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N°455 - Mars 2016 Mensuel - 4,30 IMMOBILIER Vendre une partie de terrain ENTREPRENEURS Choisir le statut adapté, travailler en couple, bien réagir en cas de crise… DOSSIER SOLIDARITÉ Don d’organe, don de vie PAGE 42 FAMILLE Gérer les biens de son enfant mineur PAGE 40 VOS DROITS Pensez à renouveler vos papiers d’identité PAGE 44

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N°455 - Mars 2016 Mensuel - 4,30 €

IMMOBILIERVendre une partiede terrain

ENTREPRENEURSChoisir le statut adapté, travailler en couple,bien réagir en cas de crise… DO

SSIE

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SOLIDARITÉDon d’organe, don de vie

PAGE 42

FAMILLEGérer les biens de son enfant mineur

PAGE 40

VOS DROITSPensez à renouveler vos papiers d’identité

PAGE 44

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SOMMAIREN° 455 Mars 2016

ÉDITORIAL 5

EN BREFVisale, la nouvelle garantie de loyer 6

Combien ça coûte ? Faire établir les statuts d’une société par un notaire 9

La fausse bonne idée ! Recourir à une formule type pour établir des statuts de société 11

Baromètre de l’immobilier et chiffres utiles 13

« L’innovation génère de la valeur économique et sociale » Entretien avec Yann Bonnet 16 L’Ubérisation, la nouvelle révolution technologique 18 Devenir auto-entrepreneur, pour bien démarrer 20 Entreprise individuelle ou société commerciale 22

Garantir le passif avec un contrat de capitalisation 24

Entreprise en difficulté : bien réagir 26

3Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455

L’Ubérisation, la nouvelle révolution p. 18

Le conjoint commerçant p. 32

Vendre une partie de terrain p. 38

Être juré de cour d’assises p. 46

ENTREPRISE

OFFRE D’ABONNEMENT p. 36

TRAVAIL

Couple et entreprise, histoires vraies 28

Décryptage : la déclaration d’insaisissabilité 31

Le conjoint commerçant 32

IMMOBILIERVendre une partie de terrain 38

FAMILLE

Gérer les biens de son enfant mineur 40

SOLIDARITÉDon d’organe, don de vie 42

Pensez à renouveler vos papiers d’identité 44

Être juré de cour d’assises 46

Employer des travailleurs étrangers 48

Notre sélection du mois 49

Vente aux enchères 51

DES LIVRES ET DES MOTS

ANNONCES IMMOBILIÈRES

VOS DROITS

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ENTREPRISE

U« Uberisation de l’économie », « uberi-sation du modèle social », « uberisation du travail »… En un an, ce néologisme a déferlé dans nos vies. À l’origine, le patron du groupe Publicis, Maurice Lévy, qui affirme en décembre 2014 au Financial Times « Tout le monde craint de se faire uberiser ».

❱❱ C’est quoi ?

Mais quelle révolution se cache véritable-ment derrière ce terme ? Tout commence avec la venue sur le marché du transport de personnes de la société Uberpop. Le concept est simple : chacun peut devenir

chauffeur avec son véhicule person-nel grâce à la mise en relation avec les clients proposée par l’application. Levée de boucliers des chauffeurs de taxis, soumis à une réglementation stricte et des charges élevées. Le Conseil consti-tutionnel leur donne raison et interdit

L’Uberisation, la nouvelle révolution technologiqueL’arrivée de la société Uber en France a bouleversé notre modèle économique et social. Laissez-vous guider pour comprendre les enjeux de cette nouvelle ère technologique.

18 Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455

L’effet « Uber » incite les acteurs traditionnels et bien établis à innover pour rester dans la course.

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Uberpop. Pour autant, Uber, qui propose le même service avec, cette fois, des chauffeurs professionnels et indépen-dants, est libre de poursuivre son activité.

❱❱ Rapide, facile et pas cher

En pratique, le concept Uber se décline dans tous les secteurs d’activités. Pour adopter un style de vie « uberisée », il vous suffit de disposer d’un Smartphone, d’une tablette ou d’un ordinateur et de téléchar-ger gratuitement toutes les applications. Si vous avez une petite faim, réservez en ligne un repas chez l’habitant partout dans le monde sur Vizeat. Vous choisis-sez en fonction de la situation géogra-phique et du menu affiché par l’hôte. Avant de partir à votre dîner, connectez-vous sur Yoopies pour trouver le baby sitter idéal pour garder vos enfants. Là

encore, même principe, une carte avec toutes les personnes disponibles à proxi-mité de chez vous et les appréciations des précédents employeurs. Pour la rémunération, vous vous arrangez entre vous. À l’issue de votre dîner où étaient réunis des convives de différents pays, vous décidez d’organiser vos prochaines vacances au Vietnam. Pour trouver la location idéale, vous consultez les offres sur Airbnb : les logements ne manquent pas, photos et présentation accueillante du propriétaire des lieux à l’appui, sans oublier les incontournables évaluations des précédents résidents. Ici, le paie-ment s’effectue intégralement auprès du site qui reverse ensuite sa part au propriétaire. Le concept se décline à l’infini. Pour louer n’importe quel objet (outil de jardin, remorque, matériel hifi ou vidéo…) à un particulier, à proximité de chez vous, rendez-vous sur Zilok. De même pour trouver un logement à louer sans recourir à une agence immobilière avec Somhome. Et si vous souhaitez faire financer votre projet artistique directe-ment par les internautes, c’est possible sur KissKissBankBank.

