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Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
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Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
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Les immunoglobinopathies monoclonales (IM), improprement appelées
gammapathies monoclonales (GM) regroupent des pathologies diverses pouvant
relever d’étiologies malignes ou bénignes.
Il faut remonter au XIX e siècle pour voir apparaître les premières notions
d’IM avec la description par le docteur S. Solly du premier cas du myélome en
1844. Ce n’est qu’en 1889 que le docteur Otto Kahler en fait une description
clinique détaillée et lui donne le nom éponyme de maladie de Kahler.
Parallèlement, le Dr. Henry Bence Jones met en évidence en 1848, une protéine
anormale dans les urines d’un patient atteint de myélome [1].
Plus tard, en 1944, le Dr. Jean Gösta Waldenström décrit une nouvelle
maladie caractérisée par la sécrétion d’une protéine anormale, la
macroglobulinémie ou maladie de Waldenström (MGW). En 1964, Jean
Waldenström sera le premier, à préciser le classement nosologique des IM et à
attirer l’attention sur des cas où celles-ci ne sont pas liées à un syndrome
immunoprolifératif malin [2]. Ce concept d’IM « bénigne » sera transformé par
Kyle en gammapathie monoclonale de signification indéterminée (MGUS) du
fait de l’observation des cas de transformation maligne au cours de la
surveillance [3].
Les immunoglobulines monoclonales (Igm), constituent une population
homogène d’immunoglobulines identiques entre elles, présentes dans le sang
et/ou les urines et témoignant de l’expansion non contrôlée d’un clone
lymphocytaire B (lymphoplasmocytes ou plasmocytes). Elles se caractérisent
par une seule classe de chaîne lourde (γ, α, μ, δ, ε) et un seul type de chaîne
légère (κ ou λ). L’Igm peut être parfois incomplète représentée seulement par sa
chaîne lourde ou légère [4].
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De nombreux contextes physiopathologiques peuvent conduire à
l’apparition d’une Igm avec des conséquences variables au niveau de
l’expression clinique et de l’évolution.
De nos jours, la prévalence des IM est importante. L’augmentation de leur
détection depuis deux décennies n’est toutefois pas univoque. Elle a une
explication évidente, liée au vieillissement de la population, à la systématisation
de l’électrophorèse des protéines sériques et à l’amélioration des techniques du
diagnostic biologique en termes de rapidité, de fiabilité, de sensibilité et de
facilité d’interprétation pour le biologiste [5].
Le caractère monoclonal de l’Ig n’est pas synonyme de malignité certaine
[6]. Une enquête étiologique semble donc indispensable.
La biologie et plus particulièrement la biochimie tient un rôle majeur dans
le dépistage et le diagnostic de ce type de pathologie. En effet les différentes
techniques électrophorétiques utilisées représentent un outil important dans la
mise en évidence mais également dans le typage de l’Igm.
Depuis l’an 2000, le laboratoire de biochimie de l’HMIMV de Rabat
répertorie les cas d’IM révélés à l’EPP sérique. Dans ce travail, nous nous
proposons donc d’exploiter dans ce contexte l’ensemble des données
biochimiques disponibles afin d’établir des profils de répartition d’une cohorte
de 214 cas d’IM diagnostiqués sur une période de 9 ans et d’étudier leurs
caractéristiques épidémiologiques et étiologiques.
Cette thèse s’articulera donc selon 2 axes principaux : Une première partie
consacrée à une revue de la littérature et une seconde partie présentant notre
manœuvre pratique, ainsi que les résultats que nous discuterons à la lumière des
données bibliographiques avant de conclure.
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I. LES IMMUNOGLOBULINES PHYSIOLOGIQUES: RAPPEL
A. Généralités et définition
Le terme d’immunoglobuline (Ig) a été proposé la première fois par
HEREMAS. Les Ig sont des glycoprotéines complexes de masse moléculaire
très élevée, présentes essentiellement, soit à la surface des lymphocytes B
(immunoglobulines de membrane), soit dans le milieu intérieur
(immunoglobulines circulantes), soit dans certaines secrétions externes
(immunoglobulines sécrétoires). Elles sont dénommées anticorps en raison de
leur fonction essentielle de liaison aux antigènes [7, 8].
Ces molécules sont caractérisées par un certains nombres de propriétés:
Dualité fonctionnelle : Les Ig sont des molécules bipolaires qui présentent
2 pôles fonctionnels : régions variables, impliquées dans les fonctions de
reconnaissance de l’Ag (Fab) et régions constantes (Fc), responsables des
fonctions effectrices,
Dualité structurale : Les Ig sont constituées par deux types de chaînes
légères et lourdes,
Hétérogénéité : Les Ig humaines sont utilisées comme immunogènes, ce qui
a permis de définir les différentes spécificités antigéniques qu’on peut classer en
trois types :
♦ Spécificité isotypique : Uniforme pour tous les individus d’une même
espèce, elle définit les catégories (classes, sous classe, types) des Ig. Chez
l’homme, appartiennent à ce type de spécificité les cinq classes principales d’Ig
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(G, A, M, D et E), ainsi que les sous classes de chaînes lourdes (G1 à G4,
A1/A2) et les types de chaines légères (κ et λ).
♦ Spécificité allotypique: Elle correspond au polymorphisme génétique
existant entre les différents individus d’une même espèce.
♦ Spécificité idiotypique : Elle est liée à l'hyper variabilité du site de
liaison à l'antigène. Cette variation est propre à chaque clone de lymphocyte B
[7,9].
B. Structure [8, 9, 10].
Malgré leur très grande diversité, les Ig se sont rapidement révélées être
toutes faites selon le même modèle par des chaînes lourdes ou Heavy (CH) et
légères ou Light (CL), comprenant des domaines variables V et constants C et
assemblées de manière monomérique ou polymérique.
Le modèle le plus général des Ig est celui de l’IgG, décrit ci-après :
- Chaque molécule d’Ig est composée de quatre chaînes polypeptidiques
identiques deux à deux : 2 chaînes légères (CL) et 2 chaînes lourdes (CH),
reliées entre elles par des ponts disulfures dits inter caténaires dont la
réduction n’altère généralement ni l’organisation de la molécule ni son
activité.
- Il existe aussi des ponts disulfures internes à chaque chaîne dits intra-
caténaires et qui sont difficiles à réduire mais essentiels au reploiement et à
l’activité des Ig, ils stabilisent les structures tertiaires.
La figure 1 illustre le modèle décrit.
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Figure 1 : Schéma illustrant la structure d’une Ig complète [8].
Les chaînes lourdes définissent la classe et la sous classe d’Ig. Les chaînes
µ, δ, α et ε correspondent respectivement aux classes des Ig M, G, A et E. Les
chaînes γ 1, γ2, γ3, γ4 correspondent aux sous-classes des IgG.
Alors que les chaînes légères définissent dans chaque classe 2 types d’Ig κ
et λ.
Les domaines entrant dans la formation des chaînes des immunoglobulines
ne sont que des séquences de 110 acides aminés environ de longueur. Et selon la
nature de ces séquences, on distingue les domaines constants et les domaines
variables pour chaque chaîne d’Ig. Chaque chaîne légère est constituée d'un
domaine constant (CL) et d'un domaine variable (VL).
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Les chaînes lourdes sont composées d'un fragment variable (VH) et de 3
ou 4 fragments constants CH1, CH2, CH3 et CH4 selon l'isotype.
C. Synthèse
Les Ig sont synthétisées et secrétées par des plasmocytes résultant de la
maturation des lymphocytes B. La présentation de l’Ag, la coopérativité des
cellules T et B sous l’action des cytokines font que les lymphocytes B
s’activent, se différencient, prolifèrent et produisent des anticorps ou des
immunoglobulines, dirigés contre les différentes épitopes de l’Ag [9, 10].
D. Fonctions [7]
Elles sont très nombreuses, on cite quelques unes :
Reconnaissance de l’Ag,
Fixation et activation du complément,
Propriétés cytophylitiques : opsonisation,
Neutralisation,
Agglutination et précipitation,
Autres fonctions particulières à la classe d’Ig :
- IgG (70 à 75 % d’Ig sériques) : constituant principal au cours de la réponse
immunitaire secondaire.
- IgM (10 % d’Ig sériques) : première classe d’Ig produite au cours de la
réponse immunitaire primaire,
- IgA (15 à 20 % d’Ig sériques) : protection des muqueuses,
- IgD (<1 % d’Ig sériques) : différenciation des lymphocytes B après activation,
- IgE (<0.1% d’Ig sériques) : action antiparasitaire et antiallergique.
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I. IMMUNOGLOBULINE MONOCLONALE (Igm)
A. Définition et caractéristiques
Il s’agit d’une Ig de structure le plus souvent normale mais en quantité
augmentée par rapport à l’état physiologique [11]. Elle peut être :
Complète, le plus souvent de classe G, A, M et rarement D ou E.
Ou incomplète sous forme de fragments d’Ig : Chaînes légères (souvent
appelées dans les urines protéine de Bence-Jones) ou chaînes lourdes [12,4]
.
A la différence des Ig physiologiques, les Ig monoclonales sont
synthétisées par un seul clone de cellules B malignes ou hyper stimulées, ce qui
leur confère un caractère homogène.
L’homogénéité des Igm est reflétée par les critères suivants [4,13]:
L’identité de charge électrique
Les molécules d’Igm ayant la même structure primaire, la même séquence
d’acide aminé, leur charge électrique globale est donc équivalente. Il en résulte
une mobilité électrophorétique homogène, objectivée par une bande étroite sur
le support de migration ou un pic étroit sur le tracé.
Ce pic les différencie des augmentations polyclonales d’Ig qui migrent
selon une bande large. Il est très souvent retrouvé dans la zone des
gammaglobulines en cas de mobilité anodique, il peut se trouver superposé à
d’autres protéines (zone α1 voir α2 plus rarement). Ce pic peut être discret voir
absent lorsque le composant monoclonal a un poids moléculaire suffisamment
faible pour franchir le filtre glomérulaire (CLL).
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L’identité structurale
La population d’Igm ne possède qu’un seul type de chaîne lourde et un
seul type de chaîne légère. Cette identité structurale sera d’ailleurs à la base du
typage immunochimique par les techniques d’immunoélectrophorèse ou
d’immunofixation.
L’identité immunologique
L’ensemble des Igm ont les mêmes déterminants iso-, allo- et idiotypiques.
Elles possèdent donc la même activité anticorps, mais celle-ci n’est que très
rarement recherchée.
B. Etapes d’identification biochimique
La recherche et la caractérisation d’une Igm, dans le sérum et les urines
des patients est une étape essentielle du diagnostic et du suivi évolutif des IM.
1- Lesquelles ?
Au laboratoire de biologie, l’exploration d’une Igm comporte trois volets
principaux : le diagnostic, l’évaluation du retentissement et le pronostic.
Le diagnostic biologique de l’Igm comporte les étapes suivantes :
- L’exploration protéinologique, visant à détecter et à caractériser l’Ig. elle
repose sur une panoplie de techniques réalisées concomitamment dans le sang et
dans les urines.
L’analyse du sérum comporte une détermination du taux de protides sériques
associée à la réalisation d’une électrophorèse, une IF(ou IS) pour typer le
composant monoclonal, un dosage des Ig sériques (permettant d’évoquer parfois
la classe de l’Ig en cause) et en fin la recherche d’une éventuelle cryoglobuline.
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L’analyse simultanée des urines bien souvent négligée quoiqu’essentielle,
associe à la recherche et au dosage de la protéinurie, la réalisation de
l’électrophorèse pour détecter une éventuelle PBJ et une IF en vue de déterminer
la nature de celle-ci et celle de l’Igm si elle est présente dans l’urine.
- La confirmation du diagnostic biologique, apportée par le myélogramme et/ou
la BOM.
Quand à l’évaluation du retentissement et du pronostic de l’Igm, elle se fait
par la pratique d’examens complémentaires sanguins et urinaires. Il est à
préciser que les renseignements cliniques sont importants à connaître par le
biologiste, pour que ce dernier puisse orienter les différentes explorations
biologiques. Cela est d’autant plus vrai lorsque les anomalies biologiques sont
peu évidentes (cas de MCL).
A côté de cela, le laboratoire joue un rôle indéniable dans la surveillance de
ce type de pathologie par la réitération périodique de certaines analyses comme
l’EPP et le dosage pondéral. Il permet, en effet, le suivi de l’efficacité du
traitement au cours des IMM et la surveillance des MGUS.
2- Diagnostic biologique : exploration protéinologique
2.1. La phase pré-analytique
Elle concerne toutes les étapes depuis le prélèvement jusqu’au démarrage
de l’analyse proprement dite. C’est une étape cruciale, car elle peut influencer
les résultats.
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2.1.1- Prélèvement sanguin
L’étude d’une Igm se fait impérativement sur un échantillon de sérum, soit
un prélèvement réalisé sur tube sec. En effet, le fibrinogène présent dans le
plasma peut simuler un pic monoclonal situé entre les zones β et γ globulines, à
l’origine de résultats faussement positifs.
Le prélèvement est réalisé par ponction veineuse sur tube sans gel séparateur
(les microgels interfèrent dans la réaction Ag-Ac).
Le patient doit être à jeun depuis 12h, les sérums troubles peuvent être à
l’origine d’une fausse interprétation des résultats (cryoglobulines faussement
positives).
Les prélèvements sont à conserver, à +4oc lorsque l’analyse est différée pour une
durée maximum d’une semaine [4,14].
L’étude correcte d’une cryoglobuline, ne peut être envisagée que si l’on
dispose d’un prélèvement de sang réalisé dans des conditions strictes de
prélèvement et de transport. Les cryoglobulines ont une amplitude thermique de
précipitation qui varie de +11 à +37°C, il faut donc impérativement éviter cette
précipitation tant que le sérum n’est pas décanté, sous peine de perdre le
cryoprécipité par absorption dans le caillot. C’est pour cette raison que le
prélèvement sanguin doit être maintenu à +37°C dés l’instant de la ponction
veineuse jusqu’à la séparation complète du sérum. Les spécimens sont
immédiatement placés dans un pot pour centrifugeuse préalablement réchauffé à
+ 37°C et couvert de coton cardé. Après centrifugation à + 37°C, 3000 tours/mn
pendant 10 minutes, les sérums sont placés au réfrigérateur à + 4°C et seront
observés chaque jour pendant une semaine [15,16].
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2.1.2- Recueil urinaire
L’envoi au laboratoire d’un échantillon d’urine issue d’une miction ou de
préférence d’un recueil de 24h (impérativement accompagné de valeur de la
diurèse) devrait être systématique.
Les urines sont collectées de préférence sur un antiseptique (azide de sodium ou
cristal de thymol) afin d’éviter l’altération des protéines par prolifération
bactérienne.
Par ailleurs l’existence d’une hématurie peut entrainer une majoration
importante de la protéinurie [17].
2.2. La phase analytique et post-analytique
2.2.1- Dosage des protéines totales sériques et urinaires
Ces examens de base non spécifiques, peuvent malgré tout, évoquer
l’existence d’une IM en cas d’hyperprotidémie importante voire même d’une
hypoprotidémie, ou lors d’une protéinurie significative en l’absence de maladie
rénale connue. De plus, ils sont indispensables à l’interprétation quantitative de
l’électrophorèse.
Technique :
La méthode de dosage de la protidémie actuellement recommandée, fait
partie du groupe des méthodes chimiques basées sur une réaction avec la liaison
peptidique, il s’agit de la technique au Biuret. Son principe repose sur la
propriété de Biuret de donner avec les solutions alcalines de cuivre une
coloration rose rouge. La réaction est fournie par la condensation des ions
cuivriques avec les liaisons peptidiques des protéines qui s’ionisent en milieu
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alcalin. Les atomes d’azote de la chaîne peptidique, forment de liaisons de
coordination avec le cuivre. La réaction développe une coloration rose qui, en
présence du réactif cuivrique bleu, conduit finalement à la coloration violette du
milieu réactionnel dont l’intensité peut être mesurée par spectrophotométrie
d’absorbance moléculaire à 540-550 nm [18].
De nombreux réactifs mettent à profit le principe réactionnel du Biuret, le plus
utilisé est le réactif de Gornall.
En ce qui concerne la réaction et le dosage d’une éventuelle protéinurie, le
biologiste doit être averti que les méthodes de détection par bandelette, basées
sur la réaction protéine/colorant sont surtout sensibles à l’albumine mais sous-
estiment les chaînes légères d’Ig dont la détection sera inconstante et donc
responsable de faux négatifs.
La méthode de dosage recommandée par la société française de biologie
clinique (SFBC) est la technique au rouge de pyrogallol. Elle présente
l’avantage d’être automatisable, d’avoir une bonne sensibilité, une bonne
praticabilité, une bonne répétabilité et une reproductibilité acceptable.
Le rouge de pyrogallol forme, en présence de molybdate en milieu acide, un
complexe bleu photométrable à 600 nm [4].
Résultat :
La protidémie normale chez l’adulte est de 62 à 85g/l.
Chez le sujet adulte sain, il existe une protéinurie physiologique
<0.15g/24h, non détectable par les méthodes habituelles de recherche et de
dosage [4].
Limites du dosage de la protidémie et de la protéinurie :
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L’albumine et les globulines ont une réponse variable au biuret selon la
technique utilisée (cinétique ou point final). Cette différence est encore
augmentée s’il existe une Igm. L’erreur analytique est alors proportionnelle à
son taux et le résultat de la protidémie peut varier de plus d’une dizaine de
grammes lorsqu’elle est dosée sur deux appareils utilisant des méthodologies
très différentes.
La PBJ est fréquemment prise en défaut par les bandelettes réactives et
certaines méthodes de dosage n’utilisant pas une réaction de type colorimétrique
comme le rouge de pyrogallol ou le bleu de Coomassie. C’est ainsi le cas des
méthodes turbidimétriques utilisant l’acide sulfosalicylique ou l’acide
trichloracétique qui sous-estiment les globulines et peuvent ne pas détecter des
chaînes légères libres présentes en faible concentration dans une urine [4].
2.2.2- L’électrophorèse du sérum et des urines
2.2.2.1. Principe
Il s’agit d’une analyse peu onéreuse, simple, actuellement totalement
automatisée, très utilisée en biologie clinique pour séparer les différentes
fractions protéiques contenues dans un milieu complexe comme le sérum ou les
urines. Introduite en 1930, comme technique de séparation, par le chimiste
suédois Arne Tiselius lors de l’étude des protéines du sérum [19,20], elle
représente l’examen de première intension, demandé dans l’exploration d’une
anomalie monoclonale.
L’électrophorèse est un phénomène physique qui désigne le déplacement
d’ions ou de particules chargées en suspension ou en solution sous l’influence
d’un champ électrique. Elle repose sur le principe suivant: Les protéines
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sériques ou urinaires sont séparées en fonction de leur mobilité
électrophorétique dans un tampon alcalin de faible molarité sous l’effet d’un
champ électrique. En solution, les protéines acquièrent une charge électrique et
sous l’effet d’un champ électrique, elles se déplacent dans un sens déterminé. Le
sens de leur migration dépend du pH de la solution étudiée et du pH
isoélectrique des protéines. En effet, la mobilité des protéines est principalement
déterminée par leur charge nette, très peu par leur taille, car les supports utilisés
(acétate de cellulose ou agarose) exercent très peu l’effet de tamisage
moléculaire [13, 21].
2.2.2.2. Electrophorèse sérique
Techniques
Les techniques électro phorétiques utilisées ont connu une évolution
considérable au fil du temps, en terme de support, rapidité et sensibilité d’où
l’existence de nombreuses méthodes pour la réalisation de cet examen.
Le laboratoire de biochimie de l’HMIMV a connu ce type d’évolution
durant la période d’étude puisqu’il est passé de l’utilisation de l’acétate de
cellulose en manuel, au gel d’agarose sur automate puis enfin au capillaire. Nous
allons essayer de décrire ces différentes méthodes.
♦ Techniques sur acétate de cellulose
La technique manuelle fait appel à un matériel simple ; une cuve de
migration dans laquelle est introduite la bande d’acétate de cellulose. Le rouge
ponceau va fixer les protéines séparées et les colorer en fonction de leur
concentration. Après ce traitement (fixation, coloration lavage…) les bandes
peuvent être analysées qualitativement par un examen visuel ou
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quantitativement par une intégration densitométrique afin d’obtenir un tracé
électrophorétique [22] (figure 2).
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Figure 2 : Résultat d’une EPP réalisée sur acétate de cellulose
(Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
♦ Technique sur gel d’agarose
Le gel d’agarose (figure3) nécessite une fixation préalable des protéines
ainsi qu’une déshydratation du gel, avant la coloration par «l’amidoschwartz»
permettant une meilleure résolution [19,22].
Cette technique est réalisée sur l’automate Hydrasys® de chez Sébia, où la
lecture densitométrique peut fournir un tracé caractérisé par une
individualisation des fractions β1 et β2,
Bande etroite en β
Bande d’acétate de cellulose (1)
Proteinogramme après lecture densitométrique
Pic monoclonal
en β
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Figure 3:Résultat de la migration des protéines sériques sur gel d’agarose /Hydragel
protéine 30 patients (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV)
Figure 4 : Protidogramme illustrant l’intégration densitométrique du cas n°27 sur le
gel d’agarose (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV)
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♦ Electrophorèse capillaire
L’électrophorèse capillaire (EC) est une technique analytique
d’introduction relativement récente, considérée aujourd’hui comme une méthode
de séparation analytique très performante, rapide, plus reproductible et plus
résolutive par rapport à l’EP en gel d’agarose. Cette technique utilise des
capillaires étroits (diamètre interne de 10 à 200µm).
