la cour penale internationale et le …le système de la cour pénale internationale (cpi), dont la...
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UNIVERSITÉ FRANÇOIS – RABELAIS DE TOURS
ÉCOLE DOCTORALE « Sciences de l'Homme et de la Société » [Groupe d’Etudes et de Recherche sur la Coopération Internationale et
Européenne (GERCIE)]
THÈSE présentée par : [Mousa ALLAFI]
soutenue le : 17 avril 2013
pour obtenir le grade de : Docteur de l’université François – Rabelais de Tours Discipline/ Spécialité : Droit public
LA COUR PENALE INTERNATIONALE ET LE CONSEIL DE SECURITE : JUSTICE VERSUS MAINTIEN DE
L’ORDRE
THÈSE dirigée par : [Mme HANNEQUART Isabelle] Maître de conférences à l’Université François – Rabelais de Tours
RAPPORTEURS :
[M LAGRANGE Philippe] Professeur à l’Université de Rouen [Mme SAINT JAMES Virginie] Maître de conférences à l’Université de Limoges
JURY : [Mme HANNEQUART Isabelle] Maître de conférences à l’Université François – Rabelais de Tours [M LAGRANGE Philippe] Professeur à l’Université de Rouen [M ROSSETTO Jean] Professeur à l’Université François – Rabelais de Tours [Mme SAINT JAMES Virginie] Maître de conférences à l’Université de Limoges
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Dédicace
A ma sainte mère, à ce paradis qui vivait et qui vit encore et pour toujours en moi malgré la
barrière de la distance durant toutes ces années.
A mon premier enseignant, mon père l’ombre qui m’a toujours protégée de la dureté de la
solitude et de la distance.
A mon idole, ma fierté, mon visage dans le miroir, mon juriste préféré, mon grand frère Faraj.
A toute ma famille, frères et sœurs, dans cette chaleureuse maison, où je suis né, où j'ai appris
à marcher et à écrire et surtout où j’ai appris à être un être humain.
A mes amis en France, pour leur présence, leur amour, leur bienfaisance et leur soutien
inconditionnel.
Enfin et avant tout, à tous les défenseurs de la justice sous toutes ses formes partout à travers
le monde.
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Remerciements
En réalité, j’étais impatient d’arriver à ce stade et de trouver les mots qu’il fallait.
Aujourd’hui j’y suis, mais je réalise à quel point cette tâche est bien plus difficile qu’on ne le
croit. J’ai donc décidé de l’écrire tout simplement comme je le ressens.
Quel que soit le domaine, quel que soit le sujet, rédiger une thèse n'est pas une tache
aisée ; notamment si cette recherche s’effectue en langue étrangère, quand bien même le
chercheur est un amoureux de cette langue. Cette thèse n'aurait, en effet, jamais été sur le
point de parvenir à une fin, sans les conseils, la supervision, l'aide et la patience de ma
directrice de recherche, Madame Isabelle Hannequart, qui fut avec moi étape après étape. Je
souhaiterais infiniment la remercier pour la confiance qu'elle m'a accordée en acceptant
d'encadrer ce travail doctoral, pour ses multiples conseils et pour le temps qu'elle a consacré à
diriger cette thèse. Je voudrais lui dire à quel point j’ai apprécié sa disponibilité et ses qualités
humaines d'écoute et de compréhension toutes ces années. J’ai énormément appris à ses côtés
et je suis très heureux de l’avoir eu pour encadrant.
Je tiens également à exprimer mon entière gratitude aux membres du jury :
Monsieur LAGRANGE Philippe.
Monsieur ROSSETTO Jean.
Madame : SAINT JAMES Virginie.
Qui m’ont honoré d’accepter de venir juger ce travail.
A l'issue de la rédaction de cette recherche, je suis convaincue que la thèse est loin
d'être un travail solitaire. Pour cette raison, au terme de ce travail, j'adresse avec émotion mes
sincères remerciements à tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à la réalisation de ce
projet : amis, correcteurs ainsi que le personnel de la faculté de droit François Rabelais.
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Résumé
Le système de la Cour pénale internationale (CPI), dont la mission est d’assurer la
justice internationale, repose sur un lien étroit avec le Conseil de sécurité. Il convient donc de
s’interroger sur le rôle du Conseil dans le fonctionnement de la justice pénale internationale.
Cette question est fondamentale, car l'intervention d'un organe politique dans l’activité d’un
organe judiciaire remet en cause les missions de chacune de ces institutions. L’intrusion du
Conseil dans l’activité de la CPI, basée sur sa mission de maintien de la paix, est en fait
établie au nom d’un ordre international voulu par le Conseil lui-même. Ce rôle affecte le
fonctionnement, l’indépendance et même l’impartialité de la Cour. Les pouvoirs que le Statut
de Rome confère au Conseil lui permettent en effet de saisir la CPI, d’imposer aux Etats de
coopérer avec la Cour, de suspendre son activité ou encore de qualifier un acte de crime
d’agression. Cependant, les rapports entre le Conseil et la CPI ne devraient pas être
subordonnés, mais entretenus dans le respect mutuel, ainsi une véritable crainte existe
concernant le respect du Conseil envers le Statut de Rome. L’étude met en évidence le conflit
entre justice et politique et révèle les enjeux actuels en termes de justice pénale internationale.
Mots-clés :
Cour pénale internationale, Conseil de sécurité, justice pénale internationale, paix et
sécurité internationales, Statut de Rome, Charte de l’ONU, Chapitre VII, pouvoir,
indépendance, contribuer, sélectivité, suspension, saisine, coopération, entraver, situation,
immunité, crime d’agression, compétence, enquêtes et poursuites.
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Résumé en anglais (Summary)
The international criminal Court system (ICC) whose mission is to ensure
international justice, is based on a close relationship with the security Council. So it is proper
to wonder about the Council’s role in the functioning of international criminal justice. Such a
questionning is fundamental, for the intervention of a political body into the functioning of a
judicial body calls into question the missions of both institutions. The Council’s interference
in the activity of the ICC, based on its mission of maintaining international peace, is actually
carried out on behalf of an international order intended by the Council itself. This role affects
the functioning, the independence and even the impartiality of the ICC. The powers the Rome
Statute gives to the Council allow it to refer to the ICC, to impose for the States to cooperate
with the Court, to suspend its activity or also to qualify an act as a crime of aggression.
However the relations between the Council and the ICC should not be subordinated, but
maintained in mutual respect. Thus there is a real concern regarding the observance of the
Rome Statute by the Council. The study highlights the conflict between justice and politics
and reveals the current issues in terms of international criminal justice.
Keywords :
International criminal Court, security Council, international criminal justice,
international peace and security, Rome Statute, UN Charter, Chapter VII, power,
independence, contribute, selectivity, suspension, referral, cooperation, hinder, situation,
immunity, crime of aggression, competence, investigations and prosecutions.
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Sigles et abréviations
ABI : Accords bilatéraux d’immunité.
AEP: Association des Etats parties.
AFDI : Annuaire français de Droit international.
AFRI : Annuaire français de relations internationales
ASPA : American service membres Protection Acta.
BPI : Barreau pénal international
C. : Contre.
CAO : Centre d’actualités de l’ONU.
CCDIH : Commission consultative de Droit international humanitaire.
CDH : Commission des Droits de l’Homme.
CDI : Commission du Droit international.
CFCPI : Coalition française pour la Cour pénale internationale.
CIJ : Cour internationale de Justice.
CNG : Conseil national général libyen.
CNT : Conseil national de transition libyen.
CPCPI : Coalition pour la Cour pénale internationale.
CPI : Cour pénale internationale.
CPRCG : Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.
Doc : Document.
FIDH : Fédération internationale des ligues des Droits de l’Homme.
GTSCA : Groupe de travail spécial sur le crime d’agression.
Ibid : Ibidem, même ouvrage que celui de la note précédente.
Infra : Voir plus loin dans le texte.
JDI : Journal de Droit international.
JEDI : Journal européen de Droit international.
JICJ: Journal of International Criminal Justice.
LEA : Ligue des Etats arabes.
MPLS : Mouvement populaire de Libération du Soudan.
OCI : Organisation de la coopération islamique
ONG : Organisation non gouvernementale.
ONU : Organisation des Nations Unies.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Convention_pour_la_prévention_et_la_répression_du_crime_de_génocide#_blank
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op. cit. : opere citato, ouvrage déjà cité.
