henri corneille agrippa
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7/22/2019 Henri Corneille Agrippa
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LE JOURNAL DE NERVURE N8 - NOVEMBRE 2000 1
Parmi les lettrs et les savants de la Re-naissance, Henri Corneille Agrippa de
Nettesheim apparat quelque peu nglig parles historiens. Cette personnalit marquante
du dbut du XVIme sicle, possde pourtantquelques titres figurer en bonne place dansune histoire intellectuelle. Vivant sujet decontradiction, Agrippa, qui fut soldat, en-seignant, juriste, astrologue et mdecin, estlauteur dune uvre abondante, elle-mmecontradictoire, dont les textes les plus c-lbres sont une apologie du sexe fminin, untrait de philosophie occulte et un essai surlincertitude et labus des sciences, qui pr-sentent un point commun, par-del leurs di-vergences, celui de jouer avec le sens com-mun de lpoque. Si sa renomme fut grande,elle lui valut souvent de subir lironie la pluscinglante comme les rumeurs les plus ignobles;vritable feu follet, sans doute plus par n-cessit que par nature, Agrippa dut sans cesse
parcourir lEurope, cherchant un asile ou uneprotection, fuyant la censure, la perscution
et la prison. Alors que Rabelais le brocardesur un mode mineur mais efficace(1), les j-suites se chargeront vite de lui tailler un ha-
bit sa dmesure : Agrippa tait un magi-cien, autrement dit un sorcier, un suppt dudiable ; mieux, il tait le diable lui-mme(2).Mais ntait-ce pas faire l lloge de son ex-traordinaire vivacit de pense ? Agilit delesprit qui droutera tant la postrit quelle
prfra retenir dAgrippa ce quelle voulutbien y t rouver. Alors que l occultisme telquil se constitue au cours du XIXme sicle,en raction la modernit, linstalle dans sagnalogie, le courant rationaliste voit en luiun prcurseur, en dpit de ses divagations as-trologiques et hermtistes, tandis que le mou-vement dit fministe le considre quelque-fois comme un jalon essentiel dans la rflexionsur la diffrence des sexes et leur rle dans
la socit. La recherche rcente, tout en res-tant parfois tributaire de ce partage du sensau sein de luvre, a choisi dtudier son li-
bertinisme et son scepticisme, et sest inter-roge sur loriginalit de son hermtisme,
pour conclure son caractre de transitionentre Moyen-Age et Renaissance. Borgssuggrait dans lImmortel, qu force dtretout, Agrippa finissait par ntre rien(3). Neserait-il pas judicieux de se demander silnest pas plus quun prte-nom, revtu dunmanteau aux couleurs certes clatantes maisdisparates ?
Le mouvement perptuel
La vie de Cornelius Agrippa de Nettesheimpouse trs exactement les vicissitudes po-litiques et la gographie intellectuelle de son
temps dont les centres ne sont plus unique-ment les universits et les monastres mais
encore les acadmies et les cours princires.Il faut ajouter que cette biographie hors ducommun sincarne dans quelques-unes desgrandes figures qui traduisent la Renais-
sance lmergence croise du pouvoir dsa-cralis et de lindividu moderne : Agrippasera guerrier, agent secret, diplomate, rudithumaniste, courtisan, astrologue, ingnieuret mdecin. Il nest certes pas indiffrent quilsoit n en Allemagne dans une de ces villesrhnanes en pleine bullition et devenues lesfoyers des ides nouvelles. On apprcieramieux le sens et la porte de luvre dAgrippasi lon prend bien garde quil est lexactcontemporain dErasme, de Lefvre dEtaples,de Paracelse, de Zwingli, de Calvin, de Lu-ther et de Copernic. Cologne, o il est n en1486 dans un milieu de petite noblesse sansgrand avenir, tait une ville dEmpire, sige
dune solide universit o le souvenir dAl-bert le Grand restait vif. On ne sait rien deson enfance et peut-tre est-il significatif quilapparaisse notre mmoire sur les bancs des
universits, Paris et Cologne. Les biographessemblent hsiter sur les dates et sur la naturedes tudes entreprises par Agrippa qui a tou-
jours affirm avoir obtenu les doctora ts dedroit et de mdecine en 1507-1508. A partirde cette date, ce gnie prcoce ne connatra
plus que lerrance travers lEurope : danstous les domaines, il tentera le sort, sap-
puyant sur ses prodigieuses connaissancespour obtenir une charge des Grands et desRois. Mais toujours son indpendance des-
prit et son comportement htrodoxe lem-pcheront de trouver stabilit et scurit ma-trielle. Gnie prcoce il le fut indniablement :cest trs tt en effet, quil se plongea dansla lecture des Anciens et des textes fonda-mentaux de lhermtisme et quil sinitia augrec et lhbreu. Jeune tudiant, il appar-tenait une socit savante avant la lettre,
comme il y en avait tant alors (les sodali-tates), dont faisaient aussi partie Charles de
LE
JO
URNALDE
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Commission paritaire n 70088
Supplment NERVUREJournal de Psychiatrien 8 - Tome XIII -Novembre 2000
(ne peut tre vendu sparment)Pour les mentions lgales relatives auprsent supplment consulter ldi-tion de Nervure.
Bovelles, Symphorien Champier, Germainde Banay qui tous se passionnaient pour lesnouvelles tendances, autrement dit pour lru-dition, le retour lantiquit, les sciences sa-
cres et une lecture attentive des textes bi-bliques. Cest au sein de ce regroupementaffinitaire de haut niveau, quAgrippa cha-fauda une malencontreuse quipe militaireen Espagne qui lui apparut plus tard commela scne primitive de sa destine : rvlationmagique dun souterrain par lequel il parvint schapper, rencontre avec un philosophesarrazin, retour par le Midi et la Bourgogne,rien ne manque cette entre en matire deloprateur de merveilles. Aprs cet pisodefondateur, Agrippa se fixera Dle o il ob-tint un poste de lecteur au collge de la ville,ayant su sattirer les bonnes grces de la fillede Maximilien, Marguerite dAutriche, quigouvernait la ville. A peine entr en fonc-tion, il sinsra dans la polmique naissante propos des thses de Jean Reuchlin et com-menta le Verbo mirifico que les Dominicains
de Cologne tentaient de faire interdire. Enguise dintroduction ce cours, Agrippa fitlloge de Marguerite, prsente comme la
plus exemplaire des femmes. Cette apologie,transforme, sera publie vingt ans plus tard.Souponn dhrsie, Agrippa dut senfuir Londres, y travailla commenterSaint Paul, regagna sa ville natale, rencon-tra Trithme qui le considra ds lors commeson disciple - il lui lgua, dailleurs, ses ma-nuscrits. La rencontre avec Trithme est d-terminante dans la biographie intellectuelledAgrippa. Trithme a jou un grand rledans la diffusion des thses concernant laKabbale et la magie naturelle ainsi que dansle dveloppement du got pour les crituressecrtes(4). Cest lui quAgrippa soumit lemanuscrit de laPhilosophie occulte et il nest
pas outr daffi rmer que sans Trithme ,
Agrippa nexisterait pas ou, du moins, nau-rait pas la mme physionomie que nous luiconnaissons.Aprs un bref passage au service imprialdes mines, Cologne, Agrippa a tent for-tune en Italie o il participa la campagnecontre Venise pendant laquelle il sera faitchevalier. Cette action militaire ouvrit unelongue priode italienne, qui se termina en1517 et savre importante dans son chemi-nement intellectuel. Devenu enseignant Pise, Turin puis Pavie, il commente SaintPaul, Platon et le Poimandres, le plus clbredes crits hermtiques, poursuit ses rflexionssur le sexe fminin, a des contacts avec lesmilieux kabbalisants et noplatoniciens. Ilsera mme thologien le temps dun concile !Mais lItalie de Machiavel est un continuelchamp de rivalits, de guerres, de misres.
Avant et aprs bien dautres, Agrippa, quiaura beaucoup appris du vivier italien, se r-
Christian Btron
LIVRES
Usure dans linstitution
2me
ditionDaniel Brandho
ditions de lcole Nationalede la Sant Publique
Daniel Brandho a t infirmier en psy-
chiatrie. Il dirige actuellement une maison
daccueil spcialise Saint-Etienne. Edit
pour la premire fois en 1991, son livre a
t remani, notamment parce que du fait
des redploiements ou de crations, le
nombre de maisons daccueil spcialises
(MAS) na cess daugmenter. Depuis 1986,
les foyers double tarification (FDT) sont
venus renforcer le dispositif daccueil des
personnes lourdement handicapes. De
telle sorte que les MAS et les FDT sont au-
jourdhui devenus une ralit forte dans le
champ mdico-social. Il propose donc un
tat des lieux, portant la connaissance du
lecteur le nombre des structures, leur ca-pacit, les classes dge de leurs rsidents,
la qualification des personnels, insistant sur
les comptences et les qualits dune nou-
velle catgorie professionnelle : les aides
mdico-psychologiques. Cette seconde
dition, comme la prcdente, tmoigne
des difficults de la vie quotidienne en ins-
titution. Il faut toujours, lors de la premire
rencontre avec une personne lourdement
handicape, surmonter sa crainte. Les soi-
gnants et les ducateurs doivent rester vi-
gilants pour grer les troubles du compor-
tement . Il leur faut un calme imperturbable,
une empathie profonde, la conviction que
la personne handicape nagit pas de fa-
on incohrente pour lui empoisonner lexis-
tence, mais parce que ses penses sont
chaotiques et disperses.
Lusure guette. Il y a dix ans lauteur pres-sentait quon pouvait lutter contre elle par
des mthodes de management appropries.
Il sait aujourdhui, et explique, que le per-
sonnel est motiv si son action sintgre
dans un cadre cohrent, devenant alors ac-
teur et se sentant concern par son travail.
