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PSIR – SEP (2016)
Projet Scientifique d’Initiation à la Recherche (PSIR)
Etude critique sur les procédés de recyclage des batteries rechargeables Lithium-ion et faisabilité
J. Dubu, Y. Lesueur, Y. Petroff, V. Poinsot, E. Sallé, M. Crochet*
Groupe esaip – 18 rue du 8 mai 1945, CS 80022 49180 St Barthélémy d’Anjou Cedex
ARTICLE INFO ABSTRACT (200 words) Article history: Received 18 February 2016
Currently the Lithium-ion batteries know a huge development and are widely spread, mainly in the communications and vehicles systems. Today’s challenges are to reduce the extraction of natural resources and reuse those contained in spent batteries in the aim of reducing greenhouse gases and dependency between countries.
The analysis of three processes was run to determine the main techniques involved in those processes. Some just allow industries to recover cathodes whereas others permit to recycle half of the component initially contained in the batteries.
After the technical description, an acceptability and feasibility study was run to determine if those processes could be introduced in an eco-circular model and in what extent environment, society and economy are big issues of the development and feasibility of those technics.
Following the results obtained for each method, we consider to research most efficient and cost effective materials or technologies which could replace the Li-ion technology in order to support the environment and sustainable development. But because of the fast improvement of technologies, it’s complicated to predict if Li-ion batteries have long term uses.
Keywords: Li-ion Batteries Battery recycling Secondary raw material Sustainable
1. INTRODUCTION
Depuis 1990, les équipements électroniques se sont multipliés, sont devenus de plus en plus petits et sont devenus portables (téléphones, ordinateurs, caméras, consoles de jeux, appareils photo, etc.). Il a donc fallu trouver des batteries qui répondent aux attentes des fabricants et des consommateurs. En une dizaine d’années les batteries lithium ont été choisies et ont connu un fort développement grâce à leur potentiel énergétique, leur procédé de fabrication et leur coût.
La consommation mondiale de batteries au lithium étant devenue significative depuis maintenant une dizaine d’années, les problématiques des déchets issus de leur fabrication et de leur utilisation se posent. D’autant plus que la société, à la fois ceux qui la dirigent et ceux qui la composent, met la pression sur les producteurs de déchets pour que ces derniers aient une responsabilité accrue du devenir de leurs déchets et de leurs produits. Ce marché nécessite des procédés et des filières pour traiter ce type de déchet.
*Contact : [email protected]
Région Nombre de batteries
consommées annuellement
Europe 5 milliards (1)
USA 3 milliards (1)
Brésil 1 milliards (2)
Tableau 1 Exemple de consommation de batteries dans certains pays.
Le modèle économique linéaire actuel (concevoir, consommer, jeter) n’est plus acceptable pour l’Homme et son environnement. L’objectif et la tendance sont que le modèle économique tend à devenir circulaire en incluant des méthodes de collecte et de recyclage. Le recyclage incluant notamment la réutilisation des déchets en matières premières secondaires (MPS). Ces méthodes doivent s’inscrire dans une démarche de développement durable (vivable, viable et équitable du point de vue économique, écologique et social).
De plus, les conjonctures économiques, politiques, environnementales et sociétales actuelles (raréfaction du lithium, répartition inégale des gisements, monopole des marchés, pollutions, scandales) amènent les industriels à rechercher des solutions alternatives ou durables à l’utilisation du lithium.
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Nous proposerons dans cette étude de faire un état de l’art, à l’échelle mondiale, des techniques de recyclage des batteries lithium-ion en répondant à la problématique suivante :
« La technologie actuelle permet-elle d'utiliser de manière durable les batteries Lithium-Ion et leurs composants, en prenant en compte les besoins sociétaux et du marché ? »
Notre article s’articulera de la façon suivante :
Dans un premier temps nous présenterons succinctement les batteries lithium-ion, leur fonctionnement et leurs utilisations. Puis nous évoquerons les caractéristiques liées aux marchés du lithium et du graphite. Nous continuerons notre développement avec des méthodes de recyclage des éléments constitutifs des batteries Li-ion développées entre les années 2000 et 2012. Enfin nous discuterons les données obtenues afin de répondre à notre problématique et ainsi pouvoir ouvrir sur de nouveaux questionnements.
2. PRESENTATION DES BATTERIES
2.1. Les batteries lithium-ion actuelles : composants utilisés et fonctionnement
Les batteries lithium-ion sont basées sur l’échange
d’ions lithium Li+ entre l’électrode positive qui est
généralement un oxyde de métal de transition lithié
(dioxyde de cobalt ou manganèse) et l’électrode
négative en graphite ou silicium amorphe. Cet échange
est possible grâce à un électrolyte (sel LiPF6 dissous dans
un mélange de carbonate d’éthylène/propylène ou
tétrahydrofurane).
Les avantages d’une telle batterie sont la haute densité
d’énergie pour une faible masse, une faible
autodécharge et une sécurité accrue (par rapport au
lithium-métal.
A l’inverse, de nombreux inconvénients ont été
décelés. Pour éviter tout phénomène de corrosion des
électrodes et l’autodécharge, les éléments sont passivés
ce qui implique une augmentation de la résistance
interne. Cette même résistance augmente avec la
température et la durée de stockage. Les courants de
charges et de décharges admissibles sont faibles, à cela
s’ajoute de possibles courts-circuits par croissance
dendritique du lithium entre deux électrodes. Enfin en
cas de fuite, ces composants présentent des risques. Au
contact de l’air ou de l’eau, le lithium se transforme en
hydroxyde de lithium provoquant des inflammations ou
explosions. (3)
2.2. Etat de l’art des différentes applications des batteries Lithium-ion
La tendance du marché de la technologie lithium-ion
est en hausse. Elle remplace progressivement les
technologies précédentes (nickel-métal et nickel-
cadmium par exemple), principalement dans le domaine
de l’électronique.
