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Université Paris-Sorbonne Année universitaire 2016-2017 LEA – Deuxième année de licence Premier semestre Initiation au droit Cours de M. Emmanuel Breen Chargés de TD : Mme Marthe-Elisabeth Oppelt, Me Pascal Trésor et Me David Ramirez Moncada Fiche n° 7 : La sanction pénale 1/ Les mots du droit pénal Infraction, crime délit, contravention : infraction est le terme le plus général qui sert à désigner un comportement passible d'une sanction pénale. Les infractions se répartissent en trois catégories, en fonction de leur gravité : crimes (compétence de la cour d'assise), délits (compétence du tribunal correctionnel) et contraventions (compétence du tribunal de police et de la juridiction de proximité). Verdict, sentence : ces termes bien connus du grand public doivent être en droit utilisés avec prudence. Le mot verdict ne peut être utilisé que pour désigner la décision des jurés d'une cour d'assise. Il faut éviter d'utiliser le mot « sentence » : la décision d'une juridiction pénale est, tout simplement, un jugement, si elle émane d'un tribunal, ou un arrêt, si elle émane d'une cour. Condamnation, relaxe, acquittement : on dit qu'une juridiction pénale « entre en voie de condamnation » (ou « prononce une condamnation ») lorsqu'elle juge que la personne poursuivie (le prévenu) est responsable des faits qui lui sont reprochés. Dans le cas contraire, on dit qu'elle prononce un jugement de relaxe (dans le cas du tribunal correctionnel) ou un arrêt d'acquittement (dans le cas de la cour d'assise). 2/ Pour aller plus loin ... M. Delmas-Marty, Les grands systèmes de politique criminelle , PUF, coll. Thémis. - B. Bouloc, Droit pénal général, coll. Précis - Ph. Conte, P. Maistre du Chambon, J. Larguier, Droit pénal général, Dalloz, A. Colin, coll. U. - Ph. Conte, Droit pénal spécial, Litec. - F. Desportes, F. Le Gunehec, Droit pénal général, Economica. - Y. Jeanclos, La justice pénale en France. Dimension historique et européenne¸ Dalloz, coll. Méthodes du droit - J. Larguier, Le droit pénal, PUF, coll. Que sais-je ? - Y. Mayaud, Les grands articles du code pénal, coll. A savoir - J. Pradel, Manuel de droit pénal général, éd. Cujas. - G. Vermelle, Le nouveau droit pénal, Dalloz, coll. Connaissance du droit. - M. Véron, Droit pénal spécial, Dalloz, A. Colin, coll. U. - Et bien entendu ... le Code pénal. 1

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Université Paris-SorbonneAnnée universitaire 2016-2017LEA – Deuxième année de licencePremier semestre

Initiation au droitCours de M. Emmanuel Breen

Chargés de TD : Mme Marthe-Elisabeth Oppelt,Me Pascal Trésor et Me David Ramirez Moncada

Fiche n° 7 : La sanction pénale

1/ Les mots du droit pénal

• Infraction, crime délit, contravention : infraction est le terme le plus général qui sert à désignerun comportement passible d'une sanction pénale. Les infractions se répartissent en trois catégories,en fonction de leur gravité : crimes (compétence de la cour d'assise), délits (compétence du tribunalcorrectionnel) et contraventions (compétence du tribunal de police et de la juridiction deproximité).

• Verdict, sentence : ces termes bien connus du grand public doivent être en droit utilisés avecprudence. Le mot verdict ne peut être utilisé que pour désigner la décision des jurés d'une courd'assise. Il faut éviter d'utiliser le mot « sentence » : la décision d'une juridiction pénale est, toutsimplement, un jugement, si elle émane d'un tribunal, ou un arrêt, si elle émane d'une cour.

• Condamnation, relaxe, acquittement : on dit qu'une juridiction pénale « entre en voie decondamnation » (ou « prononce une condamnation ») lorsqu'elle juge que la personne poursuivie(le prévenu) est responsable des faits qui lui sont reprochés. Dans le cas contraire, on dit qu'elleprononce un jugement de relaxe (dans le cas du tribunal correctionnel) ou un arrêt d'acquittement(dans le cas de la cour d'assise).

2/ Pour aller plus loin ...

M. Delmas-Marty, Les grands systèmes de politique criminelle, PUF, coll. Thémis. - B. Bouloc,Droit pénal général, coll. Précis - Ph. Conte, P. Maistre du Chambon, J. Larguier, Droit pénalgénéral, Dalloz, A. Colin, coll. U. - Ph. Conte, Droit pénal spécial, Litec. - F. Desportes, F. LeGunehec, Droit pénal général, Economica. - Y. Jeanclos, La justice pénale en France. Dimensionhistorique et européenne¸ Dalloz, coll. Méthodes du droit - J. Larguier, Le droit pénal, PUF, coll.Que sais-je ? - Y. Mayaud, Les grands articles du code pénal, coll. A savoir - J. Pradel, Manuel dedroit pénal général, éd. Cujas. - G. Vermelle, Le nouveau droit pénal, Dalloz, coll. Connaissancedu droit. - M. Véron, Droit pénal spécial, Dalloz, A. Colin, coll. U. - Et bien entendu ... le Codepénal.

