fenêtres sur la lutte ontre la orruption en tunisie197.5.145.96/ · 2019-12-18 · 2 préambule «...
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Fenêtres sur la lutte contre la
corruption en Tunisie
Septembre 2017
Actualisée en novembre 2018
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Préambule
« Dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie Nationale de Bonne Gouvernance et de Lutte contre la Corruption, et en partenariat entre le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) en Tunisie, l’Instance Nationale de Lutte Contre la Corruption (INLUCC) et les Services de Gouvernance de la Présidence du Gouvernement, le projet « Renforcement de la Gouvernance Démocratique et de la Redevabilité Publique en Tunisie », a été élaboré, avec l’appui de l’Agence de Coopération Internationale de la Corée (KOICA). Il constitue un instrument national fort afin de renforcer (1) les capacités, l’efficience et le rôle de coordination de l’INLUCC, (2) le cadre juridique et institutionnel de la lutte contre la corruption, ainsi que (3) les mécanismes de redevabilité de sites pilotes de quatre secteurs (douane, municipalités, forces intérieures de la sécurité et santé). A travers la mise en place de ces « ilots d’intégrité » au niveau sectoriel, le projet développe une action collective en partenariat avec les ministères et institutions publiques concernées, afin de réduire les risques de corruption et d’améliorer la confiance des citoyens. » Cette compilation des études sur la lutte contre la corruption a été élaborée pour enrichir les ressources documentaires et les produits de connaissance du Centre d’Etudes, de Formation et d’Information sur la Lutte Contre la Corruption (CEFICC) de l’Instance Nationale de Lutte Contre la Corruption, mis à la disposition du public intéressé. Cette compilation a été réalisée par M. Nizar Ben Sghaier.
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“Si Vis Pacem Para Bellum”
“Si tu veux la paix prépare la guerre”
Végèce, Epitoma Rei Militaris
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Abstract
Depuis le 14 janvier 2011, la lutte contre la corruption s’est érigée comme une priorité pour réussir la
transition démocratique en Tunisie. Les rapports, études, enquêtes et sondages d’opinion se sont
multipliés dans l’espoir de pouvoir comprendre, mesurer et préparer une stratégie efficace pour
atténuer les effets néfastes de ce fléau sur l’économie et sur la confiance des citoyens dans les
institutions de l’Etat.
Cette étude vise, principalement, à recenser l’ensemble de ses travaux qui, aussi éparpillés et
différentes dans leur méthodologie, ont besoin d’une grille de lecture bien claire pour permettre
d’approfondir les recherches sur le fléau de la corruption et pour accompagner les plans d’actions de
la Stratégie Nationale de la Bonne Gouvernance et de la Lutte Contre la Corruption 2016-2020.
En premier lieu, une radioscopie générale de la situation de la corruption a été établie sur la base des
rapports généraux établis par des autorités, institutions et organisations nationales e, internationales
et Onusiennes, qui ont cherché à analyser les secteurs les plus vulnérables à la corruption ainsi que les
actions à entreprendre.
En second lieu, sur la base d’une multitude d’enquêtes, de rapports et enquêtes, l’étude à dégager les
principaux indicateurs et classements de la Tunisie dans la lutte contre la corruption. Ainsi, trois
niveaux d’analyse ont été dégagés pour mesurer la perception de la corruption en Tunisie : un niveau
général de perception, un niveau sectoriel et un niveau local.
Puis, vu la centralité de la Stratégie Nationale adoptée le 9 décembre 2016, l’étude expose les
différentes composantes de cette stratégie, tout en essayant de trouver une synergie et une
complémentarité avec les autres stratégies et plans d’action dédiés à des dimensions bien particulières
de la réforme de l’Etat et qui ont une relation, direct ou indirecte avec la lutte contre la corruption.
Ces stratégies latérales ne devaient pas nuire à l’unicité de la vision telle qu’établie dans la SNBLCC et
qui a eu l’adhésion de la société civile, des parties prenantes institutionnelles et surtout de l’autorité
politique, avec la signature de la charte de l’opérationnalisation de la SNBGLC par le Chef du
Gouvernement le 9 décembre 2016.
La mise en œuvre de la Stratégie Nationale se base sur un pilotage institutionnel qui est aussi à
plusieurs niveaux par des structures d’impulsion et de coordination, des structures spécialisées
(transitionnelles et permanentes), les structures de contrôle et d’audit et les structures
juridictionnelles.
Le recensement de ces différentes structures montre les enjeux de coordination de l’intervention de
ces structures pour garantir l’efficacité et de redevabilité dans la mise œuvre, de la SNBGLCC.
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Liste des abréviations
ARP Assemblée des représentants du peuple BCT Banque centrale de Tunisie CCD Code de conduite et de déontologie CDPF Code des droits et procédures fiscaux CGDE Contrôle général des domaines de l’Etat et des affaires foncières CGF Contrôle général des finances CGSP Contrôle général des services publics CNCP Conseil national de la commande publique CNICM Commission nationale d’investigation sur la corruption et la malversation CNUCC Convention des Nations Unies contre la corruption COSEM Comité d’enquête et de suivi des marchés publics CP Code pénal CPP Code de procédure pénale CSCAMP Commission supérieure de contrôle et d'audit des marchés publics CSM Conseil supérieur de la magistrature CTAF Commission tunisienne des analyses financières (FIU) DGD Direction générales des douanes DGI Direction générale des impôts ENA Ecole nationale d'administration GAFIMOAN Groupe d'action financière du Moyen-Orient et de l'Afrique du nord HAICOP Haute Instance de la Commande Publique HCCAF Haut comité du contrôle administratif et financier IBOGOLUCC Instance de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption INLUCC Instance nationale de lutte contre la corruption IPJJ Instance provisoire pour la supervision de la justice judiciaire ISIE Instance supérieure indépendante pour les élections LBC/FT Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme MA Médiateur administratif ONMP Observatoire national des marchés publics PJEF Pôle judiciaire économique et financier SGFE Statut général des fonctionnaires de l’Etat
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Introduction générale
Le chemin parcouru depuis le rapport de la Commission nationale d’investigation sur la corruption
et la malversation en 2011 jusqu’à la signature de la charte de la mise en œuvre de la stratégie
nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption le 9 décembre 2016 témoignent de
la hardiesse d’éradiquer le fléau de la corruption dans un pays, comme la Tunisie, qui est en phase de
transition démocratique suite au déclenchement de la Révolution de la liberté et de la dignité 17
décembre-14 janvier 2011.
Ces deux documents majeurs, parmi d’autres qui ont effleuré tout au long de la période de
l’édification d’une nouvelle république basée sur les droits de l’homme et l’Etat de droit, témoignent
aussi des efforts déployés par l’Etat tunisien et ses partenaires locaux et internationaux pour atteindre
les objectifs pour lesquels le peuple tunisien s’est révolté dont la dénonciation de la corruption et la
malversation de l’ancien Régime qui s’est accaparé des richesses et des joyaux de l’économie
tunisienne pour les intérêts privés en usant des prérogatives des institutions de l’Etat au détriment de
l’intérêt général et de la prospérité économique et social du pays.
De l’avis des experts, la Tunisie d’avant la révolution n’est pas un pays « clean » dont les
manifestations sont palpables au niveau du fonctionnement des marchés (restriction de la
concurrence), la détérioration de la qualité des services publics et, par ricochet, le manque de
l’efficacité de l’action gouvernementale1.
Pourtant, le passage vers la démocratie n’est pas toujours synonyme de réussite dans la lutte contre
la corruption puisque de nouvelles formes de corruption peuvent surgir et de nouvelles opportunités
de corruption sont susceptibles d’être générées.
Plusieurs études2 ont souligné que la corruption peut se propager de façon endémique durant les
périodes de transition démocratique qui sont généralement marquées par l’instabilité socio-politique,
l’affaiblissement de l’Etat en plus de l’impact limité des mesures prises pour arrêter ce fléau. En effet,
en plus des formes connus de la corruption3, d’autres classifications ont vu le jour comme la corruption
par le bas et la corruption par le haut4 ou bien la corruption postrévolutionnaire5 pour qualifier les
spécificités constatées par les observateurs durant la période post révolutionnaire.
S’il est vrai que la transition démocratique a un effet amortisseur de la corruption, elle aussi un
effet amplificateur ; ce qui a conduit les expertes à parler d’une « transition bloquée »6, voire d’une
1 FEHRI (H.), Gouvernance politico-économique en période de transition démocratique : le cas tunisien dans une perspective comparative, RTAP, CERA, ENA de Tunis, n°1, juin 2013, p.22 2 (Moran, 2001, Sung, 2004) 3 Voir Conseil de l’Europe, Les bases conceptuelles de la lutte contre la corruption, Manuel de formation, décembre 2014 4 Forum des sciences sociales appliquées (ASSF), La corruption au quotidien : Esquisse pour un indice national de perception de la corruption en Tunisie, synthèse d’enquête, Aout 2014, p.19 5 Forum des sciences sociales appliquées (ASSF), La corruption au quotidien : Esquisse pour un indice national de perception de la corruption en Tunisie, synthèse d’enquête, Aout 2014, p.19 6 International Crisis Group, La transition bloquée : corruption et régionalisme en Tunisie, Rapport Afrique du Nord/Moyen-Orient n°177, 10 Mai 2017
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« révolution menacée »7 ou bien d’une « révolution inachevée »8, et la cause était toujours la
corruption et la prolifération de la corruption.
La tâche est difficile surtout que les causes et les origines économiques, sociales, culturelles, de la
corruption en Tunisie ne sont pas encore analysés et saisis. Cela n’a pas décourager les institutions
internationales qui appuie toujours la Tunisie qui constitue toujours l’exception dans les pays qui ont
connu le mouvement du printemps arabe et qui n’ont pas sombré dans le chao et l’obscurantisme.
Pour comprendre le phénomène de la corruption dans ses multiples facettes, il faut commencer à
saisir l’aspect institutionnel. En effet, les institutions sont de deux types : économiques et politiques.
Les institutions économiques coordonnent toutes les formes de production, d’échange et de
répartition dans le but de faciliter les interactions entre les acteurs économiques et leurs activités
génèrent des coûts de transactions préjudiciables au bon fonctionnement de l’économie. Les
institutions politiques génèrent les « règles formelles » (constitutions, lois, décrets…) qui,
théoriquement, veillent au respect du bon fonctionnement des institutions économiques et limitent
les coûts de transaction. Le degré d’efficience des institutions économiques est donc le produit de la
qualité des institutions politiques9.
En d’autres termes, des institutions efficientes (qu’elles soient économiques ou politiques)
favorisent l’utilisation productive des ressources. A l’inverse, des institutions inefficientes, du point de
vue de l’intérêt collectif, détournent les ressources et les utilisent à des fins improductives.
En Tunisie, cet aspect est toujours paradoxal, vu que les institutions, les mécanismes et contrôle
administratif et financier était en place avant la révolution mais n’ont pas empêché les atteintes à
l’intégrité. Les mesures prises après la révolution n’ont pas empêché la prolifération et « la
démocratisation » de la corruption. Pour la majorité des tunisiens, la corruption reste perçue comme
le talon d’Achille de l’Etat10
En effet, la lutte contre la corruption est un domaine très complexe caractérisé par une dimension
multidisciplinaire (juridique, économique, politique, sociologique, culturelle…), Multisectorielle
(sphère publique et de la sphère privée), Transnational (des réseaux internationaux de crime organisé
et de blanchiment d’argent.
Aussi, la corruption est un phénomène variable dans le temps et dans l’espace. Dans le temps, la
perception de la corruption varie d’une région à une autre, d’un pays à un autre, d’un individu à un
autre. Dans le temps, les temps changent, la corruption évolue aussi comme tout phénomène et même
la perception du phénomène change et des pratiques qui étaient considérées comme de nature
corruptive peuvent ne plus l’être.
Malgré cette complexité et variabilité de ce phénomène, « il n’existe pas en Tunisie de diagnostic
détaillé de l’état actuel de la corruption afin de pouvoir développer des politiques publiques
adéquates »11. S’il existe quelques enquêtes qui ont permis de jeter la lumière sur quelques aspects de
7 International Crisis Group, Justice transitionnelle et lutte contre la corruption, Rapport Afrique du Nord/Moyen-Orient n°168, 3 mai 2016 8 Banque Mondiale, La révolution inachevée. Créer des opportunités, des emplois de qualité et de la richesse pour tous les Tunisiens. Synthèse, Revue des politiques de développement, Mai 2014 9 FEHRI (H.), Les réformes institutionnelles et croissance inclusive en Tunisie, Cahier de l’ITES n°1, février 2016, p.19 10 OCDE-Sigma, Evaluation du cadre d’intégrité dans le secteur public en Tunisie, décembre 2012, p.16 11 OCDE, Examen de l'OCDE du cadre d'intégrité dans le secteur public en Tunisie, Examens de l'OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, 11 avril 2013, p.50
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la corruption, elles ne sont pas assez détaillées pour identifier les types de corruption et les activités
les plus vulnérables auxquels il faut s’attaquer
Dans ce cadre, cette présente étude vise à recenser, compiler et analyser l’ensemble des études,
enquêtes et rapports relatifs à la lutte contre la corruption et le renforcement de l’intégrité en Tunisie
dans l’objectif de donner une image globale et assez complète sur ce phénomène.
La multiplicité des études et enquêtes produites par, aussi bien les institutions publiques et les
organisations internationales que les institutions de la société civile, constituent, certes, une richesse
et une preuve de dynamisme et d’engagement des forces vives tunisiens dans la construction d’un
nouveau système d’intégrité, mais elle peut parfois être source de confusion et d’un sentiment
d’éparpillement et de contradictions des données relatives à la corruption.
Le fil d’Ariane qui va constituer la grille d’analyse de cette étude n’est que la Stratégie nationale de
bonne gouvernance et de lutte contre la corruption que la Tunisie a pu adopté en décembre 2016 et
qui va permettre d’évaluer d’une part si cette stratégie a répondu aux attentes et a pris en
considération les zones à risque constatées par les différentes enquêtes et rapports réalisées, et
d’autre part, de d’offrir des pistes et des lignes directrices pour bien cibler les actions à mettre en
œuvre dans le cadre de l’opérationnalisation de la Stratégie surtout après la validation du plan
d’actions 2017-2018 de la SNBGLC.
Dans cette perspective, on a adopté une approche progressive et graduelle pour initier et faire
comprendre aussi bien le public averti que non averti, les différentes ramifications et composantes de
la corruption et des mesures institutionnelles, juridiques et autres prise jusqu’à nos jours pour
combattre et battre l’hydre12 de la corruption qui a étendu ses tentacules à plusieurs secteurs. D’où,
on a jugé opportun de commencer, en premier lieu, par exposer les études et rapports d’ordre
générale avec des perspectives variées (officielle, internationale, civile...) ; puis en deuxième lieu, de
présenter la perception des tunisiens telle qu’elle se dégage des enquêtes existantes en la matière que
ce soit au niveau national qu’international, pour aboutir en troisième lieu à recenser et présenter
l’ensemble des stratégies adoptées par la Tunisie avec un focus principal sur la SNBGLC.
12 Mythologie grecque
12
I- Radioscopie générale de l’état de la Corruption en Tunisie
Quatre références incontournables sont à exploiter : le Rapport National de la Commission feu
Abdelfettah Amor (1), le rapport Scan d’intégrité Tunisie. L’intégrité en pratique élaboré par l’OCDE en
2013 (2) le rapport d’évaluation de la conformité à la CNUCC (3) et enfin l’Etude sur le système
d’intégrité-Tunisie 2015 (4)
La combinaison de ces quatre rapports va nous permettre d’avoir respectivement :
- Une approche officielle de l’état de la corruption effectuée par la Commission nationale
d’investigation sur la corruption et la malversation en 2011
- Une approche internationale effectuée à la demande du gouvernement tunisien par l’OCDE en
2013
- Une approche « onusienne »de conformité du système tunisien aux articles 3 et 4 de la CNUCC
réalisée par une équipe d’experts en 2015
- Une approche de la société civile réalisée par l’association I-watch pour évaluer le système
d’intégrité tunisien en 2016
1. L’approche officielle de la corruption : Le Rapport de la Commission nationale d’investigation sur la corruption et la malversation, 2011
Au lendemain de déclenchement de la révolution tunisienne, le gouvernement provisoire s’est
surtout préoccupé par l’identification et le recouvrement des avoirs illicites de l’ère Ben Ali. Cette
Mission a été mené par la Commission nationale d’investigation sur la corruption et la malversation qui
a, au cours de sa première année d’activité, reçu plus de 10 000 plaintes ou demandes d’enquête.
Les travaux de la Commission, créée pour enquêter sur les cas de corruption et malversations durant
l’ère Ben Ali, ont été centrés sur les malversations passées. Toutefois, les résultats des enquêtes font
un état des lieux des domaines et secteurs les plus vulnérables à la corruption sous le régime de Ben
Ali.
Le rapport final qui a été soumis par la Commission au Président de la République et publié en 2011
fait l’inventaire des domaines les plus exposés à la corruption, à savoir :
▪ Le secteur immobilier ;
▪ Les terrains agricoles ;
▪ Les domaines des entités publiques ;
▪ Les marchés publics et les concessions ;
▪ Les grands projets ;
▪ La privatisation ;
▪ Les télécommunications ;
▪ Le secteur audiovisuel ;
▪ Le secteur financier et bancaire ;
▪ Les autorisations administratives ;
▪ La douane et la fiscalité ;
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▪ L’administration, les recrutements,
▪ La recherche scientifique et l’orientation universitaire ;
▪ La justice et le barreau.
