloignées les unes des autres. Cinq squelettes de base, ou
figures de répulsion, dépendant du nombre de positions occupées soit par des atomes soit par des
doublets non liants, permettent de respecter ce postulat. Ces figures de répulsion sont notées AXn ,
notation dans laquelle :
Ø A représente lʼatome au centre,
Ø X le nombre de positions quʼoccupent les atomes périphériques (liés à lʼatome central A par
des liaisons simples, doubles ou triples, peu importe) ou les doublets non liants.
Les cinq figures de répulsion de base AXn, à partir desquelles la géométrie de la plupart des édifices
moléculaires peut être déduite, sont à connaître par cœur et sont décrites ci-dessous :
AX 4 "Tétraèdre régulier "
AX3"Triangle équilatéral"
(trigonal plan)"Les 3 positions périphériques sont identiques et à 120° lʼune de lʼautre dans le même plan.!
Les 4 positions périphériques sont identiques et à 109,5° lʼune de lʼautre.!
AX2"Forme linéaire"
"
Les 2 positions périphériques sont identiques et à 180° lʼune de lʼautre.!
49
II.2. Détermination de la géométrie dʼune molécule
Dans le cas où lʼatome central ne possède pas de doublets non liants, toutes les positions X
correspondent à des atomes. Le type VSEPR AXn de la molécule est noté de la même façon que le
squelette de base et la forme de la molécule se déduit de lʼarrangement spatial des atomes X
autour de A (molécule linéaire, trigonale plane, tétraédrique, bipyramide trigonale ou octaédrique). La
molécule peut être dessinée avec la bonne géométrie en remplaçant directement A et X par leurs
symboles dʼélément chimique.
Dans le cas où lʼatome central possède un ou plusieurs doublets non liants, le type VSEPR de la
molécule est noté AXnEm, avec n le nombre dʼatomes liés à lʼatome central et m le nombre de
doublets non liants sur lʼatome central. La procédure pour trouver la forme de la molécule est la
suivante.
Ø On dessine le squelette de base (la figure de répulsion) AXp tel que p = n + m . Nous allons nous
servir du squelette AXp pour positionner tous les objets qui entourent A, que ce soit des atomes ou
des doublets non liants.
Ø On commence par remplacer m positions X par des doublets non liants. Lʼatome central et les
autres positions X peuvent être remplacés par les symboles chimiques correspondants. Pour les
squelettes à 3 ou 4 positions, nʼimporte quelle(s) position(s) peu(ven)t être choisie(s) pour les doublets
non liants. Pour le squelette à 5 positions, on peuple dʼabord les positions équatoriales avec
les doublets non liants, jamais les positions axiales. Pour le squelette à 6 positions, le premier
doublet non liant peut être mis nʼimporte où ; le deuxième doublet non liant doit, lui, être placé
à la position opposée au premier.
La raison sous-tendant ces deux règles est la suivante : un doublet non liant est plus encombrant
quʼun doublet liant. Ce dernier est confiné entre les deux atomes quʼil relie. Le doublet non liant, lui,
«dépasse» de lʼatome central et peut occuper plus dʼespace. Dans les types AX4E, AX3E2 et AX2E3,
cʼest dans le plan équatorial que les positions des doublets sont les plus éloignées (angles de 120°).
Dans le type AX4E2, on place les deux doublets non liants à lʼopposé lʼun de lʼautre pour quʼils se
gênent le moins possible. Ces deux règles sont aussi valables pour tous les objets volumineux
autour de lʼatome central sur les squelettes AX5 et AX6 : les atomes périphériques plus
volumineux que les autres et les atomes liés par des liaisons doubles ou triples.
Il y a 3 positions périphériques équatoriales à 120° lʼune de lʼautre et formant un triangle équilatéral."Il y a 2 positions périphériques axiales à 90 ° du plan équatorial.!
AX 5"Bipyramide trigonale"
AX6"Octaèdre régulier"
Les 6 positions périphériques sont identiques et à 90° lʼune de lʼautre.!
50
Ø On peut maintenant nommer la forme qui correspond au type VSEPR AXnEm. Il faut bien retenir
que les doublets non liants appartiennent à lʼatome central. Ils le déforment, ils contribuent à établir la
forme de la molécule, mais ils ne constituent pas un sommet de cette forme. La forme de la
molécule est définie par la position relative des atomes A et X. À chaque type VSEPR
correspond un nom de forme qui figure dans le tableau suivant et quʼil faut connaître :
Nombre de
positions X
dans AXp
Arrangement n Type
VSEPR Forme des molécules Exemples
2 Linéaire 0 AX2 Linéaire BeCl2
3 Triangle équilatéral 0 AX3 Triangle équilatéral BF3
1 AX2E Coudée (en V) SnCl2
4 Tétraèdre
0 AX4 Tétraèdre CH4
1 AX3E Pyramide trigonale NH3
2 AX2E2 Coudée (en V) H2O
5 Bipyramide trigonale
0 AX5 Bipyramide trigonale PCl5
1 AX4E Forme balançoire SF4
2 AX3E2 Forme en T ClF3
3 AX2E3 Linéaire XeF2
6 Octaèdre
0 AX6 Octaèdre SF6
1 AX5E Pyramide à base carrée IF5
2 AX4E2 Plan carré XeF4
Il nʼexiste pas de molécules avec les types VSEPR AX3E3, AX2E4 ou encore AXE5. On constate quʼil
existe deux types VSEPR qui mènent à des molécules linéaires : AX2 et AX2E3. De même il existe
deux types VSEPR qui mènent à des molécules coudées (ou en V) : AX2E et AX2E2. Cependant
lʼangle théorique entre les liaisons, qui dérive soit de la figure de répulsion AX3, soit AX4, est
différent : 120° dans le premier cas et 109,5° dans le deuxième.
II.3. Angles théoriques vs. angles réels
On termine de commenter la géométrie de la molécule en étudiant les écarts des angles entre
liaisons par rapport à lʼangle théorique déduit de la figure de répulsion. Il est à noter quʼon parle
dʼangles entre liaisons X–A–X et quʼil nʼest une fois de plus jamais question des doublets non
liants, qui sont une partie constituante de lʼatome central. Les écarts entre les angles théoriques et les
angles réels peuvent avoir diverses origines. Les principales sont listées ci-dessous :
51
Ø Les doublets non liants, les liaisons multiples (liaisons doubles et triples) et les gros atomes sont
plus volumineux que les simples liaisons et occupent donc plus dʼespace que ces dernières. Par leur
encombrement, ils repoussent, lʼune vers lʼautre, les autres liaisons de la molécule. La conséquence
est une fermeture des angles entre ces liaisons, qui apparaissent inférieurs aux angles théoriques.
Cependant, lorsque des objets encombrants de différents types coexistent autour de lʼatome central,
leur effet cumulé sur les angles peut être difficile à prédire.
Ø Moins lʼatome central est électronégatif, moins il retient ses électrons près de lui. Lʼeffet
dʼencombrement de ses doublets non liants est donc amplifié.
Ø Moins les atomes périphériques sont électronégatifs, moins ils retiennent près dʼeux les électrons
des liaisons A–X. Les doublets liants deviennent plus encombrants et se repoussent davantage
quʼavec des atomes plus électronégatifs.
II.4. Exemples
AX3 : arrangement trigonal plan.120°H
AlH H
AX3 : arrangement trigonal plan.122°O
CH H
116°
ClSn
Cl
95° AX2E : arrangement coudé.Angle de 95° (<120°) car le doublet sur Sn est encombrant.
H
CH
109,5° AX4 : arrangement tétraédrique.
HH
NH
107°
AX3E : arrangement pyramidal trigonal.Angles de 107° (<109,5°) car le doublet sur N est encombrant.H
H
OP
ClClCl AX4 : arrangement tétraédrique.
103°
Angles ClPCl = 103° (<109,5°) car la liaison double P=O est encombrante.
114°
Angles HCH = 116° (<120°) car la liaison double C=O est encombrante.