On trouve ainsi des batteries lithium-ion dans des
domaines aussi divers que le médical, l’électronique,
l’automobile, l’aérospatial, militaire et le stockage
d’énergie.
Beaucoup de petits appareils utilisent une seule cellule
lithium-ion, dans l’électronique (casque Bluetooth,
baladeurs MP3, smartphones) et dans le biomédical
(capteurs pour la mesure du pouls cardiaque par
exemple). Cela a eu pour conséquence notamment un
développement important des smartphones de plus en
plus fins mais performants, dû à la capacité de stockage
d’énergie plus importante avec la technologie Li-ion. On
trouve également des batteries Li-ion dans des supports
plus volumineux qui emploient plusieurs cellules
(exemple six à douze cellules 18650 pour un notebook).
La taille des appareils commercialisés est cependant
limitée par les réglementations de transport
internationales dans le cadre du transport de matières
dangereuses (le lithium étant en effet source de danger
tel que l’inflammabilité).
La technologie Li-ion est ensuite employée dans le
domaine de l’automobile et assimilés, c’est-à-dire dans
les véhicules électriques (bus, voitures, scooters, vélos,
segway…). Les cellules Li-ion utilisées sont ici beaucoup
plus larges. Ainsi la Tesla Roadster emploie environ 6800
cellules 18650. Les véhicules hybrides tels que la Toyota
« Prius » ou la Ford « Escape » emploient pour l’instant
encore une technologie nickel-métal.
Dans le domaine aérospatial la technologie Li-ion
commence également à être utilisée. Ainsi le Boeing 787
Dreamliner emploie des batteries Li-ion pour les groupes
auxiliaires de puissance, les contrôles de vol
électroniques, les systèmes lumineux d’urgence par
exemple. On trouve également la technologie dans des
applications aéronautiques comme les satellites, les
sondes etc.
Enfin le dernier domaine d’application est le stockage
d’énergie, principalement pour les énergies
renouvelables dans le but de compenser les creux de
production. Ce domaine d’utilisation est encore récent
et en développement (4).
2.3. Les parties prenantes engagées
Les premières parties prenantes concernées sont les
entreprises productrices de batteries lithium. Les trois
principales sont Panasonic (20,5% de part de marché),
Samsung (19%) et LG (14,8%) (5). Du point de vue des
pays producteurs, la Chine est le principal (36,8%)
devant la Corée du Sud (33,8%) et le Japon (29,4%).
Ensuite viennent les utilisateurs des batteries lithium qui peuvent être des entreprises comme Tesla Motors. Les autres utilisateurs sont les consommateurs avec l’emploi des batteries lithium dans les smartphones ou les ordinateurs portables. Il incombe à ces utilisateurs de disposer des batteries de manière responsable afin de permettre la revalorisation et le recyclage de celles-ci.
Les Etats ont également un rôle dans le recyclage des batteries lithium car ce sont eux qui décident des voies de traitement des batteries usagées. Ainsi aux Etats-Unis l’ « U.S. Environmental Protection Agency » n’a pas défini de cadre particulier pour la récupération ou le traitement des batteries lithium ; il existe uniquement des recommandations. En France la législation donne un
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cadre plus précis avec l’obligation de détruire ou revaloriser les batteries sous certaines exigences.
Les autres acteurs également très importants du recyclage des batteries lithium sont les laboratoires et chercheurs qui développent en permanence des moyens de plus en plus efficients pour recycler les batteries et en réutiliser les composants. Depuis le début des années 2000 de très nombreuses recherches ont été menées à ce sujet et ont permis la création de plusieurs méthodes de récupération.
Enfin, les autres acteurs majeurs sont les entreprises qui collectent et recyclent les batteries lithium. L’étude datant de 2009 (6), présente notamment les entreprises qui recyclent les batteries et leurs méthodes : AEA Technology, Recupyl et Toxco Inc utilisent le processus « hydro-metallurgical » ; Batrec, Mitsubishi Heavy industries et Umicore utilisent le processus « Pyrometallurgical » et OnTo technologies remet à neuf les batteries lithium usagées.
3. LE MARCHE
Un marché est un lieu théorique où se rencontrent l’offre et la demande.
3.1. Besoins du marché.
Le lithium et le graphite sont les composants
principaux des batteries lithium-ion.
3.1.1. Lithium Le lithium (7) est un élément chimique que l’on
retrouve à l’état naturel sous forme de métal mou et
sécable. Il a la particularité d’être le plus léger des
métaux et deux fois plus léger que l’eau. Il est le 32ème
élément le plus abondant et se trouve dans l’écorce
terrestre principalement en Bolivie, Chili et Chine. Les
gisements sont :
- Les saumures des salars qui sont des grands lacs
salés partiellement asséchés (60% des ressources
mondiales et 70% de la production mondiale) que
l’on trouve au Chili, en Chine, en Bolivie et en
Argentine.
- Les minéraux lithinifères concentrés dans les
roches (26% des ressources mondiales et 30% de
la production mondiale) que l’on trouve en
Australie, aux Etats-Unis, au Zimbabwe et en RDC.
Il y a aussi des gisements qui sont à l’étude comme la
jadarite (minéral contenant du lithium), les saumures
géothermales, les saumures de champs pétroliers et les
océans.
Selon l’utilisation finale, le lithium est utilisé sous
forme de minéraux, de carbonate (Li2CO3), d’oxyde (Li2O)
ou de lithium métallique (Li). Le lithium est utilisé dans
différents domaines :
- Verres et céramiques (30% des usages en 2011)
comme additif ;
- Piles et batteries rechargeables (22% des usages
en 2011) ;
- Graisses lubrifiantes (11% des usages en 2011)
comme épaississant.
- Traitement de l’air (4% en 2001) ;
- Coulée continue de l’acier (4% en 2011) ;
La demande en lithium va continuer à augmenter de
par la croissance constante de l’économie mondiale mais
surtout par le développement des nouvelles
technologies puisque les batteries au lithium permettent
de stocker beaucoup d’énergie pour un poids et une
taille très réduits.
