feuille verte n°215 – mars 2016
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ANNÉE SOMBRE POUR EÉLV, MAIS
NOTRE AVENIR NOUS APPARTIENT
Certains se réjouissent de la situation difficile dans laquelle se
retrouve notre mouvement : il est tellement plus facile de voir la
paille dans l’œil du voisin que la poutre dans le sien. Certes, nous
ne pouvons pas dire que nous ayons été très lisibles dans notre
stratégie, déchirés entre deux visions : être « dedans » ou être
« dehors ».
En d'autres mots, participer ou non au gouvernement alors
que nous l’avions quitté deux ans auparavant et qu’aucune évolu-
tion dans les politiques nationales ne pouvait nous faire espérer un
véritable tournant écologique et social. Le choix de notre ex-
Secrétaire nationale de rejoindre le gouvernement s’est fait
contre l’avis du mouvement EÉLV. On conçoit bien, évidemment, la
difficulté de résister à l’appel du pouvoir ou, peut-être, à l’envie de
pratiquer la politique des petits pas ; mais là où le bât blesse, c’est
que la décision se devait d’être collective et Emma Cosse aurait dû
s’y soumettre. Même s’il a à son actif de timides avancées, nous savions déjà
que nous ne pouvions faire confiance à ce gouvernement, tant les
promesses ont été bafouées, tant les politiques menées sont anti-
libertés publiques et antisociales. Avec la loi sur le travail, François
Hollande piétine une fois de plus les valeurs que devrait porter la
gauche : jamais ces dernières décennies nous n’avons vu une telle
dérégulation du marché du travail.
Notre force était d’être un parti pas comme les autres, de
« faire de la politique autrement ». Qu’en est-il aujourd’hui ?
Aujourd’hui, il nous faut reconstruire, retrouver la confiance ;
souhaitons que notre prochain congrès en juin soit l’occasiond’une refondation profonde de notre mouvement.
D’ores et déjà, nous vous invitons à réserver votre journée du
samedi 28 mai 2016 : nous aurons un Congrès fédéral décentralisé,
au cours duquel seront discutées les motions d’orientation et élus
les délégués au Congrès national et au Conseil fédéral.
Pour conclure, je reprendrai les propos de notre nouveau
secrétaire national David Cormand, qui appelle à nous rejoindre
toutes celles et tous ceux qui veulent faire de l’écologie politique
un mouvement indépendant et libre, qui veulent participer à la
construction d’un projet de société alternatif.
Le travail ne manque pas : retroussons-nous les
manches au lieu de nous lamenter sur notre sort.
MARS 2016 / n°215 / 1,70 €
Brigitte Monnet
Coporte-parole
EÉLV Franche-Comté
33, Avenue Carnot
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C'ÉTAIT TROP BEAU ?...
Sommaire
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P 1 : Édito
P 2 : Bimestriel
P 3-4 : 9 et 10 janvier 2016 : Conseil fédéral d’EÉLV
P 4-5 : Emmanuelle Cosse au gouvernement
P 5 : Où trouver EELV au plus près de chez soi ?
P 6 : Conférence-débat : Comment retrouver le goût de
l’avenir ?
P 7-8 : Un second mandat ?
P 9 : Sexisme à l’Assemblée
P 10-11 : La méthanisation en Franche-Comté
P 12-13-14 : Science et écologie
P 14 : Comment recevoir La Feuille Verte ?
P 15-16 : Notre-Dame-des-Landes
P 16 : Brèves
P 17-18 : Piqûre de rappel contre l’amnésie
P 19-20 : Petite chronique wallisienne (6)
P 21-22 : Un mois, émois, et moi
P 23 : Bulletin d’adhésion
P 24 : En bref !
Souvenez-vous : il fut un temps, pas si lointain
(disons jusqu'à fin 2012, début 2013, si mes souvenirs
sont bons), où La Feuille Verte – ou ce qu'il en restait –
lançait des SOS à répétition : tout le monde semblait se
désintéresser de son sort et plus personne, ou presque, ne
lui proposait d'articles. Les appels au secours ont-ils fini
par payer ? Toujours est-il que tout d'un coup, « c'est re-
parti » : les propositions ont afflué, à tel point que le
Comité de Lecture a fini par décider de limiter à 20 le
nombre mensuel de pages – décision qu'il n'a en fait ja-
mais appliquée, puisqu'on a vu paraître quantité de nu-
méros à 24 ou 26 pages ; record battu deux fois de suite,
en octobre et novembre 2014, avec 28 pages ! Bref,
La Feuille Verte se portait plutôt bien et n'accusait pas ses
vingt ans (en novembre dernier), même si elle était en
droit de s'interroger sur l'intérêt quelque peu émoussé
que semblaient lui porter ses lecteurs, en tout cas parmi
les adhérents d'EÉLV (1).
Était-ce trop beau ? C'est hélas la réflexion
qu'on peut se faire aujourd'hui. Car entre-temps est arrivé
– patatras ! - ce qu'il faut bien appeler la dérouillée des
dernières élections régionales. Et qui dit débandade dit
aussi faillite, ou quasiment. En tout cas, EÉLV-FC, qui a vu
fondre ses ressources financières, n'a plus les moyens
(entre autres) d'entretenir un mensuel. Raison pour la-
quelle vous avez remarqué – si vous faites partie de ceuxqui s'en préoccupent encore – l'absence de Feuille Verte
en février, le Conseil politique régional (CPR) du 16 janvier
ayant décidé, par mesure d'économie, de transformer
notre canard en bimestriel, qui paraîtra donc, en théorie,
en janvier, mars, mai, juillet, septembre et novembre. Il a
même été proposé (mais pas accepté) de supprimer car-
rément la version papier et de ne fabriquer plus qu'une
« e-Feuille Verte » (!), ou encore d'accompagner le journal
papier, toutes les 3 ou 4 semaines, d'une sorte de niouze-
letter... à laquelle personne ne semble croire vraiment…
Ça a même failli être pire : quasiment jusqu'à la
date limite, les contributions pour ce numéro, bien
qu'elles aient eu deux mois au lieu d'un seul pour mûrir,
ne se sont pas franchement bousculées, et on se voyait
déjà éditant une Feuille Verte étique (mais bien sûr tou-
jours éthique !), qui semblait nous ramener à des temps
que nous pensions révolus. En fin de compte - on aurait
dû s'en douter –, les propositions d'articles sont arrivées
tardivement, mais abondamment, si bien que vous avez
entre les mains un numéro « normal ».
Demeure donc (et ce n'est pas rien) la question des
finances, qui ne concerne pas seulement La Feuille Verte.
Allez, on va faire preuve d'un optimisme plus que jamais
nécessaire en cette sinistre période : on va dire que ce
n'est qu'une mauvaise passe et que ça ira mieux bientôt.
Oui, c'est ça, bientôt.
Pour le Comité de Lecture,
Gérard Roy
(1) Cf. Toujours là, le petit canard, in Feuille Verte
n°212, novembre 2015.
Bimestriel
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Il m’est arrivé une chose étrange le deuxième week-
end de janvier : j'ai eu le sentiment d’avoir atterri sur une
planète où le FN ne serait pas une menace et où les échosdes attentats de 2015 se seraient en grande partie estom-
pés.
En effet, comment expliquer la longue litanie des
représentants du Conseil statutaire ânonnant des réponses
aux recours portés à l’encontre de la constitution des listes
pour les élections régionales – élections qui, rappelons-le,
avaient eu lieu un mois avant ?
Comment comprendre les empoignades exacerbées
sur le nombre de délégués par région au Conseil fédéral ?
Comment supporter la ribambelle d’orateurs (et
d’oratrices) dont l’impérieuse volonté de monter à la tri-
bune paraît augmenter en même temps que l’insignifiance
du contenu de leur discours ?
Comment, alors que l’oxygène politique nous
manque dramatiquement, nous préoccuper une fois de
plus de... réforme statutaire ?
Nous avons, il est vrai, fait le point sur l’état finan-
cier du parti, certes préoccupant mais pas aussi drama-tique que d’aucuns se plaisent à le dire.
Nous avons également voté des textes non clivants
sur les suites de la Cop 21 ou la réévaluation de l’obligation
vaccinale… et applaudi debout, en signe de solidarité, les
manifestants de Notre-Dame-des-Landes.
Heureusement, quelques temps forts ont marqué
positivement ce week-end et permis de reprendre pied
dans la réalité : le bilan de Sandrine Rousseau sur les élec-
tions régionales
en Nord-Pas-de-
Calais-Picardie et
son analyse de la
montée du FN
comme phéno-
mène de société,
et surtout les
différents temps
organisés sur la
question de l’état d’urgence.