52
PH
93,8°
AX3E : arrangement pyramidal trigonal.Angles de 93,8° (<109,5°) car le doublet sur N est encombrant.P est moins électronégatif que N : l'angle est moins ouvert que dans NH3.
HH
NF
102,1°
AX3E : arrangement pyramidal trigonal.Angles de 102,1° (<109,5°) car le doublet sur N est encombrant.F est plus électronégatif que H : l'angle est donc moins ouvert que dans NH3.
FF
OH
104°
H AX3E : arrangement coudé.Angle réel de 104° (<109,5°) car les doublets sur O sont encombrants.L'angle est moins ouvert que dans NH3 qui n'a qu'un seul doublet.
PBr
BrBr
Br
Br
AX5 : arrangement bipyramidal trigonal.
90°
PF
F
FO
F
AX5 : arrangement bipyramidal trigonal.La liaison double P=O est encombrante et se place en position équatoriale.
98°
FéqPFéq = 113° (<120°) car la liaison double P=O est encombrante.
OPFax = 98° (>90°) car la liaison double P=O est encombrante.
SF
F
F
F
AX4E : arrangement «balançoire »Le doublet est encombrant et se place en position équatoriale
102°
87°
FéqSFéq = 102° (<120°) car le doublet sur S est encombrant
BrF
FF
86°
AX3E2 : arrangement en T.Les doublets sont encombrants et se placent en position équatoriale.FaxBrFéq = 86° (<90°) car les deux doublets sur Br sont encombrants.
FaxSFéq = 87° (<90°) car le doublet sur S est encombrant
II
I
AX2E3 : arrangement linéaire.Les trois doublets sont encombrants et se placent en position équatoriale.
SF
FF
FF
FAX6 : arrangement octaédrique.90°
IF
FF
F
F
82°
AX5E : arrangement pyramidal à base carrée.
FaxIFéq = 82° (<90°) car le doublet sur I est encombrant.
BrFF
F
F AX4E2 : arrangement plan carré.Les deux doublets sont encombrants et se placent à 180° l'un de l'autre.
113°
120°
90°
53
II.5. Limite de la méthode VSEPR
La méthode VSEPR permet la plupart du temps la prédiction correcte de l'arrangement local des
paires d'électrons autour d'un atome lorsque celui-ci peut être choisi sans ambiguïté comme atome
central. En revanche, son application est beaucoup plus problématique quand il s'agit de prévoir la
géométrie globale de molécules complexes.
Chaque atome de carbone peut être pris comme atome central. Le type VSEPR de ces atomes de
carbone est AX3. Lʼarrangement local autour de ces atomes est donc trigonal plan. On attend des
angles de liaison de 120°. La liaison double ainsi que lʼélectronégativité des atomes de fluor referment
ces angles. En revanche, il nʼest pas possible de prévoir la planéité de ces molécules simples.
III. La polarité des molécules
La notion de moment dipolaire, vue dans le cas dʼune liaison, peut être étendue à la molécule entière.
Le moment dipolaire dʼune molécule se détermine en faisant la somme vectorielle dans
lʼespace des moments dipolaires existant le long des liaisons polarisées. Si cette somme est
nulle, la molécule est dite « apolaire », comme le serait une molécule dont les liaisons ne seraient
pas polarisées. Si la somme vectorielle est non nulle, la molécule est dite « polaire » ; on dit
aussi que la molécule possède un moment dipolaire permanent.
Ø Considérons la molécule BeH2. La méthode VSEPR indique que cette molécule est linéaire (AX2).
Du fait de la différence dʼélectronégativité entre lʼatome de bérylium (χ = 1,57) et lʼatome dʼhydrogène
(χ = 2,20), les liaisons Be–H sont polarisées. Pour savoir si cette molécule est polaire ou non, il suffit
de calculer son moment dipolaire défini comme la somme vectorielle des moments dipolaires des
deux liaisons :
Compte-tenu de la linéarité de la molécule, les moments dipolaires des liaisons Be–H1 et Be–H2 sont
opposés et de même norme, car les deux liaisons sont identiques. Leur somme vectorielle est donc
nulle. On en déduit que le moment dipolaire de la molécule BeH2 est nul, donc que la molécule BeH2
est apolaire.
Ø Considérons maintenant la molécule H2O. La méthode VSEPR indique quʼil s ʻagit dʼune molécule
coudée avec un angle de liaison théorique de 109,5° (AX2E2). On trouve expérimentalement un angle
de liaison de 104,7°. Du fait de la différence dʼélectronégativité entre lʼatome dʼoxygène (χ = 3,44) et
lʼatome dʼhydrogène (χ = 2,20), les liaisons O–H sont polarisées (µO–H = 1,52 D). Le moment dipolaire
C CH
H
H
HC C
F
F
F
F116° 109°
µ3!! !Al
H1
H2 H3
!–
3!+
µ1!! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ!! !
µ1!! !
µ4!! !
µ3!! !
µ2!! !
C
Cl1
Cl2Cl3
!–
4!+
Cl4
+ µ3 = 0!!
! !
µ2!! !
"!
(#)!
" = 52,35°!•! : Atome dʼoxygène!•!
µ1+2!! ! •! " = 60°!
: Atome dʼaluminium!•!"!
µ!! ! µ1+2!
! !=!
•!" = 54,75°!
: Atome de carbone!•!(#)!
(#)!
µ1+2!! !
µ3+4!! !
+ µ3+4 = 0!!
! !µ!! ! µ1+2!
! !=!
"!
"!
+ µ2 = 0!!
! !µ!! !
µ1!! !=!
BeH1 H22!+
!–
OH1 H2
2!–
!+
54
de H2O est par définition la somme vectorielle des moments dipolaires des deux liaisons. Par
construction graphique, on voit tout de suite que ce moment dipolaire est non nul et orienté sur lʼaxe
(Δ) bissecteur de lʼangle formé par les deux liaisons (il forme deux angles adjacents de mesure θ =
52,35°) :
Connaissant lʼorientation du moment dipolaire de la molécule H2O, il est possible dʼen calculer la
norme. Par construction, cette norme est égale à :
µ = 2 µO–H cos(52,35°) = 1,22 µO–H
On trouve ainsi un moment dipolaire permanent non nul égal à 1,85 D très proche de ce qui est
déterminé expérimentalement. La molécule H2O est donc polaire.
Ø Considérons maintenant la molécule AlH3. La méthode VSEPR indique que lʼarrangement autour
de lʼatome dʼaluminium central est trigonal plan avec des angles entre les liaisons de 120° (AX3). Du
fait de la différence dʼélectronégativité entre lʼatome dʼaluminium (χ =1,61) et lʼatome dʼhydrogène (χ =
2,20), les liaisons Al–H sont polarisées.
Pour savoir si la molécule AlH3 est polaire ou non il faut faire la somme vectorielle des moments
dipolaires des liaisons. On peut tout dʼabord faire la somme vectorielle des moments dipolaires des
liaisons Al–H1 et Al–H2. Le moment dipolaire résultant est non nul et orientée sur lʼaxe (Δ) bissecteur
de lʼangle formé par les deux liaisons (il forme deux angles adjacents de mesure θ = 60°). Par
construction ce moment dipolaire résultant a pour norme :
µ1+2 = 2 µAl–H cos(60°) = µAl–H
Le moment dipolaire de AlH3 est la somme vectorielle de ce moment dipolaire résultant et du moment
dipolaire de la liaison Al–H3. Ces deux moments dipolaires sont de même norme et opposés : le
moment dipolaire de AlH3 est donc nul et la molécule est apolaire.
Ø Considérons maintenant la molécule CCl4. La méthode VSEPR indique que lʼarrangement autour
de lʼatome de carbone central est tétraédrique avec des angles de 109,5° entre les liaisons (AX4). Du
fait de la différence dʼélectronégativité entre lʼatome de carbone (χ = 2,55) et lʼatome de chlore (χ =
3,16), les liaisons C–Cl sont polarisées. Pour savoir si la molécule CCl4 est polaire ou non il faut faire
la somme vectorielle des moments dipolaires des liaisons. On peut décomposer le problème et faire
µ3!! !Al
H1
H2 H3
!–
3!+
µ1!! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ!! !