La capture de l’Etat par la minorité au pouvoir a causé le détournement des biens publics pour des
intérêts privés que ce soit pour l’intérêt de la famille de Ben Ali que ceux de ses cercles d’amis. La
corruption s’est manifestée dans plusieurs domaines selon des formes diverses :
▪ Le domaine immobilier : le changement de la vocation des terrains de manière à ce qu’ils soient
constructibles et, parfois, le changement de la vocation des terrains à usage de construction
d’une catégorie à une autre pour que le bénéficiaire puisse en tirer profit.
▪ L’attribution, sans droit, par les agences foncières de parcelles de terrains constructibles aux
proches de l’ex-Président, et ce, dans des zones urbaines, telles que la banlieue nord de la
capitale, Hammamet et Sousse. Cette attribution pour les proches de l’ex-Président, n’est pas
fondée sur des critères objectifs.
▪ La gestion illégale des domaines de l’État, telle que le changement de la nature du domaine
public et son déclassement pour l’intégrer au domaine privé, et ce, en vue de le céder
ultérieurement à des prix dérisoires ou, parfois, au dinar symbolique.
▪ Les marchés publics : l’attribution des marchés publics et des concessions ne se faisait pas
toujours au vu des règlements. En effet, le rôle de la Commission supérieure des marchés se
limite à l’étude des dossiers et à fournir des propositions au Président de la République. Or,
contrairement à la réglementation des marchés publics, ce dernier attribue parfois le marché
à une personne autre que celle qui l’a légalement, remporté. De même, les cahiers des charges
étaient souvent conçus de manière à orienter l’attribution du marché à la personne choisie
préalablement par l’ex-Président.
▪ Les privatisations : La procédure de privatisation a été plutôt déviée, de manière à permettre
aux proches de l’ex-Président et certains hommes d’affaires privilégiés d’acquérir ces
entreprises avec des prix inférieurs à la valeur marchande. En effet, une pression est parfois
exercée sur certains candidats des appels d’offres de retirer leurs offres financières dont le
montant est supérieur au prix de cession définitivement convenu au titre de la privatisation.
▪ L’octroi des autorisations administratives : pour l’exercice de certaines activités
économiques, soumis au régime d’autorisation, telle que la commercialisation des
automobiles, essentiellement au profit des membres de la famille de l’ex-Président qui ont
accaparé la majorité des licences d’importation et de commercialisation de voitures. De
même, la gestion des grandes surfaces commerciales est soumise, depuis la Loi de 2003, au
régime de l’autorisation, ce qui a permis aux proches de l’ex-Président de s’accaparer ce
privilège, au même titre que certaines industries, telles que l’industrie du sucre, la cimenterie,
le transport des carburants, l’exploitation des carrières, les quotas d’élevage du thon.
▪ La douane et les impôts : les travaux de la commission ont révélé que la famille de l’ancien
Président avait réussi graduellement à mettre la main sur le secteur de l’importation à travers
la création de sociétés d’import-export, qui souvent ne servaient que de façades ou de boites
aux lettres, pour importer toutes sortes de marchandises, aux moindres frais douaniers, contre
rémunération. Ces pratiques ont causé la faillite de plusieurs entreprises tunisiennes, lésant
ainsi l’économie nationale.
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▪ Le contrôle fiscal a été utilisé parfois pour intimider certaines personnes opposantes au
régime. En outre, l’Etat a abandonné d’énormes créances fiscales par simple décision prise
par l’ex-Président, à charge pour le ministère des Finances de justifier cet abandon. Des
instructions de l’ex-Président ont été, également, adressées à l’administration et à la justice
en vue de classer le dossier, en faveur de certains de ses proches.
▪ Le secteur bancaire : On s’est servi des établissements financiers à participation publique, de
même que de la Banque centrale, pour sauvegarder les intérêts d’entreprises économiques
revenant aux membres de la famille de l’ex-Président et de ses proches. L’abandon de créances
et l’octroi de crédits sans garantie suffisante sont les abus les plus marquants au détriment des
finances publiques.
En 2014, La Banque Mondiale a publié un rapport sur la corruption de la famille de Ben Ali13 qui
s’est basé sur le rapport de « la commission Amor » et qui s’est focalisé sur quelques aspects de ce
rapport. L’analyse a été faite sur la base d’un examen des données portant sur 220 entreprises liées à
Ben Ali et de 25 décrets, signés par Ben Ali et relatifs à des affaires qui concernent les entreprises
recensées par la commission de confiscation créée en 2011 comme appartenant aux proches de
l’ancien président, sur une période de 17 ans.
Les résultats obtenus prouvent que la législation a souvent servi à promouvoir les intérêts de
certaines personnes et à les protéger de la concurrence. En effet, les textes promulgués au cours de
cette période ont exigé l’autorisation préalable dans 45 secteurs différents et de nouvelles restrictions
en matière d’investissements directs étrangers (IDE) dans 28 secteurs. Ceci a fait qu’un cinquième des
bénéfices du secteur privé revenait aux entreprises des proches du régime.
Par ailleurs, en plus du travail d’identification des cas de corruption, la CNICM s’est aussi chargée
de l’identification des stratégies d’avenir afin de lutter contre la corruption et la malversation. Compte
tenu du contexte tunisien particulier, la commission a élaboré un projet de loi-cadre sur la lutte contre
la corruption, dans lequel elle a préconisé la création d’une Instance permanente de lutte contre la
corruption.
La CNICM a fait aussi d’autres recommandations dans le cadre de son rapport, notamment :
- Réformer le cadre législatif et réglementaire en le mettant en adéquation avec les
engagements internationaux de la Tunisie, notamment à travers l’incrimination de
l’enrichissement illicite, de la corruption dans le secteur privé, ou en offrant la protection
adéquate aux témoins et aux informateurs, ou encore les modalités adéquates de réparation
des préjudices subis par les victimes de la corruption et de la malversation, la généralisation
de l’obligation de motivation des actes administratifs
- Réformer le cadre institutionnel : aussi bien la justice, que les corps de contrôle, d’audit ou
d’inspection nécessitent un renforcement et une garantie de leur indépendance
- Consacrer la transparence dans le processus de prise de décision et la communication de
l’information.
13 Rapport de la Banque Mondiale : « All in the Family, State Capture in Tunisia »,Mars 2014
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- Réaffirmer le principe de la légalité et de la répartition des compétences entre les différentes
autorités publiques
- Réformer les programmes éducatifs pour changer les comportements dès le plus jeune âge et
instaurer une culture de rejet de la corruption
2. L’approche internationale : Le rapport de l’OCDE, Scan d’intégrité Tunisie, 2013
Dans le cadre de son initiative Clean-GovBiz, l’OCDE a lancé un scan d’intégrité (publié en 2013) où
elle a procédé en collaboration avec le Gouvernement tunisien, à un diagnostic de l’intégrité en vue de
définir et de mettre en œuvre les réformes prioritaires pour promouvoir la culture de l’intégrité.
Ce diagnostic a porté sur l’ensemble du cadre légal, économique et règlementaire. Il a, en outre,
concerné les politiques et pratiques effectives visant à lutter contre la corruption (en termes de
détection, prévention et poursuite) et à renforcer l’intégrité.
La démarche adoptée est basée sur une autoévaluation de la part du Gouvernement tunisien, des
consultations réalisées avec les représentants du secteur privé et de la société civile tunisienne et des
organisations internationales ainsi que des analyses réalisées par des experts de l’OCDE. Ces analyses
ont été complétées par des comparaisons aux standards internationaux et ont porté sur 13 dimensions,
à savoir : la politique réglementaire, la politique de la concurrence, la gestion des finances publiques,
la coopération pour le développement, l’intégrité du secteur public, les marchés publics, la
transparence fiscale, les crédits à l’exportation, le lobbying, l’intégrité du secteur privé, l’administration
fiscale, la protection des dénonciateurs d’abus, l’incrimination de la corruption. Pour chacune de ces
dimensions, l’analyse a porté sur l’évaluation des réformes en cours, l’identification de celles qui sont
prioritaires, elle a porté également sur les bonnes pratiques telles que définies dans les standards
internationaux.
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Figure 1. Domaines du Scan d'Intégrité - OCDE
Les principaux résultats ayant émané de cette étude mettent en évidence l’inexistence en Tunisie
d’un cadre législatif cohérent pour assurer la transparence et la reddition des comptes et pour
prévenir la corruption dans le secteur public.
De plus, la mise en œuvre des dispositions existantes s’est avérée défaillante à cause du manque
de leadership politique, de capacités spécialisées dans la lutte anticorruption et de sanctions
adéquates.
Les recommandations de cette étude portent sur le renforcement et la révision du cadre législatif
et institutionnel existant, la sensibilisation et la professionnalisation des fonctionnaires ainsi que le
renforcement des capacités, de la transparence et de la reddition des comptes.
3. L’approche « onusienne » : Le rapport d’évaluation de la conformité à la CNUCC Art. 3 et 4, 2015
La CNUCC constitue le socle principal d’une vision commune entre les pouvoirs publics et les
bailleurs de fonds concernant la mise en place d’un système de lutte contre la corruption14. La Tunisie
a signé la CNUCC le 30 mars 2004 et elle l’a ratifié le 23 septembre 2008. Cette convention compte à
14 OCDE, CleanGovBiz, Scan d’intégrité Tunisie. L’intégrité en pratique, juin 2013,
17
ce jour 170 Etats membres et dispose d’un mécanisme d’examen depuis novembre 2009 suite à la
décision de la Conférence des Etats parties à la Convention (CEP)15.
Deux cycles d’examen de cinq ans ont été décidé par le CEP. Le premier portant sur les chapitres III
(Incrimination et Application de la Loi) et IV (Coopération Internationale), et le second, sur les chapitres
II (Mesures Préventives) et le chapitre V (Recouvrement des avoirs).
En juillet 2010 la Tunisie a été sélectionnée, au tirage au sort, par le Groupe d’examen de
l’application de la CNUCC, pour faire l’objet d’un examen durant le processus de trois ans qui courait
jusqu’en 2013. C’est ainsi qu’en 2013 la Tunisie a entamé son auto-évaluation en mettant en place un
groupe d’experts gouvernementaux chargés d’étudier le système juridique national au regard des
articles de la Convention, et pour identifier les insuffisances de dans la législation tunisienne ou les «
gaps » par rapport aux dispositions de la CNUCC16.
Comme encouragé par le système CNUCC, la société civile doit contribuer à ce mécanisme
d’examen, ce qui a été fait par l’association I-Watch qui a élaboré un rapport parallèle17. Ce travail a
abouti à l’élaboration d’un rapport de conformité avec les standards CNUCC18, le 25 mai 2015, qui a
identifié principalement 16 lacunes ou « gaps », qui sont utile à exposés comme suit :
• Réviser la législation pour que l’infraction de corruption active d’agents publics nationaux
couvre les cas de promesses ou dons faits pour une autre personne ou entité et d’inclure
explicitement dans la définition de la corruption l’acte de l’offre ainsi que les actes commis
directement ou indirectement (art. 15, al. a));
• Incriminer la corruption active d’agents publics étrangers et de fonctionnaires
d’organisations internationales publiques (art. 16, al. 1);
• Envisager d’incriminer la corruption passive d’agents publics étrangers et de fonctionnaires
d’organisations internationales publiques (art. 16, al. 2);
• Concernant le trafic d’influence, revoir la rédaction de l’article 87 du Code Pénal
pour étendre le champ d’incrimination au fait de solliciter ainsi qu’aux faits de promettre,
d’offrir et de donner (art. 18);
• Réviser les lois relatives au blanchiment d’argent (art. 23, al. 2 d));
• Accélérer le processus d’adoption de la loi pour incriminer l’enrichissement illicite en
conformité avec la disposition de la CNUCC (art. 20);
• Incriminer le fait de recourir à la force physique, à des menaces ou à l’intimidation ou de
promettre, d’offrir ou d’accorder un avantage indu pour empêcher un témoignage ou
pour obtenir ou empêcher la présentation d’éléments de preuve (art. 25, al. a);
• Elargir la responsabilité pénale des personnes morales (art. 26, al. 1);
• Prévoir des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives applicables aux personnes
morales qui participent aux infractions établies conformément à la CNUCC (à l’exception du
cas de blanchiment) (art. 26, al. 4);
15 la Conférence des Etats parties à la Convention a été mis en place parallèlement à l’entrée en vigueur de la CNUCC 16 Dans le cadre du mécanisme d’examen, deux pays, le Togo et les Seychelles, devraient se rendre en Tunisie afin d’élaborer un rapport d’évaluation nationale concernant la mise en oeuvre par la Tunisie de la CNUCC. 17 I Watch, Rapport sur la conformité de la Tunisie avec la Convention des Nations Unies Contre la Corruption, 2014. 18 UNODC, Groupe d’examen de l’application, Examen de l’application de la Convention des Nations Unies contre la corruption, Résumé analytique : Tunisie, 26 mai 2015
18
• Adopter des mesures adéquates pour mieux réglementer l’administration des biens gelés,
saisis ou confisqués (art. 31, al. 3);
• En ce qui concerne la protection des témoins et des personnes qui communiquent
des informations (art. 32, 33 et 37 al. 4):
• Adopter les mesures nécessaires pour assurer une protection efficace contre des actes
éventuels de représailles ou d’intimidation aux témoins et aux experts et, s’il y a lieu, à leurs
parents et à d’autres personnes qui leur sont proches. Ces mesures doivent s’appliquer
également aux victimes lorsqu’elles sont témoins et aux accusés qui apportent leur aide
dans les enquêtes ou poursuites ;
• Envisager d’adopter les mesures nécessaires pour assurer la protection contre tout
traitement injustifié de toute personne qui signale des faits de corruption.
• Prendre les mesures appropriées pour encourager les personnes qui participent ou ont
participé à la commission d’une infraction établie conformément à la CNUCC à fournir aux
autorités compétentes des informations utiles à des fins d’enquête et de recherche de
preuves (à l’exception des infractions de corruption stricto sensu), ainsi qu’une aide
factuelle et concrète qui pourrait contribuer à priver les auteurs de l’infraction du
produit du crime et à récupérer ce produit (art. 37, al. 1);
• Envisager d’alléger la peine dont est passible un prévenu qui coopère de manière
substantielle à l’enquête ou aux poursuites (art. 37, al. 2);
• Envisager d’accorder l’immunité de poursuites à une personne qui coopère de manière
substantielle à l’enquête ou aux poursuites (art. 37, al. 3);
• Codifier le principe aut dedere aut judicare19 (art. 42, al. 4).
4. L’approche de la société civile : Etude sur le système d’intégrité-Tunisie 2015
L’association I-watch dans son « Etude sur le système d’intégrité Tunisie 2015 » s’est basé sur la
méthodologie de Transparency international commune à toutes les évaluations des SNI. Dans cette
étude, les 13 « piliers » qui soutiennent le système national d’intégrité ont été évalués sur la période
s’étalant de janvier 2014 à décembre 2015. Il s’agit de : le parlement, l’exécutif, le pouvoir judiciaire,
l’administration, les institutions chargées du respect de la loi, l’instance supérieure indépendante pour
les élections, le médiateur, les juridictions financières : Cour des comptes, l’instance nationale de lutte
contre la corruption, les parties politiques, les médias, la société civile et les entreprises.
Cette étude a débouché sur les conclusions suivantes :
- Le système national d’intégrité tel qu’il est au moment de l’étude « est incapable de mener
une lutte efficace contre la corruption »20
- Le cloisonnement et le manque d’interaction entre les différents piliers du système qui
empêche d’avoir une vision claire et une stratégie cohérente de lutte contre la corruption
19 Obligation imposée à l’Etat sur le territoire duquel se trouve l’auteur présumé d’un crime de l’extrader (aut dedere) ou de le juger (aut judicare) 20 I Watch, Etude sur le système national d’intégrité. Tunisie 2015, Transparency international, 2016, p.9
19
- Les insuffisances et les incohérences des textes juridiques en matière de lutte contre la
corruption
- Le manque des moyens et de mise en œuvre des actions des acteurs non gouvernementaux
Pour pallier ces difficultés, l’étude énumère les recommandations suivantes :
- L’adoption d’une stratégie nationale inclusive de lutte contre la corruption impliquant toutes
le parties prenantes et les forces vives de la société ; une stratégie globale avec un volet
préventif d’une part et un volet répressif d’autre part
- La révision du dispositif législatif notamment en adoptant des lois sur le conflit d’intérêts, sur
le lobbying et sur la protection des lanceurs d’alerte et en modifiant la loi relative à la fonction
publique, la législation fiscale et celle de l’investissement
- La refonte de l’architecture institutionnelle du système de lutte contre la corruption avec
redéfinition des mandats respectives pour éviter les chevauchements des compétences
- L’affectation des ressources humaines, financières et logistiques pour les institutions de lutte
contre la corruption
20
II- La mesure de la corruption en Tunisie
Mesurer la corruption n’est pas chose aisée pour plusieurs raisons. D’abord, la corruption est par
nature une entente cachée entre deux parties qui n’ont pas intérêt à révéler cette entente lorsqu’on
leur pose la question s’ils sont, ou ont été impliqué dans la corruption.
