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INTERVENIR SUR LES SOUFFRANCES AU TRAVAIL : ACTEURS ET ENJEUX DANS LA DURÉE Philippe Sarnin, Marc-Éric Bobillier-Chaumon, Bruno Cuvillier, Michèle Grosjean Groupe d'études de psychologie | « Bulletin de psychologie » 2012/3 Numéro 519 | pages 251 à 261 ISSN 0007-4403 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-bulletin-de-psychologie-2012-3-page-251.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Philippe Sarnin et al., « Intervenir sur les souffrances au travail : acteurs et enjeux dans la durée », Bulletin de psychologie 2012/3 (Numéro 519), p. 251-261. DOI 10.3917/bupsy.519.0251 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Groupe d'études de psychologie. © Groupe d'études de psychologie. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 78.200.17.20 - 05/09/2018 15h19. © Groupe d'études de psychologie Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 78.200.17.20 - 05/09/2018 15h19. © Groupe d'études de psychologie

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INTERVENIR SUR LES SOUFFRANCES AU TRAVAIL : ACTEURS ETENJEUX DANS LA DURÉEPhilippe Sarnin, Marc-Éric Bobillier-Chaumon, Bruno Cuvillier, Michèle Grosjean

Groupe d'études de psychologie | « Bulletin de psychologie »

2012/3 Numéro 519 | pages 251 à 261 ISSN 0007-4403

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-bulletin-de-psychologie-2012-3-page-251.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Philippe Sarnin et al., « Intervenir sur les souffrances au travail : acteurs et enjeuxdans la durée », Bulletin de psychologie 2012/3 (Numéro 519), p. 251-261.DOI 10.3917/bupsy.519.0251--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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Intervenir sur les souffrances au travail :acteurs et enjeux dans la durée

SARNIN Philippe*

BOBILLIER-CHAUMON Marc-Éric*

CUVILLIER Bruno*

GROSJEAN Michèle**

La santé psychique au travail fait l’objet, depuisplusieurs années, de débats entre chercheurs,porteurs de théories sensiblement différentes, ausein de la psychologie du travail. D’une part, desétudes à l’échelle de l’organisation essaient decaractériser et d’expliquer, à partir de donnéesquantitatives, les facteurs qui conduisent à diffé-rentes formes de souffrance chez les travailleurs(stress, anxiété, dépression, suicide). L’organisa-tion du travail imposée aux salariés apparaît alorscomme un déterminant essentiel, mais avec desvariations liées aux caractéristiques individuelles.D’autre part, des études centrées sur l’activité réellede petits groupes de travailleurs, tout en constatant,également, les incidences de l’organisation dutravail, essaient de dégager les éléments quipeuvent redonner, aux collectifs de travail, dupouvoir d’agir sur cette organisation. Cependant,ces deux perspectives, psychologie des organisa-tions et clinique de l’activité, semblent exclusivesl’une de l’autre, à la fois sur le plan des méthodes(auto-questionnaires, analyses quantitatives d’uncôté ; observations de l’activité réelle et analysesplus qualitatives, de l’autre côté) et, sur le planthéorique (conception du travailleur comme un êtresubissant et réagissant à divers facteurs ou concep-tion du travailleur comme créateur, être en déve-loppement). Ajoutée à cela, la notion de « risquepsychosocial », qui correspond plutôt à une pers-pective épidémiologique ou calquée sur les démar-ches de prévention des risques chimiques ou physi-ques et est venue perturber l’appréhension dessouffrances au travail, en introduisant des pratiquessuccinctes « d’évaluation des risques » et unemodélisation de l’action préventive, sous les termesde « prévention tertiaire » (prise en charge, par despsychologues, des personnes souffrantes),« prévention secondaire » (renforcement par laformation des capacités des individus à faire face)et « prévention primaire » (action sur les facteursde « risque »).

Nous proposons dans cet article, à partir de nosexpériences de recherche-intervention en

entreprise, d’essayer de clarifier les rapports entreces différentes conceptions et de redéfinir les dispo-sitifs de prévention des différentes formes de souf-france au travail.

À partir d’une première intervention réalisée, en2001, avec une grande entreprise de la mécanique,qui venait d’être acquise par un groupe internationaldu même secteur, nous 1 avons pu mettre en placeune collaboration régulière avec les services auto-nomes de santé au travail de cette entreprise. Cettecollaboration, qui continue actuellement, a permis deréaliser plusieurs recherches approfondies, à based’observations et d’enquêtes, sur différents thèmes :perception du rachat de l’entreprise et conséquencesquant à la souffrance ; charge de travail et activitésdes ingénieurs de bureaux d’études ; difficultés decommunication dans les équipes de travail semi-autonomes ; intégration des technologies de l’infor-mation et de la communication par les salariés ; miseen place d’un observatoire collectif et d’outils dediagnostic pour le repérage des situations indivi-duelles de souffrance psychologique.

À partir de cette série de travaux, des démarchesmises en œuvre et des résultats qui en sont issus,à la fois, du côté de la recherche, mais aussi ducôté des pratiques de l’entreprise, nous souhaitonsanalyser plus particulièrement les aspects suivants :

– la prise en compte progressive, par les acteursde l’entreprise, des dimensions psychosociales dutravail, depuis une situation de crise, d’abord,jusqu’à l’intégration dans les politiques et pratiques

* Institut de psychologie, Laboratoire GRePS, Univer-sité de Lyon.

** Institut de psychologie, Laboratoire ICAR, Univer-sité de Lyon.

Correspondance : Philippe Sarnin, Institut de psycho-logie, Université de Lyon, 69676 Bron cedex.

<[email protected]>1. Les auteurs de cet article, avec l’aide d’étudiants en

master psychologie du travail et des organisations. Desconventions de recherche ainsi que l’accueil de stagiairesont permis cette collaboration avec l’entreprise.