Dans le laboratoire de biochimie de l’HMIMV, l’EC est réalisée sur le
Capillarys® (Sebia). Il s’agit d’un automate multicapillaire (8 capillaires) de
deuxième génération, avec une complète automatisation (identification code
barre) qui permet une analyse rapide et sécurisée.
Le principe général de l’EC repose sur la migration des espèces en
solution, porteuses d’une charge électrique globale, soumises à l’effet d’un
champ électrique, et au contact d’un support approprié. La mise en œuvre
consiste à utiliser un tube capillaire ouvert à ses extrémités, en verre de silice de
très faible diamètre (15 à 150 μm). Ce capillaire, d’une longueur L variant entre
20 et 80 cm, est rempli de la même solution aqueuse d’électrolyte tampon que
les deux réservoirs situés de part et d’autre. On applique aux électrodes une
différence de potentiel pouvant atteindre 30 kV. L’intensité ne doit pas dépasser
100 μA (soit une puissance dissipée d’environ 3 W maximum), pour éviter
l’échauffement du capillaire qu’il est préférable néanmoins de placer dans une
enceinte thermostatée.
Les espèces, qu’elles soient chargées positivement ou négativement, migrent en
général vers la cathode. Un système de détection est placé avant l’extrémité
avale du capillaire. En mode UV par exemple, le capillaire coupe le trajet
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optique entre la source et le photomultiplicateur, ce qui permet de mesurer
l’absorbance de la solution en évitant tout volume mort. Il en est de même pour
la détection électrochimique. De minuscules électrodes sont, dans ce cas,
insérées dans le capillaire.
La séparation repose donc sur 2 phénomènes [23]:
La différence de mobilité éléctrophorétique entre les analytes à séparer,
ce qui se traduit par des vitesses de migration différentes dans le tampon
d’électrophorèse à l’intérieur du capillaire,
Le courant d’électroendosmose qui est plus important, il permet dans la
même manipulation de séparer à la fois les anions et les cations.
Dans ces conditions les protéines, chargées négativement, migrent de l’anode
vers la cathode.
La figure 5 présente un schéma illustrant ce principe
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Figure 5:Schéma illustrant le principe de séparation des particules en EC [21].
Un logiciel permet la reconstitution des courbes sous forme de
protéinogramme [24].
Cette méthode présente de nombreux avantages en comparaison des
électrophorèses réalisées sur gel. Tout d’abord, c’est une technique
complètement automatisée qui fonctionne en vase clos, du prélèvement de
l’échantillon jusqu’à l’émission du tracé électrophorétique [25]. Ensuite, c’est
un système rapide effectuant 100 tests à l’heure avec la possibilité d’une
alimentation en continu des échantillons. Le système de lecture par code barre
permet, en outre, de diminuer les erreurs d’identification des tubes.
Enfin la résolution des pics est améliorée, tout comme la sensibilité (0.20g/l), ce
qui affine nettement la détection des composés monoclonaux [26].
Un exemple de tracé électrophorétique obtenu sur le Capillarys (EC) au
laboratoire de Biochimie de l'HMIMV est illustré par la figure 6.
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Figure 6: Exemple de tracé électrophorétique obtenu sur Capillarys (EC),
(Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
Résultat
Les résultats de cet examen sont présentés sous deux formes :
- Un graphique, résultat de l’intégration par densitométrie de la bande
électrophorétique ;
- Des valeurs chiffrées, pour chacune des fractions en pourcentage et en
concentration g/l calculée à partir de la protidémie totale.
Selon le support utilisé, 5 à 6 fractions sont alors bien individualisées :
La fraction albumine biochimiquement homogène, la plus importante des
protéines sériques et 4 groupes de globulines de migration α1, α2, β et γ
globulines.
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Figure 7 : Tracé électrophorétique illustrant les différentes fractions protéiques
après intégration densitométrique [27].
Normes des fractions protéiques dans le sérum :
Fractions % g/l
- Albumine 57-65 37-42
- α1-globulines 2-4 1-3
- α2-globulines 6-10 4-7
- β-globulines 8-12 5-8
- γ-globulines 12-19 8-12
L’interprétation rigoureuse d’une électrophorèse oblige à considérer
simultanément la migration électrophorétique sur gel, la courbe obtenue sur le
densitomètre et le résultat chiffré en g/l ou en pourcentage [21].
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214cas.
26
Pièges
Les principaux pièges de l’électrophorèse sont :
- la présence de fibrinogène qui se traduit par la présence d’un pic à l’électro-
phorèse, fin de migration β ou γ très rapide,
- l’augmentation des α2- ou des β-globulines (transferrine, composant C3 du
complément, β-lipoproteines, hémolyse importante),
- pic masqué dans les β-globulines (petite IgA monoclonale),
- absence de pic en cas d’Igm à activité cryoprécipitante pour non respect des
conditions de prélèvement,
- existence de formes diversement polymérisées d’une Igm, responsable de
plusieurs pics,
- complexation de l’Igm à d’autres protéines, lui faisant perdre son homogénéité
de charge : α1 antitrypsine pour les chaînes légères, facteurs rhumatoïdes
monoclonaux [12].
2.2.2.3. Electrophorèse des urines
Technique
C’est la méthode la plus appropriée pour déceler la présence d’une PBJ
majoritairement constituée de chaînes légères libres d’Ig d’un seul type. Elle
doit être réalisée parallèlement à l’électrophorèse des protéines sériques.
L’électrophorèse sur acétate de cellulose est une méthode simple mais peu
discriminatoire dans l’étude des protéinuries. La nécessité d’une concentration
préalable dépendra de la quantité totale des protéinés urinaires [19].
Sont actuellement disponibles, des kits prêts à l’emploi, permettant
l’analyse d’échantillon d’urine sans concentration préalable.
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214cas.
27
La séparation électrophorétique fractionne les protéines selon leur poids
moléculaire (Hydragel protéinurie : fig. 8) ou selon leur charge électrique
(Hydragel 7 HR ou 15HR : fig. 9) en fonction du kit commercial utilisé [28].
Cette technique permet aussi de détecter les Igm complètes en cas de leur
passage dans les urines.
Actuellement, l’utilisation de l’EC est difficilement applicable aux
échantillons urinaires et nécessite encore de nombreuses mises au point [29].
Comme pour l’Igm sérique, la nature monoclonale de la PBJ ne peut être
affirmée qu’après immunofixation [19].
Figure 8: Hydragel protéinurie: Séparation des protéines selon leur poids
moléculaire(A), Les différentes fractions séparées(B) [30].
B A
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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28
Figure 9 : Hydragel 15HR(A) : Séparation des protéines selon leur charge
électrique, Les différentes fractions séparées (B) [31].
Résultat
La figure 10 présente un exemple des résultats d’électrophorèse urinaire sur
Hydragel protéinurie.
Figure 10 : Un exemple de profil tubulaire (5) [31].
A B
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29
Pièges
Les pièges de l’EPP urinaire concernent surtout la zone des β-globulines :
-Présence de sang dans les urines ; hémoglobinurie ou myoglobinurie importante
pouvant simuler un pic de PBJ dans la zone des β-globulines.
-Des chaînes légères libres polyclonales kappa et lambda peuvent apparaître
dans des atteintes tubulaires mais, dans ce cas, elles sont de 2 types, et en
concentration peu importante. La zone des gammaglobulines est diffuse sur
l’électrophorèse urinaire (absence de pic homogène comme dans une PBJ) [4]
2.2.3- Dosage immunochimique
2.2.3.1- Des Ig A, G, M, D, E
Intérêt et techniques
En cas de détection d’une Igm par électrophorèse, le dosage pondéral des
Ig résiduelles physiologiques est indispensable pour l’orientation diagnostique
et le suivi des IM.
Il ne doit être utilisé que pour quantifier les Ig polyclonales normales. Il permet
de mettre en évidence une diminution ou non des Ig résiduelles qui représente
un élément d’orientation vers le caractère plutôt malin de l’IM. Il ne doit en
aucun cas être utilisé pour quantifier le composant monoclonal car il ne
distingue pas l’Igm des Ig polyclonales de la même classe.
Il renseigne également sur les risques infectieux éventuels encourus par le
patient, en raison de l’hypogammaglobulinémie portant sur les Ig
physiologiques (anticorps responsables de l’immunité humorale) [4,12].
Différentes techniques peuvent être utilisées : néphélémétrie, turbidimétrie
ou immunodiffusion radiale (technique de Mancini). Il s’agit de méthodes
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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30
immunochimiques utilisant des réactions d’immunoprécipitation.
L’immunoprécipitation résulte de la mise en évidence d’un Ag soluble et de son
Ac homologue ou immun sérum spécifique qui en se liant forme un complexe
immun insoluble pour un certain rapport Ag-Ac.
L’immunoturbidimétrie et l’immunonéphélémétrie sont des techniques
d’immunoprécipitation en milieu liquide. Les complexes Ag-Ac sont ainsi
formés en présence d’un excès d’Ac en solution, ces complexes diffusent de la
lumière de façon plus importante que les Ag ou les Ac libres. Il est dès lors
possible de mesurer la lumière diffusée (néphélémétrie) ou la lumière transmise
dans l’axe des faisceaux (turbidimétrie) [32].
L’immunodiffusion radiale de Mancini est une technique quantitative
d’immunodiffusion simple bidimensionnelle. C’est une technique de mise en
œuvre très simple mais demandant un temps de diffusion d’au moins 24h en
chambre humide. Elle n’est donc pas adaptée à l’urgence, mais demeure la
technique de référence et la méthode de choix pour les protéines se trouvant en
très faible concentration comme les IgD ou les sous-classes d’Ig [4,12].
Résultat
Les concentrations moyennes des immunoglobulines sériques sont
présentées dans le tableau I [12].
Tableau I : Taux normaux des Ig
IgG IgA IgM IgD IgE
Taux en (g/L) 7 - 16 0.7 - 4 0.4 – 2.3 0.1 – 0.3 0.1 – 0.5
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31
Pièges du dosage des Ig (G, A, M,..):
-Redissolution possible par excès d’Ag en cas d’Ig monoclonale en
concentration très importante (problème de plus en plus évité avec les
équipements actuels),
-Dosage normal des Ig en cas d’Ig monoclonale exclusivement
cryoglobulinique (notamment IgM dans la maladie de Waldenstrom) si le
prélèvement a été amené au laboratoire à température ambiante et non à 37°C,
-Penser à l’existence éventuelle d’une Ig D ou Ig E monoclonale s’il existe un
pic monoclonal associé à une hypo-gammaglobulinémie [4].
2.2.3.2- Dosage des CLL et rapport κ/λ
Intérêt et techniques
Utilisé depuis 1986, le dosage pondéral des chaînes légères libres (κ et λ)
est également réalisé par technique immunochimique, il permet le calcul du
rapport κ/λ.
Il s’agit d’un test biologique sensible, reproductible, disponible dans de
nombreux laboratoires hospitaliers et un critère biologique utile pour
l’exploration, le suivi et la prise en charge des myélomes à chaînes légères, des
myélomes peu ou non sécrétant et de l’amylose AL [33].
Différentes techniques de dosage permettant de quantifier spécifiquement la
forme libre des chaînes légères d’immunoglobulines, ont été mises au point [34],
mais aucune n’a été développée en routine. Depuis 2001, une méthode
immunologique automatisée (Freelite TM
) de dosage des chaînes légères libres κ
et λ est disponible [35].
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32
Cette technique permet le dosage des CLL dans le sérum ou les urines, par
immunonéphélémétrie ou immunoturbidimétrie avec une sensibilité de 0,5 mg/l
et est adaptable sur différents automates de laboratoires. Elle utilise des Ac
polyclonaux monospécifiques des CLL κ ou λ adsorbés sur des particules de
latex, qui vont réagir et former des complexes immuns, dont la quantité est
directement proportionnelle à l’intensité de la lumière diffractée [36].
Les CLL κ et λ sont quantifiées séparément et le calcul du rapport κ/λ
permet de faire la différence entre une augmentation polyclonale des CLL (les
concentrations des 2 types de CLL sont augmentées mais le rapport κ/λ reste
normal) et une production monoclonale de l’une des CLL (rapport κ/λ perturbé).
Dans le deuxième cas le rapport κ/λ, aide également au typage de l’Igm (en
complément du dosage des Ig (G, A et M)) :
- rapport κ/λ élevé : Igm type kappa.
- rapport κ/λ diminué : Igm type lambda [37].
Résultats
Les valeurs normales sériques ont été définies par l’équipe de Katzmann
chez 127 donneurs de sang, âgés de 21 à 62 ans et 165 individus sains plus âgés
(51 à 90 ans). Les intervalles de normalité sont, pour les concentrations sériques
des CLL kappa de 3.3 à 19.4 mg/l, des CLL lambda de 5.7 à 26.3 et pour le
rapport κ/λ de 0.26 à 1.65 [37].
Difficultés de dosage de CL
Le dosage CLL présente un certain nombre de problèmes analytiques
inhérents à la technique néphélémétrique.
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33
Le phénomène de zone reste la principale limite de ce dosage. Phénomène
immunologique liée à un excès d’antigènes a été décrit chez plusieurs patients, il
se traduit par une sous-estimation, voir même une normalisation de la
concentration des CLL au dosage, alors qu’il existe une CLL monoclonale
importante à l’immunofixation [38].
2.2.4- Caractérisation isotypique
2.2.4.1. Techniques
Plusieurs méthodes combinent l’électrophorèse et des réactions Ag-Ac.
Elles permettent l’appréciation simultanée de l’homogénéité de charge et de la
restriction isotypique des Ig. L’IF est actuellement la plus répondue, elle a
totalement remplacé l’immunoélectrophorèse décrite par Grabar et Williams.
Par ailleurs l’avènement de l’électrophorèse capillaire a donné naissance à une
nouvelle méthode dite immunosoustraction pour le typage de l’Igm.
Immunoélectrophorèse (Figure 11)
Technique de référence avec laquelle, ont été faites les premières
identifications d’IM, l’immunoélectrophorèse est décrite à l’institut pasteur par
GRABAR et WILLIAMS dans les années 50. Il s’agit d’une réaction
d’immunoprécipitation en milieu gélifiée basée sur la combinaison de deux
méthodes effectuées en deux temps : l’électrophorèse de zone en agarose et
l’immunodiffusion en gel [19].
Le premier temps consiste en une migration électrophorétique, en tampon
alcalin pH 8.2-8.6, de différentes fractions protéiques de la solution à analyser
après son dépôt dans un puits creusé dans le gel.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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34
Le deuxième temps consiste à déposer un antisérum monospécifique ou poly
spécifique dans une rigole parallèle à la direction de migration. Une double
diffusion de l’antigène et de l’anticorps l’un vers l’autre se produit donnant ainsi
aux zones d’équivalence respectives autant d’arc de précipitation qu’il y a de
systèmes antigène-anticorps [12].
Cette analyse est toujours effectuée en comparaison avec un sérum humain
normal eu égard de la position, la forme et l’intensité des arcs.
Figure 11: Plaque d’IEP pour le typage des Igm (Laboratoire de biochimie de l’HMIMV)
L’IEP est un examen long, qui demande une bonne expérience. Elle tend à
être remplacée par des méthodes rapides, sensibles et d’interprétation facile [13].
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35
Immunofixation (IF)
Son principe fut décrit pour la première fois par Alfonso et Wilson en
1964, c’est une technique qualitative qui associe à une séparation
électrophorétique en tompan alcalin (pH=9.1), une immunoprécipitation par des
antisérums antichaînes lourdes γ, α, et μ et antichaînes légères κ et λ (libres et
liées), en première intension puis antichaines δ et anti ξ, antichaînes légères κ et
λ dans le cas où seules les chaînes légères ont réagi. Une première piste est mise
en évidence en contact avec un réactif fixateur de protéine pour servir de
référence.
Après l’IF, les protéines précipitées, sont colorées par une solution de
violet acide ou de noir amide.
Les Ig polyclonales sont révélées sous forme d’un précipité diffus, plus au
moins large. La présence d’Igm, se traduit par une bande étroite révélée par un
antisérum antichaîne lourde associée à une bande étroite révélée par un
antisérum antichaîne légère. Toutes deux sont précipitées au même niveau de
migration que la bande étroite présente sur la piste témoin d’EP.
Dans le cas particulier de MCL, l’IF révèle l’unique présence de CL κ ou λ sans
correspondance avec les chaînes lourdes.
Dans les rares cas de myélome non excrétant ou non synthétisant, l’IF se révèle
sans anomalie. Cette technique est également applicable pour la recherche et le
typage d’une PBJ avec ou sans concentration préalable. Les immuns complexes
utilisés sont alors : anti GAM, anti κ-totales, anti λ-totales, anti κ-free, anti λ-
free [39,4].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
36
Les avantages de l’IF sont nombreux : c’est une technique résolutive,
simple, pratique, rapide (délai de réponse en 3h), très sensible (0.5 à 1 g/l),
spécifique et d’interprétation facile [12,4].
Les figures12 et 13 illustrent des exemples d’IF sérique et urinaire réalisées au
laboratoire de Biochimie à l’HMIMV Rabat.
Immunosoustraction
La dernière et plus récente technique mise en place au laboratoire de
biochimie pour typer une Igm est l’immuno-soustraction (IS). Cette technique
s’est développée grâce à l’émergence de l’électrophorèse capillaire qui est son
support direct.
Dans le système de Paragon CZE 2000® (Beckman Coulter, USA), l’IS
consiste à faire réagir le sérum renfermant le composé monoclonal avec
différentes familles de billes de sépharose sur lesquelles a été greffé un anticorps
Figure 12: Résultat de l’immunotypage
par IF des protéines sériques sur gel
d’agarose (IM, Ig M de type kappa), (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
Figure 13: Résultat de la recherche
de la PBJ par IF des protéines
urinaires (PBJ de type λ), (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
37
spécifique réagissant contre les chaînes γ, μ, α, κ, ou λ. Après agitation puis
sédimentation des billes (précipitation de complexe antigène-anticorps, le
surnagent est ensuite prélevé et injecté dans les capillaires où a lieu l’étape
classique de séparation électrophorétique [40,41].
Dans le système de Sebia, la technique est basée sur l’utilisation des
anticorps spécifiques en milieu liquide ce qui présente l’avantage d’obtenir des
immuns complexes solubles. L’injection dans les capillaires se fait donc plus
rapidement, sans étape de sédimentation. Ces complexes ainsi formés, plus
lourds que les autres fractions protéiques vont migrer avant l’albumine ne
gênant pas la lecture des six traces d’électrophorèses [25].
La présence d’une Igm se traduit par la disparition ou la diminution d’un
pic observé en superposant l’électrophorégramme de référence (Figure14).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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38
Figure 14: Résultat de l’immunotypage par immunosoustraction sur le Capillarys
révélant une IM IgG/λ, (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
Le principal inconvénient de cette méthode est que l’identification d’une
Igm n’est possible qu’en présence d’un pic fin, étroit et bien individualisable à
l’électrophorèse. Ainsi, toute Igm migrant en dehors de la zone gamma et/ou en
dehors d’une vallée, peut passer inaperçue [25].
1. Profil témoin 2. Profil avec l’anti-γ
4. Profil avec l’anti-μ
bbμαααακμαγα
3. Profil avec l’anti-α
bbμαααακμαγα
5. Profil avec l’anti-κ 6. Profil avec l’anti-λ
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39
2.2.4.2- Pièges du typage de l’Igm:
Ils sont essentiellement représentés par la redissolution complète de l’arc en
immunoélectrophorèse en cas d’excès d’Ag, le phénomène de zone n’existant
pas en immunofixation où l’image obtenue reste interprétable (bande homogène
importante et zone centrale décolorée) [4].
2.2.5- Recherche, quantification et typage d’une cryoglobulinémie
Les cryoglobulinémies sont définies par la présence persistante dans le
sérum d'Ig qui précipitent au froid et se resolubilisent lors du réchauffement.
Cette définition permet de distinguer les cryoglobulinémies des autres
cryoprotéines, c'est-à-dire les cryofibrinogènes et les agglutinines froides [42,
43].
2.2.5.1 Mise en évidence d’une cryoglobuline
La recherche de cryoglobulinémie se justifie par le fait que certaines sont
constituées d’une Igm. Sa détection in vitro se base sur ses propriétés de
précipitation à basse température. Sa mise en évidence nécessite, comme cela a
été souligné, un protocole stricte depuis le prélèvement jusqu’au typage de la
cryoglobuline : le sérum doit être conservé au moins 7 jours au réfrigérateur à
47OC et observé quotidiennement. La cryoglobulinémie est positive s’il apparaît
au fond du tube un précipité blanchâtre et de granulation fine, donnant un aspect
en volutes de fumées s’il est doucement remis en suspension. Parfois c’est une
gélification de sérum, ou plus rarement l’apparition de cristaux précipitant au
fond du tube. Dans tous les cas, la redissolution doit être complète si le sérum
est placé à 37 OC, confirmant la nature cryoglobuliniques du précipité [16].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
40
2.2.5.2- Quantification et typage
Avant d’effectuer le dosage et le typage d’une cryoglobulinémie, il est
important de l’isoler et de la purifier par lavage et centrigufication.