De plus, le public a tendance à « amplifier » sa perception de la corruption (et surtout la petite
corruption) et de montrer que la corruption est plus importante qu’elle ne l’est en réalité. De même,
ce qui est considéré comme corruption ou non varie d’un système à un autre, voire d’une personne à
une autre.
Par ricochet, mesurer la gouvernance, comme système de nature à pallier la corruption, est aussi
chose difficile. La mauvaise gouvernance se traduit par la violation des règles de droit, l’arbitraire de
l’administration et l’existence de la corruption21. Or, il est difficile de « se doter d’indicateurs
mesurables qui traduisent quantitativement le contenu d’une définition essentiellement
qualitative »22.
Pour mesurer la corruption, il est possible de faire appel à deux types d’information : les données
statistiques et les données analytiques :
- Les données statistiques portent sur les chiffres de criminalité ou d’abus de procédures
administratives en plus de la restitution de l’expérience (au contraire de la perception) de la
corruption en terme chiffré ;
- Pour les données analytiques, il est question des perceptions, des opinions au sujet de la
corruption exprimées par le simple citoyen, l’expert, le militant de la société civile ou autre
personne ou entité (ONG)23.
La combinaison de ces deux types de données permet d’appréhender l’ampleur du phonème de la
corruption, de sa gravité et de connaitre les secteurs les plus vulnérables de la société. En effet, en
l’absence des statistiques officiels sur le nombre des procès ou jugements en rapport avec la
corruption, le recours à la perception de ce phénomène peut être très utile surtout que les régimes
démocratiques donnent une importance accrue à la perception des citoyens de la mise en œuvre des
politiques publiques.
1. Les données statistiques sur la corruption en Tunisie
Les statistiques officielles disponibles sur les affaires en rapport avec la corruption sont sporadiques
et ne sont pas consolidés. On dénonce souvent l’absence de données sur le phénomène de la
21 FEHRI (H.), Gouvernance et réformes institutionnelles en Tunisie : un processus inachevé, in gouvernance et institutions publiques, MRAD (H.) (dir.), Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, 2008, p.131 22 FEHRI (H.), Gouvernance politico-économique en période de transition démocratique : le cas tunisien dans une perspective comparative, RTAP, CERA, ENA de Tunis, n°1, juin 2013, p.19 23 Conseil de l’Europe, Les bases conceptuelles de la lutte contre la corruption, Manuel de formation, décembre 2014, p.26
21
corruption24 voir même durant plusieurs décennies on le conçoit comme un sujet tabou où il n’était
même pas possible d’avoir de simples perceptions25.
Quelques données statistiques peuvent être extraites de quelques institutions étatiques, de
rapports ou des déclarations de certaines personnalités politiques.
Le Ministère de l’Intérieur avance les chiffres suivants pour les années 2015 et 201626:
Nature de l’infraction 2015 2016
Corruption administrative et financière 24 30
Faux et usage de faux 215 152
Escroquerie 1062 943
Faux des chèques 186 138
Abus de confiance 326 293
Crimes cybernétiques 45 37
Concussion 50 53
Blanchiment d’argent 18 27
Vols et faits assimilés 12 18
Contrefaçon et altération de la monnaie
locale
26 28
Trafic de contrebande (devise et
marchandises
15 22
Tableau 1 Statistiques des dossiers de la sous-direction des enquêtes économiques et financières de 2015 et 2016- Ministère de l'intérieur,
Concernant les agents de la Douane, la Direction générale des douanes a fourni les chiffres
suivants27 selon la nature des fautes commises par les agents de la Douane :
2010 2011 2012 2013 2014
Corruption 42 3 24 23 28
Infractions de droit commun 51 3 31 33 51
Manquement aux obligation professionnelles 55 13 36 43 42
Absences irrégulières 26 24 54 39 35
Indiscipline 59 15 37 37 36
Total 233 58 182 175 192
% corruption/total 18 % 5.2% 13.3% 13.1% 14.6% Tableau 2: Infractions des agents des Douanes- DGD
Concernant l’administration publique, le contrôle général des finances (CGF) a fourni des
statistiques concernant les dénonciations de la corruption auprès de ce corps de contrôle :
24 I Watch, Rapport sur la conformité de la Tunisie avec la Convention des Nations Unies Contre la Corruption, 2014, p.9 25 Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives, La corruption dans le secteur institutionnel tunisien : Perception et réalité, Document de travail, Notes et analyses n°45-2016, Novembre 2016, p.5 26 Source de ces statistiques : Commission Tunisienne des Analyses Financières (CTAF), Rapport de l’évaluation nationale des risques de blanchiment d’argent et de financement de terrorisme, Avril 2017 (en arabe), p.44 27 Source « Diagnostic du cadre anti-corruption de la Tunisie- Programme Sud", Conseil de l'Europe, 2017
22
2011 2012 2013 2014
Nombre des dénonciations adressées 142 127 78 83
Nombre des enquêtes initiées suite aux dénonciations 21 6 11 6
Nombre des dénonciations ayant abouti à des enquêtes
pénales
N/A N/A N/A N/A
Nombre des condamnations suite aux enquêtes et
dénonciations
N/A N/A N/A N/A
Tableau 3 : statistiques dénonciations et enquêtes réalisés par le CGF28
Pour les missions d’inspection réalisées par le CGF (hors les missions d’audit de projets financés par
les ressources extérieurs), les statistiques sont les suivantes :
2011 2012 2013 2014
Nombre des inspections réalisées 35 24 16 19
Nombre des cas de corruption identifiés au cours des
inspections qui ont menés aux enquêtes pénales
17 6 4 1
Tableau 4 : Inspections réalisés par le CGF et cas de corruption identifiés29
Au niveau de la direction générale des impôts, les statistiques concernant les dénonciations de la
corruption sont comme suit :
2012 2013 2014
Nombre des dénonciations adressées 56 41 41
Nombre des enquêtes initiées suite aux dénonciations 77 60 37
Nombre des dénonciations ayant abouti à des enquêtes
pénales
0 0 1
Nombre des condamnations suite aux enquêtes et
dénonciations
0 0 0
Tableau 5 : Statistiques DGI en rapport avec la corruption30
Le premier Rapport national de la gouvernance et de la prévention de la corruption, édité par les services de la gouvernance en décembre 201531, est une initiative à consolider et offre un outil pour collecter des données sur la gouvernance et la lutte contre la corruption. Il se base sur une approche sectorielle/ministérielle pour avancer des données selon le ministère sur les actions entreprises dans le domaine concerné. On peut avancer, sur la base de ce rapport, qu’en 2015, au ministère de l’éducation 133 suspicions de corruption ont été détecté dont 54 % dans les établissements scolaires, primaires et secondaires. Le Ministère des domaines de l’Etat a effectué 99 missions de contrôle sur les voitures administratives qui ont couvert plus que 3000 véhicules. 10 % était en infraction à la règlementation.
28 Idem 29 Idem 30 Idem 31 Présidence du Gouvernement, services de la Gouvernance, Le premier Rapport national de la gouvernance, 11 décembre 2015, (en arabe)
23
Le ministère de défense, selon ce même rapport a instruit 25% de suspicions de corruption en 201532.
D’autres chiffres peuvent être mentionnés et qui ont été avant par des hauts responsables de l’Etat
tunisien et qui permettent d’avoir une autre idée sur le phénomène de la corruption en Tunisie l’ancien Ministre des finances, M. Chaker, avait annoncé en 2015 que 70% de la contrebande transite par les ports commerciaux33. De son côté, le Président de l’INLUCC Chawki Tabib a déclaré que la corruption fait perdre 25% de la valeur totale des marchés publics à l'État 34.
Pour Un ancien juge administratif, les formes de corruption pratiquées en Tunisie sont l'évasion
fiscale et les fausses déclarations d'impôt qui coûtent à l'Etat environ 50 mille milliards35. Selon une étude du Global Financial Integrity36 citée dans un rapport de la Banque Mondiale, la
corruption coûte à la Tunisie plus que 2 % du PIB, son coût total est estimé à 1,2 milliards de dollars par an durant la période entre 2000 et 2008, soit 110 dollars par habitant. Quant aux pertes de l’économie tunisienne dues à la corruption, elles sont chiffrées à un milliard de dinars.
2. Cartographie des principaux indicateurs internationaux de perception de la corruption en Tunisie
Pour mesurer la perception de la corruption en Tunisie, en particulier depuis le 14 janvier 2011,
plusieurs enquêtes et études ont été menées au niveau international et national.
Indicateur Classement Score Source
Transparence budgétaire 66 sur 112 42/100 Open Budget Survey 2015-
International Budget Partenship
(IBP)
Transparence dans la gestion
des ressources naturelles
48 sur 89 46/100 Revenue Watch, 2017
Corruption Perception Index
CPI
75ème/176
74ème
41/100 Transparency International 2016
Transparency International 2017
Corruption dans la défense et
sécurité
D TI Government Defence Anti-
corruption Index 2015
Rule of Law Index 57 2017
Intégrité Electorale 25ème/127 Electoral Integrity Project EIP 2015
Doing Business 77/190 Banque Mondiale, 2017
32 Ce rapport, plus structuré et plus ramassé, tout en ayant une périodicité annuelle respectée, constituerait une source officielle et fiable avec une dimensions sectorielle sur les données relatives à la gouvernance et la corruption. 33 Tunis Forum – IACE : Lutte Contre La Contrebande… La Méthode Slim Chaker’.Webmanagercenter, 7 July 2015.http://www.webmanagercenter.com/0/2015 165431/07/7/tunis-forum-iace-lutte-contre-la-contrebande%E%80%2A-6la-methode-slimchaker/ 34 http://www.huffpostmaghreb.com/2016/12/09/corruption-tunisie_n_13532878.html 35 http://www.huffpostmaghreb.com/2016/12/09/corruption-tunisie_n_13532878.html 36 Global Financial Integrity (GFI). 2011. Illicit Financial Flows from Developing Countries: 2000-2009. Washington, DC: GFI. http://www.gfintegrity.org/wp-content/ uploads/2011/12/GFI_2010_ IFF_Update_Report-Web.pdf
24
Transparency International, indice de perception de la Corruption
Transparency International a effectué plusieurs études de perception dans laquelle elle a présenté
les évaluations de la corruption en Tunisie et leur évolution et ce en se basant sur deux indices
principaux à savoir : l’index de l’autorité de la loi et l’index de la perception de la corruption.
Ces études mettent en évidence l’amplification du phénomène de la corruption en Tunisie pendant
la période 2001-2011 et encore pendant la période 2012-2016. La Tunisie a en effet enregistré une
régression dans le classement selon l’indice de perception de la corruption passant de 59ème place en
2010 à 73ème place en 2011, pour passer à la 79ème en 2014 pour récupérer quelques places jusqu’en
2017 pour revenir à la 74ème place,
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016
Danemark 1 2 1 1 1 1 1
Tunisie 59 73 75 77 79 76 75
Maroc 85 80 80 94 80 88 90 Tableau 6 : Évolution du classement de la Tunisie selon l’IPC-TI (2010 – 2016)
Selon le rapport « Tendances en matière de corruption dans la région du Moyen Orient et de l’Afrique
du Nord (MENA) » publié par Transparency International en 2012, les formes les plus importantes de
corruption en Tunisie sont les-pots-de vin et le népotisme.
Le rapport considère que les pots-de-vin sont assez courants dans le vécu quotidien des tunisiens : «
Il est souvent demandé aux individus et aux entreprises de verser une somme d’argent ou d ’offrir des
cadeaux quand ils ont affaire à des fonctionnaires, à des inspecteurs et notamment à des agents publics
municipaux ».
Pour ce qui est du népotisme, le rapport avance que, pour les 5 pays de la région MENA (dont la
Tunisie) qu’il couvre : le népotisme est tellement commun et toléré… qu’il est devenu communément
admis et considéré comme une « chose de la vie ». De plus, « les vastes réseaux de népotisme contribuent
souvent à brouiller les frontières entre les sphères publique et privée et permettent à des individus ou à
des entreprises privées de bénéficier d ’une influence ou de bénéfices indus ».
Dans sa version 2016, le rapport « Tendances en matière de corruption dans la région du Moyen Orient
et de l’Afrique du Nord (MENA) » mentionne que 64% des tunisiens disent que la corruption a augmenté
et 72% disent que le secteur public est corruptible (dont 23% disent qu’il est totalement corruptible). En
plus, 62% des tunisiens voient que le gouvernement ne fait pas assez pour lutte contre la corruption.
Mais, seulement 9% reconnaissent avoir payé des pots de vin pour avoir des prestations publiques (contre
48% pour le Maroc et 4 % pour la Jordanie).
Selon la même étude, 7 sur 10 voient que le rôle du citoyen est déterminant pour lutte contre la
corruption.
25
Banque mondiale, Indicateur global de la Gouvernance (WGI) :
L’indicateur global de la Gouvernance fait appel à pas moins de 250 indicateurs pour mesurer la qualité
des institutions dans un pays donné. Les informations proviennent de 31 sources différentes et sont
produites par des organisations internationales et des ONG. Cette base de données couvre plus que 200
pays depuis 1996 jusqu’en 2015.
Il comprend six sous indicateurs : participation et responsabilisation, la stabilité politique et l’absence
du violence, l’efficacité des pouvoirs publics, la qualité de la réglementation, l’Etat de droit et le contrôle
de la corruption.
Le sous indicateur « le contrôle de la corruption » cherche à mesurer la corruption définie comme
l’abus d’une position publique à des fins privées. Il est calculé à partir d’indices de degré de captivité de
l’Etat et de corruption administrative. La captivité de l’Etat est entendue comme les efforts que déploient
les groupes de pression pour modeler les lois, les politiques et règlements à leur avantage en soudoyant
les décideurs publics. Alors que la Corruption administrative correspond aux paiements illégaux visant à
changer la manière dont les lois, les règles ou réglementations sont appliquées.
Score de la Tunisie (-2.5,+2.5)
Indicateurs 2000 2010 2011 2013 2015
Participation et
responsabilisation
-0.66 -1.37 -0.39 -0.12 +0.19
Stabilité politique +0.27 -0.04 -0.37 -0.93 -0.87
Efficacité du gouvernement +0.52 +0.24 +0.03 -0.07 -0.10
Qualité de la réglementation -0.06 -0.02 -0.19 -0.33 -0.39
Etat de droit -0.15 +0.12 -0.14 -0.21 -0.05
Contrôle de la corruption -0.03 -0.15 -0.17 -0.14 -0.11 Tableau 7 Compilation à partir du Worldwide Governance Indicators website http://info.worldbank.org/governance/wgi/#home
La lecture de l’indicateur dans le temps, montre un sérieux déficit depuis 2000 au niveau de la
gouvernance politique (les deux premiers indicateurs) pour arriver en 2010 à un score alarmant de -
1.37. Le corolaire de ce déficit est la prolifération de la corruption avec un score de -0.17 en 2011, année
de la révolution tunisienne.
Le changement politique en 2011 et l’amélioration de la gouvernance politique n’avait pas un grand
impact sur la diminution de la corruption, qui continue à garder des scores élevés variant entre -0.17 et
-0.11. Ainsi, la transition démocratique n’a pas renforcé l’Etat de droit et le contrôle de la corruption.
26
World Justice Project, Indice de l’Etat de droit
Le rapport sur « l’Etat de droit dans le monde » du World Justice Project37 se base sur plus que 44
indicateurs pour chaque pays, regroupés en huit facteurs : le pouvoir limité su gouvernement,
l’absence de corruption, l’ordre et la sécurité, les droits fondamentaux, le gouvernement ouvert,
l’application de la réglementation, la justice civile, la justice pénale.
Pays Danemark Tunisie Maroc Ukraine
Année 2016 2013 2016 2016 2016
Score 0.89 N/R 0.53 0.53 0.49
Classement 1 63/113 58/113 60 78
Tableau 8 : Compilation à partir https://worldjusticeproject.org/our-work/wjp-rule-law-index
Même si le classement de la Tunisie dans les pays de la région MENA, selon Rule of Law Index, est
dans le haut du tableau, il reste qu’au niveau mondial il n’est pas satisfaisant. Les causes sont, d’après les
composantes de l’indice de l’Etat de droit, sont essentiellement : le déficit au niveau de l’accès à
l’information, la faiblesse dans l’application de la loi pénal et la prolifération de la corruption.
3. Cartographie des principaux indicateurs nationaux de perception de la corruption en Tunisie
L’analyse de la perception de la corruption se basera essentiellement sur les enquêtes effectuées par
les organismes et institutions suivantes :
1. IACE-Centre Tunisien de Gouvernance des entreprises, Indice de perception de la corruption par
les citoyens, Septembre 2011.
2. Forum des sciences sociales appliquées, La corruption au quotidien : Esquisse pour un indice
national de perception de la corruption en Tunisie, Aout 2014
3. SIGMA Conseil et Konrad Adenauer Stiftung, La corruption en Tunisie : état des lieux et remèdes,
Enquête par sondage, 18 février 2016
4. I Watch, Perceptions d’intégrité auprès des jeunes tunisiens : sondages d’opinion sur la
corruption dans les concours de la fonction publique, 2014
5. ATCP, La Petite Corruption : Le Danger Banalisé. Etude exploratoire sur la perception de la petite
corruption en Tunisie, 2015
6. Institut National de la Statistique, La perception des citoyens envers la sécurité, libertés et la
gouvernance locale en Tunisie, 2015 et 2018
7. Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives, Climat des affaires et
compétitivité de l’entreprise : résultats de l’enquête compétitivité 2015, Tunis, septembre 2016
8. Sondage One To One Polling.
37 Hiil-innovating Justice, The rule of law in Tunisia : prospects and challenges, Rule of law Quick Scan Tunisia, November 2012
27
Le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) a recommandé que « des
évaluations plus efficaces de la gouvernance améliorent la démocratie quand il s’agit de processus
nationaux, fondés sur des indicateurs développés nationalement et localement, et quand elles sont
conçues par les décideurs politiques et ayant à l’esprit les réformes politiques à mettre en œuvre. »38.