Il a été question de prévention de la radicalisation
avec Sarah Turine, échevine écologiste de Molenbeek,
d’état de droit avec Laurence Blisson, secrétaire générale
du Syndicat de la Magistrature, d’opposition à la dé-
chéance de nationalité avec Françoise Dumont, présidente
de la Ligue des Droits de l’Homme (je sais, nous devrions
dire « droits humains » …). Les débats sont d’une autre
portée et d’une autre richesse lorsque nous ouvrons nos
portes au lieu de rester entre nous !
En tout cas, le vote d’une motion demandant la le-
vée de l’état d’urgence n’en paraît que plus éclairé… Rien
que pour cela il fallait sans doute y être, à ce Conseil fédé-
ral (1).
Philippe Chatelain
(1) Lors dudit Conseil fédéral, Emmanuelle Cosse
nous a annoncé qu’en raison d’un désaccord profond avec
la ligne politique majoritaire au sein d’EÉLV, elle remettait
son mandat de Secrétaire nationale et se préparait à en-
trer au gouvernement ; ce choix politique, difficile à com- prendre pour les délégués au CF, serait néanmoins respec-
table et permettrait d’envisager dans la clarté la continui-
té au bureau national…
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9 et 10 janvier 2016 : Conseil fédéral d'EÉLV
SURRÉALISTE !
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Vous l’avez compris, c'est là pure fiction :
Mme Cosse nous a gratifiés d’un discours sur l’espoir et le
rassemblement des écologistes, sans oublier quelques
piques en direction d’un gouvernement... qu’elle a depuis
rejoint ! Autant un choix politique aurait pu se comprendre,
autant - n’en déplaise à Éric Alauzet et quelques autres -
profiter du statut de Secrétaire Nationale d’EÉLV pour négo-
cier un ministère contre l’avis de la grande majorité desadhérents de ce même parti est tout simplement indécent !
(Et encore, j’ai en réserve d’autres qualificatifs moins édul-
corés…)
Note du Comité de lecture :
Interviewé le 12 février par L'Est républicain, Éric
Alauzet, député EÉLV de Besançon, approuve l'entrée
d'Emmanuelle Cosse
dans le gouverne-
ment. « On est de
retour, voilà, c’est
bien », dit-il, et ilconsidère que l’er-
reur « n’est pas
d’être revenu aux
affaires mais de les
avoir quittées il y a
deux ans ». Comme il le précise lui-même : « On n’est
pas les seuls ; partout à gauche, on se déchire sur la
question de la stratégie et des alliances. Ça explose. »
Ce qu'illustre, entre autres, la note de cet article...
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Emmanuelle Cosse au gouvernement...
...AU PLUS MAUVAIS MOMENT
Que Jean-Vincent Placé ait enfin obtenu son maro-
quin n'a rien de très étonnant : il était tellement pathétique
à quémander depuis si longtemps sa sucette (ou son su-
sucre, comme on voudra) en récompense de toutes ses
manifestations de soutien inconditionnel au chef de l'État !
Mais l'entrée d'Emmanuelle Cosse au gouvernement a été
davantage un choc pour les militants écologistes, elle qui
semblait en phase avec les militants d'EÉLV dans sa critique
encore récente des dérives sécuritaires de Valls.
Emmanuelle Cosse croise Christiane Taubira qui,
elle, a démissionné du gouvernement pour rester fidèle à
ses valeurs, à sa conscience. On peut disserter sur sa démis-
sion tardive, mais au moins elle a fini par reprendre sa liber-
té de parole et de critique en refusant de cautionner plus
longtemps une détestable orientation politique (1).
Il est difficilement compréhensible de venir au
secours d'un gouvernement empêtré dans la dé-
chéance de nationalité et la prolongation de l'état
d'urgence, alors que tous les spécialistes du terro-
risme disent que cela ne sert à rien pour protéger les
citoyens. Par ailleurs, la quasi-totalité des ONG de
défense des droits de l'homme (LDH, Amnesty, etc.) a
dénoncé le risque d'atteintes graves aux libertés indi-
viduelles et collectives.
Comment comprendre aussi la participation à
un gouvernement qui, avec 700 000 chômeurs de plus
depuis 2012, est en échec sur sa politique économique
et sociale et qui pourtant ne veut pas en changer ? Et
cela malgré les indicateurs économiques, qui sont tous
au vert : baisse de l'euro, pétrole pas cher, taux d'inté-
rêt voisins de zéro. Et au moment même où le gouver-
nement propose une remise en cause sans précédent .
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du droit du travail, qui provoque la colère de tous les syn-
dicats
Cerise sur la gâteau, l'ex-Secrétaire nationale
d'EÉLV accepte le poste de ministre du logement, anté-
rieurement occupé par Cécile Duflot. Rappelons tout de
même que la loi ALUR, qui avait pour objectif de faciliter
l'accès de tous au logement, en particulier les plus dému-
nis, a été consciencieusement détricotée par Manuel
Valls. Cela en dit long sur le cynisme de Hollande et la
naïveté (?) d'Emma Cosse, qui n'est là que pour caution-
ner une politique qu'elle avait par ailleurs contestée.
Tout le monde a compris qu'à un peu plus d'un an
de la présidentielle, Hollande et Valls ne changeront pas
d'orientation, libérale au plan économique et autoritaire
au niveau politique, qui désespère tant le peuple de
gauche. De toute façon, un an, c'est trop court pour mener
la moindre politique publique. Il ne reste donc qu'une
seule explication à ce revirement d'Emmanuelle Cosse :
privilégier une aventure individuelle – être ministre une
fois dans sa vie – en abandonnant la participation à un
projet collectif. Les militants d'EÉLV ont quelques raisons
d'être amers.
Gérard Mamet
(1) Je recommande la lecture du petit livre de
Christiane Taubira, Murmures à la jeunesse, édition
Philippe Rey.
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Le 11 février, au grand Kursaal, à Besançon, environ350 personnes étaient réunies à l'appel d’initiateurs du
manifeste pour la primaire des gauches et des écologistes.
Barbara Romagnan a assuré une introduction
moins centrée sur l’enjeu d'une primaire que sur la diffi-
culté d'être socialiste aujourd'hui face aux déceptions
engendrées par la politique du président et ses postures
autour de l’état d'urgence et de la déchéance de nationa-
lité. Elle a ensuite laissé la parole à Michel Wieviorka,
sociologue, directeur d’études à l’ÉHESS (École des Hautes
Études en Sciences Sociales), en insistant sur l'intérêt pourles politiques de se confronter aux discours des intellec-
tuels.
Lui non plus n'a pas centré son propos unique-
ment sur la primaire, pas plus qu'il n'a souhaité endosser
un costume d'expert ou d'autorité pour indiquer de ma-
nière solennelle la voie à emprunter.
On retrouvera sur http://
wieviorka.hypotheses.org/631 un billet assez proche de
son discours, qui contenait un point essentiel : la nécessi-
té du débat et du conflit. Il n'y a pas de débat sans conflit,
c'est-à-dire sans confrontation des points de vue dans le
respect de ceux qui les énoncent. La gauche meurt de ne
plus débattre.
En ce sens, la primaire n'a pas pour première fonction de
désigner un candidat, un porteur de projet, mais de tracer
les lignes d'un projet à travers un débat.
Les questions venues de la salle ont souligné à la fois
l'intérêt pour la démarche et une sorte de scepticisme
quant à son aboutissement, sujet que l'orateur n'a surtout
pas esquivé.
Il existe une volonté de débat mais se font jour ici ou là
des exclusives (sans le PS par exemple, comme si le PS
était un bloc) ou des affirmations quant à l'issue même
de la confrontation : une nécessaire rupture.Michel Wieviorka s'est efforcé de souligner l'impasse
d'un débat restreint et de montrer que l'époque
n'était pas prérévolutionnaire, autrement dit qu'il
apparaissait peu probable qu'un discours de totale
rupture soit aujourd'hui audible. Pour autant, il n'en
reste pas moins des questions vives qui appellent un
renouveau des idées.
On sort d'une telle soirée à la fois encou-
ragé par l'importance du public dans cette période
morose et par l'envie de débattre qui s'est dégagée
du jeu des questions-réponses, et marqué par le ca-
ractère incertain du processus.
Il se dessine pourtant une perspective, un pari pour
tout dire, qui paraît infiniment plus porteur que la
répétition de nos querelles intimes.
Quelques jours plus tard, une réunion de
personnes intéressées par la démarche a rassemblé
un peu plus d'une trentaine de personnes : hommes
et femmes du monde de la culture, du monde asso-ciatif, militants du PS, d'EÉLV ou d'Ensemble (une des
composantes du Front de Gauche). Les échanges ont
confirmé un besoin quasi viscéral de débattre, d'ou-
vrir les fenêtres. Après les annonces du gouverne-
ment sur la réforme (?) du code du travail, les partici-
pants furent assez unanimes à considérer comme
urgent de tracer une autre voie, les militants socia-
listes n'étant pas parmi les moins vigoureux à fustiger
les choix du président.