OTAN : Organisation du Traité de l'Atlantique Nord.
p. : page.
pp. : pages.
RBDI : Revue belge de Droit international.
RCADI : Recueil des Cours de l’Académie de Droit international.
RDF : Revue des Droits fondamentaux
RDPSP : Revue du Droit public et de la science politique.
RFDC : Revue française de Droit constitutionnel.
RGDIP : Revue générale de Droit international public.
RICR : Revue internationale de la Croix-Rouge.
RIDP : Revue internationale de Droit pénal.
RJA : Revue juridique d’Auvergne
RRJ : Revue de la recherche juridique.
RSCDPC : Revue de science criminelle et de Droit pénal comparé.
RTDH : Revue trimestrielle des Droits de l'Homme.
SDN : Société des Nations.
SFDI : Société française pour le Droit international.
Supra : Voir plus haut dans le texte.
TPIR : Tribunal pénal international pour le Rwanda.
TPIY : Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.
TSSL : Tribunal spécial pour la Sierra Leone.
UA : Union africaine.
UE : Union européenne.
Vol : Volume.
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Liste des annexes
Annexe 1 : Liste des articles du Statut de Rome de la Cour pénale internationale
cités dans les développements (version conforme aux modifications apportées par
l’Amendement du Statut en 2010).
Annexe 2 : La résolution 1422 du Conseil de sécurité concernant le maintien de la
paix par les Nations Unies.
Annexe 3 : La résolution 1487 du Conseil de sécurité concernant le maintien de la
paix par les Nations Unies.
Annexe 4 : La résolution 1593 du Conseil de sécurité concernant la saisine de la
situation au Soudan (Rapports du Secrétaire général sur le Soudan).
Annexe 5 : La résolution 1970 du Conseil de sécurité concernant la saisine de la
situation en Libye (la paix et la sécurité en Afrique).
Annexe 6 : La résolution 1973 du Conseil de sécurité concernant la situation en
Libye.
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Sommaire Remerciements ......................................................................................................................... 1
Résumé ...................................................................................................................................... 2
Résumé en anglais (Summary) ................................................................................................ 3
Sigles et abréviations ................................................................................................................ 4
Liste des annexes ...................................................................................................................... 6
Sommaire .................................................................................................................................. 8
Introduction ............................................................................................................................ 11
Première Partie : Le pouvoir du Conseil de sécurité de contribuer à l'activité de la Cour
pénale internationale .............................................................................................................. 44
Titre I : La faculté du Conseil de sécurité de saisir la Cour pénale internationale……..48
Chapitre I : La saisine par le Conseil de sécurité : une voie dans la recherche de
l’universalité de la Cour pénale internationale ................................................................... 52
Section I. La reconnaissance au Conseil de sécurité de la faculté de saisir la Cour pénale
internationale ............................................................................................................................ 53
Section II. L’avantage de la saisine par le Conseil de sécurité ............................................... 72
Chapitre II : La saisine par le Conseil de sécurité : un risque pour l’activité de la Cour
pénale internationale .............................................................................................................. 90
Section I. Une éventuelle politisation de la compétence de la Cour pénale internationale ..... 91
Section II. Les difficultés liées à l’application du principe de complémentarité .................... 97
Titre II : L’exercice par le Conseil de sécurité de sa faculté de saisir la Cour pénale
internationale ........................................................................................................................ 106
Chapitre I : Les premières saisines de la Cour pénale internationale par le Conseil de
sécurité : le Soudan et la Libye ........................................................................................... 109
Section I. Un aperçu des situations concernées (Soudan et Libye) ....................................... 110
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Section II. L’adoption des résolutions 1593 et 1970 du Conseil de sécurité : les enjeux
juridiques ................................................................................................................................ 130
Chapitre II : L’apparition des obstacles lors des saisines par le Conseil de sécurité : les
cas du Soudan et de la Libye ............................................................................................... 156
Section I. Les obstacles liés à la compétence et à l’indépendance de la Cour pénale
internationale .......................................................................................................................... 157
Section II. Les difficultés liées à la complémentarité et à la sélectivité ................................ 172
Deuxième Partie : Le pouvoir du Conseil de sécurité d'entraver l'activité de la Cour
pénale internationale ............................................................................................................ 194
Titre I : Le pouvoir effectif du Conseil de sécurité de suspendre l’action de la Cour
pénale internationale ............................................................................................................ 197
Chapitre I : La faculté du Conseil de sécurité de surseoir à l’activité de la Cour pénale
internationale ........................................................................................................................ 199
Section I. La faculté de surseoir : négociations et positions lors de la Conférence de
Rome…… .............................................................................................................................. 200
Section II. L’article 16 du Statut de Rome ............................................................................ 210
Chapitre II : L’exercice par le Conseil de sécurité de sa faculté de surseoir à l'activité de
la Cour pénale internationale .............................................................................................. 230
Section I. Les résolutions du Conseil de sécurité concernant le pouvoir de suspension : texte
et contexte .............................................................................................................................. 231
Section II. Les inconvénients liés à l’usage du pouvoir de sursis par le Conseil de
sécurité…… ........................................................................................................................... 252
Titre II : Le rôle potentiel du Conseil de sécurité à l’égard du crime d’agression…….278
Chapitre I : La compétence de la Cour pénale internationale conditionnée par la
définition du crime d’agression ........................................................................................... 281
Section I. La définition de l’agression : du Traité de Versailles à la Conférence de Rome .. 283
Section II. Le rôle éventuel du Conseil de sécurité vis-à-vis du texte adopté à Rome ......... 294
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Chapitre II : Le rôle donné au Conseil de sécurité par la modification du Statut de Rome
à l’égard du crime d’agression ............................................................................................ 305
Section I. L’Amendement du Statut de Rome ....................................................................... 307
Section II. Le nouveau rôle du Conseil de sécurité à l’égard du crime d’agression ............. 324
Conclusion ............................................................................................................................. 336
Bibliographie ......................................................................................................................... 356
Table des matières ................................................................................................................ 403
Annexes ................................................................................................................................. 408
Résumé .................................................................................................................................. 472
Résumé en anglais (Summary) ............................................................................................ 472
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Introduction
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« Il ne peut y avoir de paix sans justice, ni de justice sans loi, ni de loi
digne de ce nom sans un tribunal chargé de décider ce qui est juste et
légal dans des circonstances données»1.
Tout au long du siècle dernier, l'idée de juger les responsables de crimes
internationaux par des juridictions pénales internationales compétentes a souvent été évoquée.
Plusieurs propositions d'institution d’une Cour pénale internationale/CPI permanente sous la
forme d'accords internationaux ont fait l'objet de discussions. En plusieurs décennies, cent
cinquante conflits armés internationaux, régionaux et internes ont éclaté2. Ces conflits, ainsi
que les violations des Droits de l’Homme perpétrées par des régimes répressifs, ont causé plus
de soixante-dix millions de morts. Les conséquences dommageables semblent dépasser
l’entendement humain mais ces dures réalités doivent être regardées en face et traitées
objectivement. C’est pourquoi il était nécessaire et urgent de créer une structure juridique
internationale capable de mettre fin aux massacres qui sont fondamentalement incompatibles
avec le concept de dignité humaine. Cette structure pourrait fournir une réponse convaincante
au concept humanitaire qui exclut la perpétration de tels actes3. Par ailleurs, une forte relation
préexiste entre justice et politique, dont l’influence s’est exercée tantôt dans le sens de la
création d’une juridiction pénale internationale, tantôt dans le sens inverse en l’entravant.
Cette relation, entre politique et développement d’un système normatif, n’est cependant pas
propre à l’émergence de la justice pénale internationale. Si la justice peut être considérée
comme un grand progrès dans la lutte contre l’impunité et l’affirmation des valeurs
universelles de l’humanité, elle fait cependant l’objet de nombreuses critiques4.
1 Ferencz (B.), Ancien Procureur au Tribunal de Nuremberg. C'est en ces termes que M. Ferencz exprimait sa
foi en la justice. 2 Levy (D.), La Cour pénale internationale, une introduction pratique, université de Paris IX, Paris, 2003, p. 15.