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quotidiennes : les moments-clés de cette évolution,les enjeux qui peuvent bloquer ce passage et ceuxqui le favorisent, le rôle et la place des différentsacteurs internes, le poids des facteurs extérieurs ;

– la place des interventions psychosociologi-ques, par rapport aux acteurs internes (CHSCT,Services de santé au travail) et la constructiond’une coopération, fondée sur des échanges réci-proques. Les réflexions développées ont pu égale-ment susciter, de façon plus autonome, des chan-gements et des innovations dans les pratiques deces acteurs, dont nous examinerons les formes ;

– les relations plus complexes rencontrées, parrapport aux gestionnaires, en particulier ceuxchargés des « ressources humaines », par rapport àleur compréhension de l’activité de travail, deseffets psychiques de leurs indicateurs de gestion etde leur analyse des « risques » psychosociaux.

L’objectif est de contribuer à mieux définir, dansles pratiques d’intervention, les repères qui permet-tent d’éviter les deux écueils de la dénonciationcontemplative et de l’adhésion sans critique, parrapport aux pratiques des entreprises. La positionadoptée, dès le départ, n’est pas celle de l’expert,ni celle du consultant. Bien avant que les questionssur les « risques psychosociaux » se posent dansl’espace médiatique, il s’agissait de travailler avecles acteurs de l’entreprise, pour rendre visibles lesconséquences psychologiques des réorganisationsen cours pour les salariés et de contribuer àredonner, au travail et au rapport des salariés à cetravail, une place dans les réflexions et les démar-ches engagées dans l’entreprise. Au-delà de laconscience du chercheur en psychologie du travailet des organisations, quant aux enjeux psychologi-ques du travail, se pose, en effet, la question dupartage de ces préoccupations avec les acteurschargés de prescrire les tâches, d’organiser letravail, afin qu’ils les prennent mieux en comptedans leurs choix organisationnels.

INTERVENIR SUR LES SOUFFRANCESAU TRAVAIL

La littérature scientifique, relative aux pratiquesd’intervention sur les questions de stress, de« risques psychosociaux » (pour une synthèse, voirRouat, 2010), tend à mettre en avant un certainnombre de conditions pour assurer l’efficacité dece type d’interventions, lorsqu’elles portent direc-tement sur l’organisation du travail : un engage-ment fort de la direction ; la participation activedes acteurs ; un groupe stable, pour soutenir l’inter-vention ; un diagnostic quantifié de la situation ; lamise en œuvre d’actions planifiées ; l’évaluation etle suivi de ces actions (Saint-Arnaud, Gignac,Gourdeau, Pelletier, Vézina, 2010, p. 3). Lamon-tagne, Keegel, Louie, Ostry et Landsbergis (2007)

montrent, dans une méta-analyse de la littératuresur l’évaluation des pratiques d’intervention, queles interventions systémiques, à l’échelle de l’orga-nisation, sont d’autant plus efficaces qu’elles visentà transformer le travail et pas seulement à faciliterl’adaptation des individus à des conditions detravail dégradées. Pour autant, les travaux domi-nants, en nombre, traitent surtout des interventionscentrées sur le renforcement des capacités d’adap-tation des salariés, plutôt que sur des modificationsà l’échelle de l’organisation. Giga Cooper etFaragher (2003) ont montré que les programmesde relaxation, les interventions, fondées sur lesthérapies cognitivo-comportementales, les forma-tions au stress ou les programmes d’aide auxemployés, étaient beaucoup plus fréquents que lesinterventions sur l’organisation et le travail.Depuis, et face à la faible efficacité des pratiquescentrées sur les individus, les interventions organi-sationnelles sont plus nombreuses (Lamontagne etcoll., 2007), mais leurs résultats ne sont pastoujours à la hauteur des objectifs de départ(Hansez, Bertrand, Barbier, 2009). Selon Cox,Taris et Nielsen (2010, p. 217), la multiplicationdes démarches, pour renforcer le bien-être destravailleurs, ne permet pas de clarifier la question.Le décalage de pertinence, entre les dispositifssemi-expérimentaux des chercheurs et les réalitésdes organisations, est également mentionné par lesmêmes auteurs. Karnas et Hellemans (2002)montrent les limites des conceptions psycho-orga-nisationnelles et en appellent, ainsi, à des analysesdu stress plus « concrètes » (p. 188).

La lecture des travaux internationaux sur lespratiques d’intervention, visant à diminuer le stressdes travailleurs ou à améliorer le bien-être autravail (Aucouturier, 2010), nous montre, en effet,deux écueils :

– l’absence fréquente de prise en compte del’activité réelle des travailleurs. Les dispositifs misen place reposent sur des théorisations généralesdes travailleurs (engagement, motivation, stratégiesde faire face, voire personnalité), mais sont trèsrarement élaborés à partir d’une analyse du travailde ceux-ci ;

– malgré le rôle reconnu du management, del’organisation globale de l’entreprise, les actions,plus centrées sur l’encadrement (du premierniveau jusqu’au « top management »), restent,également, peu fréquentes, comme si les margesde manœuvre des managers étaient forcémentlimitées (par la « mondialisation », la « concur-rence », etc.), alors que c’est à ce niveau qu’ellessont les plus nombreuses comme le montrent, parexemple, toutes les études utilisant le modèle deKarasek, où l’encadrement apparaît comme lacatégorie ayant le plus de latitude de décision surson activité.

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En conséquence, plusieurs questions nous appa-raissent devoir être documentées. Commentconstruire, avec les acteurs du management, desreprésentations, qui intègrent l’activité des opéra-teurs (Lhuilier, 2009) ? Comment intervenir etdévelopper l’action sur le travail à l’échelle del’organisation et pas seulement dans tel ou telatelier ou service ? Comment aider les acteurs àraisonner en termes de « ressources », plutôt quede « risques » (Clot, 2010, p. 102) ?

Nous souhaitons ainsi, à partir d’un retourréflexif sur les démarches construites progressive-ment avec les acteurs, apporter quelques élémentsde réponse fondés sur les découvertes, mais, aussi,les erreurs d’un cheminement guidé par larecherche d’une meilleure compréhension desconditions par lesquelles une organisation peut« mûrir » (voir Rouat, 2010) vers la prise encompte, à tous les niveaux, des possibles souf-frances liées au travail.