❱❱ Quand les « petits nouveaux » bousculent les grands

Avec les débats animés autour d’Uberpop, c’est toute la société – particuliers, poli-tiques, économistes, entrepreneurs… – qui s’interroge sur cette nouvelle économie. Les offres de services sur le même modèle se bousculent, incitant les acteurs emblé-matiques à se remettre en cause. Le site de covoiturage Blablacar, qui met en relation des particuliers pour parta-ger un trajet, connaît un succès gran-dissant, notamment pour les itinéraires province-province. Directement impactée, la SNCF a réagi en lançant TGVPop pour proposer des voyages à prix cassés. Dans le même temps, la société a investi 28 millions d’eu-ros, soit 75 % du capital, dans OuiCar, une start-up créée en 2012 qui propose un service de location de voitures entre particuliers.La dynamique « Uber » assure donc aussi un effet booster sur l’économie, incitant les acteurs traditionnels et bien établis à innover pour rester dans la course.

❱❱ Les limites juridiques, sociales et fiscales

En résumé, avec l’Uberisation, on peut accéder à tous les services en un simple clic pour un coût modéré ou arrondir ses fins de mois sans autre démarche admi-nistrative. A priori, tout est beau dans le meilleur des mondes. A priori seulement car, à grande échelle, ce modèle remet en cause tous les fondements sociaux et fiscaux de notre société.

Le manque à gagner pour l’ÉtatDe nombreux sites qui mettent en relation les particuliers n’interviennent pas dans le paiement du prestataire. Les protago-nistes « s’arrangent » entre eux. Paiement de la main à la main, le plus souvent en espèces. Des revenus qui, en théorie, sont soumis aux prélèvements sociaux et à l’impôt sur le revenu mais qui en pratique, ne sont jamais déclarés. Une première étape vient d’être franchie avec la loi de finances pour 2016. À comp-ter du 1er juillet prochain, les sites Internet proposant des transactions entre particu-liers devront informer les utilisateurs de leurs obligations fiscales et sociales et leur fournir chaque année un récapitulatif détaillé de leur activité. Objectif : les inciter à déclarer ces revenus… Y croira qui veut.

Une précarité socialeSi demain, toutes les entreprises « s’ubé-risent », c’est la notion même de salariat qui est appelée à disparaître. Chacun devien-dra indépendant et proposera ses services par le biais de différentes plateformes. Notre Sécurité sociale étant financée sur les seuls salaires, on peut s’interroger sur sa pérennité face à ce nouveau modèle. Quel sort attendra le chauffeur d’Uber en cas de maladie, d’accident du travail ? Et surtout comment pourra-t-il financer une assurance professionnelle ? Qui paiera s’il cause un accident mortel ? Autant de questions qui demeurent en suspens et sur lesquelles politiques et économistes planchent pour proposer des adaptations.Comme sur le terrain économique, la réponse juridique et sociale devra reposer sur l’innovation pour permettre à toute la société d’aborder cette nouvelle ère sans y sacrifier tous les fondements de son modèle actuel.

Barbara Bénichou

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ENTREPRISE

PPour démarrer une activité d’auto-entre-preneur, rien de plus simple : il suffit de remplir un formulaire de déclaration de début d’activité qui peut être rempli en ligne (www.lautoentrepreneur.fr ou www.guichet-entreprises.fr) ou adressé au centre de formalités des entreprises compétent. Pour une activité commerciale, adressez-vous à celui de la chambre de commerce et d’industrie. Pour une activité artisanale, à la chambre des métiers. Enfin à l’Urssaf pour une activité libérale. Cette démarche doit être effectuée au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la création. Elle permet de déclarer votre activité auprès du régime social des indé-pendants (RSI) ou de la Cipav pour votre retraite, auprès des services fiscaux si vous optez pour le versement fiscal libératoire et de recevoir un numéro unique d’identi-fication qui vous sera envoyé par courrier par l’Insee (numéro Siren à neuf chiffres).

❱❱ Immatriculation obligatoire

Ce numéro Siren vous permettra ensuite de vous inscrire au Répertoire des Métiers (RM) ou au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS) selon que vous exercez une activité artisanale ou commerciale. Cette démarche peut être effectuée par dépôt de votre dossier au greffe ou en ligne à partir du même site que celui sur

lequel vous avez rempli le formulaire de déclaration de début d’activité. L’inscrip-tion au RCS vous permet notamment de bénéficier du statut protecteur des baux commerciaux si vous louez un local pour votre activité professionnelle. Attention, si vous exercez une activité artisa-nale, vous devez en outre suivre à vos frais un stage de préparation à l’installation d’une durée de cinq jours (cette dernière condition pourrait être prochainement assouplie). Enfin, quelle que soit la nature de votre acti-vité, vous devez obligatoirement ouvrir un compte bancaire séparé de votre compte personnel pour y enregistrer vos transac-tions professionnelles.