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Document 1 :

Document 2 : Les principes de la répression dans la jurisprudence constitutionnelle

A. Conseil constitutionnel, décision n° 88-248 DC du 17 janvier 1989, Loi modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

En ce qui concerne les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la Déclaration des Droits de1789 et de l'article 34 de la Constitution :33. Considérant que selon les auteurs de la saisine, même si le principe des sanctionsadministratives est admis, les articles 42-1 et 42-2 n'en sont pas moins contraires à l'article 8 de laDéclaration de 1789 qui impose que nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et légalementappliquée ainsi qu'à l'article 34 de la Constitution qui réserve à la loi le soin de fixer les garantiesfondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ; qu'en effet, la loi afixé au cas présent des limites financières maximales sans définir de manière précise les infractionspouvant donner lieu à de telles sanctions ;34. Considérant que l'article 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen dispose que"la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puniqu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée";35. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, comme des principes fondamentaux reconnus parles lois de la République, qu'une peine ne peut être infligée qu'à la condition que soient respectés leprincipe de légalité des délits et des peines, le principe de nécessité des peines, le principe de non-rétroactivité de la loi pénale d'incrimination plus sévère ainsi que le principe du respect des droitsde la défense ;

B. Conseil constitutionnel, décision n° 2012-240 QPC

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseilconstitutionnel ;

Vu le code pénal ;

Vu la loi n° 92-684 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répressiondes crimes et délits contre les personnes ;

Vu la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsiqu'à la protection des mineurs ;

Vu la loi no 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questionsprioritaires de constitutionnalité ;

Vu les observations en intervention produites pour l'Association européenne contre les violences faites auxfemmes au travail par Me Nadjette Guenatef, avocate au barreau de Créteil, enregistrées le 19 mars et le 12avril 2012 ;

Vu les observations produites pour le requérant par la SCP Waquet-Farge-Hazan, Avocat au Conseil d'État età la Cour de cassation, enregistrées le 23 mars et le 6 avril 2012 ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 23 mars 2012 ;

Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

Me Claire Waquet, Me André Soulier, Me Nadjette Guenatef et M. Xavier Potier, ayant été entendus àl'audience publique du 17 avril 2012 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1 . Considérant qu'aux termes de l'article 222-33 du code pénal « Le fait de harceler autrui dans le butd'obtenir des faveurs de nature sexuelle est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende » ;

2. Considérant que, selon le requérant, en punissant « le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir desfaveurs de nature sexuelle » sans définir précisément les éléments constitutifs de ce délit, la dispositioncontestée méconnaît le principe de légalité des délits et des peines ainsi que les principes de clarté et deprécision de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique ;

3. Considérant que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité desdélits et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789,l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits entermes suffisamment clairs et précis ;

4. Considérant que, dans sa rédaction résultant de la loi du 22 juillet 1992 susvisée, le harcèlement sexuel,prévu et réprimé par l'article 222-33 du nouveau code pénal, était défini comme « Le fait de harceler autruien usant d'ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, par unepersonne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions » ; que l'article 11 de la loi du 17 juin 1998susvisée a donné une nouvelle définition de ce délit en substituant aux mots « en usant d'ordres, de menacesou de contraintes », les mots : « en donnant des ordres, proférant des menaces, imposant des contraintes ouexerçant des pressions graves » ; que l'article 179 de la loi du 17 janvier 2002 susvisée a de nouveau modifiéla définition du délit de harcèlement sexuel en conférant à l'article 222-33 du code pénal la rédactioncontestée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'article 222-33 du code pénal permet que le délit deharcèlement sexuel soit punissable sans que les éléments constitutifs de l'infraction soient suffisammentdéfinis ; qu'ainsi, ces dispositions méconnaissent le principe de légalité des délits et des peines et doivent êtredéclarées contraires à la Constitution ;

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6. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une dispositiondéclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de ladécision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseilconstitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sontsusceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficierà l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitutionne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseilconstitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant defixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effetsque la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ;

7. Considérant que l'abrogation de l'article 222-33 du code pénal prend effet à compter de la publication de laprésente décision ; qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date,

D É C I D E :

Article 1er.- L'article 222-33 du code pénal est contraire à la Constitution.

Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet à compter de la publication de laprésente décision dans les conditions fixées au considérant 7.

Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans lesconditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

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Gazette du Palais, 28 juillet 2012 n° 210, P. 3

Rancœur et droit pénal ?

La vie du droit ne s'écoule pas tel un long fleuve tranquille. Elle est l'occasion de combats d'autant plus violents que lesintérêts y sont âprement défendus et toujours dissimulés. Les propos de Jhering sur la lutte pour le droit ou ceux deRipert sur les forces créatrices du droit n'ont donc rien perdu de leur actualité. Il existe une guerre, aussi bien pourl'adoption des textes que pour leur abrogation, où l'échec d'une bataille ne suffit pas à désarmer les adversaires tant lesrancœurs sont profondes et tenaces. La décision médiatique rendue par le Conseil constitutionnel le 4 mai 2012 enmatière de harcèlement sexuel l'illustre parfaitement.

En l'occurrence, il convient de rappeler l'hostilité de toujours d'une minorité de la société française à l'égard d'uneincrimination qui, comme souvent, a coïncidé avec l'hostilité majoritaire de la doctrine juridique. En 1992, que n'a-t-onprédit comme abus et risques d'erreur judiciaire à son sujet ? L'incrimination du harcèlement sexuel, à la rédactionmaladroite, fut dénoncée dès l'origine comme offrant au juge un pouvoir d'appréciation excessif, et aux salariéesvictimes un moyen de faire chanter leurs supérieurs. Pourtant, ces abus et erreurs ne se sont pas produits. Au point quedes parlementaires ont ensuite cru pouvoir simplifier ce texte afin de le rendre plus efficace. La doctrine n'a pas salué ladisparition des termes ampoulés qui alourdissaient sa rédaction initiale. Elle a dénoncé une incrimination sans limite etrepris la rengaine d'un risque de dérapage, voire d'instrumentalisation. C'était le résultat d'un mélange idéologiquedouteux : conservatisme doublé de machisme et d'anti-américanisme primaire. A été dénoncée la « pénalisation duquotidien ». Pourtant, une telle critique s'est exprimée, là encore, en pure perte : l'incrimination simplifiée est restée envigueur pendant plus de dix ans, sans démultiplier les poursuites ni provoquer les abus annoncés.

Il ne s'agit pas ici de la défendre, car il est inadmissible qu'une infraction ne soit pas définie. Il s'agit de s'interroger surles raisons qui ont conduit le Conseil constitutionnel à son abrogation. En effet, on peut fortement douter de lajustification avancée. En quoi l'incertitude du harcèlement sexuel « simplifié » était-elle plus gênante que celle de lacorruption de mineurs ou des « autres » agressions sexuelles avec lesquelles elle voisinait dans le Code pénal sans quepersonne ne s'inquiète de leur absence de définition ? En quoi cette incertitude posait-elle plus de difficulté que celle duracolage « passif », de la bande organisée ou de l'appartenance à un groupe potentiellement violent, qui ont passé sansencombre le contrôle de constitutionnalité ? Voir dans la décision du 4 mai 2012 un retour à l'orthodoxie permettant degarantir – enfin – l'effectivité du principe de légalité serait inexact. La motivation du Conseil est trop précise pourannoncer une attitude plus exigeante : ce n'est pas tant le flou de l'incrimination qui a été sanctionné que le fait qu'elleait été privée des bornes initialement fixées par le législateur. Il faut comprendre que le Conseil a voulu s'opposer àl'extension de son champ d'application. C'est précisément là que réside la difficulté. C'est précisément là que réside lavictoire de ceux qui ont toujours cherché à minimiser la gravité d'un tel comportement. Cette décision peut être lue, surle plan sociétal, comme une revanche de ceux qui ont toujours condamné le principe même d'une telle incrimination.

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Mais, bien entendu, cette conception du droit perçu comme procédant d'un rapport de forces n'engendre que desvictoires de courte durée. Le Parlement s'apprête à adopter une nouvelle incrimination dont le texte n'est guère plussatisfaisant, mais qui relancera le mouvement du balancier législatif. L'important serait-il seulement d'avoir le derniermot ?