Pour plus d’informations, voir : Cassese (A.), The Tokyo Trial and beyond, Polity Press, Cambridge, 1993, pp.1-
3. Le Statut du Tribunal de Nuremberg (articles 1 à 4).
Del Ponte (C.), Ex-Yougoslavie, Rwanda : Les défis du Tribunal pénal international, Université de Fribourg :
Service Presse Communication, 2000. pp. 12-50. 3 Bassiouni (C.), Note explicative sur le Statut de la Cour pénale internationale, RIDP, 2000, N° 71, p. 2.Voir
aussi : Atche (B.R.), Les conflits armés internes en Afrique et le droit international, Thèse présentée à
l’Université de Cergy-Pontoise, doctorat en droit public, 2008, pp. 16-18. 4 Pour plus d’informations, voir : Ibid, pp. 15-37.
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Concernant la nécessité de créer une structure juridique pénale internationale et ses
rapports avec les organes politiques, il convient d’une part de mettre en évidence l’évolution
historique de la création d’une CPI et le rôle joué par les Organisations internationales dans
cette création et d’autre part de présenter les organes, la CPI et le Conseil de sécurité, sur
lesquels notre recherche se concentre. Nous soulèverons à leur égard les intérêts et la
problématisation de l’étude.
(I) La Cour pénale internationale et le Conseil de sécurité : des acteurs de la justice
pénale internationale
Pendant longtemps, et aujourd’hui encore, toute tentative dans le sens de la création
d’une CPI a été considérée comme l’expression de la justice du vainqueur d’un conflit, ainsi
lors des procès de Nuremberg, stigmatisant les dérives du vaincu pour mieux dissimuler les
siennes. Or, un accord entre certains Etats, fussent-ils les plus puissants, ne saurait être
considéré comme l’expression de la Communauté internationale dans son ensemble. De
même, alors que certains ont pointé du doigt l’arbitraire des décisions du Conseil de sécurité
dans le cas des tribunaux pénaux internationaux, d’autres les ont considérées comme un pas
vers l’établissement d’une justice pénale internationale1. Aussi importantes que soient ces
expériences de tribunaux, leur caractère à la fois ad hoc, c’est-à-dire d’une compétence
limitée en termes de temps, de lieu, de crimes et de personnes, et post hoc, c’est-à-dire
intervenant après que le pire a été commis, ne pouvait satisfaire aux exigences qu’implique
l’instauration d’une véritable justice pénale internationale. Que la justice demeure un
instrument de rétablissement de la paix comme ce fut le cas dans les situations mentionnées,
nul n’en disconvient, mais son rôle doit rester limité2. Nous pouvons donc dès à présent
conclure à l’ambiguïté et à la complexité de cette relation. En effet, la politique élabore le
droit international et le met ensuite en œuvre. Les Etats, au gré de leurs décisions, peuvent
ainsi modifier les règles qu’ils avaient auparavant adoptées. D’où la relation complexe entre
1 Badinter (R.), De Nuremberg à la Haye, RIDP, vol. 75, p. 704. Voir aussi : Benages (T.), La convention pour
la prévention et la répression du crime de génocide à l’épreuve du tribunal pénal internationale pour l’ex-
Yougoslavie, Thèse présentée à l’Université d’Auvergne, doctorat en droit public, 2005, pp. 8-20. 2 Bassiouni (C.), Note explicative sur le Statut de la Cour pénale internationale, op. cit., p. 4. Voir aussi :
Badinter (R.), De Nuremberg à la Haye, op. cit., pp. 703-704. Dans cette étape, nous explorerons plusieurs
tentatives, soit par la volonté des pays soit par des résolutions du Conseil de sécurité, d’établir une justice pénale
internationale pour lutter contre l’impunité et punir les responsables des crimes internationaux.
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« la volonté de lutter contre l’impunité qui a émergé et la prise en compte d’une certaine
realpolitik »1 : les Etats marchent à reculons. L’implication de tant d’Organisations de la
société civile résulte de leur prise de conscience que la barbarie ne devait pas rester impunie
et qu’il fallait non seulement révéler la vérité mais aussi que justice soit faite pour espérer une
réconciliation entre les peuples. Nonobstant les difficultés diverses et complexes faisant
obstacle à la création d’un instrument international pour la justice, nous avons pu observer des
efforts considérables, tant de la part de certains Etats que d’organisations non
gouvernementales, qui ont œuvré pour obtenir une justice équilibrée et ainsi mettre un terme
aux crimes contre l’humanité2. Pour mieux comprendre le Statut actuel de la justice pénale
internationale, nous présenterons l’évolution historique du projet de création de la CPI (A)
avant de présenter plus précisément la CPI et le Conseil de sécurité (B).
(A) L’évolution historique du projet de création de la Cour pénale internationale
L’idée d’une juridiction pénale internationale, ou encore d’une CPI, trouve ses
origines au début du dix-neuvième siècle, la première proposition sérieuse ayant été avancée
par Gustave Moynier, l’un des fondateurs du comité international de la Croix-Rouge. Ce
comité a proposé de créer une CPI sur la base de la Convention de Genève de 18543. Cette
Convention ainsi que celle de Saint-Pétersbourg de 1868 sont les premières à agir en faveur
de l’amélioration du sort des militaires blessés sur les champs de bataille. Cependant ce
projet, comme bien d’autres d’ailleurs, ne s’est pas concrétisé. Jusqu’à ce que Moynier
propose d’établir un Tribunal international permanent, presque toutes les affaires de violation
du droit de la guerre étaient jugées par des tribunaux ad hoc, constitués par des adversaires
généralement vainqueurs, et non par des tribunaux ordinaires ou par un Tribunal pénal
international. Ces conventions mettent en évidence l’exigence de concilier les nécessités de la
guerre avec les lois de l’humanité en traitant essentiellement des moyens d’atténuer au mieux
les ravages de la guerre et en interdisant l’usage de certaines armes4. Toutefois, dix ans
1 Bukhari de Pontual (S.), Naissance difficile d’une Cour pénale internationale, Acteurs du monde, Revue
projet 303/2008, p. 9. 2 Ibid, pp. 8-10. Voir aussi : Condé (P.Y.), Quatre témoignages sur la justice pénale internationale : entre ordre
public international et politiques de justice, éditions juridiques associées, Droit et société 2004/3, N° 58, pp.
567-569. 3 Huyghe (FB.), L’impureté de la guerre, RICR, Vol.91, 2009, pp. 31-33. 4 Bassiouni (C.), Le long chemin jusqu’à Rome, Nouvelle étude pénale, 1999, N° 13, p. IV.
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devaient encore s’écouler avant que l’idée de Moynier de créer une CPI permanente ne soit à
nouveau envisagée sérieusement1. La Guerre Froide fut un événement marquant en ce qui
concerne les efforts menés en vue de la création d’une CPI. C’est pourquoi nous distinguerons
dans notre étude l’évolution du projet de création de la CPI avant (1) et après la Guerre Froide
(2).
1. L’évolution historique de la création de la Cour pénale internationale avant la Guerre Froide
L’émergence au niveau mondial de la responsabilité pénale internationale
individuelle semble remonter à la déclaration de mise en garde adressée le 24 mai 1915 par la
France, la Grande-Bretagne et la Russie à la Sublime Porte pour les crimes commis contre les
Arméniens. Cette déclaration, sans doute inspirée par des considérations morales et même
moralisatrices, doit néanmoins être analysée dans le contexte de son époque. En réalité, la
première esquisse d’une juridiction internationale va résulter de la constitution d’une justice
pénale internationale. Depuis la fin de la Première Guerre mondiale, la Communauté
internationale a cherché à établir une CPI permanente. En 1919 plus précisément, une
Commission d’enquête sur la responsabilité des auteurs des crimes commis au cours de la
Première Guerre mondiale a vu le jour. C’est une fois de plus le niveau de barbarie atteint
pendant les conflits et les incroyables souffrances subies qui devaient faire germer une
juridiction internationale. Cette première ébauche de juridiction internationale était le fruit
quasi exclusif d’une logique de pays affirmant leur suprématie politique et militaire, et non
celui d’une conscience collective de la nécessité de trouver une réponse juridictionnelle
internationale aux crimes de même nature. Même si ce fut une tentative sérieuse, elle ne verra
jamais le jour car d’une part les Pays-Bas avaient refusé de livrer Guillaume II2, qui avait 1 Keithall (C.), Première proposition de création d’une Cour pénale internationale permanente, RICR, N° 829,
1998, pp. 59-60. 2 Pour plus d’informations, voir : Lavenue (J.), Histoire du Droit international pénal, cours de droit
international pénal, faculté des sciences juridiques, politiques et sociales, Université de Lille 2 Droit et Santé,
2008, pp. 2-5. IPEUT, La genèse de la cour, article disponible sur : http://www.ipeut.com/droit/la-
constitution/164/la-genese-de-la-cour53369.php, référence de la page consultée le 4 décembre 2011.
