emission obligataire marocaine 2022 2042 quelle appréciation

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Emission Obligataire marocaine 2022/2042 : Quelle appréciation ? Analyse détaillée de la 4éme sortie obligataire marocaine Par Imad EL AHDI, Analyste Financier Indépendant En continuation de notre réflexion sur la situation souveraine marocaine (l’Etude « Le Rating Souverain Marocain : Faut-Il être inquiet ? »), cette étude vise à éclairer son lecteur sur les conditions générales de la sortie obligataire marocaine, via une mise en situation de son contexte et de ses motivations. En outre, elle permettra d’aborder le sujet sous un angle plus précis on ana lysant les conditions d’emprunt dans leurs environnements actuels et avec ceux passés. Via des graphiques et données chiffrés, nous voulons fournir des éléments de réflexion qui peuvent servir à la construction d’une opinion personnelle, loin des commentaires précipités. - Décembre 2012 -

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Page 1: Emission Obligataire marocaine 2022 2042 Quelle appréciation

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Emission Obligataire marocaine

2022/2042 : Quelle appréciation ? Analyse détaillée de la 4éme sortie obligataire marocaine

Par Imad EL AHDI, Analyste Financier Indépendant

En continuation de notre réflexion sur la situation souveraine marocaine (l’Etude « Le Rating

Souverain Marocain : Faut-Il être inquiet ? »), cette étude vise à éclairer son lecteur sur les

conditions générales de la sortie obligataire marocaine, via une mise en situation de son

contexte et de ses motivations.

En outre, elle permettra d’aborder le sujet sous un angle plus précis on analysant les conditions

d’emprunt dans leurs environnements actuels et avec ceux passés. Via des graphiques et

données chiffrés, nous voulons fournir des éléments de réflexion qui peuvent servir à la

construction d’une opinion personnelle, loin des commentaires précipités.

- Décembre 2012 -

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ETUDE :

Imad El Ahdi : « Emission Obligataire marocaine 2022/2042 : Quelle appréciation ? »

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I. Introduction :

ors du passage d’une économie d’endettement

à celle du marché dans les années 80, l’objectif

majeur était de désenchainer le lien naturel

entre les agents excédentaires et déficitaires de

l’intermédiation bancaire, et par la même occasion

revitaliser les marchés financiers. Au cœur de cette

évolution se trouve les obligations souveraines, comme

alternative au mode de financement classique

(endettement interne, crédits auprès des institutions

internationales, …). Ainsi, au premier semestre 2011,

les obligations souveraines du gouvernement

Britannique (Gilts), étaient souscrites à 80% par des

prêteurs privés.

Figure 1: Les détenteurs des Gilts en premier semestre 2011.

En littérature financière, l’obligation souveraine est

celle émise par un Etat dans une devise étrangère

(l’emprunt d’Etat étant émis en monnaie nationale),

permettant une ressource budgétaire. A la différence

des autres obligations (corporate,…), ces dernières

présentent le profil suivant : i) un faible risque

d'insolvabilité grâce à la qualité de signature de

l’émetteur et un Risque de liquidité minime vue le

volume important de la dette publique en circulation

sur le marché secondaire. Cependant, cet instrument

subit un Risque de change impactant la valorisation de

la mise initiale (principal), et celui du taux d'intérêt lié

aux conditions du marché.

Loin de ces facteurs de risque assurables, le poids de

l’Etat en tant qu’entité souveraine peut susciter des

tentations de défaut fabriquées. En effet, avec

l’absence d’instance se dotant d’une force pénale

contre les défauts «artificiels», les Etats peuvent

arbitrer en faveur d’une banqueroute les mettant à

l’abri des intérêts à payer. D’ailleurs, la probabilité de

concrétisation de cette incertitude se mesure sur le

marché dérivé des CDS1. En cette voie, les modèles de

dettes souveraines telles celui d’EATON et

GERSOWITZ [1981] expliquent que les Etats n’ont

pas intérêt à falsifier leurs défauts pour une

optimisation inter-temporelle en vertu du modèle à

sanction fondé sur la réputation: le défaillant étant

exclus immédiatement et définitivement de l’accès à

l’emprunt extérieur.