µ1!! !
µ4!! !
µ3!! !
µ2!! !
C
Cl1
Cl2Cl3
!–
4!+
Cl4
+ µ3 = 0!!
! !
µ2!! !
"!
(#)!
" = 52,35°!•! : Atome dʼoxygène!•!
µ1+2!! ! •! " = 60°!
: Atome dʼaluminium!•!"!
µ!! ! µ1+2!
! !=!
•!" = 54,75°!
: Atome de carbone!•!(#)!
(#)!
µ1+2!! !
µ3+4!! !
+ µ3+4 = 0!!
! !µ!! ! µ1+2!
! !=!
"!
"!
+ µ2 = 0!!
! !µ!! !
µ1!! !=!
BeH1 H22!+
!–
OH1 H2
2!–
!+
µ3!! !Al
H1
H2 H3
!–
3!+
µ1!! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ!! !
µ1!! !
µ4!! !
µ3!! !
µ2!! !
C
Cl1
Cl2Cl3
!–
4!+
Cl4
+ µ3 = 0!!
! !
µ2!! !
"!
(#)!
" = 52,35°!•! : Atome dʼoxygène!•!
µ1+2!! ! •! " = 60°!
: Atome dʼaluminium!•!"!
µ!! ! µ1+2!
! !=!
•!" = 54,75°!
: Atome de carbone!•!(#)!
(#)!
µ1+2!! !
µ3+4!! !
+ µ3+4 = 0!!
! !µ!! ! µ1+2!
! !=!
"!
"!
+ µ2 = 0!!
! !µ!! !
µ1!! !=!
BeH1 H22!+
!–
OH1 H2
2!–
!+
55
la somme vectorielle des moments dipolaires des liaisons C–Cl1 et C–Cl2 dʼun côté, et celle des
liaisons C–Cl3 et C–Cl4 de lʼautre.
Les deux moments dipolaires résultant sont sur le même axe (Δ) bissecteur des angles formés par les
liaisons (il forme deux angles adjacents de mesure θ = 54,75°). Ils ont pour norme :
µ1+2 = µ3+4 = 2 µC–Cl cos(54,75°) = 1,16 µC–Cl
Le moment dipolaire de la molécule CCl4 est la somme vectorielle de ces deux moments dipolaires de
même norme et opposés : il est donc nul et la molécule est apolaire.
IV. Le modèle de lʼhybridation des orbitales atomiques
IV.1. Présentation du modèle
Le modèle des orbitales hybrides a été développé par Linus Pauling dans les années 1930 pour
expliquer la géométrie de molécules comme le méthane (CH4). En effet, La configuration électronique
de valence 2s2 2p2 de lʼatome de carbone dans son état fondamental ne permet pas d'expliquer les
observations expérimentales faites sur le méthane : tous ses angles sont de 109,5°. Cʼest ce que
prévoit également la méthode VSEPR en attribuant le type AX4 au methane. Lʼhybridation des
orbitales atomiques est le mélange des orbitales atomiques d'un atome appartenant à la même
couche électronique de manière à former de nouvelles orbitales permettant de décrire qualitativement
les liaisons entre atomes.
La tétravalence du carbone est tout dʼabord expliquée en invoquant lʼétat excité 2s1 2p3 du carbone :
les quatre orbitales atomiques contiennent ainsi un électron célibataire.
Les orbitales atomiques de valence 2s et 2p appartiennent à la même sous-couche et sont donc
proches en énergie. Elles vont alors se combiner pour donner de nouvelles orbitales
atomiques dites hybrides.
IV.2. Hybridation sp3 de lʼatome de carbone
Dans lʼhydbridation sp3, lʼorbitale atomique 2s dʼun atome de carbone se combine avec les
orbitales atomiques 2px, 2py et 2pz du même atome de carbone conduisant à la formation de 4
orbitales atomiques hybrides identiques sp3 de même forme et de même énergie.
µ3!! !Al
H1
H2 H3
!–
3!+
µ1!! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ1!! ! µ2!
! !
µ!! !
µ1!! !
µ4!! !
µ3!! !
µ2!! !
C
Cl1
Cl2Cl3
!–
4!+
Cl4
+ µ3 = 0!!
! !
µ2!! !
"!
(#)!
" = 52,35°!•! : Atome dʼoxygène!•!
µ1+2!! ! •! " = 60°!
: Atome dʼaluminium!•!"!
µ!! ! µ1+2!
! !=!
•!" = 54,75°!
: Atome de carbone!•!(#)!
(#)!
µ1+2!! !
µ3+4!! !
+ µ3+4 = 0!!
! !µ!! ! µ1+2!
! !=!
"!
"!
+ µ2 = 0!!
! !µ!! !
µ1!! !=!
BeH1 H22!+
!–
OH1 H2
2!–
!+
Hybridation sp3!
2s1! 2p3!
État excité!
(sp3)4!
h!!
2s2!
État fondamental!
2s1! 2p3!2p2!
État excité!
2py!2px!2s! Carbone tétraédrique!
+!+! +!
2pz!
2s!
2p!sp3!
E!
56
Les 4 orbitales hybrides sp3 contiennent chacune un electron célibataire. Leur énergie est comprise
entre celle de lʼorbitale atomique 2s et celle des orbitales atomiques 2p. Les 4 orbitales hybrides
sp3 pointent vers les sommets dʼun tétraèdre dont lʼatome de carbone est le centre : les angles
entre les orbitales hybrides sp3 sont de 109,5°. Cela explique la géométrie du méthane
IV.3. Hybridation sp2 de lʼatome de carbone
Dans lʼhydbridation sp2, lʼorbitale atomique 2s dʼun atome de carbone se combine avec les
orbitales atomiques 2px et 2py du même atome de carbone conduisant à la formation de 3
orbitales atomiques hybrides identiques sp2 de même forme et de même énergie. Lʼorbitale 2pz
reste, elle, inchangée.
Les 3 orbitales hybrides sp2 et lʼorbitale 2pz inchangée contiennent chacune un electron célibataire.
Lʼénergie des orbitales hybrides sp2 est comprise entre celle de lʼorbitale atomique 2s et celle des
orbitales atomiques 2p, et est inférieure à celle des orbitales hybrides sp3. Les 3 orbitales
atomiques hybrides sp2 sont dans un même plan : elles forment un triangle equilateral avec
des angles de 120°. Lʼorbitale 2pz est perpendiculaire au plan formé par les orbitale hydrides sp2.
Hybridation sp3!
2s1! 2p3!
État excité!
(sp3)4!
h!!
2s2!
État fondamental!
2s1! 2p3!2p2!
État excité!
2py!2px!2s! Carbone tétraédrique!
+!+! +!
2pz!
2s!
2p!sp3!
E!
Hybridation sp3!
2s1! 2p3!
État excité!
(sp3)4!
h!!
2s2!
État fondamental!
2s1! 2p3!2p2!
État excité!
2py!2px!2s! Carbone tétraédrique!
+!+! +!
2pz!
2s!
2p!sp3!
E!
Hybridation sp2!
2s1! 2p1!
État excité!
(sp2)3!
2py!2px!2s!
Carbone trigonal plan!
+!+!
2pz!
+!
sp2!
sp2!
2s!
2p!
sp3!
E!
sp2!
Hybridation sp2!
2s1! 2p1!
État excité!
(sp2)3!
2py!2px!2s!
Carbone trigonal plan!
+!+!
2pz!
+!
sp2!
sp2!
2s!
2p!
sp3!
E!
sp2!
57
IV.4. Hybridation sp de lʼatome de carbone
Dans lʼhydbridation sp, lʼorbitale atomique 2s dʼun atome de carbone se combine avec lʼorbitale
atomique 2px du même atome de carbone conduisant à la formation de 2 orbitales atomiques
hybrides identiques sp de même forme et de même énergie. Les orbitales 2py et 2pz sont
inchangées.