Par Emmanuel DREYER

Professeur Université Paris Sud-XI Faculté Jean Monnet

C. Conseil constitutionnel, décision n° 2010-6/7 QPC du 11 juin 2010

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code électoral, notamment son article L. 30 ; Vu le code pénal ; Vu la loi n° 95-65 du 19 janvier 1995 relative au financement de la vie politique ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questionsprioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour M. H. par la SCP Ortscheidt, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 14 mai 2010 ; Vu les observations produites pour M. P. par Me Patrick Tabet, avocat au Barreau de Paris et près les tribunaux de Saint-Pierre-et-Miquelon, enregistrées le 19 mai 2010 ; Vu les observations produites pour M. A. par la SELARL Flécheux et Associés, avocat au Barreau de Paris, enregistrées le 20 mai 2010 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 20 mai 2010 ; Vu les nouvelles observations produites pour M. P. par Me Patrick Tabet, enregistrées le 26 mai 2010 ; Vu les pièces produites et jointes aux dossiers ; Me Xavier Flécheux, pour M. A., Me Virginie Colin, pour M. P., Me Jérôme Ortscheidt, pour M. H., et MmeSophie Rimeu, désignée par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 2 juin 2010 ; Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les deux questions transmises par la Cour de cassation portent sur la même dispositionlégislative ; qu'il y a donc lieu de les joindre pour y répondre par une seule décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 7 du code électoral : « Ne doivent pas être inscrites sur la listeélectorale, pendant un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenuedéfinitive, les personnes condamnées pour l'une des infractions prévues par les articles 432-10 à 432-16,433-1, 433-2, 433 3 et 433-4 du code pénal ou pour le délit de recel de l'une de ces infractions, défini par lesarticles 321 1 et 321-2 du code pénal » ;

3. Considérant que, selon les requérants, ces dispositions portent atteinte aux principes de la nécessité et del'individualisation des peines garantis par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de1789;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peinesstrictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguéeantérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que le principe d'individualisation des peines qui découlede cet article implique que la peine emportant l'interdiction d'être inscrit sur une liste électorale et l'incapacitéd'exercer une fonction publique élective qui en résulte ne puisse être appliquée que si le juge l'aexpressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ;

5. Considérant que l'interdiction d'inscription sur la liste électorale imposée par l'article L. 7 du code électoralvise notamment à réprimer plus sévèrement certains faits lorsqu'ils sont commis par des personnesdépositaires de l'autorité publique, chargées d'une mission de service public ou investies d'un mandat électifpublic ; qu'elle emporte une incapacité d'exercer une fonction publique élective d'une durée égale à cinq ans ;qu'elle constitue une sanction ayant le caractère d'une punition ; que cette peine privative de l'exercice du

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droit de suffrage est attachée de plein droit à diverses condamnations pénales sans que le juge qui décide deces mesures ait à la prononcer expressément ; qu'il ne peut davantage en faire varier la durée ; que, même sil'intéressé peut être, en tout ou partie, y compris immédiatement, relevé de cette incapacité dans lesconditions définies au second alinéa de l'article 132-21 du code pénal, cette possibilité ne saurait, à elle seule,assurer le respect des exigences qui découlent du principe d'individualisation des peines ; que, par suite,l'article L. 7 du code électoral méconnaît ce principe et doit être déclaré contraire à la Constitution ;

6. Considérant que l'abrogation de l'article L. 7 du code électoral permet aux intéressés de demander, àcompter du jour de publication de la présente décision, leur inscription immédiate sur la liste électorale dansles conditions déterminées par la loi,

D É C I D E :

Article 1er.- L'article L. 7 du code électoral est déclaré contraire à la Constitution.

Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans lesconditions prévues à l'article 23 11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Document 3 : Les principes du droit pénal dans la jurisprudence judiciaire

Cass., chambre criminelle, 18 juillet 1973, PetitAttendu que, pour déclarer Petit coupable de la contravention prévue per l'article R 40-1 Code pénal,

l'arrêt attaquée énonce que ce prévenu a volontairement fermé la porte de son bureau pour s'opposer à lasortie de Bonifas, qui, sous l'effet du choc, fut blessé à la main droite; que ces contusions entraînèrent uneincapacité totale de travail pendant huit jours;

Attendu qu'en l'état de ces constatations exemptes d'insuffisance, la cour d'appel a donné une baselégale à sa décision; qu'en effet, la contravention, définie par l'article R 40-1 susvisé, est constituée lorsqu'ilexiste un acte volontaire de violence, quel que soit le mobile qui a inspiré cet acte, alors même que sonauteur n'aurait pas voulu le dommage qui en est résulte; qu'ainsi les deux moyens doivent être rejetés;Et attendu que la procédure est régulière;Par ces motifs, - Rejette...

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Document 4 : Des exemples de décisions de justice en matière pénale

CIRCULATION ROUTIÈRE

Obligations des usagers - Usage d'un téléphone tenu en main - Activation de l'appareil

L'usage d'un téléphone, au sens de l'article R. 412-6-1 du Code de la route, s'entend de l'activation de toutefonction par le conducteur sur l'appareil qu'il tient en main.

Cass. crim., 13 sept. 2011, no 11-80432 : Michel X – F – P+B – Rejet pourvoi c/ CA Reims, 25 nov. 2010 –M. Louvel prés. ; M. Straehli, cons. rapp. ; M. Blondet, cons. ch.