Il n’existe pas de méthodes idéales de dosage de cryoglobulinémie dans la
mesure où les protéines entrant dans leur composition sont des Ig parfois de trois
classes différentes [4].
Une technique simple et sensible est proposée au biologiste sous forme
d’un coffret prêt à l’emploi, il s’agit d’une technique colorimétrique optimisée,
dérive de la méthode de biuret. Le typage est indispensable quand la
cryoglobuline est en quantité suffisante (>50 mg/l). L’immuno-empreinte
(Western Blot) est la technique de choix pour le typage des cryoglobulines mais
elle est assez longue, ce qui constitue un frein à son utilisation courante.
L’IF est une technique plus accessible applicable au typage des
cryoglobulinéemies [4,16]. Un exemple de typage de cryoglobuline par
immunofixation, réalisé au laboratoire, est représenté par la figure 15.
Figure 15 : Résultat de l’immunotypage par IF d’une cryoglobuline IgM/κ
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41
(Laboratoire de biochimie, HMIMV)
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42
2.2.5.3- Interprétation
La classification des cryoglobulines en trois types (I, II et III) proposée en
1974 par Brouet et al. [44] est toujours utilisée par la plupart des auteurs, mais
elle apparaît aujourd'hui incomplète car elle est basée sur l'analyse par IEP.
L'utilisation de l'IF, technique plus sensible et plus résolutive, a mis en évidence
un nouveau groupe de cryoglobulines comportant un profil oligoclonal [16].
Ainsi, la nouvelle classification proposée par Le Carrer [16] conserve le type I
monoclonal et le type mixte III polyclonal, mais subdivise le type mixte II en
deux sous-groupes: le type IIa monoclonal et polyclonal et le type IIb
oligoclonal et polyclonal.
2.2.5.4- Pièges de la cryoglobulinémie
Les pièges sont représentés par les faux négatifs et les faux positifs. Dans
le premier cas, le non respect des modalités du prélèvement et du transport peut
entrainer la précipitation de la cryoglobuline dans le caillot, donc sa perte dans
le sérum. Dans le deuxième cas, les lipides présents dans le sérum d’un patient
non à jeun ou avec une dyslipidémie importante peuvent donner un trouble qui
se redissout à 37oC.
3- Confirmation du diagnostic
Le myélogramme sternal est nécessaire pour établir le diagnostic. Il permet
de savoir si l’Igm est le témoin d’une prolifération lymphocytaire et ou
plasmocytaire avérée, ou si au contraire, elle est de nature bénigne.
La BOM est indiquée dans tous les cas où le myélogramme semble non
informatif ou infructueux.
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43
4- Examens évaluant le pronostic et le retentissement de l’Igm
4.1. Dosage de la β2microglobuline
La bêta2microglobuline (β2M) est une protéine de faible poids moléculaire
(11800 daltons), constitutive du système HLA, et présente à la surface de toutes
les cellules à l’exception des érythrocytes. Ce polypeptide est secrété
principalement sous forme libre, et son élimination est exclusivement rénale
[45,46]. Marqueur de la prolifération lymphoplasmocytaire, son augmentation
devra toujours être interprétée en fonction de l’état rénal [19].
Son dosage peut être déterminé par technique immunochimique :
immunoturbidimétrique, immunonéphélémétrique ou immunoenzymatique. Ces
techniques répondent le mieux à des exigences de rapidité, de sensibilité et de
spécificité.
Le taux chez l’adulte est en fonction des techniques de dosages utilisées,
variant de 1.2 à 3 µg/ml. Il est augmenté dans toute prolifération myélo- et
lymphocytaire et dans les tubulopathies [19].
La β2M permet d’évaluer la masse tumorale dans le myélome, de surveiller
la réponse au traitement et constitue un marqueur fiable d’appréciation
pronostique de la maladie de Kahler [4].
4.2. Bilan biochimique standard
L’hypercalcémie et l’hyper calciurie parallèles, dues aux destructions
osseuses sont fréquentes dans le myélome,
Le bilan rénal complet peut mettre en évidence une hypercréatininémie si
l’insuffisance rénale est déjà installée [4].
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44
4.3. Hémogramme
La NFS est également un examen capital dans le bilan diagnostique d’un
myélome. Elle met fréquemment en évidence une anémie (généralement
normocytaire), plus rarement une thrombopénie et de manière exceptionnelle,
une neutropénie. Dans de très rares cas, la NFS peut mettre en évidence des
plasmocytes circulants, signant alors une leucémie à plasmocytes. L’examen du
frottis met en évidence des rouleaux érythrocytaires, témoin du composant
monoclonal sérique [47].
4.4. Dosage de la CRP
La Protéine C Réactive est une glycoprotéine de masse moléculaire 120000
daltons, formée par l’union de 5 sous-unités identiques. Cette protéine porte son
nom en raison de sa propriété de précipiter au contact de polysaccharide C du
pneumocoque. C’est un marqueur très précoce de l’inflammation, s’élevant dans
les 2 à 4 heures après le début du processus inflammatoire [45].
Le taux normal varie de 0 à 6 mg/l.
Au cours du myélome multiple, l’interleukine 6 (IL6), produite en grande
quantité par le microenvironnement tumoral, stimule la synthèse de la CRP qui
est donc un bon critère d’efficacité thérapeutique, et surtout un indicateur
sensible de rechute pour les myélomes mis en rémission [4].
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45
II. LES IMMUNOGLOBULINOPATHIES MONOCLONALES
A. Classification des immunoglobulinopathies monoclonales [4]
1. Classification basée sur des critères immunochimiques
1.1. Hyperproduction sélective d’une Ig monoclonale complète (95 à
97% des cas environs)
Cette biosynthèse anormale concerne les IgG, les IgA, les Ig M et le plus
rarement les IgD ou les IgE. Elle sera en relation avec une
immunoglobulinopathie monoclonale maligne ou bénigne et en général, se
traduira par l’existence d’un pic monoclonal net à l’électrophorèse.
1.2. Hyperproduction de chaînes légères libres monoclonales (3à 5
% des cas environ)
Il existe dans ce cas une augmentation anormale de la biosynthèse des
chaînes légères libres de type κ ou λ.
Cette anomalie se rencontre presque exclusivement dans le myélome à chaînes
légères, constamment malin. Le pic monoclonal est en général absent ou très
discret sur l’électrophorèse du sérum, sauf s’il existe des polymères de chaînes
légères libres de poids moléculaire (PM) trop important pour passer le filtre
rénal. Une hypogammaglobulinémie d’accompagnement portant sur les trois
classes d’Ig est en général présente.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
46
1.3. Hyperproduction de chaînes lourdes libres monoclonales
structuralement anormale (très rare)
Ce type d’immunoglobulinopathie monoclonale concerne les chaînes
lourdes libres α, γ ou µ et se rencontre dans les pathologies rares et malignes des
maladies des chaînes lourdes (MCL). Leur diagnostic est difficile et le pic
monoclonal inconstant sur l’électrophorèse du sérum.
2. Classification basée sur des critères cliniques
2.1. Immunoglobulinopathies monoclonales malignes
Elles sont principalement représentées par les pathologies suivantes :
Le Myélome à IgG, IgA, chaînes légères ou plus rarement à IgD, IgE ou
IgM,
La Maladie de Waldenström à Ig M,
La Maladie des chaînes lourdes α, γ ou μ.
L’Ig monoclonale constitue ici un marqueur tumoral de diagnostic et de
surveillance de la maladie.
2.2. Gammapathies monoclonales de signification indéterminée
Elles concernent les IgG, IgM ou plus rarement IgA. Deux types de MGUS
peuvent être individualisés, l’Ig monoclonale détectée ne pouvant pas être
considérée comme un marqueur tumoral :
Les Gammapathies monoclonales associées à certaines pathologies
connues malignes ou bénignes du sujet jeune ou âgé.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
47
Les Gammapathies monoclonales idiopathiques, souvent
asymptomatiques chez le sujet âgé.
B. Les immunoglobulinopathies monoclonales malignes (IMM)
Les immunoglobulinopathies malignes regroupent les syndromes lympho-
prolifératifs à caractère tumoral. Dans ce groupe, les immunoglobinopathies
monoclonales de type IgG et IgA doivent être distinguées de celles de type IgM,
les premières témoignent d’un myélome multiple, les deuxièmes caractérisent la
maladie de Waldenström [48].
Selon le type et la concentration de l’Igm synthétisée, on peut distinguer les
différents tableaux cliniques abordés ci-après.
1. Myélome multiple
1.1. Définition
Décrit par Mac Intyre en 1850, le myélome multiple des os porte le nom de
maladie de kahler, lequel a contribué à sa description par une publication de
1889 [49].
C’est une hémopathie maligne développée à partir d’un clone lymphoïde
B, aboutissant à une prolifération de plasmocytes monoclonaux dans la moelle
hématopoïétique [50].
1.2. Épidémiologie
Le MM est la forme la plus fréquente des proliférations lymphocytaires
malignes. Les connaissances sur son épidémiologie descriptive sont rares.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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48
Dans les pays développés, elles donnent une incidence annuelle de 4 cas par
100000 habitants [50]. Alors qu’il n’existe pas de chiffre précis au Maroc [51].
Il représente 1% de l’ensemble des cancers et 15% des hémopathies
malignes [51].
D’une façon générale, la fréquence de la maladie augmente avec l’âge.
Selon des études, l’âge médian de diagnostic se situe entre 60 [38] et 71 ans
[48], avec un ratio H/F de 3/2 ; ce qui indique que les hommes sont plus souvent
atteints que les femmes.
1.3. Signes cliniques
C'est une maladie à symptomatologie très polymorphe : les signes cliniques
et biologiques sont dus en grande partie à la sécrétion des médiateurs sériques de
façon variable d’un malade à l’autre.
Lorsque le MM est symptomatique, le plus souvent, l’altération de l’état
général et les douleurs osseuses dominent le tableau clinique. Les fractures
pathologiques sont fréquentes et les tuméfactions osseuses possibles.
Les complications peuvent être inaugurales en particulier l’insuffisance rénale,
l’anémie, les complications osseuses ou infectieuses et rarement le syndrome
d’hyperviscosité [52,53].
1.4. Signes biologiques
-Anomalies protéiques
La réalisation d’une exploration des protéines sériques et urinaires est
indispensable. Dans 80% des cas, l’EPS met en évidence un pic étroit
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
49
correspondant à une protéine monoclonale de type IgG ou IgA, migrant le plus
souvent dans la zone des gammaglobulines, parfois des β-globulines ou des α2
globulines. L’albuminémie est diminuée. La présence d’une protéine
monoclonale sérique est habituellement responsable d’une hyperprotidémie,
pouvant être supérieure à 100g/l (Figure 16). Parfois, il n’existe pas d’aspect de
pic étroit à l’EPS qui révèle en outre une hypogammaglobulinemie, cette
situation correspond surtout au MCL (Figure 18) ou au myélome de type IgD.
Plus rarement, il s’agit d’un MNE ou MNS. Il est également possible de détecter
une immunoglobulinopathie biclonale.
L’EPS est complétée par le dosage pondéral des Ig dont la principale indication
est l’évaluation du taux des Ig polyclonales (apprécié par l’effondrement des
autres classes d’Ig).
L’IF des protéines sériques permet de typer la protéine monoclonale pour sa
chaine lourde (G, A) et sa chaine légère (κ ou λ).
L’électrophorèse des protéines urinaires montre dans 90% des cas une
protéinurie de Bence-Jones et l’IF urinaire en précise le type.
-La VS est souvent augmentée pouvant dépasser 100 mm à la 1ère heure.
-L’hémogramme dévoile, dans plus de la moitié des cas, une anémie qui est
le plus souvent normochrome normocytaire arégénérative traduisant un
envahissement médullaire. La leucopénie et la thrombopénie sont rares et de
mauvais pronostic reflétant une importante masse tumorale.
-Le myélogramme montre une infiltration plasmocytaire habituellement
supérieure à 30%. (Figure 17)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
50
Sur le reste du bilan biologique, on pourra constater une augmentation de
la creatininémie ainsi que de la calcémie [52,53].
Figure 16 : Résultat de l’EPP et de l’IF sériques sur gel d’agarose dans le cas d’un
MM IgG de type κ, (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
51
Figure 17 : Résultat du myélogramme illustrant l’existence d’une plasmocytose
médullaire avec des éléments dystrophiques (Diagnostic positif du MM.
(Laboratoire d’Hématologie de l'HMIMV)
1.5. Critères diagnostiques
D’après « The international myeloma working group definition of multiple
myelome » réuni en 2003, le diagnostic du myélome multiple symptomatique
repose sur deux critères biologiques et un critère clinique [54] :
Sous le terme d’anomalie organique, on distingue :
- l’hypercalcémie
- l’insuffisance rénale
- l’anémie
- Les lésions osseuses, l’ostéoporose ou les fractures
- Autres : hyperviscosité, amylose, infections bactériennes récurrentes.
En outre, il est important de différencier le myélome multiple actif, de la
notion de « smoldering multiple myeloma » [52, 53] qui est le versant
asymptomatique du MM et qui est défini comme suit :
Igm dans le sérum et/ou les urines
+ plasmocytose médullaire.
+une anomalie organique
Igm dans le sérum ≥30 g/L
et / ou plasmocytose médullaire≥10%.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
52
D’autres variants moins connus du myélome multiple vont être abordés
dans le paragraphe suivant.
1.6. Formes cliniques de myélomes
1.6.1. Formes immunochimiques
Les myélomes multiples peuvent être définis par le type de l’Igm et par ordre
décroissant de fréquence, on individualise [53] :
Les myélomes à IgG (55 %)
Les myélomes à IgA (26 %)
Les myélomes à chaîne légère (14 % des cas) : Ceux-ci présentent les
caractéristiques suivantes :
- La VS est basse ou peu augmentée,
- L’EPP sérique montre le plus souvent une hypogamma-globulinémie
sans pic monoclonal (figure 18),
- L’IF révèle la présence de CLLm parfois dans le sang mais presque
toujours dans les urines avec des difficultés de dépistage (figure 18).
En effet la suspicion d’un MCL sera basée sur la visualisation d’une
seule bande de précipitation au niveau de l’un des immunsérums
antichaînes légères κ ou λ (première IF). Cet aspect est aussi retrouvé
dans les myélomes à IgD et IgE.
Le diagnostic d’un MCL ne pourra être posé qu’en recommençant l’IF
(deuxième IF) en utilisant deux types d’antisérums, l’un dirigé contre
les formes liées et libres et l’autre dirigé contre les formes libres de
chaînes légères. La même plaque d’IF (deuxième IF) permet la
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
53
recherche indispensable d’une éventuelle IgD ou IgE monoclonale en
utilisant des immuns sérums anti IgD ou IgE. C’est la visualisation
d’une bande colorée dans la piste contenant les antisérums dirigés
contre les formes libres sans correspondance avec une chaine lourde
qui signera la présence de CLL dans le sang [55] (figure 19).
- Les MCL se compliquent très fréquemment d’insuffisance rénale
surtout si la protéinurie de Bence Jones est importante.
Les myélomes à IgD sont rares (3% des cas) et particulièrement graves.
La chaîne légère est lambda. Dans la majorité des cas, ils se compliquent
là encore d’insuffisance rénale ou d’amylose.
Le myélome non sécrétant ou non excrétant (2 % des cas):
l’immunotypage ne détecte aucune immunoglobuline ni dans le sérum ni
dans les urines. Le diagnostic repose sur l’association lésions osseuses et la
plasmocytose médullaire. Il est affirmé par l’immunofluorescence sur les
plasmocytes médullaires (non excrétant).
Les myélomes IgM et IgE sont exceptionnels.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
54
Figure 18 : Résultat de l’EPP et de l’IF sérique sur gel d’agarose dans le cas d’un
MCL de type λ, (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV)
Figure 19 : Résultat de l’IF sérique sur gel d’agarose montrant la présence de CLLm
de type λ (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
Lt : anti CL lambda totales
(libres et liées)
Lf : anti CL lambda libres
-Présence d’une anomalie avec l’antisérum anti-lambda totales « libres et liées » (1).
-Identification des chaînes légères libres sur une autre immunofixation avec les antisérums
anti-IgD, anti-IgE, anti-CL lambda totales et anti-CL lambda libres (2)
Première IF (1) Deuxième IF (2)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
55
1.6.2. Plasmocytome solitaire [56 ,57]
C’est une lésion plasmocytaire unique, de localisation osseuse
(plasmocytome vertébral, cranieofacial, d’un os long) ou extra-osseuse (cavum,
amygdale, fosses nasales, ganglions, parties molles, seins, tube digestif). Le
diagnostic est histologique. On peut trouver les anomalies protidiques
habituelles avec l’excrétion d’une Ig monoclonale qui disparaitra
progressivement après le traitement du plasmocytome.
1.6.3. Leucémie à plasmocytes [58]
La leucémie à plasmocytes réalise un tableau clinique proche de celui de
leucémie aiguë avec [58]:
- insuffisance médullaire marquée ;
- hépato-splénomégalie ;
- présence de signes généraux, fièvre.
Son diagnostic est basée sur la présence dans le sang périphérique d’un
pourcentage de plasmocytes >20% de leucocytes circulants [59]:
Le pronostic est particulièrement redoutable malgré les traitements actuels.
1.6.4. " POEMS syndrome " [60]
Le POEMS syndrome, dénommé syndrome de CROW-FUCASE
principalement au Japan, est une dyscrasie plasmocytaire rare. Cet acronyme,
proposé par Bardwick, se définit par l’association :
- P une polyneuropathie (Polyneuropathy),
- O une organomégalie (Organomegaly),
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
56
- E une endocrinopathie (Endocrinopathy),
- M une dysglobulinemie monoclonale (Monoclonal protein) qui correspond
à une prolifération plasmocytaire avec immunoglobuline monoclonale,
- et S des anomalies cutanées (Skin abnormalities).
Typiquement, il comporte les cinq éléments annoncés. Cependant, il faut
souligner que les formes incomplètes sont les plus fréquentes, ce qui pose de
véritables problèmes diagnostiques.
1.7. Evolution et pronostic du myélome
Malgré la thérapeutique, le MM reste une hémopathie de pronostic
redoutable constamment mortelle. L’espérance de survie médiane est comprise
entre 3 et 5 ans selon les études. Cependant cette survie est très variable allant
de quelques mois dans les formes les plus graves, jusqu'à plus de 10ans
[52, 53, 61]. Cette hétérogénéité résulte de l’existence de plusieurs facteurs
pronostiques, on en distingue :
- Ceux liés à l’hôte : âge, atteinte rénale, réponse au traitement…
- Ceux liés à la tumeur : β2M sérique, anomalies cytogénétiques,
morphologie des plasmocytes…
La classification historique de Durie et Salmon, basée sur la masse
tumorale est encore utilisée (Tableau II). Néanmoins un nouveau système de
classification a apparu récemment, basé sur la mesure de l’International
Pronostic Index (IPI) qui détermine 3 stades de la maladie en fonction des
valeurs de deux paramètres biologiques : la β2M et l’albuminémie (Tableau III)
[61, 62]. Une β2M sérique élevée est associée à une survie plus courte.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
57
Les anomalies cytogénétiques prennent de plus en plus une importance
pronostique croissante. En effet le développement des techniques d’hybridation
in situ en fluorescence (FISH) sur cellules interphasiques a rendu possible
l’analyse de cellules plasmocytaires non proliférantes. De même, la
démonstration de la très grande fréquence des réarrangements illégitimes du
gène codant pour les chaines lourdes d’Ig dans les lignées cellulaires de MM a
permis d’identifier de nouvelles translocations récurrentes dans cette
pathologie.
De plus, des études ont montré que certaines de ces anomalies pouvaient se
rencontrer dès le stade préclinique, dans les MGUS [63].
Ces études ont permis de dresser un « catalogue » assez précis des anomalies
chromosomiques les plus fréquemment rencontrées (Tableau IV).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
58
Tableau II : La classification de Durie et Salmon [62].
Cette classification est basée sur la masse tumorale et comprend trois stades et
une sous-classification.