Ainsi les indicateurs internationaux de perception doivent être complété par des indicateurs nationaux,
ce qui a été fait par les institutions publiques mais aussi et surtout les institutions de la société civile.
Dans un esprit de regroupement de ces analyses, il est possible de distinguer trois niveaux abordés
par les enquêtes internes de la corruption en tunisien : un niveau général ou global, un niveau sectoriel
et enfin un niveau local.
L’apport du PNUD, que ce soit dans le soutien ou l’appui de la société civile ou des institutions
publiques dans l’élaboration de ces enquêtes est à saluer car il a permis de découvrir d’autres dimensions
du phénomène de la corruption, à travers « des yeux tunisiens ».
1. Les enquêtes d’ordre général sur la corruption en Tunisie
Indice de perception de la corruption, IACE, 2011
L’IACE- le centre tunisien de gouvernance des entreprises a mené une étude de perception en 2011
ayant pour objet d’établir un baromètre permettant la mesure et le suivi du niveau de la corruption telle
que perçue par les différents agents économiques, qu’il s’agisse de citoyens, d’entreprises tunisiennes
ou d’opérateurs étrangers installés en Tunisie.
Ce travail a été effectué à travers une enquête auprès d’un échantillon de 250 citoyens par le biais
d’un questionnaire dont les thèmes sont : la perception de la corruption par secteur d’activité, le degré
d’acceptabilité des comportements de corruption, les différentes attitudes face aux pratiques de la
corruption, l’évaluation de l’action du gouvernement en matière de lutte anticorruption et les mesures
anticorruptions.
38 Un guide de l'utilisateur pour mesurer la corruption, PNUD, 2008
28
D’après cette étude, la corruption est considérée comme étant le deuxième problème le plus
important auquel la Tunisie devrait faire face avec un taux de 86% après l’insécurité avec un taux de
92.1%.
Pis, les secteurs les plus touchés par la corruption sont : la police avec un taux de 71.9% qui vient en
première position, suivie des partis politiques et de la douane.
S’agissant de la dynamique de la corruption, l’étude a montré que 36.6% des ménages interrogés
voient que le niveau de corruption est resté le même au cours de cette dernière période, alors que
34.1% affirment que le niveau de corruption a diminué.
Cependant, malgré cette gravité attribuée à la corruption, l’étude montre que le comportement
des citoyens envers ce phénomène est généralement passif (pas de dénonciation, ni de poursuites).
Cela peut trouver une confirmation dans l’étude faite récemment par Hiil-innovation Justice en 2017
qui montre que les tunisiens ne font pas recours en justice pour dénoncer la corruption. Seulement
4% des affaires devant la justice ont pour objet la corruption.
En plus, 31.1% des interrogés considèrent le favoritisme comme forme de corruption comme
acceptable.
Figure 2 : Acceptation de la corruption dans la société tunisienne- IACE-2011
S’agissant des pratiques de la corruption, 89% des interrogés affirment n’avoir jamais fait recours au
versement des pots de vin contre seulement (11%) qui avouent avoir recours à ce comportement.
La quasi-totalité des tunisiens qui ont fait ce genre de versements ne l’ont pas dénoncé aux autorités
parce qu’ils n’ont pas confiance et estiment que les autorités sont passives.
De même, plus que la moitié (56,7%) des citoyens tunisiens croient que le gouvernement tunisien
ne dispose pas d’une politique de lutte contre la corruption contre seulement (15%) qui affirment le
contraire.
29
Figure 3 : Classement de la perception de la corruption par secteur- IACE-2011
Forum des sciences sociales (2014)
D’après l’enquête du forum des sciences sociales, environ la moitié des interrogés croient que la
corruption s’est développée davantage après la révolution tandis que seulement 13.90% pensent que
l’ampleur de la corruption était plus importante avant la révolution. Plus de 36.40% des enquêtés ont
déclaré qu’il n’y a pas un changement visible au niveau de la prévalence de la corruption avant et après
la révolution.
La majorité des répondants croient que la révolution a accentué la corruption, ce postulat
semble être général et adopté par les différentes catégories d’âge. En effet, 48.7% des répondants
âgés de18 à 35 ans pensent que la corruption est plus répandue après la révolution. Ce pourcentage a
atteint 50.7% pour les répondants âgés de 36 à 50 ans, 52.9% chez les répondants âgés de 51 et 65 ans
et 46.1% chez les répondants ayant 66 ans et plus.
Dans la suite de ses résultats, le dernier sondage de Sigma Conseil, Open Sigma 2014, traite du
degré de la réussite de la révolution à atteindre ses objectifs. En effet, seulement 18 % voient que la
révolution a réussi à lutter contre la corruption. De même 43% considèrent que la qualité des services
administratifs s’est détériorée et 51% que la corruption a augmenter après la révolution.39
La majorité écrasante des répondants pensent que la corruption est plus répandue dans le secteur
étatique (79.5%). Seulement 20.50% des répondants croient que la corruption dans le secteur privé
est plus présente que dans le secteur étatique.
Selon la perception des citoyens interrogés, les secteurs d’emploi, les douanes et les impôts
représentent les secteurs les plus corrompus en Tunisie. Près de 79.20% des citoyens trouvent que la
corruption est répandue dans le secteur de l’emploi (notamment les concours) dont 49% croient
qu’elle est très répandue. Environ 40.10% des répondants pensent que la corruption est très
répandue dans les douanes et 37% voient les impôts comme un secteur très corrompu. Plus que 31%
des répondants pensent que la corruption est très répandue chez les forces de l’ordre.
39 Open Sigma 2017 : La Tunisie en chiffres et un digital qui perce !
30
Cependant, les secteurs touristiques et le secteur financier et bancaire sont les moins corrompus
avec respectivement 12.30% et 15% des citoyens qui estiment que la corruption dans ces deux
secteurs est très répandue.
Les pratiques et les formes de la corruption ne cessent de se développer et se diversifier. Selon les réponses des citoyens interrogés, le favoritisme est la forme la plus répandue. En effet, le favoritisme a été jugé par 53% des répondants comme étant une forme très répandue. Environ 39.20% pensent que les pots de vin sont très répandus. Plus de 27.40 % qualifient la prévalence des avances et le harcèlement sexuels comme étant très répandue. L’appartenance régionale et partisane a été citée par environ 21.70% des répondants en tant que forme de corruption très répandue.
Figure 4 : La prévalence de la corruption selon les secteurs Forum sciences sociales (2014)
31
Figure 5 : Forum sciences sociales (2014), les formes de la corruption en Tunisie
ATCP, Petite corruption
L’ATCP s’est focalisée dans son enquête sur la petite corruption déjà définie comme étant la
corruption qui a lieu au niveau de la mise en œuvre des politiques publiques ou «street level
management», autrement dit c’est le moment de rencontre entre les fonctionnaires et les usagers. La
caractéristique principale de la petite corruption est les sommes modestes échangées pour détourner
la réglementation en vigueur et/ou abuser du pouvoir.
L’ATCP affirme dans son étude que 450 Millions de DNT étaient versés par les tunisiens sous forme
de pots de vin en 201340 et que bien que le tunisien perçoive la corruption comme une forme de
décadence morale qui déroge aux principes de la religion, les taux montrent une certaine acceptation
globale de l’acte41 l pour arranger certaines transactions (43%) ou une habitude (39 %).
D’après cette enquête, les tunisiens interrogés voient que les maux de l’administration publique
sont essentiellement le versement des pots de vin (92%) et le favoritisme (93%).
Figure 6 Positionnement de la corruption, ATCAP-La petite corruption p.54
40 En Grèce, le montant de pots-de-vin payé en 2012 est estimé à 420 millions d’euros (National Survey on Corruption in Greece – 2012). 41 Association Tunisienne des Contrôleurs Publics, La Petite Corruption : Le Danger Banalisé. Etude exploratoire sur la perception de la petite corruption en Tunisie, Tunis, p.60
32
Aussi, 77% des interrogés considèrent que la corruption s’est aggravée. 27 % affirment ayant été
directement confronté à la corruption durant l’année 2014. Ce taux est considéré par Transparency
International comme suffisamment élevé pour provoquer l’inquiétude.42
Quant aux secteurs les plus corrompus, il s’agit de :
1- Les services de sécurité : cités par 97 % des répondants dont 85% les considèrent comme très
touchés par la corruption.
2- La douane : citée par 97 % des répondants dont 87 % la considèrent comme très touchée par
la corruption.
3- La justice : citée par 93 % des répondants dont 78 % la considèrent comme très touchée par
la corruption.
4- Les services de santé : citée par 91 % des répondants dont 66 % la considèrent comme très
touchée par la corruption.
5- Les collectivités locales : citées par 91 % des répondants dont 67 % les considèrent comme
très touchées par la corruption.
Dans cette étude, on a essayé de déceler les caractéristiques d’un corrupteur, qui s’est avéré sur la
base des résultats de l’enquête, comme suit :
• Plutôt hommes (64 % des hommes contre 36 % des femmes)
• Relativement jeunes ne dépassant pas 45 ans
• Ayant un revenu plutôt modeste (les catégories de revenus les plus touchées sont les plus
vulnérables : 41% des répondants touchent moins de 400 dinars par mois et 38% touchent un
salaire mensuel compris entre 401 et 800 dinars)
• Relativement peu instruit (la corruption touche dans la majorité des cas des personnes avec
un faible niveau d’instruction puisque 85% des répondants ont un niveau d’instruction
secondaire ou moins).
S’agissant des causes de la petite corruption, il s’agit de 97 % des tunisiens interrogés du manque
de volonté de l’Etat à appliquer les lois. Alors que 96% voient que c’est à cause de la faiblesse des corps
de contrôle. En effet, la simple existence de dispositifs de contrôle et les sanctions prévues par la loi
sont insuffisantes pour influencer le comportement de corruption du fait que c’est leur efficacité et
leur crédibilité qui ont un impact sur le comportement de corruption 43
42 Association Tunisienne des Contrôleurs Publics, La Petite Corruption : Le Danger Banalisé. Etude exploratoire sur la perception de la petite corruption en Tunisie, Tunis, p.57 43 (Lavalée et al, 2010)
33
Figure 7 : les causes de la petite corruption selon les tunisiens, ATCP-p.65
Par ailleurs, 98% des tunisiens interrogés considèrent que la première motivation à la corruption
c’est « l’âpreté matérielle » de l’agent administratif, d’où l’intérêt de travailler sur le côté éthique et
déontologique pour « purifier l’âme de l’agent public ».
Figure 8 : les raisons d’accepter les pots-de-vin chez l’agent public, ATCP- p.70
Selon les données d’une étude récente, la corruption se manifeste essentiellement sous les formes
de pots de vin (90%), de favoritisme (71%), de népotisme (67%), de cadeaux (61%) et d’échange de
services (46%). Les faits de corruption sont perçus comme étant les plus répandus dans les secteurs
suivants : les douanes (63%), les partis politiques (60%), le secteur de la sécurité (56%), les
collectivités locales (56%), les administrations publiques (51%), le secteur de la santé (51%), le secteur
de l’équipement (48%), la justice (47%), l’enseignement (35%) et la recette des finances (34%).
Certains interlocuteurs ont également cité les marchés publics, les services de santé, le secteur
foncier, le secteur minier, les services administratifs et le monde associatif. Environ 78% pensent que
la corruption a beaucoup augmenté depuis 2011. Par ailleurs, 27% des Tunisiens interrogés ont
personnellement vécu une expérience de corruption dont 91% ne l’ont pas dénoncée.
34
2. Enquêtes sectorielles sur la corruption en Tunisie
▪ Le Secteur de l’enseignement supérieur et de l’éducation : Septembre – octobre 2013
Le Forum universitaire tunisien en partenariat avec le PNUD a mené une étude dans l’objectif
d’explorer et d’analyser les perceptions de la corruption des acteurs qui sont directement impliqués
dans les universités tunisiennes à savoir les enseignants, les étudiants et les administrateurs et ce
afin de proposer des recommandations utiles pour prévenir et lutter contre ce phénomène.
L’apport de cette étude réside dans la conceptualisation de la corruption dans le contexte
universitaire tunisien et en plus de l’identification de ses formes, ses manifestations et ses causes
selon l’acteur. En outre, l’étude porte sur le jugement des comportements face à l’acceptation et au
refus de cette pratique.
L’étude a été menée sur quatre phases essentielles qui se présentent comme suit : une phase
préliminaire faite à travers un sondage d’opinion en ligne complétée par une revue de littérature sur le
phénomène de la corruption dans le domaine de l’éducation et de l’université. Puis, une étude
exploratoire qualitative a été effectuée à travers des entretiens semi-directifs individuels et de
groupes qui ont ciblé les différentes parties prenantes du milieu universitaire. Pour pouvoir
généraliser les résultats issus des phases précédentes, une étude quantitative d’envergure nationale
a été menée à travers un questionnaire administré auprès d’un échantillon de 1264 interviewés,
composé de 1004 étudiants, 195 enseignants et 65 administrateurs durant la période septembre –
octobre 2013.
Les résultats obtenus montrent que les principales causes de la corruption, perçues par les
différents acteurs, trouvent leurs origines dans :
• La culture du piston,
• L’absence d’un système de contrôle,
• Les failles du système universitaire,
• L’incompétence de certains responsables et/ou enseignants,
• L’absence de sanction ou de culture de dénonciation.
A l’issue de ces résultats, un ensemble de recommandations a été avancé entre autres :
• Sanctionner les acteurs corrompus,
• Adopter les critères de l’honnêteté et de la compétence au niveau du
recrutement,
• Renforcer le contrôle,
• Mobiliser la société civile afin qu’elle agisse sur ce phénomène en se dotant du rôle de
l’information et de la communication autour de la question de la corruption à l’université.
35
Pour ce qui est des propositions aux instances publiques, la recommandation majeure est celle de la
diffusion de la culture de bonne gouvernance à travers :
• La transparence et l’accès à l’information.
• Une approche participative dans la prise de décision.
• Une évaluation des politiques publiques.
• Une responsabilisation permanente.
▪ Le secteur des concours de la fonction publique
L’accès aux emplois publics et aux responsabilités au sein de l’Etat constitue un domaine de
prédilection pour la prévention de la corruption. En effet, l’application des principes de l’égalité et de
mérite constitue le gage pour fournir à l’appareil étatique des agents intègres et dignes de représenter
l’intérêt général et de fournir des services publics nécessaires pour les citoyens.
Dans ce cadre l’association I-Watch a publié les résultats de son sondage44 auprès des jeunes
tunisiens sur la question de l’intégrité dans les concours de la fonction publique qui a permis aussi de
faire des recommandations dans ce domaine.
La corruption dans les concours de la fonction publique est estimée très élevée par les jeunes
tunisiens. Sur une échelle de 0 à 10, la note attribuée par les jeunes était de 2.1, ce qui montre un
manque de confiance dans les procédures et les conditions dans lesquels l’Etat recrute ses agents
publics.
Figure 9 : degré de la corruption dans les concours de la fonction publique, I-Watch,2014
Les concours sur dossiers avec un taux de 57 % des interrogés est le domaine les plus vulnérable au
favoritisme et au népotisme, suivis par les épreuves orales (21%)
44 I Watch, Perceptions d’intégrité auprès des jeunes tunisiens : sondages d’opinion sur la corruption dans les concours de la fonction publique, 2014
36
Figure 10 : les phases les plus vulnérables dans les concours FP , I-Watch,2014
La cause principale de ce phénomène est d’après les jeunes l’absence de contrôle et de sanctions
dissuasives.
Figure 11 : Causes de la corruption dans les concours, I-Watch 2014
Les relations familiales et connaissances sont la base principale de la corruption dans les concours
publics (85%) suivies des opinions politiques (78%) et les origines sociales (60%).
Figure 12 : les raisons de favoritisme perçues par les jeunes- I-Watch 2014
Même si 60% des jeunes déclarent être prêts à dénoncer la corruption dans les concours publics, il
reste que cette enquête montre une certaine acceptation de la corruption dans les concours publics
de la part de la société tunisienne.
37
▪ Le secteur privé
Dans le dernier rapport de la Banque Mondiale « Doing Business 2017 », la Tunisie a reculé de deux
places du rang 75 en 2016 au rang 77 en 2017 sur 190 pays45 . Ce rapport a mentionné que la qualité
des applications administratives et à l’allégement des procédures de création d’entreprises laisse à
désirer et que « chaque fois qu’il y ait un contact direct avec les fonctionnaires, la transparence de la
procédure est suspectée »46.
Sur la base des résultats de l’enquête sur le climat des affaires et la compétitivité de l’entreprise
pour l’année 2015 47 menée par l’Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives, la
corruption est souvent signalée comme un facteur nuisant au climat des affaires et entravant le bon
développement des activités de l’entreprise. A ce titre, 33% des entreprises enquêtées48 considèrent
la corruption comme contrainte majeure qui porte préjudice à leurs activités (contre 26% en 2014).