Si, comme lors de la conférence de Michel
Wieviorka, certains ferment la porte à toute partici-
pation à la primaire d'un membre du trio Hollande-
Valls-Macron, chacun se retrouve sur l'idée de l’éla-
boration d'une plate-forme : sinon un programme, du
moins un socle à partir duquel pourrait s'organiser le
choix du candidat. Des idées, puis une femme ou un
homme pour les porter. En quelque sorte, une per-
version nécessaire de la logique de la présidentielle.
Des groupes de travail vont être constitués à cette fin.
Michel Boutanquoi
Conférence-débat
COMMENT RETROUVER LE GOÛT DEL’AVENIR ?
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Loin de moi, Monsieur le Général-Président,
l'idée de vous dicter votre conduite. Mon seul souci est
d'essayer d'envisager un avenir à la gauche dans ce pays.
Vous nous obligeriez si vous renonciez à vous présenter
pour un second mandat.
À 14 mois de l'échéance, c'est peu dire que votre
bilan n'est pas mirifique. On cherche ici et là quelques
mesures qui rehausseraient l'inventaire en cours, mais
soit elles sont noyées dans des logiques technocratiques
qui les transforment en usine à gaz, tel le « compte péni-
bilité », soit elles restent largement en deçà des an-
nonces, tel le « compte personnel d'activité », soit encore
elles manquent totalement leur cible, tels les « contrats
de génération ». Et de toute façon, elles disparaissent
sous les nuées de vos renoncements : de la réforme fis-
cale aux trente-cinq heures, les digues sont en voie de
rupture.
Je n'ignore en rien le caractère parfois injuste
d'un regard rétrospectif qui liste plus les échecs que les
avancées, mais en dernier ressort, vous ne pouvez pas ne
pas prendre en compte le sentiment qui domine : une
défiance généralisée à votre égard comme à l'égard de
votre caporal-chef, dont les mouvements de menton se
veulent républicains.
Vous et vos gouvernements successifs avez
glissé tranquillement dans une dérive libérale sur le plan
social et économique, et désormais dans une dérive
droitière sur le plan moral. Faute de réussir sur la ques-
tion du chômage, vous vous êtes engouffrés, sous le
coup de l'émotion, dans une opération politique très
mitterrandienne pour piéger vos adversaires, croyant
vous ouvrir ainsi le chemin d'une réélection. Il faut avoir
renoncé à tout idéal, à tout vocabulaire un tant soit peu
socialiste pour vous être commis dans cette entreprise
profondément amorale.
Jusqu'ici, on observait un président qui cherchait
à « faire président » au gré de son art éculé de la syn-
thèse et qui suscitait une déception de plus en plus
amère. On pouvait essayer de comprendre combien
vous étiez marqué par une sorte d'inaptitude à cerner la
Un second mandat ?
SUPPLIQUE AU GÉNÉRAL-PRÉSIDENTDE LA RÉPUBLIQUE
Dessin publié avec l’aimable autorisation de Charlie Hebdo
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fin d'un monde, celui de la croissance ; une sorte d'inca-
pacité à penser le monde à faire naître, ce dont témoigne
votre inculture en matière d'écologie. Aujourd'hui, on est
face à un général-président qui se sert d'une réalité in-
soutenable pour porter atteinte à une certaine idée de
l’État et de la République ; un général-président qui tient
plus ou moins en laisse son caporal-pitbull dont les yeux
révulsés et la bave des certitudes catastrophiques auxlèvres doivent maintenir le sentiment de peur, le con-
traire même d'une lutte assurée contre ce qui nous me-
nace. D'urgence en déchéance, vous avez définitivement
rompu avec votre élection de 2012. Votre dernière trou-
vaille politique, débaucher la secrétaire d'EÉLV pour la
nommer au poste occupé naguère par Cécile Duflot alors
que la loi Alur reste presque lettre morte, signe un peu
plus une fin de règne inscrite dans la décomposition et
les combinaisons politiciennes . Laissons à Emma ses illu-
sions. À votre égard, il n'y en a plus aucune.
Quatre ans après votre élection, la gauche est
en miettes et le FN aux portes. Certes, la totalité de la
responsabilité ne vous incombe pas, mais vous aurez
contribué ardemment à obscurcir l'avenir : votre parti est
déchiré, le Front de gauche éclaté et EÉLV dans une
phase d'agonie avancée.
Il ne nous reste finalement que l'appel à une pri-
maire comme fragile tentative pour repeindre l'horizonaux couleurs d'une nouvelle espérance. Ce n'est, à mes
yeux, ni une tentative de vous légitimer ni une occasion
de vous exclure. Cela ouvre un possible incertain, vulné-
rable dans l'orage de nos convictions malmenées et de
nos appartenances désenchantées. Si vous êtes honnête
avec vous-même, avec votre passé, vous savez que cette
primaire ne vous concerne pas, qu'elle ne peut pas vous
concerner.
Je vous en conjure : laissez la gauche rebâtir
une maison sobre et accueillante, ouverte et chaleu-
reuse, loin des postures sans lendemains, des rodomon-
tades des uns et des autres, des hommes ou femmes
providentiels qui lisent leur destin fantastique dans l'ho-
roscope de leurs chimères ; laissez la gauche repenser
demain, donnez-lui la chance de se renouveler à travers
le débat. Renoncez à prétendre à un second mandat
pour ne pas la condamner à la faillite.
À défaut d'un véritable héritage, léguez-nous au
moins cela.
Respectueusement.
Michel Boutanquoi
Dessin publié avec l’aimable autorisation de
Charlie Hebdo
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Sexisme à l'Assemblée
PAMELA ET LES DÉPUTÉS
Mardi 19 janvier 2016, à l'Assemblée. En France,
donc, au XXIe siècle !
Un grand moment de représentation nationale a
eu lieu à Paris ce jour-là, où les députés recevaient
Pamela Anderson,
actrice et mili-
tante de la
cause animale.
La star cana-
dienne, venue
soutenir un
projet de loi de
la députée éco-
logiste Laurence Abeille contre le gavage, n’a pas laissé
les parlementaires insensibles.
Eux qui, comme tous les
mâles de leur génération
(1), ont dû passer quelques
heures devant la télévision,
admirant Pamela courir en
bikini sur une plage de
Malibu et rêvant d’être à laplace du blessé vers qui
accourait la lifeguard de la
beach patrol...
Eux qui sont des élus de la
nation, des représentants
des citoyens, qui exercent la
souveraineté nationale, qui votent les lois…
On aurait pu penser qu’ils avaient conçu une
forme de gratitude envers Pamela Anderson pour ces
jolis souvenirs d’adolescence, et donc qu’ils écoute-raient le message qu’elle venait leur délivrer - pour ses
arguments éthiques et philosophiques, s’entend. Et
puis, éventuellement, on pouvait espérer que nos repré-
sentant nationaux avaient une haute idée leur fonction.
Haute idée dont ils ont donné la mesure (ce
n'était hélas pas la première fois, ni sans doute la der-
nière...) dans ces messages, ces dizaines de tweets,
d’une élégance et d’un humour que l’on ne soupçonnait
pas chez nos élus :
- #PamelaAnderson Une dinde gavée au silicone parade à l'assemblée contre le gavage des oies... Quelle
farce ! Qui en sera le dindon ?
- @Bleu_Gironde Oui au gavage des canards et
des oies à la purée de maïs ! Non au gavage des lèvres
et des seins au Botox ! #PamelaAnderson
- #Pamela "n'y connaît rien. Pas de silicone
dans le foie gras. Qu'elle continue à courir. Ça nous
rappellera des souvenirs" @patrick_ollier
https://twitter.com/patrick_ollier
Nous avons donc, d’un côté, une ex-actrice qui
a mis sa notoriété au service d’une cause, qui parcourt
le monde depuis 20 ans contre la chasse aux phoques,
contre la fourrure, pour la protection des baleines,
contre toutes les formes de maltraitance animale, avec
PETA (2), Sea Sheperd ou la FBB (3), et de l'autre,
quelques individus qui pensent rester dans les mé-
moires grâce à des vannes de piliers de bistrots. Le-
quel de ces deux types de personne est-il le plus digne
de fréquenter l’Assemblée nationale ? Douloureuse
question...