Critères
Stade I: -Myélome de faible masse tumorale
-Présence de tous les critères suivants :
1) Hémoglobine > 10 g/dl
2) Calcémie < ou = 3 mmol/l
3) Os normal ou un seul plasmocytome osseux
4) Faible taux d’immunoglobuline monoclonale :
IgG sérique < 50 g/l
IgA sérique < 30 g/l
Protéïnurie monoclonale < 4 g/24 h
Stade II: -Myélome de masse tumorale intermédiaire
-Regroupe les myélomes multiples ne répondant ni aux
critères de stade I, ni aux critères de stade III
Stade III: -Myélome de forte masse tumorale
-Présence d’un ou plusieurs des critères suivants :
1) Hémoglobine < 8.5 g/dl
2) Calcémie > 3 mmol/l
3) Atteinte ostéolytique multiple
4) Taux élevé d’immunoglobuline monoclonale :
IgG sérique > 70 g/l
IgA sérique > 50 g/l
protéïnurie monoclonale > 12 g/24 h
Sous-classification selon la fonction rénale
Stade A:
Stade B:
Créatinine < 20 mg/l
Créatinine > ou = 20 mg/l
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
59
Tableau III : index du pronostic international de classification du myélome
multiple [48]
Bêta2-m : bêta2-microglobulinémie sérique
Tableau IV: Incidence des principales anomalies chromosomiques dans les
GMSI et le MM [63]
Stade Critères Survie (médiane)
Stade I Bêta2-m < 3.5 mg/l + albuminémie > ou
= 35 g/l 62 mois
Stade II Ni stade I, ni stade III 44 mois
Stade III Bêta2-m > ou = 5.5 mg/l 29 mois
Anomalies
chromosomiques
Incidence
GMSI (%) Incidence
MM (%)
Impact
pronostique
Réarrangement IGH 60 > 50 Inconnu
t (11;14) 15 – 20 20 Neutre
t (4; 14) 2 – 5 15 Défavorable +++
t (14;16)/t (14;20) 1 5 Défavorable +++
Hyperdiploïdie 50 – 60 50 – 60 Favorable +
Del (13) 30 – 50 45 – 50 Défavorable ++
Gains 1q 0 30 – 40 Défavorable ++
Del (17p) 0 10 Défavorable +++
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
60
2. Macroglobulinémie de Waldenström
2.1. Définition
Initialement décrite par Jan Waldenström, la macroglobulinémie de
Waldenström (MGW) est une hémopathie lymphoïde chronique touchant la
cellule B. C’est une affection rare qui s’inscrit parmi les syndromes
lymphofrolifératifs [64].
Elle se définit par l’association d’une IgM monoclonale présente dans le sérum à
un taux supérieure à 5g/l et d’une infiltration lymphoïde médullaire, le plus
souvent polymorphe, lymphoplasmocytaire [65,66]. En amont, la présence d’une
IgM témoigne d’une prolifération lymphoïde B. En aval, les IgM ont des
conséquences clinicobiologiques propres, tantôt liées à leurs propriétés
anticorps, tantôt liées à leurs propriétés physico-chimiques [67].
2.2. Epidémiologie
La MGW est une affection rare. Elle est en effet, 3 à 4 fois moins fréquente
que le myélome, elle représente 6% des syndromes lymphoprolifératifs B et 2%
des hémopathies malignes et son incidence est inferieur 1 pour 100000 de la
population.
La maladie est exceptionnelle avant 30 ans. La médiane d’âge de survenue
est de 63 ans avec une nette prédominance masculine [68, 69].
2.3. Tableau clinique
La MGW a souvent une évolution progressive et de ce fait compatible avec
une survie prolongée.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
61
Les manifestations cliniques sont directement liées aux propriétés
physicochimiques et antigéniques de l’IgM secrétée, elles sont de deux ordres
[70, 71, 72]:
certaines liées à l’infiltration médullaire et représentées
essentiellement par un syndrome tumoral (adénopathie, splénomégalie
et hépatomégalie),
et d’autres liées aux propriétés physicochimiques et antigéniques de
l’IgM : syndrome d’hyperviscosité, syndrome hémorragique, anémie,
maladies des agglutinines froides, et neuropathie périphérique.
2.4. Biologie
Le principal paramètre biologique de la MGW c’est l’existence dans le sang
d’une Igm de type IgM (Macroglobuline monoclonale), avec un taux
élevé>30g/l chez le tiers des patients [73]. L’électrophorèse du sérum met en
évidence un pic habituellement situé dans la zone γ-globulines (fig.20). Le
dosage pondéral montre pour les autres Ig polyclonales, un taux normal, peu
diminué, ou augmenté modérément. On trouve parfois dans les urines une PBJ
en faible quantité [11].
D’autres manifestations biologiques peuvent faire penser à la MGW : les
rouleaux érythrocytaires sur frottis sanguin et la très forte accélération de la VS
résultante d’une hyper protidémie fréquente au cours de cette pathologie [11].
Une hyperlymhocytose inconstante, généralement discrète peut être observée.
L’hémogramme révèle en outre une anémie chez 60% et une thrombopénie chez
16% des patients [73,11].
Le myélogramme montre des cellules lymphoïde plus proche de lymphocytes
que de plasmocytes, mais l’aspect cytologique est habituellement pléomorphe.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
62
La BOM confirme l’infiltration lymphoïde.
La présence d’une cryoglobulinémie caractérise 10 à 20% des patients [11].
Figure 20: Résultat de l’EPP et de l’IF sériques sur gel d’agarose dans le cas d’une
MGW, IgM de type λ, (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
2.5. Diagnostic de la MGW
Les critères diagnostiques définis lors du 2ème workshop sur MGW, sont
les suivants: [72]
IgM monoclonale sérique quelle que soit la concentration ;
infiltration médullaire par de petits lymphocytes avec différenciation
plasmocytaire ;
infiltration à la biopsie médullaire souvent diffuse ;
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
63
phénotype des cellules tumorales (immunophynotypage par cytométrie de
flux) : IgM+, CD5
–/+, C10
–, CD19
+, CD20
+, CD22
+, CD23
–, CD25
+,
CD27+, FMC7
+, CD103
–.
2.6. Pronostic :
La médiane de survie varie entre 5 et 10 ans selon les séries [74, 75, 76].
Dans la plupart des études pronostiques, 3 facteurs sont cités :
- l’âge avec seuil compris entre 60 et 70 ans [75, 76, 70,78].
- L’abaissement du taux d’hémoglobine [74, 75, 76, 77,78].
- L’élévation du taux de β-microglobulines [74,76, 77,78].
3. Amylose
3.1. Définition
C’est une maladie rare, secondaire au dépôt extracellulaire fibrillaire des
chaînes légères de l’Igm. On parle des fibrilles amyloïdes qui se précipitent au
niveau des organes, entrainant ainsi leur dysfonctionnement. Elle peut survenir
de façon primitive ou dans un contexte avéré de prolifération tumorale
lymphoïde B [79].
Les chaînes légères des Ig responsable des amyloses AL sont 2 à 4 fois plus
souvent λ que κ à la différence des IM usuelles [80].
3.2. Epidémiologie
L’amylose AL est 5 fois moins fréquent que le myélome avec une
incidence de 8 cas pour 1000000 d’habitants [81].
Il existe une prédominance masculine modérée de l’amylose AL.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
64
L’âge moyen au moment de diagnostic est entre 60 et 65 ans selon les séries,
mais l’amylose AL peut également s’observer chez les adultes jeunes.
La durée moyenne de survie est de 14ans [82].
3.3. Manifestations cliniques : [79,82, 83]
L’amylose est une maladie multi-viscérale susceptible de toucher
pratiquement tous les organes. Elle se manifeste cliniquement par :
- Une cardiomyopathie, cause du décès dans environs la moitié des cas. Elle
se manifeste initialement par une dyspnée, asthénie qui peut évoluer vers
une insuffisance cardiaque, s’accompagnent souvent de trouble de rythme,
- Une néphropathie (protéinurie et insuffisance rénale),
- Des atteintes digestives : macroglossie, hémorragie hépatobiliaire/
splénomégalie,
- Une atteinte cutanée : purpura ecchymotique…
3.4. Diagnostic
Une fois le diagnostic clinique de l’amylose est évoqué, il faut s’efforcer
d’en faire le diagnostic histologique pour la confirmer.
Cela implique donc la réalisation d’une biopsie et son étude après coloration
spécifique principalement par le rouge CONGO [82].
4. Maladies des chaînes lourdes.
4.1. Définition [11]
Ce sont des hémopathies peu fréquentes, caractérisées par une prolifération
monoclonales de cellules de la lignée B, qui sont sécrétantes mais d’Ig
incomplètes constituées uniquement de chaînes lourdes.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
65
On distingue trois variantes de maladies de chaines lourdes correspondant
aux 3 principales classes d’Ig secrétées et connues par ordre de fréquence :
Maladie de chaîne lourde α : IgA
Maladie de chaîne lourde γ : IgG
Maladie de chaîne lourde µ: IgM
4.2. Clinique et épidémiologie
4.2.1. Maladie des chaines lourdes γ
Décrite la première fois en 1964, cette maladie est aussi fréquente chez
l’homme que chez la femme. Elle n'a pas de distribution géographique ou raciale
particulière. L’âge moyen des malades au moment de diagnostic est de 60 ans,
mais elle peut s’observer chez des sujets jeunes voire chez l’enfant ou
l’adolescent.
L’aspect clinique se caractérise par une grande hétérogénéité. Elle se
présente comme une prolifération plasmocytaire avec quelques plasmocytes
touchant la moelle et fréquemment les ganglions, une hépatosplénomégalie est
également possible, la survenue de manifestations auto-immunes est fréquente
lors de cette maladie : polyarthrite, hémolyse auto-immune. Généralement, elle
présente un tableau clinique polymorphe proche de la MGW [11,84].
4.2.2. Maladie des chaines lourdes α
Décrite par Feligman en 1968, également appelée lymphome
méditerranéen.
Contrairement à la plupart des hémopathies lymphoplasmocytaires, la maladie
des chaînes lourdes alpha survient le plus souvent chez des sujets jeunes
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
66
originaires pour la plupart d’entre eux du pourtour méditerranéen, d’Extrême et
de Moyen-Orient.
Depuis que le premier cas est répertorié en 1968, cette maladie se présente sous
deux formes cliniques principales [85,86] :
- La forme digestive la plus fréquente c’est l’expression d’un syndrome de
malabsorption et d’une entéropathie exsudative,
- Et la forme respiratoire qui reste très rare.
4.2.3. Maladie des chaînes lourdes µ
Exceptionnelle, car un petit nombre d’observations a été connu depuis la
description initiale de la maladie en 1970 par Forte et Franklin.
Cliniquement, elle se présente comme une leucémie lymphoïde chronique [11].
4.3. Diagnostic biologique [87,88]
Le diagnostic des maladies des chaînes lourdes repose uniquement sur
l’étude immunochimique des Ig sériques et éventuellement des Ig urinaires et
cellulaires.
Le taux sérique de la protéine pathologique est souvent peu important. L'EPS ne
met donc qu'inconstamment en évidence une bande anormale, qui est souvent
assez large, située habituellement dans la région:
- des γ ou β2-globulines pour les maladies des chaînes lourdes γ,
- des α2-globulines pour les maladies des chaînes lourdes µ,
- S’étendent au α2-globuline pour les maladies des chaînes lourdes α.
Dans ce cas, le typage (IF sérique avec les antichaines lourdes) du composant
monoclonal permet d’établir le diagnostic.
La protéine anormale est rarement retrouvée dans les urines.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
67
5. Autres hémopathies
Il existe de nombreuses autres affections malignes au cours desquelles un
pic monoclonal, qu’il soit de nature IgG, IgM ou IgA, peut être découvert.
Sans entrer dans les détails, nous pouvons citer notamment : la leucémie
lymphoïde chronique, les lymphomes non hodgkiniens, la leucémie
myélonormocytaire chronique, ainsi que certaines myélodysplasies.
C. Les gammapathies monoclonales de signification
indéterminée (MGUS)
Les gammapathies monoclonales de signification indéterminée (MGUS)
sont des affections asymptomatiques, caractérisées par l’existence d’un pic
d’immunoglobuline monoclonale dans le sérum, en dehors de tout signe
d’hémopathie lymphoïde [89].
1. Définition
Le terme classique de gammapathie monoclonale bénigne ne doit plus être
employé, au regard de leur potentiel évolutif [90,91]. On lui préfère donc celui
de GM apparemment bénigne ou plus souvent de GM de signification
indéterminée, traduction littérale de la terminologie anglosaxone MGUS
(Monoclonal Gammopathy of undetermined Significance).
Une MGUS est définie par l’association des critères suivants [92]:
- présence d’un pic d’Igm sérique de moins de 30g/l (quel que soit le type d’Ig);
- myélogramme contenant moins de 10 % de plasmocytes non dystrophiques;
- PBJ faible ou absente (<1g/24h) ;
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
68
-absence de signes cliniques ou biologiques de toute lymphoprolifération
maligne (hypercalcémie, lésion osseuse, IR, ou médullaire).
Il s’agit donc d’une définition purement biologique : il faut cependant lui
ajouter, comme proposé par Durie, une stabilité pendant un minimum d’un an,
afin d’exclure les myélomes multiples découverts à leur tout début [90].
ajouter, comme proposé par Durie, une stabilité pendant un minimum d’un an,
afin d’exclure les myélomes multiples découverts à leur tout début [91].
Figure 21 : Résultat de l’EPP et de l’IF sériques sur gel d’agarose dans le cas d’une
MGUS, IgM de type κ, (Laboratoire de Biochimie de l'HMIMV).
2. Epidémiologie
Les MGUS représentent la majorité des cas d’IM [93,94], presque 60%
d’après les données de la Mayoclinic aux Etats unis [95].
;
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
69
Leur fréquence est estimée à 3.4 %, chez les plus de 50 ans et augmente avec
l’âge allant de 1.7 % entre 50 et 59 ans à 6.6 % au delà de 80 ans [89,95].
L’âge médian du diagnostic se situe autour de 70 ans.
Comme pour le MM, les MGUS sont 2 fois plus fréquentes dans la race noire.
Leur prévalence est plus importante chez l’homme [96].
3. Exploration et diagnostic différentiel
La notion de MGUS ne peut être retenue qu’après exclusion de pathologie
lymphoïde détectable sous-jacente.
Si l’isotype de l’Ig est IgG ou IgA, il faut rechercher systématiquement un
myélome. L’anamnèse clinique recherche l’existence de douleurs osseuses,
d’infections récurrentes. Un minimum d’examens est nécessaire chez un patient
asymptomatique avec un examen clinique normal. Les résultats de l’étude
immunochimique des protéines sériques et urinaires, de la calcémie, de la
créatinémie, de l’hémogramme sont confrontés pour écarter l’hypothèse d’un
MM. Quand le pic monoclonal est d’importance modérée IgG<20g/l ou
IgA<10g/l, aucun autre examen complémentaire ne sera réalisé mais quand le
taux de composant monoclonal est plus important, il est conseillé d’effectuer
des radiographies osseuses, un myélogramme pour évaluer la plasmocytose et
un dosage de β2-microglobuline. Ces examens doivent être normaux et la
plasmocytose médullaire doit être inferieure à 10% pour parler de MGUS [97].
Si l’isotype est IgM, il faut éliminer une pathologie lymphoïde de type
MGW, LLC ou lymphome de bas grade. La recherche d’un syndrome tumoral
ganglionnaire ou hépatosplénique est obligatoire. L’échographie abdominale et
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
70
éventuellement un scanner et la BOM si le pic est supérieur à 5g/l, évaluent la
prolifération lymphoïde latente.
Enfin, il faut toujours évoquer l’amylose AL et envisager le cas échéant un
prélèvement biopsique (glande salivaire accessoire ou graisse abdominale ou
rectum) avec coloration histologique adaptée [98].
Le diagnostic de MGUS posé, il est nécessaire d’informer le patient de la
nécessité d’un suivi annuel clinique et biologique, compte tenu du risque de
transformation en MM ou autre lymphoprolifération. Bien entendu, les rares cas
de transformations brutales nécessitent une réévaluation rapide en cas
d’apparition d’une symptomatologie clinique [98].
4. Les facteurs prédictifs de l’évolution maligne
La disparition d’une Igm est une éventualité rare, en dehors des IM
transitoires. Dans la majorité des cas ; le taux d’Igm reste stable sans
symptomatologies associées.
Le risque de transformation d’une MGUS en une hémopathie maligne est à
présent bien précisé. Il est de 10% à 10 ans, 21% à 20 ans, et 26% à 25 ans. Le
risque global de progression était de 1 % par an selon la série de Kyle [96].
Certains paramètres sont très utiles pour prédire la probabilité de cette
transformation maligne des MGUS, ils sont individualisés dans plusieurs études.
Décaux, Avet-Loiseau et Grosbois 2008, ont identifiés 4 facteurs de
transformation maligne des MGUS [92] :
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
71
Isotypie de chaînes lourdes (du pic monoclonal)
Plusieurs études ont démontré que les patients avec une MGUS à IgA ou
IgM ont un risque plus accru à développer un MM ou une autre hémopathie
maligne que ceux avec une IgG [92].
Taux de composant monoclonal
Le risque d’évolution maligne est directement proportionnel à la
concentration de la protéine monoclonal au moment du diagnostic, il est évalué
à 5.3% à 5ans et à 15.2% à 10 ans lorsque le taux de composant monoclonal est
<15g/l, ce risque s’élève à 22.1% à 5ans et à 33.7% à 10 ans si le taux du
composant monoclonal est ≥15g/l [99,100].
Plasmocytose médullaire
Selon Decaux, la plasmocytose médullaire a été citée comme facteur
prédictif de l’évolution maligne avec une valeur seuil de 5%. [101]
L’incidence des hémopathies malignes est presque 2 fois plus importante avec
une plasmocytose > 5% par rapport à celle ≤ 5%.
Dosage des chaînes légères libres sériques
Un rapport de chaînes légères libres sériques κ/λ anormal était associé à un
risque de transformation plus élevé [99, 100, 102], et plus le rapport est éloigné
de valeurs normales, plus ce risque est important [102,104].
5. Affections associées aux MGUS
Les MGUS peuvent être associées à d’autres maladies d’autant plus qu’il
s’agit d’une anomalie qui survient sur une population d’âge avancé.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
72
On en distingue [104, 93,4] :
Les maladies hématologiques : maladie de Willebrand acquise, anémies
pernicieuse et réfractaire, thrombose veineuse,
Les maladies cancéreuses : cancers épithéliaux,
Les maladies hépatobiliaires : hépatite chronique, hépatite virales, cirrhose,
Les maladies dermatologiques : gangrène polydermique, xanthome plan
normocholesterolemique,…
Les endocrinopathies : hyperparathyroïdie, diabète,
Les Maladies auto-immunes : LED, polyarthrite rhumatoïde, syndrome de
Gougerot-Sjögren, sclérodermie, spondylarthrite ankylosante,
Les infections virales, bactériennes ou parasitaires : cytomégalovirus, virus
HIV, virus d’Epstein Barr (EBV), tuberculose, amibiase,…
Les neuropathies périphériques,
Autres pathologies associées : Maladie de Gaucher, néphropathies,…
D- Variantes d’immunoglobulinopathies
Les gammapathies biclonales sont habituellement rattachées par la plupart
des auteurs aux aspects oligoclonaux. Elles sont caractérisées sur l’EPP par la
présence de deux bandes étroites, homogènes et bien différenciées ; lorsque leur
mobilité électrophorétique est très proche, elles ne sont visibles que si le support
utilisé est suffisamment résolutif (gel d’agarose), et leur identification
immunochimique est en général aisée par une technique d’IF. Ce type d’image
apparait le plus souvent lorsque deux clones cellulaires indépendants
synthétisent deux populations d’Ig monoclonales bien distinctes (le plus souvent
de classes différentes et d’un même type de chaînes légères), on utilise alors
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
73
dans ce cas préférentiellement au terme de gammapathie biclonale, celui de
gammapathie double. Le typage immunochimique des deux Ig en cause doit être
réalisé par IF.
Selon le contexte justifiant la réalisation d’une EPP et en fonction de
l’importance respective des deux Ig monoclonales visualisées sur l’EPP et
typées par l’IF ; deux cas sont à envisager quant à la signification clinique de
l’existence dune gammapathies biclonale dans le sérum d un patient :
- si l’une des deux bandes est prédominante et quantitativement très
importante, il s’agit en général d’une gammapathies biclonale maligne
rencontrée dans le cadre des anomalies protéiques d’un myélome (IgG ou IgA
prédominante), ou d’une maladie de Waldenström (IgM prédominante) ; il
existe bien souvent dans ce cas une baisse concomitante du taux des Ig
physiologiques ;
- si les deux Igm sont en faible concentration dans le sérum sans diminution
significative des autres Ig, leur présence doit obligatoirement être interprétée en
fonction des éléments clinico-biologiques : s’il existe un contexte
d’immunosuppression thérapeutique ou virale, leur interprétation sera identique
à celle de tout profil oligoclonal. S’il n ya pas notion d’immunosuppression, la
signification clinique d’une gammapathie double est la même que celle d’une
MGUS souvent associée à des pathologies dont l’étiologie peut être très variée
[105, 4].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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PPaarrttiiee pprraattiiqquuee:: NNoottrree ééttuuddee
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Matériels et méthodes
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
78
I. MATERIELS
Il s'agit d'une étude rétrospective portant sur les cas d’IM répertoriés au
laboratoire de Biochimie de l’HMIMV de Rabat sur une période de 9 ans, depuis
l’an 2000 jusqu’à fin décembre 2008, et pour lesquels un dossier médical était
exploitable.
A- Patients inclus
Les registres de l’immunotypage (IF et IS) du laboratoire de biochimie de
l'HMIMV ont été utilisés pour identifier les cas d’IM répertoriés dans
l’ensemble des services depuis l’an 2000.