Les formes de corruption auxquelles les entreprises privées font face sont : favoritisme/népotisme
(38%), pots de vin (36%), abus administratifs (34%), dysfonctionnements liés aux marchés publics
(14%) et fraude et falsification (7%).
Les payements informels décaissés par les entreprises avaient pour but en 2015 :
- D’accélérer les procédures (64%)
- D’éviter le blocage d’un dossier (53%)
- D’éviter l’application de la réglementation (22%)
- De diminuer les frais à payer (19%)
Il est constaté dans le secteur privé que l’application des lois anti-corruption crée un choc mais ce
dernier n’aura pas d’effet durable. Il faut, dans ce cas, des périodes multiples où le paysage est exempt
de corruption pour retrouver la trajectoire de la faible corruption. Il importe donc, d’accompagner les
mesures anti-corruption par une sensibilisation des entreprises quant à leur position par rapport à la
corruption49.
3. Enquêtes locales sur l’intégrité
La dimension locale a été prise en considération dans quelques enquêtes relatives à la corruption.
En effet, bien que la décentralisation présente une opportunité aux citoyens de se rapprocher des
45 ITCEQ, la Tunisie dans les rapports internationaux relatifs à la compétitivité économique et le climat des affaires, document de travail par OUNI (F.), avril 2017, (en arabe), p.15 46 ITCEQ, la Tunisie dans les rapports internationaux relatifs à la compétitivité économique et le climat des affaires, document de travail par OUNI (F.), avril 2017, (en arabe), p.19 47 ITCEQ, Climat des affaires et compétitivité de l’entreprise : résultats de l’enquête compétitivité 2015, Tunis, septembre 2016. Cette enquête permet, à la fois, d’avoir des données de perception de la corruption ainsi que des données de réalité telle qu’elle est vécue par les chefs d’entreprise interrogés lors de leurs contacts avec l’administrations publique 48 Sur un échantillon de 1200 entreprises privées employant plus de six employés 49 Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives, La corruption dans le secteur institutionnel tunisien : Perception et réalité, Document de travail, Notes et analyses n°45-2016, Novembre 2016
38
pouvoirs de décision et de les impliquer dans la gestion des affaires publiques, elle constitue également
un champ propice au développement de la corruption créant des situations irréversibles50.
1. INS : La perception des citoyens envers la sécurité, libertés et la gouvernance locale en Tunisie
3.3.1.1 Les résultats de l’enquête de l’INS en 2014
L’institut National de la Statistique, dans son enquête sur « La perception des citoyens envers la
sécurité, libertés et la gouvernance locale en Tunisie-2014 », publiée le mois d’octobre 2015, affirme
que « le phénomène de la corruption et de pot de vin est très répondu au niveau local et dans tous les
domaines ». En effet, 50% des personnes interrogées reconnaissent l’existence de la corruption dans
les différentes institutions publiques dans leurs régions.
Les secteurs perçus comme les plus corrompus au niveau local sont classés comme suit : la sécurité
(68%), la santé (67%), les cadres locaux et délégués (entre 62% et 64%), l’éducation (59%).
L’enquête de l’INS attire aussi l’attention sur la corruption dans le secteur privé avec un taux de
58%, ce qui montre que les efforts de lutte contre la corruption ne doivent pas se limiter uniquement
au secteur public, considéré comme plus corrompus par plusieurs études et enquêtes.
Cette enquête cite des exemples de favoritisme comme l’intervention d’un enseignant universitaire
ou un infirmier pour faciliter l’obtention d’un service public.
Le chiffre le plus alarmant qui se dégage au niveau de cette enquête, est que 22 % des citoyens
acceptent, à contre cœur, de payer des pots de vin ou à offrir des cadeaux aux agents publics pour
avoir un service et 6% ne voient aucune objection à le faire.
3.3.1.2. Les résultats de l’enquête de l’INS en 2017
Selon l’enquête de l’Institut National de la Statistique sur « La perception des citoyens envers la sécurité, libertés et la gouvernance locale en Tunisie 2017», publiée en mois de mai 2018 , les citoyens sont toujours convaincus de la prévalence de la corruption et des actes de corruption au niveau local dans la plupart des secteurs. Ainsi, 63,3% affirment l’existence de ce phénomène dans de nombreuses institutions publiques, en plus des transactions suspectes fondées sur la corruption et les actes de corruption dans leur région, ce qui montre une augmentation de 13 points par rapport à 2014. 74.0 %
50 ISF-ASSF-ADDCI, Association ingénieurs sans frontières- Forum des sciences sociales appliqués- Association de Zarzis pour le développement durable et la coopération internationale, Rapport du système local d’intégrité, Gouvernorat de Médenine Municipalité pilote de Zarzis, février 2016,p.3
39
des citoyens considèrent que le phénomène de la corruption et des actes de corruption est l'un des plus grands dilemmes à ce jour.
Le secteur de la santé en termes de perception de la corruption et d’actes de corruption est en tête
de liste des secteurs avec un taux approchant les 63%, suivi du secteur de la sécurité avec 52% et ensuite la douane avec 46,7%. Les taux les plus bas ont été enregistrés dans le secteur bancaire, l’octroi de crédit et le secteur privé.
Concernant les cas de corruption et de malversation avérés et la manière dont les autorités locales
les ont traités, environ 53,9% des citoyens interrogés estiment que que des responsables au niveau régional ne traitent pas sérieusement le sujet par rapport à seulement 10% qui le font sérieusement.
En ce qui concerne la lutte contre la corruption, près de 55.7% des citoyens considèrent que les
efforts faits par l’Etat dans la lutte contre la corruption dans les différents secteurs est inefficace ou sans efficacité aucune.
2. Rapport du système local d’intégrité, Gouvernorat de Médenine Municipalité de Zarzis et de Houmt Souk, 201651
Aussi, dans le cadre de l’évaluation du Système Local d’Intégrité (SLI) dans le Gouvernorat de
Médenine, Association ingénieurs sans frontières- Forum des sciences sociales appliqués- Association
de Zarzis pour le développement durable et la coopération internationale, ont élaboré un rapport du
système local d’intégrité, Gouvernorat de Médenine Municipalité pilote de Zarzis dans l’objectif de
détecter les défaillances du système à travers la détermination des sources possibles de corruption,
mais aussi les mécanismes anti-corruption déjà existants, et d’évaluer leur efficacité52.
Parmi les résultats de cette enquête dans la municipalité de Zarzis, bien que 71.4% des interrogés
se déclarent contre toute pratique de corruption, 50 % refusent de porter plainte même en cas de
détection de la corruption pour la simple raison qu’ils jugent que le personnel de l’administration est
solidaire, et que leur plainte n’aura aucun aboutissement.
De même, l’octroi de permis de bâtir, la gestion des ressources financière de la Municipalité (les
impôts à titre d’exemple), les cahiers de charges des activités (les normes de santé), la gestion du
patrimoine à savoir la gestion des propriétés de la municipalité et la police municipale sont considérés
comme plus exposés à la corruption.
Aussi, l’enquête a révélé plusieurs défaillances au niveau de la municipalité à savoir l’inexistence
des outils de contrôle, de suivi et d’audit interne ce qui permet d’expliquer l’inefficacité du contrôle
ex-ante. L’absence des audits externes périodiques, mais aussi de contrôle ex-post et l’absence de la
société civile ce qui fait accroitre le risque de corruption, et se traduisant par un certain favoritisme et
népotisme dans la réalisation de certains services municipaux.
51 ISF-ASSF-ADDCI et RTE, Réseau Tunisien d’Evaluation 52 Association ingénieurs sans frontières- Forum des sciences sociales appliqués- Association de Zarzis pour le développement durable et la coopération internationale, Rapport du système local d’intégrité, Gouvernorat de Médenine Municipalité pilote de Zarzis, février 2016,p.8
40
Ce constat peut trouver une confirmation dans les résultats d l’enquête réalisé en 2013 sur 7
gouvernorats par l’association Forum des Sciences Sociales Appliquée (ASSF) pour mesurer la
satisfaction des citoyens à l’égard des services municipaux53.
Selon les réponses des citoyens, les services les plus corrompus sont essentiellement les permis de
bâtir, les permis d’exploitation des cafés, et les impôts. En effet, 64 % des interrogés croient que la
corruption est très répandue au niveau de services d’octroi de permis de bâtir, 34.60% d’eux pensent
qu’elle répandue. Pour le service d’octroi de permis de taxi 64% des répondants croient que la
corruption est répandue dans ce service, dont 26% croient qu’elle est très répandue. De même pour
les permis d’exploitation des cafés avec un taux de 60.60%, dont 26.90% pensent que la corruption est
très répandue.
Figure 13 La prévalence de la corruption au sein des services municipaux - Forum des sciences sociales (2014)
Pour la dénonciation de la corruption au niveau local, selon la même enquête, 92.40% du total des
gens qui ont subi des actes de chantages et de corruption ont préféré ne pas déposer de plaintes. Les
raisons de ne poursuivre les agents municipaux en justice sont principalement la banalisation de la
corruption, la crainte de représailles et le manque d’information concernant les démarches à
entreprendre.
En effet, 33% des citoyens qui ont préféré ne pas poursuivre les agents locaux qui les ont faits
chanter l’ont fait parce qu’ils croient que la corruption est devenue une pratique ordinaire qui ne
suscite pas de sanction. Près de 24% d’eux n’ont pas poursuivi les agents locaux corrompus parce qu’ils
ne savent pas à qui s’adresser ni comment entreprendre les démarches nécessaires pour déposer une
plainte. Pour 14.70%, leur décision de ne pas déposer une plainte est justifiée par la crainte des
représailles, 14.30% par la longueur des procédures et 14.10 % par l’absence de preuves.54
53 Forum des sciences sociales appliquées, La corruption au quotidien : Esquisse pour un indice national de perception de la corruption en Tunisie, synthèse d’enquête, Aout 2014, p. 54 Forum des sciences sociales appliquées, La corruption au quotidien : Esquisse pour un indice national de perception de la corruption en Tunisie, synthèse d’enquête, Aout 2014, p.
41
III- Stratégie(s) et lutte contre la corruption en Tunisie
Figure 14 : Les stratégies nationales en rapport avec la lutte contre la corruption
1. L’ITES « La Tunisie en 2025 » : la conditionnalité de l’émergence démocratique et économique par la lutte contre la corruption
L’ITES a développé une étude stratégique et prospective intitulée « La Tunisie en 2025. Un Etat
émergent, résilient et reconcilié avec lui-même » qui a été publiée en janvier 2017.
Cette étude, dans sa version résumée, remise au Président de la République, a posé une vision globale
et stratégique avec différents scénarios de sortie de crise tout en fixant les priorités et les orientations
stratégiques.
Cette étude a préconisé pour instaurer un système démocratique, une condition que ce système doit
fonctionner dans le respect des règles de transparence, de redevabilité, d’intégrité et d’équité,
impliquant un droit d’accès à l’information, l’obligation de rendre compte. Elle signale également «
l’interpénétration » des menaces du terrorisme, du crime organisé et de la corruption et tire l’attention
sur le scénario défavorable si l’Etat trouve une difficulté à mettre en œuvre d’une façon rigoureuse et
efficace une politique de lutte contre la corruption en raison de la montée des lobbies et du
Stratégie nationale de réforme de la fonction publique-
Présidence du gouvernement
Stratégie Nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption (2016-2020) -INLUCC
Stratégie de Modernisation administrative (Administration 2020)-
Présidence du gouvernement
Plan de développement 2016-2020
Axe 1- Bonne gouvernance, réforme administratif et prévention de la corruption- Ministère du développement de l'investissement et de la
coopération internationale
Objectifs de développement durable 2015-2030
ODD16 Paix justice et institutions
Présidence du gouvernement-MDICI
Open GovernmentPartnership OGP
Présidence du Gouvernement
Stratégie Tunisie 2025
ITES
42
corporatisme et sa répercussion négative sur la confiance entre les gouvernées et les responsables
administratifs et politiques55.
Les prérequis présentés dans cette étude pour sortie de la crise sont, essentiellement :
- Restaurer l’autorité de l’Etat en rétablissant la confiance et le fonctionnement normal de
l’administration
- Rendre les institutions plus résilientes (administration, corruption et modernisation)
- Lever les entraves qui font obstacle au développement des entreprises : économie parallèle,
corruption, contrebande et réseaux organisés56
Les orientations à l’horizon 2025, dans ce cadre, sont :
- L’amélioration du fonctionnement du système administratif notamment à travers la lutte
contre la corruption
- La rationalisation du fonctionnement des institutions de lutte contre la corruption à travers
une répartition claire de leurs rôles et attributions
Plusieurs actions sont citées pour attendre la vision tracée, notamment :
- La mise en place de l’IBOGOLUC
- Le renforcement de la volonté de lutte contre la corruption et la promotion de la culture de la
bonne gouvernance
- L’exécution des décisions de justice
- La redevabilité des agents publics
2. Le plan de développement 2016-2020 : la bonne gouvernance, axe primordial pour le développement économique et social
Le pouvoir législatif en Tunisie vient d’approuver tardivement le plan de développement 2016-
202057 tout en indiquant que le gouvernement présentera à partir de l'année 2017 à l'assemblée des
représentants du peuple, dans le cadre du budget économique, un rapport annuel sur l'état
55 Institut Tunisien des Etudes Stratégiques, La Tunisie 2025 : un Etat émergent, resilient et reconcilié avec lui-même, Etude stratégique et prospective, janvier 2017, p.65 56 Elément mentionnée aussi dans la note d’orientation du plan de développement 2016-2020, p. 13
43
d'avancement de la mise en œuvre du plan et les perspectives de la poursuite de son exécution, assorti
de propositions concernant les ajustements nécessaires à la lumière de l'évolution de la situation
économique.
Le plan de développement a placé la bonne gouvernance comme axe prioritaire et déterminant pour
l’amélioration d l’investissement et des conditions de vie en Tunisie.
La note d’orientation dudit plan de développement a fixé les axes prioritaires suivants pour lutter
contre la corruption :
- L’adoption d’un plan national de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption et la mise
en place d’un système de suivi et d’évaluation parallèlement à l’évaluation faite par la société
civile
- L’établissement de l’IBOGOLUC
- Le renforcement du cadre juridique et réglementaire et de l’indépendance de la justice
- La consécration de l’accès à l’information pour promouvoir la participation citoyenne aux
affaires publiques
- La coordination entre l’exécutif et le législatif pour accélérer les délais de prise de décisions
dans l’intérêt du citoyen et de l’entreprise
Le budget économique 2017, publié en novembre 2016, a actualisé les données contenues dans le plan
de développement et a constaté l’état d’avancement des projets. Parmi les éléments cités dans le
budget économique, en rapport avec la lutte contre la corruption, il s’agit de reformer les mécanismes
de contrôle de l’administration en migrant vers le contrôle a posteriori et en consolidant
l’indépendance fonctionnelle des organes de contrôle, en plus de la publication des rapports de
contrôle selon la réglementation en vigueur.
3. L’ODD 16 : un engagement international de la Tunisie pour la gouvernance
La Tunisie est parmi les cinq pays pilotes à l’échelle mondiale qui viennent d’entamer un processus
de contextualisation de l’objectif de développement durable en matière de gouvernance (ODD 16)58.
Il s’agit des objectifs de développement durable adopté par l’ONU qui sont au nombre de 17 objectifs
de développement durable dont l’ODD 16 portant sur « Promouvoir l’avènement de sociétés
57 Loi n° 2017-28 du 25 avril 2017, portant approbation du plan de développement (2016-2020)
58 Présidence du Gouvernement, Elaboration d’un objectif de développement durable en matière de gouvernance, novembre 2014
44
pacifiques et ouvertes aux fins du développement durable, assurer à tous l’accès à la justice et mettre
en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes.
Un processus de réflexion a commencé au niveau global, régional et national pour définir de nouveaux
objectifs du DD 2016-2030.
C’est dans ce contexte global et en s’inspirant de l’initiative mondiale « le Monde que nous voulons »
que le gouvernement Tunisien a lancé la consultation nationale. Cette consultation a débouché sur 12
priorités parmi lesquelles la nécessité d’instaurer une meilleure gouvernance en Tunisie.
Les cibles de l’ODD 16 en relation direct avec la lutte contre la corruption sont les suivantes :
- D’ici à 2030, réduire sensiblement les flux financiers illicites et le trafic d’armes, renforcer les activités
de récupération et de restitution des biens volés et lutter contre toutes les formes de criminalité
organisée :
- Réduire sensiblement la corruption et la pratique des pots-de-vin sous toutes leurs formes
- Mettre en place des institutions efficaces, responsables et transparentes à tous les niveaux
Les autres cibles contribuent indirectement à la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption.