Mutabaruka (A.), La problématique de la répression des crimes de droit international par les juridictions
pénales internationales, article disponible sur : http://www.memoireonline.com/06/09/2106/La-problematique-
de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int.html, référence de la page
consultée le 10 décembre 2011.
http://droit.univ-lille2.fr/index.php?id=230http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=L'id%C3%A9e+de+constituer+une+juridiction+universelle+pour+juger+les+crimes+les+plus+attentatoires+%C3%A0+l'essence+de+l'humanit%C3%A9,+c'est-%C3%A0-dire+ceux+qui+seront+progressivement+qualifi%C3%A9s+comme+crimes+internationaux+en+droit+international&source=web&cd=1&cad=rja&ved=0CDIQFjAA&url=http%3A%2F%2Fdroit.univ-lille2.fr%2Findex.php%3Fid%3D503&ei=gi0ZUcn3B8O40QXK8IHoCw&usg=AFQjCNEULmpJmXj0_V3NeT5CFg8zr1qTrQ&bvm=bv.42080656,d.d2khttp://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=L'id%C3%A9e+de+constituer+une+juridiction+universelle+pour+juger+les+crimes+les+plus+attentatoires+%C3%A0+l'essence+de+l'humanit%C3%A9,+c'est-%C3%A0-dire+ceux+qui+seront+progressivement+qualifi%C3%A9s+comme+crimes+internationaux+en+droit+international&source=web&cd=1&cad=rja&ved=0CDIQFjAA&url=http%3A%2F%2Fdroit.univ-lille2.fr%2Findex.php%3Fid%3D503&ei=gi0ZUcn3B8O40QXK8IHoCw&usg=AFQjCNEULmpJmXj0_V3NeT5CFg8zr1qTrQ&bvm=bv.42080656,d.d2khttp://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=L'id%C3%A9e+de+constituer+une+juridiction+universelle+pour+juger+les+crimes+les+plus+attentatoires+%C3%A0+l'essence+de+l'humanit%C3%A9,+c'est-%C3%A0-dire+ceux+qui+seront+progressivement+qualifi%C3%A9s+comme+crimes+internationaux+en+droit+international&source=web&cd=1&cad=rja&ved=0CDIQFjAA&url=http%3A%2F%2Fdroit.univ-lille2.fr%2Findex.php%3Fid%3D503&ei=gi0ZUcn3B8O40QXK8IHoCw&usg=AFQjCNEULmpJmXj0_V3NeT5CFg8zr1qTrQ&bvm=bv.42080656,d.d2khttp://www.ipeut.com/droit/la-constitution/164/la-genese-de-la-cour53369.phphttp://www.ipeut.com/droit/la-constitution/164/la-genese-de-la-cour53369.phphttp://www.memoireonline.com/06/09/2106/La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int.htmlhttp://www.memoireonline.com/06/09/2106/La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int.html
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trouvé refuge sur leur territoire et d’autre part la volonté politique des pays vainqueurs de
contraindre l’Allemagne à livrer les huit cent quatre-vingt-neuf présumés criminels de guerre
faisait défaut. Même si cette disposition ne faisait référence qu’aux seuls crimes de guerre,
elle avait affirmé l’existence d’une morale internationale, c’est-à-dire d’une norme de nature
universelle transcendant les frontières et les souverainetés1. Ainsi a-t-il fallu attendre le Traité
de Versailles de 1919, qui devait mettre fin définitivement à la Première Guerre mondiale et
qui prévoyait l’instauration d’une juridiction pénale internationale, pour que les Etats
envisagent pour la première fois de confier à une juridiction internationale le soin de juger un
individu, même s’il était le chef de cet Etat2. L’article 227 de ce Traité prévoyait en effet qu’il
devait être jugé pour « offense suprême contre la morale internationale et l’autorité sacrée
des traités ». Cette disposition, bien que nullement appliquée puisque le Kaiser, réfugié aux
Pays-Bas, n’a pas été jugé, n’en constituait pas moins la première brèche dans l’édifice d’un
droit international aujourd’hui qualifié de classique, qui ne reconnaissait d’autres sujets de
droit que l’Etat : pour la première fois il était envisagé de lever le voile étatique pour mettre
en examen un individu3. Par ailleurs, au cours des années qui suivirent l’année 1919, plusieurs
tentatives, marquées d’efforts et d’espoirs, en vue de créer une véritable juridiction pénale
internationale ont échoué. En effet, les deux Conventions de 1937 ne sont jamais entrées en
vigueur faute de ratification. Or, à la même époque, quatre tribunaux ad hoc et cinq
Commissions d’investigation ont été établis suivant la volonté des Alliés pour juger les
criminels de guerre de l’Axe. La création du Tribunal de Nuremberg puis celle du Tribunal
1 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, Inédit Essais, Paris, 2000, p. 9. Voir aussi :
Lavenue (J.), Histoire du Droit international pénal, op. cit., pp. 2-6. Le Traité de Versailles de 1919 (articles
227, 228 et 229). Voir aussi : Mutabaruka (A.), La problématique de la répression des crimes de droit
international par les juridictions pénales internationales, op. cit.,
http://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-
international-par-les-juridictions-penales-int17.html. 2 Farget (D.), La reconstruction juridique de l'Irak et de l'Afghanistan et l'influence des systèmes juridiques
occidentaux, publication de l'Université de Montréal, Centre de Recherche en Droit Public, 2009, pp. 9-11. Voir
aussi : Mutabaruka (A.), La problématique de la répression des crimes de droit international par les
juridictions pénales internationales, op. cit., http://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-
de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.html. 3 Badinter (R.), De Nuremberg à la Haye, op. cit., p. 700. Voir aussi : Mujanayi (J.C), Les innovations et
insuffisances de la Cour pénale internationale par rapport au Droit pénal congolais, article disponible sur :
http://www.memoireonline.com/10/12/6276/Les-innovations-et-insuffisances-de-la-Cour-Penale-Internationale-
par-rapport-au-Droit-Penal-congo.html, référence de la page consultée 11 novembre 2011.