DIX ANNÉES D’INTERVENTIONS

Cette entreprise française, qui comprend 14 000salariés dont 11 000 en France, a été achetée en 2001par une entreprise scandinave du même secteurd’activités. Dans les mois qui ont suivi ce rachat, lesmédecins du travail ont observé, lors des visitesmédicales obligatoires, que de plus en plus de sala-riés se trouvaient en difficulté dans leur travail : unepression importante, une charge de travail croissante,des interrogations sur l’avenir les préoccupaient à unpoint tel que nombre d’entre eux « craquaient »,s’effondraient en pleurs dans le cabinet médical. Enaccord avec le comité d’hygiène, de sécurité et desconditions de travail (CHSCT), l’équipe médicale aproposé qu’une étude soit conduite afin d’évaluerplus précisément l’ampleur du phénomène au niveaude l’établissement regroupant les fonctions tertiairesde l’entreprise (commercial, bureaux d’études,finances, etc.). La première demande, exprimée parles médecins et discutée avec le CHSCT, qui a étéadressée à notre équipe universitaire correspondait àla volonté d’établir un état des lieux, à l’aide« d’instruments validés scientifiquement, du stress,de l’anxiété et de la dépression ». Nous avons rapi-dement transformé cette recherche d’expertise en unquestionnement en commun avec les médecins dutravail, le CHSCT et les responsables de l’établisse-ment sur les préoccupations de l’entreprise, l’enjeudu rachat et les inquiétudes et réactions des salariés.

Nous avons construit avec les services de santé autravail un dispositif de mesure, d’abord à partir d’uneenquête ponctuelle en 2001, puis sous la forme d’un« observatoire » permanent implanté en 2006 dansl’établissement tertiaire et généralisé, en 2008, àl’ensemble des établissements de l’entreprise situésen France. Ce dispositif d’observatoire permet, lors

des visites médicales et à partir du remplissage d’unquestionnaire sur un poste informatique, de recueilliren permanence des données sur la perception dessalariés pour différents indicateurs : stress, dépres-sion, anxiété, reconnaissance, conditions de travail,etc. tout en offrant un outil de diagnostic individuelutilisé par les médecins lors de la visite obligatoire.Pendant la même période, une série de recherchesplus précises a permis d’approcher la réalité dutravail à partir de questionnements issus soit deproblématiques repérées par les médecins soit dedemandes exprimées par des responsables deservices ou d’ateliers ou par les représentants dessalariés dans le cadre de leurs activités mutualistes.La prise en charge individuelle par les médecins lesamène également à faire évoluer les instrumentsutilisés pour les évaluations collectives, tandis queles outils de mesure de l’observatoire leur permettentde repérer des travailleurs en difficultés. Les deuxalimentent les réflexions des acteurs sur le travail etson organisation dans les équipes de travail.

Le tableau 1 synthétise les différentes opérationsconduites par l’équipe de chercheurs avec l’aided’étudiants, certaines à l’échelle de l’ensemble del’organisation, d’autres auprès de collectifs de travailparticuliers. Bien sûr, dans cette grande entreprise,d’autres actions ont été menées sans notre concours :un programme de formation ambitieux pour l’enca-drement et les représentants du personnel, des confé-rences, des pages dédiées aux conditions de travailet au stress sur le site intranet de l’entreprise, diversesinterventions d’ergonomes, de psychologues, etc. Unservice « santé et bien-être », rattaché à la directiondes ressources humaines, a, en effet, été créé dans lecadre d’une politique générale de la société scandi-nave qui a racheté l’entreprise.

Le groupe, qui constitue le noyau central de cestravaux, comprend la dizaine de médecins du travaildes différents établissements, la responsable duservice « santé et bien-être », qui se réunissent trèshabituellement, et les chercheurs. Les travaux de cegroupe font régulièrement l’objet de présentations etsont débattus avec les représentants du personnel(comités d’entreprise et CHSCT des différentsétablissements) et l’encadrement. Les actions plusponctuelles mobilisent les acteurs concernés.

Les méthodes mise en œuvre combinent l’utili-sation de différents instruments de recherche, enfonction du niveau de l’étude : questionnaires etéchelles pour les analyses au niveau de l’organisa-tion, entretiens, observations directes et « armées »(logiciels de suivi d’activité, grilles d’observations,enregistrements audiovisuels) de fonctionnementscollectifs ou d’activités. Les résultats obtenus surchaque chantier de recherche alimentent les autresétudes dans leurs questionnements, mais, aussi,pour faire évoluer les instruments utilisés. Il s’agitde jouer, à la fois, sur la triangulation des

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problématiques (local/global) et la triangulation desméthodes (par exemple, intégration dans le ques-tionnaire général de nouvelles questions issues deschantiers locaux) pour accroître la validité et larichesse des analyses et des propositions d’action.

LES DIFFÉRENTS « CHANTIERS »

Nous évoquerons, dans cette partie, quelqueséléments saillants, mis en évidence par les différentstravaux conduits dans l’entreprise. Le tableau 1résume les principales caractéristiques des études surlesquelles nous appuyons notre réflexion.

Étude Période Acteursenquêtés

Entretiensindividuels

Questionnaires Observationsdirectes

Première enquête suiteau rachat de l’entreprise,à la demande desmédecins du travail

2000-2001 Services tertiaires N = 21 N = 416Questions ad hocet échelle MSP

Étude à la demande duservice « achats »

2001-2002 Service achats« global sourcing »

N = 6 N = 38 – Six salariésobservés pendantdeux jours chacun– Deux réunions detravail vidéoscopées

Étude sur la charge detravail des ingénieursd’études

2003-2004 Ingénieurs d’unbureau d’études

N = 12 – Dix ingénieursobservés pendant unejournée chacun– Observations desréunions de service

Première phase de testde l’observatoire dustress

À partir de2006 jusqu’àdébut 2008

Services tertiaires (entretiens pourmettre au point ledispositif)

N = 278

Échelles MSP, Cohen,HAD, Karasek etquestions spécifiques

Étude surl’usage desmails par lessalariés

2006-2007 Bureau d’études« électricité-électronique »

N = 18 – Auto-observationsdes mails par 18 salariés– Cinq observationsavec verbalisationssimultanées lors dutraitement des mails

Étude de lacommunication dans leséquipessemi-autonomes deproduction

2007-2008 Équipessemi-autonomesde travail enfabrication

N = 46 – Observation desrelèves– Analyse des traces

Deuxième phase del’observatoire du stress :généralisation à toutel’entreprise

À partirde 2008

Ensemble dessalariés del’entreprise

(entretiens pourmettre au point ledispositif)

N = 7 500 fin 2010Échelles : Cohen,HAD, Karasek,Siegrist et questionsspécifiques

Étude sur les problèmesposés par l’usage del’anglais dansl’entreprise

2009-2010 Bureau d’études« moteurs »

N = 18 Cinq salariés observéspendant une journéechacun

Étude sur lesconséquences duchômage technique delongue durée (à lademande de la mutuelledes salariés)

2010-2011 Ouvriers etemployés deprofuction

N = 23 N = 102Questionnairespécifique sur laperception duchômage partiel etles conséquencessur la vieprofessionnelle etla vie personnelle

Tableau 1. Principales caractéristiques des études effectuées.