La production étant concentrée à certains pays
(Bolivie, Chili, Chine, USA, Argentine), des tensions
peuvent rapidement naître si l’un des principaux pays
producteurs rencontre des problèmes diplomatiques,
sociaux ou politiques.
3.1.2. Graphite Le graphite (8) est l’un des trois allotropes naturels
communs du carbone. Le carbone constitue 0,02% de la
lithosphère sous forme de carbonates et de produits
carbonés.
Il se présente sous forme naturelle de carbone
amorphe (ex : noir de fumée), de diamant ou de
graphite. On peut aussi le synthétiser par graphitisation
à haute température de coke de pétrole. Les gisements
sont :
- Charbons et des schistes bitumeux que l’on
trouve au Mexique, Corée et Autriche.
- Graphite en paillettes dans des roches hôtes que
l’on trouve en Chine, au Canada, au Brésil et à
Madagascar.
L’extraction est principalement localisée en Chine
avec 80% de la production mondiale de graphite naturel.
Le graphite est utilisé pour ses propriétés d’excellent
conducteur de chaleur et d’électricité. Il est utilisé dans
différents domaines :
- Réfractaires pour aciéries (26% des usages en
2009) ;
- Énergies dont batteries (20% des usages en
2009) ;
- Garnitures de freins et embrayages (14% des
usages en 2009).
Pour les mêmes raisons que le lithium la demande en
graphite pour la fabrication de batteries va fortement
croître durant la prochaine décennie.
Le monopole de la Chine crée des tensions sur
l’approvisionnement et crée une forte augmentation des
prix depuis 2010. D’une part ses gisements deviennent
plus difficilement exploitables et la qualité de son
graphite diminue et d’une autre part, la Chine contrôle
l’approvisionnement pour sa consommation interne
pour la production d’acier. Il n’y a actuellement aucun
pays capable de compenser la production de graphite
par la Chine mais certains développent leur production
comme l’Inde, le Brésil et l’Australie.
4. RECYCLAGE DES BATTERIES ET DE LEURS COMPOSANTS
4.1. Procédés actuels et rendements
Il existe différentes méthodes de recyclage des
composants de batteries Li-ion, celles-ci ne traitent pas
toutes les mêmes composants, et ne permettent pas de
récupérer la même quantité de matières réutilisables.
Nous nous baserons sur les deux procédés suivants.
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4.1.1. Projet RecLionBat Le projet RecLionBat (9) est un programme de
recyclage des batteries lithium-ion mené par la Société
Nouvelle d’Affinage des Métaux (S.N.A.M) et l’aide du
financement européen LIFE.
La réutilisation des batteries Lithium-ion est très intéressant, car elles peuvent remplacer d'autres types de batteries grâce à leur poids faible et leurs performances supérieures. Cependant il y a deux inconvénients majeurs pendant le recyclage des LIB (Lithium-ion battery) usagées : l'élimination des déchets dangereux et la prévention des explosions relatives au lithium métallique.
La technique de recyclage étudiée ici vise à préparer du dioxyde de cobalt et de lithium ou oxyde mixte de cobalt et de lithium (LiCoO2) provenant de LIB usagées, dans celles qui utilisent cet élément pour la cathode. Le procédé de recyclage implique un traitement mécanique et hydro-métallurgique ainsi qu'un procédé de citrate amorphe.
Les métaux représentent environ 50% en masse des
constituants d'une batterie, et notamment le lithium
(6%) et le cobalt (11%) (9).
Le lithium (voir partie 3 de cet article) et le cobalt sont
deux matériaux stratégiques, il est donc important de les
recycler. La production de cobalt est principalement
d'origine minière (Zambie, RDC, Russie, Canada,
Nouvelle Calédonie, Cuba, Maroc) et ses usages divers :
- batteries rechargeables (en hausse car le cobalt
est utilisé dans diverses cathodes mixtes des
batteries Li-ion) : 38 % ;
- superalliages (industrie de la défense et de
l’aérospatiale) : 20 % ;
- carbures cémentés et outils diamantés (travaux
publiques) : 10 % ;
- catalyseurs (industries chimiques et
pétrochimiques) : 9 % ;
- céramiques et émaux (pigments) : 8 % ;
- aimants permanents (enregistrements
magnétiques) : 5 % ;
- agent séchant et pneumatiques : 3 % ;
- autres (engrais, stérilisation, joaillerie...) : 7% (10).
La batterie étudiée se compose d’un circuit intégré,
d’un étui plastique et de plusieurs cellules, elle peut être
représentée de la façon suivante :
Fig. 1. Décomposition schématique d’une batterie de téléphone portable [(11)].
La cathode est constituée de LiCoO2, de carbone et d'un liant en aluminium. La composition chimique de la batterie est :
Component weight.%
LiCoO2 27,5 Steel/Ni 24,5 Cu/Al 14,5 Carbon 16 Electrolyte 3,5 Polymer 14
Tableau 2 Composition chimique d’une batterie Li-ion [(11)].
Les étapes du recyclage (schéma visible en Annexe 1)
se déroulent de la façon suivante.
D’abord la batterie est traitée thermiquement dans
une chaudière à 100-150°C pendant 1h. Elle est ensuite
désassemblée et les segments recueillis sont classés en
fonction de leurs tailles de 1 à 50 millimètres.
Ensuite un deuxième traitement thermique est
effectué, permettant de libérer les matériaux des
électrodes à l'aide de tamis vibrants. On obtient le
matériau de la cathode, le LiCoO2, en brûlant le carbone
et le liant (aluminium) à la température de 500 à 900°C
pendant 30 minutes à 2heures.
Pour résumer cette partie, les différentes étapes ont
été effectuées, dans le but de concentrer le matériau de
l'électrode active en poudre :
- Premier traitement thermique à 100-500°C
pendant 30 minutes
- Broyage à haute vitesse à 5-20 millimètres
- Second traitement thermique à 300-500°C
pendant 1heure
- Tamis vibrants
- Calcination à 700-900°C pendant 1 heure.