Participent la lutte contre lusure du per-
sonnel, en mme temps que du soin des
rsidents, des disciplines et des activits
particulires. Cest pourquoi la parole a t
donne un animateur datelier dexpres-
sion picturale, un psychologue et rfrent
de groupe de communication ainsi qu un
architecte. Daniel Brandho montre que
cest dabord en grant au mieux les actes
fondamentaux de la vie quotidienne que la
personne handicape peut se sentir en s-
curit. Il nous invite partager son exp-
rience comme ses doutes et ses limites.G. Mass
A en perdre son latin :Henri Corneille Agrippa, oprateur
de merveilles
H. Corneille Agrippa
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stance . Mieux, il nexclut pas la possibi-lit dune parthnogense de lespce hu-maine, rapporte avec complaisance lexis-tence dles o les femmes conoivent sousleffet du vent, et se risque donner commeexemple le cas si particulier de la Vierge Ma-rie. Cette hypothse de la parthnogensevise lgitimer lanalogie de la femme avecle divin sous-jacente tout le trait, et la
disculper dfinitivement du pch originel.Le pch de naissance est avant tout associau dsir sexuel dont Agrippa a tendance exempter la femme. Adam est dailleurs leseul responsable de la chute puisquil aura
pch en connaissance de cause, au contrairede sa compagne qui aura agi en toute igno-rance. Vritable miroir du ciel, la femme sevoit ainsi investie dune cohrence absoluetant sur le plan physique que sur le plan mo-ral. Agrippa loue avec insistance la beautcorporelle, quasi-gomtrique, lharmonie etla finesse des traits des femmes qui sav-rent encore suprieures aux hommes quantaux vertus : elles sont plus courageuses,
pieuses, temprantes et sont capables de sa-crifice. Elles possdent un pouvoir de gu-rison (par le lait maternel, par le sang mens-truel) dont sont dpourvus les hommes, ont
invent par ailleurs les arts libraux et ma-trisent mieux que leurs compagnons ce traitdunion entre lhumanit et son Crateur queconstitue la parole. Le discours dAgrippa
prend une tonalit critique lorsquil dplorelexclusion sociale des femmes et les injus-tices quelles subissent et notamment ltrangeducation qui sert reproduire cette inga-lit et les rendre soumises : peine ne,en effet, la femme, est maintenue oisive lamaison ds ses premires annes, et comme
si elle tait incapable de fonction plus im-portante, elle na pas dautre perspective queles aiguilles et le fil. Tomb du jardin dEden,lhomme a en effet d crer des lois, lois hu-maines, temporelles et accidentelles, qui ontleur origine dans son orgueil. Il nest pas sur-
prenant de voir que la femme, qui obit auxlois naturelles et divines, en soit la premire
victime. La rversibilit de largumentationen faveur de la suprmatie fminine favoriseune forte cohrence du discours mais contientses propres limites : le paradoxe ne permet
pas de sortir dune conception hirarchisedes sexes et du cercle attirance/rpulsion.Reste, comme le remarque R. AntonioliquAgrippa reprsente un cas exemplaire decette vision fministe qui se retrouvera
bien plus, tard chez les romantiques puis chezles surralistes(9).
La thorie magique ou lenombre dor
On doit, incontestablement, rattacher Agrippa ce vaste mouvement intellectuel qui ne se
communes. La question des sexes a toujoursjou un rle dterminant dans le dogme re-ligieux et la formation des orthodoxies, et
plus gnralement dans toute conception delhomme et du monde. Ce nest donc pas unhasard si Agrippa a choisi de dbuter danslenseignement par une discussion appro-fondie de cette redoutable question. Lint-rt de ce trait, et ce ne fut dailleurs pas le
seul crit quil consacra au sexe fminin, estde rassembler en peu de pages lensembledes arguments dvelopps par les championsdes femmes depuis le dbut du XVImesicle(8).Mais sil se rattache ce courant fministeau demeurant trs composite, cest pour mieuxlui donner la cohrence quil navait pas jus-qualors. Agrippa unifie en effet des discoursdisparates aux origines diverses, tant sur le
plan doctrinal que sur le plan du contexte so-ciologique. Il joue l pleinement son rledauteur hermtiste qui sattache dgagerlesprit, la quintessence, dune matire confuse.En conclusion de ce trait, il rappelle quil a montr la prminence du sexe fminindaprs son nom, le lieu, et la matire de sacration, et quelle dignit suprieure lhommeelle a reu de Dieu , en sappuyant sur lanature, les lois humaines, diverses autorits,
divers raisonnements, divers exemples .Ctait rappeler le plan suivi dans ce textemthodique o sont tour tour convoqusltymologie, les arguments dautorit - tra-vers les Ecritures, Saint Paul et Saint Au-gustin, mais aussi Pline, Galien, Avicenne -et les explications naturelles et historiques. La femme fut le dernier ouvrage de Dieuqui lintroduisit dans notre monde comme lareine dun royaume dj prpar pour elle.Cette affirmation des premires pages rendfidlement le ton gnral de louvrage etmontre combien Agrippa accordait un statutexceptionnel la femme quil considrecomme un signe du Divin sur terre et presquecomme une preuve incarne de lexistencede Dieu. Cette thse suppose davoir prala-
blement cart la conception thologique do-minante pour laquelle une maldiction sat-
tache au sexe fminin pens comme seconddans le dessein de Dieu, comme infrieure
physiquement et intellectuellement lhomme,et comme indissociablement lie au pchoriginel. Conue avec les anges au Paradis,alors quAdam est issu du limon de la terreet associ tout phnomne de corruption,Eve, dont le nom signifie vie, ne lui est pasinfrieure dans lordre de la Cration. Assu-rant la reproduction de lespce, elle en in-carne bien au-contraire le dynamisme et lavitalit. Agrippa exprime ce propos des po-sitions originales, en insistant sur la respon-sabilit premire de la femme dans la gn-ration. Prenant appui sur Galien et Avicenne,il minimise la part de lhomme en la rdui-sant ntre quun accident de la sub-
solu partir pour Metz. Durant deux ans, ily occupera un poste de jurisconsulte, jouantl un rle dcisif de mdiateur des conflits
privs et de ngociateur dans les affaires ex-trieures de la cit. Ses prises de position enfaveur des supposes sorcires, des travauxde thologie bien tmraires, provoqurent
de si vives rsistances quil dut senfuir. Ilvcut de la mdecine Berne, Fribourg, Co-logne et Genve. La faveur semble alors ve-nir du royaume de France : Louise de Savoie,mre de Franois 1er, lappelle son service titre de mdecin et astrologue mais il a letort, simple navet ? jeu maladroit avec lesdiffrentes factions?, de se commettre avecle conntable de Bourbon... Il dut quitter Lyon
pour Anvers, o il exera la mdecine jus-quen 1530. A la mme date, pourvu dunoffice imprial Malines, et malgr cettenouvelle fonction, il fut emprisonn pourdettes. La publication de ses uvres, qui cir-culaient jusqualors par la copie, provoquales attaques grandissantes des thologiens dela facult de Louvain. Le soutien du lgat du
pape, de lvque de Lige et de larchevquede Cologne, auprs duquel il finira par se r-
fugier, lui permirent dchapper linquisi-tion et la perscution. Est-ce pour se sous-traire cette hostilit croissante des milieuxgermaniques, et dans lespoir de retrouver lafaveur de la cour de France, toujours est-ilquon le retrouve Grenoble, en 1535, o ilmourra la mme anne. Il laissait une uvreabondante qui atteste de son esprit universelet que charpentent les traits de la philoso-
phie occulte, de la prminence du sexe f-minin, de lincertitude et de labus des sciencesauxquels il faut ajouter de nombreux m-moires de dfense, crits polmiques, textesthologiques et mme des traits de lex-
ploitation des mines et des feux de guerre(5).Ce petit homme infatigable et pugnace aura
par ailleurs tiss un large rseau damitis etdchanges dont il reste une assez volumi-neuse correspondance(6), vritable biographie
intellectuelle en acte, qui rend compte ausside la profonde humanit de celui qui a pucrire propos de sa troisime et dernirepouse : elle est morte, morte, et avec elletout est mort en moi (7).
La femme ou le miroir du ciel
Le trait deLa noblesse et de la prexcel-lence du sexe fminin sinscrit dans un cou-rant littraire en vogue au dbut du XVIme
sicle et peut tre considr comme lex-pression la plus acheve et sans doute la plusradicale dun discours sur la femme apparu la fin du Moyen-Age. Ce texte se prsentecomme une dissertation, un exercice dcole,dont les conditions dcriture et dlabora-tion prvalent peut-tre sur largumentationdveloppe. Rdig en 1509, dans le but dat-
tirer les faveurs de Marguerite dAutriche, ilvoque avant tout ces interminables joutesoratoires, hritires de la dispute mdivale,au cours desquelles les universitaires ga-gnaient ou perdaient une rputation et o cequi importait tait moins le contenu mmede la discussion que la capacit dvelop-
per de faon cohrente une argumentationcontraire celle de ladversaire. Dans un telcadre, il nest pas tonnant de voir la notionde paradoxe, et les figures rhtoriques quilaccompagnent, prendre une place telle quon
peut lriger en genre l ittraire particulier.On peut certes dire quAgrippa a fait llogede la femme comme Erasme a pu faire celuide la folie. Mais comme dans le cas dErasmeet de nombreux auteurs paradoxaux , le
procd rhtorique renoue ici avec la fonc-tion de recherche philosophique de la vrit
que lui accordait lAntiquit et permet la libreexpression dune pense critique des croyances
LIVRES
Penser la psychiatrie et sonhistoireCahiers de lAssociation pour laFondation Henri EyNumro 1 printemps 2000
La premire partie de ce premier numro
regroupe des commentaires de Th. Trmine,
P. Belzeaux, E.T. Mahieu, S. Chebili et R.M.
Palem concernant les travaux sur les para-
digmes de la psychiatrie contemporaine de
G. Lantri-Laura. Ensuite, M. Balat aborde
le pragmatisme de Peirce, pragmatisme sou-
vent voqu pour justifier le DSM III.
Enfin, les critiques svres de Henri Ey de
la conception amricaine des classifications
sont rappeles, appuyes par la rdition
de trois textes devenus difficiles daccs.
R.M. Palem prsente des documents dar-
chives indits illustrant limpossible diffu-
sion du Manuel de Ey, Bernard et Brisset
aux USA et rendant compte dune distance
incommensurable et dun jugement de
condamnation symtrique et rciproque.
Ltat et la psychosePhilippe Rappard
LHarmattan
Pour Philippe Rappard, ce nest pas un ha-
sard si lEtat et la Folie ont le mme statut
juridique, celui de lirresponsabilit pnale,
do sa question : quel est le sens de cette
irresponsabilit ? Les discours qui se tien-
nent sur les psychoses et leur traitement
rejoignent ceux tenus sur les Etats et la po-
litique : relations des Etats entre eux, droit
des peuples disposer deux-mmes, droits
de lhomme, droit dingrence... Si lEtat et
la psychose se rangent du ct du narcis-
sisme ajuridique, la socit civile se range-
rait du ct juridique de la relation conflic-
tuelle et du transfert, au sens psychanalytique
du terme. Nous passons dune psychiatrie
de lEtat une psychiatrie de la socit ci-
vile, dsgrgative et sociale. Mais quest-ce que le social, si ce nest lme de cha-
cun ! La thrapeutique consiste alors, dans
la vie quotidienne, humaniser une relation
Je-Tu, et non absolutiser une relation
Je-Il , fonctionnement quasi hallucina-
toire.
Sept familles abattreEssai sur le jeu des septfamillesClaude de la Genardire
Seuil
Lauteur nous invite nous laisser reprendre
au jeu des sept familles, avec ses gnra-
tions de parents, denfants et de grands-
parents, jeu auquel beaucoup denfants
continuent de jouer et de parents avec eux.