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Michel X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 25 novembre 2010, qui, pourusage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation, l'a condamné à 200 eurosd'amende ;

Vu le mémoire personnel produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 § 1 de la Convention européenne desdroits de l'homme et l'article préliminaire du code de procédure pénale ;ù

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article R. 412-6-1 du code de la route ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a été cité devant le tribunalcorrectionnel pour conduite d'un véhicule automobile malgré l'annulation du permis de conduire et conduited'un véhicule en faisant usage d'un téléphone portable tenu en main ; que le tribunal a relaxé le prévenu duchef du délit mais l'a déclaré coupable de la contravention ; que M. X... et le ministère public ont relevéappel de cette décision ;

Attendu que, pour confirmer le jugement sur la culpabilité et l'aggraver sur la peine, l'arrêt retient que si leprévenu affirme qu'il n'était pas en train de téléphoner lors du contrôle effectué par les gendarmes, le relevéde communications qu'il produit ne suffit pas à établir ses dires dès lors que cette pièce ne recense pas lesappels reçus, mais seulement ceux passés à partir de l'appareil ; que les juges ajoutent qu'en manipulant leclavier de l'appareil avec son pouce pour vérifier la réception de SMS, ainsi qu'il le déclare, M. X... a, sansambiguïté, fait usage de son téléphone tenu en main ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision, sans renverser la charge de la preuve,dès lors que, d'une part, il appartient au prévenu de rapporter la preuve contraire aux énonciations duprocès-verbal constatant l'infraction, en application de l'article 537 du code de procédure pénale, lequel estconforme aux dispositions conventionnelles invoquées, et que, d'autre part, l'usage d'un téléphone, au sensde l'article R. 412-6-1 du code de la route, s'entend de l'activation de toute fonction par le conducteur surl'appareil qu'il tient en main ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi

Note par Stéphane DETRAZ

L'article R. 412-6-1 du Code de la route érige en contravention de la deuxième classe l'« usage d'untéléphone tenu en main » par le conducteur d'un véhicule en circulation. Le texte indique suffisamment quel'infraction consiste non pas simplement à tenir l'appareil en main mais bien, en sus, à l'utiliser. En quoi alorsconsiste l'« usage » prohibé ? Naguère la réponse eût été aisée : à téléphoner. Mais, aujourd'hui, lestechniques aidant, un téléphone – si l'on peut encore recourir à ce vocable – a d'autres emplois (consulterdes messages électroniques, visionner une vidéo, écouter de la musique, etc.), en sorte qu'il convient dedéterminer si ces derniers entrent dans les prévisions du texte d'incrimination. Le présent arrêt apporte uneréponse affirmative.

En l'espèce, un individu est poursuivi, entre autres, sur le fondement du texte précité et, pour sa défense,prétend qu'il n'était pas en train de téléphoner au moment du contrôle opéré par les gendarmes. Il est

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néanmoins condamné en appel, ce qu'approuve la Cour de cassation. Elle relève en effet que le procès-verbal dressé établit que le prévenu se servait du téléphone et que, aux dires de l'intéressé, il manipulait leclavier de l'appareil avec son pouce pour vérifier la réception de SMS ; or, indique-t-elle, l'usage interdit« s'entend de l'activation de toute fonction par le conducteur sur l'appareil ». La décision se comprendaisément : l'article R. 412-6-1 du Code de la route chercher à prévenir la distraction du conducteur quirésulterait de l'utilisation du téléphone, même si cette dernière ne consiste pas à communiquer oralement.

Néanmoins, l'affaire montre le ridicule de la « loi », à deux égards. D'une part, le texte n'évoque quel'utilisation d'un téléphone, alors que l'emploi d'autres appareils est susceptible de compromettre l'attentiondu conducteur (jeu ou agenda électroniques, etc.). Certes, l'article R. 412-6-2 sanctionne depuis 2008 ladétention, dans un véhicule en circulation, d'un appareil en fonctionnement doté d'un écran et ne constituantpas une aide à la conduite ou à la navigation, mais uniquement lorsqu'il est placé « dans le champ de visiondu conducteur » ; cette précision, interprétée strictement, devrait exclure l'hypothèse d'un appareil (tabletteélectronique, etc.) déposé sur le siège passager avant ou même sur les genoux du conducteur. D'autre part,la Cour de cassation se contente en l'espèce de l'« activation de toute fonction » du téléphone, serait-ellerudimentaire et nécessiterait-elle quelques secondes à peine (par exemple appuyer sur une touchequelconque du téléphone afin d'en réactiver l'écran noirci).

Aussi bien – dès lors que la peine principale est identique dans les deux cas – le pouvoir réglementaireserait-il mieux inspiré de (re-)faire de l'usage d'un téléphone tenu en main un simple cas d'application de lacontravention générale de deuxième classe consistant à ne pas se conformer au II de l'article R. 412-6 duCode de la route, lequel énonce : « Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en positiond'exécuter commodément et sans délai toutes les manœuvres qui lui incombent. Ses possibilités demouvement et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers,par les objets transportés ou par l'apposition d'objets non transparents sur les vitres ».