Chère Pamela, un conseil : présente-toi au
Congrès en 2017 ; non seulement tu y seras à ta place,
mais lors de ta prochaine visite à Paris, tu y seras aussi
bien traitée que le fut ArnoldSchwarzenegger. Sacré Arnold the Governator, aux
formes avantageuses pourtant tout aussi modifiées
que celles de Pamela, mais pour qui on déroule le ta-
pis rouge à l’Assemblée nationale et qui peut se prêter
à une séance de pose au sein même de l’hémicycle
sans que personne ne s’en offusque ! Au contraire, nos
chers députés, émus, se battaient presque pour une
photo avec Arnie. Mais Arnold est un homme et un ex-
gouverneur : il est des leurs…
Martine Landry
(1) Ah ! ben non : moi, je savais même pas qui c'était...[Note du réviseur]
(2) People for the Ethical Treatment of Animals.
(3) Fondation Brigitte Bardot.
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La méthanisation est un procédé biologique qui
permet d'obtenir un gaz combustible, le méthane, à partir
de la fermentation anaérobie (1) de déchets organiques.
Cette technique, utilisée un peu partout dans le monde
depuis le début du 20e siècle, permet d'éliminer et de
valoriser certains déchets. On parle aussi de la production
de biogaz qui est une forme d'énergie renouvelable. Mais
attention à ne pas oublier les préoccupations agrono-
miques et environnementales !
Un secteur en développement
Il y a en Franche-Comté une dizaine d'installationsde méthanisation à la ferme, dont celle de la ferme biolo-
gique de They (Haute-Saône), de M. Devillair, qui a été
construite en 2011. On compte aussi deux installations
pour traiter les boues des stations d'épuration (dont celle
de Besançon) et trois liées à des fromageries, sans comp-
ter une vingtaine en projet ou en construction.
Les équipements de méthanisation sont des ins-
tallations classées soumises à déclaration ou autorisation
(selon la taille) et à contrôle périodique. Cette réglemen-
tation se justifie par les risques qui y sont liés : pollution,
circulation de véhicules, émanations, explosions…
L'ADEME, les services de l'État et la Chambre d'Agriculture
sont chargés d'étudier la faisabilité des projets et la con-
formité à la règlementation.
Le pouvoir méthanogène varie beaucoup selon les
substrats. Ainsi, une tonne de lisier de porc ne produit que
quelques m3 de gaz alors qu'une tonne de déchets de
céréales en produit jusqu'à 350 m3. Le gaz méthane peutêtre valorisé de quatre manières différentes :
- injection dans le réseau de gaz naturel quand la
proximité le permet,
- utilisation directe par combustion : chauffage,
séchage du foin, etc.,
- cogénération : production simultanée de cha-
leur et d'électricité,
- transformation en carburant GNV (Gaz Naturel
Véhicule).
Préoccupations agronomiques et environ-
nementales
Dans le cadre de Franche-Comté Nature
Environnement, un guide de réflexion a été élaboré pour
aider les associations ou les élus à donner un avis sur les
projets de méthanisation. L'idée générale retenue a été
qu'il ne fallait pas se préoccuper seulement de questions
énergétiques, mais qu'on devait aussi tenir compte des
impératifs agronomiques, comme la préservation du
taux d'humus des sols, et écologiques, en évitant les
épandages excessifs de nitrates et de phosphates conte-
nus dans les digestats de méthanisation (2).
En effet, selon la célèbre loi de Lavoisier - « Rien
ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » -, la part
de carbone transformée en méthane n’est plus dispo-
nible pour enrichir le sol en humus et les quantités
d’azote et de phosphore sont exactement les mêmes à
l’entrée et à la sortie de la méthanisation. Celle -ci ne
permet en aucun cas de résoudre la question des excé-
dents d’azote et de phosphore, qui se retrouvent inté-
gralement dans les digestats. Il est donc recommandé de
maintenir une fertilisation mixte (digestats et fumier sur
paille), moins lessivable et plus durable, indispensable à
la préservation des eaux souterraines, des rivières et des
sols.
La fertilisation avec les digestats est intéressante
quand elle remplace les engrais chimiques. Mais les
règles d'épandage de ces fertilisants très solubles doi-
vent être très strictes pour éviter qu'en zone karstique,
Transition énergétique
LA MÉTHANISATION EN FRANCHE-COMTÉ
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ils ne se retrouvent dans les eaux souterraines et les ri-
vières.
Attention aux dérives !
La production de gaz doit être réalisée à partir de
déchets organiques, qu’ils soient uniquement d’origine
agricole ou en mélange avec d’autres déchets (gazons,
graisses usagées…). Nous refusons la méthanisation réali-sée à partir de cultures dédiées, avec les mêmes arguments
que ceux de notre refus des agrocarburants en général. Il
ne doit pas y avoir de concurrence, dans l’utilisation des
surfaces cultivées, entre production à des fins énergétiques
et production alimentaire. Cette dernière doit toujours res-
ter prioritaire.
Les matières organiques provenant d’une zone
extérieure au territoire d’épandage des digestats entraî-
nent, automatiquement, une augmentation des quantités
globales de nitrates et de phosphates apportées au sol. Ilpeut en résulter des excédents que le territoire est inca-
pable d’absorber, avec les risques d'aggravation des pollu-
tions d'origine agricole.
L’utilisation du biogaz doit se substituer à une
énergie fossile. On doit privilégier une utilisation sur
place, sur l’exploitation ou à proximité. En aucun cas
cette production ne doit servir de prétexte à de nou-
veaux besoins. Si on crée un nouveau besoin, comme le
chauffage d’une serre par exemple, on n’avance pas vers
la transition énergétique. Quand c'est possible, l’injec-
tion dans le réseau de gaz naturel est aussi une solution
intéressante.
Pour éviter les transports, gourmands en éner-gie, tant des matières à méthaniser que des digestats, il
faut privilégier l’installation d’unités modestes « à la
ferme » ou des projets collectifs, aux dimensionnements
liés aux capacités d’épandage dans des projets de fertili-
sation mixte. Les sols ne peuvent pas s’adapter aux
quantités à épandre. Aussi la dimension des projets doit
s’adapter à la nature des sols, à la surface réellement
disponible pour l’épandage et aux besoins en fertili-
sants.
Gérard Mamet
(1) Anaérobie : sans oxygène, à l'abri de l'air.
(2) Digestats : nom donné aux résidus de méthanisa-
tion.
Europe Ecologie Les Verts de Franche
omté
(33, Avenue Carnot 25000 Besançon)
Directeur de publication :
Gérard Roy
omité de lecture : Michel Boutanquoi, Gérard Mamet,
Gérard Roy, Suzy Antoine, Françoise Touzot
CPPAP: 0518 P 11003
Maquette : Corinne Salvi Mise en page : Suzy Antoine
Imprimé sur papier recyclé
Par les soins d’Europe Ecologie Les Verts de Franche-Comté
ISSN 1169-1190
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1. La vague d'innovation actuelle détruit
plus d'emplois qu'elle n'en crée
La vague actuelle d'innovations tourne autour du
numérique, mais pas seulement. Les avancées tou-
chent aussi les matériaux, l'énergie, la biologie molécu-
laire, la génétique, etc. D'après la théorie de la
« destruction créatrice » de l'économiste Joseph
Schumpeter, quand une nouvelle technologie remplace
une ancienne, elle permet de faire mieux et moins cher.
Mais l'impact sur l'emploi est immédiat. Dans les
vagues d'innovations passées, dans les secteurs émer-
gents, de nouveaux emplois étaient créés, plus nom-
breux et mieux rémunérés. Le problème, c'est que la
phase actuelle d'innovations détruit beaucoup plus
d'emplois qu'elle n'en crée. Ainsi, Le Bon Coin, qui
fonctionne avec moins de 300 personnes, remplace10 000 agents immobiliers, Amazon entraîne la destruc-
tion de centaines d'emplois dans les librairies tradition-
nelles. Et on ne voit pas très bien quels seront les do-
maines de création des nouveaux emplois. Il y a bien
chaque année dans le monde un million de plus de
chercheurs en R & D (Recherche et développement),
mais c'est beaucoup moins que le nombre d'emplois
détruits. (La Recherche n° 508, février 2016, pp. 72-75)
Commentaire : Certains pensent que, pour
faciliter la création de nouveaux emplois, il faudraitsimplifier la réglementation. Néanmoins, tous s'accor-
dent sur l'importance de la formation et de la re-
cherche fondamentale de haut niveau. Mais cela ne
répond pas à la menace du chômage technologique. Le
chercheur américain Randall Collins (1) définit le chô-
mage technologique comme « le mécanisme par lequel
les innovations en matière d'équipement et d'organisa-
tion du travail permettent d'économiser de la main
d'œuvre : produire plus à un coût inférieur et avec moinsde travailleurs ». Collins ajoute que « la substitution des
machines et des ordinateurs au travail humain est un
processus potentiellement sans fin ». Or c'est le secteur
des services, qui emploie déjà 75 % de la population ac-
tive aux États-Unis (2), qui est le plus affecté par les tech-
nologies de l'information. Dans ces conditions, Collins
envisage la possibilité d'un chômage structurel de 50 %
de la population en âge de travailler, dès 2040, dans les
pays développés. Au moment où le gouvernement et le
Medef veulent défaire la loi sur les 35 heures, cela re-
pose donc avec une très grande acuité la question de la
réduction du temps de travail.