Il sest impos elle comme outil ludiquede travail sur les questions lies aux repr-
sentations psychiques de la famille, grce
lexistence du Muse franais de la carte
jouer et la complicit de son quipe qui
a bien voulu ouvrir laccs sa collection,
do une trs belle iconographie. En analy-
sant la composition de la famille au sein du
jeu, Claude de la Genardire observe que
la branche maternelle en est curieusement
absente, et qu travers la caricature des
noms familiaux ou des professions sont ex-
prims les prjugs sociaux dominants de
chaque poque (ptainisme, propagande
coloniale, revendications identitaires dau-
jourdhui). A lchelle dune partie, le rap-
port des partenaires la parent est ainsi
mis en jeu travers leur rivalit : chacun
doit dcomplter les familles des autres
pour complter la sienne et gagner alors ledroit dabattre sa famille.
BIOGRAPHIE (suite)
DCOUVERTES RCENTES EN PSYCHOPATHOLOGIEFAMILIALE
Cycle de confrences organis par laSocit de Thrapie Familiale Psychanalytique dIle-de-France
11/10/2000: Jean-Pierre Dumont,Sapproprier un enfant : PMA, clonage, thrapies g-ntiques. Discutant : Grard Huber
08/11/2000 : Philippe Mazet,Le syndrome de Munchhaussen par procuration.Discutant : Grard Decherf.
13/12/2000 : Jean-Claude Maes,Famille et sectes. Discutant : Alberto Eiguer.
10/01/2001 : Claude de la Genardire, Sept familles abattre : du jeu de cartes au fan-tasme. Discutant : Serge Tisseron.
14/03/2001: Sylvie Faure-Pragier,Demande de procration assiste par des femmes c-libataires et homosexuelles. Discutante : Florence Baruch.
Cycle complet : tudiants, internes, membres de la Socit : 180F. Formation profes-sionnelle : 500F. Autres : 250F. Confrence : 60F.
Renseignements : STFPIF : 7 rue Ernest Cresson, 75014 Paris, Tl. : 01 45 40 08 10. Fax : 01 46 61 68 21.
(suite p.11)
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Cette synthse vise rendre compte dun
travail, initi en 1995 par un groupe demdecins psychiatres praticiens hospitaliers(1),qui avait pour objectif de faire un tat deslieux de la prvention de la transmissionsexuelle du VIH parmi les patients suivis en
psychiatrie, de recueillir les reprsentationsdes diffrents professionnels et didentifierdes. problmatiques rencontres par les pa-tients. Un deuxime objectif poursuivi par legroupe de travail tait, au travers de la par-ticipation rpte des services ainsi que descomptes-rendus rgulirement, restitus auxquipes, de soutenir une mobilisation et unesensibilisation des quipes sur la question dela prvention.
Mthodologie
Lenqute, laquelle ont particip 5 tablis-
sements psychiatriques(2)(4 en Ile-de-Franceet 1 dans la rgion PACA), a comport quatrevolets successifs :- deux questionnaires ferms proposs tousles intervenants des 5 tablissements, le pre-mier en intra-hospitalier (n = 1067), le se-cond en extra-hospitalier (n = 1020). Lesitems portaient sur les actions de prventionet leur valuation, le rle des professionnels,la sexualit lhpital et la position des quipessur le sujet, la perception ou non dune vul-nrabilit particulire des patients. Ces ques-tionnaires ont fait lobjet dun traitement sta-tistique y compris un certain nombre danalyses
par croisement de variables.- deux enqutes au moyen dentretiens semi-directifs : la premire, avec 34 patients, com-
portait des items sur lvaluation des connais-sances et la reprsentation du VIH, le vcu
de la sexualit, la perception du risque decontamination pour eux-mmes et leurs dif-ficults en matire de prvention ; la secondeavec 39 soignants (mdecins psychiatres chefsde service, cadres infirmiers(res), infir-miers(res)), portait sur la reprsentation deleur rle en matire de prvention, les ac-tions mises en uvre dans les services, leurvaluation et les difficults rencontres. Cesentretiens ont fait lobjet dune transcriptionet dune analyse longitudinale. Les proposrecueillis ont t isols en units dinforma-tion, classes par thmes eux-mmes dfinis partir des objectifs de lenqute. Lensemblede lanalyse a ici t centre sur les conte-nus, avec les limites qui en dcoulent sa-
voir, par exemple, la seule prise en compte
du discours manifeste, lisolation du discoursde son contexte de production Ces rsul-tats donnent, cependant, des lments suffi-sants pour laborer une politique de prven-tion en institution psychiatrique et ce, mmesil serait intressant terme de reprendrelensemble des entretiens pour en faire uneanalyse structurelle.Tous les services ont t confronts la priseen charge de patients sropositifs, asympto-matiques ou malades, parfois en phase ter-minale, ce que confirment les questionnaires.En effet, 69,3 % des rpondants ont t encontact, professionnellement, avec une per-sonne sropositive et 41 % avec un patientmalade. Par ailleurs, tous les services ren-contrs avaient dans leur file active, au jourde lentretien, plusieurs personnes sroposi-tives. On peut faire lhypothse que ce r-
sultat est en relation avec le fait que les siteschoisis pour lenqute taient situs pourquatre dentre eux dans des zones de recru-tement ayant la plus forte prvalence pour leVIH.Il est ncessaire, aussi, de ne pas oublier quedes contaminations par le VIH entre patientsont eu lieu dans le cadre des institutions ayant
particip lenqute, mais pas seulementdans ces dernires(3), ce dont tmoignent lafois des professionnels et des patients.Il a t fait le choix de se centrer ici sur la
prvention primaire de la transmission sexuelledu VIH parmi les patients relevant de lins-titution psychiatrique, les questions ouvertes
par le suivi des patients sropositifs ne se-ront donc pas dveloppes ici.
La sexualit des patients
Il a t un moment implicitement admis quelinstitution psychiatrique protgeait les pa-tients des risques de transmission du faitmme des rgles de fonctionnement interdi-sant la plupart du temps la sexualit. Lesquestionnaires montrent les limites de cetteinterdiction : 74,4 % du personnel dit avoirconnaissance de relations sexuelles entre pa-tients dans ltablissement mme lorsquilest fait tat dune interdiction(4). Des rponsesun peu diffrentes recueillies au niveau desservices (61 %) rendent peut-tre comptedune plus grande observance de cette r-gle . Les patients hospitaliss connaissenttous cette interdiction mme si elle nest
jamais explicitement nonce. Un certainnombre dentre eux tmoignent de la construc-tion de stratgies de contournement commelutilisation dun lieu isol dans le parc, lob-servation des habitudes de surveillance dessoignants Lobjectif du contournement delinterdit nest pas dans la transgression enelle-mme mais plutt dans la recherche duneintimit vitant de placer lautre en position
de voyeur et soi-mme en position dexhi-bitionniste. Lorsquun patient dit navoir paseu de relations sexuelles lhpital, ce nest
jamais en rfrence cette interdiction maiscest par absence de dsir (les mdicamentssont alors voqus), absence de partenaire,lexistence dun(e) partenaire lextrieur,refus de le faire entre malades . Enfin, cer-tains tmoignages voquent, clairement, lefait que ces relations sexuelles ne sont pastoujours entre deux personnes consentantesou que le consentement de lune est soumis
parfois de pressantes demandes matrielles.Par ailleurs, pratiquement tous les patientsrencontrs ont tmoign dune sexualit ac-tive, ponctuelle ou rgulire, dans ltablis-sement ou lextrieur, et les deux tiers vo-quent plusieurs relations sexuelles non
protges ces dernires annes.
Linformation dont disposentles patients
Un des objectifs des entretiens tait lva-luation des connaissances des patients sur lanature et la gravit de la pathologie, les modesde contamination et les moyens de prven-tion, le test de dpistage, lhypothse tantque ces informations seraient incontournables
pour pouvoir intgrer la prvention dans sesrelations sexuelles.Les reprsentations du sida les plus frquentes(plus des 2/3 des rponses) sont celles dunemaladie mortelle, la fois rapidement et in-luctablement. Ces reprsentations sont ex-
primes par des personnes souffrant duneautre pathologie. Cest dire quelles vont se
positionner diffremment du tout venant face une pathologie grave. Pour eux, ilsagira dune autre pathologie, voire dune
pathologie supplmentaire. On peut, ainsi,reprer les positions suivantes qui seraient
prendre en compte dans un travail de pr-vention auprs des patients hospitaliss en
psychiatrie :Le sida cest comme la maladie mentaleParce que jai la maladie mentale, jai lesidaParce que jai la maladie mentale, je ne peuxpas avoir le sidaSi javais le sida, jaurais moins de maladiementaleOn retrouve ainsi cette difficult associermaladie mentale et infection par le VIH chezles professionnels, comme en tmoigne B.Patin : La mthode associative a mis en
vidence la difficult pour les infirmiers(res) associer maladie mentale et infection parle VIH. Cette difficult atteste que le doublecontexte de morbidit ne sinscrit pas dansleur univers de rfrence... Cependant pour rendre le familier insolite et linsolite fa-milier (Moscovici) on compare la maladiementale linfection VIH et linfection VIH aux autres maladies connues .Cest aussi une maladie qui se voit au tra-vers, en particulier, de lamaigrissement, desaltrations de la peau.... Cette reprsentation
prdominante joue un rle important dans laprvention, notamment dans les critres dechoix du partenaire mais aussi dans la per-ception de son exposition au risque ( je saisque je ne suis pas contamin parce que limagede mon corps nest pas altre, il nest donc
pas ncessaire de faire un test ).
En ce qui concerne les modes de transmis-sion, les 34 patients rencontrs connaissent
LIVRES
Du dmon de SocrateSpcimen dune application de laScience Psychologique celle de
lhistoire
Louis Francisque Llut
LHarmattan
Louis Francisque Llut (1804-1879) a t
mdecin Bictre puis la Salptrire et
la Prison de la Roquette. Membre de
lInstitut (Sciences morales et po litiques)
et Acadmicien de mdecine, il fut la fois
un aliniste clbre et un politique, charg
de hautes fonctions pour lhygine pu-
blique et lducation. Il a publi, en 1836,
ses Introductions sur la valeur de laltra-tion de lencphale et sest employ r-futer lorganologie phrnologique deGall. En 1846, il poursuivit ses tudes de
psychopathologie biographique et his-
torique avec Lamulette de Pascal.En crivant Du dmon de Socrate, il navaitpas lintention, comme on la trop long-
temps cru, de rduire le gnie la fo-
lie, mais celle de dmocratiser lAli-
nation et, sous ce couvert, la Socit. Ilrelativise ainsi en se servant de la sciencepsychologique , le mythe du Matre, matre
penseur ou politique et rcuse linali-
nabilit naturelle des privilges jusque
dans le domaine de lEsprit. Ce livre pro-
gressiste, au style incisif, a pu passer la
censure grce au statut affich de confor-
miste catholique et de partisan de Louis-
Napolon de son auteur.