Les 2 orbitales hybrides sp et les orbitales 2py et 2pz inchangées contiennent chacune un electron
célibataire. Lʼénergie des orbitales hybrides sp à mi-chemin entre celle de lʼorbitale atomique 2s et
celle des orbitales atomiques 2p. Les 2 orbitales atomiques hybrides sp sont alignées. Lʼangle
entre les orbitales atomiques hybrides sp est donc de 180°. Dʼautre part, les orbitales 2py et 2pz
inchangées sont perpendiculaires aux orbitales hydrides sp.
IV.5. Correspondance hybridation–géométrie
Les hybridations sp, sp2 et sp3 peuvent être appliquées aux autres éléments du bloc p respectant la
règle de lʼoctet. En particulier, elles ne sʼappliquent pas aux éléments de transition. Lʼhybridation dʼun
atome, et par conséquent sa géométrie, peut facilement être déduite du nombre total dʼatomes et de
doublets non liants autour de lui. Elle peut être déduite du type VSEPR de lʼatome.
Nombre de positions autour de lʼatome Type VSEPR Hybridation de lʼatome Arrangement autour de
lʼatome
4
AX4
sp3
Tétraèdre
AX3E Pyramide trigonale
AX2E2 Coudée (en V)
AXE3
Hybridation sp!
2s1! 2p3!
État excité!
(sp)2!
2s!
2p!
sp3!
E!
2py!
2px!2s!
Carbone linéaire!
+!
+!
2pz!
sp2!
+!
sp!
2p2!sp!
sp!
Hybridation sp!
2s1! 2p3!
État excité!
(sp)2!
2s!
2p!
sp3!
E!
2py!
2px!2s!
Carbone linéaire!
+!
+!
2pz!
sp2!
+!
sp!
2p2!sp!
sp!
58
Nombre de positions autour de lʼatome Type VSEPR Hybridation de lʼatome Arrangement autour de
lʼatome
3
AX3
sp2
Trigonal plan
AX2E Coudée (en V)
AXE3 Linéaire
2 AX2
sp Linéaire
AXE
59
C. Stéréochimie
I. Formules brute, développée, semi-développée, et topologique
La formule brute est l'écriture la plus compacte décrivant un composé chimique. La formule brute
renseigne uniquement sur la composition chimique des molécules (ou des ions), c'est-à-dire sur le
nombre et le type d'atomes qui les composent. Plusieurs règles gèrent lʼordre dʼapparition des
éléments suivant la nature du composé. En chimie organique, après C et H lʼordre alphabétique est
suivi (Cα Hβ Clγ Oδ …)
Les composés organiques peuvent également être représentés en formule développée. Cʼest en
quelque sorte un schéma de Lewis dans lequel les doublets non liants (et les lacunes électroniques)
ne sont pas indiqués pour simplifier et alléger l'écriture.
Dans une formule semi-développée, les liaisons avec les atomes dʼhydrogène ne sont pas
représentées, et en particulier les liaisons carbone–hydrogène.
Une formule topologique est souvent adoptée pour représenter les molécules. Il sʼagit dʼune formule
simplifiée qui fait abstraction de la représentation des atomes de carbone et des atomes dʼhydrogène
que ces derniers portent. Les liaisons carbone–carbone sont ainsi représentées par des lignes
brisées. Chaque extrémité de segment représente un atome de carbone. La multiplicité des
liaisons est figurée. Les atomes dʼhydrogène ne sont plus représentés (ils sont en nombre tels que
la tétravalence du carbone est respectée) sauf s'ils sont liés à des hétéroatomes eux-mêmes indiqués.
Cela permet de ne montrer que le squelette carboné de la molécule. Les fonctions peuvent être
écrites de façon condensée. Dans une formule topologique, en général, un atome de carbone ne
portant pas de charge formelle est tétravalent. En revanche, si il porte une charge formelle
positive ou négative il est trivalent.
But-2-ènamide
Formule brute → C4H7NO
Schéma de Lewis →
Formule développée →
Formule semi-développée →
Formule topologique →
Formule topologique condensée →
H C C CH
HCO
NH H H
H
H C C CH
HCO
NH H H
H
H3C CH CH CO
NH2
O
NH2
CONH2
60
II. Isomérie de constitution
On parle d'isomérie quand deux molécules possèdent la même formule brute mais ont des structures
différentes. Ces molécules sont appelées isomères et ont des propriétés physiques, chimiques et/ou
biologiques différentes.
L'isomérie a été remarquée la première fois en 1827 par Friedrich Woehler qui a préparé l'acide
isocyanique de même formule brute que l'acide fulminique. Il a alors noté que ces deux composés ont
des propriétés chimiques radicalement différentes. Cette découverte était en contradiction avec les
théories de l'époque pour lesquelles les propriétés d'une substance étaient entièrement déterminées
par sa formule brute.
À partir dʼune même formule brute plusieurs enchaînements dʼatomes sont donc possibles en
respectant la valence des atomes : on parle dʼisomérie de constitution ou de structure. Deux
isomères de constitution nʼont en commun que la formule brute.
Les isomères de constitution comprennent les isomères de fonction (les fonctions portées par le
squelette sont différentes), les isomères de position (les fonctions et le squelette sont identiques,
seules les positions dʼintroduction des fonctions sur le squelette étant différentes) et les isomères de
squelette (les fonctions sont identiques mais le squelette carboné est différent). Ainsi, pour une
même formule brute C4H10O il est par exemple possible de trouver les différents isomères de
constitution suivants :
Isomérie de fonction
Butan-1-ol
Éther diéthylique
Isomérie de position Butan-1-ol
Butan-2-ol
Isomérie de squelette Butan-1-ol
2-Méthylpropan-1-ol
III. Stéréoisomérie de conformation et de configuration
Les stéréoisomères (stéréomères) sont des composés de même constitution mais différant par
l'arrangement de leurs atomes dans l'espace. La forme dʼune molécule nʼest pas figée et une rotation
est possible autour de chaque liaison simple : la molécule peut adopter différentes formes appelées
conformations. Les différents conformères sont en équilibre par des rotations autour de simples
liaisons (liaisons de type σ).
HC N O HN C O
Acide fulminique (CHNO) Acide isocyanique (CHNO)
OH
O
OH
OH
OH
OH
61
À chaque rotation, la molécule est toujours la même mais représentée sous une conformation
différente. Même pour des molécules relativement simples, une multitude de conformères en équilibre
les uns avec les autres est possible. Certaines conformations sont cependant plus stables que
dʼautres : elles sont donc présentes en plus grande proportion dans le mélange.
Attention à ne pas confondre conformation et configuration. Le passage dʼune configuration à
une autre ne peut se faire que par la rupture dʼau moins une liaison : il nʼy a pas dʼéquilibre entre
deux stéréoisomères de configuration. En particulier, il nʼy a pas de rotation possible autour de
liaisons multiples :
IV. Représentation des molécules
IV.1. Représentation de Cram
Cette représentation a été développée par le chimiste Donald Cram. Ce mode de représentation
respecte les angles de liaison. Lʼécriture de la structure doit respecter des angles dʼenviron 109° pour
des atome hybridés sp3, des angles dʼenviron 120° pour des atomes hybridés sp2, et des angles
dʼenviron 180° pour des atomes hybridés sp :
La représentation de Cram est particulièrement bien adaptée aux molécules complexes et aux atomes
de carbone tétraédriques. La représentation de Cram d'une molécule permet de dessiner celle-ci dans
l'espace : elle fait apparaître les liaisons en perspective. Cette représentation considère le plan
passant par deux liaisons et bissecteur de lʼangle formé par les deux autres liaisons du tétraèdre. Deux liaisons sont donc dans ce plan (le plan de la feuille), une est en avant du plan et une autre en
arrière du plan.
O O O O ...
O
NH2
O
NH2
NH2
sp2 : angles ≈120°
sp3 : angles ≈109° sp : angle ≈180°
C C
Liaisons dans le plan.!
Liaison vers lʼavant du plan.!
Liaison vers lʼarrière du plan.!
HH
H
CH3
H H
Représentation de Newman!
Plan de projection!
Rotation (en degrés)!Conformation décalée!