2. Des carburants solaires pour la transition
énergétique
En ces temps de réchauffement climatique, l'éner-
gie solaire apparaît comme une solution. Son exploita-
tion par l'homme revêt deux principales formes : les pro-
cédés photovoltaïques (transformation de la lumière en
électricité) et les procédés photothermiques (le rayonne-
ment est transformé en chaleur, par exemple dans un
chauffe-eau solaire). La difficulté vient de son caractère
intermittent et il est donc nécessaire de la stocker. Une
troisième forme d'exploitation directe de l'énergie solaire
est prometteuse : la transformation de l'énergie solaire
en carburant, ce qui résout en même temps la question
de son stockage.
Science et écologie
DESTRUCTION NON CRÉATRICE,CARBURANTS SOLAIRES,
VIRUS EBOLA ET MALADIE DE LYME
La science pour éclairer les choix de l'écologie politique.
La réflexion politique pour développer la critique de la science.
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L'hydrogène gazeux est le plus simple des carburants so-
laires et il peut être obtenu par électrolyse de l'eau. Mais
son stockage reste compliqué. D'autres recherches visent
à fabriquer directement des carburants carbonés tels que
les hydrocarbures ou le méthanol, à partir du CO2, en
cherchant à imiter la photosynthèse (3). (Pour la Science
n° 459, janvier 2016, pp. 57-63)
Commentaire : Les recherches sur la production
directe de carburants carbonés n'en sont qu'à leurs pre-
miers balbutiements. Les rendements énergétiques sont
encore trop faibles, autour de 0,1 %, c'est-à-dire inférieurs
à ceux de la photosynthèse. Un rendement énergétique
global de 10 %, qui est l'objectif des chercheurs, est consi-
déré comme plausible. Pour y arriver, il faudrait mobiliser
de nombreuses ressources humaines et matérielles, dans
le cadre de collaborations internationales. Dans ces condi-
tions, les carburants solaires pourraient trouver leur place
dans la transition énergétique.
3. Les débuts prometteurs du vaccin contre
Ebola
Depuis le début de l'épidémie, 28 635 personnes
ont été infectées par le virus Ebola et 11 314 décès dé-
nombrés. La maladie a un taux de décès élevé mais qui
varie selon les 5 souches de virus identifiées. Elle est mo-
dérément contagieuse : son mode de transmission par les
fluides corporels (sueur, sang, etc.) rend efficace une stra-
tégie d'isolement des malades. Mais devant la gravité dela situation observée pendant l'été 2014, la communauté
internationale a lancé une coopération de grande ampleur
(OMS, ONG, ONU, pays donateurs). Les laboratoires qui
travaillaient déjà sur cette maladie ont rapidement mis au
point des candidats vaccins qui ont d'abord été testés sur
des cellules et des animaux. Entre avril et juillet 2015, le
plus avancé des vaccins, rVSV-Ebov, a été testé sur
7 500 personnes. Les résultats montrent qu'il offre une
bonne protection contre le virus sans provoquer d'effets
secondaires importants. (La Recherche n° 507, janvier2016, pp. 51-54).
Commentaire : L'épidémie, qui a démarré en
Guinée en décembre 2013, a pris une grande ampleur,
sans doute parce que les populations concernées se dé-
plaçaient beaucoup et que les autorités ont tardé à
mettre en place un contrôle strict. C'est « l'urgence de
santé publique de portée internationale » à un moment
donné qui a stimulé la recherche sur les vaccins. Le vac-
cin protège non seulement les personnes vaccinées,
mais aussi celles qui ne l'ont pas été en coupant la circu-
lation du virus dans la population. Comme le virus circuletoujours dans la faune sauvage, notamment chez les
chauves-souris, cette épidémie ne sera pas la dernière. Il
est donc très important de disposer d'un ou de plusieurs
vaccins efficaces.
4. Maladie de Lyme : les outils pour améliorer
le diagnostic sont pourtant là
La maladie de Lyme, ou borréliose, est transmise
par des tiques. Selon l'Institut de Veille sanitaire, la
France compte 27 000 cas nouveaux par an mais, selonles associations de malades, ce nombre serait largement
sous-estimé. Le symptôme classique est une tache rouge
sur la peau, ou érythème, qui disparaît en quelques
jours. C'est une maladie facile à guérir au stade précoce
à l'aide d'antibiotiques adaptés. Par contre, sans traite-
ment antibiotique précoce, la situation se complique.
Des symptômes très variés – articulaires, musculaires,
neurologiques - apparaissent. Le problème, c'est que
l'affection n'est pas toujours facile à diagnostiquer.
D'abord, la morsure de la tique peut passer inaperçue,
parce qu'elle injecte une substance anesthésiante. En-
suite, les tests ne détectent pas tous les cas. En France, il
y a 5 espèces de bactéries responsables de la maladies
et les tests commercialisés ne précisent ni leur spécifici-
té ni leur sensibilité. (Pour la Science n° 460, févier 2016,
pp. 14-16)
Commentaire : La maladie de Lyme pose un
grave problème de santé publique et la Franche-Comté
est particulièrement touchée. Il y a une certaine mécon-
naissance de la maladie dans le monde médical. Les
tests, basés sur la détection d'anticorps spécifiques, sont
parfois réalisés trop tôt ou ne correspondent pas tou-
jours à la souche de bactérie concernée. Il y a ainsi près
de 20 % de faux négatifs. L'information du public est
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insuffisante : chaque fois qu'on se promène dans un en-
droit susceptible d'abriter des tiques, il faudrait s'exami-
ner et enlever les tiques le plus tôt possible, car les
risques de transmission augmentent avec la durée d'at-
tachement de la bestiole. La ministre de la Santé a été
alertée à plusieurs reprises sur la gravité de l'épidémie
par des parlementaires francs-comtois sans qu'il en ré-
sulte, à ce jour, des actions adaptées et efficaces. Pour-tant, des techniques sont disponibles pour détecter les
différents microorganismes transmis par les tiques, mais
il faudrait qu'elles soient généralisées.
Gérard Mamet
(1) Immanuel Wallerstein, Randall Collins,
Machael Mann, Georgi Derluguian, Craig Calhoun, Le
Capitalisme a-t-il un avenir ? La Découverte, novembre
2014.
(2) Dans les pays avancés, le travail agricole ne
représente plus que 1 % des emplois et les industries ma-
nufacturières 15 %.
(3) La photosynthèse est le processus utilisé parles plantes vertes pour fabriquer de la matière organique
(sucres, graisses, protéines) à partir du CO2, en utilisant
l'énergie lumineuse.
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blicité, bien sûr), l'abonnement, c'est le nerf de la guerre.
Le Comité de lecture de La Feuille Verte
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On entend sans cesse le gouvernement et le Medef
dire qu'il faut économiser l'argent public ; et pourtant, à
Notre-Dame-des-Landes, Manuel Valls continue de sou-
tenir un projet d'aéroport coûteux, inutile et destructeur
de terres agricoles. Le 13 janvier, les militants de la Con-
fédération paysanne du Doubs ont manifesté leur soutien
à leurs collègues de Loire-Atlantique menacés d'expul-
sion.
Un acte de solidarité
Ce jour-là, 4 paysans et 11 familles étaient jugés
devant le tribunal de Nantes pour avoir refusé de quitter
leurs terres. Ils risquaient l'expulsion immédiate, la saisie
et la séquestration de leur bétail et de leurs biens et une
astreinte pouvant aller jusqu'à 1 000 euros par jour.
Une quarantaine de militants et sympathisants de
la Conf' 25 se sont retrouvés, au même moment, au rond
point d'Étalans, pour organiser un barrage filtrant avec
une dizaine de tracteurs et pour distribuer une informa-
tion aux automobilistes de passage sur cet endroit straté-
gique entre le Haut-Doubs et Besançon. Cet acte de soli-
darité a été assez bien accepté par les personnes de pas-
sage.
Le samedi 23 janvier, un rassemblement de sou-
tien a eu lieu aussi à Besançon, à l'appel du collectif bi-
sontin contre NDDL, avec le soutien d'EÈLV. Le jugement
est tombé le 25 janvier : il a décidé l'expulsion dans un
délai de deux mois, mais sans astreinte.