Le LiCoO2 est ensuite inséré dans une solution d'acide
nitrique, puis filtré dans un réacteur, lui-même placé
dans un bain contenant de l'eau à température
constante.
Le but de cette étape est de dissoudre le cobalt et le
lithium des matériaux de la cathode active. On arrive
facilement à extraire les deux métaux à un taux
d'environ 85% grâce à un agent réducteur (peroxyde
d'hydrogène), à 75°C et pendant 30 minutes. En
optimisant les conditions d'extraction, c'est à dire en
ajoutant 1 mole d'HNO3, 1,7% du volume, à 75°C et
pendant 1h, on peut obtenir un taux d'extraction proche
de 99% pour chacun des deux métaux.
La quatrième étape est la préparation de la poudre de
LiCoO2. On prépare un mélange de solution de lixiviation
sous forme de nitrate et d'acide citrique pour obtenir un
gel précurseur amorphe, à l'aide d'un évaporateur rotatif
à 65°C pendant 2 heures. La solution de lixiviation
contient justement des ions Li et Co avec un ratio
molaire d'environ 1 pour 1. Ce gel est ensuite placé dans
un creuset en acier inoxydable et calciné en poudre dans
l'air pendant 2 heures à 500-1000°C. Cette poudre
obtenue, synthétisée à partir de la solution de lixiviation,
permet de préparer une nouvelle cathode, en ajoutant à
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la poudre du noir de carbone à 15% de la masse et 5% de
liant (aluminium).
Une fois testée (dans une cellule Téflon), on obtient
des résultats équivalents à 90% de la performance des
batteries produites en industrie, sur le premier cycle
(une charge et une décharge). En effet on observe 165
(charge) et 154 (décharge) mAh/g (milliampères par
gramme) en termes de capacité. Après 30 cycles, on
observe une baisse de capacité de moins de 10% par
rapport au premier cycle.
Fig. 2. Graphique de cycles de charge/décharge des batteries utilisant la poudre de LiCoO2 recyclée pour fabriquer la cathode (11).
4.1.2. Recyclage expérimental de batteries Cette méthode est un processus de recyclage de
batteries lithium-ion testée dans un laboratoire en 2001 (12). Cette méthode vise à récupérer les composants les plus importants des cellules de batteries afin de pouvoir réduire la consommation des matières premières rares.
Ce processus a été utilisé sur des cellules lithium-ion de batteries de taille standard 18650. Le logigramme de ce procédé est visible en Annexe 2.
La première étape consiste à trier les batteries pour récupérer celles adaptées au processus, il existe des machines permettant de le faire à l’échelle industrielle (13).
Après quoi on procède à l’ouverture et au broyage de l’enveloppe extérieure pour pouvoir atteindre les composants internes importants, à savoir le lithium et le cobalt. L’enveloppe composée essentiellement d’acier et de plastiques ne sera pas traitée lors de ce procédé.
Ensuite pour pouvoir séparer les différents composants on utilise un traitement à base de N-methylpyrrolidone. On plonge ainsi les composants dans un bain de cette solution puis on chauffe le tout à 100°C pendant une heure. Cela permet de récupérer le cuivre et l’aluminium sous leurs formes métalliques en filtrant la solution obtenue. Les deux métaux ainsi obtenus peuvent être directement revalorisés.
Ensuite pour séparer les différentes poudres restantes on décante la solution puis on rince à plusieurs reprises avec de l’eau le filtrat obtenu. Cela jusqu’à récupérer les différentes poudres de carbone et d’oxyde mixte de cobalt et de lithium. Le N-methylpyrrolidone récupéré peut être utilisé pour un nouveau processus.
Pour obtenir le cobalt, on traite les poudres obtenues avec une solution de 4 moles d’HCl, on chauffe le mélange à 80°C pendant une heure. Il faut un ratio de 10/1 entre l’acide et l’échantillon pour obtenir le meilleur taux de récupération de dioxyde de cobalt et de
lithium. Après filtration, la poudre de carbone peut être extraite. Le cobalt, le lithium se trouvent sous forme aqueuse.
On récupère ensuite le cobalt grâce à une précipitation sous forme d’hydroxyde de cobalt Co(OH)2 en ajoutant un volume équivalent de solution de quatre moles de NaOH. On filtre encore une fois la solution pour récupérer le précipité contenant le cobalt tout en le lavant avec une solution de NaOH pour obtenir le produit le plus pur possible. Le filtrat contient alors les ions Li
+. Il est possible de récupérer le lithium par
précipitation des ions lithium contenus dans la solution en ajoutant une solution de HCl pour obtenir du chlorure de lithium.
Afin de tester la qualité des produits récupérés grâce à ce processus on les utilise pour constituer une cathode comme on pourrait en trouver dans une batterie lithium-ion classique. Les résultats obtenus par ces tests sont les suivants.
Fig. 3. Cycles d'intercalation et de désintercallation d'une électrode recyclée [ (12)].
Les cycles d’intercallation et de désintercallation galvanostatiques ainsi obtenus montre la bonne capacité des matériaux récupérés pour produire de nouvelles batteries à partir des composants des batteries usagées.
Fig. 4. Diagramme de voltampérométrie d'une électrode recyclée [ (12)].
De même, le diagramme de voltampérométrie montre la bonne tenue de l’électrode soumises à des cycles répétés. Cette méthode est donc efficace pour récupérer les composants rares car leurs pertes sont minimes à partir du moment où les opérations de filtration sont effectuées avec soin. Ce processus pourrait donc être utilisé à un niveau industriel.
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4.2. Adaptation à un niveau industriel
Ces méthodes de recyclage ont été testées et réalisées en laboratoire. Cependant, la quantité de batteries produites et utilisées entraine un grand nombre de batteries à recycler chaque année (5 milliards/an sur le marché Européen). Afin d’être efficace, le recyclage doit être effectué à une échelle industrielle. Il est donc nécessaire d’envisager la mise en place du recyclage à une plus grande échelle.