http://droit.univ-lille2.fr/index.php?id=230http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=L'id%C3%A9e+de+constituer+une+juridiction+universelle+pour+juger+les+crimes+les+plus+attentatoires+%C3%A0+l'essence+de+l'humanit%C3%A9,+c'est-%C3%A0-dire+ceux+qui+seront+progressivement+qualifi%C3%A9s+comme+crimes+internationaux+en+droit+international&source=web&cd=1&cad=rja&ved=0CDIQFjAA&url=http%3A%2F%2Fdroit.univ-lille2.fr%2Findex.php%3Fid%3D503&ei=gi0ZUcn3B8O40QXK8IHoCw&usg=AFQjCNEULmpJmXj0_V3NeT5CFg8zr1qTrQ&bvm=bv.42080656,d.d2khttp://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.htmlhttp://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.htmlhttp://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.htmlhttp://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.htmlhttp://www.memoireonline.com/10/12/6276/Les-innovations-et-insuffisances-de-la-Cour-Penale-Internationale-par-rapport-au-Droit-Penal-congo.htmlhttp://www.memoireonline.com/10/12/6276/Les-innovations-et-insuffisances-de-la-Cour-Penale-Internationale-par-rapport-au-Droit-Penal-congo.html
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17
militaire international pour l’Extrême-Orient au lendemain de la Seconde Guerre mondiale
ont concrétisé pour la première fois cette idée.1
L’Accord de Londres du 8 août 1945 mettait ainsi en place le Tribunal militaire
international de Nuremberg chargé de juger les plus grands criminels de guerre des pays
européens de l’Axe coupables de crime contre la paix, de crimes de guerre et de crimes contre
l’humanité. Ni la qualité de dirigeant d’Etat, ni l’obligation d’obéir aux ordres de supérieurs,
ne constituaient des circonstances excluant la responsabilité internationale pénale individuelle
des auteurs de crimes contre l’humanité. Du reste, en ce qui concerne le Tribunal de Tokyo,
son Statut était joint à la proclamation spéciale du Commandant en Chef suprême pour les
Puissances Alliées faite à Tokyo le 19 janvier 1948. Mais aucune poursuite, hormis celle
engagée par le Tribunal de Tokyo, ne fut entreprise par le Japon contre ses propres
ressortissants2. Le Tribunal de Nuremberg, celui de Tokyo ainsi que les poursuites ultérieures
par les Alliés constituent des précédents significatifs en vue d’établir un système efficace de
justice pénale internationale. Ces décisions historiques ont développé de nouvelles normes
légales et des normes de responsabilité qui ont fait évoluer le droit international. Avec le
temps, ces précédents ont acquis une certaine légitimité qui laisse présager la naissance d’une
justice pénale internationale. Il est ainsi incontestable que les tribunaux de Nuremberg et de
Tokyo, dans le contexte de l’époque de leur création, furent un pas important pour la
naissance de l'idée d’une CPI3. Le 21 novembre 1947, l’Assemblée générale de l’ONU adopte
la création d’une Commission du droit international/CDI ayant pour mandat l’élaboration des
principes reconnus par la Charte de Nuremberg. Un projet de Statut d’une CPI est alors
proposé en 1951 puis révisé en 1953. L’Assemblée générale de l’ONU a invité la CDI à
formuler les principes du droit international reconnus dans la Charte du Tribunal de
1 Donnadieu (V.), Le procès de Nuremberg, RCADI, 1947, vol. 70, p. 482. 2 Bassiouni (C.), L’expérience des premières juridictions pénales internationales, in Ascensio (H.), Decaux
(E.), Pellet (A.), Droit international pénal, Pédone, Paris, 2000, pp. 653-654. Voir aussi : Costes (E.),
Harnequaux (A.), Tripoteau (C.), Le Tribunal militaire international de Tokyo, IEP 4ème année, Séminaire
justice internationale M. Raimbault, pp. 3-4. Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op.
cit., pp. 15-19. 3 Bassiouni (C.), Une étude historique de la Cour pénale internationale : 1919-1998, Nouvelles études pénales,
13 quater, Toulouse, Erès, p. 13. Voir aussi : Néron (J.), La justice et l’histoire dace aux procès pour crimes
contre l’humanité : entre la mémoire collective et la procédure, Mémoire de fin d’étude de DEA, présenté à
l’Université de Montréal, 2010, pp. 1-15.
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Nuremberg1. L’année suivante, le 9 décembre 1948, toujours suivant les mêmes principes
inspirateurs, une nouvelle sollicitation est prononcée à la CDI par l’Assemblée générale, à
savoir examiner le caractère propice de la conjoncture. La résolution dit : « souhaitable et
possible » à la création d’un organe judiciaire pénal, notamment « une chambre pénale de la
Cour internationale de Justice». Au même temps, les rédacteurs de la Convention pour la
prévention et la répression du crime de génocide demandaient la mise en place d’une CPI car
ils avaient anticipé le fait que les personnes accusées de ce crime puissent être renvoyées
devant une telle cour2. L’idée d’instituer une juridiction internationale pour traiter des crimes
les plus graves semblait donc pouvoir recevoir un accueil favorable après ces événements qui
avaient heurté la conscience de la Communauté internationale. Toutefois, des raisons
juridiques mais aussi et surtout politiques entraînèrent la suspension de ces travaux jusqu’à
des temps plus propices. Juridiquement, l’existence des divergences juridiques sur la
définition de l’agression a entrainé en 1954 le report sine die des travaux du comité
préparatoire. Notons d’ailleurs que, politiquement, la Guerre Froide n’était pas une période
favorable à un compromis global mais plutôt à un affrontement des souverainetés. L’absence
de synchronisation entre les travaux sur le projet de Statut d’une cour pénale n’était pas
fortuite mais résultait d’une volonté politique de retarder l’établissement d’une CPI à une
époque où le monde était profondément divisé et au bord de la guerre. Autrement dit, après
ces tentatives sérieuses d’établir une CPI, le monde entier a vécu une période où ce concept
idéaliste a été oublié. Cette fois, ce n’était pas dû à un manque de volonté internationale mais
bien au contexte de Guerre Froide qui paralysait tous les efforts internationaux conduisant à
l’établissement d’une CPI3.
1 Bercheraoui (D.), L’exercice des compétences de la Cour pénale internationale, RIDP, vol.76/2005, Nos 3-4,
p. 343. Voir aussi : Bassiouni (C.), Note explicative sur le Statut de la Cour pénale, op. cit., p. 2. Mutabaruka
(A.), La problématique de la répression des crimes de droit international par les juridictions pénales
internationales, op. cit., http://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-
crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.html. 2 David (E.), La Cour pénale internationale : une Cour en liberté surveillée ?, in International law forum, 1998,
p. 20. 3 Bassiouni (C.), L’expérience des premières juridictions pénales internationales, op. cit., p. 654. Voir aussi :
Aziz (A.), L’action de la Cour pénale internationale au Darfour, Mémoire de fin d’étude de DEA, présenté à
l’Université de Liège, 2010, pp. 8-9.
http://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.htmlhttp://www.memoireonline.com/06/09/2106/m_La-problematique-de-la-repression-des-crimes-de-droit-international-par-les-juridictions-penales-int17.html
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2. L’évolution historique de la création de la Cour pénale internationale après la Guerre Froide
Comme nous venons de le mentionner, la justice pénale internationale, pourtant
envisagée dans les premières années de l’ONU, a connu une longue période de défaillance
tout au long de la Guerre Froide, et ce malgré les multiples violations des Droits de l’Homme
et la perpétration des crimes contre l’humanité. Une question se pose cependant concernant la
Guerre Froide : pourquoi a-t-elle interrompu les progrès du projet d’une CPI ? Cela est-il
réellement dû à l’engagement des Etats-Unis dans cette guerre ? Ce pays belligérant sur
différents fronts craignait-il l’instauration d’une Cour devant laquelle ses ressortissants
seraient susceptibles d’être poursuivis pour les crimes commis au cours de ces conflits ?
Tandis que les Etats-Unis soutenaient à l’origine l’idée d’une CPI, ce refus de laisser juger
leurs citoyens par des tribunaux impartiaux persistera-t-il après l’institution d’une telle
Cour 1? La Guerre Froide faisant barrage à la réalisation d’une telle juridiction, il a fallu
attendre la fin de cette période pour la reprise des travaux préparatoires d’une CPI, et pour
parvenir à l’adoption d’un projet de Statut de cette dernière2.
Entre temps, l’ampleur des crises humanitaires ainsi que la gravité des violations des
droits fondamentaux de l’Homme perpétrées à l’encontre des civils dans l’ex-Yougoslavie ont
amené l’ONU, spécialement le Conseil de sécurité, en vertu de ses pouvoirs de maintien de la
paix et de la sécurité internationales, à prendre cette situation en main en jugeant les
responsables de ces massacres. Une telle situation nécessiterait l’intervention et par là même
l’existence d’une CPI mais l’ONU, représentée par le Conseil de sécurité, a choisi
d’emprunter la voie la plus rapide. En effet, ce dernier ne souhaitait nullement la mise en
place d’une CPI permanente, ayant pour compétence de juger tous ceux qui s’attaqueraient à
la paix et la sécurité internationales. Il a recouru à des solutions provisoires par la création de
juridictions internationales, fonctionnant plus ou moins sous son contrôle. Ainsi, avec la
question de l’ex-Yougoslavie (Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie/TPIY), le
Conseil a réagi, bien que ses pouvoirs ne soient pas clairement définis3, en prenant en 1993 la
résolution N° 827 instituant un tribunal pour juger les responsables de crimes contre
1 Pour plus d’informations sur ce point, voir : infra, pp. 205-209. 2 Bercheraoui (D.), L’exercice des compétences de la Cour pénale internationale, op. cit., p. 343. 3 Voir : infra, pp. 36-38.