En finir avec les grands projets inutiles
Il a été largement démontré que ce projet était
ancien, basé sur l'hypothèse d'une progression complè-tement surestimée du transport aérien. Il existe déjà un
aéroport international à Nantes, qu'il suffirait de réno-
ver. Le coût de la rénovation serait 8 à 10 fois moindre et
cela éviterait la destruction de 1 700 ha de terres agri-
coles et de zones humides remarquables, très riches en
biodiversité.
La ville de Nantes peut être reliée à Paris en deux
heures par le train, beaucoup moins gourmand en éner-
gie. Ce sont les lobbies du bétonnage qui cherchent à
imposer ce type de projet. La terre est précieuse et elle
doit être réservée autant que possible à l'alimentation
humaine. Les paysans de Notre-Dame-des-Landes, qui
respectent la terre et l'environnement, veulent pouvoir
continuer de vivre de leur travail, soutenus par des di-
zaines d'associations.
Dernier rebondissement : un référendum
Si le gouvernement est à l'écoute des citoyens,
s'il veut se conformer aux engagements de la COP 21 qui
vient de se tenir à Paris, il doit renoncer à ce projet inu-tile, qui augmenterait encore les émissions de gaz à effet
de serre. Après le remaniement gouvernemental,
François Hollande a annoncé un référendum local pour
15
Notre-Dame-des-Landes
NON A L'EXPULSION DES PAYSANS,OUI A LA PRÉSERVATION DE
LA BIODIVERSITÉ
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trancher la question. Problème : on ne sait pas quel sera
le périmètre du vote, peut-être le seul département de la
Loire-Atlantique. Mais le conseil de ce département a déjà
annoncé qu'il refusait de l'organiser. C'est encore une fa-
çon de tergiverser.
Les forces en présence sont assez bien identifiées :
d'un côté, les partisans des GPI (1) qui sont sous
l'influence du lobby des grandes entreprises de BTP
(Bouygues, Vinci…) et qui, sous prétexte de croissance et
d'emplois, sont prêts à faire n'importe quoi, même de
l'inutile (alors qu'il y a tant à faire en matière de transition
énergétique) ; de l'autre, des paysans qui veulent conti-
nuer à vivre de leur travail et des défenseurs de l'environ-
nement qui veulent préserver une zone remarquable pour
sa biodiversité. Référendum ou pas, il est plus que temps
de mettre un terme définitif à ce projet déraisonnable (2).
Gérard Mamet
(1) Grands Projets Inutiles.
(2) Et comme si ça ne suffisait pas, voilà qu'on ap-
prend, par le Canard enchaîné, que l'État a tenu secret un
rapport de la DREAL remis en 2014 au préfet de région et
préconisant l'extension de l'aéroport actuel plutôt que la
construction d'un nouveau !
ON VIT UNE ÉPOQUE FORMIDABLE
Brèves
1) Selon un article du Canard enchaîné, chaque
année, dans le monde, 12 millions de tonnes de ma-
tières plastiques finissent dans l’eau. On estime que
960 000 tonnes de débris plastiques se sont conglomé-
rées en cinq immenses dépotoirs flottants. Le plus grand
se trouve dans le Pacifique, et il est épais de 30 mètres.
Tout ce bon plastique n’est pas perdu pour tout le
monde : oiseaux, tortues, phoques s’étouffent en l'ingé-
rant. Mais ce n’est pas tout : il s’émiette en minuscules
fragments qui se mélangent au plancton. Et qui mange
le plancton ? Poissons, huîtres, coquillages filtreurs…
Une étude récente menée sur les espèces pê-
chées dans la Manche a montré que les plus
« plastiqués » étaient le merlan bleu, le grondin rouge,
et certaines soles. Quand on songe que ce plastique
contient lui-même du bisphénol, des phtalates…
Y a pas à dire : le plastique, c'est fantastique !
2) Le magazine Auto plus a testé la consomma-
tion réelle des autos les plus vendus en France. Ils ont
testé des modèles lambda, non préparés, sur route, sanssoufflerie, bref sans tricherie. Du coup, ils ont mesuré
une consommation plus élevée de 37,2 % que celle an-
noncée par les constructeurs ! Et les voitures françaises
sont parmi les plus tricheuses.
3) Actuellement, les déplacements à vélo ne repré-
sentent en France qu’un peu plus de 3 % du total
(87 km par an et par Français). Le Club des villes et terri-
toires cyclables a calculé que la Sécurité sociale pourrait
économiser le montant de son déficit annuel (plus de 14
milliards d’euros) si ce pourcentage montait jusqu’à 15 %
(300 km par an et par personne). (Ville et vélo, mai 2015)
Voir à ce sujet :
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/
avan-
tages_sanitaires_du_velo_version_assemblee_du_17_dece
mbre.pdf
ou (version courte) :http://tinyurl.com/hn62mno
Michèle Greif
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Piqûre de rappel contre l'amnésie
LA BATAILLE D'EINAUDI (1) : LES DÉRIVES DELA RÉPUBLIQUE
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En ces temps de questionnement sur laRépublique, ses valeurs et ses renoncements, ses si-
lences appuyés et ses représentations, sur ce qu 'elle
voudrait bien paraître par rapport à ce qu'elle est, un
récent petit livre du Bisontin Fabrice Riceputi sur les
aléas de la construction de notre Histoire est à la fois
passionnant et instructif. Le sous-titre du livre annonce
déjà le propos : « Comment la mémoire du 17 octobre
1961 revint à la République » après plus de trente ans
de « dissimulations systématiques de la part des autori-
tés françaises, sans que l'alternance politique de 1981
ne change profondément les choses », comme le pré-
cise Gilles Manceron dans la préface.
Cette enquête retrace le parcours complexe d'un
chercheur citoyen, Jean-Luc Einaudi (auteur de La
Bataille de Paris en 1991), pour faire reconnaître un
massacre oublié et les obstacles auxquels il s'est heurté.
Elle pose aussi la question de la construction
d'une Histoire officielle et de sa contestation, comme
celles de la consultation des Archives nationales ou de
l'élaboration des manuels d'histoire. Elle montre de plus
à quel point un dispositif d'exception peut permettre
des dérapages. Ce qui n'est pas sans écho avec la situa-
tion actuelle.
À l'époque, c'est la mise en place d'un acte
anticonstitutionnel, un couvre-feu après 20 h 30 vi-
sant les seuls « Français musulmans d'Algérie », qui
avait provoqué la manifestation réprimée. Ainsi, déjà
par le passé, on savait instrumentaliser des dispositions
exceptionnelles discriminatoires mettant en danger leslibertés et la cohésion sociale.
Un crime d'état laissé dans l'oubli
Les massacres de manifestants pacifistes perpé-
trés le 17 octobre 1961 et les jours qui ont suivi repré-sentent une des pages d'un passé colonial dont l'opacité
officielle a creusé en silence une fracture dans toute
notre société. Sous prétexte de préserver l'unité natio-
nale, cette opacité perpétue cette fracture entre
Français par la distinction de traitement qu'elle opère.
Le Préfet de police Maurice Papon estimait à
l'époque avoir défendu Paris sans violence contre les
terroristes du FLN. Il ne re-
connaîtra en fin de compte
que deux morts, alors que lenombre réel de victimes
durant cette opération de
« maintien de l'ordre » par
une police armée contre un
défilé pacifiste reste incon-
nu, bien qu'estimé à plus de
200 morts, « noyés par
balles », victimes de matra-
quages mortels, de strangulations ou de tortures - faits
relatés par de nombreuses sources, y compris dans lapolice.
Le parcours d'un chercheur citoyen
Outre l'opposition du principal ordonnateur de
ces basses œuvres, la recherche de la vérité d'Einaudi a
rencontré aussi celle de l'Université, qui lui a refusé
toute aptitude à la recherche comme à quiconque
n'ayant pas le statut de chercheur. Force est de consta-
ter que cette défense corporatiste, crispée autour du
fétichisme des diplômes, passe avant la reconnaissance
argumentée des faits. Einaudi, éducateur, ne verra ainsi
son travail pris en considération que beaucoup plus tard.
Au procès de Maurice Papon, à Bordeaux, pour
concours actif à la déportation de Juifs, Einaudi fut ap-
pelé pour témoigner de la continuité dans les agisse-
ments du Préfet à travers ses différentes fonctions. Tou-
tefois, c'est surtout la plainte pour diffamation formulée
ensuite par Papon lui-même contre Einaudi pour avoir
évoqué, lors du procès de Bordeaux, des faits couverts
par l'amnistie de 1962 qui donneront au récit d'Einaudi
son véritable impact. Si tout portait à croire que Papon
sortirait vainqueur de cette confrontation étant donné
cette prescription, Einaudi obtint la relaxe, ce qui reve-
nait à faire reconnaître Papon comme l'organisateur de
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cette répression. Et cela à force de témoignages et grâce
au concours d'archivistes qui ont soutenu Einaudi, mais qui
en paieront le prix par la suite.