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Le rachat de l’entreprise et la constructionsociale du stress

La première étude conduite reposait sur unesérie d’entretiens semi-directifs, qui ont permisla construction d’un questionnaire, diffuséauprès des salariés de l’établissement tertiaire.Combinant des échelles de mesure du stress(MSP 25 2 de Lemyre, Tessier, Fillion, 1990) etdes questions sur les préoccupations des salariés(rachat de l’entreprise, passage aux 35 heures),la charge de travail, les relations avec les collè-gues et la hiérarchie, les conditions de travail àaméliorer.

L’analyse a montré un phénomène remar-quable, lié au rachat de l’entreprise. L’échelle destress indiquait un niveau général élevé, quisemblait confirmer les hypothèses des médecins.Les interprétations, permises par les analysesstatistiques (Sarnin, 2003 ; Sarnin, Fernandez,Malaurie, 2006) et les entretiens avec les salariés,nous ont orientés vers l’idée d’une constructionsociale d’une perception excessive, peu connectéeà la réalité de ce rachat. En fait, devant l’absencede discours sur le devenir de l’organisation, de lapart de l’entreprise scandinave, et le sentimentd’avoir été abusé par des discours antérieurs dela direction, du type : « l’entreprise n’est pas àvendre », l’interprétation de la situation, répandueparmi les salariés, a été celle d’une compétitionentre les salariés français et ceux de l’entreprisescandinave qui fabriquent les mêmes produits.« Il faut qu’on soit meilleurs qu’eux sinon on vadisparaître » résume, assez bien, cette représen-tation. L’année qui a suivi le rachat, les résultatséconomiques de l’entreprise française ont étélargement meilleurs, par rapport aux objectifsinitiaux, mais aussi par rapport aux résultats del’année de l’entreprise scandinave. Cette dernière,dont la motivation des dirigeants n’était pas ladisparition de l’entreprise française, mais unepolitique d’expansion externe et de présence surles marchés mondiaux, n’a donc pas eu à regrettercet achat. La souffrance, ressentie par les salariés,était ainsi, en partie, générée par l’interprétationd’une situation de forte incertitude (Lancry,2007), ayant généré des exigences excessivesparmi les salariés.

Le travail d’articulation des acheteurs

Les tensions ressenties par les salariés, en suitedu rachat de l’entreprise, se sont particulièrementmanifestées chez les acheteurs. Le servicecomprend une dizaine de personnes, mais se situeau cœur des interactions entre les différentes unités

de production, les bureaux d’études, les fournis-seurs et l’entreprise scandinave (recherched’économies d’échelle). L’objectif d’une observa-tion du travail collectif et de l’analyse de l’activitédes acheteurs (Dupont, 2002) était de comprendrece travail d’articulation (Strauss, 1992) dans lecadre de projets complexes et très instables. Partouches progressives, ce travail d’articulation nesemblait plus pouvoir être piloté et maîtrisé par lessalariés, dont l’activité était structurée, essentielle-ment par des attracteurs cognitifs (objets, écrits,évènements qui influencent le cours d’action, voirLahlou, 2000).

La fragmentation du travail des ingénieurs debureau d’études

En observant 10 ingénieurs d’un bureaud’études, pendant des journées complètes (Sarnin,Balas-Broche, 2006), ce chantier a permis demettre en évidence la fragmentation des activitésde ces salariés, censés pouvoir dégager des tempsde réflexion suffisants pour travailler sur leursprojets. Les interruptions et la place grandissantedes outils de collaboration à distance (visiocon-férences, audioconférences, etc.) entraînent unecharge de travail très lourde. Bien qu’ils soientdes ingénieurs centrés sur des questions très tech-niques, l’essentiel de leurs activités s’apparente àdu management d’informations, de personnes, defournisseurs, de la « débrouille », avec des hori-zons temporels et des objectifs, qui se superpo-sent. Malgré une autonomie affirmée dans laconduite des projets, l’observation montre denombreuses dépendances et contraintes, qui leurlaissent le sentiment de ne pas faire du « bonboulot ».

Les débordements du courrier électronique

Bien que l’usage du courrier électronique soitdevenu, depuis quelques années, un élément essen-tiel du travail, les plaintes à son sujet ont conduità examiner de plus près cet usage (Sornet, 2007).Les observations réalisées ont relevé les stratégiesutilisées par les salariés pour gérer les flux de cour-riels, qui les conduisent à re-planifier régulièrementleur activité, mais, aussi, le fait qu’ils soientdevenus un vecteur de communication dans lescollectifs de travail et plus seulement un systèmede transmission d’information. L’ampleur desdébordements sur le hors-travail a conduit, ensuite,l’entreprise à élaborer, à partir de cette étude, quel-ques règles générales « opposables » (vis-à-visd’un supérieur ou d’un autre service), qui sont, avecle recul, effectivement mobilisées par les salariés :limitation des horaires d’envoi, meilleur ciblagedans la diffusion, éviter les demandes de réponseimmédiate, etc.