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l’humanité et les violations massives du droit international humanitaire1. Par ailleurs, l’idée
d’un mécanisme juridictionnel international n’est pas restée lettre morte. En effet, en 1994 la
CDI présentait enfin son projet de Statut portant création de la CPI à l’ONU, et le processus
de création d’une Cour permanente est entré dans sa phase diplomatique. Mais cette année-là,
d’autres événements, à savoir les massacres du Rwanda, témoignent de graves violations du
droit international humanitaire et des droits de l’Homme et ce depuis l’année 1991 selon les
rapports du Secrétaire général de l’ONU. Face à cette nouvelle situation, l’ONU et son
Conseil de sécurité ont préféré suivre la même direction que pour l’ex-Yougoslavie : créer
une nouvelle fois un tribunal pour juger les responsables de ces crimes commis au Rwanda
(Tribunal pénale international pour Rwanda/TPIR), par la résolution N° 955 de 1994, et
tourner le dos au projet d’une CPI permanente porté par la CDI. D’autant que les Statuts de
ces deux tribunaux ont sans aucun doute largement bénéficié des résultats des travaux de la
CDI2. Une nouvelle étape fut franchie en 1996, à savoir un événement laissant les mains
libres à l'ONU et à son Conseil de sécurité pour représenter à nouveau le commanditaire
principal de la paix et la sécurité internationales. Cette tragédie se déroulait sur le territoire de
la Sierra Leone qui a connu une guerre civile. Des crimes épouvantables ont été commis dans
la région, notamment des crimes contre l’Humanité, qui portaient atteinte, du point de vue du
Conseil de sécurité, à la paix et la sécurité internationales. A la fin de ce conflit, le
gouvernement de la Sierra Leone demande à l’ONU de l’aider à mettre en place un moyen
pour traiter des crimes commis pendant les affrontements restés impunis. L’ONU, toujours
représentée par le Conseil, prend cette demande en considération et y puise une nouvelle
raison de poursuivre sa politique. Aussi, le 16 janvier 2002 est créé par un accord entre le
gouvernement sierra léonais et l’ONU un Tribunal Spécial pour la Sierra Leone/TSSL dont le
but est de poursuivre les personnes qui s’avèreraient porter les plus grandes responsabilités
dans les graves violations du droit humanitaire international et de la Loi de la Sierra Leone
qui ont eu lieu dans cette région depuis le 30 novembre 19963. La constitution de ces trois
1 Chrestia (P.), L’influence des droits de l’Homme sur l’évolution du droit international contemporain, RTDH,
1999, N° 40, p. 734.Voir aussi : la résolution 827 du 25 mai 1993 du Conseil de sécurité, UN.Doc.S/RES/827
(1993). 2 La résolution 955 du 8 novembre 1994 du Conseil de sécurité, UN.Doc.S/RES/955(1994). 3 Lefranc (S.), La justice transitionnelle n’est pas un concept, la Découverte-Mouvements, 2008/1 - N° 53, p.
65. Voir aussi : Adenuga (M.), Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone et ses effets sur l’accord d’amnistie de
Lomé, la Découverte-Mouvements, 2008/1 - N° 53, p. 126. La résolution 1315 du 14 août 2000 du Conseil de
sécurité, UN.Doc.S/RES/1315 (2000).
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21
tribunaux découle des bouleversements du contexte international, à savoir la fin de la Guerre
Froide accompagnée d’un consensus politique nouveau au sein du Conseil de sécurité1.
Nonobstant, à cette époque, la réelle possibilité de l’existence d’une CPI permanente, l’ONU,
ou plutôt le Conseil de sécurité, a concrétisé son objectif de création de deux tribunaux, l’un
pour l’ex-Yougoslavie et l’autre pour le Rwanda. Malgré des difficultés de fonctionnement,
ces deux tribunaux eurent un impact considérable dans l’histoire de la justice pénale
internationale. Mais dans le même temps, rappelons que, ayant été créés par des résolutions
adoptées dans le cadre du chapitre VII, ils fonctionnent sans le consentement des Etats2.
Revenons en 1995, alors que l’Assemblée générale décide dès lors de mettre en place
un comité préparatoire pour examiner les modalités d’établissement de la CPI3. En 1996, elle
confirme le mandat octroyé à la Commission préparatoire. Entre 1996 et 1998, se tiennent à
New York six comités préparatoires qui deviennent alors le lieu d’une intense activité des
ONG, ces dernières ayant gagné en maturité politique et technique. En mars 1998, le Comité
préparatoire adopte finalement un projet de Statut consolidé ainsi qu’un projet d’acte final
renforcé. Lors d’une ultime réunion, il soumet un texte synthétique reflétant cependant de très
larges divergences de vues entre Etats. Ce texte est proposé lors d’une conférence
diplomatique qui se déroule à Rome du 15 juin au 17 juillet 1998 en vue de négocier ce projet
de Statut d’une CPI : 160 Etats ainsi que des centaines d’ONG participent à ces cinq semaines
d’intenses discussions4.
Pendant la phase préparatoire qui se déroule dans la même ville, le projet de base de
la CDI est porté par une coalition de pays appartenant aux différents groupes régionaux. Un
groupe auto-baptisé d’Etats pilotes se ferme progressivement aux autres groupes, s’octroyant
pour objectif commun l’aboutissement rapide des travaux au détriment parfois du contenu du
Statut, de sa cohérence et de sa précision. Tous les membres de l’Union Européenne ainsi que
la Suisse, le Canada, l’Australie, l’Argentine, l’Afrique du Sud, l’Egypte, la Corée du Sud et
Singapour se rassemblent dans cette coalition. En revanche, les Etats les plus réticents que 1 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., p. 23. 2 Chrestia (P.), L’influence des droits de l’Homme sur l’évolution du droit international contemporain, op. cit.,
pp. 735-736. 3 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., pp. 22-23. 4 Dobelle (JF.), La Convention de Rome portant Statut de la Cour pénale internationale, AFDI, 1998, pp. 356-
375.
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22
sont la Chine, les Etats-Unis et l’Inde s’expriment peu jusqu’à une date avancée du processus.
Ainsi, les Etats-Unis n’ont jamais dévoilé leur carte maîtresse lors du commentaire de certains
articles, même dans les dernières heures précédant l’adoption du Statut. Ce n’est qu’à partir
de 1997 qu’ils commencent à faire part de leurs réserves à l’égard de ce Statut. En effet,
Washington semblait n’avoir jamais accepté la remise éventuelle de citoyens américains à une
juridiction pénale internationale1. Pendant toutes les discussions, « les Etats-Unis ont donc
tenté d’introduire des dispositions permettant de faire une distinction entre les méchants
Etats obligés de coopérer avec la Cour et les gentils Etats dont les ressortissants seraient par
principe renvoyés devant leur justice nationale »2. Jusqu’au 8 juillet, des efforts importants
ont été déployés pour obtenir l’adhésion des Etats-Unis. Le 9 juillet, une longue liste
d’exigences, contenant encore le principe de non-remise des nationaux, est présentée mais les
Etats-Unis ont clairement exprimé leur refus de se joindre aux signataires3. Quoi qu’il en soit,
l’impossibilité d’un échec a contraint à une logique de compromis délicats, et ce jusqu’au
bout. Une série de textes de compromis a en effet été élaborée par le bureau de la commission
plénière et des propositions ont été présentées à la conférence, rendant alors possible un
accord sur les tenants et les aboutissants de cette Cour4.
Le texte proposé par le Bureau le 17 juillet, dernier jour de la conférence, constitue la
base de l’accord. Ce jour-là, le Statut est voté et approuvé par une majorité de plus des deux
tiers : 120 Etats favorables, 7 contre et 21 abstentions. Le Statut de Rome de la CPI était ainsi
adopté. Ce Statut et l’acte final étaient ouverts aux signatures. Lors d’une cérémonie présidée
par le Secrétaire Général de l’ONU, le 18 juillet en fin d’après-midi, 26 Etats avaient signé.
Sur le plan politique, la légitimité de la CPI ne peut être remise en question, car elle a été
créée sous l’impulsion de l’Assemblée générale de l’ONU et non à la seule initiative du
Conseil de sécurité, comme ce fut le cas pour les deux tribunaux ad hoc pour l’ancienne
Yougoslavie et le Rwanda. Le Statut de Rome a dès lors acquis valeur de Traité soumis à
1 Ibid, pp. 357-358. Pour plus d’informations, Voir : Coulée (F.), Sur un Etat tiers bien peu discret : les Etats-
Unis confrontés au Statut de la Cour pénale internationale, AFDI, 2003, pp. 27-32. 2 Dobelle (JF.), La Convention de Rome portant Statut de la Cour pénale internationale, op. cit., p. 357. 3 Bassiouni (C.), Note explicative sur le Statut de la Cour pénale, op. cit., p. 32. Voir aussi : Dobelle (JF.), La
Convention de Rome portant Statut de la Cour pénale internationale, op. cit., pp. 356-357. 4 Broomhall (B.), La Cour pénale internationale : présentation générale et coopération des Etats, Nouvelle
étude pénale, 1999, N° 13, pp. 52-53. Voir aussi : Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale
internationale, op. cit., p. 24.