Objectif 16 : Promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et
ouvertes aux fins du développement durable, assurer à tous l’accès
à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions
efficaces, responsables et ouvertes
Cibles
16.1 Réduire sensiblement, partout dans le monde, toutes les formes
de violence et les taux de mortalité qui y sont associés
16.2 Mettre un terme à la maltraitance, à l’exploitation, à la traite, à
toutes les formes de violence et de torture dont sont victimes les
enfants
16.3 Promouvoir l’état de droit aux niveaux national et international
et assurer à tous l’accès à la justice dans des conditions d’égalité
16.4 D’ici à 2030, réduire sensiblement les flux financiers illicites et le
trafic d’armes, renforcer les activités de récupération et de restitution
des biens volés et lutter contre toutes les formes de criminalité
organisée
16.5 Réduire sensiblement la corruption et la pratique des pots-de-vin
sous toutes leurs formes
16.6 Mettre en place des institutions efficaces, responsables et
transparentes à tous les niveaux
16.7 Faire en sorte que le processus de prises des décisions soit souple,
ouvert à tous, participatif et représentatif à tous les niveaux
45
16.8 Élargir et renforcer la participation des pays en développement
aux institutions chargées de la gouvernance au niveau mondial
16.9 D’ici à 2030, garantir à tous une identité juridique, notamment
grâce à l’enregistrement des naissances
16.10 Garantir l’accès du public à l’information et protéger les libertés
fondamentales, conformément à la législation nationale et aux
accords internationaux
16.a Appuyer, notamment dans le cadre de la coopération
internationale, les institutions nationales chargées de renforcer, à
tous les niveaux, les moyens de prévenir la violence et de lutter contre
le terrorisme et la criminalité, en particulier dans les pays en
développement
16.b Promouvoir et appliquer des lois et politiques non
discriminatoires en matière de développement durable
4. La Stratégie Nationale de Bonne Gouvernance et de lutte contre la corruption
4.1 . Genèse de la SNBGLCC
Les prémisses de l’actuelle stratégie nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la
corruption (2016-2020) ont commencé depuis 2012. Face à la nécessité de mettre en commun les
efforts nationaux en matière de lutte contre la corruption, une feuille de route nationale pour
l’élaboration d’une vision partagée de lutte contre la corruption en Tunisie a vu le jour en juillet 2012
pour être annoncée en décembre de la même année.
Elle comprend quatre axes majeurs :
1. La construction des piliers du Système National d’Intégrité par le développement des institutions,
des réglementations et des dispositifs en rapport avec la maîtrise de la corruption en Tunisie ;
2. L’accompagnement de l’Instance Nationale de Lutte contre la Corruption dans la définition claire
de ses principes, de ses attributions, et du périmètre d’intervention de ses capacités réelles et
effectives ;
3. Le renforcement des aptitudes des acteurs et, en particulier, la société civile, engagée dans les
fonctions de vigilance, de lobbying et d’expertise sur la problématique de la lutte contre la
corruption ; et
4. La consolidation d’un processus d’élaboration du cadre stratégique de lutte contre la corruption
en lui assurant sa pérennité par des mécanismes de coordination, coopération et communication
au sein des diverses parties prenantes.
46
Figure 16 : Processus de l’adoption de la SNBGLC
En décembre 2012, le gouvernement a lancé sa « Vision partagée de la lutte contre la corruption »
qui constitue une première étape vers une stratégie nationale de lutte contre la corruption59. Entre
janvier 2013 et avril 2014, les efforts se sont concentrés pour élaborer un projet de stratégie nationale
de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption selon une approche inclusive et participative.
Un premier projet de stratégie nationale a vu le jour sous l’égide du Ministère de la gouvernance
et de la lutte contre la corruption en collaboration avec le PNUD et présenté le 9 décembre 2013 à
l’occasion de la journée internationale de lutte contre la corruption.
Un deuxième projet a été élaboré pour ledit Ministère mais selon une autre approche en mars 2016.
En parallèle des discussions ultérieures et des efforts se sont déployés pour de relancer le processus
de finalisation du projet de stratégie nationale.
Il convient de noter à cet égard que les objectifs constitutionnels de bonne gouvernance ne
pourraient être réellement poussés de l’avant sans une approche stratégique intégrée qui engage les
acteurs publics concernés, la société civile et les médias.
59 Voir BAHRI (T.), Gouvernance et lutte contre la corruption en Tunisie, RTAP, CERA, ENA de Tunis, n°1, juin 2013, pp. 205-210
Figure 15
Signature de la charte de la mise en oeuvre du plan d'actions de la SNBGLCC
(9 décembre 2016)
Stratégie nationale de Bonne gouvernance et de lutte contre la corruption 2016-2020
Plan national de la fonction publique, la gouvernance et la lutte contre la corruption ( Avril 2016)
Premier projet de SNBGLCC
(9 décembre 2013)
Elaboration d'une stratégie nationale de Bonne Gouvernance et de Lutte Contre la Corruption (janvier 2013-avril 2014)
Vision patagée de lutte contre la corruption
(décembre 2012)
Feuille de route nationale
pour une vision partagée de lutte contre la corruption (juillet 2012)
47
Ce parcours de « Titan » a connu une consécration le 9 décembre 2016 par l’adoption de la charte
de la mise en œuvre de la Stratégie nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.
Sous le haut patronage du Président de la République, la Charte de la Stratégie Nationale de Bonne
Gouvernance et de Lutte contre la Corruption 2016-2020 (SNBGLCC) a été signée le 9 décembre 2016
par le Chef du gouvernement, le président de l’INLUCC, le vice-président de l’Instance provisoire de la
justice judiciaire et le président du syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT).
But V: Améliorer les outils de travail et renforcer les capacités des parties prenantes en matière de bonne
gouvernance et de lutte contre la corruption
Clarifier et coordonner
les rôles des différents acteurs publics
intervenants dans le
domaine de la bonne gouvernance et de la
lutte contre la corruption
But VI
Améliorer la
transparence et l’accès à l’information dans
l’organisation du service
public et la gestion des ressources et des
dépenses publiques
But III
Encourager la
participation citoyenne active dans les efforts de
l'Etat en faveur de la
bonne gouvernance et la lutte contre la corruption
But II
But IAffermir la volonté politique en insufflant une dynamique
de changement dans le domaine de la bonne gouvernance et la
lutte contre la corruption
Renforcer
l’imputabilité/responsabilité pour empêcher
l’impunité et assurer
l’égalité de tous les citoyens devant la loi
sans discrimination
But IV
Figure 17 : Les 6 initiatives stratégiques de la SNBGLC
48
4.2 . Composantes de la SNBGLC
Les six objectifs principaux de la SNBGLC sont :
1. Affermir la volonté politique en insufflant une dynamique de changement dans le domaine de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption
2. Encourager la participation citoyenne active dans les efforts de l'Etat en faveur de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption
3. Améliorer la transparence et l’accès à l’information dans l’organisation du service public et la gestion des ressources et des dépenses publiques
4. Renforcer l’imputabilité/responsabilité pour empêcher l’impunité et assurer l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans discrimination
5. Améliorer les outils de travail et renforcer les capacités des parties prenantes en matière de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption
6. Clarifier et coordonner les rôles des différents acteurs publics intervenants dans le domaine de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption
Un plan d’action est validé et s’étalera sur 2 ans et se basera sur des plans d’action semestriels. Un premier plan d’action pour la période 2017-2018 comportant notamment des actions, des acteurs responsables et concernés et des indicateurs prévoit des mécanismes de suivi dont le Comité National formé par l’ensemble des représentants ayant participé à l’élaboration du plan d’action et la Commission Nationale créée par le Comité National qui sera en charge du pilotage, coordination et suivi de la SNBGLCC.
Ce comité national a été remplacé par un système de pilotage de la stratégie comprenant trois sous-comités : un sous-comité stratégique, sous-comité suivi et évaluation et un sous-comité communication
Ces différents sous-comités incluent des représentants des ministères, des représentants de l’INLUCC, du secteur privé, de la société civile, des médias ainsi que des personnalités académiques.
4.3 . La SNBGLC et l’arsenal juridique de la lutte contre la corruption en Tunisie : les prémices d’une synergie à renforcer
Il est à rappeler que les efforts de lutte contre la corruption (tels que exposés ci-dessus) ont commencé bien avant l’adoption de la nouvelle constitution en janvier 2014. Cela n’empêche que
49
la consécration dans cette norme suprême de la volonté du Constituant, de lutter contre la corruption, a corroboré les efforts et facilité la mise en place de la SNBGLC.
En effet, la nouvelle Constitution établit des principes et des institutions qui garantissent un niveau d’intégrité et de Gouvernement Ouvert compatible avec les exigences des conventions internationales et autres instruments qui peuvent être résumes comme suit :
• L’article 10 de la constitution affirme que l’État tunisien doit établir des mécanismes pour lutter contre la corruption.
• L’article 15 affirme que l’administration publique doit être soumise à des règles de transparence et d’intégrité.
• L’article 32 garantit le droit d’accès à l’information pour tous les citoyens tunisiens.
• L’article 117 affirme que le rapport annuel de la Cour des comptes doit être présenté au président de l’Assemblée nationale, au chef du gouvernement et au président de la République, et rendu public.
• L’article 130 donne un statut constitutionnel à l’Instance nationale de lutte contre la corruption, ce qui représente un progrès significatif dans la réduction de la vulnérabilité potentielle des institutions qui travaillent dans le domaine de la transparence et de la lutte contre la corruption
Il convient de noter également qu’un nombre important de textes sont adoptés en matière de lutte contre la corruption. En dehors des textes ayant créé des structures spécialisées, il faut mentionner tous les textes qui ont créé un cadre juridique tourné vers la lutte contre la corruption en l’espace de cinq ans :
• Décret-loi n°2011-7 du 18 février 2011 portant création de la commission nationale d’investigation sur la corruption et la malversation ;
• Décret-loi n°2011-41 du 26 mai 2011 relatif à l’accès aux documents administratifs des organismes publics, modifié par le décret-loi n°54 du 11 juin 2011 ;
• Décret-loi n°2011- 87 du 24 septembre 2011 portant organisation des partis politiques
• Décret-loi n°2011-88 du 24 septembre 2011 portant organisation des associations ;
• Décret-loi n°2011- 91 du 29 septembre 2011 relatif aux procédures et au fonctionnement du contrôle de la cour des comptes sur la campagne électorale ;
• Décret n°2014-1039 du 13 mars 2014 portant réglementation des marchés publics ;
• Décret n°2014-4030 du 3 octobre 2014 portant approbation du code de conduite et de déontologie de l’agent public ;
• Décret-loi n°2014-4566 du 31 décembre 2014 portant ratification d’un mémorandum d’entente portant instauration d’un mécanisme de communication entre l’administration
50
publique et le secteur privé dans le domaine du développement du climat administratif des affaires « Agenda National des affaires » ;
• Décret n°2016-1072 du 12 août 2016, portant modification du décret n°1993-147 du 18 janvier 1993 portant création de l’équipe du « Citoyen superviseur »
• Décret n° 2018- 417 du 11 mai 2018 relatif la liste des activités soumises à l’autorisation et la liste des autorisations administratives pour réaliser le projet, les délais, les procédures et les conditions de leur octroi
• Loi organique n° 2015-26 du 7 août 2015 relative à la lutte contre les infractions terroristes et la répression du blanchiment d’argent
• Loi organique n° 2016-77 du 6 décembre 2016 relative au Pôle judiciaire économique et financier
• Loi organique n° 2017-10 du 7 mars 2017 relative à la dénonciation de la corruption et à la protection des donneurs d’alerte
• Loi organique n°2018-35 du 29 mai 2018 relative à la responsabilité sociétale des entreprises
• Loi n° 2018-46 du 1 août 2018, portant déclaration des biens et des intérêts, de la lutte contre l'enrichissement illicite et le conflit d'intérêt dans le secteur public
51
IV- Pilotage institutionnel de la lutte contre la corruption en Tunisie
La politique de la lutte contre la corruption se base en premier lieu sur les moyens préventifs
développés par les organes de contrôle surtout et les inspections. Mais elle est fondée en aval sur la
répression à travers les organes chargés du respect de la loi et le pouvoir judiciaire. Différentes
institutions et structures interviennent à des échelles multiples, directement ou indirectement, pour
la prévention et la répression de la corruption.
La panoplie d’institutions et de structures intervenants dans la mise en œuvre de la stratégie nationale
de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption offre parfois l’image d’un éparpillement
institutionnel voir même une multitude institutionnelle sans efficacité fonctionnelle.
La SNBGLC a intégré cette donne institutionnelle que ce soit pour renforcer les capacités d’institutions
de lutte contre la corruption (exemple, Cour des compte, INLUCC) que ce soit pour réorganiser des
structures existantes (ex. corps de contrôle).
Il est possible de distinguer, dans ce cadre, et selon les missions imparties, les structures d’impulsion
et de coordination, les structures spécialisées transitionnelles et permanentes, les structures de
contrôle et d’inspection, et les structures juridictionnelles.
Figure 18 : Les Institutions et organismes responsable de la prévention, la détection et la répression de la corruption
52
1. Les structures d’impulsion et de coordination en matière de la lutte contre la corruption
1.1. Conseil supérieur de lutte contre la corruption et de recouvrement des avoirs et biens de l’Etat
Le Conseil supérieur de lutte contre la corruption et de recouvrement des avoirs et biens de
l'État a été créé par le décret n° 1425 du 31 aout 201260. Le Conseil supérieur est un organisme
consultatif de coordination, créé pour prolonger le travail des divers comités et organismes chargés
de recouvrer les biens publics et les avoirs mal acquis sous l’ancien régime. Son comité consultatif est
en particulier chargé de suivre et de coordonner les différents programmes du gouvernement en
matière de lutte contre la corruption, de proposer des solutions aux différents problèmes rencontrés
par ces entités, en suggérant des mécanismes juridiques pour permettre un bon fonctionnement. Il
doit aussi faire des propositions pour assurer une gestion adéquate des propriétés et des biens
confisqués. Sous le précédent gouvernement provisoire, ce conseil était présidé par le Premier
ministre et comprenait les ministres de la Gouvernance et de la Lutte contre la corruption, de la
Justice, de l’Intérieur, des Affaires étrangères, de l’économie et des Finance, des Droits de l’homme
et de la justice transitionnelle, et des Domaines de l’État et des affaires foncières, mais aussi les
chefs des Instance nationale de la lutte contre la corruption, du Comité national de recouvrement des
biens mal acquis, de la Commission nationale de Gestion des avoirs et des fonds objets de confiscation
ou de récupération en faveur de l’État, mais aussi cinq membres nommés et un représentant de la
société civile.
Il a été rapporté que le Conseil supérieur de lutte contre la corruption et de recouvrement des avoirs
et biens de l’Etat s’était peu réuni.
1.2. Le « Ministère » de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption
Après les premières élections législatives d’octobre 2011, un poste de Ministre en charge de la
gouvernance et de lutte contre la corruption auprès du chef du gouvernement a été créé en février
2012 démontrant l’engagement du gouvernement à lutter contre la corruption61.
Aussi, Un département chargé de la bonne gouvernance à la présidence du gouvernement (entre 2013
et début 2016) a assuré la coordination des différents dossiers interministériels en rapport avec la
gouvernance et la lutte contre la corruption.
En 2014, sous le gouvernement des technocrates de Mehdi JOMÂA, produit de l’institution du dialogue
national, le poste de ministre en charge de la gouvernance et de la lutte contre la corruption est
transformé en secrétariat d’Etat de la fonction publique et de la Gouvernance, toujours sous la
houlette du chef du gouvernement et en supprimant toute référence à la lutte contre la corruption.
60 Modifiant le décret n°2010-3080 du 1er décembre 2010, portant création des conseils supérieurs. 61 GIZ, La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) en Tunisie. Etats des lieux, novembre 2012, p.
53
Suite au remaniement ministériel de janvier 2016, un nouveau ministère de la Fonction publique, de
la Gouvernance, et de la lutte contre la corruption a été créé. Le décret gouvernemental n°2016-271
du 2 mars 2016 fixe ses missions et les structures qui y sont rattachées. Toutefois, le
« Gouvernementd’Union Nationale » mis en place fin août 2016 comprend 26 portefeuilles
ministériels, dont un Ministère de la fonction publique et de la gouvernance, qui est cette fois
autonome et indépendant de la Présidence du Gouvernement.
Mais département ministériel n’a pas pu être durable dans l’architecture gouvernementale et le
schéma politique et administratif a été supprimé et ses structures ont été absorbées par la Présidence
du Gouvernement en vertu du décret n°468 du 10 avril 2017.
Depuis cette date et jusqu’en novembre 2018, seul le poste d’un Conseiller auprès du Chef du
Gouvernement en charge de la fonction publique et de la gouvernance est consacré, avec toujours un
département pour la coordination qui n’a pas encore une existence dans l’organigramme officielle de
la Présidence du Gouvernement.
1.3. Les cellules de bonne gouvernance
Toutes les structures de l’Etat ont été invitées par la circulaire 16 du 27 mai 2012 à mettre en place
des cellules gouvernance dans toutes les organisations publiques à tous les niveaux. Cette circulaire a
été récemment érigée en décret afin de confirmer la création légale de ces cellules et de pallier aux
irrégularités juridiques qui entachaient leur création.