Dans cette perspective, les obligations souveraines

dépendent de la qualité de leurs émetteurs. Ainsi, on

devisera différente classe d’obligation selon un couple

rentabilité/risque différent. De ce fait, les émissions

des pays à signature moyenne à faible, tel ceux des

pays émergeants, sont plus juteuses pour leurs

détenteurs.

En dépit de ses facteurs de risques spécifiques et d’une

rémunération limitée en comparaison d’autres

instruments (Actions, Obligations Corporate,…), les

obligations souveraines restent un instrument

privilégié par les professionnels de la gestion de

portefeuille (OPCVM diversifié,…) leurs permettant

une maitrise des risques. En tête des plus rechercher,

on citera le T-Bond Américain, le Bund Allemand,…

Néanmoins, les sorties obligataires massives des pays à

bonne signature, accentuent la difficulté pour que la

demande des pays émergeants soit satisfaite (ex : Les

émissions obligataires de l’Allemagne passé de 140

Mds en 2008 à 221 Mds en 2010). En effet, les pays

développés se dotant d’une signature plus prestigieuse

inondent le marché par leurs émissions afin de financer

leurs déficits et programmes de relance, sur des

échéances allant du moyen à long terme. Ceci initie un

« Fly to quality » des investisseurs, voulant minimiser

le risque de leurs placements (ex : la forte demande sur

les obligations Suisses, ayant un spread2 négatif de 187

pips vis-à-vis du T-Bond).

1 Credit Default Swap est un contrat de couverture financière sur la

défaillance d’un emprunteur 2 Il s’agit de l’écart entre le taux actuariel de l’obligation suisse et

celle américaine

L

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ETUDE :

Imad El Ahdi : « Emission Obligataire marocaine 2022/2042 : Quelle appréciation ? »

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Au milieu de ce contexte périlleux, la sortie obligataire

marocaine en deux tranches s’avère difficile et

accentuée par la mise en perspective négative de

Standard & Poor’s de l’ « Investement Grade »

marocain. Aussi, les spreads élevés adossés aux pays à

notation comparable (Turquie BB+ S&P, Espagne

BBB- S&P,…) rangent la prime adossée en territoire

inconnu. Ainsi, Quels sont les facteurs ayant poussés

le gouvernement marocain à opter pour la sortie

obligataire ? Comment peut on évalué les résultats de

cette émission ?

II. Le contexte et motivations de la sortie

obligataire marocaine :

a) Contexte :

Le Maroc a émis, mercredi 05 décembre 2012, un

emprunt obligataire sur le marché financier

international d'un montant de 1,5 milliard de Dollars

en deux tranches. Cette émission fait partie des 22

Milliards d’USD que le gouvernement marocain

cherche à lever en dettes extérieures fin 2012. Avant

d’analyser les motivations de cette sortie, force est de

comprendre la structure de la dette extérieure

marocaine. Tous d’abord, la dette nationale libellée en

devises étrangères, qu’elle soit en dette du Trésor

(51,8%) ou Dette garantie (48,2%), est détenue en

2011, par 3 trois catégories de créanciers : Créanciers

bilatéraux (39,1%, principalement l’UE), Institutions

internationales (50,7%) et Marchés Financiers

Internationaux (MFI) & banques commerciales

(10,2%)3. Cette dette reste majoritairement libellée en

Euro (71,3%).

Ainsi, on peut déduire que le poids de la dette

extérieure est partagé entre les dettes de trésor et ceux

garantis, détenus principalement par les institutions

internationales en Euros, et que leurs encours reste

limité (43,4% en 2000 à 23,6% en 2011).

En ce sens, de part le regain d’intérêt constaté depuis

2008, l’exécutif marocain (le précédent comme

l’actuel) cherche à exploiter cette source de

financement en tant que support aux ressources

budgétaires.

3 Bulletin Statistique de la dette extérieure publique, Juin 2012

Figure 2: Evolution du ratio Dette extérieure/PIB, Calcul DTFE

b) Motivations :

Apres cette mise en contexte de la dette extérieure,

force est de repérer les arguments et motivations

favorables à cette source de financement. Les quatre

facteurs que nous allons citer offrent pour nous, les

principales motivations d’une sortie obligataire

marocaine.