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23
signature et à ratification. Il faut donc souligner que, du point de vue des pays favorables à la
création de cette Cour et à son entrée en fonction rapide, l’adoption de ce Statut représente en
soi un résultat extrêmement positif1. La CPI est devenue une réalité, son Statut étant entré en
vigueur, adopté par un Traité qui établit cette Cour. Puisque les tribunaux de Nuremberg et de
Tokyo représentent la justice du vainqueur, une question reste néanmoins à élucider : quel
sera donc, en la matière, l’avenir de la CPI ?
(B) Présentation de la Cour pénale internationale et du Conseil de sécurité
La mise en place de la CPI est l’aboutissement d’un long cheminement débuté en
1872 à Genève et achevé en 1998 à Rome2. Ce parcours rend évidente la vocation d’une
justice pénale internationale ainsi que l’obligation des responsables de crimes contre
l’humanité d’en rendre compte à la justice. Les institutions juridiques mais aussi sociales,
politiques, économiques, sont indispensables à la réalisation d’une justice internationale.
Cette idée doit bien évidemment subsister et s’appliquer dans les sociétés nationales et
internationales afin de mener à bien les objectifs de cette justice orientés vers ces valeurs3.
Malgré la faiblesse de certains compromis, la Conférence a marqué un recul de la culture de
l’impunité4. Le succès de la conférence de Rome est notable. Mais mener à bien ce projet ne
dépend pas uniquement de l’activité et de l’instrument juridique, que ce soit au niveau
national ou international, mais également d’autres instruments, en particulier des institutions
politiques comme le Conseil de sécurité. C’est pourquoi nous aborderons les relations que la
CPI entretient avec le Conseil de sécurité de l’ONU. Ce que nous développerons dans cette
introduction n’est en rien inédit, mais le fait de présenter le fondement, la structure et les
fonctions de la CPI et du Conseil de sécurité s’avère nécessaire puisque notre recherche
s'appuie de façon incontournable sur ces deux organes. Il conviendra par conséquent de
présenter dans un premier temps ces deux organes mais aussi leurs pouvoirs, leurs missions et
les objectifs qui leur sont confiés, pour pouvoir préciser par la suite dans quelle mesure ces
1 Zakr (N.), Les aspects institutionnels de la Cour pénale internationale, JDI, 129/2002, N° 2, p. 431.Voir
aussi : Broomhall (B.), La Cour pénale internationale : présentation générale et coopération des Etats, op. cit.,
p. 53. 2 Badinter (R.), De Nuremberg à la Haye, op. cit., p. 699. 3 Bassiouni (C.), Une étude historique de la Cour pénale, op. cit., p. 1. 4 Politi (M.), Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale : le point de vue d’un négociateur, RGDIP,
113/1999, N° 4, p. 823.
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24
entités se sont écartées de leurs objectifs premiers et ont bafoué leurs missions en abusant de
leurs pouvoirs. Nous procèderons à une présentation générale tout d’abord de la CPI (1) puis
du Conseil de sécurité (2).
1. Présentation générale de la Cour pénale internationale
En 1998, la Commission des Affaires Etrangères de la Défense et des Forces Armées
du Sénat français avait déclaré : « Le siècle prochain s'ouvrira peut-être sur une innovation
majeure : avec la création de la Cour pénale internationale, les auteurs et les instigateurs des
crimes les plus graves contre le droit international humanitaire sauront qu'ils auront à rendre
compte de leurs actes. Quelle rupture plus éloquente avec ce siècle qui s'achève et qui fut
celui de l'impunité pour tant de responsables d'actions inqualifiables ? »1. Désormais,
l’existence de cette institution est acquise et son rôle est une réalité sur la scène internationale.
Mais la question est celle de sa capacité à rendre la justice, à faire cesser les massacres et à
mettre fin à l’impunité des responsables. Sans s’arrêter sur les détails des négociations qui ont
caractérisé les cinq semaines des travaux de la conférence, indiquons qu’étaient présentes les
délégations de plus de cent soixante Etats, auxquelles il faut ajouter plusieurs organisations
internationales et quelques centaines d’ONG.
• L’organisation de la Cour pénale internationale
L’entrée en vigueur du Statut de la CPI est subordonnée à soixante ratifications.
Cette clause est difficile à satisfaire2. Cette Cour est une institution internationale permanente
créée en vertu du Traité de Rome après avoir été négociée entre les Etats présents à la
conférence diplomatique de Rome3. La CPI est une innovation hardie et sa création convient
1 Dulait (A.), La Cour pénale internationale, la Commission des Affaires étrangères et de la Défense et des
forces armées, rapport du sénat, Paris, 27 avril 1999. 2 Daillier (P.), Nguyen (D.), Pellet (A.), Le droit international public, 7e édition, LGDJ, Paris, 2002, p. 1455.
Voir aussi : Keithall (C.), Première proposition de création d’une Cour criminelle internationale permanente,
op. cit., pp. 61-62. 3 Weckel (P.), La Cour pénale internationale, présentation générale. RGDIP, 102-1998, N° 4, p. 983. Voir
aussi : Zappala (S.), La justice pénale internationale, Montchrestien, Paris, 2007, p. 105. Coulée (F.), Sur un
Etat tiers bien peu discret : les Etats-Unis confrontés au Statut de la Cour pénale internationale, op. cit., pp. 36-
37.
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au mouvement contemporain en faveur d’une juridiction criminelle interétatique, mouvement
destiné à acquérir une ampleur et une force croissante de par sa conformité à l’évolution subie
par le droit dans tous les groupements humains1. Ce n’est pas un organe supranational mais
international semblable à d’autres existants2. En effet, la Cour ne se substitue pas à la
compétence pénale nationale mais elle la complète car le Statut de cette Cour a adopté le
principe de complémentarité où la priorité est donnée aux compétences nationales3. Les
objectifs de la CPI sont multiples : établir une justice exemplaire et rétributive, fournir une
réparation aux victimes, effectuer le devoir de mémoire, renforcer les valeurs sociales et la
droiture individuelle, éduquer les générations présentes et à venir, et le plus important,
décourager et prévenir de futurs actes répréhensifs. Comme pour toute institution humaine, le
succès de la Cour dépend de ceux qui en feront partie. Néanmoins, ceux-ci nécessiteront les
ressources et le soutien politique de nombreux Etats afin que le fonctionnement de cette
institution au rôle considérable soit géré avec efficience. A en juger par la vague de soutien
témoignant du bien-fondé de cette institution, les perspectives semblent lui être favorables4.
Dès l’amorce des travaux préparatoires, remarquons, au travers des négociations, que
l’adoption du Statut de la Cour n’a été possible que par l’affirmation du principe de
complémentarité de la compétence de la Cour par rapport à celle des juridictions nationales.
Ce principe est à l’inverse du TPIY et du TPIR puisque ces deux juridictions bénéficient
d’une primauté sur les juridictions nationales5. Concernant la CPI, il est utile de remarquer
que le préambule précise que les Etats conservent leur obligation de poursuivre les personnes
présumées responsables de crimes internationaux et que la Cour est simplement
complémentaire des juridictions des Etats6. De plus, l’article premier du Statut de Rome
réaffirme aussi cette relation entre juridictions internationales et internes en prévoyant de
1 Sottile (A.), Le terrorisme international, RCADI, 1938, vol. III, p. 175. Voir aussi : Le Statut de la Cour pénale
internationale (article I). Coulée (F.), Sur un Etat tiers bien peu discret : les Etats-Unis confrontés au Statut de
la Cour pénale internationale, op. cit., pp. 31-34. 2 Bassiouni (C.), Note explicative sur le Statut de la Cour pénale internationale, op. cit., p. 4. 3 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., p. 31. Voir aussi : Le Statut de la Cour
pénale internationale (article 5). Weckel (P.), La Cour pénale internationale, présentation générale, op. cit., p.