Il s'agirait alors, au sein de ce texte, d'indiquer que la violation de ses dispositions est présumée (de manièresimple ou irréfragable) en cas d'usage d'un téléphone tenu en main. Néanmoins – pourquoi ? –, lacontravention de l'article R. 412-6 ne fait pas encourir le retrait de points du permis de conduire, attaché àl'inverse à la contravention de l'article R. 412-6-1 (alinéa 3) : il vaut donc mieux jouer de la guitare enconduisant que téléphoner.

LÉGITIME DÉFENSE

N'est pas en état de légitime défense l'individu qui réagit de manière disproportionnée pourrepousser, de nuit, l'entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité.

Cass. crim., 13 déc. 2011, no 10-88699 : Pierre X – Rejet pourvoi c/ CA Versailles, 15 nov. 2010 – M.Louvel, prés. ; M. Nunez, cons. rapp. – SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP Waquet, Farge etHazan, av.

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-5, 122-6, du code pénal, 591 et 593d u c o d e d e p r o c é d u r e p é n a l e , d é f a u t d e m o t i f s e t m a n q u e d e b a s e l é g a l e ;

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a, après requalification des faits, condamné, M. X... du chef de violenceavec arme ayant entraîné une incapacité de travail de plus de 8 jours sur la personne de M. Y...;

" aux motifs qu'il est constant que M. X... connaissait le jeune homme à l'époque âgé de 15 ans, camaradede ses filles, décrit par tous comme un garçon calme et gentil, qu'il n'avait aucune raison de tirer sur lui etqu'il a fait feu sans le reconnaître ; qu'il est aussi constant que M. Y..., qu'il ait été ou pas influencé par M.Z...s'est introduit, de nuit, par escalade, dans le jardin de la propriété de M. X... ; que, toutefois, en l'espèce,les circonstances conduisent à écarter l'application de la légitime défense invoquée par le prévenu ; qu'eneffet, il est établi que M. X... a été avisé par M. Y...le soir même à 20 h que « des gens » ou « le fils deDominique » (M. Z...) « pouvait venir chez lui », le but de cette « visite » étant de récupérer une barque ; quebien que le prévenu dise n'avoir pas accordé d'attention à cette information, il ne pouvait manquer de s'ensouvenir en entendant un bruit dans son jardin, de sorte qu'il savait qui pouvaient être ses visiteurs et leursobjectifs, d'un enjeu très relatif s'agissant de l'éventuelle prise de possession d'une barque ; qu'aucun indicene permet de retenir qu'il pouvait objectivement craindre un danger pour ses filles qui dormaient dans lamaison ; que, nonobstant cela, il est sorti dans son jardin avec une arme dont, en tant que chasseurnotamment, il n'ignore pas la dangerosité ; qu'en outre M. X... a fait feu, très vite, et sans sommation alorsque rien ne pouvait laisser présager un danger imminent ; que ce tir immédiat et cette absence desommation, contestés par le prévenu, ressortent de l'ensemble des dépositions : les déclarations constantesde M. Y..., celles de M. A...et de M. Z...; que de plus le prévenu est de mauvaise foi quand il affirme avoir tiré

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dans le sol sur du béton qui aurait fait ricocher la balle ce qui s'est démenti par les constatations médicalessur les blessures de la victime qui font apparaître au contraire qu'il a parfaitement maîtrisé son tir dans lesjambes ; qu'au vu de ces éléments qui témoignent d'une nette disproportion entre l'atteinte à son bien àlaquelle M. X... s'attendait, et les moyens employés par lui, à savoir l'utilisation d'un fusil à pompe, la légitimedéfense ne peut être retenue ;

" 1) alors qu'est présumé avoir agi en état de légitime défense celui qui agit pour repousser, de nuit, l'entréepar effraction, violence ou ruse dans un lieu habité ; qu'il appartient à l'accusation de démontrer l'existenced'éléments établissant que celui qui a repoussé l'individu entrant de nuit chez lui n'était pas victime d'uneeffraction ou intrusion injustifiée, que cette intrusion ne lui donnait aucune raison de craindre pour sasécurité ou celle d'autrui et qu'il était en mesure d'apporter une réponse proportionnée à l'atteinte dont il estvictime ; que l'arrêt attaqué qui constate que M. Y...s'est introduit de nuit par escalade dans la propriété deM. X... et écarte la légitime défense au motif qu'aucun indice ne permet de retenir que M. X... pouvaitcraindre un danger pour lui ou pour ses filles a inversé la charge de la preuve et violé l'article 122-6 du codep é n a l ;