Conformation éclipsée!
Éner
gie
rela
tive!
60!0! 120! 180! 240! 300! 360!
CH3H
H H
H H
62
La méthode de représentation de Cram des atomes de carbone tétraédriques est basée sur quelques
règles simples quʼil est impératif de respecter scrupuleusement :
Ø Une liaison entre deux atomes dans le plan de la feuille est représentée par un trait.
Ø Une liaison entre un atome dans le plan et un atome en avant de la feuille est représentée par ,
la pointe étant du côté de l'atome dans le plan, la base du côté de l'autre atome.
Ø Une liaison entre un atome dans le plan et un atome en arrière du plan est représentée par , la
pointe étant du côté de l'atome dans le plan, la base du côté de l'autre atome.
En particulier, la représentation de la liaison à lʼarrière du plan doit être rigoureuse et ne doit pas être
confondue avec une autre représentation utilisée pour signifier une stéréochimie inconnue :
La représentation de Cram peut être étendue à la représentation dʼautres atomes tétraédriques et,
dʼune façon générale, à chaque fois que des liaisons sont dans et hors du plan de la feuille :
IV.2. Représentation de Newman
La représentation de Newman (ou projection de Newman) est un autre mode de représentation
des molécules organiques généralement utilisé avec des atomes de carbone tétravalents. Dans la
représentation de Newman, la molécule est regardée dans lʼaxe d'une liaison entre deux atomes de
carbone voisins. Le carbone frontal masque le carbone arrière. Il est représenté par le point de
jonction des trois liaisons le concernant. Le plan médian de la liaison carbone–carbone est représenté
par un cercle. Les liaisons émanant du carbone arrière émergent de la circonférence de ce cercle.
La représentation de Newman est particulièrement utilisée pour lʼanalyse conformationnelle des
molécules organiques en mettant en évidence l'éloignement des atomes liés aux deux atomes de
carbone qui est variable de par la libre rotation autour de la liaison carbone–carbone. Cette
représentation permet de visualiser aisément les effets d'interactions stériques entre des groupements
portés par les deux atomes de carbone adjacent (gène stérique). Il est possible de prévoir lʼévolution
de lʼénergie de la molécule en fonction de ces interactions. Dans le cas simple de lʼéthane (C2H6), on
peut ainsi écrire deux conformations remarquables :
C Cn'est pas équivalent à
C PO
Si S RuN
C C
Liaisons dans le plan.!
Liaison vers lʼavant du plan.!
Liaison vers lʼarrière du plan.!
HH
H
CH3
H H
Représentation de Newman!
Plan de projection!
Rotation (en degrés)!Conformation décalée!
Conformation éclipsée!
Éner
gie
rela
tive!
60!0! 120! 180! 240! 300! 360!
CH3H
H H
H H
63
Ø La conformation décalée (la plus stable) dans laquelle les atomes dʼhydrogène dʼun atome de
carbone sont les plus loin possible de ceux de lʼautre atome de carbone, ce qui correspond à une
gène stérique minimale.
Ø La conformation éclipsée (la moins stable) dans laquelle les atomes dʼhydrogène dʼun atome de
carbone sont les plus proches possible de ceux de lʼautre atome de carbone, ce qui correspond à une
gène stérique maximale.
Le passage dʼune conformation à lʼautre se fait au moyen dʼune simple rotation dʼun angle de 60°
autour de la liaison carbone–carbone de la molécule :
À partir de la conformation éclipsée, une rotation autour de la liaison carbone–carbone sʼaccompagne
dʼune diminution progressive de lʼénergie potentielle de la molécule jusquʼà son minimum une fois la
conformation décalée atteinte (rotation de 60°). À partir de la conformation décalée, une même
rotation sʼaccompagne dʼune augmentation progressive de lʼénergie potentielle de la molécule jusquʼà
son maximum une fois la conformation éclipsée atteinte (rotation de 60°). Et ainsi de suite. On peut en
déduire le diagramme dʼénergie potentielle ci-dessous qui montre que la conformation décalée est la
conformation la plus basse en énergie (donc la plus stable) :
V. La chiralité
V.1. Définition
En 1820, dans des cuves de vin est découvert un tartrate étrange qui possède la même formule
brute mais pas les mêmes propriétés que le tartrate habituel. En 1826, Louis
Gay-Lussac nomme ce tartrate «acide racémique» (du latin racemus = grappe de
raisin). Au milieu du 19e siècle, Louis Pasteur cristallise ce tartrate en de nombreux
cristaux de deux formes différentes; il les sépare à la loupe et à la pince à épiler !
Il montre que lʼune des formes correspond au tartrate naturel et lʼautre à un tartrate qui dévie la
lumière polarisée en sens exactement inverse. En 1860, Pasteur découvre que les deux tartrates
H
H H
H
H H
H
H H
Éclipsée
HH
HDécalée
H
H HHH
HDécalée
H
H H
H
H H
Éclipsée
...60° 60° 60° 60°
C C
Liaisons dans le plan.!
Liaison vers lʼavant du plan.!
Liaison vers lʼarrière du plan.!
HH
H
CH3
H H
Représentation de Newman!
Plan de projection!
Rotation (en degrés)!Conformation décalée!
Conformation éclipsée!
Éner
gie
rela
tive!
60!0! 120! 180! 240! 300! 360!
CH3H
H H
H H
64
sont identiques mais quʼils sont images lʼun de lʼautre dans un miroir (on parle dʼimages
spéculaires) : la molécule est chirale (du grec xειρ = chiros = main).
V.2. Énantiomérie
Une molécule chirale nʼest pas superposable à son image dans un miroir. Cela signifie quʼelle
possède un énantiomère. Une molécule achirale (non chirale) ne possède pas dʼénantiomère. Deux
énantiomères sont images lʼun de lʼautre dans un miroir et ne sont pas superposables.
Deux molécules énantiomères ont les mêmes caractéristiques spectrales et physiques (températures
de fusion et dʼébullition, indice de réfraction…) et ne peuvent donc pas être séparés directement.
Elles ne diffèrent que par leur activité optique mesurée à lʼaide dʼun polarimètre.
Un molécule chirale peut être caractérisée par son pouvoir rotatoire exprimé en degré (°) et mesuré
avec une lumière monochromatique polarisée de longueur dʼonde précise (souvent la raie D du
sodium à 589 nm), à une température et à une concentration dans un solvant donné. Pour une
molécule chirale donnée :
Ø Un des énantiomères est dextrogyre : il dévie le plan de polarisation dʼune lumière polarisée dʼun
angle +α vers la droite et est noté (+).
Ø Lʼautre énantiomère est lévogyre : il dévie le plan de polarisation dʼune lumière polarisée dʼun
angle –α vers la gauche : il est noté (–).
(+)-Alanine αD = +14° (c = 20,6 g.L–1 dans HCl 6 mol.L–1)
(–)-Alanine αD = –14° (c = 9 g.L–1 dans HCl 1 mol.L–1)
!"
Ne se superpose pas à la molécule de départ.!
Analyseur!
Lumière!polarisée!
CH3
HFI
CH3
HFI
CH3
HIF
OO
Odeur de menthe verte!Odeur de fenouil!
Odeur de citron! Odeur d’orange!
molécule chirale!récepteur 2!
récepteur 1!
cellule!
OO
!"
ne se superpose pas à la molécule de départ!
Analyseur!
Lumière!polarisée!
CH3
HFI
CH3
HFI
CH3
HIF
OO
Odeur de menthe verte!Odeur de fenouil!
Odeur de citron! Odeur d’orange!
molécule chirale!récepteur 2!
récepteur 1!
cellule!
OO
CO2H
NH2
HO2C
NH2
CO2H
NH2
65
On appelle mélange racémique, et on note (±), un mélange équimolaire de deux énantiomères.
Lʼactivité optique dʼun mélange racémique est nulle : il nʼy a pas de déviation du plan de
polarisation dʼune lumière polarisée. Les énantiomères dextrogyre et lévogyre sont présents à 50% et
font tourner le plan de polarisation dʼune lumière polarisée dʼun angle +α et –α respectivement.