D’après l’article 5 du décret susmentionné, ces cellules de gouvernance jouissent d’un large spectre
de compétences dont notamment :
- « veiller à la bonne application des principes de la gouvernance et de la prévention de la
corruption au sein de la structure dont elle relève, conformément au cadre législatif et réglementaire
en vigueur,
- œuvrer et participer à l'élaboration des programmes, stratégies nationales et sectorielles et
les plans d'action afin de consacrer la gouvernance et la prévention de la corruption, assurer leur bonne
mise en œuvre et évaluation selon des critères et indicateurs relevant de ce domaine, surtout en ce
qui concerne l'accès à l'information et la dénonciation des pratiques de corruption,
- diffuser la culture de gouvernance, de transparence, les valeurs d'intégrité et de bonne
conduite ainsi que veiller sur le respect des codes de conduite et de déontologie et la bonne application
des manuels de procédures,
- prendre en charge les cas de dénonciation et leur suivi, en veillant au respect du secret
professionnel et la non-divulgation de l'information en attendant les résultats de l'enquête,
- suivi des dossiers de corruption notamment en ce qui concerne les mesures prises, le sort de
l'affaire et les statistiques qui lui sont relatifs, qu'ils soient dans une situation d'audit ou objet d'une
mission de contrôle »
Après la promulgation de la loi organique n°2017-10 du 7 mars 2017 relative à la dénonciation de la
corruption et à la protection des dénonciateurs, le problème s’est posé pour accepter la compétence
attribuée antérieurement par le décret en matière de protection des dénonciateurs surtout que le
texte de la loi organique n’a pas désigné expressément les cellules, surtout que l’article 7 de cette loi
54
laisse la latitude aux organismes publics de fixer la structure en charge de la protection des
dénonciateurs.
D’un autre côté, les cellules de gouvernance, offre une opportunité pour assurer la coordination
interinstitutionnelle pour harmoniser les efforts et la mission de prévention et de détection de la
corruption. D’ailleurs, l’article 5 l’a chargé expressément de « coordonner avec les structures chargées
de l'éthique professionnelle, la qualité, les relations avec le citoyen et l'administration électronique
pour tout ce qui a trait aux attributions essentielles des cellules ». Cela corrobore le mécanisme conçu
dans le décret consistant à créer au sein de chaque cellule de gouvernance « une Commission de
Gouvernance » qui regroupe les métiers suivants : la réforme administrative, la qualité, l'éthique
professionnelle, les relations avec les citoyens, l'administration électronique.
1.4. La commission de la réforme administrative, de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption et de la gestion des deniers publics
En vertu l’article 59 de la Constitution tunisienne, l’organisation interne de l’ARP se décline en neuf
commissions permanentes et neuf commissions spéciales. Les commissions, permanentes ou
spéciales, sont composées de 22 membres d’après l’article 64 du règlement intérieur de l’ARP62. Parmi
les commissions spéciales, on décompte la Commission de la Réforme administrative, de la bonne
gouvernance et la lutte contre la corruption et de la gestion des deniers publics. Cette commission est
chargée du suivi de tous les dossiers et questions relatifs à la corruption. Elle est chargée du suivi du
dossier des biens détournés et de gestion des biens confisqués, en plus du dossier de l’audit des
banques publiques et des établissements publics. Elle est aussi chargée du suivi de la modernisation
de l’administration et de la réforme de la fonction publique.
En plus, l’article 59 de la Constitution permet dans son deuxième paragraphe de constituer des
commissions d’investigation et enjoint à tous les pouvoirs de les aider à accomplir leur mission.
L’efficacité de ces commissions reste douteuse à cause de la représentation proportionnelle qui dicte
sa composition et la répartition des responsabilités et qui va permettre au parti ou à la coalition au
pouvoir d’avoir le dernier quand il est question de contrôler le gouvernement.
La commission parlementaire précitée n’est ni une commission législative permanente ni une
commission d’enquête. Ses travaux et recommandations ne se traduisent pas par des rapports
ponctuels mais font l’objet d’un rapport d’activité à la fin de chaque session parlementaire, ce qui
atténue l’écho médiatique que pourrait recevoir de sa part le traitement approfondi d’un sujet ayant
trait à la corruption. Par ailleurs, cette instance ne pouvant faire œuvre de législation qui est du ressort
des commissions permanentes ni se concentrer sur des faits particuliers pouvant faire l’objet
d’investigations comme une commission d’enquête, d’où la crainte que son action ne permette pas de
62 Règlement de l’assemblée des représentants du Peuple du 2 février 2015
55
relayer, voire de stimuler ou de contester l’action ou le cas échéant le manque de réactivité des
structures compétentes du pouvoir exécutif.
2. Les structures spécialisées de la lutte contre la corruption
2.1. Les structures transitionnelles d’enquête et de lutte contre la corruption
Dans le contexte du processus de transition, des instances spécifiques ont été créées et des mesures
concrètes ont été prises :
2.1.1. La Commission nationale d'investigation sur la corruption et la malversation (Commission Amor)
Créée par le Décret n°2011-7 du 18 février 2011, la commission comporte un Comité général
« chargé de l’examen des orientations fondamentales ayants trait à l’activité de la commission et
de l’identification des stratégies d’avenir afin de lutter contre la corruption et la malversation » (article
2) et un Comité technique « chargé de dévoiler les cas de corruption et de malversation commis par
ou pour le compte de toute personne physique et ou morale, publique ou privée ou un groupe de
personnes grâce à son poste dans l’État ou l’administration ou en raison d’un lien de parenté ou
d’alliance ou n’importe qu’elle autre relation qu’elle que soit sa nature avec un responsable ou un
groupe de responsables de l’État notamment durant la période allant du 7 novembre 1987 au 14
janvier 2011 » (article 3).
Le comité pouvait procéder à des actes de perquisition et de saisie de documents et biens. En présence
de preuves sérieuses concernant des infractions de corruption et de malversation, le président de la
commission pouvait, sur délibération du comité technique, demander aux autorités compétentes de
prendre les mesures conservatoires adéquates. La commission avait accès à toute information utile
nonobstant tout secret professionnel qui était réputé inopposable.
La commission Amor a regroupé plusieurs sous-commissions techniques spécialisées notamment en
matière des finances et des marchés publics, des affaires fiscales et douanières, de la privatisation et
des entreprises publiques, des affaires foncières et des terres domaniales et de traitement des plaintes
signalées par les citoyens.
Durant son mandat, la Commission a pu recevoir et traiter près de 10 000 cas ou affaires de corruption
présumée. Elle en a déféré un nombre très limité – moins de 5% – au Parquet. Elle a élaboré et soumis
un certain nombre de projets de loi ayant trait, notamment, à la protection des informateurs, à
l’abolition de prescription pour les dossiers de corruption, et à la création de l’Instance nationale de
lutte contre la corruption.
56
2.1.2. La Commission de la vérité et de la dignité
La Commission de la vérité et de la dignité (IVD) est créée en vertu de la loi organique n°2013-53 du
24 décembre 2013 relative à l’instauration de la justice transitionnelle et à son organisation. Son
règlement intérieur est fixé par l’arrêté de la présidente de l’IVD n°2014-1 du 22 novembre 2014 relatif
au règlement intérieur de l’IVD.
Cette commission est chargée de veiller sur le processus de la justice transitionnelle qui comprend
d’après l’article 14 de ladite loi organique « la réforme des institutions (visant) à démanteler le système
de corruption… et que soit consacré l’Etat de droit ».
Cette loi évoque « la corruption financière (article 45) et de la mauvaise gestion des deniers publics
(article 43) et ne traite pas d’autres formes de la corruption qu’indirectement, en évoquant la nécessité
de réformer les institutions impliquées dans la corruption de manière à garantir que le violations ne se
reproduisent pas.
Deux organes au niveau de l’IVD interviennent dans les affaires de corruption :
- La Commission d'Arbitrage et de conciliation63 qui examine les demandes de transaction se
rapportant aux dossiers de corruption financière. Elle est saisie sur la base d’une convention
d’arbitrage et de conciliation, et ce :
• à la demande de la victime y compris l’Etat ayant subi un préjudice.
• avec l’approbation de l’Etat dans les cas de corruption financière, si le dossier porte sur les
deniers publics ou sur les fonds des établissements dans lesquelles l'Etat détient une
participation directe ou indirecte au capital.
• sur transmission de l'instance nationale de lutte contre la corruption, sur la base d'une
convention d'arbitrage et de conciliation entre les parties concernées.
- La commission de l’examen fonctionnel et de la réforme des institutions64 qui est investie
notamment des missions suivantes :
• Présenter des propositions pratiques en vue de réformer les institutions impliquées dans la
corruption et les violations,
• Présenter des propositions en vue de filtrer l’administration et tous les secteurs nécessitant
un filtrage.
2.1.3. La commission de confiscation
Cette commission est créée auprès du Ministère des finances en vertu du décret-loi n°2011-15 du 14 mars 2011
2.1.4. Le Comité national du recouvrement des biens mal acquis existants à l’étranger (décret-loi n°2011-15 du 26 mars 2011) ;
Depuis la révolution de 2011, le constat est unanime, les pouvoirs publics se plaignent « qu’en matière
de coopération internationale dans la lutte contre la corruption, le soutien international dans le
63 Article 45 de la loi organique n°2013-53 du 24 décembre 2013 relative à l’instauration de la justice transitionnelle et à son organisation 64 Article 43 de la loi organique n°2013-53 du 24 décembre 2013 relative à l’instauration de la justice transitionnelle et à son organisation
57
recouvrement des biens acquis illégalement n’a pas toujours été à la hauteur des espérances de la
Tunisie ».
Pour améliorer les résultats, un comité national du recouvrement des biens mal acquis existant à
l’étranger en vertu du décret-loi n°2011-15 du 26 mars 2011. Le comité est créé auprès de la banque
centrale de Tunisie, et il coordonne et, le cas échéant, conduit les procédures de recouvrement des
biens transférés, acquis, détenus ou contrôlés, directement ou indirectement, à l’étranger et dans des
conditions illégales par l’ancien président Ben Ali et sa famille et autres personnes ayant bénéficié de
ces transferts.
Il n’y a pas des statistiques consolidés sur les le recouvrement sauf quelques informations éparpillés
dans des rapports des organisations internationales et la presse écrite. A titre d’illustration, la
fédération helvétique a ordonné le gel de plus de 68 millions de dollars dans ses banques. Le 16
décembre 2011, l’unité de coopération judiciaire de l’Union européenne (Eurojust) a été sollicitée et
coordonne la recherche d’actifs de l’ancien Président. L’Union européenne a annoncé qu’elle allait
restituer aux autorités tunisiennes « les fonds détournés » par les anciens dirigeants, qu’elle avait gelés
au moment du « printemps arabe »65.
2.1.5. La Commission nationale de gestion des avoirs et des fonds objets de confiscation ou de récupération en faveur de l’Etat
Cette commission est créée en vertu du le décret-loi n°2011-68 du 14 juillet 2011 auprès du Ministère
des finances. En vertu de l’article 2 de ce décret, elle est chargée de :
- prendre toutes les mesures relatives aux droits et obligations liés aux valeurs mobilières et parts et
titres objets de confiscation ou de récupération,
- la gestion de portefeuille des valeurs mobilières et droits y rattachés, des parts et titres et des biens
meubles et immeubles objet de confiscation ou de récupération…
Son rôle est déterminant en matière de lutte contre la corruption car elle donne un signal positif de
l’engagement politiquer pour restituer les biens mal acquis. En plus les résultats de ses travaux
confortent le grand public pour le bon déroulement du processus de confiscation. Au fait, les
statistiques disponibles parlent de 544 entreprises, 148 voitures, 480 biens fonciers, et des titres
dépassant les 65 mille, outre les portefeuilles financiers. Selon l’ancien Ministre des finances, Slim
Chaker, 153 de l'ensemble de 544 entreprises confisquées sont des coquilles vides et que l'Etat détient
moins que 50% dans le capital de 203 sociétés, ce qui signifie, selon lui, qu'il n'existe en réalité que 244
sociétés concernées par la vente dont 7 ont été déjà vendues et ont engendré des recettes de l'ordre
de 1375 millions de dinars pour les caisses de l’Etat. 64 sociétés sont entre les mains d'El Karama
65 OCDE-Sigma, Evaluation du cadre d’intégrité dans le secteur public en Tunisie, décembre 2012, p.17
58
holding et 184 autres sont chez les administrateurs judiciaires pour manque de documents ou de
bilans.
Il a ajouté que la vente des biens confisqués a rapporté aux caisses de l'Etat, depuis l'année 2011
jusqu'à la fin de l'année 2015, la somme de 998 millions de dinars
Un site internet www.confiscation.tn est dédié pour suivre l’avancement des travaux de cette
commission.
2.2. Les structures permanentes de lutte contre la corruption
2.2.1. L’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC)
L’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) a été instaurée en vertu de l’article
12 du Décret-loi cadre n°2011-120 du 14 novembre 2011 relatif à la lutte contre la corruption. Se
substituant à la commission Amor66 (voir plus bas), l’Instance est l’acteur principal en matière de
prévention et de lutte contre la corruption qui se charge notamment de l’enquête, la sensibilisation et
la coordination. Elle peut proposer des politiques de lutte contre la corruption et leur suivi, édicte les
principes d’orientation générale, donne son avis sur les projets de textes législatifs et réglementaires
relatifs à la lutte contre la corruption, réunit des données relatives à la corruption, facilite la
communication et l’interaction entre acteurs concernés, et diffuse une culture anti-corruption par des
campagnes de sensibilisation, publications et formations.
L’Instance ne se substitue à aucun autre corps de contrôle existant car si elle reçoit des plaintes et
dénonciations sur les cas de corruption et enquête à leur propos, elle doit les transmettre à la justice.
Le président de l’Instance est désigné par décret sur proposition du gouvernement parmi les
personnalités nationales indépendantes réputées pour leur compétence dans le domaine juridique. Il
a été nommé en avril 2012. Un nouveau Président de l’Instance a été investi depuis janvier 2016.
Le conseil de l’Instance se compose d’un président (le président de l’Instance) et de trente
membres au maximum choisis : sept membres, au moins, parmi les hauts fonctionnaires et les
représentants des organismes de contrôle, d’audit, d’inspection et d’évaluation ; sept membres, au
moins, des organisations de la société civile et les organismes professionnels réputées ; un magistrat
judiciaire, un juge du Tribunal administratif et un juge de la Cour des comptes ; et deux membres du
secteur de la communication et de l’information. La durée du mandat au sein du conseil de l’Instance
est fixée à trois ans, renouvelable une seule fois. Le conseil de l’Instance tient ses réunions au moins
une fois tous les trois mois. Les délibérations du conseil ne sont valables qu’en présence de la moitié
au moins de ses membres. Les membres de l’organe de prévention et d’investigation prennent part
aux délibérations et au vote67.
L’organe de prévention et d’investigation (qui n’a pas vu le jour) a pour mission d’enquêter sur
les infractions de corruption. Dans ce cadre, il est chargé de la collecte des informations, documents
et témoignages permettant l’investigation sur les infractions de corruption et la vérification des
66 Antérieurement à l’INLUCC qui est une structure permanente, le décret-loi n°2011-7 du 18 février 2011 avait créé la commission nationale d'investigation sur la corruption et la malversation (commission Amor, du nom de son président feu Abdelfattah Amor), une structure ad hoc pour enquêter sur la corruption du régime de Ben Ali (janvier-décembre 2011). 67 Le chef du gouvernement a nommé, par le décret n°2013-2394 du 4 juin 2013, 26 membres au conseil de l’Instance.
59
documents collectés et de leur authenticité, et ce, avant leur transmission aux pouvoirs judicaires
compétents.
L’Instance peut procéder à des actes de perquisition et de saisie de documents et biens dans
tous les locaux professionnels et privés qu’elle juge nécessaire de perquisitionner, et ce sans autre
procédure. Les services de l’Etat (y compris les organes de contrôle, d’inspection et d’audit, les
collectivités locales, les établissements et entreprises publics et à participation publique) doivent
fournir au président de l’Instance des déclarations comprenant toutes les informations et données
dont ils ont eu connaissance ou qu’ils ont pu obtenir. Toute personne physique ou morale est tenue
de fournir au président de l’Instance tous les documents ou déclarations dont il dispose.
L’Instance établit et publie son rapport annuel comportant ses propositions et
recommandations et le remet au Président de la République et au pouvoir législatif. L’Instance peut
également émettre des avis et des rapports spéciaux concernant son activité.
Au cours de l’année 2017, l’effectif de l’Instance s’est élevé à 147, réparti entre investigateurs
et personnel administratif, entre le siège et les sections régionales. Selon le rapport semestriel de
l’INLUCC couvrant la période entre le 15 janvier 2016 et le 15 août 2016, l’Instance a affirmé avoir reçu
1937 dossiers d’affaires. Parmi eux, 832 dossiers ont été remis aux enquêteurs et 106 dossiers à la
Justice. Selon ce rapport, entre 2011 et 2015, 10.048 dossiers ont été enregistrés au bureau d’ordre,
dont 8.667 ont été étudiés. 642 plaines impliquant des proches du président déchu et 500 dossiers
sont hérités de ma Commission d’Investigation dans les Malversations dite Commission Abdelfattah
Amor. Cependant, entre 60 et 70% des plaintes ne concerne pas de véritables dossiers de corruption
relevant de l’INLUCC. Le rapport annuel 2016, précise que l’Instance a reçu 9027 requêtes, parmi
lesquelles 2198 requêtes entrant dans la compétence de l’INLUCC et 94 dossiers de corruption ont été
transmis à la justice
Les affaires des fonds mal-acquis cachés à l’étranger concernent principalement la passation de
marchés publics, les transactions d’importation et le changement de vocation des terres agricoles qui
deviennent des terrains industriels ou des lotissements touristiques.