" 2) et alors que l'arrêt attaqué qui affirme que les éléments de l'information témoignaient d'une nettedisproportion entre l'atteinte à son bien à laquelle M. X... s'attendait et les moyens employés par lui, sansconstater qu'il était également établi que M. X... ne pouvait craindre pour sa personne ou celle de ses fillesn'est pas suffisamment motivé ni légalement justifié " ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-5, 122-6, du code pénal, 591 et 593du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a, après requalification des faits, condamné, M. X... du chef de violenceavec arme ayant entraîné une incapacité de travail de plus de 8 jours sur la personne de M. Z...;

" aux motifs que, bien qu'il le conteste, il ne fait aucun doute que M. X..., quand il a tiré sa secondecartouche, savait sur qui il faisait feu ; qu'à ce moment là il s'était rendu compte qu'il avait blessé M. Y...cequi lui permettait, à supposer qu'il ne l'ait pas déjà compris, de réaliser qui étaient ses « visiteurs » ; qu'enoutre la lumière était allumée ; que de plus comme il l'indique lui-même, il a vu M. Z...debout sur un despiliers de sa clôture, qui l'insultait et qui a jeté une bouteille dans sa direction, ce dont attestent ses deuxfilles ; que sur les circonstances du tir, le prévenu et la victime divergent sur deux points : d'abord le lieu oùse trouvait M. Z...au moment du tir, ensuite la question de savoir si M. Z...menaçait M. X... avec un marteau ;que M. Z...soutient qu'il n'est pas entré dans la propriété, qu'il se tenait à l'extérieur, derrière le portail ; qu'enoutre, il affirme qu'il n'avait pas de marteau ; que sa version est confirmée sur ces deux points par ses amisainsi que par M. Y...; que M. X... affirme au contraire que M. Z...était à l'intérieur de sa propriété, à 5 mètresde lui avec un marteau dans la main et qu'il a tiré parce qu'il se sentait menacé ; que cette version estconfirmée par sa fille ; qu'il n'a pas été établi au cours de l'instruction que M. Z...se trouvait à l'intérieur de lapropriété quand M. X... a tiré ; que les éléments matériels démontreraient plutôt le contraire ; que des tracesde sang ont été trouvées dans l'allée derrière le portail, par ailleurs la nature de ses blessures laisse penserqu'il était relativement éloigné de M. X... l'expertise balistique mentionnant qu'en tout cas il était à plus de 3mètres de lui ; que, quant au marteau qui a été retrouvé sur place, sa position (debout) et sa taille rendentpeu vraisemblable d'une part qu'il soit tombé ainsi lors du coup de feu ; que, d'autre part, que M. Z...ait puêtre porteur d'un marteau pendant toute la soirée sans qu'aucun de ses accompagnements, et notammentM. Y...ne l'ait remarqué ; qu'au final, il est établi qu'avant de tirer, M. X... a identifié M. Z...; que ce dernier,énervé par les substances ingérées et par le premier tir a jeté une canette dans la direction de Pierre X... etl'a insulté ; qu'en revanche aucun élément matériel ne permet de retenir que M. Z...s'est avancé vers M. X...en le menaçant d'un marteau ; que dès lors en l'absence de danger imminent contre sa personne, la ripostedu prévenu aux actes de provocation de M. Z...apparaît largement disproportionnée et exclut la légitimedéfense ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les faits de violences volontaires ayant entraînéune incapacité totale de travail supérieure à 8 jours tant sur M. Y...que sur M. Z..., avec l'usage d'une armee n l ' e s p è c e u n f u s i l à p o m p e d e t y p e M o s s b e r g , s o n t c a r a c t é r i s é s ;

" 1) alors qu'est présumé avoir agi en état de légitime défense celui qui agit pour repousser, de nuit, l'entréepar effraction, violence ou ruse dans un lieu habité ; qu'en énonçant, pour considérer que M. Z...n'était pasentré par effraction chez M. X..., que les éléments matériels démontreraient plutôt le contraire, que destraces de sang ont été trouvées dans l'allée derrière le portail et que la nature de ses blessures laissepenser qu'il était relativement éloigné de M. X... l'expertise balistique mentionnant qu'en tout cas il était àplus de 3 mètres de lui, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs hypothétiques privant sa décision demotifs en violation des textes susvisés ;

" 2) et alors qu'il ressort des constatations de l'arrêt que M. Z..., énervé par des substances qu'il avaitingurgitées, avait été vu par le prévenu debout sur un pilier de sa clôture d'où il l'insultait et envoyait en sadirection, à l'intérieur de la propriété une bouteille ; qu'il ressort suffisamment de ces constatations que le