Les patients, pris en charge au moins une fois dans ces services à l’occasion
d’une consultation ou d’une hospitalisation, ont été enregistrés (n=300), mais
nous n’avons pu inclure dans la présente étude que 214 parmi eux, dont les
dossiers médicaux étaient archivés et exploitables.
Les patients inclus, sont originaires pour la grande majorité d'entre eux de
Rabat, Casa et les environs.
Certains sont pris en charge suite à l’apparition d’un signe évocateur d’une
IM. Pour d’autres, la découverte de la maladie, était fortuite, à l'occasion d’un
bilan de routine (NFS, VS, Calcémie, ...) ou d'un bilan d'extension d'une autre
pathologie.
Dans tous les cas, chaque patient présentant, à l'électrophorèse des protéines
sériques et/ou urinaires, une anomalie évoquant une IM (pic monoclonal,
hypogammaglobulinémie, hypoprotidémie,…), a fait l’objet d'une exploration
biochimique complémentaire.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
79
B- Caractéristiques étudiées
Une fiche d’exploitation (cf. annexe) a été renseignée pour chaque patient
lors de l’analyse de son dossier médical.
Cette fiche permet d’identifier les caractéristiques épidémiologiques (nom, âge,
sexe, origine) ainsi que les résultats des analyses biologiques, objet de l’étude :
protidémie, EPP sérique (zone de migration, taux du composant monoclonal),
recherche et/ou dosage de la protéinurie, immunotypage sérique et urinaire,
dosage pondéral des Ig, calcémie corrigée/PT, bilan rénal, β2-microglobuline,
CRP, VS, hémogramme, myélogramme).
C- Démarche diagnostique au laboratoire
Il semble intéressant de rappeler ici les étapes d'investigation d’une IM
suivant la démarche adoptée au laboratoire de biochimie de l’HMIMV. Cela
constitue la base analytique de notre travail.
L’exploration biochimique, comme cela a déjà été souligné auparavant, a
lieu aussi bien dans le sang que dans les urines avec une démarche similaire.
Pour chaque patient, sont réalisés, un prélèvement sanguin effectué sur tube sec
(sans anticoagulant) et un recueil des urines dans un tube sans conservateur.
Ces échantillons sanguins et urinaires sont acheminés au laboratoire puis
centrifugés avant d'être techniqués.
Une détermination de la protidémie, de même qu’une électrophorèse des
protéines sériques, est réalisée. L’interprétation du protéinogramme obtenu après
validation analytique, est ensuite effectuée par le biologiste. Celui ci décidera
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
80
alors s'il serait nécessaire ou non d'ajouter une exploration complémentaire
(figure1).
En cas d’anomalie évoquant une IM, le jour suivant seront effectués, le
dosage pondéral des Ig concomitamment à l’F ou IS sur le même échantillon de
sérum conservé à +4°C.
L’analyse des urines suit la même démarche que celle du prélèvement
sanguin (recherche et dosage éventuel de la protéinurie, électrophorèse des
protéines urinaires et typage du composant monoclonal par IF) (figure 2).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
81
Interprétation GGGGGGFGREWGW
visuelle
Présence ou non de signes clinico-biologiques évocateurs (AEG, signes osseux, VS accélérée, hypercalcémie, anémie, syndrome tumoral, IR,…)
Dosage de la protidémie (Taux de protides sériques augmenté, hypoprotidémie)
Electrophorèse des protéines sériques (Hydrasys/Capillarys)
Figure 1: Schéma illustrant la démarche diagnostique dans l’exploration d’une Igm
dans le sérum (Laboratoire de Biochimie, HMIMV)
Commentaires Si suspicion d’IM exploration
Départ du dossier
Densitométrie
=
quantification
du pic selon
la protidémie
Dosage des IgG, IgA, IgM, κ, λ
IF ou
IS sérique
Patient
inconnu
Patient
connu
(Suivi)
Arrêt des
investigations
Interprétation visuelle
(Gel+tracé)
Aspect normal Aucun pic en γ, β ou α
Absence d’hypogamma-
globulinèmie
Aspect douteux Anomalie de la zone γ
ou zone β augmentée
Aspect anormal Pic bien visible
en zone β, γ ou α
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
82
Recherche et Dosage de la protéinurie
Electrophorèse des protéines urinaires
(si réactifs disponibles/Hydrasys)
Présence ou non de signes clinico-biologiques évocateurs (pic monoclonal sérique, hypogammaglobulinemie ou hypoprotidemie)
Figure 2 : Schéma illustrant la démarche diagnostique dans l’exploration d’une
Igm dans les urines (Laboratoire de Biochimie, HMIMV)
Aspect normal Aucune ne bande en
β, γ ou α,
IF des urines
(Hydragel Bence
Jones)
Aspect douteux
Bande peu importante
ou superposition a
d’autres protéines
Interprétation visuelle
(Gel+tracé)
Arrêt
d’investigations
Patient
connu Patient
inconnu
Simple
densitométrie :
quantification de
la PBJ selon %
protéinurie
Commentaires Comparaison avec l’exploration du sérum
Aspect anormal Bande bien visible
en zone β, γ ou α
Départ du dossier
Aspect normal Aucune bande en β, γ
ou α,
Aspect douteux
Bande peu importante
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
83
II. METHODES UTILISEES
L’ensemble des dossiers-patients analysés ont été conservés dans les
archives des services concernés sous format papiers, d’où la difficulté de les
consulter convenablement.
A- Paramètres biochimiques analysés
Les résultats biochimiques relevés à partir de ces dossiers concernent les
paramètres suivants :
Le taux des protides totaux sériques,
Les données du protidogramme sérique,
Le dosage pondéral des Ig associé au rapport kappa/lambda, lorsqu’il est
calculé, ainsi que d’autres tests explorant :
- la fonction rénale notamment la créatininémie et l’azotémie,
- le syndrome inflammatoire avec la CRP,
- la β2microglobuline pour l’évaluation du pronostic.
Il est à rappeler que le dosage de ces paramètres en particulier la β2-
microglobuline n’a pas été toujours disponible.
Dans des situations précises, une recherche de cryoglobulinémie était indiquée.
Dès lors, l’acheminement du prélèvement au laboratoire et son prétraitement,
ont été effectués selon les recommandations requises, déjà évoquées dans la
partie théorique. La recherche de la cryoglobulinémie et son typage éventuel
sont réalisés au laboratoire selon une démarche bien définie (Figure 3).
L’envoi au laboratoire d’un échantillon d’urine obtenu à partir d’un recueil de
24h, en même temps que le sérum est exigé mais n’a pas été toujours respecté.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
84
B- Techniques analytiques
Le dosage de la protidémie a été réalisé par technique colorimétrique de
biuret.
Concernant les techniques électrophorétiques utilisées au laboratoire, elles
ont connu une évolution durant la période de l’étude quant à la nature du support
employé, comme cela a été précisé dans la partie théorique :
Prélèvement (tube sec) apporté au laboratoire à 37 ºC
Coagulation et centrifugation à 37ºC
Observation pendant une semaine
Apparition progressive d’un précipité, d’un gel, de cristaux à 4ºC
Séparation et conservation du sérum à 4º C et à 37ºC
Recherche négative
Recherche positive
Isolement après lavage
Soluble à 37 ºC
Typage immunologique
Absence
Presence
Figure 3 : Schéma illustrant la démarche suivie pour la recherche et le typage
des cryoglobulines (Laboratoire de Biochimie, HMIMV)
non
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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85
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
86
2000-2001: L’acétate de cellulose a été utilisé comme support,
2001- Juin 2008: Le gel d’agarose a été introduit au laboratoire grâce a
l’acquisition de l’Hydrasys® de chez Sebia (Figure 4),
Depuis juin 2008 : La technique d’EC est employée sur le Capillarys® de
la même société (Figure 5).
Le typage des immunoglobulines monoclonales, initialement effectué par
immunoélectrophorèse, a été réalisé par IF sur l’Hydrasys. En Juin 2008, la
technique d’IS adaptée sur le Capillarys® a été introduite. Elle est pratiquée
particulièrement dans les cas typiques, ne posant pas de problème
d’interprétation.
Nous avons procédé à la détermination du taux du composant monoclonal à
partir du tracé électrophorétique.
Le dosage pondéral des Ig sériques G, A, M, des chaines légères κ et λ ainsi
que la détermination de la concentration de la β2-microglobuline sérique, ont été
réalisés par Immunonéphélémétrie d’abord sur BN-100 puis ensuite sur BN-
prospec de chez Behring® (Figure 6).
Les dosages de l’urée et la créatinine ont été pratiqués sur l’Intégra 400®
de Roche (Figure 7) et à partir de 2007 sur le Dimension RXL de chez Behring®
(Figure 8).
Dans le tableau I, sont reportés, les noms des trousses de réactifs ainsi que
les principes analytiques des différents paramètres biochimiques étudiés
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
87
Figure 4: Automate Hydrasys® de chez Sébia
(Laboratoire de biochimie et de toxicologie, HMIMV).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
88
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
89
Figure 5: Automate Capillarys® de chez Sébia
(Laboratoire de biochimie et de toxicologie, HMIMV).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
90
Figure 6: Auto-analyseur BN ProSpec® de la Société Dade Behring
(Laboratoire de biochimie et de toxicologie, HMIMV)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
91
Figure 7: Auto-analyseur COBAS Interga 400 de la Société ROCHE
(Laboratoire de biochimie et de toxicologie, HMIMV)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
92
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
93
Figure 8 : Auto-analyseur RXL Dimension de la Société Dade Behring
(Laboratoire de biochimie et de toxicologie, HMIMV)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
94
Tableau I : Noms des trousses des réactifs ainsi que les principes analytiques
Analyse
biochimique
Principe
analytique
Valeurs
usuelles
Nom de la
trousse
Fabriquant
Protidémie Colorimétrie
(réaction de biuret)
[64 - 82g/l]
Flex PT Dade Behring
EPP Electrophorèse
Sur gel d’agarose
Fig. 9
(A) Kit Hydrazys Sébia
EPP Electrophorèse
capillaire
Fig. 9
(B) Kit Cappilarys
protein 5 β1/β2
Sébia
Immuno-typage IF Fig. 10
(A)
Hydragel IF Sébia
Immuno-typage IS Fig. 10
(B)
Kit cappilarys Sébia
PBJ UIF Fig. 11 Hydragel Bence
Jones
Sébia
Dosage
pondéral des Ig
Immuno-
néphélémétrie
Tableau II N- Antisérum
anti-Ig humaines
Dade Behring
Protéinurie Bandelette réactive Absence Uricheck Test Reactifs
Dosage de la
protéinurie
Colorimétrie
(rouge de pyrogallol)
<0,15g/24h UCFP Flex Dade Behring
Créatinine Colorimétrie
(réaction de Jaffé)
[6 -13mg/l] Flex CREA
Dade Behring
Calcium Complexométrie [85-101mg/l] Flex CA Dade Behring
CRP Immuno-
turbidimétrie
≤3 mg/l Flex CPR Dade Behring
β2-M Immuno-
néphélémétrie
[0,7-1,8mg/l] N latex β2M Dade Behring
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
95
des différents paramètres biochimiques étudiés.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
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A B
Fractions
Albumine
Alpha-1
Alpha-2
Beta1
Beta2
Gamma
Fractions
Albumine
Alpha-1 Alpha-2 Beta1
Beta2
Gamma
Normes en%
60-71
1,4- 2,7
7 - 11
6 - 9
2- 5
11,1-18,8
Normes en%
55,8 - 66,1
2,9 - 4,9
7,1 -11,8
4,7 - 7,2
3,2 - 6,5
11,1- 18,8
Normes en g/l
43 - 51
1 - 2
5 - 8
4 - 6
1- 4
6 -12
Normes en g/l
40,2- 47,6
2,1 - 3,5
5,1 - 8,5
3,4 - 5,2
2,3- 4,7
8,0 -13,5
Figure 9: Protidogramme normal (EPP/Hydrasys : A, EPP/Capillarys : B)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
97
IF (A) IS (B)
Figure 10 : Résultat normal de l’immunotypage par IF sérique/ Hydrasys (A)
et par IS/Capillarys (B)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
98
Figure 11: Résultat d’une recherche négative de la PBJ/IF
Tableau II : Normes du dosage pondéral des Ig polyclonales selon la pratique
du laboratoire de biochimie de l’HMIMV
Ig CL
G A M κ λ
Taux en (g/L)
7 - 16
0.7 - 4
0.4 - 2.3
1.7 - 3.7
0.9 - 2.1
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
99
C- Diagnostic étiologique
Le diagnostic étiologique repose sur des investigations différentes selon
l’orientation diagnostique initiale. Nous rappelons ici les critères retenus pour le
diagnostic des IM dans la présente étude.
En ce qui concerne les MGUS, les critères sont ceux définis par Kyle
[106] :
- gammapathie monoclonale isolée sans argument clinique ou biologique
caractérisant une hémopathie maligne,
- taux du composant monoclonal inferieur à 30 g/l,
- protéinurie de Bence-Jonces négative ou inferieure à 1g/24h,
- hémogramme, taux de calcémie et de créatininémie normaux.
Les critères diagnostiques de myélome utilisés sont ceux définis par le
groupe international de myélome [54]. Dans les cas de myélome à plasmocytes
non excrétant, l’étude immunohistochimique des plasmocytes médullaires a
permis d’objectiver l’Igm dans leur cytoplasme et prouver ainsi le caractère
monoclonal.
Le diagnostic de la maladie de Waldenstrôm est basé sur la présence d’une IgM
monoclonale supérieure à 5g/l associée à une infiltration médullaire
lymphoplasmocytaire. Celui du lymphome repose sur les données histologiques
(biopsie ganglionnaire ou ostéomédullaires).
Quant aux leucémies à plasmocytes, les critères retenus sont ceux de l’OMS et
des papiers de référence sur cette pathologie [59]: présence dans le sang
périphérique de plus de 2G/L de plasmocytes ou un pourcentage de plasmocyte
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
100
>20% des leucocytes circulants [107]. Le diagnostic de leucémie lymphoïde
chronique (LLC) est basé sur l’existence d’une hyperlymphocytose sanguine et
sur les données de l’immunophénotypage sanguin.
D- Analyse et traitement des données
Les données ont été saisies et traitées par les logiciels Excel 2007 et
SPSS10.0 pour Windows.
Les résultats ont été exprimés par la moyenne ± écart type pour les variables
continues et par pourcentage (effectif) pour les variables discontinues. Ils sont
reportés dans des tableaux, ou représentés sous formes d'histogrammes, de
secteurs ou de barres, …
La distribution normale des variables continues a été vérifiée par le test
Kolmogorov-Smirnov.
L’analyse de la variance (ANOVA) et le test post hoc ont été utilisés pour
la comparaison des variables continues entre groupes, alors que pour la
comparaison des variables discontinues on a utilisé un test non paramétrique, le
khi-deux.
Les résultats sont considérés statistiquement significatifs à partir d’une
valeur de p≤ 0.05.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
101
Résultats
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
102
I.DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE A- Répartition des cas d’IM
Les 214 observations de notre cohorte se répartissent, comme l’illustre bien
le graphique 1, en 2 grandes catégories de populations :
Les immunoglobulinopathies monoclonales malignes (IMM) : 133 cas
(62%),
Les gammapathies monoclonales de signification indéterminées
(MGUS) : 81 cas (38%).
B- Répartition étiologique des IMM
Le graphique 2 et le tableau III représentent la répartition des cas d’IMM
selon le type d’hémopathie maligne en cause.
On note la plus forte prédominance du MM, stricto sensu, qui représente à lui
seul près de 80% des cas (n=106) répartis en :
75 cas (70.75%) de MM à Ig complète,
27 cas (25.47 %) de MCL,
3 cas (2.83%) de MNE,
1 seule observation de MNS (<1%).
La MGW et le lymphome occupent la seconde position avec près de 13 % des
cas.
Afin de pouvoir mieux exploiter les résultats de la présente étude, nous
avons sérié la population des IMM en 3 groupes :
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
103
Le groupe des MM au sens large (n=113), auquel nous avons
rattaché les cas de leucémie à plasmocytes (n=3), de
plasmocytome (n=2) et de syndrome de POEMS (n=2),
La MGW (n=8),
Les autres syndromes lymphoprolifératifs (n=12).
Aucun cas d’IM à chaîne lourde sans association de chaîne légère n’a été
retrouvé dans cette série.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
104
.
Graphique 1 : Répartition de la population selon le type d’IM
Graphique 2 : Répartition étiologique des IMM
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
105
Tableau III : Répartition étiologique des IMM
MM : Myélome Multiple.
MGW : Macroglobulinémie de Waldenstrom.
LLC : Leucémie Lymphoïde Chronique.
Etiologie n % dans IMM % dans IM
MM 106 79.7 49.5
MGW 8 6 3.7
Lymphomes 9 6.8 4.2
LLC 3 2.5 1.4
Leucémie à plasmocytes 3 2.5 1.4
Plasmocytome 2 1.5 0.9
POEMS 2 1.5 0.9
Total 133 100 62%
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
106
II. DONNEES DEMOGRAPHIQUES ET
CLINIQUES A- Répartition des IM selon le sexe
La série étudiée comprend 153 sujets de sexe masculin et 61 de sexe
féminin, soit respectivement 71.5% et 28.5 % de l’ensemble des cas. Le sex-
ratio global (H/F) est de 2.51.
Ce ratio H/F est de 2.91 (99 Hommes et 34 Femmes) dans le groupe des IMM,
alors qu’il est de 2 dans le groupe des MGUS (54 Hommes et 27 Femmes).
Les graphiques 3 et 4 montrent la répartition des cas d’IM de notre cohorte
respectivement selon le sexe puis selon le sexe et le groupe étiologique.
Graphique 3 : Répartition de la population selon le sexe.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
107
Graphique 4 : Répartition selon le sexe et le groupe étiologique des IM.
Une nette prédominance masculine est bien illustrée sur les deux
graphiques : plus des 2/3 de la population étudiée sont des hommes.
Cette prédominance masculine est objectivée dans les 2 groupes étiologiques
(IMM et MGUS).
B- Répartition selon l’âge
1- Répartition des IM selon l’âge
L’âge au moment du diagnostic des cas d’IM de la cohorte étudiée varie
entre 23 et 97 ans, avec une moyenne de 59.87±12.46 ans et une médiane à 60
ans.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
108
Dans le groupe des IMM, l’âge est moyen de 59.29±11.84. Il n’est pas
significativement différent (p>0.05) de celui des MGUS (60.85±13.46).
Ce résultat est illustré par le graphique 5.
La distribution des patients selon les tranches d’âge et le groupe étiologique
est présentée dans le graphique 6.
Graphique 5 : Boite à moustaches des moyennes d’âges dans les IMM et les
MGUS
IMM MGUS
Type d’IM
Ag
e (a
ns)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
109
Graphique 6 : Répartition des IM en fonction de l’âge.
Le graphique 6 montre un aspect pyramidal, avec un pic de fréquence dans
la tranche d’âge comprise entre 60 et 69 ans, aussi bien pour l’ensemble des IM
que pour les IMM. Les MGUS montrent une répartition différente puisque les 3
tranches d’âges 50-59, 60-69, 70-79 ans sont représentées de façon comparable.
Néanmoins, la comparaison statistique ne révèle pas de différence
significative (p>0.05) entre les IMM et les MGUS quant à leur répartition selon
les tranches d’âge,
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
110
2- Répartition des IMM selon l’âge
Les moyennes d’âge des IMM dans les groupes étiologiques sont reportées
dans le tableau IV. Le groupe MGW montre une médiane d’âge (66 ans) plus
élevée que celles des deux autres groupes MM (60 ans) et autres SL (58.50 ans)
qui se révèlent très proches.
La comparaison statistique n’a cependant pas montré de différence
significative (p=0.718) entre ces 3 groupes des IMM quant à leur répartition
selon l’âge (graphique 7).
La distribution des cas d’IMM selon les tranches d’âge et le type de
l’hémopathie maligne est représentée par le graphique 8. Ce dernier révèle un
pic de fréquence dans la tranche d’âge de 60-69 ans et ce dans les 3 groupes
étiologiques.
Tableau IV : Moyennes d’âges dans les 3 groupes des IMM.
Etiologie de l’IMM Moyenne d’âge
(ans)
Médiane d’âge
(ans)
Extrêmes d’âges
(ans)
MM 59.14±11.98 60 [31-84]
MGW 65.25±5.52 66 [58-73]
Autres SL 57.07±12.91 58.50 [35-72]
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
111
Graphique 7 : Boite à moustaches des moyennes d’âges dans les MGUS et les
étiologies des IMM.
MGUS et les groupes étiologiques des IMM
MM Autres SL MGUS MGW
Ag
e (a
ns)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
112
Graphique 8: Répartition de la population selon les tranches d’âges et le type
de l’IMM.
C- Signes révélateurs des IM
Le tableau V regroupe les différents signes révélateurs, cliniques et/ou
biologiques, qui constituent très souvent des motifs d’hospitalisation, ainsi que
leurs fréquences dans la population étudiée.