❱❱ Calcul simplifié des cotisations sociales

Le statut d’auto-entrepreneur vous permet de bénéficier du régime micro-social simpli-fié. Il consiste à appliquer au montant du chiffre d’affaires ou des recettes déclaré un taux forfaitaire global pour l’ensemble des cotisations et contributions sociales (maladie-maternité, retraite, allocations familiales, etc.). Pour 2016, ce taux est de 22,9 % pour les auto-entrepreneurs rele-vant de la Cipav (architectes, psycholo-gues, consultants…). Pour ceux relevant du RSI, ce taux est de 13,4 % pour les activités commerciales et de 23,1 % pour

les services qu’ils relèvent des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ou des bénéfices non commerciaux (BNC). Principal intérêt de ce régime : vous ne payez des cotisations que si vous avez réalisé un chiffre d’affaires. Toutefois depuis le 1er janvier 2016, les auto-entre-preneurs ont la possibilité d’acquitter une cotisation minimale, même en l’absence de chiffre d’affaires, dans les mêmes conditions que les autres travailleurs indépendants afin de continuer à se constituer des droits, notamment en matière de retraite.

❱❱ Aide aux chômeurs créateurs d’entreprise

Si vous êtes sans emploi, vous pouvez demander à bénéficier de l’aide aux chômeurs ou repreneurs d’une entreprise (ACCRE). Pour les auto-entrepreneurs, l’ACCRE consiste en un allégement des cotisations sociales sur une durée de 36 mois maximum : jusqu’à la fin du troi-sième trimestre civil suivant le début de votre activité, vous ne paierez que le quart de la cotisation normale ; les quatre trimestres suivants, vous ne paierez que la moitié de la cotisation normale et les quatre trimestres suivants, les trois quarts.

Devenir auto-entrepreneur pour bien démarrerLe statut d’auto-entrepreneur permet d’exercer une activité professionnelle indépendante, qu’elle soit artisanale, commerciale et libérale, et de bénéficier d’un régime social et fiscal simplifié. Sans dépasser certaines limites.

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❱❱ Un régime simplifié pour vos impôts

Les revenus tirés de votre activité d’auto-entrepreneur sont en principe soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Mais ils sont imposables sur une base forfaitaire et non au réel. En pratique, c’est l’administration fiscale qui se charge de calculer votre revenu impo-sable en appliquant au chiffre d’affaires déclaré un abattement forfaitaire de 71 % pour une activité commerciale, de 50 % pour les prestations de services relevant des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et de 34 % pour les bénéfices non commerciaux (BNC). Mais vous avez la possibilité d’opter pour un versement fiscal libératoire sous réserve que vos revenus de 2014 pour une option en 2016 n’aient pas dépassé 26 764 € pour une part de quotient familial (cette limite est majorée de 50 % par demi-part supplémentaire). Cette option vous permet de régler l’impôt sur le revenu dû au titre de votre activité d’auto-entrepreneur en

même temps que vos cotisations sociales et d’échapper au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Le versement libéra-toire est calculé en appliquant sur le chiffre d’affaires ou les recettes un taux de 1 % pour les activités de vente, de 1,70 % pour les services relevant des BIC et de 2,20 % pour les services relevant des BNC.

❱❱ Chiffre d’affaires ou recettes limités

Ces régimes simplifiés sont réservés aux auto-entrepreneurs dont le chiffre d’affaires ou les recettes ne dépassent pas certaines limites : 82 200 € pour une activité commerciale ou pour des pres-tations d’hébergement, à l’exception de la location en meublé et 32 900 € pour les autres activités. Ces seuils sont ceux applicables pour une année complète d’activité. Si vous démarrez en cours d’année, votre chiffre d’affaires doit être proratisé en fonction de la date de créa-tion de votre activité.Si vous dépassez ces limites au titre d’une

année (N), vous pouvez continuer à béné-ficier de ces régimes simplifiés pendant cette année (N) et l’année suivante (N+1) à condition que votre chiffre d’affaires ou vos recettes ne dépassent pas 90 300 € pour une activité commerciale ou pour des prestations d’hébergement et 34 900 € pour les autres services. Mais dès la deuxième année (N+2), vous serez soumis à la TVA. Si au titre de la troisième année (N+2), votre chiffre d’affaires dépasse toujours ces limites, vous ne pourrez plus bénéficier de ces régimes simplifiés et vous devrez déclarer votre cessation d’activité en tant qu’auto-entrepreneur. Vous serez alors imposé sur la base des bénéfices réalisés (c’est-à-dire après déduction de vos charges pour leur montant réel) et vous devrez payer des cotisations sociales sur la base de vos bénéfices et non plus en fonction du chiffre d’affaires réalisé.

Nathalie Cheysson-Kaplan

21Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455 2121

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ENTREPRISE

LLes créateurs ou repreneurs d’entreprise bénéficient d’aides lors du démarrage de leur projet. Toutefois, elles s’amenuisent avec le temps alors que seule un peu plus de la moitié des entreprises sont encore en activité cinq années après leur création. Pourtant, des solutions existent pour redresser la barre dès les premières difficultés.

❱❱ Agir vite

Si l’entreprise connaît des difficultés structurelles, le chef d’entreprise doit agir vite. Il est souvent rétif à saisir la justice car il craint de faire la lumière sur ses problèmes. De ce fait, la plupart des chambres de commerce et d’industrie ont mis en place des cellules de préven-tion des difficultés des entreprises. Le dirigeant est invité à rencontrer gratuite-ment, avec son comptable, un conseiller qui peut être un membre de la chambre de commerce et d’industrie ou un juge consulaire. Il est alors informé de tous les dispositifs de soutien et de traite-ment existants, y compris les procédures judiciaires telles que le mandat ad hoc, la conciliation et la procédure de sauve-garde. Le chef d’entreprise est égale-ment aidé afin d’anticiper et prévenir ses difficultés financières, économiques et juridiques.