2. MSP 25 : Mesure du stress psychologique, échellede 25 items.

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Les équipes semi-autonomes et la surabon-dance d’informations

L’histoire de cette entreprise est marquée, à lafois, par une présence syndicale forte et par denombreuses expérimentations en matières d’orga-nisation et de conditions de travail. Ainsi, les unitésde production sont, depuis longtemps, organisées,à partir du modèle de l’équipe semi-autonome,développé par le courant sociotechnique avec,cependant, des différences importantes : si leséquipes sont relativement autonomes dans l’acti-vité, dans chaque équipe un chef existe, qui estprésenté comme un « manager ». Les équipesdisposent de salles de réunions et ont denombreuses informations sur leurs activités(production, qualité, conditions de travail, acci-dents, etc.). La question posée par les acteurs del’entreprise portait sur la communication entrechefs et équipes (Digonnet, 2008). En effet, malgréune volonté de la direction de favoriser leséchanges dans les collectifs de travail, de façon àce que les problèmes rencontrés dans l’activitésoient traités par l’équipe elle-même, il semblaitque les éléments d’information, fournis avec abon-dance à ces équipes et affichés en salle de réunion,ne servaient pas à faciliter ces échanges. Les obser-vations des réunions, l’analyse des informationstransmises et discutées indiquaient, avec des varia-tions selon les équipes, des échanges créatifs maispeu d’utilisation de l’information fournie, ainsiqu’une charge de travail importante pour les chefs,liée à la fabrication de ces informations, au détri-ment des échanges directs avec les ouvriers.

L’usage de l’anglais et la reconnaissanceprofessionnelle

En raison du rachat par une entreprise scandi-nave, l’usage de l’anglais a été généralisé dans leséchanges internes, particulièrement pour l’encadre-ment. Ce sont, aussi, les outils de travail, commeles logiciels techniques, les rapports, les dossierstechniques, notes de service, informations géné-rales, qui font de moins en moins l’objet de traduc-tions. Un programme important de formation àl’anglais est proposé aux salariés pour accompa-gner cette évolution : les personnes nouvellementrecrutées doivent posséder un niveau minimumdans cette langue. Cependant, cet usage, de plus enplus massif, est apparu aussi comme une source desouffrance pour certains salariés. L’étude effectuée(Krief, 2010) combinait l’observation de l’usage del’anglais au cours de journées de travail habituelleset des entretiens approfondis avec des salariés dedifférents niveaux et catégories. Si pour les person-nels les plus diplômés ou jeunes, l’usage del’anglais est peu problématique, les moins quali-fiés, les ouvriers en particulier, n’ont pas àl’utiliser. Le problème se pose surtout pour les

salariés anciens, ouvriers qualifiés ou techniciens,dont les compétences sont reconnues, mais qui setrouvent en difficulté lorsqu’ils doivent lire, écouterou parler anglais. Les stratégies développées visentà augmenter les ressources (fabrication collectivede lexiques techniques, recherche de collèguesmaîtrisant l’anglais, utilisation de sites internet detraduction, etc.) ou à fuir les situations où l’anglaisest indispensable (réunions, audioconférences,etc.). L’accroissement de la charge de travail lié àcet usage n’est pas négligeable : efforts cognitifs,temps de traduction, erreurs et rattrapages à la suited’incompréhensions™ Pour les plus anciens despersonnels qualifiés, qui ne maîtrisent pas du toutcette langue, l’enjeu est la disparition de la recon-naissance de leurs qualités professionnelles : ne paspouvoir se faire comprendre, exprimer ses idées,ne plus pouvoir discuter du métier avec certainscollègues sont des éléments très déstabilisateurs.Les plus âgés adoptent des stratégies d’évitement« en attendant la retraite », ceux qui ont encore 10ou 15 ans d’activité devant eux expriment une fortesouffrance.

Les conséquences du chômage technique delongue durée

Pendant l’été 2008, le carnet de commandes del’entreprise s’est effondré de 60 %. Fin 2008, lespersonnes en contrat à durée déterminée et lesintérimaires n’ont pas été réembauchés. À partirde janvier 2009, et avec l’aide de l’État, deux joursde chômage technique par semaine ont été mis enplace dans la plupart des secteurs jusqu’à l’été2010. La crise économique et ce chômage tech-nique de très longue durée ont préoccupé les diri-geants de la mutuelle d’entreprise des ouvriers etemployés. Sans obtenir le soutien de la directiondes ressources humaines, mais en relation avec leservice de santé au travail, cette mutuelle nous asollicités pour une étude spécifique sur les consé-quences sociales et psychologiques de ce chômagepartiel (Bebessiki, 2010). L’observatoire du stress(voir ci-dessous) a montré une légère baisse desindicateurs de stress au cours de l’année 2009,tandis que ceux relatifs à l’anxiété se dégradaienten 2010, peu avant que l’activité ne reprenne tota-lement. En plus de l’inquiétude, liée à la situationéconomique, la reprise du travail signifiait, en fait,pour les ouvriers, des conditions de travail diffé-rentes de celles qu’ils avaient connues avant lacrise, lorsque l’activité de l’entreprise était parti-culièrement importante. Travailler sans intéri-maires ou personnels en contrat à durée déter-minée modifie les tâches affectées et entraîne unesorte de régression des qualifications pour intégrerdes tâches plus ingrates. La période de chômagepartiel a créé quelques tensions entre ceux quiétaient en chômage deux jours par semaine et

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certains secteurs (pièces détachées), dont l’acti-vité était, au contraire, très importante. Cepen-dant, il semble que le temps disponible et leséchanges sur la situation ont, plutôt, renforcé lesrelations entre les salariés et avec leur hiérarchie.Les deux journées libres ont, principalement, étéutilisées pour des activités familiales (enfants,bricolage, etc.), qui ont favorisé le bien-être dessalariés. Selon les métiers exercés, la charge detravail pouvait être importante pendant les troisjours travaillés : pour les cadres, les techniciensde bureau d’études, par exemple, la crise n’a pasdes conséquences aussi directes et rapides qu’enproduction. Les salariés ont pu apprécier le dispo-sitif de chômage partiel mis en place en France,alors que leurs collègues scandinaves ont subi deslicenciements collectifs.