Ce défi a été relevé pour le cas du recyclage des piles lithium il y a moins de 20 ans (Il est obligatoire de trier ses piles usagées depuis 1999 (14)). Le schéma général de recyclage est visible en Annexe 3.
4.2.1. Comment l’industrie s’est-elle appropriée les méthodes de recyclage des piles ?
Un exemple de méthode de recyclage des piles : Récupération des métaux par précipitations sélectives (15).
La méthode étudiée traite un échantillon de 15 types de piles issues de divers fournisseurs.
Dans un premier temps, les piles sont lavées puis broyées. Lors de la phase de broyage, une forte chaleur est dégagée du fait des nombreux courts-circuits internes aux piles. Il semble nécessaire de refroidir l’échantillon à cette étape dans le cas d’une utilisation industrielle.
Dans un second temps, l’échantillon est solubilisé dans une solution de HNO3 à 2 mol/L et à 80°C pendant 2h. Après filtration on obtient un résidu solide (composé de fer de nickel et de cobalt) et un filtrat liquide.
Un traitement thermique (chauffé à 500°C pendant 2 heures) permet d’éliminer les composés organiques et le carbone du résidu solide. Les métaux ainsi récupérés peuvent être directement utilisés pour des applications métallurgiques.
La dernière étape consiste à atteindre un pH de 10, toujours à l’aide de NaOH afin de faire précipiter le manganèse sous forme de Mn(OH)3 que l’on récupère par filtration.
Le rendement de ce type de traitement est très bon : 100% du lithium et 95% de manganèse sont récupérés. 4.2.2. Les méthodes appliquées par l’industrie en France 2 Méthodes : Pyrométallurgie : Traitement thermique
permettant d’isoler certains métaux, en jouant notamment sur les températures de fusion ou sur des réactions d’oxydoréduction.
Hydrométallurgie : Après un prétraitement physique (broyage et séparation magnétique), les métaux sont ensuite traités chimiquement. Ils sont mis en solution puis séparés par divers procédés chimiques : précipitation, électrolyse, extraction liquide-liquide.
Les rendements communiqués sur le site internet COREPILE (16) varient entre 50 et 80%. Notamment le manganèse n’est pas valorisé par leurs méthodes de recyclage.
4.2.3. Synthèse Il semble que dans le cas des piles, les industries du
recyclage se sont en partie inspirées des essais scientifiques, notamment sur la partie hydrométallurgie.
En revanche, les adaptations nécessaires pour la viabilité économique d’une application industrielle ont fait baisser les rendements.
Nous pouvons donc raisonnablement supposer le même type de baisse de rendement lors de l’application industrielle des méthodes de recyclage des batteries Li-ion étudiées.
4.3. Développement d’un procédé prometteur
Comme il a été vu précédemment, chaque industrie a
développé sa propre technique de recyclage (Toxco,
Inmetco, Xstrata, Umicore VAL’EAS) utilisant des
procédés d’hydrométallurgie, de pyrométallurgie, de
prétraitement et de séparation mécanique ou chimique.
Le but du développement de ce projet était de créer un
procédé le plus efficient possible afin de l’adapter au
niveau industriel.
Le projet (17) 01RW0404 « Recovery of raw materials
from Li-ion batteries », financé par le Ministère Fédéral
Allemand de l’Education et de la Recherche, a été
développé en coopération avec les partenaires
industriels ACCUREC Recycling Gmbh et UVR-FIA Gmbh.
Ce procédé utilise un prétraitement mécanique combiné
à des processus hydro et pyrométallurgiques dans le but
d’effectuer un recyclage efficace de tous les matériaux
de la batterie.
La caractéristique importante de ce procédé intervient
dans les dernières phases de traitement avec
notamment l’utilisation d’un fourneau à arc électrique
pour minimiser les pertes de cobalt.
Pour commencer, la phase de prétraitement permet
de désassembler les batteries et de mettre à nu la cellule
composant la batterie. Une fraction contenant du
plastique et des composés électroniques contenant du
cuivre sont extraits, ces composés sont valorisables en
MPS.
Ensuite, vient une étape de pyrolyse de la cellule dans
un four à résistance chauffé au maximum à 250°C. Cette
phase permet de désactiver les cellules en toute sécurité
et de faire évaporer les électrolytes qui sont des
composés organiques volatiles (COV). Ces derniers sont
placés dans un évaporateur sous vide afin de pouvoir les
traiter ou les réutiliser pour d’autres fonctions. Il est
possible de récupérer le carbonate d’éthyl-méthyl (71%
de masse) et le carbonate d’éthylène (10% de masse)
pour les réutiliser dans des électrolytes. Les autres
fractions contiennent des coproduits obtenus lors de la
décomposition et par conséquent sont inutilisables.
Dans la troisième phase, les cellules sont écrasées dans
un broyeur puis un désintégrateur. Les éléments
obtenus sont classifiés grâce à des mécanismes de
plateaux vibrants, un séparateur magnétique dans un
tambour et un séparateur à air dans classifficateur
zigzag. Les fractions d’aluminium, de fer et de nickel
7 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)
(matériaux de l’électrode) peuvent alors être extraites.
La fraction de fer-nickel est refondue dans un four de
fusion à induction sous vide pour obtenir deux fractions
pures. D’autre part, la fraction de feuilles d’électrode
contenant une composition non homogène en
aluminium et cuivre, une dissolution dans de l’eau régale
(mélange d’acide chlorhydrique et d’acide nitrique
concentrés (2 à 4 volumes d’HCl pour 1 d’HNO3).
Ensuite, la fraction la plus intéressante à valoriser
(contenant les oxydes decobalt et de lithium et le
graphite) est agglomérée en pastilles en utilisant des
agents liants. Ces pastilles (30 % de Co en masse, 3% de
lithium en masse, 30% de graphite en masse) sont
introduites dans un four à céramique à 800°C pour
réduire de moitié la teneur en graphite (carbo-
réduction). Ces pastilles sont ensuite introduites dans le
fourneau à arc électrique pour obtenir des alliages à
base de cobalt.