Premièrement, le creusement du « Twin Deficit »,

commercial et budgétaire, a alimenté les craintes d’un

assèchement de liquidité. En effet, le déficit budgétaire

continu de se creuser à cause de la hausse des dépenses

de compensation et des revalorisations salariales qui se

chiffre à 11% du PIB national. En contrepartie, les

recettes ordinaires enregistrent une évolution molle

(+4%), ne permettant pas de couvrir les dépenses

grandissantes.

Figure 3: Evolution du déficit budgétaire

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ETUDE :

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Pour le déficit commercial, la récession en Europe,

principal partenaire commercial du royaume, et le

renchérissement des prix des matières premières ont

contribué à un assèchement des réserves en devises

s’évaluant désormais à 4 mois d’importation en

Septembre (5 mois en 2011).

Figure 4: Evolution du déficit commercial

Deuxièmement, l’encours globale de la dette reste

toujours limité et stable (abstraction faite des emprunts

garantis4) à 53,7% du PIB en 2011 (61,8% du PIB avec

les emprunts garantis), en dépit d’une hausse de 7,4%

des encours du trésor. En effet, la hausse du PIB de 6%

en terme nominal a pu atténuer le poids du numérateur

dans le ratio. En outre, le marché de la dette extérieure

(voir figure 2) souscrit par les marchés financiers

internationaux & banques commerciale reste limité

(10% de l’encours extérieur).

Troisièmement, le marché monétaire national endure

une asphyxie liée à l’« effet d’éviction » des levés de

fonds récurrents du trésor. En effet, pour financer le

déficit budgétaire arrêté à 31 Mds Dh en Septembre

2012 (contre 9,8 Mds prévus), le Trésor a émis des

bons d’une valeur de 38 Mds Dh. Par conséquent, la

courbe des taux marocaine a une pente haussière, en

dépit des allégements des réserves obligatoires de 2%

par la Banque Centrale, ramenant les exigences à 4%

et libérant du coup 8 Mds de Dh sur le marché. En

outre, force est de généraliser cette éviction relative –

involontaire- induit par ces levés de fonds, faisant de

4 Contractée par les établissements et entreprises publics, les

collectivités locales et le secteur bancaire

l’ombre sur d’autres marchés, en, l’occurrence celui

des Actions.

Figure 5: Courbe des taux sur le marché national

Finalement, le Maroc jouie d’une bonne réputation sur

la scène internationale grâce à son niveau de notation

souverain (Investement grade) mais aussi à la nouvelle

ligne du FMI le dotant de 6,2 Mds de USD. Derrière ce

statut, on trouve les réformes fiscales et budgétaires

qu’il avait entreprises dans la dernière décennie, en

dépit du chemin qui reste à parcourir (réforme de la

caisse de compensation,…).

Fitch Ratings BBB-/Stable

Standard&Poor’s BBB-/négative

Moody’s Ba1/Stable Figure 6: Rating Fitch, S&P et Moody's du Maroc

III. L’Obligation 2022-2042 : Une continuation

quantitative et une rupture qualitative …

a) Cadre général :

Dans le projet initial d’émission, le gouvernement a

estimé le montant de sa 4éme

Euro-obligation à 1

Milliard d’USD, finalement c’est 1,5 milliards de

Dollars (en deux tranches) qui ont été levé. Derrière

cette levée, une préparation scrupuleuse.

En effet, le lancement a été précédé par un road show

mener par le Ministre de l'Economie et des Finances,

M. Nizar Baraka et le Ministre délégué auprès du

Ministre de l'Economie et des Finances chargé du

Budget, M. Driss Azami El Idrissi, aux Etats-Unis et

en Europe. En chefs de file, ce sont les banques

Barclays Bank PLC, BNP Paribas, Citigroup Global

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ETUDE :

Imad El Ahdi : « Emission Obligataire marocaine 2022/2042 : Quelle appréciation ? »

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Markets Limited et Natixis qui ont été mandaté pour

assister le royaume dans sa tournée de séduction.

Outre le principal levé, les coupons associés sont

intéressants aussi. Concrètement, pour chaque

échéance d’emprunt, les investisseurs utilisent un

benchmark normalisé qu’est le taux sur les obligations

américaines de même maturité, on parlera alors du

taux sans risque (Cette définition reste largement

discutable). En addition, une prime de risque est

majorée, d’où le rôle du profil de risque de l’émetteur.