En effet, ces archivistes témoignèrent en sa faveur,
mais verront de ce fait leur carrière compromise, pour
avoir brisé la loi du silence, par une « mise au pla-
card » jusqu'à leur retraite, d'où personne, de droite
comme de gauche, ne les sortira malgré des demandes
réitérées, ni n'ouvrira les archives comme promis.
Le difficile accès aux archives et l'histoire offi-
cielle
Il faut préciser qu'en 1979, Papon, Ministre des Fi-
nances sous Giscard, avait soigneusement fait en sorte que
le délai de consultation de certaines archives soit allongé
de 60 à 100 ans, au nom de la raison d’État, sauf déroga-
tion exceptionnelle dont ne bénéficiera pas Einaudi. Par
ailleurs, la destruction d'archives durant ce délai, ainsi que
la prescription ou l'amnistie, permettront difficilement que
l'on revienne sur les versions officielles du « roman natio-
nal ».
L'ensemble de ces pressions réduit considérable-
ment l'accès à la compréhension des faits et le dialogue
nécessaire entre les histoires de chacun de son vivant et
l'Histoire retenue par les manuels scolaires, en particulier
autour du fait colonial, consubstantiel à la République. La
lecture de ce livre est l'occasion de mesurer à quel point
cette « tendance lourde à l'occultation du savoir favorise
une incapacité plus ou moins consciente à reconnaître ce
que l'on sait et à en tirer les leçons », comme le précise
Fabrice Riceputi. Il ne s'agit pas de repentance, mais de
reconnaissance de ce qui s'est passé, afin de ne pas répé-
ter les mêmes erreurs. Or, depuis les attentats de 2015, on
voit réapparaître implicitement dans certaines décisions
une stigmatisation à peine retenue. Même si cette grille de
lecture doit en croiser d'autres, rien ne sert de l'éluder, car
un pays qui ne fait pas les comptes de son passé est un
pays qui ne cesse de le payer.
À Besançon, un collectif d'associations (2) appelle
chaque année, le 17 octobre, à un rassemblement en sou-
venir de ces événements tragiques . Des fleurs sont lan-
cées symboliquement à cette occasion dans le Doubs de-
puis le pont Battant. Pour le cinquantenaire, en 2011, une
plaque a été posée avec la participation de la ville au coin
gauche du pont, côté quai Vauban. Toutefois, incroyable
mais vrai, le texte de cette plaque est gravé sur une pierredont les marbrures mouchetées le rendent quasiment illi-
sible.
« À la mémoire des Algériens Victimes de la ré-
pression lors d’une Manifestation Pacifique le 17 octobre
1961 à Paris »
Thierry Lebeaupin
(1) : La Bataille d’Einaudi -
Comment la mémoire du17 octobre 1961 revint à
la République de Fabrice
Riceputi, Éditions Le Pas-
sager clandestin, 2015.
2) : Ce collectif est formé par CISIA, CDDLE, l'asso-
ciation À la rencontre de Germaine Tillion, LDH, CIMADE,MRAP, Pastorale des migrants, CCFD Terre Solidaire du
Doubs, Survie, Terre des hommes, FSU, Solidaires, PG25,
PS, PCF, EELV, NPA, les Alternatifs...
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À peu près au moment du bouclage de cette
Feuille Verte, le 22 février, le Président de la République,
Falakiko Hollande, nous rendra visite, avant de rejoindre
la Polynésie Française. La dernière visite présidentielle fut
celle de Valery Giscard d'Estaing en 1979, il y a trente-
sept ans. Et c'est la première fois qu'un président de la
République en exercice foule le sol de Futuna... Évène-
ment historique, donc. Notons encore que François
Hollande sera ici le lundi 22 février, puis le dimanche 21
en Polynésie : petite facétie de la ligne de changement de
date !...
Mais aujourd'hui, c'est de santé que je souhaite
vous parler, l'archipel étant confronté à un défi considé-
rable dans ce domaine.
Une espérance de vie inférieure de sept ans
à celle de la métropole
Depuis la nuit des temps, en Polynésie, ce sont les
plantes, le recours aux guérisseurs et à des cérémonies
permettant d'éloigner les temonio (esprits mauvais) quipermettaient de lutter contre les maladies. Ces pratiques
n'ont pas disparu, le recours aux plantes médicinales
reste en effet très habituel dans le quotidien des familles
wallisiennes et la peur des temonio est toujours présente.
Aujourd'hui, l'Agence de Santé définit la politique
de santé, gère un hôpital et trois dispensaires, fournit les
médicaments et gère les actions de prévention. Les soins
sont gratuits et il n'existe pas ici de médecine libérale. Les
dépenses de santé par habitant sont à Wallis les plus
basses d'Outre-Mer, à égalité avec Mayotte.
Mais ce n'est pas l'équipement médical, ni même
l'éloignement des plateaux techniques très pointus de
Nouméa ou de métropole, qui posent problème ici. La
préoccupation n°1 est celle de l'explosion de l'obésité
et du diabète. À Wallis, 60 % de la population est en
situation d'obésité selon la classification OMS, 87 % en
surcharge pondérale et 19 % des habitants souffrent
de diabète. Les complications liées sont nombreuses :
hypertension artérielle et maladies cardiovasculaires,
insuffisance rénale chronique, risque accru de certains
cancers (sein, colon, prostate), problèmes articulaires,
moindres défenses immunitaires…
Ces chiffres sont les plus élevés de l'ensemble du
territoire national. Aujourd'hui, selon l'INSEE, l'espé-
rance de vie d'un Wallisien, hommes et femmes con-
fondus, est de 75,8 ans. Elle est en métropole de 82,8
ans.
Si elle atteint des records ici, cette réalité est
hélas partagée : selon un rapport de la Cour des
Comptes de juin 2014, obésité et hypertension ont
doublé en outre-mer entre 1980 et 2010.
Régime soda-chips-corned beef
C'est bien sûr l'évolution des modes de vie et de
consommation qui est en cause. Mais il existe aussi
des prédispositions génétiques qui remontent aux
temps anciens : dans ces îles soumises aux aléas clima-
tiques (cyclones) et ces territoires isolés, ne survi-
vaient que ceux qui pouvaient stocker assez de calories
pour résister aux famines récurrentes. Une sélection
naturelle s'est donc opérée, mais cette force devient
aujourd'hui une faiblesse face à l'abondance alimen-
taire et à la baisse des besoins énergétiques.
De la Franche-Comté à Wallis-et-Futuna
PETITE CHRONIQUE WALLISIENNE (6)Une nouvelle fois, je vous emmène sur l'archipel de Wallis-et-Futuna, le territoire français le plus
éloigné de la métropole, à la rencontre d'une terre et de ses habitants.
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L'arrivée des Américains pendant la guerre du
Pacifique (1) a été le point de départ d'une véritable révo-
lution dans l'archipel. Alors que l'agriculture vivrière et le
troc régissaient la vie économique locale, les Américains
ont introduit la monnaie en rétribuant la population pour
les aider à construire routes et infrastructures. Et au pas-
sage en introduisant coca, corned beef, alcool et ciga-
rettes…
Après le rattachement de Wallis-et-Futuna à la
France en 1961, l'administration s'est développée et avec
elle l'emploi salarié.
Péni, Kika et Florence travaillent au service Préven-
tion Santé de l'hôpital. Pour elles, c'est bien l'évolution des
modes de vie qui est au cœur du problème :
« Le changement est net depuis les années 1985.
Aujourd'hui, les gens ont un salaire, ils achètent dans les
supermarchés beaucoup de sodas, du poulet congelé, du
corned beef, du riz, du pain, pas de légumes et peu de
fruits. On mange moins de taro et d'ignames, mangues et
bananes pourrissent souvent sur les arbres et les gens
achètent des pommes et des oranges...
Autrefois, lorsque les hommes préparaient le 'umu
(2), tout le monde prenait ses repas ensemble. Maintenant
chacun mange quand il a faim. Les enfants partent à
l'école les sacs plein de sachets de Twisties (chips).
Avant, on marchait beaucoup, aujourd'hui tout le
monde a une voiture. Et puis il y a la télé, internet, les jeuxvidéo... »
Une évolution tristement classique donc, mais ici
tout s'est passé très vite. En quarante ans, les modes de
vie ont été radicalement bouleversés.