Construction de soi ethandicap mentalSous la direction de
Grard Zribi et Jacques Sarfaty
Editions de lEcole Nationale de laSant Publique
Cet ouvrage dfinit les meilleures condi-
tions possibles dacquisition dune auto-
nomie psychique, dune indpendance
sociale optimum et dune bonne qualit
de vie. Llaboration de relations triangu-
laires (familles, institutions, handicaps)
rflchies et volutives, ainsi quune soli-
darit collective clairement exprime, en
sont trs certainement des paramtres es-
sentiels. Le traitement de plusieurs thmes
- lannonce du handicap aux parents, ldu-
cation prcoce, les relations des jeunes
et adultes handicaps avec leur environ-
nement familial et institutionnel, laccom-
pagnement des transitions lies lge
(ladolescence, lge adulte) et des pas-
sages dune forme de vie une autre, lem-
ploi protg et lhabitat, la sexualit, le
vieillissement... - indique les conditions
et les caractristiques dune vie sociale
adapte.
Dans la continuit de la mise en place
dune politique sociale du handicap puis
dune diversification accrue des services
offerts, se profile aujourdhui le temps du
positionnement des usagers dans la d-
finition des prestations, institutionnelles
ou non, et du bnfice de nouveaux droits
(encore trop virtuels), comme celui dex-
primer sa personnalit et de disposer de
choix dexistence. Au travers des diff-
rentes contributions (articles thoriques,
tmoignages, expriences) qui mettent en
vidence les difficults, les souffrances,
mais aussi les potentialits et les volu-
tions individuelles et environnementales,
sont dgages des opportunits favori-
sant, de lenfance la vieillesse, llabo-
ration didentits personnelles et ditin-raires qui soient propres a chacun.
La prvention de la transmissiondu VIH parmi les patients suivisen psychiatrie (1re partie)
Socit Psychanalytique de Paris Institut de Psychanalyse de Paris
La psychanalyse de lenfantConfrences du mercredi
LE MODE FREUDIEN DE LA SEXUALIT INFANTILE,AUJOURDHUI
18/10/2000 : Lobjet combin, son rle dans la sexualit fminine, Clopatre Athanassiou
06/12/2000 : Dveloppement et troubles de lidentit sexue, Colette Chiland
17/01/2001 : Mlanie Klein ou la matricide comme douleur et crativit, Julia Kristeva
28/02/2001 : La sexualit infantile et la causalit psychique, Bernard Brusset
14/03/2001 : De linfantile la nvrose infantile, Florence Guignard
30/05/2001 : Sexualit orale et constituiton du moi corporel, Genevive Haag
Universit Ren Descartes Un mercredi par mois 21h15 Confrences ouvertes toutpublic : 12 rue de lEcole de Mdecine, 75006 Paris.
Renseignements : Institut de psychanalyse, 187 rue Saint-Jacques, 75005 Paris. Tl. : 01 43 29 66 70 dulundi au jeudi de 10h 12h e de 14h 17h. Inscriptions : secrtariat de lInstitut uniquement pour le cyclecomplet ou sur place, le soir de la confrence pour les confrences lunit ou le cycle complet. Cycle com-plet des confrences du mercredi : 600F, lunit : 100F, formation permanente : 1 000F.
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7/22/2019 Henri Corneille Agrippa
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LE JOURNAL DE NERVURE N 8 - NOVEMBRE 20004
population gnrale, ce cas de figure amnele plus souvent exclure demble les possi-
bilits de rapports sexuels, le prservatif ap-paraissant dans ce cas-l comme une barriredrisoire. Cette stratgie dvitement des re-lations sexuelles en lien avec le sentiment quele prservatif nest pas quelque chose de vrai-ment fiable amne certains patients mettreen place des logiques de prvention telles
que :Je ne peux pas mprouver dangereux pourlautre
Je suis srongatif parce que je suis en bonnesantDonc je nai pas besoin de prservatif pourprotger lautreSi lautre est sropositif, il doit mettre un pr-
servatif pour me protgerSil met un prservatif, cest quil est sro-
positifDonc je nai pas de relations sexuelles avecluiSi lautre est sropositif, il doit mettre un pr-
servatif pour me protgerMais sil ne met pas de prservatif, cest quilest srongatif
Donc il nest pas ncessaire de me protgerLes propos recueillis ont permis didentifier
dautres paramtres intervenant dans la pr-vention et qui sont en lien direct avec ce quia motiv lhospitalisation des patients et/ouavec le fait de vivre dans une institution. Eneffet, certains patients peuvent se saisir de la
possibilit dune contamination comme mo-dalit de mise en acte dun dsir de mort ouinvestir le fait dtre contamin dun carac-tre positif. Le fait aussi dtre atteint dunemaladie psychique peut tre interprt commefermant la possibilit de contracter une autre
pathologie (somatique en loccurrence). Lhos-pitalisation peut protger provisoirement delexposition un risque (par exemple, refu-ser des relations sexuelles avec des personneshospitalises ou parce quon est malade) oufavoriser, au contraire, une plus grande ex-
position au risque car si quelquun taitcontamin cela se saurait, entre nous il ny
a pas de danger(7)... .Lensemble des entretiens tmoigne, sil enest besoin, que la prvention ne peut, en au-cun cas, tre rduite un comportement in-dividuel, voire volontariste, mais que sa pos-sibilit de mise en acte prsuppose lexistencede nombreux lments, tant conscients quin-conscients, et passe ncessairement par unengociation (plus ou moins explicite) dans larelation avec le (la) partenaire, voire par unedlgation au partenaire. Elle ne peut donc
jamais tre considre comme un comporte-ment dfinitivement acquis : les connais-sances de la personne, son tat psychique, le
permis de distinguer dune part des patientspour lesquels il est possible de dire que lin-formation est intgre , elle est apparem-ment devenue une rgle quils peuvent sim-
poser ou transgresser, dautre part des patientspour lesquels il est au contraire plus plau-sible de poser lhypothse dune non-int-gration de cette information. Pour ces der-niers, il sagit dune contrainte extrieure, un
savoir extrieur. Ils nont pas incorpor lin-formation au sens de pouvoir se le dire (culpabilit, dcision du test). Faut-il prci-ser que ceci nest pas systmatiquement enlien avec la nature des troubles psychiatriquesdont souffre le patient? Il faut souligner parailleurs que le fait davoir intgr ou nonles informations ne garantit en aucun cas lacapacit de la personne adopter des com-
portements de prvention mais quil sagitpeut-tre dune condition ncessaire a mi-nima.Enfin, il est peut-tre important de rappeler quun besoin de prvention nest pas toutcoup traduit par une demande de prvention.Et cela nest pas moins vrai quand le besoinest ressenti par le patient... il y a des attentesfortes quon risque de ne pas percevoir carelles restent muettes, il y a des demandes qui
demandent tre devines. Noublions pasque, comme tout un chacun, les patients sontsouvent loin davoir clairement consciencede leurs besoins(6).
Les patients et la prvention delinfection par le VIH
Lanalyse des entretiens a permis de recueillirun certain nombre dlments, en lien aveclutilisation du prservatif, qui vont partici-
per aux difficul ts de prvention. On peutainsi faire une distinction entre des lmentsqui relveraient plus de lutilisation du pr-servatif au sens technique en quelque sorte(le mode demploi, une rection rendue dif-ficile...) et des lments qui relveraient plu-tt de lusage , cest--dire de tout lima-
ginaire que le prservatif vient convoquerdans la relation comme, par exemple, le sen-timent dune sparation entre soi et lautrequi rencontre le fantasme de ne faire quun dans la relation amoureuse.On peut noter que malgr linformation surle prservatif, et au-del des difficults lies son utilisation, la question de sa fiabilitreste ouverte et son emploi napporte pas unrel sentiment de scurit. Par ailleurs, par-ler de lefficacit du prservatif nest quasi
jamais spontanment compris dans une rela-tion avec un partenaire sropositif. En effet,
pour la majorit des patients, comme dans la
la contamination sexuelle et 24 dentre euxla contamination par voie sanguine (transfu-sion ou change de seringues). Tous connais-sent lintrt du prservatif masculin commemode de prvention mais les lieux dacqui-sition restent, sauf la pharmacie, mal connusy compris lorsquils sont mis dispositiondans les institutions. Cependant la fiabilitdu prservatif laisse dsirer pour bon nombre
de patients. Un tiers dentre eux voquent lapossibilit dun claquage et un lien estfait avec le lieu dacquisition : la qualit est
perue comme meilleure lorsquils sont ache-ts en pharmacie.Toutes les personnes rencontres voquentsoit le test de dpistage lui-mme, soit la pos-sibilit de faire un examen sanguin. Vingt-trois patients disent avoir fait au moins untest, parfois plusieurs, soit partir dune d-marche personnelle, soit quil ait t fait loccasion dun autre examen biologique,soit quils pensent quil ait t fait lors du bi-lan biologique dadmission lhpital.Un certain nombre de patients ont fait unedmarche personnelle et ont demand un d-
pistage dans un contexte quon pourrait d-finir comme adapt , cest--dire soitcomme bilan la suite dune relation sexuel-
le non protge, soit dans une dmarcheconjointe des deux partenaires avec lob-
jectif de retirer le prservatif. On peut ainsiobserver un lien trs net entre le fait davoirintgr les informations et une utilisation correcte ou adapte de la demande desrologie de linfection VIH. On peut no-ter, enfin, que le fait dtre en bonne sant et, en particulier, de ne prsenter aucun dessymptmes lis la reprsentation quon ade la maladie peut tre un frein la dmarchede test. Il est par ailleurs proccupant deconstater que plus de la moiti des patients
pensent que le test de dpistage des anticorpsanti VIH est fait systmatiquement lad-mission lhpital et labsence de rsultatsest interprte comme un rsultat ngatif.Toutes les informations dont disposent les
patients viennent des mdias et, en premier
lieu, de la tlvision. Les personnes rencon-tres ont le sentiment dtre bien informes,ne sont pas globalement dsireuses dappro-fondir cette question et trs majoritairementne choisiraient pas un interlocuteur lint-rieur de linstitution mais privilgieraient,
pour aborder le sujet, un mdecin gnralisteen ville.Les rponses aux questions poses sur cesthmes tant dans la moyenne des rponsesrecueillies dans dautres cadres(5), on pourraitestimer, un premier niveau, que maintenirces dispositifs informatifs de prvention se-rait sans objet, mais les tudes KABP (tudessur les connaissances, attitudes, croyances etcomportements face au sida) montrent, dansla population gnrale, une perte de la prci-sion des informations au fil du temps. Il sem-
ble, aussi, ncessaire den reprendre certaines
comme labsence de contamination dans lavie quotidienne, le fait que lhpital ne pra-tique pas une srologie systmatique lad-mission, etc... En outre, les informations dontdisposent, actuellement, les patients se r-vlent souvent non oprationnelles, notam-ment lors de lvaluation par les patients desrisques pris pour eux-mmes. Ici, il ne sagit
plus proprement parler de renforcer le dis-positif informatif mais plutt de travailler surles liens que les patients peuvent tablir entredes informations dune part et leur protec-tion dautre part.Par ailleurs, au cours dun certain nombredentretiens o des patients ont voqu defaon prcise les modes de transmission,lexistence du prservatif et du test de d-
pistage, il est apparu que quelques-uns parmices derniers se comportaient comme si ces
informations restaient, en quelque sorte, com-pltement extrieures eux-mmes. Ceci a
LIVRES
La greffe humaine(In)certitudes thiques : du don de
soi la tolrance de lautreDialogue pluridisciplinaire sur
La greffe, le don et la socit
Sous la direction de Robert Carvais et
Marilyne SasportesPUF
Ds la cration de lEtablissement franais
des Greffes, alors que les lois de biothique
venaient dtre promulgues, la dcision
sest impose quune rflexion collective,
avec des intervenants dhorizons divers,
tait ncessaire autour des interrogations
que pose la greffe, ds lors que lon veut
bien dpasser sa dimension immdiate-
ment mdicale et technique. Pour ceux que
la greffe concerne directement, les malades,
leur famille, les mdecins et les infirmires,
et tous ceux qui, de prs ou de loin, y pr-
tent attention, une tierce personne sinter-
pose, celui ou celle, vivant ou mort, dont
un lment du corps devra contribuer
cette thrapeutique et venir sinsrer dans
la relation que le mdecin tablit avec le
malade. Cette insertion a ncessit un cadrejuridique, une forme dautorisation. Si lon
accepte de reconnatre que la greffe quitte
ainsi le champ bien dlimit de la dimen-
sion purement thrapeutique, ce livre d-
voile beaucoup des visages que revt ce
recours une tierce personne. Des clai-
rages indits sont apparus sur le don, le re-
fus, la justice distributive, le deuil, le consen-
tement. Autour du malade, du mdecin et
du greffon, se dvoilent des univers, des
fils tendus, et, peu peu, le lien de la greffe
avec le monde se construit, la rendant moins
isole et certainement mieux connue. Les
textes prsents dans ce livre, ainsi que les
rsultats inattendus de la premire enqute
nationale sur le don dorganes constituent
le point le plus complet ce jour sur le su-
jet du prlvement et de la greffe.