Entreprise en difficulté : bien réagir

Pour sauver le navire avant le naufrage et le remettre à flots, les entrepreneurs ont accès à différents dispositifs.

26 Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455

Le chef d’entreprise en difficulté peut obtenir des conseils gratuitement dans les cellules de prévention mises en place par les chambres de commerce et d’industrie.

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❱❱ Donner l’alerte

Si l’entrepreneur n’effectue aucune démarche malgré ses difficultés, il peut être convoqué par le président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance pour donner des renseigne-ments sur la situation économique de l’entreprise. Le président de la juridiction peut être alerté par le commissaire aux comptes de la société ou s’auto-saisir s’il constate des éléments pouvant révéler une situation économique dégradée. Tel est le cas en présence d’un grand nombre d’injonctions de payer dépo-sées à l’encontre d’une société, d’une nouvelle demande de prolongation du délai d’approbation de comptes…

❱❱ Le mandat ad hoc

Le mandat ad hoc est réservé à une société qui connaît des difficultés mais qui arrive encore avec sa trésorerie à faire face au paiement des factures courantes. On parle d’entreprise qui n’est pas encore en état de cessation de paiement. Cette procédure est confidentielle et préven-tive. Elle vise, dans un cadre amiable, à rétablir la situation financière. Toutes les entreprises commerciales, artisanales, agricoles ou libérales peuvent bénéficier de cette procédure. Elle s’applique égale-ment quel que soit le type de structure juridique (SARL, SAS, SA, EIRL). Les associations et les auto-entrepreneurs peuvent également demander l’ouverture d’un mandat ad hoc.

Comment faire ?Le chef d’entreprise doit solliciter la désignation d’un mandataire ad hoc par requête motivée auprès du président du tribunal de commerce s’il est commer-çant ou artisan ou auprès du président du tribunal de grande instance dans les autres cas. Le débiteur peut proposer la désignation d’une personne qu’il souhaite voir désigner comme mandataire ad hoc. S’il accepte la demande, le président du tribunal, après avoir reçu le chef d’entre-prise, désigne un mandataire ad hoc et fixe sa mission ainsi que la durée. Celui-ci devra négocier des accords avec les prin-cipaux créanciers afin de rééchelonner les dettes ou d’obtenir des abandons partiels de créances, permettant ainsi d’éviter un

dépôt de bilan. Pendant le mandat ad hoc, le dirigeant continue à gérer son entreprise.

❱❱ La conciliation

La conciliation vise à rechercher un accord amiable entre les principaux créanciers et l’entreprise. Il s’agit d’une procédure confidentielle qui concerne les sociétés qui ne sont pas en état de cessation de paiement ou qui le sont depuis moins de 45 jours. Un conciliateur est désigné par le président du tribunal de commerce pour les commerçants et les artisans ou par le président du tribunal de grande instance dans les autres cas. Il est nommé pour une période de quatre mois qui peut être prolongée sans excéder cinq mois. Si un accord est trouvé avec les créanciers, le président du tribunal l’homologue. Dans ce cas, les signataires ne peuvent plus poursuivre en justice leur débiteur tant que l’accord est respecté. L’homologation entraîne égale-ment la levée de l’interdiction d’émettre des chèques.

❱❱ La procédure de sauvegarde

Cette procédure a pour but, lorsque l’entreprise n’est pas encore en cessation de paiement, de mettre en place un plan de sauvegarde afin que l’entreprise conti-nue son activité. Le dirigeant doit saisir le

tribunal de commerce s’il est commerçant ou le tribunal de grande instance dans les autres cas, en exposant ses difficultés et en communiquant des justificatifs : situation de trésorerie, derniers comptes annuels, compte de résultat prévisionnel.Après avoir entendu le dirigeant, le tribunal statue sur la demande. Si une procédure de sauvegarde est ouverte, les poursuites contre la société sont suspen-dues. Au terme de la procédure, qui ne saurait excéder dix-huit mois, un plan de sauvegarde d’une durée maximale de dix ans peut être adopté s’il existe une possibilité sérieuse de redressement de l’entreprise. Si le plan ne se déroule pas comme convenu, la procédure peut être convertie en redressement ou en liquidation judiciaire.

La sauvegarde accéléréeCette procédure concerne les entre-prises de plus de vingt salariés, ou trois millions d’euros de chiffres d’affaires et dont les comptes sont certifiés par un commissaire aux comptes ou qui a établi des comptes consolidés. Elle vise à permettre à cette société, déjà enga-gée dans une procédure de conciliation, d’élaborer dans un délai d’un à trois mois, un plan devant assurer la pérennité de l’entreprise. L’accord sur le plan doit être approuvé par les créanciers représentant au moins les deux tiers du montant des créances. Il existe également une variante de la procédure de sauvegarde accélé-rée, qui ne concerne que les créanciers financiers, dénommée « sauvegarde financière accélérée ». Elle s’adresse aux entreprises fortement endettées qui ont obtenu le soutien de la majorité de leurs banques et qui souhaitent restructurer leurs dettes.

Thierry Deschanels

27Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455 2727

Le dirigeant de l’entreprise en difficulté peut saisir la commission des chefs des services financiers (CCSF) en cas de difficultés temporaires de trésorerie afin

d’obtenir des délais de paiement pour certaines dettes fiscales et sociales (Urssaf). Si les délais de paiement sont respectés, une remise des majorations et pénalités peut être envisagée. Lorsque la dette fiscale est manifestement disproportionnée par rapport aux réelles possibilités de remboursement, un abandon d’une partie des impositions directes est possible.