Face à cette situation, l'équipe du service Préven-
tion Santé propose quelques supports aux personnes dia-
bétiques : ateliers culinaires, information sur la maladie et
le traitement, organisation de journées « marche », travail
en groupe pour motiver des patients souvent peu cons-cients des conséquences du surpoids. Mais face à
l'ampleur de la tâche, les professionnelles avouent leur
découragement, leur sentiment de n'être qu'une goutte
Alain Sœur, Directeur de l'Agence de Santé, le
reconnaît :
« Nous intervenons trop tard et nous manquons
de professionnels compétents : pas de médecin de san-
té publique, pas de diététicienne ni de psychologue ou
psychiatre ! Une des difficultés aussi, c'est que les per-
sonnes font preuve de fatalisme : c'est Dieu qui décide
de notre sort. Et il n'y a pas encore de prise de cons-cience chez les habitants des graves conséquences du
surpoids. Pas beaucoup plus chez les responsables poli-
tiques et/ou économiques du territoire. »
Alain Sœur le constate, le système économique
de l'archipel est contre-productif : les revenus du terri-
toire sont constitués des taxes issues des produits
d'importation. Les élus n'ont donc pas intérêt à déve-
lopper une production locale (pêche, fruits, légumes,
volaille, porcs) , alors qu'il faudrait réorienter la con-
sommation des habitants vers les produits locaux, quisont sains et goûteux. Ici, pas d'intrants en agriculture
ni de ciguatera dans le poisson (3).
Tout reste à faire, donc.
François Hollande sera-t-il sensible au charme
voluptueux des Wallisiennes ? Entendra-t-il la de-
mande de leur député, Napole Polutélé, bien décidé
semble-t-il à solliciter des moyens supplémentaires
pour faire face à cette « urgence sanitaire », comme il
la nomme ?
L'avenir le dira. Ou pas.
Françoise Touzot
(1) Cf. La Feuille Verte, septembre 2015 : Pendant la
Seconde Guerre mondiale, Wallis devient une base
arrière américaine (1942-1944).(2) Four traditionnel du Pacifique.
(3) Intoxication alimentaire par le poisson contaminé
par une algue présente dans les récifs coralliens.
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Breloques. David Bowie avait refusé d'être fait
commandeur de l'ordre de l'Empire britannique – un
peu comme s'il avait dédaigné la Légion d'honneur –
parce qu'il « ne compren[ait] vraiment pas à quoi çasert ». Et trois ans plus tard, même refus de l'anoblisse-
ment par la Queen. Respect.
Retour. Jean-François Copé veut désormais
« faire de la politique autrement ». Si ça lui réussit aussi
bien qu'aux Verts, on ne devrait pas entendre parler de
lui trop longtemps.
Vroum. Aux États-Unis, en 2015, la consomma-
tion d'essence a augmenté de 3 % et les ventes de pick-
up et de SUV (ces 4x4 « urbains » pour emmener leschiards à l'école au coin de la rue) ont bondi de 15 %.
La faute, paraît-il, à la chute des prix du pétrole. Peut-
être un peu aussi à la connerie des acheteurs, non ?
Virée. Je n'éprouve aucune sympathie particu-
lière pour Fleur Pellerin, bonne élève de la classe PS.
Mais que dire alors des malotrus qui l'ont débarquée
comme une malpropre du ministère de la Culture, en
plein examen d'un texte de loi qu'elle défendait ?
Sacerdotaux. Vous avez vu les photos de la
réconciliation « historique » (à Cuba !!!) entre les
Églises catholique et orthodoxe ? Y a pas de doute,
entre François et Cyrille, c'est bien le second qui avait le
plus beau chapeau !
Multifonctions. Laurence Rossignol est désor-
mais ministre de la Famille, de l'Enfance et des Droits
des Femmes. Il était prévu d'ajouter « des Couches-
culottes, la Serpillère et de la Cocotte-minute », mais ça
tenait trop de place sur le papier à en-tête.
Cool. Les Émirats Arabes Unis font encore plus
fort, en nommant des ministres (femmes, et voilées,
bien sûr !) du Bonheur et de la Tolérance. À ce niveau
d'aberration, on devrait bientôt voir un ministère saou-
dien du String et du Fist Fucking.
PS. Et aussi, chez nous, un ministère des Pro-
messes tenues ? Bah non, faut quand même pas exagé-
rer .
Lettres. Selon un communiqué officiel, les
Coréens du Nord, après le tir de « fusée » par Pyongyang
début février, ont pu admirer « la vapeur fascinante du
satellite de la Juche striant le ciel bleu et clair au début du
printemps, à la veille de la fête de l'étoile qui brille ».
Avec Sarko, les Français ont un écrivain ; avec Kim Jong-
un, les Nord-Coréens ont un poète.
Arsenal. Après les États-Unis, la Serbie et le
Yémen, c'est la Suisse qui abrite la plus forte densité
d'armes au monde ! Terminées pour moi les virées chas-
selas-malakoff entre Nyon et Lausanne.
Indulgent. Dans une interview au Monde, début
janvier, Nicolas Hulot se dit « frappé par l'indigence des
partis politiques sur la question du climat ». Seulement
sur cette question-là ?!
Nuls. Le snobisme anglomane des pubeux ne
connaît pas de limites. Record (provisoirement) battu par
ceux d'Alstom, dont la dernière campagne proclame :
« Alstom is France. We are Alstom. Designing fluidity. »
En soi, c'est déjà très, très con (normal, c'est de la pub).
Mais ça l'est encore plus quand on parvient à lire la mi-nuscule traduction bien planquée dans un coin : « Alstom
is France » est traduit par « Alstom est en France ».
Même pas un niveau de 6e !
UN MOIS (1), ÉMOIS, ET MOI
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Ingrat. Condamné pour le détournement massif,
pendant 26 ans, de dons des fidèles, le curé de Saint-Lizier
explique qu'il piquait ces fonds « par peur de manquer ».
Faut dire que le Seigneur ne se foule guère pour assurer la
subsistance de ses serviteurs.
Urne. Les cendres du défunt créateur de la célèbre
cafetière italienne Bialetti ont été déposées dans... une
cafetière. Heureusement qu'il n'était pas l'inventeur du
godemiché !
À foison. Ségolène Royal, ministre des Chasseurs
et autres nuisibles, déclare qu'en France, « le loup proli-
fère ». C'est évidemment faux, puisque l'ONCFS (2) en a
compté 282 en 2015 contre 301 en 2014. Mais même si
c'était vrai, ce ne serait pas grâce à elle, sous le règne gran-
diose de qui 40 loups sont déjà morts depuis juillet der-
nier. Ce qui prolifère, dans la Grande Hollanderie, c'est le
foutage de gueule.
Travail. Non seulement la droite se réjouit, mais
même la CFDT (!!) fait les gros yeux : il y en a encore
pour douter que la loi d'El Khomry est une vraie loi de
droite ?
Insultant. Selon la cour d'appel de Versailles qui
a finalement relaxé Orelsan, les textes vulgaires, vio-
lents et misogynes du rappeur sont le « reflet d'une
génération révoltée ». C'est vraiment prendre pour des
cons les gens de ladite génération.
Gérard Roy
(1) Oui, bon, maintenant, c'est deux mois. Mais
franchement, « Deux mois, émois, et moi », ça le fait
pas , hein ?
(2) Office national de la Chasse et de la faune
sauvage – appellation qui me fait toujours rire. Jaune...
Reçus fiscaux
Toute personne ayant adhéré ou versé un don à EELV-Franche-Comté en 2015 recevra un reçu fiscal au cours du
mois de mars.
Au début de l’année 2015, nous avons quitté l’ancien système informatique qui gérait les données au niveau natio-
nal pour un autre, plus performant et correspondant aux exigences actuelles de la CNCCFP (Commission nationale des
Comptes de Campagne), qui contrôle les comptes des partis politiques ainsi que ceux des candidats ayant fait une cam-
pagne électorale. L’aspect des nouveaux reçus sera probablement différent de celui que vous connaissiez auparavant.
Les personnes ayant payé par carte bancaire recevront leur reçu de la part du national, comme à l’accoutumée.
Suzy Antoine
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En bref !
Samedi 23 janvier :
500 personnes àNantes déambulent
contre les expulsions à
Notre-Dame-des-
Landes.
Dimanche 24 janvier :
des militants antinu-
cléaires des deux cô-
tés du Rhin se sont
rassemblés à
Fessenheim.
« Inquiets » desrisques que présente
la centrale électrique,
ils réclament l'arrêt
définitif des deux ré-
acteurs les plus an-
ciens de France dans
les plus brefs délais.
Samedi 30 janvier : manifesta-
tion contre la prolongation de
l’état d’urgence à Besançon.