La chiralité est importante dans le monde du vivant : elle est à la base de la reconnaissance
moléculaire. La chiralité de certaines molécules leur permet dʼactiver certains récepteurs moléculaires
à la surface des cellules. Deux énantiomères peuvent ainsi activer des récepteurs différents :
Deux molécules énantiomères peuvent par exemple activer des récepteurs olfactifs différents comme
dans les cas suivants :
V.3. Chiralité centrée
V.3.a. Règles séquentielles de Cahn–Ingold–Prelog
Un atome stéréogène est un atome dont la permutation de deux substituants (atomes ou groupes
dʼatomes) liés à celui-ci, génère deux stéréoisomères. Dans les exemples ci-dessous les atomes en
gras sont tous stéréogènes :
Un atome de carbone tétraédrique possédant quatre groupes différents est stéréogène et on parle de
carbone asymétrique : il est défini par sa configuration absolue (R) ou (S). La configuration absolue
!"
Ne se superpose pas à la molécule de départ.!
Analyseur!
Lumière!polarisée!
CH3
HFI
CH3
HFI
CH3
HIF
OO
Odeur de menthe verte!Odeur de fenouil!
Odeur de citron! Odeur d’orange!
Molécule chirale!Récepteur 2!
Récepteur 1!
Cellule!
OO
!"
Ne se superpose pas à la molécule de départ.!
Analyseur!
Lumière!polarisée!
CH3
HFI
CH3
HFI
CH3
HIF
OO
Odeur de menthe verte!Odeur de fenouil!
Odeur de citron! Odeur dʼorange!
Molécule chirale!Récepteur 2!
Récepteur 1!
Cellule!
O O
CCH3
HFI C C
H
Cl
Cl
HSO
DH
PO
CH3CH3CH2
Fe
O
O O
O O
O
OO
OO
O
O
3–
66
(R) ou (S) dʼun carbone tétraédrique stéréogène est établie à lʼaide des règles séquentielles de
Cahn–Ingold–Prelog (règles CIP). On classe ainsi les groupes par ordre de priorité.
Ø Règle 1 : Le groupe prioritaire est celui dont l'atome directement lié au centre stéréogène possède
le numéro atomique Z le plus grand. Les isotopes les plus lourds sont prioritaires sur les plus
légers.
53I > 9F > 6C > 1H
8O > 1D > 1H > :
Ø Règle 2 : Quand deux groupes sont liés au centre stéréogène par des atomes identiques, il nʼest
pas possible de conclure avec la règle 1. On compare alors entre eux les atomes situés à la
proximité suivante et on applique la règle 1 à cette proximité. La priorité est donnée au groupe
faisant apparaître lʼatome de plus grand numéro atomique. Si on ne peut toujours pas conclure, on
poursuit la comparaison dans les proximités suivantes de la ramification prioritaire : on effectue une
arborescence.
Les trois groupements carbonés sont prioritaires sur lʼatome dʼhydrogène :
on attribue le numéro 4 à lʼatome dʼhydrogène.
Les trois groupements carbonés ne peuvent pas être classés au 1e rang
et sont classés en effectuant une arborescence.
Substituant Arborescence 1e Rang 2e Rang Classement
CH3
C (H, H, H) 3
C(CH3)3
C (C, C, C) 2
CH2I
C (I, H, H) 1
Ø Règle 3 : Les liaisons multiples sont comptées comme autant de liaisons simples, et chaque
atome engagé dans une liaison multiple est répété autant de fois qu'il est lié dans cette
liaison. Cependant, on ne poursuivra l'arborescence qu'à partir d'un seul de ces atomes s'il est
nécessaire de regarder la proximité suivante. On est donc amené à écrire des atomes fantômes
CH3
HFI
SO
DH
CH3
HCH2IC(CH3)3
CH
HH
CC
CC
CH
HI
67
désignés par ∞. Ces atomes fantômes comptent comme des atomes classiques dans les règles de
priorité. Lʼarborescence nʼest pas poursuivie à partir des atomes fantômes.
Lʼapplication de règles des Cahn–Ingold–Prélog permet de classer sans ambiguïté les substituants
dʼun atome stéréogène .
Les trois groupements carbonés sont prioritaires sur lʼatome dʼhydrogène : on
attribue le numéro 4 à lʼatome dʼhydrogène.
Les trois groupements carbonés ne peuvent pas être classés au 1e rang et
sont classés en effectuant une arborescence.
Substituant Arborescence 1e Rang 2e Rang 3e Rang Classement
C(O)CH3
C (O, O∞, C) C∞ et (H, H, H) 1
C(CH3)3
C (C, C, C) 3 × (H, H, H) 3
C≡CH
C (C, C∞, C∞) (C∞ , C∞, H) 2
Au 2e ordre, le groupe C(O)CH3 fait apparaître un atome dʼoxygène qui lʼemporte sur lʼatome de
carbone apparaissant dans la décomposition des deux autres groupes carbonés. On lui attribue le
numéro 1. Les deux autres groupes ne peuvent être classés au 2e rang. Il faut donc comparer leur
décomposition au 3e rang. Le groupe avec la liaison triple carbone–carbone fait apparaître des atomes
de carbone alors que lʼautre ne fait apparaître que des atomes dʼhydrogène à ce rang. On peut donc
conclure et attribuer le numéro 2 au substituant avec la liaison triple et le numéro 3 à lʼautre. Le
classement des groupes est terminé.
HC CH2 CC∞
HCH
C∞H C CH C
C∞
C∞CC∞
C∞H
HC O CO∞
HO C∞ C N C
N∞
N∞NC∞
C∞
O
HC(CH3)3
CO∞
OC
C∞
HH
H
C
C
C
C
HH H
HHH
H
H
H
CC∞
C∞CC∞
C∞H
68
V.3.b. Descripteurs (R) et (S)
Une fois les substituants de lʼatome stéréogène classés selon les règles séquentielles de Cahn–
Ingold–Prelog, on regarde dans lʼaxe de la liaison carbone–substituant n°4 de façon à placer le
substituant n°4 à lʼarrière.
Ø Si lʼordre 1 → 2 → 3 → 4 se déroule dans le sens trigonométrique (sens anti horaire ou encore
vers la gauche), la configuration absolue de lʼatome est (S), du latin sinister.
Ø Si lʼordre 1 → 2 → 3 → 4 se déroule dans le sens anti trigonométrique (sens horaire ou encore
vers la droite), la configuration absolue de lʼatome est (R), du latin rectus.
V.3.c. Composé méso
Il nʼy a aucune corrélation entre les configurations absolues des centres stéréogènes et la propriété
dextrogyre ou lévogyre de la molécule. La propriété dextrogyre ou lévogyre dʼune molécule chirale
ne peut pas être connue à priori : il faut faire la mesure du pouvoir rotatoire pour la connaître.
Pour une molécule chirale qui possède n centres stéréogènes il existe au plus 2n stéréoisomères
différents. On note par une étoile (∗) les centres stéréogènes :
2 Centres stéréogènes → 22 = 4 Stéréoisomères possibles
Il y a donc au maximum 4 stéréosiomères pour lʼacide tartrique. En fait il nʼy en a que 3 car un
des stéréoisomères est achiral (il est superposable à son image dans un miroir).
Configuration absolue (S).!
! "
#$Cl
I BrF
Br
I ClF
F! I! Br!
Cl!
! "
#$
Ce que lʼon voit en regardant selon lʼaxe C–F.!
On classe selon les règles CIP.!
Configuration absolue (R).!
F! I! Cl!
Br!
Ce que lʼon voit en regardant selon lʼaxe C–F.!
On classe selon les règles CIP.!
! "#$
! "#$
Configuration absolue (S).!
! "
#$Cl
I BrF
Br
I ClF
F! I! Br!
Cl!
! "
#$
Ce que lʼon voit en regardant selon lʼaxe C–F.!
On classe selon les règles CIP.!
Configuration absolue (R).!
F! I! Cl!
Br!
Ce que lʼon voit en regardant selon lʼaxe C–F.!