Atlas des fractures franaisesLes fractures franaisesdans la recomposition sociale etterritoriale
Christophe Guillery
LHarmattan
Loin de se rsumer la crise de certains
quartiers populaires, les fractures sociales
et territoriales structurent lespace franais
au rythme des mutations socio-cono-
miques et urbaines. Les fractures franaises
ne se rduisent pas la vision caricaturale
dune socit divise entre des inclus
et des exclus , entre des quartiers po-
pulaires la drive et des quartiers hup-
ps en voie de dsolidarisation. LAtlas desfractures franaises souligne les limites dune
thmatique de lexclusion qui occulte enpartie la question sociale ; le bilan mitig de
la politique de la ville ntant que le reflet de
cette impasse politique. Louvrage suggre,
au contraire, la proximit sociale, et parfois
territoriale, des classes populaires et moyennes
qui subissent prioritairement les nouvelles
mutations socio-conomiques et linscu-
rit sociale qui en rsulte, tandis que les
couches suprieures creusent lcart en b-
nficiant fortement de la nouvelle organisa-
tion de la socit. La recomposition sociale
et territoriale se ralise donc aujourdhui plus
par un accroissement des ingalits entre
des catgories suprieures tentes par des
pratiques dvitement que par le dcrochage
des plus dmunis et la drive de quartiers
dits sensibles. Cette recomposition sociale
est renforce par une accentuation des dis-
parits territoriales qui favorise prioritaire-ment les mtropoles.
Socit Psychanalytique de Paris Institut de Psychanalyse de Paris
Confrences du jeudi
LE FACE FACE PSYCHANALYTIQUE 12/10/2000 : Le travail du psychanalyste : du cadre de la cure ses variations,
modifications, extensions, Andr Green
23/11/2000 : Psychanalyse et psychothrapie psychanalytique : de linterpsersonnel lintrapsychique,Alain Gibeault
14/12/2000 : Trauma et psychothrapie trop brve, Jean Cornut
18/01/2001 : Face face, corps corps, Marilia Aisenstein
08/02/2001 : Lemprise thrapeutique et la psychanalyse, Paul Denis
03/05/2001 : Du psychodrame psychanalytique au face face, Paul Israel
14/06/2001 : Trois repres pour la psychothrapie psychanalytique en face face,
Ren Roussillon
Universit Ren Descartes Un jeudi par mois 21h15 Confrences ouvertes tout pu-blic : 12 rue de lEcole de Mdecine, 75006 Paris.
Renseignements : Institut de psychanalyse, 187 rue Saint-Jacques, 75005 Paris. Tl. : 01 43 29 66 70 du
lundi au jeudi de 10h 12h e de 14h 17h. Inscriptions : secrtariat de lInstitut uniquement pour le cyclecomplet ou sur place, le soir de la confrence pour les confrences lunit ou le cycle complet. Cycle com-plet des confrences du mercredi : 600F, lunit : 100F, formation permanente : 1 000F.
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moment de sa relation avec une personne, sarencontre avec une autre, etc... sont autant de
paramtres dterminants dans cette ngocia-tion qui va se rejouer non seulement avecchaque nouveau partenaire mais aussi lors dechaque nouveau rapport sexuel avec le mme
partenaire. Au travers des propos recueillis,on peut noter que ce qui va fonder les moda-lits de mise en uvre de la prvention est,au-del des informations minimum requises,trs diffrent dune personne lautre.
Les professionnels et laprvention de linfection VIH
La question de la prvention auprs des pa-tients ne peut se poser que si les profession-nels ont le sentiment que leurs patients sontexposs, voire plus que la population gn-rale, au risque de contamination par le VIH.Si les patients suivis en ambulatoire sont le
plus souvent compars la population gn-rale au regard de la contamination, les pa-tients hospitaliss sont eux souvent consid-rs comme plus exposs une transmissionsexuelle du VIH. Compte-tenu du peu de pu-
blications sur le sujet, il nest pas possible ac-tuellement de se prononcer sur cette ques-tion(8) mais on ne saurait mconnatre lasurmortalit (9) des malades mentaux et la
place que pourrait y jouer le sida. Par ailleurs,les questionnaires ne font pas apparatre delien direct entre la reconnaissance de lexis-tence de relations sexuelles dans ltablisse-
ment et le sentiment que les patients sont ex-poss o u pl us e xposs que da utres latransmission du VIH.La prvention est majoritairement consid-re comme faisant partie du rle profession-nel des personnes enqutes (87 %) et cestnotamment le cas pour 96 % des mdecins,cadres infirmiers(res) et infirmiers(res). La
plupart des rpondants (85 % en intra-hospi-talier et 94 % en extra) affirment que la pr-vention nest pas uniquement laffaire du pa-tient et les trois quarts considrent que leursinterventions peuvent conduire les patients modifier un comportement risque. Une autrerecherche portant sur les reprsentations desinfirmiers(res) de secteur psychiatrique rap-
porte des rsultats proches : 10 % seulementdes personnes interroges ne considraient
pas comme pertinente la mise en uvre de la
prvention(10).
Cependant si, au travers desquestionnaires, lintrt de lexercice dune
prvention auprs des patients semble fd-rer lensemble des intervenants en psychia-trie, les entretiens montrent que ces rponsesdoivent tre interprtes de faon beaucoup
plus diffrencie, notamment en fonction desrles professionnels : en effet, les mdecins
psychiatres se positionnent globalement defaon plus institutionnelle (la prvention estncessaire dans linstitution mais ne relve
pas directement de leur rle) l o les infir-miers(res) peroivent la prvention, au mmetitre que le soin, comme partie intgrante deleur rle professionnel. Ce type de position-nement favorise, sil en tait besoin, un dsin-vestissement des mdecins voqu par presquetoutes les quipes et la dlgation de respon-
sabilit vers les infirmiers(res). Ces lmentsne sont pas propres aux tablissements concer-ns par ce travail mais ont t identifis aucours dautres recherches, en particulier cellede Bertille Patin(11) : Pour autant, la pr-vention na fait lobjet daucune consigne m-dicale, ce qui laisserait sous-entendre quelle
sinscrit dans le rle sur prescription de lin-firmier.... Elle est alors interprte comme lersultat de la volont infirmire, sopposantau manque dintrt des mdecins .Les mdecins peroivent diffremment leursresponsabilits lorsque le patient est hospita-lis (sentiment de responsabilit maximum)ou lorsquil est suivi en ambulatoire (la res-
ponsabilit est dgage du. fait de limpossi-bilit dune surveillance hors institution etventuellement dlgue aux parents ou auxtuteurs). Il faut noter que les infirmiers(res)
nvoqueront jamais cette diffrence.Les acteurs de prvention voqus, au niveauinstitutionnel, sont les comits sida qui estdlgue la rflexion de fond sur linfection VIH, et les rfrents des diffrents servicesqui sont le plus souvent des infirmiers(res)volontaires. Le choix dun rfrent a pouravantage de faciliter les liens entre les quipeset les activits du comit sida mais favoriseaussi dans les services une sorte de dlga-tion des problmes lis au VIH uniquementvers le rfrent qui devient, en quelque sorte, le spcialiste . La prvention, en tant d-lgue la responsabilit, aux reprsentationsdes rles professionnels et au bon vouloir dechacun, permet de faire lconomie dun tra-vail dquipe qui, dune part, offrirait un cadreet un soutien aux soignants, et dautre part,
permettrait une appropr iation progressive
dune sorte de culture de prvention lin-trieur de linstitution psychiatrique, qui de
linfection par le VIH pourrait stendre dautres problmatiques.
Les actions de prvention endirection des patients
Globalement, trois types dactions de pr-vention sont dveloppes en direction des pa-
tients. Linterdiction des relations sexuelles lintrieur des tablissements est srementla premire mme si elle nest jamais citecomme telle et si elle a t mise en place pourdautres motifs avant lmergence de lin-fection par le VIH. Les informations recueilliesauprs des professionnels et des patients per-mettent den percevoir, au-del des questionsthiques rarement poses, trs rapidement leslimites.Le deuxime axe est reprsent par la mise disposition de prservatifs masculins. Si lesquestionnaires recueillaient 87 % davis fa-vorables cette mise disposition en extra-hospitalier et 90,8 % en intra-hospitalier (endclarant 64 % de mise disposition effec-tive dans les services), les entretiens font ap-
paratre une ralit bien diffrente. Des pr-servatifs sont disposition dans tous les
tablissements rencontrs mais, signes pro-bables dune rsistance, les lieux ne sont passouvent identifis ni par les soignants ni parles patients, le rapprovisionnement est trsloin dtre rgulier et systmatique. Enfin, lesmodalits de distribution sont extrmementvariables dun service lautre, voire lin-trieur dun mme service ( disposition libreet anonyme, ncessit de demander, distri-
buteur...).Les autres actions de prvention sont peunombreuses, quasi uniquement linitiativedes infirmiers(res) et favorisent le cadre dunerelation duelle (62 % des personnels disent
parler de prvention, avec les patients), en-tretien o il sagirait essentiellement de rap-
peler les informations et de passer un mes-sage de rappel sur un mode exhortatif de type: il faut faire attention, mettez un prserva-
tif . Ces interventions se fondent sur un cer-tain nombre de postulats qui sous-tendent lesactions de prvention et qui auraient besoindtre interrogs plus avant, comme parexemple: linformation amne un change-ment de comportement , personne ne sou-haite tre contamin , la prvention est dudomaine de la matrise donc du conscient ...Par ailleurs, ce choix de la relation duelle
pourrait ouvrir la possibilit dune personna-lisation de lapproche de la prvention enfonction des difficults rencontres par le pa-tient mais il a pour inconvnient dtre en-tirement laiss lapprciation des soignantset prsuppose implicitement pour eux une ca-
pacit parler de sexualit. Or, permettre cetteparole est ressenti, par les professionnels,comme se placer en contradiction avec lin-terdiction des relations sexuelles dans lins-
titution. Parler de sexualit, ou de pratiquessexuelles, est aussi le plus souvent ressenticomme une possibilit de faire effraction danslintimit du patient et de modifier la naturede la relation soignant-soign en intgrant deslments vcus comme potentiellement pro-vocateurs ou sducteurs difficilement int-grables dans cette relation.Parmi les autres difficults rencontres parles infirmiers(res), mais aussi largement par-tage par les autres professionnels, on iden-tifie la difficult en soi daborder le thmedes relations sexuelles, labsence de discours
possible en quipe sur la sexualit, labsencede formation sur le sujet, les reprsentationsquont les personnels de la sexualit des ma-lades mentaux , reprsentations qui oscil-lent entre les images de la prostitue, delinnocent ou de lanimal .