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prévenu a agi pour repousser l'intrusion de nuit par violence dans son domicile en sorte qu'il était présuméêtre en état de légitime défense ; que la cour d'appel n'a pas ainsi tiré les conséquences légales résultant deses propres constatations de fait " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour écarter la légitime défense invoquée par M. X... sur le fondement de la présomptioninstituée par l'article L. 122-6, alinéa 1°, du code pénal, l'arrêt prononce par les motifs reproduits auxmoyens ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que le prévenu a eu une réaction disproportionnéeface au comportement de ses victimes qui ne constituait pas un danger grave et imminent, la cour d'appel ajustifié sa décision ;

Que dés lors les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Note par Emmanuel DREYER

Les décisions en matière de légitime défense sont suffisamment rares pour que l'on signale celle-ci, rejetantle pourvoi formé contre un arrêt d'appel ayant écarté un tel moyen. En l'occurrence, était discutée la portéede la présomption énoncée à l'article 122-6 du Code pénal : « est présumé avoir agi en état de légitimedéfense celui qui accomplit l'acte : 1° Pour repousser, de nuit, l'entrée par effraction, violence ou ruse dansun lieu habité (...) ». La portée de ce texte, tendant à justifier tant la légitime défense des personnes que lalégitime défense des biens, est restée longtemps incertaine. En effet, deux interprétations peuvent en êtredonnées. La logique voudrait qu'une telle présomption soit irréfragable. Lorsqu'une infraction est commisepour repousser de nuit l'entrée par effraction d'un individu dans un lieu habité, il n'y aurait alors aucunediscussion possible sur la nécessité de l'acte de défense : peu importe l'éventuelle disproportion de lariposte à une telle agression.

Reprise de l'ancien Code pénal, cette disposition tendait manifestement à protéger la propriété en laissantl'occupant des lieux libre d'en défendre les occupants, fût-ce de manière excessive, compte tenu de l'effroiqu'une telle invasion peut susciter la nuit. Mais il paraît bien difficile de tolérer aujourd'hui un telraisonnement. Aussi, la cour d'appel a-t-elle considéré que la présomption en cause n'était que simple, etadmis qu'elle pouvait être discutée. Au cas d'espèce, elle a estimé qu'une telle présomption était combattuepar différents éléments démontrant l'absence de nécessité de l'acte : en l'occurrence, le prévenu avait étéinformé qu'un tiers avec lequel il était en conflit viendrait rechercher une « barque » dans sa propriété. Il atiré sur lui au moment où il escaladait la grille entourant sa propriété, « très vite et sans sommation alors querien ne pouvait laisser présager un danger imminent ». Car, ajoute la cour, « aucun indice ne permet deretenir qu'il pouvait objectivement craindre un danger pour ses filles qui dormaient dans la maison ». Elle adonc conclu « qu'au vu de ces éléments qui témoignent d'une nette disproportion entre l'atteinte à son bien àlaquelle M. X s'attendait, et les moyens employés par lui, à savoir l'utilisation d'un fusil à pompe, la légitimedéfense ne peut être retenue », et la haute juridiction l'approuve, au motif qu'« en l'état de ces énonciations,il résulte que le prévenu a eu une réaction disproportionnée face au comportement de ses victimes qui neconstituait pas un danger grave et imminent ».

En statuant de la sorte, la Cour de cassation prend implicitement mais nécessairement position sur lecaractère simple de la présomption invoquée par le prévenu. Elle fragilise ainsi la vertu intimidante de cettedisposition. Mais une telle solution paraît seule compatible avec le caractère exceptionnel des faitsjustificatifs qui, neutralisant la répression, ne peuvent être admis sans contrôle par un juge.

VIE PRIVÉE

Délit d'atteinte à l'intimité de la vie privée - Diffusion de paroles - Nécessité d'une atteinte à l'intimité de la vieprivée (non) - Liberté d'information - Référé

Constitue une atteinte à l'intimité de la vie privée, que ne légitime pas l'information du public, la captation,l'enregistrement ou la transmission, sans le consentement de leur auteur, de paroles prononcées à titre privéou confidentiel.

Cass. 1re civ., 6 oct. 2010, no 10-21822 : Mme Y – F – P+B – Cassation CA Paris, 23 juill. 2010 – M.Charruault, prés. – SCP Roger et Sevaux, SCP de Chaisemartin et Courjon, av.

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Document 5 : Les éléments constitutifs de l'infraction de « rébellion »

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Exercices

1/ Suivez la méthodologie fournie dans la fiche précédente et réalisez la fiche des arrêts reproduits dans ledocument n° 4.

2/ Quelles garanties peut-on invoquer dans l'application des sanctions pénales? Quels organes peuventcontribuer à en garantir le respect?

3/ Quel est le rôle du Conseil constitutionnel dans la garantie des grands principes du droit pénal ? Donnezdes exemples.

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