L’INLUCC a pu présenter à la justice environ 450 dossiers dont le plus grand nombre concerne
les permis, suivis par les secteurs de l'énergie, la douane, les fermes publiques et le domaine foncier.
Cependant, un nombre réduit de ces dossiers a fait l’objet d’un examen.
2.2.2. L’instance de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption (IBOGOLUCC)
L’article 130 de la Constitution tunisienne institue l’Instance de la bonne gouvernance et de la lutte
contre la corruption (IBOGOLUCC) qui a pour mission de contribuer aux politiques de bonne
gouvernance, d’empêchement et de lutte contre la corruption, au suivi de leur mise en œuvre et à la
diffusion de la culture y afférente.
Elle veille à consolider les principes de transparence, d’intégrité et de responsabilité. L’Instance est
chargée de relever les cas de corruption dans les secteurs public et privé. Elle procède aux
investigations et à la vérification de ces cas et les soumet aux autorités concernées.
L’Instance est obligatoirement consultée sur les projets de loi se rapportant à son domaine de
compétence.
60
Elle peut donner son avis sur les textes réglementaires généraux ressortissant à son domaine de
compétence. L’Instance est composée de membres indépendants, choisis pour leur compétence et
leur intégrité, qui exercent leurs missions pour un seul mandat de six ans. Le tiers de ses membres est
renouvelé tous les deux ans.
Cette nouvelle instance constitutionnelle reprendra les fonctions de l’ancienne INLUCC et se verra
confiée de nouvelles attributions pour la promotion de la bonne gouvernance.
l’IBOGOLUC est organisée par la loi organique n° 2017-59 du 24 août 2017 dont l’article 66
prévoit l’abrogation des dispositions du titre 2 (relatif à l’INLUCC) du décret-loi n°120 dès que
l’IBOGOLUCC commence son activité.
2.2.3. La Commission Tunisienne des Analyses Financières (CTAF)
La Commission Tunisienne des Analyses Financières (CTAF) est instituée par l'article 118 de la loi
organique n°2015-26 du 7 août 2015 relative à la lutte contre le terrorisme et à la répression du
blanchiment d'argent.
D’après l’article 120 de cette loi, la CTAF est chargé notamment de :
- recueillir et analyser les déclarations concernant les opérations et les transactions suspectes et
notifier la suite qui leur est donnée,
- assister à l’élaboration de programmes ayant pour objectif la lutte contre les circuits financiers illicites
et à faire face au financement du terrorisme et au blanchiment d’argent,
- participer aux activités de recherche, de formation et d’étude, et en général, à celles ayant trait au
domaine de son intervention,
- coordonner entre les différentes autorités concernées dans ce domaine sur le plan national et faciliter
la communication entre elle.
Cette commission est organisée en vertu du Décret gouvernemental n° 2016-1098 du 15 août 2016,
fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement de la commission tunisienne des analyses
financière. L’article 5 de ce décret vient compléter la liste de mission de la commission telle que fixée
par la loi susmentionnée pour ajouter, entre autres, la mission de « coordonner avec la commission
nationale de lutte contre le terrorisme créée par l'article 66 de la loi organique n° 2015-26 et les
autorités concernées pour préparer une étude globale d'évaluation nationale des risques de
blanchiment d'argent et de financement du terrorisme et pour sa mise à jour périodique ». Cette étude
vient d’être publiée par la CTAF le mois d’avril 2017 et juge le niveau des risques en Tunisie «
relativement élevé », pour une liste de menaces de blanchiment d’argent, dont également la
corruption, l’évasion fiscale et douanière68.
Cette étude répond aux engagements internationaux de la Tunisie notamment, la première
recommandation du Groupe d’Action Financière (Gafi), exigeant des pays la détermination et
l’évaluation des risques liés au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme, et l’adoption
de la méthodologie basée sur la définition des risques et l’orientation des ressources de l’Etat vers les
68 Commission Tunisienne des Analyses Financières (CTAF), Rapport de l’évaluation nationale des risques de blanchiment d’argent et de financement de terrorisme, Avril 2017 (en arabe)
61
secteurs et les métiers à haut risque. Ainsi, la Tunisie est le premier pays de la région MENA à avoir
précisé de façon indépendante les dangers du financement du blanchiment et du terrorisme.
Le rapport met l’accent sur la faiblesse (parfois l’absence) de la coordination entre les différents
intervenants et la faible capacité d’analyse en ce qui concerne les crimes financiers comme au sein des
institutions financières et non-financières, à l’instar de la Poste Tunisienne, des promoteurs
immobiliers et des bijoutiers.
3. Les structures de contrôle et d’audit 69
On reconnait à la Tunisie une longue tradition à créer une panoplie d’organismes de contrôle et
d’inspection horizontaux à différents niveaux70 avec :
- Un contrôle vertical exercé par le pouvoir hiérarchique et les inspections départementales
internes à chaque ministère
- Un contrôle transversal exercé par les grands corps de contrôle
- Un contrôle de la légalité et la régularité de l’exécution du budget exercé par les contrôleurs des
dépenses publiques pour les administrations publiques et par les contrôleurs d’Etat pour les
entreprises publiques
Au-delà de ces organismes, la Cour des Comptes assure les fonctions d’audit externe et le HCCAF assure
la coordination entre ladite Cour, les corps de contrôle général et les inspections départementales, en
plus du suivi des recommandations formulées dans les rapports de contrôle.
Malgré une architecture assez étouffée, l’efficacité de l’action de contrôle et d’audit comme
fonction primordial de prévention et de lutte contre la corruption reste à envier.
69 Voir OCDE, Examen de l’OCDE du système de contrôle et d’audit en Tunisie. Gestion des risques dans les institutions publiques, 2014 70 OCDE, Tunisie. Un programme de réformes à l’appui de la compétitivité des entreprises et de la croissance inclusive, mars 2015, Éditions OCDE, Paris, 2015, p.69
Figure 19 Les structures de contrôle et d’audit public, Examen de l’OCDE du système de contrôle et d’audit en Tunisie. Gestion des risques dans les institutions publiques, OCDE, 2014, p.23
62
3.1 Les corps des contrôles généraux
Il existe trois corps de contrôles généraux de l’administration en Tunisie :
- Le Contrôle Général des Services Publics (CGSP) – régi par le décret n°2013-3232 du 12 août
2013 et relevant de la Présidence du Gouvernement ;
- Le Contrôle général des finances (CGF) – régi par le décret n°2000-2886 du 7 décembre 2000
et d’autres textes et relevant du Ministère des Finances ; et
- Le Contrôle Général des Domaines de l’Etat et des affaires foncières (CGDE) – régi par le
décret n°91-842 du 31 mai 1991 et relevant du Ministère des Domaines de l’Etat et des
Affaires Foncières.
Le CGSP est un organe de contrôle supérieur, ayant une compétence horizontale, qui est habilité à
contrôler les services de l’administration publique y compris les organismes recevant directement ou
indirectement des participations ou des contributions publiques. C’est aussi un organe consultatif qui
émet des avis sur les projets de lois et règlements visant à organiser et moderniser les outils de la
gestion dans les services publics. Ce corps compte jusqu’à aujourd’hui 87 contrôleurs.
Le CGF, de son côté, a pour mission d’assurer le contrôle de la gestion des budgets et des comptes de
l’Etat, des établissements publics, des collectivités locales, ainsi que la gestion des offices, des sociétés
nationales, sociétés d’économie mixte et des organismes de toute nature, faisant appel directement
ou indirectement au concours financier de l’Etat ou d’une personne publique. Le CGF compte 56
contrôleurs repartis sur 4 divisions : Division de contrôle relevant des services du ministère des
finances, Division de contrôle des services publics et d’audit des comptes des projets, Division de
contrôle des établissements et entrepris publics et division de contrôle des autres structures et
évaluation71.
Quant au CGDEAF, sa principale mission consiste à contrôler la gestion, l’utilisation et l’entretien ou la
maintenance des domaines public et privé de l’Etat ainsi que des biens immeubles qu’il occupe, des
biens mobiliers dont l’Etat est gestionnaire, des participations en nature ou en espèces de l’Etat. En
plus, Il peut être chargé d’effectuer toute enquête ou mission particulière qui lui est expressément
confiée.
A ces trois corps de contrôle « classiques », il faut ajouter le Comité du contrôle d’Etat, créé récemment
en vertu du décret n°2013-5093 du 22 novembre 2013 et relevant de la présidence du gouvernement.
Ce comité comprend les contrôleurs d’Etat exerçant leurs missions de contrôle externe, à caractère
général et essentiellement préalable des activités auprès des entreprises et des établissements publics
à caractère non administratif.
3.2 Haut Comité du Contrôle Administratif et Financier
Le HCCAF est rattaché auprès du Président de la République, qui est régi par la loi n°93-50 du 3 Mai
1993 et le décret n°93-906 du 19 avril 1993, est chargé de coordonner les programmes d’intervention
71 OCDE, Analyse du système de contrôle, d’audit et de maitrise des risques dans le secteur public tunisien : L’exemple des entreprises publiques et des douanes, 2013, p.35
63
des organes du contrôle général des services de l’Etat et des établissements publics (la Cour des
comptes, les différents corps de contrôle général et les inspections ministérielles).
Il est chargé aussi du suivi des recommandations et conclusions mentionnées dans les rapports de
contrôle ou d’inspection et propose des mesures pratiques permettant de pallier aux insuffisances. Il
assure également le contrôle des rapports de la Cour des comptes. Ce dernier point pose problème,
car « confier à un organe du pouvoir exécutif le soin d’assurer les suivis de recommandations de l’audit
externe n’est pas exempt de risques72
3.3 Les structures de gouvernance des marchés publics
Les achats publics en Tunisie constituent une « zone à risque »73. Ils représentent 18 % du PIB et 35 %
du budget de l’Etat74, d’où l’intérêt de veiller sur l’intégrité des acheteurs publics surtout en renforçant
les institutions de gouvernance des marchés publics.
Le nouveau décret n°2014-1039 a créé des nouvelles structures et il a redéfini les missions des organes
déjà existants. Il s’agit, notamment, des structures suivantes :
- Le Conseil national de la commande publique (CNCP) qui est une structure consultative
collégiale, créée auprès du chef du gouvernement. Il compte des représentants du secteur public
(ministères et instances de contrôle) et du secteur privé (représentants des organismes
professionnels). Il étudie et propose toute réforme ou mesure nécessaire en la matière, donne des avis
et établit un rapport à l’attention de la présidence de la république, à la présidence du gouvernement
et du Parlement, sur l’attribution et l’exécution des marchés à partir des rapports de contrôle et d’audit
effectués (articles 143 à 146). Il est notamment chargé de présenter toutes les propositions relatives
à la prévention et à la lutte contre la corruption dans le domaine des marchés publics en concertation
avec l’autorité en charge de la lutte contre la corruption. Les contrôleurs et réviseurs de la commande
publique assurent le secrétariat du CNCP sous la supervision de la HAICOP.
- La Haute instance de la commande publique (HAICOP) a été créée en 2013. Elle est rattachée au chef
du gouvernement et est composée de :
• la Commission supérieure de contrôle et d’audit des marchés publics, chargée du contrôle a
priori, concomitant et a posteriori des marchés publics en fonction des 4 commissions spécialisées, de
la gestion de l’Observatoire national des marchés publics (ONMP) ainsi que de la gestion des achats
publics en ligne via la plateforme TUNEPS ;
• et du Comité du suivi et d’enquête des marchés publics, chargé d’étudier les requêtes des
ayants droits et les saisines des contrôleurs.
• Les commissions de contrôle des marchés publics qui sont des commissions départementales
(dans chaque ministère), régionales (dans chaque gouvernorat), communale (dans chaque
municipalité) et internes (dans chaque entreprise publique). Elles exercent un contrôle a priori sur
toutes les phases de passation des marchés (rapport d’évaluation des offres, marché négocié, avenants
et règlement définitif).
72 OCDE, Examen d’intégrité de l’OCDE du système de contrôle de la Tunisie : Gestion des risques dans les institutions publiques, 2015, p. 24 73 OCDE, Examen de l'OCDE du cadre d'intégrité dans le secteur public en Tunisie, Examens de l'OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, 11 avril 2013, p.67 74 OCDE-Sigma, Evaluation du cadre d’intégrité dans le secteur public en Tunisie, décembre 2012, p.18
64
4. Structures juridictionnelles de lutte contre la corruption
Au niveau du secteur public deux structures juridictionnelles interviennent dans la lutte contre la
corruption : la cour des comptes et la cour de discipline financière75.
Quant à la justice, avant la révolution, le nombre de condamnations pour faits de corruption était
très faible. Désormais la corruption est un sujet de première importance pour le ministère de la justice
et 400 à 500 affaires de corruption sont encours d’instructions76.
Cette croissance du nombre de condamnations a poussé à instituer un pôle spécialisé pour traiter
ces affaires qui constitue une nouveauté institutionnelle et un nouvel outil de lutte efficace contre la
corruption.
La loi organique n°2016-57 portant sur le Pôle judiciaire économique et financier régit le champ
d'action du Pôle, ses prérogatives, sa composition judicaire et technique ainsi que des dispositions
transitoires. Ce Pôle judiciaire économique et financier (PJEF) a été créé depuis septembre 2012 auprès
du Tribunal de première instance de Tunis.
Le Pôle est spécialisé en matière d’infractions économiques mais jusqu'à récemment il n'existait
pas de loi qui définisse la saisine et les attributions de ce pôle. Ce pôle traite des dossiers de corruption
et de blanchiment d’argent.
Malgré les difficultés, le Pôle a fait un travail énorme au niveau de l'instruction ainsi qu’au niveau
de la restitution des biens mal acquis.
Les juges d'instruction ont envoyé environ 100 commissions rogatoires internationales et des
mandats d'amener internationaux ainsi que plusieurs expertises ont été lancées dans plusieurs
affaires. Le travail du Pôle a abouti à traduire plusieurs inculpés devant la justice ainsi qu’à la restitution
de quelques biens à l'étranger et la saisie des biens.
75 Pour plus d’informations voire OCDE-Sigma, Evaluation du cadre d’intégrité dans le secteur public en Tunisie, décembre 2012, p.31 et OCDE, Examen de l'OCDE du cadre d'intégrité dans le secteur public en Tunisie, Examens de l'OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, 11 avril 2013, p.45 76 OCDE-Sigma, Evaluation du cadre d’intégrité dans le secteur public en Tunisie, décembre 2012, p.37
65
Annexe 1 liste des études, enquêtes et rapports au niveau sectoriel
ou local
Etudes, enquêtes Organisme Année Axe privilégié
Scan d’intégrité Tunisie OCDE 2013 Secteur de l’éducation
Evaluation du cadre d’intégrité ans le secteur
public en Tunisie
OCDE-Sigma 2012 Partis politiques- fonction
publique
Examen du cadre d’intégrité dans le secteur
public en Tunisie
OCDE 2013 Marchés publics
Intégrité de l’éducation publique en Tunisie :
Réinstaurer la confiance
OCDE 2013 Education et enseignement
supérieur
Perception les concours de la fonction publique I Watch 2014 Concours de la fonction publique
Diagnostic et prévention de la corruption dans
le milieu universitaire tunisien : perceptions des
acteurs et proposition d’une stratégie d’action
Forum
universitaire
Tunisien
2014 Milieu universitaire
La gouvernance des marchés publics et la
gestion des conflits d’intérêts dans le secteur de
la santé en Tunisie
Académie
internationale
de la bonne
gouvernance
2016 Secteur de la Santé
La gouvernance des projets publics Académie
internationale
de la bonne
gouvernance
2017 Projets publics
Rapport d’évaluation du système local
d’intégrité, La Commune de Djerba Houmt
Souk,
RTE, Réseau
Tunisien
d’Evaluation
Mars
2016
Djerba-Houmt Souk
Rapport du système local d’intégrité,
Gouvernorat de Médenine Municipalité pilote
de Zarzis,
ISF-ASSF-
ADDCI
Février
2016
Zarzis
66
Annexe 2 : les secteurs les plus vulnérables d’après les enquêtes
recensées KAS-
SIGMA TI IAC
E INS
(2014/2017)
ITCEQ Social Science Forum
CNICM
1 Douanes (63%)
Police Sécurité (68%/ 52.3%)
Douanes (32%)
Forces de l’ordre (police et douane) 40.9%
Administration fiscale
2 Partis politiques (60%)
Partis politiques
Santé (67%/63%)
Admin. pub (15%)
Autorités locales 21.7%
Douanes
3 Sécurité (56%)
Justice Enseignement (64%)
Justice (8%)
Santé 18% Marchés publics
4 Collectivités locales (56%)
Médias Education (59%/ 43.1%)
Adm.fiscale (14%)
Enseignement 11.4%
Gestion des biens de l’Etat
5 Admin. publique (51%)
Administration locale
Douanes 46.7%
Marchés publics (12%)
Justice 8%
6 Santé (51%)
Inspection contrôle (13%)
7 Equipement (48%)
8 Justice (47%)
9 Enseignement (25%)
10
Recettes des finances (39%)
67
Annexe 3 : Tunisie, Rule of law index, World justice project
68
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Le PNUD forge des partenariats à tous les niveaux de la société pour aider à construire des nations résilientes, afin de mener à bien une croissance qui améliore la qualité de vie de chacun. Présents dans quelque 170 pays et territoires, nous offrons une perspective mondiale et des connaissances locales au service des peuples et des nations.