Christiane Charmasson, DominiqueRolland et Dominique Velche
LIVRES
Handicap et fonction publiqueApports de la jurisprudence auxdroits des personnes handicapes
Rmy Fontier
LHarmattan
Cet ouvrage reprend le parcours quune per-
sonne handicape doit emprunter pour de-
venir fonctionnaire et exercer. Sont dabord
rsums et comments les jugements
concernant les diverses commissions avec
lesquelles devra se familiariser le candidat.
Les droits des agents publics, et leurs li-
mites, sont ensuite prciss, en matire de
concours, de titularisation et de droule-
ment de carrire. Ce livre contient deux
cent quarante rfrences jurisprudentielles.
Commentaire du statut de lafonction publique hospitalireAlbert Faure en collaboration avec
Danielle Vilchien
Editions Berger-Levrault
Albert Faure, administrateur civil honoraire
du ministre de lintrieur et directeur ho-
noraire de centres hospitaliers, vient de pu-
blier, en collaboration avec Danielle Vil-
chien, la 7me dition du Commentaire dustatut de la fonction publique hospitalirequi concerne environ 700.000 agents. Lou-
vrage fait le point sur lvolution des textes
et de la jurisprudence relative au statut, en
tenant compte, en particulier, des nom-
breuses modifications mises en uvre de-
puis ldition prcdente de 1998. Ainsi,
plus dune centaine de nouvelles dcisions
de jurisprudence sont commentes sajou-tant celles dj prsentes.
(1) Consitu par Ch. Charmasson, responsable de la re-
cherche-action, A. Georgieff, coordinateur, F. Arnaud,
C. Barral, P. Beau, M. Duroussy, P. Eche, T. Gream, Bl.
Guigue, L. Lemoigne, D. Rolland, Cl. Veil, D. Velche.
(2) EPS Ville-Evrard, EPS Maison Blanche, EPS Mont-
perrin, E PS Perray-Vaucluse, Ins titut Marcel Rivi re
(MGEN).
(3) PATIN Bertille,Maladie mentale et infection VIH:
reprsentations et comportements en milieu psychia-
trique, Paris, EHESS, Laboratoire de psychologie so-
ciale (ANRS 1998).
(4) CHARMASSON,Psychiatrie et VIH,In Annales de
Mdecine Interne, 1991, 142, n 4, pp. 259-296.
(5) GREMY Isabelle, BELTZER Nathalie, ECHEVIN
Damien ,Les connaissances, attitudes, croyances et com-
portements face au sida en Ile-de-France,Evolutions
1992 - 1994 - 1998 - ORS Ile-de-France, avril 1999.
(6) VEIL Claude,Identification des besoins de prven-
tion, Journe sur la prvention du VIH en psychiatrie,
juin 1997.
(7) Tmoignage dun patient
(8) DROUIN MJ, Le sida dans les populations psychia-
triques, In : Cohen H, Levy 1 : Le sida : perspectives
contemporaines et enjeux, Montral, Editions du Mri-
dien, 1997.
LINARD F, BEAU P, SILVESTRE D., Psychiatrie et
infection VIH chez ladulte, Paris : Encycl. Md., Chir.,Psychiatrie, 1995, 37-750-A-20.
(9) CASADEBAIG B. (Dir) ,Accs aux soins somatiques,
morbidit physique et mortalit de patients schizophrnes,
INSERM unit 302 : Groupe Franais dEpidmiologie
Psychiatrique.
CASADEBAIG B. (Dir) ,Accs aux soins somatiques et
morbidit physique de patients schizophrnes ,INSERM
unit 302 : Groupe Franais dEpidmiologie Psychia-
trique
(10) PATIN Bertille,Maladie mentale et infection VIH:
reprsentations et comportements en milieu psychia-
trique, Paris, EHESS : Laboratoire de psychologie so-
ciale (ANRS 1998)
(11) Idem
SMINAIRE DE PSYCHIATRIE BIOLOGIQUE2000-2001
Organis dans le cadre du DES de Psychiatrie, ce sminaire sous la direction de :
H. Lo (Paris), A. Grard (Paris) et J.P. Oli (Paris) a lieu le
Jeudi 14 heuresSalle de Confrence Pierre Deniker du Service Hospitalo-Universitaire de Sant
Mentale et de Thrapeutique (rez-de-chauss haut),Hpital Sainte-Anne, 7 rue Cabanis, 75014 Paris. Inscriptions : tl. : 01 45 65 81 56.
Il est ouvert tous les spcialistes intresss. Le thme de cette anne est consacr aux
Troubles du comportement
23/11/2000 :Les dterminants comportementaux, O. Guillin, J.P. Oli30/11/2000 :Lagitation, F. Petitjean07/12/2000 :Linhibition, D. Sechter14/12/2000 :Impulsivit et agressivit, F. Bayle21/12/2000 : Troubles du comportement et pathologie bipolaire, C. Gay01/01/2001 : Troubles du comportement et pathologie schizophrnique, V. Kapsambelis11/01/2001 : Troubles psychocomportementaux des sujets gs, Ph. Robert18/01/2001 : Troubles du comportement chez lenfant,N. Godart25/01/2001 : Troubles du comportement et abus de substances psycho-actives, H.J. Aubin01/02/2001 : Troubles des conduites alimentaires, C. Foulon08/02/2001 :Jeux pathologiques, M. Lejoyeux01/03/2001 : Troubles ds conduites sociales, A. Gut08/03/2001 :Les phobies sociales, C. Andr15/03/2001 :Les rituels comportementaux, B. Millet
22/03/2001 : Troubles comportementaux et pilepsie, C. Dig
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LE JOURNAL DE NERVURE N 8 - NOVEMBRE 20006
- Un CMP offrant des possibilits de rendez-vous avec un psychiatre un mois peut-i l r-
pondre lurgence et/ou aux situations decrise ?- Un CMP tablissant que tout patient doitdabord tre reu par un psychiatre rpond-t-il au psychologique contenu dans sonappellation, aux demandes de psychothra-
pies ou de consultations psychologiques for-
mules directement ?- Un CMP fonctionnant dans les locaux delhpital peut-il rpondre aux besoins des
personnes rsolument en dfiance par rap-port lhospitalisation ?
2- Bien sr, loption que je voudraisdfendre ici est celle dun CMP desecteur, tabli comme son pivot partir duquel sorganise le reste dudispositif.Le secteur : tentons den retrouver son sens,son origine. Cest G. Baillon(1) qui nous lerappelle : la politique de secteur a bas sonhypothse de travail sur lapplication de deuxides : lune reprenait lenseignement des
gnrations prcdentes sur la longue duredes troubles psychiques, mais en soulignantla ncessit que la suite des soins soit la-
bore par les mmes soignants, ctait lidede la continuit des soins, lautre tait nou-velle pour la psychiatrie, ctait lide de lacontextualit, cest dire dun soin sap-
puyant sur le monde proche du patient,le monde o vit la personne, en valorisantde faon ferme les liens de la personne avecles membres de son entourage . La politiquede secteur sest developpe ainsi comme cri-tique radicale de lhospitalisation en tant quemoyen prvalent ou exclusif du soin. Les al-ternatives lhospitalisation se sont dve-loppes, fonctionnent et tablissent lhpitalcomme un des lieux du dispositif, en articu-lation avec les autres, grce au CMP.Cela suppose que le CMP soit clairement si-tu en dehors, pas seulement concrtementmais dans les signes et le style daccueil quiy est propos :
- sur les signes une anecdote : il a fallu beau-coup dnergie pour obtenir des arrts de tra-vail vierges, non pr-imprims lordre delhpital Gourmelen, beaucoup dnergie en-core pour conserver des ordonnances en-tte du CMP dans la prparation actuelle desordonnances scurises o revenaient les or-donnances uniques entte de lhpital. Etque dire de la charte du patient hospitalisaffiche dans les CMP ?- sur le style : laccessibilit du lieu, sa sou-
plesse de fonctionnement fonde sa capacitdaccueil et de rencontre.Cest--dire quon se situe clairement non
pas comme un service de suite ou de suivipar rapport lhospitalisation mais commeproposition daccs direct aux soins.
tion tait axe sur la prvention tertiaire: vi-ter des rechutes, des retours prmaturs lh-
pital dune population la plupart du temps psy-
chotique et ayant connu lhospitalisation.
Un deuxime type dorganisation estmaintenant beaucoup plus dveloppet permet la plupart des secteurs dnum-rer dans leur dispositif les lieux cits danslarrt de mars 86 : CMP, hpital de jour,appartements thrapeutiques etc... Le CMPest souvent ouvert tous les jours avec une
permanence infirmire de 9h 17h et quelquesconsultations mdicales et psychologiques.Lhpital est dcentr sur le secteur avec demultiples prolongements quon appelle par-fois des antennes mais que lhpital soit me-nac, problme deffectifs mdicaux ou in-firmiers, il ramne bien vite ses antennes.Cest lhospitalier qui prime. Bien sr quelextension en ville des offres de soins est
positive et permet des interfaces minimum,
mais, loccasion dune audit organisepar la ville de Quimper cette anne sur le secteur social-secteur psychiatrique , on abien t oblig dentendre que la psychiatriepublique tait toujours vcue comme une to-talisation centre par lhpital, trop souventincomprhensible et inaccessible, cristalli-sant les ambivalences de lusager vis--visde la psychiatrie et, paradoxalement, appa-raissant comme toute puissante dans sesmoyens : ne disposez-vous pas de vos uni-ts hospitalires temps plein, de vos hpi-taux de jour, de vos propres appartementsdans la ville, de vos structures danimationet de loisirs (les CATTP) ? . Reprage dune
population stigmatise appartenant lh-pital et devant se suffire de son dispositifet en mme temps flou quant laccessibi-lit de nos services par une autre population
dite nouvelle.