Pour le cas marocain, cette sortie été facilitée par une

notation méritée des agences de rating Standard &

Poor’s et Fitch Ratings (s’alignant sur la notation

souveraine d’Investment Grade) et décrochant le 2/3

nécessaire pour l’émission (Moody’s n’était pas

conviée). Ainsi, le Maroc s’est vue assigné une prime

de risque de 275 points pour l’échéance de 10 ans et

280 points pour celle de 30 ans.

Au final, la première tranche porte sur un montant de 1

milliard de Dollar d'une maturité de 10 ans et un taux

d'intérêt de 4,25 %, et la deuxième, d'un montant de

500 millions de Dollars, est assortie d'une maturité de

30 ans avec un taux d'intérêt de 5,50 %. Des conditions

plus avantageuses que celle de l’Espagne et la Turquie,

et semblables à celles de l’Italie sur la tranche à 10 ans.

Figure 7: Comparaison des conditions d'emprunt marocain

1) Aspects quantitatifs et qualitatifs :

Quantitativement, L’émission obligataire 2022/2042

s’inscrit en continuation de la relaxation des conditions

d’emprunt à l’international, et marque le maintien de la

capacité de mobilisation des capitaux du Maroc. En

effet, le Royaume a levé 1 Mrd d’Euro en échéance de

2020 lors du gouvernement sortant, et donc a pu

maintenir sa capacité nominale de levé (abstraction

faite de la devise). En outre, les conditions d’emprunts

(coupon à payer) sont plus avantageuses: à titre

d’exemple, l’Euro-obligation à échéance 2020 été

adossée à un coupon de 4,50% alors que celui de 2022

est à 4,25% soit un gain total de 250 points de base.

Figure 8: Les fonds levés & taux d'intérêts

Qualitativement, c'est la première fois que le Maroc

émis une obligation souveraine en Dollar, et surtout

une tranche de 30 ans constituant la plus longue

maturité réalisée à ce jour par le Royaume. En effet,

les trois dernières sorties obligataires ont été libellées

en Euro, considérée comme la principale devise pour

financer le déficit commercial du royaume. Or, la

structure actuelle des devises de facturation et

règlement souligne que le Dollar détient un poids

grandissant face à l’Euro. En 2010, les importations

ont été facturées en Euro pour 44,3% et en Dollar US

pour 52,2%, soit 96,5% du total. Pour ce qui est des

exportations, la part des facturations libellées en euro

et en dollar US a été respectivement de 48% et de 45%

soit 93% du total5.En outre, la structure actuelle du

déficit commercial et budgétaire marocain découle

principalement des importations de matière première,

principalement du pétrole, cotaient en Dollar sur les

marchés internationaux.

En conséquence, la sortie actuel vient confortée la

« diversification » des devises de financement

5 Les "Statistiques des échanges commerciaux par devise de

facturation", réalisée par l'Office des changes, 2006-2010.

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ETUDE :

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souverains, à l’image de la ligne accordée par le Fonds

Monétaire International de 6,2 Mds de Dollars. Par la

même occasion, ce flux de devise viendra étoffer les

réserves nationales en devises, réduit à 4 mois

d’importations au lieu des 5 mois de l’année dernière.

Pour la maturité de l’émission à 30 ans, s’agissant

d’une « cerise » lors de la sortie, car ce besoin n’était

pas exprimé officiellement lors du road show

gouvernemental. La levé de 500 Millions de Dollars à

30 ans exprime la confiance des créanciers à l’égard

des agrégats actuels, et anticipe surtout le maintien

voir l’amélioration des soldes souverains présents. En

outre, cette maturité est adossée à une prime de risque

de 280 points de base, soit 5 points supplémentaires

par rapport à la maturité de 10 ans. Pour rappel,

l’Espagne et la Turquie n’ont aucune obligation sur

cette échéance.

IV. … Mais un succès qui reste à nuancer :

En dépit du succès réaliser par l’émission 2022/2042,

une analyse scrupuleuse des conditions d’emprunt et

des retombés néfastes sur les agrégats d’endettement et

budgétaire, modérera l’excitation médiatique autour de

cette opération.