Le sort des dettes fiscales et sociales en cas de difficultés

À fin octobre 2015, le nombre cumulé de défaillances d’entre-

prises s’est élevé en France à 62 163 en baisse de 1,7 % par rapport à octobre 2014.

Des chiffres

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ENTREPRISE

Couple et entreprise, histoires vraies Lors de la création d’entreprise, les démarches administratives et financières prennent souvent le pas sur la protection juridique de l’entrepreneur et de sa famille. Une omission risquée. Vu et entendu dans les offices.

28 Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455

J’« J’ai créé ma petite entreprise. Ma compagne souhaite que nous officialisions notre relation. Que me conseillez-vous ? D’un côté, je souhaite rester maître à bord. De l’autre, je ne veux pas l’exclure de tout, d’autant qu’elle m’aide au jour le jour, tient la comptabilité, suit mes commandes et mes factures… »Selon l’option choisie, Pacs ou mariage, vous devrez envisager soit un contrat de mariage, soit une convention de Pacs. Si vous souhaitez exercer votre activité ensemble et que vous vous mariez sous le régime de la communauté, un contrat de société peut être utile. Enfin, dans la mesure où votre compagne est investie dans votre projet commun, vous êtes déjà liés juridiquement.

« Mon épouse travaille avec moi mais, je ne peux pas la payer pour l’instant. Est-il vrai que cette situa-tion présente des risques pour moi ? Et pour elle, qu’en serait-il si, demain, nos affaires « tournaient mal » ?Il n’y a pas de travail sans statut donc, lors d’un contrôle, l’inspection du travail pourrait relever une infraction pour travail dissimulé. Le statut de conjoint collaborateur permet d’officialiser la relation de travail, sans pour autant devoir verser une rémunéra-tion. Il faudra toutefois prévoir des cotisa-tions sociales pour votre épouse sur une base que vous déterminerez librement (le plus souvent un tiers du Smic). Par ailleurs, si vous veniez à vous sépa-rer, votre épouse pourrait réclamer une

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29Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455 2929

indemnisation correspondant à la plus-value que son travail a apportée à l’entre-prise, si vous êtes mariés sous le régime de la séparation de biens. Enfin, si vos affaires « tournaient mal », votre épouse n’aurait aucun droit à l’assu-rance chômage.

« Peu après mon mariage, j’ai créé mon entreprise de chaudronnerie avec 50 000 €. Aujourd’hui, elle vaut environ 750 000 € et nous divor-çons. L’avocat me dit que je vais en devoir la moitié à ma femme. Est-ce possible alors que c’est moi qui l’ai créée et financée au départ ? »Oui, c’est exact ! Vous vous êtes marié sans contrat et vous avez créé votre entreprise pendant le mariage, sans aucune disposition complémentaire. Dès lors, il s’agit d’un bien commun et votre épouse a droit à la moitié de sa valeur.

« Mon comptable me dit que je risque le dépôt de bilan et de tout perdre, y compris ma maison. Est-ce vrai ? »Depuis le 7 août 2015, vos créanciers ne peuvent plus saisir votre résidence principale même quand vous n’avez rien prévu et que vous avez créé une entre-prise individuelle.

« Si je meurs demain, je voudrais que l’entreprise que j’ai créée et le bail commercial que j’ai signé reviennent à ma femme. Pouvez-vous “m’arranger” cela ? »

Oui, il faut pour cela prévoir une clause d’attribution portant sur l’entreprise dans le contrat de mariage ou un testament en faveur de votre épouse. Le propriétaire des murs ne pourra pas s’opposer à la transmission du bail si votre épouse continue l’activité. Vous pouvez également anticiper votre transmission en faisant une donation-partage dans laquelle vous attribuez vos différents biens personnels à vos enfants. Vous laisserez ainsi votre entreprise à votre conjoint.

Selon vous, votre entreprise risque-t-elle le dépôt de bilan en cas de :

Un peu plus de la moitié des entrepreneurs, artisans et commerçants ont conscience, à juste titre, que leur entreprise risque le dépôt de bilan en cas de décès ou d’invalidité. Plus de 80 % d’entre eux négligent encore l’incidence du divorce sur l’activité professionnelle.

Or, dans la pratique, pour les entrepreneurs mariés sous le régime légal, un divorce signifie le partage à 50/50 de la valeur de l’entreprise, ce qui passe, dans la plupart des cas, obligatoirement par la vente de l’entreprise.

En tant que chef d’entreprise, arti-san, commerçant, pensez-vous que votre résidence principale est proté-gée en cas de difficultés financières professionnelles ?

Plus d’un français sur deux pense que sa résidence principale est protégée. C’est VRAI.

Avant le 7 août 2015, si aucune dispo-sition spécifique n’avait été prise au niveau du régime matrimonial du couple et des statuts de la société, la résidence principale pouvait être saisie. Aujourd’hui, elle bénéficie d’une protection automatique.

Sondage* Harris Interactive

OUI52 %

NON48 %

Décès 54 % 43 %

52 % 48 %

16 % 82 %

Incapacité/invalidité

Divorce

OUI NON Ne se prononce pas

*Sondage Harris Interactive, réalisé pour Conseils des notaires Hors Série du 15 avril au 16 avril 2014 auprès d’un échantillon national représentatif de 1 000 personnes de 18 ans et plus.