Un recul critique
Loin de moi lide de dnier limportancedes reprsentations lies la sant mentalemais ne pouvons-nous pas faire un recul cri-tique sur ces fonctionnements, sur nos fonc-tionnements ?- Un CMP dont les coordonnes sont illi-sibles ou inexistantes dans un annuaire, in-connues de nos collaborateurs, seulementdisponibles auprs des secrtariats des CHSest-il accessible ?- Un CMP ouvert aux heures de bureau cest dire ferm 17 heures et le week-end
peut-il accueillir les usagers qui travaillent ?
Quimper est une ville de 60 000 habitantsaujourdhui, qui dispose depuis trs
longtemps dun gros hpital psychiatrique
qui accueillait les hommes du Finistre, lesfemmes allant Morlaix dans le Finistrenord ( 80km de l). Ces deux hpitaux fu-rent crs avant 1838, cest--dire avant quEs-quirol et quelques autres ne dcident quelinstitution psychiatrique se devait dtre la campagne, instituant la grande relgationdes fous hors de la ville. LHpital psychia-trique de Quimper est situ sur une collineen plein centre ville: cest au moins un avan-tage qui a, de faon sre, facilit son volu-tion. Sparation des hommes et des femmes,loignement de la plupart dentre eux de leur pays dorigine . Tout ceci appartient au
pass proche puisque cest en 1974 seule-ment que le dcoupage sectoriel et la mixitqui en dcoulait ont t imposs aux chefsde service.En 1979, lhpital Gourmelen de Quimper
comptait une population de 1300 malades(ce fut la plus forte densit depuis sa cra-tion en 1826). Quelques consultations ex-ternes se faisaient en Dispensaire dhyginementale (DHM) Quimper et dans quelquescommunes plus rurales... Cest lpoque dela premire visite domicile infirmire... La
prhistoire est toujours trs proche en psy-chiatrie. En effet, en 2000 lhpital disposede 170 lits plus 150 lits environ dunits in-tersectorielles et dun redploiement vastede dispositifs sectoriels. Progression specta-culaire mais peu prs conforme celle detous les autres secteurs et rgions mais, rap-
pelons-le, toujours, initie et dfendue parun ensemble dacteurs quanimait llan ex-traordinaire de la mise en place de la poli-tique de secteur. On serait maintenant lacroise des chemins, du secteur vers linter-
secteur, de lhpital psychiatrique vers lh-pital gnral, du secteur encore vers le r-seau... dchirs que nous sommes entre desralits budgtaires toujours la baisse et desdemandes croissantes, de nouvelles missions dfinir.
Le CMP, un dispositif souple
Je propose, au travers dun des dispositifs lesplus souples, le CMP, doprer un recul cri-tique sur son volution et ses fonctionne-ments suivant le statut quon lui assigne.Cette lecture, on ne peut mon avis la fairequ partir dun axe allant de lhpital versle secteur dans sa dfinition dorigine, cest dire une population dfinie avec sa culture,ses activits, ses traditions.
1- Donc dans loption dfendue delhospitalocentrisme on trouve :Une premire organisation trs centre
par lhpital, hritire de lhpital-village,cette illusion humaniste de laprs-guerre.On y trouve, outre les pavillons dhospitali-sation, les bureaux de consultations externes,
parfois un centre social, au moins une caf-tria, des animations possibles et le point dedpart des activits infirmires de VAD.Lhpital est revendiqu comme le lieu dex-
pression privilgi dexpression de la foliedonc le lieu de la clinique et dune spcifi-cit professionnelle. Dans cette option, lesCMP sont rduits de petits centres de consul-tations souvent loigns, donc souvent en mi-lieu rural, ouverts quelques 1/2 journes parsemaine et garantissant des patients quine peuvent pas se rendre lhpital une cer-
taine continuit de soins. Ce dispositif est di-rectement issu de lancien DHM dont la fonc-
LIVRES
Les usagers du systme desoinsSous Ia direction de Genevive
Cresson et
Franois-Xavier Schweyer
Editions de lEcole Nationale de la
Sant PubliqueL e terme dusager est devenu le synonyme
commode de malade patient, client et ci-
toyen, tous concerns par la sant. Lusa-
ger serait le centre mme du systme de
sant, celui pour lequel les investissements
sont consentis, les professionnels forms
et les quipements renouvels...
Cet ouvrage propose quelques cls pour
comprendre les transformations rcentes
de la question de lusager du systme de
soins, dont le traitement engage les d-
cennies venir. Il est le fruit de la rencontre,
au sein du Comit de recherche Socio-
logie de la sant de lAssociation inter-
nationale des sociologues de langue fran-
aise (AISLF), dune vingtaine de chercheurs
(sociologues, dmographes, anthropo-
logues, conomistes) et de mdecins. Les
principaux thmes abords sont : la placede lusager dans les rcents dispositifs de
sant publique ou dans les dernires lois
hospitalires, les regards des profession-
nels sur le bon usager, leurs pratiques
de tri, de dfinition et dvaluation des dif-
frents types dusagers, lusager comme
acteur part entire du systme, produc-
teur de soins, de connaissances profanes,
dvaluation des professionnels...
La qualit des soins en FranceJean de Kervasdou
La Mutualit franaise et Ed. delAtelier
Alors que, depuis 10 ans, le thme de la
qualit des soins est au cur des rflexions
pour lamlioration de notre systme de
sant, Jean de Kervasdou, professeurdconomie et de gestion des services de
sant au Conservatoire national des arts
et mtiers, fait le point sur ce sujet. Ce livre
est un plaidoyer pour la mise en uvre des
procdures de qualit. Il met en garde contre
une certaine conception des politiques de
qualit des soins qui pourrait mener une
bureaucratisation et une dshumanisation
des pratiques mdicales. Enfin, il propose
des mesures oprationnelles susceptibles
dtre dveloppes rapidement tant en m-
decine de ville quhospitalire.
ToxicomaniesPierre Angel, Denis Richard et
Marc Valleur
Masson
Cet ouvrage, trs complet, sur les diffrents
aspects des toxicomanies est un dernier n
de la collection desAbrgs de Mdecinedes ditions Masson. Il est le rsultat de la
collaboration de divers professionnels de
sant (psychiatres, mdecins gnralistes,
pharmacologues, pidmiologistes, psy-
chologues), chacun apportant un regard par-
ticulier sur la question de la toxicomanie.
Pierre Angel sest entour de lquipe du
Centre Marmottan, spcialise dans la prise
en charge des toxicomanies. Les aspects
socio-conomiques y sont abords, puis
chaque toxique fait lobjet dun chapitre com-
plet, les diffrentes thories des addictions
sont exposes. Les auteurs consacrent une
large partie aux thrapeutiques actuelles.
Ce livre, par son exhaustivit et sa clart,
parat utile toutes les personnes dsireuses
dune source dinformation et de rfrence
sur le sujet.C. Jallade
Du dispensaire au centredaccueil mdico-psychologique
LE CONGRS DE PSYCHIATRIE ET DE NEUROLOGIEDE LANGUE FRANAISE
La prochaine session du Congrs se tiendra Beyrouth du 22 au 27 avril 2001. Le co-mit dorganisation est compos de D. Hachem et J. Hafez de Beyrouth et de S. Tawilde Paris.Les trois rapports seront axs sur les thmes suivants : Rapport de Psychiatrie : Les troubles psychiques de la gravido-puerpralit et de la
prinatalit , M. Goudemand (Lille). Rapport de Neurologie : Epilepsie et psychose , B. De Toffol (Tours). Rapport de Thrapeutique : 1951-2001 ou 50 ans dhistoire, des neuroleptiques auxantipsychotiques : bilan, enjeux, perspectives , B. Lachaux (Lyon), E. Lombertie (Li-moges), P.A. Lambert (Chambry), J.P. Chabannes (St Egrve).De nombreux symposiums parallles et runions de socits scientifiques diverses au-ront galement lieu pendant cette session.Le bureau est constitu ainsi : les Prsidents seront les Professeurs G. Briole et A. Bous-tani, le Vice-Prsident, le Professeur P. Moron, le Secrtaire Gnral, le Docteur J.P.Chabannes et le Trsorier, le Docteur M. de Boucaud.Pour tous renseignements complmentaires, contacter le Docteur Jol Burgonse, CHS
de la Savoie, BP 1126, 73011 Chambry Cdex.Tl. : 04 79 60 30 36. Fax : 04 79 60 31 88. B.L.
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La fonction daccueil du CMP
Dans le CMP o je travaille, nous disons,aux gens : vous pouvez venir en prenantrendez-vous mais aussi vous prsenter sansrendez-vous, quand a va mal ou quand vousen ressentez le besoin . Nous sommes plu-sieurs Quimper, en effet, dfendre lidequune fonction daccueil est possible en
CMP et avoir propos cette appellation deCAMP, sorte de condensation entre CAP(centre daccueil permanent surtout deve-lopp en rgion parisienne et comprenant uncertain nombre de lits) et CMP. La fonctiondaccueil permet la rencontre et lvaluationde ce qui est en jeu dans ladresse quon vientnous faire. Un temps hebdomadaire (insuf-fisant) pluri-disciplinaire (psychiatre, psy-chologue, assistante sociale, infirmiers ) per-met de rflchir et de proposer :- parfois la poursuite du temps daccueil quel-quefois lui-mme pluri-professionnel (infir-mier psychiatre ou infirmier psychologue),- parfois la proposition dune prise en chargedemble : visite domicile, hospitalisation domicile, proposition de rencontre aveclhpital de jour, consultation mdicale ou
psychologique, entretien infirmier...
Quelques mots sur lHAD quon a beaucoupdeveloppe. Cest une alternative claire lhos-
pitalisation qui permet de proposer la per-sonne un cadre de prise en charge suffisam-ment contenant puisquil sappuie sur lesmmes personnes (infirmires) qui effectuentde faon programme au moins 3 visites in-firmires (la plupart du temps une visite par
jour). Une consultation mdicale au moinshebdomadaire permet de faire le point aveclensemble des personnes impliques : le pa-tient, sa famille, lentourage en gnral et lessoignants. Les mdicaments sont apports
par les infirmiers donc par lhpital qui ho-nore une ordonnance pouvant tre revalueau jour le jour. Il ny a pas dindication par-ticulire ou plutt pas de contre-indication,sinon videmment le refus de la personne oude son entourage trop en crise lui-mme ou
trop excluant.Se situer du ct de lalternative lhospita-lisation nentrane pas quon situe lhpitalcomme une mauvaise proposition mais en-core une fois comme modalit particulirede soins parmi dautres, laquelle laccueilen CMP, voire lHAD peut aussi prparer,une fois que le lien et le soin ne sont plus me-naants.Le fonctionnement institutionnel valorise lacomptence infirmire et son initiative, per-met de ne pas buter sur des carnets de rendez-vous remplis : une VAD se dplace, un ren-dez-vous de consultation peut se reporter...Laccueil permet dviter la plupart du tempslurgence, en donnant une rponse mme siles modalits concrtes de la rponse sont
plus ou moins loignes en temps. Si nousattachons une importance particulire aux
premiers accueils cest que nous savons,depuis longtemps que lentre en soin d-termine largement la poursuite et lallure fu-ture dune prise en charge. Mais la fonctiondaccueil, nous rappelle Oury, est pour-suivre tout au long du suivi, notamment au-
prs de ces patients souffrant au long cours pour repenser avec eux leur circulation dansle dispositif sectoriel. Un jeu dalternance
prsence/absence, garant dune continuitde la relation de soin, au sein dune discon-tinuit de la prsence soignante dit Muld-worf(2).Beaucoup de temps pour comprendre ,
beaucoup de temps de coordination (par ex.une fois par semaine avec les admissions,une fois par semaine avec lquipe de lh-
bergement thrapeutique, une fois par moisavec lquipe de laccueil familial, etc...) et
pas beaucoup de temps, mais la convictionde prserver davantage de confiance, de d-
dramatiser, pour le patient et son entourage,la question du soin psychiatrique et de nouerune possible alliance thrapeutique. Riendidal pourtant, les CMP de Quimper res-tent encore trop peu accessibles, non suffi-samment reprables et reprs.Je reviens sur cette audit ralis Quim-
per sur les relations entre secteur social etsecteur psy.