Enfin les roches et les poussières obtenues lors du
traitement utilisant le fourneau à arc électrique sont
traitées par un procédé hydrométallurgique. Les solides
sont lixiviés à l’acide sulfurique pour augmenter le
rendement de récupération de lithium. En fin de
procédé, du carbonate de lithium à 99,0% de masse peut
être généré.
5. DISCUSSION
Dans cette partie, nous évoquerons l’acceptabilité des
procédés de recyclage déjà existants et nous
développerons les résultats tirés de l’étude d’un
nouveau procédé de revalorisations des déchets de
batteries qui est en cours de lancement. Puis nous
verrons deux technologies alternatives prometteuses qui
pourraient être utilisées pour remplacer les batteries
lithium-ion dans les années à venir.
5.1. Procédés de recyclage
5.1.1. Economie Circulaire et acceptabilité des procédés D’après l’Article 1 de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975
relative à l’élimination des déchets et à la récupération
des matériaux :
« Est considéré comme déchet : tout résidu issu d’un
processus de production, de transformation ou
d’utilisation, toute substance, matériau, produit, ou plus
généralement tout bien meuble abandonné ou que son
détenteur destine à l’abandon ».
Actuellement, l’économie est basée sur un modèle
linéaire utilisant un stock de matière première infini et
suivant le schéma « extraction de ressources naturelles,
fabrication du produit, élimination du déchet ». Le but
premier est de créer un modèle circulaire où le déchet
deviendrait une ressource et par la suite réussir à
découpler la croissance économique de la
consommation en matières premières d’origine naturelle
(concevoir plus et mieux avec moins de ressources).
L’économie circulaire est basée sur 3 axes majeurs :
- L’offre et les acteurs économiques,
- La demande et le comportement des citoyens
- La gestion des déchets
Un procédé acceptable au sens de l’économie
circulaire prend en compte les 3 axes précédents. Il doit
de plus permettre une réduction de la production de
déchets à la source (extraction, fabrication, transport,
distribution) en réutilisant les déchets sous forme de
matières premières secondaires. Cette vision vient de la
fondation Ellen MacArthur à travers le principe du Cradle
to Cradle : il consiste en un système de deux cycles
fermés ; un cycle technique et un cycle biologique. La
matière est empruntée au cycle biologique pour être
utilisée dans le cycle technique et rendue au cycle
biologique une fois le produit en fin de vie (18).
Pour ce faire, le service ou produit en question doit
être éco-conçu ; c’est-à-dire pensé pour favoriser la
réutilisation de tout ou une partie de celui-ci dans la
conception d’un nouveau produit. Cette réutilisation
permet de limiter l’extraction des ressources, la
consommation d’énergie et les émissions de GES (Gaz à
Effet de Serre).
Au point de vue environnemental et sanitaire, les
processus de collecte, recyclage, traitement et
valorisation de la matière doivent être écologiquement
viable et socialement vivable. Ils ne peuvent avoir un
impact important (émissions de particules nocives,
pollutions des sols, air, eau).
Ensuite, le procédé de recyclage doit être viable et
équitable. Il doit posséder un coût inférieur ou égal à
l’achat de la matière première non recyclée.
5.1.2. Projet RecLionBat La mise en place d’une unité RecLionBat apporte de
multiples caractéristiques et bénéfices s’inscrivant dans
le développement durable (9).
Premièrement, du point de vue environnemental, elle
permet l’économie de ressources naturelles d’origines
minières (cobalt, nickel, fer, aluminium, cuivre, etc.). En
effet, le procédé de revalorisation permet de réutiliser
85% du cobalt et 85% du lithium initialement présents
de la cathode en reformant une poudre de LiCoO2 qui
servira par la suite à recréer une électrode ayant une
capacité de plus de 90% comparée à celles produites
industriellement. En améliorant les conditions initiales, il
est possible d’augmenter le rendement du recyclage du
lithium et du cobalt jusqu’à 99% mais l’amélioration de
ces conditions a un coût non négligeable. En d’autres
termes, le procédé permet de réduire les volumes de
déchets ultimes mis en centres d’enfouissement
technique (CET) et de réutiliser des matériaux fossiles
(améliorations envisageables pour cette partie). Ce
projet est aussi un moyen d’accompagner la politique
européenne (mise en application de la directive 20060 :
66/CVE).
Une unité RecLionBat soustrait la mise en décharge de
1000 tonnes d’accumulateurs et 550 à 600 tonnes de
métaux sont réutilisés en tant que MPS, permettant ainsi
de préserver les ressources naturelles tout en réduisant
les émissions de GES.
J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 8
A l’échelle industrielle, la SNAM envisage que les
ventes de matériaux recyclés pourront couvrir les frais
de traitement et que les collectivités n’auront pas un
budget à allouer pour le traitement de ses
accumulateurs Li-ion ce qui rend le projet
économiquement viable.
Puis au point de vue social, une installation de ce type
peut générer la création de 7 à 10 emplois permanents.
5.1.3. Projet de recyclage étudié à l’échelle d’un laboratoire
Ce projet mené à l’échelle d’un laboratoire, présente
des caractéristiques intéressantes vis à vis des processus
de recyclage des matières.
Tout comme le projet RecLionBat, il a pour but la
revalorisation de la matière en extrayant le cobalt, le
lithium, l’aluminium, le cuivre et la poudre de carbone
constituant la batterie. L’étude ne permet pas d’obtenir
les rendements réalisés. Du point de vue
environnemental, ce projet vise à réduire la quantité de
déchets ultimes, une diminution de l’extraction des
ressources naturelles et donc de réduire les émissions de
GES. Economiquement parlant, la viabilité du procédé
dépend des cours du lithium (prix au kg extrêmement
fluctuant), de l’aluminium (1,35€/kg), du cuivre (4,22 à
5,01€/kg) et surtout du cobalt qui sont restés élevés ces
dernières années malgré une baisse des prix durant
l’année 2015 autour de 26€/kg pour le cobalt. Les prix
indiqués (excepté pour le cobalt) sont ceux constatés
chez les grands industriels de la transformation des
métaux tels que KME le 15/02/2016. Il est donc
important de garder à l’esprit que la chute du cours des
métaux constitutifs des batteries est l’enjeu majeur pour
que ce domaine perdure dans le temps et que le
traitement soit économiquement viable.