>>>

L’engagement collectif de conservation de titres appelé aussi « Pacte Dutreil » permet de bénéficier d’une exonération de 75 % de la valeur des titres trans-

mis lors d’une donation ou d’un décès. En contrepartie, celui qui reçoit les titres doit s’engager à les conserver pendant une durée totale de six ans.

Le Pacte Dutreil, pour transmettre à moindre coût

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30 Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455

TÉMO

IGNA

GEMAUD, 34 ans, vétérinaire

« Nous nous sommes mariés en 2006 et nous avons choisi le régime de la séparation de biens. J’étais à l’époque vétérinaire salarié mais j’envi-sageais de m’installer à mon compte par la suite. Ce régime me semblait le mieux adapté pour protéger à la fois ma famille et mon outil de travail. Je ne voulais pas qu’un problème professionnel mette en péril nos biens personnels. De la même façon, en cas de séparation, je souhaitais préserver mon activité. Et plutôt que d’attendre et de changer de régime le moment voulu, il nous a semblé plus opportun d’anticiper. Aujourd’hui, je suis toujours salariée et c’est finalement mon mari qui a pris des parts dans sa société. Pour le moment, ce régime correspond à notre organisation patrimoniale et à nos activités professionnelles. Mais comme les besoins et les objectifs varient au fil de la vie, il est tout à fait possible que nous y apportions des modifications par des clauses spécifiques ou des donations dans les années à venir. »

Propos recueillis par B. B.

« La séparation de biens pour préserver ma famille et mon outil de travail »

« Ma femme a créé sa société de publicité sous forme de SARL voici cinq ans et cela marche bien. Nous nous sommes mariés il y a dix ans sans faire de contrat de mariage. Est-il vrai que je suis, de fait, associé de sa société ? »Non. Cependant, si vous n’avez pas renoncé à la qualité d’associé lors de la constitution et que vous êtes mariés sans contrat de mariage, vous pouvez revendiquer cette qualité. Pour cela, il faut en faire la demande à votre épouse, gérante de société, et respecter les clauses d’agrément si les statuts ont réglementé cette situation. Dans tous les cas, vous avez droit à la moitié de la valeur de l’entreprise.

« À 67 ans, j’ai un garage, vingt-cinq camions, et trois entrepôts dans la zone artisanale. Tout cela est en société. Un de mes fils travaille avec moi. Je suis fatigué, je veux lui passer la main et lui donner ma société. Comment procéder à moindre coût ? »Deux solutions peuvent être envisagées. La première consiste à opter pour une donation-partage entre vos enfants. De cette façon, vous pourrez attribuer votre société à votre fils et d’autres biens pour

ses frères et sœurs, à condition que vous disposiez des fonds nécessaires pour procéder à une répartition équitable.La seconde consiste à laisser votre fils indemniser lui-même ses frères et sœurs en leur versant une « soulte ». Il finan-cera cette soulte au moyen d’un emprunt

bancaire et les parts que vous lui avez données serviront d’apport personnel.Dans tous les cas, il est souhaitable d’ins-crire cette transmission dans le cadre d’un Pacte Dutreil (voir encadré), fisca-lement très intéressant.

Barbara Bénichou

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AAvant d’entamer votre projet, effec-tuez quelques recherches auprès de la mairie pour étudier les règles applicables et déterminer si la parcelle que vous envi-sagez de vendre est constructible. Faut-il une distance minimale par rapport à la limite séparative, à la voirie, entre deux constructions ? Quelle est l’emprise au sol maximale ? Quelle hauteur pour les bâtiments ? etc. En pratique, consultez le plan local d’urbanisme (PLU), ou le plan d’occupation des sols (POS) s’il est toujours applicable à votre commune.Vous pouvez réaliser ces démarches en

direct ou vous faire aider de votre notaire ou d’un géomètre-expert. Attention, si votre terrain est situé dans un lotissement, consultez le cahier des charges et le règlement car l’accord des autres propriétaires peut s’avérer nécessaire.

❱❱ Un découpage optimisé

Au commencement du projet, il est préfé-rable de contacter un géomètre-expert.Ces professionnels fixent librement leurs tarifs. Ils sont calculés en fonction du

temps passé et de la complexité de la mission. L’établissement d’un devis est obligatoire et, le plus souvent, gratuit. N’hésitez pas à en interroger plusieurs. Sa première mission est d’entrer dans le détail de votre projet et de confirmer la faisabilité de l’opération. Il vérifiera que le décou-page que vous envisagez du terrain est conforme aux règles d’urbanisme et aux servitudes mais aussi s’il est opportun compte tenu de sa topographie. Il tiendra compte des voies d’accès, du raccorde-ment au tout à l’égout, etc.

38 Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455

Vendre une partie de terrain

IMMOBILIER

Votre maison se situe sur un grand terrain ? Pourquoi ne pas détacher une parcelle et la vendre en terrain à bâtir ? Attention l’opération n’est pas toujours réalisable, ni rentable.

© ivanastar

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39Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455 3939

Depuis la loi du 24 mars 2014, le coefficient d’occupation des sols (COS) a été supprimé et les surfaces minimales de terrain constructible interdites (sauf

pour les communes encore sous POS). Diviser son terrain est devenu plus facile dans toutes les communes ayant un PLU en vigueur. Auparavant, si vous disposiez d’un terrain de 1 000 m2 avec un COS de 0,2 vous pouviez construire une habitation de 200 m2 au maximum (1 000 x 0,2). Mais pour obtenir votre permis, certaines communes imposaient une surface mini-male. Si bien que si ce seuil avait été fixé à 1 500 m2, votre terrain de 1 000 m2 ne vous permettait pas de construire. Pour les autorisations d’urbanisme déposées depuis le 27 mars 2014, l’opération de division est facilitée. Vous pouvez envisager de diviser votre terrain de 1 000 m2 et obtenir deux terrains constructibles. Bien entendu, les autres règles du PLU restent applicables : emprises au sol, prospects, hauteur, etc.