Ces signes sont dominés par les douleurs osseuses et l’altération de l’état
général, qui représentent prés de la moitié des cas. Des anomalies biologiques
(anémie, hypercalcémie, accélération de la VS, hyperprotidémie….) et
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
113
l’insuffisance rénale sont également fréquentes comme circonstances de
découverte dans la présente étude.
On note, par ailleurs, la prédominance de ces signes dans le groupe des
IMM comparativement au groupe des MGUS (43.6%, 15%, 11.3%, 7.5%
Versus 9.9%, 11.1%, 3.7%, 3.7%).
Tableau V: Signes révélateurs au cours des IM.
Motifs d’hospitalisation IMM MGUS IM
n % n % n %
Douleurs osseuses 58 43.6 8 9.9 66 30.8
AEG 20 15 9 11.1 29 13.5
Anomalies biologiques 15 11.3 3 3.7 18 8.4
IR 10 7.5 3 3.7 13 6.1
Maladies rhumatismales 0 0 12 14.8 12 5.6
Syndrome tumoral 7 5.3 2 2.5 9 4.2
Syndrome hémorragique 5 3.8 2 2.5 7 3.3
Syndrome néphrotique 1 0.8 4 4.9 5 2.3
Fractures pathologiques 4 3 0 0 4 1.9
Neuropathie 1 0.8 3 3.7 4 1.9
Autres (prostatisme, ictère, dyspnée,…) 7 5.3 30 37 37 17.3
Manquants 5 3.8 5 6.2 10 4.7
Total 133 100 81 100 214 100
D- Pathologies associées aux MGUS
Les pathologies associées aux cas de MGUS (n= 81) de la cohorte étudiée
sont reportées dans le tableau VI.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
114
D’après ces résultats, on peut relever que les maladies rhumatologiques, les
insuffisances rénales, les affections hépatobiliaires et le diabète représentent plus
de 50% des pathologies associées aux MGUS.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
115
Tableau VI : Pathologies associées aux MGUS.
Pathologies associées aux MGUS
n
%
Maladies rhumatologiques a
11 13.6
Insuffisance rénale et néphropathies b
17 21
Affections hépatobiliaires c 8 9.9
Endocrinopathies d
8 9.9
Affections hématologiques e 6 7.4
Maladies du système f 5 6.17
Infections g 4 4.9
HTA 4 4.9
Pathologies cutanées h 3 3.70
Autres 10 12.36
Aucune 5 6.17
Total 81 100
a Maladies rhumatologiques : polyarthrite rhumatoïde, oligoarthrite aigu, arthralgies, arthrose
lombaires, …
b Insuffisances rénales et néphropathies: insuffisance rénale aigu ou chronique, néphropathies,
syndrome néphrotique.
c Affections hépatobiliaires
: hépatite B ou C, cirrhose post-virale, hépatopathies,…
d Endocrinopathies: diabéte…
eAffections hématologiques: thrombopénie essentielle, anémie sévère, thrombose veineuse,...
f Maladies du système: syndrome de Gougerot-Sjogren, lupus érythémateux
g Infections: tuberculose, infections parasitaires, pneumopathie infectieuse, …
h Pathologies cutanées
: éruptions, psoriasis.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
116
III. EXPLORATIONS BIOCHIMIQUES A. Protidémie
Dans le groupe des IMM, le taux moyen des protides totaux sériques est de
83.16 g/l ± 23.28, avec des extrêmes de 37 à 149.7g/l. La protidémie est
retrouvée augmentée dans 41.40% des cas, basse dans 15% des cas (16 cas de
myélome à chaînes légères, 4 cas de myélome à plasmocytes non sécrétant ou
non excrétant) et normale dans 43.60% des cas.
Dans le groupe des MGUS, la protidémie moyenne est nettement plus
basse : 70 g/l ± 8.27, avec des extrêmes de 48 à 90g/l. La protidémie est
retrouvée normale dans 90% des cas, basse dans 7.4% des cas et augmentée
dans seulement 2.6% des cas.
La comparaison statistique de la protidémie moyenne entre les 2 groupes
étiologiques d’IM, montre une différence très significative (p < 0.001).
Ces résultats sont reportés dans le tableau VII.
Par ailleurs, dans le groupe des IMM à Ig complète, la protidémie moyenne
est retrouvée significativement (p<0.001) plus augmentée que dans le groupe
des IMM à Ig incomplète (89.97 g/l ±21.67 versus 61.66 g/l ±21.63), comme le
montre bien le tableau VIII.
Tableau VII : Résultats de la protidémie dans les IMM et les MGUS.
Taux de PT
(g/l)
IMM MGUS p
Moyenne 83.16 70 <0.001
Ecart type 23.28 8.27
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
117
Minimum 37 48
Maximum 149.7 90
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
118
Tableau VIII : Résultats de la protidémie dans les IMM à Ig complète et les
IMM à Ig incomplète.
Taux de PT
(g/l)
IMM à Ig
complète
IMM à
Ig incomplète P
Moyenne
89.97
61.66
<0.001
Ecart type
21.67
21.63
Minimum
46
37,0
Maximum
149.7
84.0
B. Caractéristiques électrophorétiques et immuno-
chimiques 1- Electrophorèse des protéines sériques
Dans le tableau IX sont reportés les résultats de l’EPP sérique retrouvés
dans les IM étudiées d’une manière générale, mais aussi selon le groupe
étiologique, IMM ou MGUS.
Un pic, d’importance variable est objectivé chez 185 patients soit
(86.45%). Il est chiffré à 37.58±23.25 g/l (extrêmes : 6.9 -114) dans le cas des
IMM, à 14.74±5.72 g/l (extrêmes : 4.6 -33) dans le cas des MGUS.
La différence entre ces valeurs moyennes est statistiquement significative,
comme l’atteste p (<0.001).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
119
Le pic d’allure monoclonale est principalement situé au niveau de la zone γ
(n= 152, soit 82.16% versus n=33 soit 17.84% seulement au niveau de la zone
β). L’absence de pic monoclonal a été notée dans 29 cas d’IM (13.55%) où elle
est retrouvée associée à une hypogammaglobulinémie (28/29).
Les résultats de cette analyse permettent de noter :
o Une fréquence des pics β plus élevée dans les IMM (24%) par rapport
aux MGUS (9.9%), contrairement aux pics γ, qui sont le plus souvent
retrouvés dans les MGUS (90.1%) que dans les IMM (76%),
o Une hypogammaglobulinémie chez 28 patients de notre cohorte (13.1%
des cas) appartenant tous au groupe d’IMM (21cas de MCL, 3cas de
MNE, 1cas MNS, 1cas de Syndrome de POEMS et 1 cas de Leucémie à
plasmocytes).
Tableau IX : Résultats de l’EPP sérique selon le groupe étiologique.
Etiologie
n
Pic a l’EPP
Pic β
Pic γ
hypo γ
n % n % n % n %
IMM 133 104 78.19 25 24.04 79 75.06 28 21.05
MGUS 81 81 100 8 9.88 73 90.12 0 0
Total 214 185 86.45 33 17.84 152 82.16 28 13,1
n : nombre de cas
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
120
2- Résultats de l’immunotypage 2.1- Distribution isotypique des IM
La répartition isotypique des IM de la série étudiée selon leur classe et leur
type figure dans le tableau X et est illustrée par les graphiques 9 et 10.
Tableau X : Distribution isotypique des IM.
N % κ (n1) λ (n2) κ/λ (n1/n2)
IgG 119 55.61 70 49 1.43
IgA 30 14.01 11 19 0.58
IgM 26 12.13 20 6 3.33
CLL 30 14.01 13 17 0.76
Biclonales1 5 2.37 07 03 2.33
NS2ou NE
3 4 1.87 - - -
Total 214 100
1 :immunoglobinopathies biclonales
2 : Non secrétant
3 :
Non excrétant
n : nombre
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
121
Graphique 9: Répartition des IM selon la classe d’Igm.
Graphique 10 : Répartition des IM selon le type d’Igm.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
122
Les résultats présentés objectivent la prédominance de l’isotype IgG qui
représente à lui seul plus de la moitié des cas (56%). L’isotype IgA et les CLL
viennent en deuxième position avec un pourcentage de 14% chacun, suivis des
IgM (12%), des biclonales, des NS ou NE qui représentent chacun 2%.
Par ailleurs, les chaines légères kappa semblent majoritaires (56%) : la
chaine légère kappa (121 cas) est beaucoup plus représentée que la chaine légère
lambda (94 cas) avec un rapport κ/λ de 1.28.
2.2- Distribution isotypique selon le groupe étiologique
Les résultats de cette distribution sont reportés dans le tableau XI. On note
une prédominance de la classe des Ig G et des Ig M dans le groupe des MGUS
par rapport aux IMM (respectivement 72.8% versus 45.11% pour les Ig G, 13.6
% versus 11.28% pour les Ig M). Alors que les IgA monoclonales sont plus
fréquemment retrouvées dans les IMM (16.5%) que dans les MGUS (9.9%).
Dans tous les cas, la différence est statistiquement significative (p=0.0001).
Quant au type de l’Igm, la prédominance de chaines légères κ dans le
groupe des IMM quelque soit la classe est à souligner (κ/λ dans IMM > κ/λ dans
MGUS).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
123
Tableau XI : Distribution isotypique dans les IMM et les MGUS.
2.3- Répartition isotypique selon la zone de migration à l’EPP
Le tableau XIV et le graphique 11 précisent, selon le type du composé
monoclonal, la traduction à l’électrophorèse des 185 IF positives (185 EPP):
82.70% des Igm sont révélées par un pic dans la zone des γ- globulines et
17.3% le sont dans la zone des β-globulines. On constate, par ailleurs, que la
zone γ est le secteur de migration privilégiée des IgG (98.3%), des Ig M
(96.2%) et des biclonales (100%), alors que les IgA migrent très souvent dans
la zone β (93.8% des cas). Ces résultats sont statistiquement significatifs
(p=0.0001).
IMM MGUS p
n % κ/λ n % κ/λ
IgG 60 45.11 1.5 59 72.8 1.36 0.0001
IgA 22 16.5 0.83 8 9.9 0.14 0.0001
IgM 15 11.28 4 11 13.6 1.75 0.0001
CLL 30 22.56 0.76 0 0 _ _
I.Biclonales1 2 1.5 _ 3 3. 7 _ _
NS2ou NE
3 4 3.1 _ 0 0 _ _
Total 133 100 81 100
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
124
Tableau XII : Répartition iso typique selon la zone de migration.
Graphique 11 : Répartition isotypique selon la zone de migration de l’Igm.
Isotype Zone β Zone γ Significativité
n % n %
IgG 2 1.7 117 98.3 0.0001
IgA 28 93.3 2 6.7 0.0001
IgM 1 3.8 25 96.2 0.0001
κ ou λ 1 20 4 80
I.Biclonales 0 0 5 100
Total (185) 32 17.3 153 82.7
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
125
3- EPP comparée à l’IF
Nous avons comparé la mise en évidence ou non du composant monoclonal
par l’électrophorèse des protéines sériques selon le résultat de l’immunotypage.
Nous retrouvons cette mise en évidence plus difficile dans le cas des
chaines légères libres monoclonales : 25 faux négatifs sur 30 (soit 83 %),
comme le souligne les résultats reportés dans le tableau XIII.
Les deux techniques se sont révélées négatives dans les cas de myélome NS ou
NE.
Tableau XIII : Répartition par classe d’Ig du résultat de l’EPP.
EPP
positive EPP
négative Total par classe
d’Ig n % n % n
IgG 119 100 0 0 119
IgA 30 100 0 0 30
IgM 26 100 0 0 26
κ ou λ
libre
5 16.6 25 83.3 30
I.Biclonales 5 100 0 0 5
NS /NE 0 0 04 04 4
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
126
Par ailleurs, nous avons considéré l’immunotypage (IF/ IS), comme
technique de référence. Sur 210 IF positives, 25 n’ont pas été décelées à l’EPP
(faux négatifs) comme nous l’avons déjà mentionné, alors qu’il n y a pas de faux
positifs (tableau XIV).
Tableau XIV : Résultats de l’électrophorèse par rapport à l’IF
IF positive IF négative Total
EPP (+) 185 0 185
EPP (-) 25 4 29
Total 210 04 214
Il en résulte pour L’EPP :
Une Sensibilité1 de 88.1%, IC à 95% : [83.02 - 91.81],
Une Spécificité2 de 100%, IC à 95% : [51.01 - 100].
1: 185/210 x 100 = 88.1%
2: 4/4 x 100 = 100%.
IC : intervalle de confiance
4- Exploitation des résultats du dosage pondéral
4.1- Taux d’Igm
Les résultats du dosage pondéral des immunoglobulines, réalisé pour 100
patients de la cohorte étudiée (tableau XV), ont objectivé pour les IMM une
augmentation du taux de :
L’Igm A ou G essentiellement dans le cas de MM à IgA ou à IgG,
L’Igm M dans les cas de MGW, de LLC et de lymphome.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
127
Dans le groupe des MGUS, un taux normal ou légèrement élevé de l’Igm
est retrouvé.
Tableau XV : Taux sérique moyen, écart type, valeurs extrêmes et intervalles de
confiance à 95% de l’Ig m selon l’étiologie.
m : moyenne, VE : valeurs extrêmes, IC : intervalle de confiance a 95%.
Pour comparer statistiquement ces valeurs moyennes, nous avons pris en
considération seulement les taux moyens, tous isotypes confondus.
La comparaison multiple des valeurs moyennes des taux de l’Ig m selon
l’étiologie, montre :
Une diminution statistiquement très significative des résultats dans les
MGUS par rapport au MM (12.77±9.99 versus 35.20±20.77; p<0.001),
mais également, de façon moins significative, par rapport aux autres IMM
(12.77±9.99 versus 32.77±24.22; p=0.004).
Type d’IM n Valeurs
Tous isotype
confondus
(g/l)
IgG(g/l) IgA(g/l) IgM (g/l)
Myélome
(stricto sensu) 48
m±écart type 35.20±20.77 42.00±19.79 33.8±23.37 _
VE [0.66 - 74] [28 - 56] [0.66 - 71.2] _
IC [29.17 - 41.24] [21.2 - 51] [20.86 - 46.7] _
autres IMM
11
m±écart type 32.77±24.22 35.84±19.84 18±1.41 34.36±28.41
VE [8.63 - 80] [4.5 - 74] [17 - 19] [8.63 - 80]
IC [16.51 - 49.04] [28.81 - 42.88] [5.29 - 30.7] [8.08 - 60.64]
MGUS
41
m±écart type 12.77±9.99 16.46±9.44 6.5±4.33 1.94±1.23
VE [0.5 - 45] [3.36 - 45] [3.68 - 14] [0.5 - 3.91]
IC [9.61 - 15.92] [12.86 - 20.05] [1.1 - 11.88] [0.80 - 3.07]
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
128
4.2- Dosage des Ig polyclonales
Dans le tableau XVI sont présentés les résultats de cette analyse,
particulièrement la fréquence de la répression de synthèse des Ig plyclonales
selon l’étiologie (MM, IMM, MGUS).
Ainsi, par opposition aux MGUS où les Ig polyclonales demeurent
généralement à un taux normal (80-92%), on note au cours des IMM une
répression de synthèse des Ig polyclonales, plus accentuée dans le MM (100%
dans les cas du MCL, 80.6% dans le MM à Ig G et 76.9 dans le MM à Ig A).
Tableau XVI : Fréquence de la répression de synthèse des Ig plyclonales selon
l’étiologie.
Type d’IM Isotype Répression de
synthèse (n1/n
2)
% de la
répression
Résultat normal
(%)
Myélome
IgG 25/31 80.6 19.4
IgA 10/13 76.9 25.1
CLL 4/4 100 0
Autres IMM
IgG 31/64 48.4 51.6
IgA 11/19 57.9 42.1
IgM 3/14 21.4 78.6
MGUS
IgG 2/25 8 92
IgA 1/5 20 80
IgM 1/7 14.3 85.7
n1 : Tous les cas qui présentent une répression de synthèse d’une ou des 2 classes d’Ig polyclonales
n2 :
L’ensemble des cas pour lesquels un dosage pondéral des Ig polyclonales est réalisé
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
129
La comparaison statistique des pourcentages de la répression de synthèse
chez les 3 groupes montre une différence très significative entre le myélome et
les MGUS (p<0.00001), alors que cette différence est statiquement moins
significative entre les IMM et les MGUS (p=0.016).
4.3- Rapport κ/λ : Sensibilité et spécificité par rapport à l’IF
Les critères pour les limites du rapport κ/λ sont ceux établis dans une
grande étude internationale multicentrique [108] :
♦ κ/λ est négatif quand 1.29≤ κ/λ≤2.61,
♦ κ/λ est positif si κ/λ<1.29 ou κ/λ >2.61.
En considérant l’IF comme référence, les résultats donnés par le tableau
XVII montrent un faux négatif et 4 faux positifs. Il en découle :
Une Sensibilité (75/76) de 98.68%, IC à 95% : [92.92-99.7],
Une Spécificité de 20% (1/5), IC a 95% : [3.62-62.45]
Tableau XVII : Résultat du rapport κ/λ par rapport à l’IF sérique.
IF (+) IF (-) Total
Rapport κ/λ (+) 75 4 79
Rapport κ/λ (-) 1 1 2
Total 76 5 81
κ/λ: taux de chaines légères kappa/taux de chaines légères lambda.
5- Protéinurie de Bence Jones
La PBJ a été recherchée chez 191sujets de la série étudiée (121 IMM et 70
MGUS), par la technique d’IF urinaire, au moment du diagnostic.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
130
Elle s’est révélée positive chez 68 patients, soit 35.6% (66 cas d’IMM et 02 cas
seulement de MGUS), négative dans 123 cas, soit 64.4% (55 IMM et 68
MGUS).
Cette différence de répartition de la PBJ entre les IMM et les MGUS est
statistiquement très significative (p < 0.001).
C. Recherche et typage d’une éventuelle cryo-
globulinémie
Sur une période de 6 ans, 53 demandes de cryoglobulinémies ont été
enregistrées, Seules 7 d’entre elles, se sont révélées positives (tableau XVIII) :
2 cas de type I, dont un associant un MM à un LED,
5 cas de type II, associés en majorité à des hépatites virales accompagnées
ou pas de néphropathies.
Tableau XVIII : Résultat de typage des cas de cryoglobulinémies trouvés
Type Anomalies monoclonales
Associées
Nombre
des cas Pathologies
I IgM/κ 1 HVC
IgG/λ 1 MM + LED
II IgM/κ +Ig polyclonales 3
HVC, HVC+IR,
HVC+GNA
IgG/λ +Ig polyclonales 2 HVC
GNA : Glomérulonéphrite aigu
LED: Lupus érythémateux disséminée
HVC: Hépatite virale C
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
131
IV. AUTRES PARAMETRES BIOLOGIQUES
Le tableau XIX résume toutes les données recueillies du tableau Excel
concernant les autres paramètres biologiques étudiés, selon l’étiologie de l’IM.
Seront comparées les moyennes observées pour chacun des paramètres en
fonction de l’étiologie (IMM ou MGUS) et la significativité (p) de leur
différence déterminée.
Tableau XIX: Comparaison des résultats des paramètres biologiques
déterminés dans les 2 groupes d’IM, les IMM et les MGUS.
m : moyenne, VE : Valeurs extrêmes
La créatininémie moyenne est augmentée dans les IMM (30.53
mg/l) comparativement au groupe des MGUS (16.43 mg/l). La différence entre
les deux groupes est statistiquement significative (p<0.001).
Paramètres biologiques IMM MGUS p
Créatininémie (mg/l) m
VE
30.53
[6 - 219]
16.43
[4 - 30]
<0.001
Calcémie corrigée
(mg/l)
m
VE
101.56
[78 - 163]
88.43
[85 - 108]
<0.001
β2micro-
globulinémie (mg/l)
m
VE
13.29
[1.20 - 32.50]
5.07
[0.90 - 6.70]
0.02
CRP (mg/l) m
VE
47.28
[0.01 - 317]
45.68
[0.80 - 320]
0.90
VS (mm/h) m
VE
72.74
[3 - 177]
37.54
[4 - 88]
<0.001
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
132
Une IR, attestée par une créatininémie > 20 mg/l est objectivée chez 51 patients
atteints d’IMM (20 MCL, 30 MM à Ig complète et 1 cas de leucémie à
plasmocytes).
La calcémie corrigée par rapport au taux de protides, oscillait entre
des valeurs extrêmes allant de 78 à 163 mg/l dans les IMM, alors qu’elle reste
normale dans les MGUS.
La différence de calcémie moyenne est statiquement très significative
(p<0.001) entre ces deux groupes étiologiques.
La β2microglobulinémie moyenne est statistiquement
significativement plus augmentée dans les IMM que dans les MGUS (p=0.02).
Le taux moyen de la CRP n’est pas significativement différent entre
les IMM et les MGUS.
La VS moyenne trouvée dans le groupe des IMM est
significativement très élevée par rapport à celle des MGUS (p < 0.001),
Par ailleurs, une anémie normochrome normocytaire arégénérative a été
objectivée dans 81% des cas de MM.
V. CLASSIFICATION PRONOSTIQUE DES
CAS DE MM SELON DURIE ET SALMON.