En théorie, le traitement d’une grande quantité de
batteries devrait alors pouvoir générer des revenus
couvrant les frais de traitement des collectivités.
Comme le procédé précédent il permet de générer des
emplois au sein des collectivités.
5.1.3. Projet « Recovery of raw materials from Li-ion batteries »
Ce procédé comme les précédents fait intervenir les
mêmes caractéristiques environnementales,
économiques et sociales.
Contrairement aux deux autres procédés, celui-ci traite
tous les composants de la batterie. L’enveloppe et les
parties électroniques sont envoyées dans une autre
entreprise permettant de les recycler. Les fractions de
fer et nickel, d’aluminium, les alliages de cobalt et les
carbonate de lithium sont extraits puis recyclés par
ACCUREC Recycling (partenaire du projet).
Fig. 5. Pourcentage des fractions recyclées ou non dans les batteries démantelées [(17)].
Ce procédé est le plus abouti en termes de
recyclabilité des matériaux. Comme le montre le schéma
ci-dessus, 49,08% de la masse d’une batterie peut être
recyclée et utilisée directement selon les méthodes de
calculs inscrits dans la Directive Européenne sur les
batteries.
Le condensat électrolytique est considéré comme non
réutilisable car la récupération d’un électrolyte
parfaitement pur n’a pas encore été achevée. Dans les
années à venir il sera possible d’éliminer les produits de
décompositions contenus dans l’électrolyte et donc de le
réutiliser pour de nouvelles batteries.
Les 34,51% contiennent l’enveloppe de la batterie, et
tous les composés perdus par renversement lors des
chocs de l’arc électrique.
A titre de comparaison, la société Umicore’s VAL’EAS a
quant à elle développé un procédé comparable en
indiquant que celui-ci permettait de recycler environ
70% de la masse d’une batterie. Or les méthodes de
calculs utilisées ne sont pas conformes à la Directive
Européenne sur les batteries et incluent la masse de
plastique (20%) et de graphite (15%) recyclés ce qui nous
ramène à un recyclage de 35% de la masse de la
batterie.
Pour conclure sur ce procédé, il s’inscrit aussi dans
l’économie circulaire car il permet une réutilisation des
matériaux pour fabriquer de nouvelles batteries ou
d’autres produits. Il a un enjeu environnemental
important car il permet l’une des meilleures valorisations
des matériaux jusqu’à aujourd’hui. Il est encore possible
de l’améliorer en permettant le recyclage de
l’électrolyte.
Comme dans toute problématique, l’enjeu
économique surpasse une nouvelle fois les enjeux
environnementaux et sociaux.
Une évaluation économique a montré que ce procédé
dépendait essentiellement du cours du cobalt et qu’il
était économiquement viable à la seule condition que le
cobalt soit revendu à un minimum de 20€/kg pour 1000
tonnes de batteries traitées.
9 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)
De plus, ce procédé doit faire face à la conjoncture
actuelle du marché. Les industriels tendent à remplacer
leurs électrodes à base de LiCoO2 par des électrodes
utilisant des composés bon marché (LiFePO4, LiMn2O4,
LiSix). La substitution du cobalt va modifier la rentabilité
des procédés de recyclage.
Outre les enjeux résidant dans la réutilisation des
matières constituant les batteries Li-ion, nous pouvons
nous demander s’il ne serait pas envisageable
d’effectuer un changement radical de technologie, basé
sur des matériaux abondants et des enjeux
environnementaux et sociétaux moins contraignants.
5.2. Nouvelles technologies alternatives
5.2.1. Batteries en graphène obtenues par impression 3D Le graphène est un nano-matériaux. Il se présente sous
la forme d’une monocouche d’atomes de carbone
organisés en maille ondulée hexagonale.
Fig. 6. Structure du graphène d’après Jannik Meyer [ (19)].
Le graphène est un constituant du graphite. On peut
donc extraire les couches de graphène de ce dernier. On
peut aussi synthétiser du graphène par le biais de
plusieurs méthodes et substrats. La synthèse est
toutefois très couteuse.
Il dispose de caractéristiques uniques. Sa structure est
très stable, 200 fois plus résistant que l’acier, il conduit la
chaleur 10 fois plus vite que le cuivre et transporte une
densité de courant électrique 1000 fois supérieure au fil
de cuivre. Une autre propriété du graphène est que sa
température n’augmente pas lorsqu’il est traversé par
un courant, il a une résistance électrique très faible.
Ce matériau permet donc de concevoir des
conducteurs petits, résistants et efficaces. Mais son prix
de revient est encore trop élevé pour espérer l’utiliser en
substitution des matières premières actuelles. Il faut
donc trouver un moyen de production industriel pour
espérer atteindre un coût de revient acceptable pour les
industriels.
Actuellement il existe plusieurs voies d’utilisation du
graphène qui sont explorées. Parmi elles, l’impression
3D. Une entreprise américaine, Graphene 3D (20), a
réussi à ajouter une matière thermoplastique (polymère)
au graphène sans altérer ses capacités. Ainsi on peut
mouler un fil utilisable par les imprimantes 3D.
L’entreprise a utilisé cet alliage pour imprimer des
batteries. Pour le moment, il faut imprimer les éléments
des batteries séparément mais l’objectif est d’imprimer
les batteries d’un seul bloc.