Cinq groupes de problmes ont t dgags :- problme quant lvaluation insuffisante
par la psy du danger dans certaines situations,notamment familiales,- problme de la fameuse absence de de-mande de lusager nonce par les acteursde la psy alors quun besoin dintervenir estreconnu par le secteur social,- problme des liens insuffisants entre pro-fessionnels pour relayer la prise en chargehospitalire ,- problme de la discontinuit des actions des
professionnels dans le temps : hospitalisa-tions rptes et prise en charge sociale,- problme de la rpartition des rles dans lecadre dune prise en charge simultane. Cestle problme de la synergie des actions.On retrouve donc certaines des reprsenta-tions lies la sant mentale, quand elle est
encore trs identifie la pratique hospita-lire, elle-mme repre comme replie surelle-mme.
Le CMP comme lieu daccueilindividuel
Grosse demande du secteur social souventexprime autour de la notion de danger etsouvent formule en terme de demande dhos-
pitalisation. Grosse dfiance du secteur psypar ra pport au ri sque ressenti dune psy-chiatrisation abusive des problmes sociauxet repre dans cette question de la demandeou non demande . On pourrait poser la ques-tion en ces termes : qui demande ?R. Castel(3) dans son ouvrage,Les mtamor-
phoses de la question sociale,parle de lin-dividualisation croissante des comportements,
mme au travail, avec un effacement desgrandes identits collectives, des repres quivalent pour tous, etc...Cela donne, dit-il, beaucoup deffets posi-tifs : la recherche dexpressions plus per-sonnelles et tout ce qui a fond la culturede lindividu comprenant lintrt pour la
psychanalyse et la psy en gnral. Mais cegain pour lindividualit vaut surtout pourles personnes en situation de scurit et din-dpendance. Cela transforme, aussi, les de-mandes de soins en CMP avec ces fameusesdemandes personnelles souvent de psycho-thrapie auxquelles il nous faut rpondre.Mais cet individualisme nouveau par dfautde cadres et de liens produit, aussi, chez les
personnes en situation de plus grande pr-carit, cette culture du sans lendemain ,du sans projet, culture de lalatoire dit
R. Castel. Toutes ces modalits flottantesdexistence, chez les jeunes, notamment, ont voir, me semble-t-il, avec ces nouvelles pa-thologies centres sur les passages lacteet les conduites addictives comme mtaphoredu refus de la satisfaction diffre. Et sou-vent, effectivement, l o il ny a pas de de-mande de soins.Dans un article dun ouvrage collectif surladolescence, M. Botbol, psychiatre, et AnneJamet, psychologue,(4) voquent le traitementde la non-demande des adolescents en souf-france.Pour accder aux soins psychiques, disent-ils, il faut :- la capacit de percevoir sa souffrance,- la capacit dexprimer une demande daide,- la possibilit de supporter linstaurationdun lien psychique investi.
Hors, chez les adolescents, mais aussi pourdes raisons diffrentes chez les personnes en
situation de grande prcarit, comme lvo-quent R. Castel, ou M. Sassolas pour les per-sonnes en situation de grande exclusion, chezces personnes quon dit tats-limites ,lomniprsence de la question des limites desoi et lexacerbation narcissique diminuent les possibilits de traiter de faon nuanceles rapprochs et les sparations qui devien-nent menaants . Dans ces cas, la demande
nest possible qu lincitation dun tiers par-ticipant, disent ces auteurs, lespace psy-chique largi , cest--dire dun mdiateursocial, qui exerce, je cite encore la fonc-tion suppltive de reconnatre la souffranceet demander les soins . On passe du dipleclassique, patient-professionnel de la santmentale, un triple incluant ce mdiateursocial qui exerce, je cite encore, la fonc-tion suppltive de reconnatre la souffranceet demander des soins .On a tous fait lexprience au CAMP quilest toujours intressant de proposer au tra-vailleur social, linfirmire du lyce, au
proche en gnral, daccompagner le jeuneou ladulte. Bien sr, il faut du temps et cenest pas facile mais lenjeu est de taille : ce-lui de prvenir laggravation de la souffrance
psychique, du dsarroi et de linquitude de
lentourage qui peuvent entraner ces fa-meuses situations de danger ou le recours la psychiatrie se fait alors vers une psychia-trie dexclusion forcment mal vcue.
Le CMP lieu du collectif inscritdans le rseau
Nouvelles souffrances, nouvelles demandesqui ncessitent, dune part, la rencontre etlaccueil individuel, avec ou sans ces m-diateurs dont je parlais, mais aussi beaucoupde rencontres et de rflexions partages avecdautres partenaires, dautres institutions desmilieux sociaux, ducatifs, scolaires, judi-ciaires etc... Cest toute la dimension du tra-vail en rseau avec le collectif ou la n-cessaire dsillusion rciproque (ne passillusionner sur le pouvoir de lautre) qui
peut entraner une rel le connaissance delautre, et une collaboration possible. Lesliens entre professionnels, entre les parte-naires permettent aussi ces synergies dac-tion dont parlait lenqute de la ville de Quim-
per.Rappelons-nous le livre de Goffman,Asiles,dcrivant linstitution psychiatrique commetotalisante parce quelle prtendait soccu-
per de toute la vie des malades : les soins,lhbergement, la nourriture, la vture, la ges-tion de largent, du travail ou du moins deloccupationnel Nous nen sommes plusl, mais la tentation est toujours forte, dh-
pital de jour en CATTP, de proposer soins,loisirs, vacances, activits culturelles... Mmesi les auteurs et acteurs de la psychothrapieinstitutionnelle nous ont appris combien letravail du soin auprs des psychotiques exige
de raliser du lien avec toutes les mdiationspossibles, pour autant chappons-nous tou-jours l effervescence occupationnelledailleurs induite par cette pathologie du lienet du faire qui entrave la vie des psycho-tiques ?Un exemple dune toute autre proposition Quimper nous a bien intresss.Le CCAS a, en effet,dvelopp pour toute
personne en difficult dinsertion et dispo-sant forcment de faibles revenus des Ate-liers intituls mieux dans... :- mieux dans ... la ville : ateliers culturels,ateliers informatique,- mieux dans... la vie quotidienne : ateliercuisine, atelier bricolage, jardinage,- mieux dans... son corps : ateliers relaxation,gymnastique, esthtique etc...Beaucoup de nos patients y participent et ny
sont videment pas accueillis comme ma-lades mais comme des personnes faibles
revenus (souvent lAAH en loccurrence) eten difficults dinsertion. Des frquentationsnouvelles se dveloppent, facteurs dinser-tion dans de nouveaux collectifs, certes fluc-tuants, mais souvent inventifs.Travail daccueil au CAMP, travail en r-seau tmoignant de la propre insertion desCMP dans un collectif, de cela nous ne pou-vons voquer que des bauches intressantes
Quimper mais aussi de crispations lies,par exemple, au projet imminent de transfertde toutes les urgences psychiatriques lh-
pital gnral dans un service durgence biensr trs renforc.Ce projet, videmment intressant, risquetoutefois de remdicaliser laccs aux soinsen psychiatrie sur le mode de lurgence si lesCMP ne renforcent pas leur place et leur rle
prvalent dans laccs aux soins et le suivides patients.Pour finir, je voudrais voquer une enqutemene Montpellier sur reprsentations
sociales, images du psychiatre et de la psy-chiatrie (5), celle mene Armentires sur images et communication en sant men-tale (6) en 96 qui insistent sur, je cite J.-C.Penochet, limage de la psychiatrie pour-rait bien samliorer trs progressivement
puisquelle contient des lments trs fortsqui poussent dans ce sens. Limpact le plus
fort demeure au niveau des pratiques, no-tamment extra-hospitalires .Malgr toutes les inquitudes lgitimes, parmilesquelles la question dramatique de la d-mographie mdicale et aussi infirmire, lesrationalisations scientifiques autour doffresde soins morceles ou hypertechnicises, lemaintien et le dveloppement des CMP, fac-teurs puissants de mise en rseau et incluantune fonction daccueil, peuvent tre des ins-truments simples pour garantir louvertureet lhumanit de nos pratiques.
Docteur Annie Bleas*
*Praticien Hospitalier, CAMP, 13 Bd Kerguelen, 29000Quimper, Secteur 29 G 08 de psychiatrie.
Bibliographie(1) BAILLON G.,Evolution des Centres de Crises,
Linformation psychiatrique, 2000, 76, 5, 549-564.
(2) MULDWORF L., La dpendance d es sujets
psychotiques,Synapse, 1999, numro spcial, 6-7.
(3) CASTEL R.,Les mtamorphoses de la ques-
tion sociale, Paris, Fayard, 1995.
(4) BOTBOL M. , JAMET A., Traiter la non de-
mande des adolescents, in Soigner-Protger-Pu-
nir, Paris, Bayard, 1999.
(5) PENOCHET J.C., GUIMELLI CH,Reprsen-
tations sociales, image du psychiatre et de la psy-
chiatrie,Nervure, 1996, 9, 9, 28-37.
(6) ROELANDT J.L., SELOD S.,La marie tait
pourtant belle,Nervure, 1996, 9, 9, 43-51.
Sanofi-Synthlabo met disposition unenouvelle forme galnique damisulpride:SOLIAN solution buvable, dose 100 mg/ml, flacon de 60 ml, qui vientcomplter la gamme actuelle : compri-ms scables 100, 200 et 400 mg etforme injectable 200 mg/4ml.SOLIAN solution buvable disposede lensemble des indications de la gamme:traitement des psychoses, en particuliertroubles schizophrniques aigus ou chro-niques, caractriss par des symptmes
positifs (par exemple dlire, hallucina-tions, troubles de la pense) et/ou dessymptmes ngatifs (par exem