Dans la présente série, les 106 cas de MM se repartissent selon les critères
pronostiques de Durie et Salmon, comme suit :
Stade I : 4 cas,
Stade II A: 12 cas,
Stade II B : 10 cas,
Stade III A : 38 cas,
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
133
Stade III B : 42 cas,
Le graphique 12 permet de mieux illustrer cette répartition.
Graphique 12 : Résultat de la classification pronostique des cas de MM
(Durie et Salmon).
D’après ce graphique, on constate que plus des ¾ (76%) des cas de
myélomes de notre série, sont classés stade III (A ou B). La majorité de MCL
(93%) sont à ce stade terminal (tableau XX). La différence dans la répartition
des stades est statistiquement significative (p=0.006) entre les MM à Ig
complète et les autres myélomes (MCL, MNS et MNE).
Tableau XX: Etude comparative des résultats de la classification de Durie et
Salmon dans le MM à Ig complète, le MCL, MNS et MNE.
Stade du Myélome I IIA IIB IIIA IIIB Total
M à Ig complète 4 9 7 34 21 75
MCL 0 0 2 4 21 27
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
134
MNS et MNE 0 3 1 0 0 4
Total 4 12 10 38 42 106
VI. REPARTITION DES IM SELON LE
SERVICE CLINIQUE
Tableau XXI : Répartition des cas d’IM par service.
CRRF : centre de rhumatologie et de rééducation fonctionnelle
CCV : chirurgie cardiovasculaire
Service clinique Nombres des cas %
Médecine interne 138 64.48
Hématologie clinique 34 15.88
CRRF 20 9.34
Néphrologie-Dialyse-
Transplantation rénale 5 2.34
Neurologie 4 1.87
Neurochirurgie 4 1.87
Traumatologie 4 1.87
Pneumologie 3 1.4
CCV 1 0.47
Réanimation 2 0.93
Total 214 100
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
135
Le premier point à signaler pour cette cohorte est la grande diversité des
services cliniques dont sont originaires les cas étudiés.
Nous avons ainsi pu dénombrer les différents services prescripteurs dont 3
sont principaux avec 80% des cas: médecine interne, hématologie clinique, et
CRRF.
Le service de médecine interne à lui seul, rassemble prés de 2/3 des cas
admis à l’HMIMV.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
136
Discussion
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
137
Les IM représentent un problème fréquent en pratique clinique quotidienne.
Nous avons pu constater, lors de l’exploitation des dossiers, une
augmentation des cas d’une année à l’autre et plus particulièrement depuis 2001.
Une des explications possibles, est l’amélioration des techniques de
l’électrophorèse.
Les premières études épidémiologiques concernant les IM, datent de plus
de 20 ans [109 et 110]. Elles concernaient des populations non définies
géographiquement ou des patients hospitalisés. Par ailleurs, les techniques de la
détection utilisées étaient moins sensibles que les électrophorèses actuelles. La
fréquence des IM était estimée à environs 1% de la population
I- REPARTITION ET FREQUENCE DES IM
SELON LE DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
Les IM, groupe très hétérogène de maladies, relèvent d’étiologies diverses.
Le présent travail souligne la prédominance des IMM par rapport aux
MGUS.
Afin de mieux comprendre les particularités de la répartition dans la
présente étude, nous avons rassemblé dans le tableau XXII, les résultats obtenus
dans plusieurs études internationales.
Il ressort de cette comparaison que nos résultats se trouvent comparables à ceux
objectivés dans les travaux suivants : une étude marocaine [111], deux séries
tunisiennes [112,113] et 2 cohortes françaises [114,115].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
138
En revanche les MGUS sont plus fréquentes dans d’autres études [116, 117,
118, 119,120], où elles représentent entre 40.5 et 71% d’IM.
Il est néanmoins important de nuancer les résultats obtenus en fonction de
la démarche adoptée par toutes ces études en termes de recrutement des patients
et de méthodologie. A cet effet le nombre restreint des MGUS dans notre série
s’explique par un recrutement fondé exclusivement sur des malades hospitalisés
généralement symptomatiques. En effet, dans les autres séries internationales,
une bonne partie des sujets recrutés sont asymptomatiques et ont été dépistés
dans le cadre d’un bilan, réalisé régulièrement à l’occasion d’un check-up. Cela
semble justifier la fréquence élevée des MGUS dans ces séries.
Par ailleurs les résultats peuvent être influencés par les techniques
d’analyses. Entre les études les plus anciennes qui utilisaient l’acétate de
cellulose et l’IEP, et les plus récentes qui utilisent l’agarose ou le capillaire et
l’IF, il existe de grande différence. En effet, certains pics peu importants ou de
migration très proches étaient plus difficiles à visualiser avec les techniques
anciennes, d’où une sous-estimation probable. L’évolution de la biologie est
donc à prendre en compte dans l’interprétation des résultats.
La place occupée par les MGUS dans les grandes séries internationales,
l’est dans la nôtre par l’IMM particulièrement le MM qui représente à lui seul
près de la moitie des cas.
La faible fréquence de la MGW dans notre série (3.7%) est retrouvée dans
la plupart des séries de la littérature ou elle représente de 1.1 à 4.8%. Seuls
Youinou et al. [115], Fine et al. [114] en France et Pick et al. [119] en Israël
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
139
rapportent une proportion relativement importante de la MGW allant de 8.7%
jusqu’au 21.7%.
De la même façon, le plasmocytome et les lymphomes sont retrouvés à des
pourcentages faibles respectivement de 0.9 et 4.2%, comme dans les autres
séries de la littérature ou leur fréquence varie :
- de 0 à 5.5% pour le plasmocytome [112, 114,115, 117, 121,122],
- de 0 à 5.8% pour les lymphomes [112, 114,115].
Quant à l’amylose primitive et à la maladie des chaines lourdes, aucun cas
n’a été enregistré dans la cohorte étudiée. La fréquence de l’amylose primitive
est en effet faible selon les données de littérature (0 à 3.8%). Seul Kyle aux
Etats-Unis rapporte une fréquence relativement élevée allant jusqu'à 12% des
cas [122]. Par ailleurs, d’autres types d’IM peu fréquentes ont été enregistrés
dans notre cohorte : LLC (1.4%), Leucémie a plasmocytes (1.4%) et Syndrome
de POEMS (0.93%).
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
140
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
141
Tableau XXII: Répartition étiologique des IM selon la présente étude et les
séries de la littérature.
Etiologie :
Les (%)
Séries
MGUS
MM
MGW
Plasmo
cytome
Lymphome Amylose
primitive
Chaines
lourdes
Autres
Youinou [115]
1977Brest
152 cas
25.7 61.8 11.8 0 0 0 0 0.7
Pick [119] 1979
Israel 423 cas 40.5 22.4 12.4 _ _ 3.8 _ _
Fine 1985 [114]
Paris 1182 cas 20.1 56.3 21.7
0
0 0 0 1.9
Malacrida[116]
1987
Italie 375 cas
69.6 25.6 1.1 _ 1.6 1.1 _ _
Kyle [118]
1989Mayo-clinic
873 cas
64.2 15.6 2.4 1.5 5.8 8 0 2.5
Makini[112] 1990
Tunis 198 cas 22.7 58.1 2 0 0 0 17.2 0
Kyle [122] 1995
Mayoclinic 882 cas 55 21 2 2 3 12 0 5
Yvette [116] 1996
Hong Kong 157 cas
59.6
28.8 2.7 1.4 5.5 _ _ _
Ong [117] 1997
Hollande 1275 cas 71 18 3.7 _ 3.5 _ _
Mseddi [113] 2003
Sfax270 cas 27 58.2 4.8 1.1 3.4 1.8 2.2 _
Decaux [121] 2007
Rennes 1051cas 64.1 14.1 8.7 0.3 4.2 0.9 _ _
Decaux [121] 2007
Blois 1282cas
77.6 12.1 4.4 0.2 3.2 0.3 _ _
Etude [111] 2007
Rabat 310 cas 29.3 53.5 2.9 5.5 _ 0.65 _ _
Notre étude 2008
Rabat 214 cas 37.8 49.5 3.7 0.9 4.2 0 0 3.9
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
142
II. CARACTERISTIQUES EPIDEMIOLOGIQUES
ET CLINIQUES A. Répartition des IM selon le sexe et l’âge
1. Sex-ratio
La forte prédominance masculine notée dans cette étude (sex-ratio : 2.51)
est un résultat cohérent avec les données des différentes séries citées
précédemment.
Des études notamment celle de Saleum [110], de Makini et de Mssedi en
Tunisie [112,113], retrouvent un chiffre proche. Ces résultats peuvent être
confirmés par les données de la littérature sur le myélome (ratio de 1.4) [123], et
sur la MGW [124].
Il est à souligner toutefois que notre résultat soit un peu plus élevé
comparativement aux autres études citées, cela pourrait s’expliquer par le fait
que les patients recrutés sont majoritairement militaires, donc de sexe masculin.
Enfin si l’on s’attache à observer plus particulièrement la répartition chez les
plus de 80 ans, on constate une prédominance féminine. Ce résultat est en
accord avec celui retrouvé par Kyle 2002 [96] et dans l’étude danoise [125].
Cela pourrait être attribué à l’espérance de vie plus grande des femmes.
2. Age
Dans la présente étude, l’âge moyen du diagnostic est de 60 ans avec un pic
de fréquence pour les tranches d’âge de 60 à 69 ans. Ce chiffre est en accord
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
143
avec l’étude tunisienne [112] et l’étude espagnole [126] qui présente une
moyenne d’âge autour de 62 ans.
En revanche il est intéressant de noter que d’autres études notamment françaises
[121,127] et nordiques menés en Hollande et en Islande [117,128] affichent une
moyenne d’âge plus élevée variant entre 69 et 71 ans. Seuls les patients de la
série de Blois [121] présentent un chiffre plus élevée à 79 ans.
D’un autre côté, la compilation des résultats de plusieurs études
européennes montre que la fréquence des Igm chez les sujets âgés en bonne
santé augmente avec l’âge [114].
Le graphique suivant représente par tranches d’âges, le pourcentage des IM
retrouvées dans 5 études, dont la nôtre.
(%)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
144
Graphique 13 : Répartition du nombre d’IM par âge, étude comparative
Pour toutes les séries représentées ici, la répartition en fonction de l’âge
suit un modèle similaire pseudo-pyramidal, centré autour de 60-69 ans ou de
70-79 ans. Le pic de fréquence, selon la tranche d’âge est différent d’une étude à
l’autre, situé entre 60 et 69 ans dans la série tunisienne [113] et la nôtre. Il est en
revanche retrouvé dans la tranche comprise entre 70 et 79 ans dans les autres
cohortes [110, 114, 127,129].
Tout cela permet de conclure que les IM sont majoritairement des
pathologies de la personne âgée : 53% de nos patients ont plus de 60 ans.
(ans)
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
145
A cela, quelques nuances peuvent être apportées en fonction du type de
l’IM. Selon les études, l’âge moyen varie entre 60 et 71 ans pour le myélome (à
peu près 60 ans dans la présente étude) et entre 63 et 68 ans pour le MGW
(65ans dans la présente étude).
De même, les données concernant les MGUS ne semblent pas différer
significativement des autres pathologies bien que la prévalence de ces affections
augmente avec l’âge. La moyenne d’âge décrite est de 67.9 ans dans l’étude de
Gregersen 2006 [125], de 72 ans dans l’étude de Kyle 2002 [96] et de 61 ans
dans la nôtre.
Globalement, les données de la littérature sur les principales IM,
concordent parfaitement avec nos résultats.
Enfin, si l’on s’intéresse aux patients les plus jeunes, on constate que la part
représentée par les moins de 40 ans reste relativement faible puisque l’on
dénombre à peine (12 cas). Néanmoins, ce chiffre n’est pas négligeable au vu
des résultats de Saleum [110] qui, en 1982, ne décrivait aucune IM en dessous
de 30 ans.
Ainsi l’augmentation de la part des patients jeunes serait probablement liée
à l’accroissement du nombre de demandes (tous âges confondus), et d’autre part,
à l’amélioration des techniques d’électrophorèse, plutôt qu’à une augmentation
réelle du nombre des IMM chez les sujets jeunes.
B. Signes révélateurs
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
146
Les signes révélateurs sont divers et variés. Il peut s’agir d’un examen
biologique de routine pratiqué en raison d’une AEG, hypercalcémie, hyper
protidémie.
Dans d’autres cas ce sont des signes cliniques qui peuvent constituer des
circonstances de découverte : syndrome anémique, syndrome douloureux...
Parfois l’hémopathie est révélée au stade de complications (infections, IR,
fractures pathologiques, compression médullaire, manifestation viscérale d’une
amylose, …)
Dans la présente étude, les douleurs osseuses sont majoritaires au cours des
IMM particulièrement dans le MM. Selon les données de la littérature, les
manifestations osseuses cliniques sont très fréquemment révélatrices du MM.
Elles sont présentes dans le diagnostic d’environs 70% des cas et intéressent
surtout le squelette axial (rachis, côtes, bassin).
L’atteinte osseuse est liée à l’augmentation de la résorption osseuse
ostéolytique, le plus souvent associée à un découplage entre formation et
résorption. Des lymphokines activant les ostéoclastes tels l’interleukine-1β,
l’interleukine-6 ou le TNF (tumor necrosis factor) produit par les plasmocytes
ou leur microenvironnement, sont impliqués dans cette symptomatologie [130].
Les anomalies biologiques (hypercalcémie, VS accélérée, anomalie de la
NFS) représentent dans notre série une circonstance de découverte dans 8.4%
des cas d’IM avec une prédominance au cours des IMM.
L’hypercalcémie décrite dans le MM est un reflet de la résorption
ostéoclastique. Elle représente un élément de gravité, et risque d’entrainer une
détérioration rapide de la fonction rénale. [52]
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
147
La VS est souvent très augmentée (>100 mm à la 1ière
h). Cet élément doit
faire évoquer chez un sujet âgé, hors contexte infectieux ou inflammatoire avéré,
le diagnostic du MM tout au moins d’IMM et faire compléter le bilan en ce sens.
Une VS accélérée peut également se voir au cours d’une MGUS, mais ce terme
de MGUS, ne peut être retenu qu’après exclusion d’une pathologie lymphoïde
détectable sous-jacente. Parfois la VS est peu augmentée voire normale, c’est le
cas des MCL, MNE ou lorsque l’Igm précipite à basse température
(cryoglobuline). Cette caractéristique est la conséquence de la faible
concentration sérique, en chaînes légères (cas de MCL) et de
l’hypoglobulinémie globale, souvent de règle. Un syndrome inflammatoire
associé peut mettre en défaut cette observation (VS augmentée) [131].
L’hémogramme peut être également révélateur : anémie normochrome
normocytaire arégénérative, dans le MM, hématies en rouleaux sur le frottis
sanguin dans le cas d’une MGW. De nombreux mécanismes peuvent expliquer
l’anémie : la prolifération plasmocytaire médullaire, un déficit relatif en
érythropoïétine, une suppression de l’érythropoïèse par les cytokines ou un
phénomène d’hémodilution [52].
Quant à l’IR, représentant prés de 6.1% de circonstances de découverte au
cours d’IM notamment le MM du présent travail, elle serait multifactorielle. Elle
correspond le plus souvent à une néphropathie tubulo-interstitielle liée au dépôt
des chaînes légères. Il peut aussi s’agir de la conséquence d’une hypercalcémie.
[131]. Elle est appréciée dans la classification de Durie et Salmon [60].
Elle est souvent majorée par divers facteurs comme la déshydratation ou les
infections [53].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
148
C. Pathologies associées aux MGUS
Les MGUS sont révélées au moment de la prise en charge des pathologies
évolutives pour lesquelles, les patients sont admis à l’hôpital.
Il s’agit dans notre cohorte essentiellement des maladies rhumatologiques, IR,
affections hépatobiliaires et diabète qui représentent prés de 50% des cas. Cela
semble vérifié dans la littérature [4].
III. EXPLORATIONS BIOCHIMIQUES A. Protidémie
Le taux moyen des protides sériques variant entre 37 et 149 g/l au cours des
IMM de la présente cohorte (augmenté dans 41% des cas et diminué dans 15%
des cas) permet de souligner l’intérêt voire la nécessitée de le compléter par une
électrophorèse et une IF dans les deux cas de figures.
L’hyperprotidémie objectivée, est en rapport avec l’augmentation de la
masse protéique totale circulante due à l’Igm.
L’hypoprotidémie paradoxale décrite dans les MCL, les MNE ou MNS
serait liée à la diminution de la synthèse des Ig polyclonales et de l’albumine
[55, 4].
Dans le groupe de MGUS, la protidémie moyenne est retrouvée normale
dans 90% des cas. Elle montre une différence statiquement significative avec les
chiffres retrouvés dans les IMM. Il s’agit d’un des critères différentiels de
diagnostic biochimique entre les IMM et les MGUS [4].
Néanmoins, dans 44% des cas d’IMM, la protidémie normale ne permet pas
d’exclure le diagnostic d’une IMM.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
149
B. EP sérique
Examen très souvent systématique, l’EP sérique permet une meilleure
séparation des globulines. Une IM est habituellement révélée à l’EP par la
présence d’une bande étroite objectivée sur le tracé électrophorétique par un pic
pointu homogène d’allure monoclonale. Cette découverte orientera les
investigations nécessaires.
Dans la série étudiée, l’EP s’est révélée positive (montrant un pic
monoclonal) dans 86% des cas. Le pic objectivé était principalement situé au
niveau de la zone des γ-globulines (82% cas), moins souvent dans la zone des β-
globulines (17% des cas).
L’EP n’a pas montré de pic dans 29 cas d’IMM (13.5%) dont 28 étaient
associés à une hypogammaglobulinémie. Cette dernière constitue un excellent
signe d’appel, permettant de suspecter le MCL, le MNE, le MNS ou même le
myélome à IgD ou à IgE. Tous les cas enregistrés, appartiennent au groupe des
IMM, représentés par des MCL, les MNS, les MNE, un syndrome de POEMS et
un cas de leucémie à plasmocytes.
Ceci témoigne de la sensibilité insuffisante de cet examen, qui ne permet pas
d’exclure une IM. Ce constat a été vérifié par d’autres travaux [132, 113].
L’électrophorèse des protéines réalisée sur agarose ou sur Capillaire représente
une technique performante, certes pour la détection des IM à Ig complètes, mais
demeure insuffisante dans les autres situations.
Si on prend le cas des MM, pathologie de loin la plus fréquente des IMM,
l’examen électrophorétique permet de détecter le pic monoclonal dans 75% des
cas selon les données de la littérature [133].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
150
Dans les autres cas, le plasmocyte n’excrète pas son Ig. L’aspect de l’EP
est celui d’une hypogammaglobulinémie majeure. Exceptionnellement, il s’agit
d’un vrai myélome non secrétant parfois, c’est un myélome secrétant mais non
excrétant. Le plus souvent, il s’agit d’un myélome n’excrétant que les chaines
légères. Le plasmocyte pathologique n’est alors pas capable de combiner
chaînes lourdes et chaînes légères : la chaînes légère est libérée dans les urines,
constituant la PBJ qui expose au risque d’insuffisance rénale [133].
Dans la série étudiée, le taux du composant monoclonal évalué par
électrophorèse oscillait entre 7 et 114g/l dans les IMM, intégrant les cas
extrêmes d’hypo et d’hypergammaglobulinémie. Ces valeurs étaient
significativement plus élevées par rapport aux MGUS. D’ailleurs, un taux faible
de l’Igm représente également un des critères différentiels de diagnostic
biologique entre les IMM et les MGUS.
Seule l’électrophorèse, permet en règle générale, lorsque le pic est bien
individualisé, de quantifier de façon fiable une Igm après balayage
densitométrique et intégration. Elle permet aussi d’apprécier l’importance des Ig
polyclonales résiduelles : un pic dans la vallée, signifie une répression de
synthèse des Ig polyclonales normales, un pic dans la colline signifie l’absence
de cette répression. Dans le premier cas, il existe une réelle
hypogammaglobulinemie fonctionnelle. Et on comprend dés lors un type de
complication fréquent dans le myélome : les infections [133].
C. Immunotypage
1. Répartition selon la classe d’Ig
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
151
Concernant, la distribution isotypique dans le groupe d’IM d’une manière
générale, le type IgG est prédominant suivi des IgA, des CLL et des IgM.
La place prépondérante qu’occupent les IgG dans notre série est retrouvée
également dans les grandes séries internationales où leur proportion varie de
43% à 65% (tableauXIII).
Les IgA occupent la deuxième place dans notre série avec prés de 14% des
cas, ce résultat est trouvé dans d’autres travaux [134, 135, 112, 113, 128,111].
Alors que dans la plupart des séries internationales, ce sont les IgM qui occupent
la seconde place avec un pourcentage allant de 21% à 32% (tableau XXIII).
Ces différences peuvent, en partie, être expliquées par la forte prévalence
de la macroglobulinémie de Waldenström en Europe de l’ouest par rapport au
bassin méditerranéen (tableau XXII).