On classe selon les règles CIP.!
! "#$
! "#$
O(–)-Carvone
Configuration absolue (R)
HO2C
OH
OH
CO2HAcide (+)-tartrique
Configurations absolues (2S,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H! !
69
Le stéréoisomère (2S,3S) nʼest pas superposable à son image spéculaire, le stéréoisomère
(2R,3R). On a 2 stéréoisomères chiraux qui sont énantiomères.
Le stéréoisomère (2S,3R) est superposable son image spéculaire. Les stéréoisomères (2S,3R) et
(2R,3S) ne sont quʼun seul et même composé. On nʼa donc quʼun seul stéréoisomère achiral.
Une molécule peut donc posséder des centres stéréogènes et peut ne pas être chirale pour autant si
elle possède au moins un plan et/ou un centre de symétrie : on parle de molécule méso.
V.3.d. Diastéréoisomères (diastéréomères)
Deux diastéréoisomères ne sont pas images lʼun de lʼautre dans un miroir. Ce sont des
stéréosiomères qui ne sont pas énantiomères. Des diastéréoisomères sont des stéréoisomères
qui ont au moins un centre stéréogène de même configuration absolue et au moins un centre
stéréogène de configuration absolue opposée. À priori, des diastéréoisomères nʼont pas les mêmes
propriétés physico-chimiques et peuvent facilement être séparés par distillation ou cristallisation.
! "#$
(R)! (S)!! "
#$Cl
I BrF
Br
I ClF
HO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
HO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H
! "#$
(R)! (S)!! "
#$Cl
I BrF
Br
I ClF
HO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
HO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3S)
HO2C
OH
OH
CO2HHO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
HO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H
OH OH
(R,S)
OH OH
(R,S)
OH OHHO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3R)
•!
HO2C
OH
OH
CO2H
HO2C
OH
OH
CO2H
O
O OBr
Br
N
O
O OBr
Br
N
70
Les composés éthyléniques (composés possédant au moins une liaison carbone–carbone double)
peuvent donner lieu à de la diastéréoisomérie. Par exemple, les deux stéréosiomères ci-dessous ne
sont pas images lʼun de lʼautre dans un miroir : ils répondent bien à la définition de diastéréoisomères.
Il est possible de définir la configuration de chacun de ces diastéréoisomères à lʼaide de la
nomenclature (E) / (Z). Pour ce faire, on classe les groupements sur chaque atome de carbone de la
liaison double à lʼaide des règles séquentielles de Cahn–Ingold–Prelog.
Les deux groupes prioritaires selon les règles CIP sont du même côté de la liaison
double : cela correspond à la configuration (Z) de la liaison double (de Zusammen,
ensemble, en allemand).
Les deux groupes prioritaires selon les règles CIP ne sont pas du même côté de la
liaison double : cela correspond à la configuration (E) de la liaison double (de
Entgegen, opposé, en allemand).
Si au moins un des deux atomes de carbone de la liaison double porte deux groupements identiques,
il nʼy a pas de configuration (Z ) ou (E) :
V.4. Chiralité axiale et atropoisomérie
La chiralité est une propriété globale de la molécule. Elle est liée à lʼabsence de plan et de centre de
symétrie. Une molécule peut être chirale sans posséder de centres stéréogènes : cʼest le cas de
la chiralité axiale ou de lʼatropoisomérie.
Lʼatome de carbone central est hybridé sp. Lʼatome dʼhydrogène et le groupe CH3 de lʼatome de
carbone de gauche sont dans un plan perpendiculaire au plan contenant lʼatome dʼhydrogène et le
groupe CO2H de lʼatome de carbone de droite.
Cette molécule est chirale (chiralité axiale) car non superposable à son image spéculaire, bien que
ne possédant pas de centre stéréogène.
C CCH3
H
H3C
HC C
H
CH3
H3C
H
C C
C C
C CCH3
CH3
H3C
H
•CO2HHH
H3C
•CO2HHH
H3C•
HO2CH H
CH3
•HCO2HH
H3C
•CO2HHH
H3C
•CO2HHH
H3C•
HO2CH H
CH3
•HCO2HH
H3C
71
Les atomes dʼhydrogène et de brome de lʼatome du cycle de gauche sont dans un plan
perpendiculaire au plan contenant les atomes dʼhydrogène et de chlore du cycle de droite.
Il nʼy a pas de libre rotation autour de la liaison σ reliant les deux cycles. En effet cela forcerait les
atomes (Br et H dʼun côté, Cl et H de lʼautre) à se trouver dans un même plan occasionnant une gêne
stérique trop importante.
Cette molécule est chirale. Comme il nʼy a pas de libre rotation autour de la liaison σ reliant les deux
cycles, elle nʼest pas superposable à son image spéculaire (atropoisomérie).
•CO2HHH
H3C
•CO2HHH
H3C•
HO2CH H
CH3
•HCO2HH
H3C
Br
H
H
Cl
Br
H
Cl
H
Br
H
Cl
H
Br
H
Cl
HBr
H
Cl
H
Br
H
H
Cl
Br
H
H
Cl
HO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
HO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3R)
HO2C
OH
OH
CO2H
(2R,3S)
HO2C
OH
OH
CO2H
OH OH
(R,S)
OH OH
(R,S)
OH OHHO2C
OH
OH
CO2H
(2S,3R)
•!
Br
H
Cl
H
Br
H
Cl
H
Br
H
H
Cl
72
D. Forces intermoléculaires
I. Définitions Les forces de van der Waals conduisent à une attraction au voisinage des espèces chimiques
résultant de lʼinteraction de dipôles électriques. Ces forces sont généralement beaucoup plus faibles
que les liaisons dans les molécules :
Ces forces bien que faibles sont dʼune importance considérable pour expliquer certains des
comportements des espèces moléculaires et en particulier certaines de leurs propriétés physico-
chimiques comme leurs températures dʼébullition et de fusion. En effet, plus les forces de van der
Waals sont intenses plus les molécules sont liées entre elles et plus les températures
dʼébullition et de fusion sont élevées. Les forces de van der Waals comprennent les forces de
Keesom, de Debye et de London. Lʼénergie de ces forces est inversement proportionnelle à r6 où r
est la distance entre les deux molécules. Cela signifie quʼelles diminuent rapidement avec la distance.
Les liaisons hydrogène constituent une autre force intermoléculaire. On peut comparer lʼintensité de
ces forces en exprimant lʼénergie quʼil faut fournir pour rompre les interactions quʼelles engendrent :
Ø Énergie de liaison de 100 à 500 kJ.mol–1.
Ø Forces de Keesom de 0,5 à 3 kJ.mol–1.
Ø Forces de Debye de 0,02 à 0,5 kJ.mol–1.
Ø Forces de London de 0,5 à 30 kJ.mol–1.
Ø Liaisons hydrogène de 5 à 40 kJ.mol–1.
II. Forces de Keesom
Les forces de Keesom résultent d'une interaction intermoléculaire entre dipôles permanents dus à des
molécules polaires. Leur formulation mathématique a été établie par Willem Keesom en 1912. Les
forces de Keesom sont directionnelles et correspondent à des forces dʼattraction électrostatique entre
charges partielles :
Deux molécules polaires vont avoir tendance à sʼorienter de façon à maximiser leur interaction et
minimiser lʼénergie du système. Lʼénergie des forces de Keesom peut se mettre sous la forme ci-
dessous où µ1 et µ2 sont les normes des moments dipolaires des deux molécules polaires, r la
distance entre ces deux molécules, et k une constante (cette expression nʼest pas à connaître) :
E = k µ21!µ
22
r 6
CH4!
SiH4!
GeH4!
SnH4!
H2O!
H2S!H2Se!
H2Te!HF!
HCl! HBr!
HI!NH3!
AsH3!
SbH3!
–170!
–120!
–70!
–20!
30!
80!
Température dʼébullition (°C)"
130!
PH3!
Forces dʼattraction"
A B C D
µ2!! !
µ1!! !
Dipôle permanent! Dipôle permanent!
!+! !–!!+! !–!