La division de terrain facilitée depuis 2014

Le bornage du terrain Le projet se poursuit obligatoirement par le bornage du terrain, également réalisé par un géomètre-expert. Cette délimi-tation s’effectue à l’amiable et de façon contradictoire, c’est-à-dire en présence de tous les propriétaires voisins de la parcelle. En principe, le coût de l’opé-ration est réparti entre les propriétaires. En pratique, seul le propriétaire intéressé par le bornage supporte le coût. Atten-tion, si un voisin s’oppose au bornage, il vous faudra obtenir un bornage judiciaire devant le tribunal d’instance.

L’autorisation de diviserEn détachant une parcelle de votre terrain pour la vendre en terrain à bâtir, vous êtes juridiquement soumis aux règles du lotissement. En conséquence, vous avez obligation de déposer une déclaration préalable de division foncière en mairie. Si vous prévoyez la création d’aménage-ments communs (une voie de circulation, un réseau d’assainissement, un espace vert, etc.), un permis d’aménager s’im-pose. Le délai d’instruction est d’un mois pour une déclaration préalable, trois mois pour un permis d’aménager. La décision tacite ou expresse de non-opposition à déclaration préalable ou le permis d’aménager équivaut à l’autori-sation de diviser. Reste à afficher sur le terrain l’autorisation pendant deux mois, délai pendant lequel les tiers peuvent agir. L’autorisation de la mairie ne vous protège pas d’une action de voisins, s’ils ont un intérêt à agir.

POIN

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UEFranck BOURDON, géomètre-expert

« Nous entrons dans le détail du projet et tout a son importance : un terrain en pente, un talus en bordure de voie, une ligne à haute tension qui passe au-dessus, un réseau de transport de gaz à proximité, un plan de prévention des risques et les contraintes qui en découlent, etc. La check-list est très fournie et rien ne doit être oublié. La façon de diviser le terrain a aussi son importance puisqu’elle va déterminer les futurs emplacements des constructions. Il faut donc être attentif aux canalisations qui traversent le terrain, aux futures vues sur la propriété, ou encore, aux câbles électriques qui pourraient surplomber le futur terrain, point d’achoppement fréquent entre vendeur et acquéreur ».

Propos recueillis par R. M.

« La division du terrain détermine les futurs emplacements des constructions »

❱❱ Risques fiscaux et juridiques

Généralement, votre projet est motivé par la recherche d’un capital supplémentaire. Il est prudent, pour étudier l’opportunité de l’opération, de ne pas s’arrêter au prix de vente du nouveau terrain.

Impôt sur la plus-valueAyez conscience que votre logement actuel va perdre une partie de sa valeur puisque le terrain va être réduit et que vous aurez des nouveaux voisins à proxi-mité. Cette moins-value est-elle compen-sée par le prix de vente de la parcelle ?

Par ailleurs, la parcelle détachée sera soumise à l’impôt sur la plus-value immobilière, vous ne pouvez pas invo-quer l’exonération au titre de la résidence principale. Demandez à votre notaire de la calculer en fonction de la valeur estimée du terrain.

Une vente en suspensAvant la signature du compromis ou de la promesse de vente, votre notaire accordera une attention particulière à la rédaction de ce document. Il doit, par exemple, faire mention du descriptif du terrain résultant du bornage, sous peine de possibilité d’annulation par l’acqué-reur. Pensez à lui demander conseil sur l’intérêt d’insérer des servitudes conven-tionnelles. Pourquoi ne pas prévoir quelques garde-fous pour vous prému-nir de la future construction (hauteur maximale, accès des véhicules, etc.) ? Il ne s’agit évidemment pas de tout inter-dire mais simplement de préserver votre environnement.Attention, la vente ne se réalisera en définitive qu’à la condition suspensive que l’acquéreur obtienne le permis de construire. Car, même si vous avez obtenu l’accord pour détacher un terrain, l’auto-risation de construire n’est pas garantie pour l’acquéreur.

Rosine Maiolo

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FAMILLE

AAvant ses 18 ans, un enfant est repré-senté par ses parents qui prennent toutes les décisions relatives à son patrimoine. Depuis le 1er janvier 2016, la gestion des biens d’un enfant mineur par ses parents a été réformée. La loi se fonde désormais sur une présomption de bonne gestion des biens par les parents, le juge n’inter-venant que pour les situations à risque.De plus, ce texte gomme une discrimina-tion qui existait entre les familles où l’en-

fant avait ses deux parents qui décidaient pour lui et celles où il n’en avait qu’un seul. Auparavant, ces familles monoparen-tales se retrouvaient systématiquement sous le contrôle du juge. Désormais, il n’existe plus de différence entre l’admi-nistration des biens d’un enfant dont les deux parents détiennent conjointement l’autorité parentale et celle d’un parent l’exerçant seul. La confiance aux familles est redevenue la règle.