D’autres facteurs génétiques et environnementaux non encore parfaitement
connus devraient intervenir [136]
La dernière caractéristique que l’on peut relever dans notre distribution par
type d’Igm, concerne le pourcentage de CLL qui s’élève à 14%. Alors que dans
les séries internationales (tableau XXIII), la fréquence de ce type d’IM va de
2.7% à 9.8%, ce qui témoigne de la forte prévalence du MCL dans notre série et
les séries tunisiennes [112, 113]. Dans l’étude marocaine menée en 2007 [111],
la fréquence retrouvée est relativement diminuée de moitié par rapport à la
nôtre. Cette constatation est peut être due en partie au terme utilisé, mais aussi
probablement à la démarché diagnostique adoptée au laboratoire.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
152
En effet, dans la plupart des études, un amalgame est fait entre CLL
sériques et PBJ. Le plus souvent, le pourcentage communiqué concerne
uniquement les CLL détectées dans les sérums des malades.
Par ailleurs, au laboratoire de biochimie de l’HMIMV de Rabat, la démarche
diagnostique adoptée devant une hypoprotidémie avec ou sans
hypogammaglobulinémie, consiste à pratiquer un immunotypage, ce qui
augmente la probabilité de détecter des CLL surtout en l’absence de
renseignements cliniques.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
153
Tableau XXIII : Répartition isotypique des IM selon la présente étude et les
séries de littérature.
n= nombre total des cas dans la série.
Type d’Ig
Séries (%)
IgG
IgA IgM κ ou λ biclonales IgD Chaînes
lourdes
Ameis [134] 1976
USA n=1242 58.4 14.7 13.0 9.8 2.5 1.0
Hurez [135] 1985
Brest n=4193 46.9 12.4 31.6 4.6 4.2 0.3
Makini [112] 1990
Tunis n=198 47. 7 15.3 3.5 13.2 / 3.1 17.2
Giraldo [126] 1994
Espagne n=1203 63.3 17.8 9.5 5.3 3.8 / /
Ong [117] 1997
Hollande n=1275 64.8 11 21.2 7 11 <1 /
HM.O [128] 2002
Islande n=614 55 13 32 / / / /
Mseddi [113] 2003
Sfax 51.7 20.8 8.7 13.6 2.1 1 2.1
Decaux [121] 2007
Rennes n=1051 42.8 8.9 31.9 6.6 9.8 / /
Decaux [121] 2007
Blois n=1282 59.7 11.8 25.7 2.7 / 0.2 /
Etude Rabat [111]
2007 n=310 58.4 21.29 10 7.75 1.28 1.28 /
Notre étude 2008
Rabat n=214 56 14 12 14 2 / /
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
154
2. Répartition selon le type de chaines légères
En ce qui concerne le type de chaines légères, le rapport κ/λ est, dans
notre série, plus élevé pour les IgG et les IgM que pour les IgA. Ceci concorde
avec les données de la littérature [137 et 113].
D’ailleurs physiologiquement, les chaînes κ sont synthétisées en excès par
rapport aux chaînes λ, le ratio κ/λ est proche de 2. Il parait donc tout à fait
cohérent de retrouver une telle proportion au sein des IM.
3. Répartition selon la zone de migration à l’EP
Les résultats de cette répartition concordent avec les données de la
littérature qui confirment la migration privilégiée des IgG et des IgM dans la
zone des γ-globulines et des IgA dans la zone des β-globulines [4].
4. L’EPP comparée à l’IF
La performance de l’électrophorèse pour la détection des Igm est soulignée
dans plusieurs études, y compris la nôtre (100% de positivité en cas d’Igm à Ig
complète). Mais sa faible sensibilité (88%), selon notre étude, demeure
insuffisante dans la pratique clinique et ne permet pas d’exclure une IM.
Les faux négatifs sont représentés par les MCL, les MNS et les MNE [132].
D. Dosage pondéral des Ig
1. Taux d’Igm et d’Ig polyclonales
Les résultats du dosage de l’Igm, permettent de retenir deux types de
profils anormaux :
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
155
- Profil très évocateur de MM à IgA ou à IgG caractérisé par une
augmentation respective du taux de l’Igm A ou de l’IgG,
- Un autre orientant vers la MGW, LLC ou lymphome et où le taux de
l’IgM est retrouvé augmenté.
Le taux moyen de l’Igm est nettement plus élevé et de façon statiquement très
significative dans les IMM et particulièrement le myélome que dans les MGUS.
L’augmentation du taux moyen dans les MGUS, tient au fait que les résultats se
trouvent majorés par le cumul des Ig polyclonales de même classe, lors du
dosage de l’Igm.
Par opposition aux MGUS, où les Ig polyclonales demeurent à un taux normal,
une baisse d’au moins une classe des Ig polyclonales prédomine dans les MM
de notre série. Un résultat similaire est objectivé dans d’autres travaux (série de
Mssedi) [113].
Le dosage pondéral des Ig a été intégré avec l’électrophorèse, le rapport κ/λ
dans la démarche diagnostique de certains laboratoires pour limiter partiellement
le nombre d’IF [132]. Néanmoins, cet examen semble entaché, de façon quasi-
constante d’une erreur par excès. Ceci en raison d’un excès d’Ag dans le sérum
par rapport à la fraction d’Ac lui correspondant dans l’immun sérum du système
du dosage utilisé. En effet, les techniques de dosage des Ig ne distinguent pas
l’Igm des Ig polyclonales de même classe. De ce fait, quand l’Ig est bien
individualisée, la quantification par électrophorèse est la seule méthode
d’évaluation valable, ce qui n’est bien sûr pas le cas pour les Ig polyclonales,
pour lesquelles, le dosage immunochimique reste la meilleure technique [4].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
156
2. Le rapport κ/λ
Utilisés depuis 1986, les dosages des chaines légères κ et λ libres et liées,
permettent de détecter la présence des CLL si le rapport κ/λ est perturbé et
aident au typage d’une Igm (en complément de dosage pondéral des Ig G, A, M)
si celle-ci est en quantité importante.
Dans le présent travail, le rapport κ/λ parait très sensible pour la détection
des IM (99% des cas). En comparaison, Burnat [138] détecte 87% des Igm par le
rapport κ/λ sur une série de 386 Igm.
Dans l’étude de Peronnet, la sensibilité du rapport κ/λ est de 76% sur
l’ensemble des IF positives. Selon cette même étude, le rapport κ/λ associé à
l’hypogammaglobulinémie, constitue un examen complémentaire bien utile
pour orienter vers le diagnostic de MCL. [132].
E. Protéinurie de Bence Jones
La PBJ formée de CLL à différents états de polymérisation, est connue
depuis 1847 date à laquelle Henris Bence Jones l’a décrite la première fois
[138].
La recherche de cette protéinurie fait partie de la démarche diagnostique
d’une IM, particulièrement dans le MCL car, elle est généralement positive et
reste un des moyens de détection les plus simples.
Rappelons que les CLL κ sont présentes dans le sérum sous forme de
monomères et sont filtrées par le glomérule rénal plus vite que les CLL λ qui
circulent sous forme de dimères ou de tétramères. Ce métabolisme explique que
la concentration sérique des CLL λ soit supérieure à celle des CLL κ, alors que
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
157
c’est l’inverse dans l’urine. Physiologiquement, on ne retrouve pas de CLL dans
l’urine puisque près de 99% sont réabsorbées par le tube proximal. En revanche
dans les IMM, elles sont synthétisées en excès, s’accumulent au niveau sérique
et commencent à être éliminées dans l’urine lorsque le seuil de réabsorption est
dépassé, ce qui constitue la PBJ [4].
Le biologiste doit être averti que la méthode de détection, à l’aide de
bandelettes urinaires au bleu de tétrabromophénol, est généralement négative,
seule la présence concomitante d’albumine, témoin d’une altération rénale,
favorise la positivité de cette réaction. Il en résulte un résultat faussement
négatif [4,138], comme nous l’avons mentionné dans la partie théorique. Ainsi
dans la série de Stone [139], 28% des recherches à la bandelette sont négatives.
Dans notre cohorte, la PBJ détectée par technique d’IF s’est révélée
positive dans presque de 50% des cas d’IMM et seulement 2.4% de MGUS.
Cette différence de répartition entre les deux groupes étiologiques est
statistiquement très significative.
Selon les données de la littérature, la PBJ est présente dans 2/3 des cas de
myélome, ce qui explique la fréquence de l’atteinte rénale dans ce type d’IMM.
Elle est cependant moins souvent retrouvée dans la MGW ou du moins présente
à un taux faible [4].
Dans les MGUS, elle est retrouvée chez 5 à 10% des patients, mais elle est
rarement inferieure à 1g/l, ce qui constitue d’ailleurs l’un des critères
diagnostiques de la maladie. Son augmentation progressive est un argument
essentiel contre le diagnostic de MGUS [92].
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
158
F. Recherche et typage d’une éventuelle
cryoglobulinémie
Dans la pratique clinique quotidienne de l’HMIMV, les prescriptions de
demandes de recherche de cryoglobulines sont relativement récentes (fin 2002)
et souvent peu courantes. Ceci explique le faible nombre des cas positifs
enregistrés (7 : 2type I/ 5type II).
Rappelons ici qu’une cryoglobuline est une Ig qui a la propriété de
précipiter à froid et de se dissoudre à 37 °C. Son étude immunochimique permet
d'en reconnaître trois types, selon Brouet [41], que nous avons déjà définis dans
la partie théorique.
Sa recherche peut être motivée par l'apparition de signes biologiques
d'orientation non spécifiques: vitesse de sédimentation fluctuante, diminution
des fractions de la voie classique du complément, auto-agglutination des
hématies sur lame et modifications de l'électrophorèse des protéines sériques
(soit hypergammaglobulinémie polyclonale, soit immunoglobuline
monoclonale, soit aspect d'hypogammaglobulinémie).
Les signes cliniques des cryoglobulines varient depuis des formes
asymptomatiques jusqu'à des formes graves. Parmi les manifestations cliniques
accompagnant une cryoglobulinémie, on distingue: les manifestations cutanées
(purpura vasculaire pétéchial), les atteintes vasomotrices (syndrome de
Raynaud...) et les manifestations neurologiques (polynévrites, neuropathies
périphériques...).
Chacun des types de la cryoglobuline est rattaché à un groupe d'étiologie
[140, 16]. Ainsi, les cryoglobulinémies détectées au cours des hémopathies
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
159
malignes comportent presque toujours un composant monoclonal (cryoglobuline
de type I ou II). Par ordre de fréquence, on distingue la macroglobulinémie de
Wadenström, le myélome multiple, la leucémie lymphoïde chronique et les
lymphomes non hodgkiniens (LMNH). L'isotype IgM est le composant
monoclonal le plus fréquemment retrouvé [140].
Les cryoglobulines associées aux maladies auto-immunes sont
habituellement mixtes (type II ou III). Il s'agit le plus souvent de lupus
érythémateux disséminé (LED) ou de syndrome de Gougerot-Sjogren. De
nombreuses cryoglobulinémies mixtes essentielles se sont révélées être des
cryoglobulinémies associées à des hépatites virales B ou C mais beaucoup plus
rarement A [141]. Mais, généralement, les maladies hépatiques (hépatites,
cirrhoses) et infectieuses (virales, bactériennes et parasitaires) s'accompagnent
essentiellement de cryoglobulinémies polyclonales (type III) [140, 15]. Parmi
les agents infectieux impliqués, le rôle du virus de l'hépatite C dans la
pathogénie des cryoglobulinémies mixtes est démontré [140]. En effet, 70 à 100
% des cryoglobulines de type III ont été associées au VHC [142, 143].
Par ailleurs, certains auteurs confirment l'étroite relation entre l'infection
par le VHC, les LMNH, la macroglobulinémie de Wadenstrom et les autres
gammapathies monoclonales [144,145]. La persistance virale dans le système
immunitaire pourrait être responsable d'une stimulation antigénique répétée à
l'origine de la prolifération ou de l'expansion clonale des lymphocytes B [146,
147]. Au cours de l'évolution, la cryoglobulinémie initialement polyclonale peut
se transformer en cryoglobuline oligoclonale [16, 148], suggérant une transition
entre une stimulation polyclonale des lymphocytes B vers l'émergence d'un
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
160
nombre limité de clones (stimulation oligoclonale), puis d'un clone prépondérant
(stimulation monoclonale) [148, 149].
IV. AUTRES PARAMETRES BIOLOGIQUES
Si la créatinémie est le plus souvent retrouvée normale au cours des
MGUS, constituant un des critères diagnostiques de cette pathologie [111], elle
se révèle fréquemment augmentée au cours de l’évolution d’une IMM. On
constate, en effet, une élévation de la créatinémie dans plus de 50% des cas de
MM et la déficience rénale est la seconde cause de décès chez ces patients [150].
Dans notre série, une insuffisance rénale est objectivée dans 38% des cas
(51/133) d’IMM, tous des cas de MM. L’atteinte rénale est fréquente au cours
de myélome, elle constitue une des complications les plus redoutées de cette
pathologie en raison de sa gravité et du mauvais pronostic ultérieur qu’elle
annonce, comme cela a été souligné.
L’existence d’une protéinurie glomérulaire reste l’indication de choix de la
ponction biopsie rénale (PBR) afin d’éliminer une amylose ou une maladie des
chaines légères. Dans les autres cas, l’indication et l’intérêt de cet examen
histologique est discutable, compte tenu de ses complications potentielles.
Des facteurs déclenchant l’IR au cours du MM doivent être recherchés et
constamment prévenus au cours de l’évolution de la maladie, il s’agit de
l’hypercalcémie, la déshydratation extracellulaire, ainsi que toutes les autres
causes de déshydratation comme la fièvre, la diarrhée, les diurétiques, …
[151,152].
L’infection des voies urinaires, les antibiotiques visant à la traiter, ainsi que
les examens d’imagerie utilisant des produits de contraste iodés (UIV, Scanner
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
161
avec injection) sont d’autres facteurs favorisants. Cela prouve le caractère
multifactoriel et complexe de l’atteinte rénale dans le MM [151, 131, 152, 52].
Concernant les résultats de la calcémie, une différence statistiquement
significative entre les deux groupes étiologiques est objectivée dans notre série.
Les valeurs normales retrouvées dans les MGUS, aussi bien dans notre cohorte
que dans la littérature, représente également un critère diagnostique de ce groupe
étiologique.
L’hypercalcémie retrouvée dans le groupe étiologique des IMM,
notamment au cours du MM, résulte de l’augmentation de la résorption osseuse.
Elle favorise l’IR en favorisant la déshydratation, une vasoconstriction et des
dépôts intra tubulaires du calcium [153].
Quant au dosage de la β2microglobuline sérique, sa place est justifiée
comme analyse complémentaire dans l’exploration d’une IM.
Son dosage est particulièrement utile en cas de déficience des marqueurs
classiques : MCL ou MNS [4].
L’augmentation de ce paramètre devra toujours être interprétée en fonction
de l’état rénal [4].
Son dosage associé à celui de l’albumine sérique a conduit à la construction
d’une classification pronostique internationale (ISS) .Cette classification permet
de séparer les patients en trois groupes de pronostic différents comme cela a été
précisé dans la partie théorique. Néanmoins, cette stratification pronostique
proposée en 2005 n’est pas encore utilisée partout et mérite d’être mieux validée
[154].
Le présent travail révèle un taux moyen de la β2microglobulinémie
statistiquement significativement plus élevé dans les IMM que dans les MGUS.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
162
Pour ce qui est du dosage de la CRP, nos résultats n’objectivent pas de
différence significative entre les IMM et les MGUS.
L’augmentation de ce paramètre n’étant pas spécifique des IMM, elle peut se
voir aussi dans les syndromes inflammatoires et infectieux.
La synthèse de la CRP au cours du myélome, en particulier, est stimulée
par l’Il6 (interleukine 6). La CRP est un bon critère d’efficacité thérapeutique et
surtout un indicateur sensible de rechute pour les myélomes mis en rémission
[4].
V. EVALUATION PRONOSTIQUE
L’évaluation pronostique dans le cadre de la prise en charge des MM est
incontournable, les indications thérapeutiques en dépendent.
Elle a connu récemment une évolution dans la manière et les méthodes.
Outre, les paramètres biologiques préalablement cités (β2-microglobuline,
albumine), la cytogénétique rêvait un caractère pronostic capital. Le recours à
des techniques de cytogénétique moléculaire comme la FISH est souhaitable
sinon indispensable.
Les principales anomalies cytogénétiques reliées à un pronostic
défavorable sont la translocation t(4,14), la délétion 17(17p13) et la
translocation t(14,16). En couplant ces anomalies avec le dosage de la
β2microglobuline, il est possible de construire un modèle pronostique très
performant [155]. A l’avenir, il est probable que des techniques beaucoup plus
sophistiquées, comme les puces à ADN, permettront encore d’améliorer la
définition du pronostic des patients présentant un myélome [156, 157]. L’on se
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
163
demande si à l’avenir, il serait également possible de diagnostiquer précocement
ce type d’hémopathie afin d’améliorer son pronostic jusqu’ici redoutable.
VI. REPARTITION EN FONCTION DES
SERVICES PRESCRIPTEURS
Dans cette dernière partie de la discussion, nous saisissons l’occasion pour
aborder, plus en détail, certains contextes cliniques susceptibles d’être associés à
des anomalies monoclonales.
Nous pouvons simplement signaler que le pôle de médecine interne
regroupe les quatres services de médecine (A1, A2, B1et B2) et que jusqu'à
octobre 2006, le service d’Hématologie Clinique n’existait pas. Cela explique la
fréquence élevée de recrutement des IM dans les services de médecines internes.
Ces résultats sont le reflet d’un large éventail de patients et d’autant de
pathologies.
Le pourcentage de recrutement des IM dans les services d’hématologie
clinique n’est pris en compte que depuis octobre 2006, comme cela a été
souligné.
Le nombre des cas enregistrés dans le CRRF se justifie étant donné la
fréquence élevée de manifestations osseuse caractérisant les MM
particulièrement.
Le service de néphrologie représente environ 3% des demandes enregistrées
au laboratoire. Ce chiffre est sous-estimé car les prescriptions relevant de la
spécialité de néphrologie étaient pour la plupart comptabilisées dans le pôle de
médecine interne.
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
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164
Les conséquences cliniques directes des IM, notamment du MM justifient
ces prescriptions. En effet, les anomalies de la fonction rénale sont des
complications fréquentes dans les IMM.
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165
Limites de l’étude
Les IM : Etude épidémiologique, biochimique et étiologique d’une cohorte de
214cas.
166
L’absence de l’outil informatique au laboratoire a rendu difficile
l’exploitation des données. En effet, un important travail de leur regroupement
était nécessaire afin d’obtenir un seul et même tableau Excel plus facilement
exploitable et de retirer les doublants.
La recherche des informations manquantes pour un grand nombre de
patients, de même que la perte de certains dossiers anciens, nous a obligé de les
soustraire de la cohorte.
Pour toutes ces raisons, le nombre de patients répertoriés durant la période
d’étude nous semble sous estimé.
Enfin, Il faut rappeler la différence en terme de performance et de
sensibilité entre les techniques les plus anciennes (acétate de cellulose) et celles
dont nous disposons actuellement (gel d’agarose et électrophorèse capillaire).
L’amélioration analytique des techniques contribue sans doute au meilleur
dépistage et suivi des IM.
Par ailleurs, l’indisponibilité provisoire de certains réactifs au moment de
l’étude, explique que les résultats de certains paramètres biochimiques n’ont pu
être exploités ni discutés.
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167
CCoonncclluussiioonn
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214cas.
168
Les IM, groupe très hétérogène de maladies, représentent un problème
fréquent en pratique clinique.
Cette étude a été l’occasion d’exploiter des données biologiques,
épidémiologiques et étiologiques des IM, recueillies pendant une période de 9
ans écoulée, par le laboratoire de biochimie de l’HMIMV, et de les comparer
avec les résultats de nombreuses autres études menées dans le même cadre que
la nôtre.
Ainsi ce travail, mené sur une cohorte de 214 cas d’IM, nous a permis de
confirmer certaines particularités :
La forte prévalence des IM chez le sujet âgé avec une prédominance
masculine remarquable,
La prédominace de l’isotype IgG/κ dans les MM, pathologie de loin la
plus fréquente dans le groupe des IMM,
L’absence de pic monoclonal à l’électrophorèse des protides qui ne doit
nullement faire écarter le diagnostic d’une IM,
La nette augmentation du taux moyen de l’Ig m dans les IM malignes, en
particulier le myélome, comparativement aux MGUS.
Par rapport à la plupart des grandes séries internationales, notre série se
distingue par :
o La faible fréquence de la macroglobulinémie de Waldenström,
o La fréquence relativement élevé des MM à chaines légères,
o Le retard dans le diagnostic des IMM, particulièrement du MM,
expliquant la lourdeur de la prise en charge des patients.
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Par ailleurs, l’amélioration des techniques, allant de pair avec l’évolution
de la biologie, joue probablement un rôle prépondérant dans la mise en évidence
de profils diversifiés.
A la lumière de nos résultats, il serait intéressant de pouvoir compléter ce
travail, par une exploitation ultérieure davantage ciblée sur une IM précisée (le
MM par exemple) ou pourquoi pas le suivi de l’évolution des MGUS, états pré
néoplasiques.