C CA B
µ1!! !
Dipôle permanent! Molécule apolaire!
!+! !–!
A B
µ1!! !
Dipôle permanent! Dipôle induit!
!+! !–!
C C
µ2!! !
!+! !–!
A A B B
Molécule apolaire!Molécule apolaire!
A A
Dipôle instantané!
µ1!! !
!+! !–!
B B
Molécule apolaire!
A A
Dipôle instantané!
!+! !–!
Dipôle induit!
B B
µ2!! !
!+! !–!
µ1!! !
73
III. Forces de Debye
Les forces d'induction de Debye sont les forces intermoléculaires résultants de l'interaction entre un
dipôle permanent (dû à une molécule polaire) et un dipôle (instantané) induit sur une molécule
apolaire (ou un atome). Le champ électrique créé par la molécule polaire déforme le nuage
électronique de la molécule apolaire :
La norme dʼun moment dipolaire induit sous lʼeffet dʼun champ électrique est proportionnelle à la
polarisabilité α (en C2.m2.J–1) de la molécule (ou atome). On utilise souvent plutôt le volume de
polarisabilité αʼ (en m3). La polarisabilité traduit la capacité des molécules (ou atomes) à voir leur
nuage électronique se déformer sous lʼeffet dʼun champ électrique et donc à former un dipôle induit.
Plus une molécule (ou un atome) est volumineuse plus elle est polarisable : les électrons de
valence sont plus loin du noyau et donc moins liés à celui-ci. Les forces de Debye sont alors plus
intenses :
F– Cl– Br– I–
αʼ (10–30 m3) 1,04 3,66 4,77 7,10
Lʼénergie des forces de Debye peut se mettre sous la forme ci-dessous où µ1 est la norme du moment
dipolaire de la molécule polaire, r la distance entre les molécules, α la polarisabilité de la molécule
apolaire, et k une constante (cette expression nʼest pas à connaître) :
E = k µ21!!
r 6
IV. Forces de London
Les forces de dispersion de London sont dues à la nature probabiliste de la densité électronique des
molécules. La densité électronique des molécules nʼest en effet pas équitablement répartie dans la
molécule à tout moment. Cela crée un léger moment dipolaire, le barycentre des charges négatives
(électrons) se décalant légèrement du barycentre des charges positives (noyau). La molécule
présente alors un dipôle instantané (bien que, en moyenne, le moment dipolaire soit nul). Ce dipôle
instantané va pouvoir déformer la distribution électronique dʼune molécule voisine créant ainsi un
dipôle induit : une force dʼattraction dipôle instantané–dipôle induit s'exerce alors entre les molécules.
A B C D
µ2!! !
µ1!! !
Dipôle permanent! Dipôle permanent!
!+! !–!!+! !–!
C CA B
µ1!! !
Dipôle permanent! Molécule apolaire!
!+! !–!
A B
µ1!! !
Dipôle permanent! Dipôle induit!
!+! !–!
C C
µ2!! !
!+! !–!
A A B B
Molécule apolaire!Molécule apolaire!
A A
Dipôle instantané!
µ1!! !
!+! !–!
B B
Molécule apolaire!
A A
Dipôle instantané!
!+! !–!
Dipôle induit!
B B
µ2!! !
!+! !–!
µ1!! !
74
Les forces de London sʼexercent entre deux molécules, quʼelles soient polaires ou non. Cependant, ce
sont les seules forces intermoléculaires de cohésion qui apparaissent entre molécules
apolaires. Lʼénergie des forces de London peut être mise sous la forme suivante où α1 et α2 sont les
polarisabilités électroniques de chaque molécule (ou atome) et r la distance entre les deux molécules
(ou atomes). Plus les molécules (ou atomes) sont polarisables plus les forces de London sont
intenses. Lʼénergie des forces de London peut se mettre sous la forme ci-dessous où α1 et α2 sont les
polarisabilités des deux molécules apolaires, r la distance entre les molécules, et k une constante
(cette expression nʼest pas à connaître) :
E = k !1!!2
r 6
Les forces de London sont dʼautant plus intenses que le nombre dʼélectrons dans le nuage
électronique de la molécule est élevé. Le nombre dʼélectrons dans les atomes étant lié au numéro
atomique Z et la masse molaire atomique croissant avec Z, on peut en déduire que lʼintensité des
forces de London croît globalement avec la masse molaire de la molécule.
Ø Le dihydrogène, H2, est une molécule ne possédant que deux électrons. Cette molécule est très
peu polarisable et les forces de London qui sʼexercent entre deux molécules de dihydrogène sont
faibles : la température dʼébullition du dihydrogène est de –253 °C. Ces forces de London permettent
également dʼexpliquer les variations de température de fusion des dihalogènes :
F2 Cl2 Br2 I2
Température de fusion (°C) –219 –101 –7 114
Lʼintensité des forces de London dépend aussi en partie de la forme des molécules. Elles sont plus
intenses pour des molécules plus longues que pour des molécules plus compactes. Pour des
molécules étirées, les zones de contact entre molécules sont plus vastes et les interactions plus
fortes.
A B C D
µ2!! !
µ1!! !
Dipôle permanent! Dipôle permanent!
!+! !–!!+! !–!
C CA B
µ1!! !
Dipôle permanent! Molécule apolaire!
!+! !–!
A B
µ1!! !
Dipôle permanent! Dipôle induit!
!+! !–!
C C
µ2!! !
!+! !–!
A A B B
Molécule apolaire!Molécule apolaire!
A A
Dipôle instantané!
µ1!! !
!+! !–!
B B
Molécule apolaire!
A A
Dipôle instantané!
!+! !–!
Dipôle induit!
B B
µ2!! !
!+! !–!
µ1!! !
75
Forme de la molécule Température dʼébullition (°C)
Hexane (C6H14)
69
2-Méthylpentane (C6H14)
60
2,3-Diméthylbutane (C6H14)
58
2,2-Diméthylbutane (C6H14)
50
V. Liaisons hydrogène
La liaison hydrogène (ou pont hydrogène) est une liaison qui relie deux molécules. Elle
implique un atome d'hydrogène et un atome électronégatif comme l'oxygène, lʼazote ou le
fluor. Il sʼagit à 80% dʼune liaison de type électrostatique. Pour que cette liaison s'établisse, il
faut être en présence d'un donneur de liaison hydrogène, composé possédant un
hétéroatome (azote, oxygène, fluor) porteur d'un atome hydrogène, et d'un accepteur de
liaison hydrogène, composé possédant un hétéroatome (azote, oxygène, fluor) porteur de
doublets électroniques libres. Les liaisons hydrogène appartiennent à la famille des forces
intermoléculaires. Elles se distinguent cependant des forces de van der Waals par leur
intensité plus importante :
Énergie (kJ.mol–1)
29
21
13
8
Cʼest grâce aux liaisons hydrogène que lʼeau est liquide aux températures auxquelles nous vivons :
les molécules équivalentes H2S, H2Se, H2Te, qui sont plus lourdes mais ne présentent pas de liaisons
hydrogène, sont toutes gazeuses au-dessus de 0 °C. On trouve aussi des liaisons hydrogènes dans
lʼacide fluorhydrique HF liquide et dans certaines molécules possédant des liaisons N–H. Ces
HO N
HO O
HN N
HN O
76
interactions sont moins fortes que celles impliquant des liaisons O–H. Toutefois, un exemple important
concerne les liaisons entre paires de bases des deux brins de lʼADN. Les deux brins sont maintenus
associés via des liaisons hydrogène de type N–H…N, mais celles-ci restent suffisamment faibles pour
pouvoir se rompre temporairement lorsque lʼADN se réplique.
CH4!
SiH4!
GeH4!
SnH4!
H2O!
H2S!H2Se!
H2Te!HF!
HCl! HBr!
HI!NH3!
AsH3!
SbH3!
–170!
–120!
–70!
–20!
30!
80!
Température dʼébullition (°C)!
130!
PH3!
Forces dʼattraction"
n (pour lʼhétéroélément)!2! 3! 4! 5!