« Un questionnaire peut être plus qu’un ques-tionnaire » (Kristensen, 2010)

« L’observatoire du stress » a été construitprogressivement avec les acteurs de l’entreprise eten tirant parti des autres études réalisées.L’objectif de mesure à l’échelle de l’organisationde certains indicateurs de stress, anxiété et dépres-sion, de leurs évolutions et de leurs variationsentre services, n’était pas une fin en soi. Leséchanges, générés par la construction de ce dispo-sitif, avec les représentants du personnel, l’enca-drement et les services de santé au travail, ontpermis de s’assurer de la pertinence des échellesutilisées et des variables prises en compte. Letravail important de restitution régulière des résul-tats, tous les six mois au départ, puis tous les ansà partir de 2010, s’effectue grâce à l’implicationdes médecins du travail, qui participent à l’anima-tion de ces restitutions dans les différents secteursdont ils ont la responsabilité. Une premièreversion du dispositif a été testée dans l’établisse-ment tertiaire, en 2006-2007. Le retour d’expé-rience et les débats internes, qui ont suivi, ontconfirmé l’intérêt de ce dispositif, en même tempsque des ajustements étaient proposés. La directionde l’entreprise a soutenu l’extension à tous lesétablissements de l’entreprise de cet observatoire,à partir du printemps 2008, sans limitation dansla durée. Fin décembre 2010, 7 500 salariés, surune population de 10 100, avaient répondu au ques-tionnaire proposé.

Concrètement, cet observatoire repose sur lamise en place d’une dizaine de postes informati-ques dans les services de santé au travail des diffé-rents établissements de l’entreprise. Les salariéssont invités, lors de la visite médicale obligatoire,à remplir un questionnaire, installé sur ces postes,qui comprend les éléments suivants :

– échelle de Karasek : Job Content Questionnaire(Karasek, Theorell, 1990), évaluant les dimensions

« demande psychologique », « latitude de décision »et « soutien social ». Pour faciliter les comparaisonsavec des données nationales, la version de l’échelleutilisée est celle de l’enquête SUMER (Surveillancemédicale des expositions aux risques) (Niedhammer,Chastang, Gendrey, David, Degioanni, 2006 ;Coutrot, Mermilliod, 2010) ;

– échelle HAD (Hospital Anxiety and Depres-sion) relative aux dimensions « dépression » et« anxiété » (Mykledu, Stordall, Dahl, 2001) ;

– échelle de « stress perçu » de Cohen :Perceived Stress Scale (Cohen, Kamarck,Mermelstein, 1983) ;

– durant la phase de test, en 2006-2007 etjusqu’à l’été 2010, l’échelle de Lemyre « Mesuredu stress psychologique » (MSP25, Lemyre et coll.,1990) avait été utilisée, pour permettre des compa-raisons avec les résultats de l’enquête de 2001. Laforte corrélation des résultats de cette échelle avecceux de l’échelle de Cohen (0,75 sur un échantillonde 6 643 salariés de l’entreprise) nous a conduits àla retirer du dispositif au profit de l’échelle Effort/reward imbalance (ERI) de Siegrist (1996), quiintroduit des dimensions différentes ;

– échelle de Siegrist ERI, qui évalue « l’effortextrinsèque », « l’effort intrinsèque » et les« récompenses » en retour, perçues par les salariés ;

– une série de questions, ne correspondant pas àdes échelles, pour examiner différents facteursspécifiques, susceptibles de poser problème auxsalariés : horaires de travail, charge et conditionsde travail, changements dans l’organisation, usagede l’anglais, conflits avec l’entourage profes-sionnel, clarté des rôles, etc. ;

– les variables sociodémographiques habi-tuelles, telles que : âge, sexe, ancienneté, niveau deformation, statut, service, etc.

Les salariés ne sont pas obligés de répondre auquestionnaire, mais il se constate que les conditionsde passation entraînent très peu de refus (moins de1 %) : l’anonymat est préservé, la passation se faitau sein du service médical, dans le respect desrègles déontologiques des médecins. Un bilan indi-viduel est imprimé après chaque passation et lelogiciel se referme automatiquement, empêchantquiconque de regarder les réponses ou de réim-primer le bilan. Ce bilan est la propriété du salarié,il peut ou non en discuter, lors de la visite médicalequi suit. L’application permet, également, deremplir le questionnaire à une autre occasion quela visite médicale, si le salarié souhaite examinerl’évolution de ses résultats pour les différents indi-cateurs utilisés. De fait, les conditions de passationet la confiance accordée aux médecins font que plusde 95 % des salariés n’hésitent pas à discuter leurbilan avec le médecin.

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L’observatoire permet, donc, deux typesd’utilisation :

– à partir des bilans individuels peut s’amorcerun dialogue avec le médecin sur les conditions detravail des salariés, ainsi que le repérage et la priseen charge des personnes en grande difficulté. Lesmédecins ont intégré l’usage du dispositif dans leurpratique, au même titre que d’autres examens plusclassiques (mesure de la tension, vue, audition,etc.). Ils ont, également, construit, à l’aide de cetobservatoire, un dispositif de suivi des salariés lesplus en difficultés (environ 400 en moyenne pourune population de 10 100) ;

– les données brutes sont conservées, en respec-tant l’anonymat, sur le poste informatique. Ellessont envoyées, chaque mois, à un des chercheursde l’équipe, qui effectue des analyses statistiques,dont les résultats et interprétations sont restituéeset discutées régulièrement avec les médecins, mais,aussi, dans le cadre des réunions de CHSCT. Lesanalyses portent sur l’évolution des indicateursdans le temps et les variations entre les différentsgroupes de l’entreprise (avec un seuil minimum de10 salariés par catégorie pour préserverl’anonymat). Dans le cadre d’une convention avecl’entreprise, ces données peuvent être exploitéespour des publications scientifiques.

Ce qui pourrait n’apparaître que comme un ques-tionnaire de plus est, en fait, un instrumentd’échanges particulièrement utile dans l’entreprisepour déclencher des actions plus concrètes, repérerdes groupes en difficulté, définir des priorités etvérifier que les actions entreprises ont amélioré lasituation des salariés. La construction participativedu dispositif et les nombreuses restitutions ont,petit à petit, fait évoluer les représentations desacteurs sur les questions de stress et de souffranceau travail.