D’abord, les conditions d’emprunt, théoriquement

avantageuses, cachent la marche haussière de la prime

de risque souveraine. En effet, pour une analyse

pointue, seule la comparaison de la prime de risque est

porteuse de sens, vu que le coupon subit en outre

l’estimation du rendement sur le T-Bond à échéance

égale. En ce sens, nous remarquons une augmentation

de la prime de risque exigée par les créanciers et une

baisse de celle exercer sur le T-Bond. En effet, la

première passait de 55 points lors de l’émission de

2017 à 275 points de base sur celle de 2022. Ainsi,

cette évolution est alarmante dans la mesure où elle

relate une perception négative des investisseurs sur la

signature marocaine. De ce fait, les conditions

avantageuses sur l’obligation marocaine découlent

principalement d’une prime sans risque faible plus

qu’une relaxation de la prime de risque.

Figure 9: Répartition du Coupon (les %T-Bond sont calculés)

D’un autre côté, le Maroc a veillé à la réussite de cette

sortie avec un argument qui partage le financier et le

commercial qu’est la Prime d’Emission : il s’agit de

proposer l’obligation à un prix inférieure à sa valeur

faciale. Le cas échéant, sur les 1 Mrd USD à 10 ans et

les 500 M USD à 30, seul 99,228% et 97,464% seront

réellement versés au Trésor, tout en payant des

coupons sur 100% de la valeur faciale. Ainsi, afin de

neutraliser l’effet de la prime, on parlera d’un taux

actuariel traduisant le coupon effectif versé aux

créanciers. Concrètement, la 1ere tranche est ainsi

émise à 4,340% et non 4,250%, et la deuxième à

5,677% et non 5,500%.

Abstraction faite à cette analyse financière de base, les

Euro-obligations nécessitent un « Risk Management »

dû aux fluctuations de la devise d’émission (Dollar).

Ainsi, deux choix se présentent : soit une stratégie nue

qui n’utilisant aucun produit de couverture, ou une

stratégie de Hedging, utilisant l’ingénierie financière et

les produits dérivés pour fixer à l’avance le cours de

paiement. En terme d’avantages et inconvénients, la

première stratégie ne présente aucune dépense de suivi

ou de gestion mais laisse le Trésor sous la clémence

des fluctuations du Dollar (La hausse étant négative et

la baisse positive), la seconde permettant la couverture

contre les fluctuations de la devise et donc réduit

l’incertitude de la parité USD/MAD lors des

versements de coupon et surtout du principal. Pour un

choix rationnel, un arbitrage entre les risques potentiels

de variation et le coût de couverture est à simuler.

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Finalement, loin des aspects techniques, un contraste

plus moral est à mettre en évidence sur la nature même

des emprunts long termiste, et sur la dernière sortie

obligataire de manière spécifique. En effet, les

capitaux mobilisés seront destinés au financement des

dépenses de compensation plus que des projets

d’investissement productif. Aussi, le ratio Dette/PIB

risquera de se dégrader sachant qu’il est l’un des

piliers du rating souverain du royaume. En effet, pour

absorber le service de la dette, une croissance

économique est nécessaire. Cette dernière reste

difficile vue la conjoncture actuelle du pays.

Ainsi, le service de la dette sera supporté par les

gouvernements et générations à venir. En outre, la

mise en contexte de cette mobilisation internationale

remet en cause la stratégie d « Endettement national et

désendettement international » de 2000-2008. Ainsi, le

poids de la dette extérieure sera de en hausse (environ

23% du PIB), énonçant un retour vers la structure de

financement des années 80, avec tous les souvenirs

amères qu’ils en découlent.

Conclusion :

Le dogme des néolibéraux soutient que les marchés

libres sont les seuls à être efficients et qu’ils sauront

bien imposer leurs limites aux excès d’endettement des

Etats. Ce système est démenti par la crise souveraine

européenne (L’Angleterre reste AAA avec un encours

de dette proche de 500% du PIB).

Pour le cas marocain, le marché restera attentif aux

réformes structurels marocaines sur le marché

secondaire de la dette, ce dernier influençant la valeur

actuelle de l’obligation marocaine (taux

d’actualisation), et prochainement, le coupon contracté

en cas de sortie nouvelle.