Il y a de nombreux avantages à cette utilisation. Le
premier est qu’il y a peu de déchets issus de la
fabrication. Le deuxième est que la fabrication peut être
décentralisée au niveau des possesseurs d’imprimantes
3D (petits détaillants, particulier, etc.) grâce à une
distribution contrôlée des plans. Le troisième est que le
graphène est un élément abondant. Et enfin, le recyclage
de l’alliage polymère et graphène est possible.
5.2.2. Batteries Na-ion Le sodium (Na) est un métal appartenant à la famille
des alcalins. Il ne se trouve pas sous forme de corps pur
dans la nature mais sous forme de composés (par
exemple, dans le sel).
Le sodium est un excellent conducteur électrique et
calorifique, il est d’ailleurs utilisé comme fluide
caloporteur réfrigérant. Il est aussi utilisé pour la
fabrication des esters, la fabrication d’additif
automobile, purifier les métaux fondus, ou renforcer des
alliages métalliques.
Inspirés par la technologie des batteries lithium-ion les
chercheurs ont développé une batterie sodium-ion (21).
Ses capacités de stockage sont similaires mais sa durée
de vie est nettement supérieure avec plus de 2000 cycles
de charge et de décharge. Plus massives que les
batteries lithium-ion, leur utilisation serait plutôt
destinée aux véhicules électriques, au stockage
domestique et industriel de l’électricité.
Le principal avantage est que contrairement au
lithium, le sodium se trouve sur l’ensemble du globe, il
est facilement extractible et est abondant puisque qu’il
compose 2,8% de la croûte terrestre et on en retrouve
dans les océans. On peut donc avoir une extraction et
une conception au plus proche des consommateurs.
Cependant, le recyclage du sodium est délicat car si on
souhaite l’éliminer il est nécessaire d’utiliser une
réaction chimique présentant un risque d’explosion.
5.3. Existe-t’il une réelle prise en compte des enjeux soulevés?
Les batteries au lithium répondent aux exigences
présentent mais la recherche et le développement de
batterie se fait principalement dans un intérêt
économique. En effet le but est de trouver un type de
batterie permettant de répondre à des exigences plus
importantes (capacité de stockage, taille, durée de vie,
temps de charge, dégagement de chaleur) pour pouvoir
commercialiser des produits disposant de ces avantages.
Il y a aussi l’approvisionnement qui est pris en compte
puisque plus une matière est rare et/ou difficile à
extraire plus elle sera chère. Il est donc dans l’intérêt des
industriels de trouver une batterie constituée de
matériaux abondant et faciles à extraire.
En prenant en compte ces intérêts économiques, on
rejoint des intérêts environnementaux avec la durabilité
des batteries et des ressources utilisées, ainsi que des
intérêts sociaux avec l’utilisation de matières premières
abondantes et donc mieux réparties géographiquement.
J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 10
6. CONCLUSION
Le développement des batteries lithium-ion s’est
accompagné d’une évolution des produits, et d’un
développement du taux et des méthodes de recyclage
qui impliquent les producteurs et les utilisateurs.
Les batteries Li-ion possède des avantages intéressants
comme leurs performances, leurs coûts et leurs poids.
Cela influence leur fort essor sur le marché jusqu’à la
quasi exclusivité par exemple pour les applications
électroniques (ordinateurs portables). Les batteries Li-
ion se heurtent à de nombreuses problématiques ; que
ce soit au point de vue de l’inégale géolocalisation des
minerais les composant, au point de vue de l’impact
environnemental qu’elles possèdent ou encore de la
dangerosité lié au risque incendie du lithium.
L’économie devient circulaire pour transformer le
déchet en matière première secondaire, réutiliser les
déchets et réduire au maximum la quantité de déchets
ultimes.
C’est pourquoi le développement d’une économie
circulaire autour de ces matériaux a été initiée il y a
quelques années et qu’une multitude de procédés de
recyclages ont été développés dans le but de pouvoir
revaloriser au mieux les composants ayant un coût et un
impact environnemental important lors de leur
extraction et/ou production. Ces procédés traitent de
tout ou partie des composants d’une batterie, et chacun
possède ses avantages et ses défauts, mais il est
important de constater que le procédé le plus efficient
est contrôlé par sa faisabilité économique. De plus ces
procédés complexes ne permettent pas de traiter un
grand tonnage de batteries par année.
Des chercheurs et des industriels ont aussi trouvé des
solutions alternatives qui offrent des qualités égales voir
supérieures à celles des batteries lithium-ion dans
certaines domaines, comme les batteries au graphène.
Les batteries lithium-ion restent toutefois la meilleure
alternative pour certaines utilisations du point de vue
technique et économique. C’est pourquoi il est
important de mettre en place des filières de recyclage
durables pour que cette technologie soit durable. La
technique de recyclage « Recovery of raw materials from
Li-ion batteries » permettent de recycler 50% de la
masse totale de la batterie et donc si elle est appliquée à
grande échelle rendrait l’économie des batteries lithium-
ion circulaire.
Il est donc intéressant de se pencher sur les avancées
technologiques qui pourraient être la solution au
remplacement des batteries lithium-ion.
11 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)
ANNEXES
Annexe1. Les étapes de recyclage du projet RecLionBat [(11)].
Annexe 2 Logigramme du processus de recyclage des batteries usagées suivant le deuxième procédé développé en laboratoire [ (12)].
J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 12
Annexe 3. Schéma général du processus industriel de recyclage des piles usagées [(14)].
13 J.Dubu et al. / PSIR SEP (2016)
Annexe 4. Schéma du recyclage alternative des batteries développé dans le projet 01RW0404 « Recovery of raw materials from Li-ion batteries » [(17)].
J. Dubu et al. / PSIR SEP (2016) 14
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[19] brgm. Panorama 2011 du marché du graphite naturel. Orléans : s.n., 2012. BRGM/RP-61339-FR.
[20] Inc., Graphene 3 D Lab. Graphene 3 D Lab Inc. [En ligne] [Citation : 14 02 2016.] http://www.graphene3dlab.com/s/home.asp.
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