ÉVOLUTIONS DES ACTEURS DEL’ENTREPRISE ET POSITIONNEMENTDES CHERCHEURS

Les acteurs de terrain : médecins, représen-tants du personnel, direction générale et directiondes ressources humaines, cadres opérationnels

Les médecins du travail sont les acteurs majeursdans la réalisation de ces chantiers. Initiateurs dela démarche, la soutenant de manière constante,essayant de débloquer les premières réticences dela direction, il semble qu’ils aient trouvé, dans cestravaux, des voies de développement de leur métier(dans les termes de Clot, 2008), mais, aussi, unaccroissement de légitimité au sein de l’organisa-tion. La confiance manifestée par les salariés et lessollicitations régulières, dont ils font l’objet de lapart de l’encadrement, les ont confortés en cela. Du

coup, nous avons pu observer une implicationcroissante de ces médecins dans des activités deréflexion sur les conditions de travail et sur l’exer-cice de leur métier (participation à des congrès demédecine du travail, conférences dans divers orga-nismes, formation à la clinique médicale du travail,implication dans les études épidémiologiquesnationales, etc.), ce qui a, d’ailleurs, accru leurcharge de travail.

Les représentants du personnel, tout en partici-pant activement à la démarche dans le cadre denombreuses réunions ordinaires (CE, CHSCT) ouspécifiques (restitutions), nous sont apparus plusdistants. « Avec 100 e de plus par mois, il n’y auraplus de stress » est une phrase entendue au débutde la démarche. Après quelques années, les posi-tions ont évolué. La démarche et, en particulier,l’observatoire du stress, fait partie maintenant duquotidien. Certains représentants syndicaux, quiavaient exprimé une hostilité au départ en s’inter-rogeant sur leur participation, sont maintenantactifs et impliqués, avec, bien sûr, le souci perma-nent de la transformation des analyses en actionsconcrètes. L’épisode de la demande, par lamutuelle, d’une étude sur les conséquences duchômage partiel, montre une situation un peu para-doxale. Cette mutuelle d’entreprise, qui est dirigée,en fait, par les représentants des différents syndi-cats de salariés de l’organisation, a transmis, ainsi,des préoccupations qui ne pouvaient être expriméesouvertement par les syndicats à la direction, maisqui étaient réelles. Les enjeux de négociationsociale et les consignes des fédérations ne permet-taient pas d’aborder ouvertement les questions desouffrance psychologique, de mesure du stress,avec la direction.

Du côté des gestionnaires des ressourceshumaines, les questions de stress au travail ont étéabordées majoritairement avec les outils quifondent leurs activités : formation continue (stages« gestion du stress », « affirmation de soi », etc.),évaluation (à « 360o ») et accompagnement del’encadrement. Le délai entre la première enquêtede 2001 et l’expérimentation de l’observatoire, en2006, dans l’établissement tertiaire, s’explique, engrande partie, par les résistances des responsablesdes ressources humaines de l’époque, autour desdifficultés à penser la discussion sur l’organisationdu travail, face à la place grandissante prise par lesservices de santé au travail sur ces questions. Ledéblocage et la généralisation de l’observatoire, en2007-2008, sont liés à des changements de respon-sables à la direction des ressources humaines et àun agenda médiatique favorable à la prise deconscience des difficultés rencontrées par les sala-riés. Cependant, il reste beaucoup à faire pour queles dispositifs de gestion du personnel, qui visentà favoriser la mobilité ou l’adaptation des salariés

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aux évolutions du travail et de l’organisation 3,soient infléchis pour mieux tenir compte du déve-loppement professionnel des individus et renforcerles collectifs de travail.

Du côté de l’encadrement, l’évolution des repré-sentations est passée par plusieurs phases. D’abordréticents à voir les problématiques de souffranceabordées ouvertement par l’entreprise (remise encause possible de l’organisation du travail, qu’ilsont contribué à implanter), les chantiers, conduitsdans certains secteurs, les ont rassurés sur l’intérêtconcret de se pencher sur ces questions, pourrésoudre un certain nombre de difficultés rencon-trées par les travailleurs et qui les mettent, aussi,dans l’embarras. Au début, certains ont, parfois,perçu les restitutions des données de l’observatoirecomme une nouvelle forme d’évaluation de leurscompétences dans le management de leurs équipes.Cependant, les débats instaurés par la suite ont,semble-t-il, montré qu’il était possible, sans risque,d’intégrer une réflexion sur les conséquencespsychologiques, pour les salariés, des choix d’orga-nisation en discussion. Pour avoir participé surplusieurs années à de nombreuses réunions avecl’encadrement, c’est cette évolution dans les repré-sentations de celui-ci qui est apparue le plus nette-ment pour les chercheurs, par rapport aux autrescatégories d’acteurs de l’entreprise mentionnéesplus haut. Cependant, le développement de la« production allégée » 4 dans l’entreprise remetconstamment cette évolution en question, du faitdes conséquences importantes de ce mode deproduction sur les conditions de travail (Valeyre,2006) et des ambiguïtés autour de la prise encompte du travail réel (Bourgeois, Gonon, 2010).

Le positionnement des chercheurs

D’abord sollicités, en tant qu’experts de lapsychologie du travail et des organisations, par lesmédecins du travail, confrontés à une souffrancecroissante des salariés, la collaboration mise enplace progressivement nous a permis, de façon plus« égalitaire », aussi bien de mettre à l’épreuvecertains modèles théoriques préexistants, que denous mobiliser, à partir de nouvelles questions,issus du terrain. Le partage des connaissances,parfois revendiqué par les spécialistes de larecherche-action (Liu, 1997), présente, bien sûr,des limites. La complexité d’une grande entreprisene permet pas d’appréhender tout ce qui s’ydéroule, de même que la participation ponctuelle

aux débats sur le métier des acteurs ne facilite pasla transmission de connaissances académiques auxacteurs les plus à même de faire évoluer l’organi-sation. Cependant, notre apport de chercheurs tient,nous semble-t-il, dans cette évolution des représen-tations que nous avons indiquée précédemmentchez ces acteurs. Dugué, Petit et Daniellou (2010)décrivent « l’intervention ergonomique commeacte pédagogique » à travers la confrontation, lorsde l’intervention, de différentes rationalités. Cetteévolution des représentations correspondrait auregistre de l’éducation (p. 17), à travers le regard,porté par les chercheurs, sur l’existence de margesde manœuvre et les questions de santé inhérentesaux choix organisationnels. D’un autre côté, nosréflexions, au cours de cette démarche, ont renforcénos convictions sur la complémentarité desméthodes dites quantitatives et qualitatives, pourmieux appréhender finement la réalité du travail,sans renoncer, pour autant, à des actions plus géné-rales, à l’échelle de l’organisation. Le positionne-ment adopté vise, ainsi, à maintenir l’articulationentre les analyses organisationnelles et les analysesde l’activité, pour faire face aux limites des deuxperspectives : risque d’abstraction stérile, d’un côtéet risque d’enkystement d’expériences locales, del’autre.