❱❱ Les pouvoirs des parents

Les parents peuvent prendre toutes les décisions relatives aux biens de l’enfant qualifiées « d’actes d’administration ». Ce sont les actes de gestion classique : paiement des dépenses courantes telles que la cotisation d’assurance d’un bien immobilier, les réparations d’entretien, l’encaissement des loyers, le placement de l’argent de l’enfant, etc. À noter que

Gérer les biens de son enfant mineurDepuis le 1er janvier 2016, l’administration légale des biens des mineurs est réformée, laissant davantage de place à la famille. Explications.

40 Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455

Les parents ont une grande liberté pour gérer le patrimoine de leur enfant, sous réserve d’agir dans le seul intérêt du mineur.

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lorsque le mineur a ses deux parents, chacun d’eux peut agir seul puisqu’il est réputé avoir reçu de l’autre le pouvoir de faire seul ces actes.Pour les actes plus graves, c’est-à-dire ceux qui sont les plus engageants pour le patrimoine de l’enfant et qualifiés « d’actes de disposition », les parents ont également le pouvoir d’en accom-plir un certain nombre, par exemple la conclusion ou le renouvellement d’un bail. Mais parfois l’autorisation du juge est nécessaire (voir ci-dessous). Atten-tion en cas de désaccord des parents sur un acte à accomplir, il appartient au juge de trancher.

Obligations et responsabilitéSi les parents ont une grande liberté pour gérer le patrimoine de leur enfant, ils ont bien sûr l’obligation d’apporter dans leur gestion « des soins prudents, diligents et avisés, dans le seul intérêt du mineur » (art. 385 du Code civil). Ils n’ont pas à établir et à remettre au tribunal un compte de gestion annuel, ni même à effectuer l’inventaire du patrimoine. Toutefois, ils peuvent être tenus de le faire si le juge l’estime nécessaire. Si les parents occasionnent des dommages en raison d’une faute dans la gestion des biens de l’enfant, ils peuvent en être tenus responsable. L’action peut être menée par l’enfant dans les cinq ans qui suivent sa majorité.

Droits de profiter des revenus générésLa loi accorde un autre droit aux parents, celui de jouir des biens jusqu’aux seize ans de l’enfant. Ce droit de jouissance légale permet d’utiliser librement les biens du mineur, par exemple habiter gratuitement dans un appartement ou une maison lui appartenant, percevoir et dépenser les revenus de ses biens (loyers, intérêts de l’épargne, dividendes, etc.), le tout sans avoir à en rendre compte. Bien sûr, l’enfant lui-même profite indirectement de cette jouissance, le surplus, s’il y a, n’étant finalement qu’une compensation

des charges supportées par les parents dans la gestion du patrimoine. À noter que les biens donnés ou légués peuvent être exclus de cette jouissance légale si telle a été la volonté du donateur ou du légataire (voir encadré).

❱❱ Les actes nécessitant le recours au juge

Huit catégories d’actes requièrent impérativement l’autorisation du juge aux affaires familiales pour être réali-sés (art. 387-1 du Code civil). Il s’agit de : la vente d’un bien immobilier ou d’un fonds de commerce appartenant à l’enfant ou son apport en société ; la souscription d’un emprunt au nom de l’enfant ; la renonciation pour le mineur à

un droit (par exemple à une succession), la transaction ou le compromis en son nom ; l’acceptation pure et simple d’une succession lui revenant ; la constitution d’une sûreté, telle qu’une hypothèque, pour garantir la dette d’un tiers ; l’achat par les parents ou la location par eux d’un bien de l’enfant (dans ce cas, les parents sont réputés être en opposition d’intérêts avec le mineur) ; la réalisation d’un acte portant sur des valeurs mobilières (ou instruments financiers) mais seulement dans les actes les plus graves pour le patrimoine du mineur.Dans toutes ces hypothèses, les parents doivent, avant d’agir, s’en référer à la déci-sion du juge. C’est d’ailleurs le magistrat qui, à travers son autorisation, détermine les conditions dans lesquelles l’acte doit être passé et s’il y a lieu, le prix ou la mise à prix pour lequel l’acte est passé.

❱❱ Les actes interdits

Même avec l ’autorisation du juge, les parents ont interdiction de réali-ser certains actes graves, notamment donner gratuitement les biens du mineur ou encore exercer le commerce ou une profession libérale au nom de l’enfant.

Rosine Maiolo

41Conseils des notaires - Mars 2016 - N° 455 4141

Si les biens du mineur sont en principe gérés par ses parents, il est possible pour un donateur ou un défunt de donner ou de léguer des biens à la condition qu’ils

échappent justement à l’administration des parents. C’est le cas, par exemple, de grands-parents qui feraient donation d’une somme d’argent à leur petit-enfant afin que soit ouvert à son nom un contrat d’assurance-vie mais qui ne souhaiteraient pas que la gestion soit confiée aux parents. Ils peuvent ainsi assortir leur geste d’une condition : attribuer la gestion à un autre membre de la famille (eux-mêmes par exemple), à une tierce personne ou encore à l’un des deux parents seulement. De même, ils peuvent priver les parents du droit de jouissance afin de s’assurer que leur petit-enfant profite de la valorisation du capital transmis. Une autre hypothèse peut être citée. Celle où un père, divorcé, décède en ayant institué ses enfants légataires universels. Par testament, il peut prévoir que leur mère sera privée de ses droits d’administration légale et de jouissance sur les biens revenant aux enfants, droits qu’il peut confier à sa propre sœur, la tante des enfants par exemple.

* Ordonnance n° 2015-1288 du 15 octobre 2015

Biens donnés ou légués, quand les parents sont écartés

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