DISCUSSION

Les chantiers, dont nous avons rendu compterapidement, ont fait l’objet ou vont faire l’objetd’autres publications. Nous avons insisté sur l’arti-culation entre les différents niveaux de l’organisa-tion, de l’individu à l’ensemble de l’entreprise, enpassant par les collectifs de travail. Les enjeux detelles interventions, avec toutes leurs limites, noussemblent concerner plusieurs aspects.

Sur le plan épistémologique, il s’agit d’évitercertaines dérives de la recherche en psychologie dutravail et des organisations. Le souci de la mise àdistance, dans de nombreuses pratiques derecherche, s’appuyant uniquement sur des ques-tionnaires et des analyses statistiques complexes,peut aboutir à fabriquer des « construits psycholo-giques » plus proches des artefacts que de lacompréhension des comportements concrets destravailleurs et du travail. Les évaluations contradic-toires des effets d’interventions utilisant ce cadrenous semblent correspondre à cet éloignement dela réalité des représentations et comportements.Cependant, les perspectives plus cliniques de l’acti-vité et du travail (Clot, Lhuilier, 2010) montrent,aussi, des limites. Favorisant le développement dumétier, pour les travailleurs qui ont la chance departiciper à ces recherches, la question de la trans-formation d’ensemble de l’organisation reste posée.Des rapprochements entre ces perspectives sont

3. L’observatoire montre que 27,5 % des salariés ontchangé de poste dans l’année qui précède la passation duquestionnaire et 41,4 % ont changé de supérieur hiérar-chique dans l’année qui précède (n = 6 643).

4. Qui essaie d’éliminer tous les déplacements, acti-vités et gestes non productifs des travailleurs.

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possibles, comme le montre Vézina (1999), maisl’articulation entre l’action (locale, concrète) sur letravail et la structure (globale, institutionnelle) del’organisation doit être pensée plus fortement.

Du point de vue disciplinaire, nous avons,parfois, l’impression d’un découpage entre lespsychologues qui s’occupent du travail, prochesdes travailleurs, et les psychologues centrés surl’organisation, plus proches des directions. Nouspréférerions aller au fond de l’appellation la plusgénérale et internationale de la discipline :« psychologie du travail et des organisations », enévitant, autant que possible, cette distinction. Ilnous faut travailler avec les directions pour pouvoirinfléchir leur choix organisationnels en fonctiondes résultats des analyses de l’activité réelle destravailleurs.

Les possibilités de développement du métierpour augmenter le pouvoir d’agir et atténuer lessouffrances nous semblent, ainsi, en lien avec ledéveloppement de l’organisation. La psychologiedes organisations, enrichie par la clinique de l’acti-vité, pourrait construire des théories plus« fondées » ou « ancrées » (au sens de Strauss etCorbin, 1990) et ne plus participer à la dérive desdirigeants et gestionnaires vers un éloignement duréel de l’activité.

Enfin, la distinction habituelle entre trois formesde prévention : « primaire », « secondaire » et« tertiaire » nous est apparue, chercheurs et acteursde l’entreprise, pas aussi pertinente dans ledomaine des « risques » psychosociaux que pourd’autres risques, chimiques, physiques, etc. ou pourune perspective hygiéniste. Nous souhaiterions,ainsi, revoir la signification des notions de

préventions primaire, secondaire, tertiaire, sousl’angle d’une psychologie du travail et des organi-sations ainsi constituée :

– les interventions primaires correspondraient àdes interventions sur l’organisation (global) etl’activité (local), avec des aller/retour, pour favo-riser le développement du métier, aussi bien quecelui de l’organisation, l’échelle organisationnellepermettant de repérer les groupes en difficulté et laclinique de l’activité d’agir auprès de ces groupespour qu’ils retrouvent les voies de développementde leurs métiers ;

– la prévention secondaire pourrait s’adresser àl’encadrement, non pas pour lui apprendre à « gérerson stress », mais pour lui permettre de faciliter lacréation et le maintien de collectifs de travail, seulsà même de construire des solutions aux problèmesrencontrés dans le métier par le débat entre pairs.Caroly (2010) a montré, sur de nombreux exem-ples, l’importance de cette forme d’activité collec-tive pour la santé des individus. Réinstaurer ledébat entre pairs permettrait de construire plus soli-dement des marges de manœuvre dans l’action, quede simplement renforcer les capacités de faire facedes individus ;

– la « prévention » tertiaire correspondrait àl’accompagnement, par des psychologues avertis,des enjeux du travail (connaissance de la cliniquede l’activité et de la psychodynamique du travail),des individus sur le sens de leur travail, l’analysede leurs contextes d’action, afin de retrouver lepouvoir d’agir, sans, nécessairement, faire undétour par l’enfance ou par l’acquisition de tech-niques d’adaptation.

RÉFÉRENCES

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BEBESSIKI (Danièle).– Conséquences psychologiqueset sociales du chômage partiel de longue durée, Mémoirede master, Institut de psychologie, Université Lyon 2,juin 2010.

BOURGEOIS (Fabrice), GONON (Olivier).– Le lean etl’activité humaine, @ctivités, 7, 1, 2010, p. 136-142[http://www.activites.org/v7n1/bourgeois.pdf].

CAROLY (Sandrine).– L’activité collective et la rééla-boration des règles : des enjeux pour la santé au travail,Habilitation à diriger des recherches, UniversitéBordeaux 2, 3 mars 2010.

CLOT (Yves).– Travail et pouvoir d’agir, Paris, Pressesuniversitaires de France, 2008.

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261bulletin de psychologie

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