985. 4 Bassiouni (C.), Etude historique de la Cour pénale internationale, op. cit., p. 2. 5 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., p. 95. 6 Le Statut de la Cour pénale internationale (le point 6 du préambule).
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manière explicite que la Cour est complémentaire des juridictions criminelles nationales. Une
lecture des articles 17 et 18 du Statut de Rome relatifs aux questions d’admissibilité semble
d’ailleurs confirmer cette idée. L’examen de telles dispositions atteste que la Cour est
compétente pour mener des enquêtes et engager des poursuites dans certains cas : lorsque le
système juridique national s’effondre ou lorsqu’il refuse ou manque à son obligation juridique
d’enquêter et de poursuivre les personnes suspectées d’avoir commis des crimes relevant de la
compétence de la Cour ou de punir les personnes coupables de tels crimes1.
Par ailleurs, le Statut prévoit que la Cour est composée de dix-huit juges devant
représenter équitablement les deux sexes et les différents systèmes juridiques du monde, élus
pour neuf ans et non rééligibles2. Aucune limite d’âge n’est prévue. Les dix-huit juges sont
élus par l’assemblée des Etats parties. En matière de droit international3, le Statut n’autorise
pour chaque Etat qu’une candidature, cette dernière n’ayant pas forcément la nationalité de
l’Etat qu’elle représente mais obligatoirement celle d’un Etat partie4. Le Statut, par les articles
40 et 41, garantit l’indépendance et l’impartialité des juges5. La Cour est quant à elle
composée d’une présidence, de trois sections juridictionnelles, d’une section d’appels, d’une
section de première instance et d’une section préliminaire, mais aussi du bureau du Procureur
et du greffe :
- La présidence est composée de trois juges, d’un président, d’un premier et
d’un second vice-président. Cette section est chargée de l’administration de la Cour,
à l’exception bien sûr du bureau du Procureur6.
- Le greffe est dirigé par un greffier et un greffier adjoint mais il n’est pas un
organe autonome, il est placé sous l’autorité du Président de la Cour et est chargé de
l’administration non judiciaire7.
1 Bassiouni (C.), Note explicative sur le Statut de la Cour pénale internationale, op. cit., p. 5. Voir aussi : Le
Statut de la Cour pénale internationale (articles 1, 17 et 18). 2 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., p. 31. 3 Buchet (A.), Organisation de la Cour et procédure, in Colloque Droit et Démocratie, la Cour pénale
internationale, La Documentation française, Paris, 1999, pp. 29-34-35. 4 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., p. 31. 5 Buchet (A.), Organisation de la Cour et procédure, op. cit., p. 35. 6 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., p. 29. 7 Trean (C.), Adoption du Statut de la Cour pénale internationale, les principaux points du traité adopté sous
l’égide des Nations Unies, in La justice pénale internationale, Dossier d’actualité mondiale, p. 29. Voir aussi :
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- Les chambres sont réparties en trois sections : la section des appels comprend
le président et quatre autres juges. La section de première instance comprend six
juges et peut être constituée en une ou plusieurs chambres de première instance,
chacune de ces chambres étant composée de trois juges. La section préliminaire
comprend également six juges et peut être formée d’une ou plusieurs chambres
préliminaires, chacune composée normalement de trois juges ou d’un juge unique
pour les cas qui sont précisés par le Statut ou qui le seront par le règlement de
procédure et de preuve.
- Le bureau du Procureur : l’article 42 détermine le Statut et la fonction du
Procureur, tout en précisant ses pouvoirs, les modalités de son élection ou de sa
récusation, ainsi que les conditions requises pour l’accession à ce poste. Le Procureur
est élu par l’assemblée des Etats parties. Il en va de même pour le ou les Procureurs
adjoints élus sur une liste de candidats proposée par le Procureur : leur mandat est de
neuf ans non renouvelable1. Le bureau du Procureur est un organe indépendant de la
Cour, dirigé par le Procureur, qui est assisté par un ou plusieurs Procureurs adjoints.
Cette indépendance comme l’impartialité de ce bureau sont garanties par le Statut et
non par le Procureur. Celui-ci est habilité à ouvrir des enquêtes de sa propre initiative
sur la base de renseignements concernant les crimes relevant de la compétence de la
Cour. S’il considère que des éléments suffisants justifient l’ouverture d’une enquête,
il doit présenter à la Chambre préliminaire une demande d’autorisation en ce sens. Si
celle-ci accède à cette demande, le Procureur le notifie à tous les Etats parties et aux
Etats concernés2. Toutefois, il peut se voir sollicité par le Conseil de sécurité pour
ouvrir une enquête en vertu d’une résolution prise dans le cadre du chapitre VII de la
Charte de l’ONU3, tout comme les Etats parties et le Procureur4.
Buchet (A.), Organisation de la Cour et procédure, op. cit., p. 29. Le Statut de la Cour pénale internationale
(article 43). 1 Buchet (A.), Organisation de la Cour et procédure, op. cit., p. 23. 2 Le Statut de la Cour pénale internationale (articles 42 et 43). 3 Pour plus d’informations sur ce point, voir : infra, pp. 58-68. 4 Trean (C.), Adoption du Statut de la Cour pénale internationale, les principaux points du traité adopté sous
l’égide des Nations Unies, op. cit., pp. 29-35. Voir aussi : Fontanaud (D.), La justice pénale internationale,
Problèmes politiques et sociaux, 27 août 1999, La Documentation française, N° 826, p. 58.
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• La compétence de la Cour pénale internationale
Le Statut de la CPI délimite, de façon précise, la compétence de cette Cour en
déterminant les cas et les conditions dans lesquels elle peut exercer son rôle en tant
qu'institution juridique. Cet axe a d’ailleurs constitué l'un des thèmes prépondérants
approfondis lors des négociations à Rome mais aussi l’une des raisons pour lesquelles des
Etats ont refusé d’adhérer à la Cour. Il était donc indispensable de déterminer la compétence
de la Cour sans aucune ambiguïté. En réalité, une majorité des Etats partageait la perspective
que la Cour acquerrait une compétence universelle mais subsistait conjointement une forte
opposition américaine1. Les Etats-Unis ont en effet utilisé tous les moyens de pression afin de
limiter la compétence de cette Cour, soutenant notamment que la juridiction de cette Cour
violait les droits des Etats non parties au Statut en leur imposant des obligations auxquelles ils
n’avaient pas consenti.
Par ailleurs, l’article 12 dispose que « la Cour peut exercer sa compétence si l’un des
Etats suivants ou les deux sont Parties au présent Statut ou ont accepté la compétence de la
Cour conformément au paragraphe 3 : a) L’Etat sur le territoire duquel le comportement en
cause a eu lieu ou, si le crime a été commis à bord d’un navire ou d’un aéronef, l’Etat du
pavillon ou l’Etat d’immatriculation. b) L’Etat dont la personne accusée du crime est un
ressortissant ». Cet article ne limite pas la compétence de la CPI aux crimes commis sur le
territoire d’un Etat partie puisque la cour est également compétente en cas de crimes commis
par un citoyen d’un Etat partie2. C’est pourquoi a été menée une lutte acharnée contre
l’élargissement de la compétence de la Cour prévu par cet article et de nombreuses tentatives
des Etats-Unis ont vu le jour afin de subordonner toute investigation de la Cour au
consentement préalable des Etats en question, a fortiori l’Etat de la nationalité de la personne
accusée3. Il n’est pas surprenant que les Etats parties aient souhaité regrouper les questions
relatives à la compétence de la Cour, et notamment aux conditions d’exercice de sa
compétence. Rien, en effet, n’interdisait de prévoir des chapitres séparés s’agissant de cette 1 Zappala (S.), La justice pénale internationale, op. cit., p. 109. 2 Cet article appelé Conditions préalables à l’exercice de la compétence, prévoit que la Cour est compétente si le
crime a été commis sur le territoire d’un Etat partie et/ou la personne accusée du crime est un ressortissant d’un
Etat partie. Voir : le rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa 46e session, A/49/10. 3 Pour plus d’informations, voir : infra, pp. 205-209. Nous mettrons en évidence toutes les oppositions
américaines concernant la Cour pénale internationale et sa compétence.
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question fondamentale. Les Etats parties ont donc clairement exprimé leur souci de lier la
question de la détermination des mécanismes de déclenchement de la compétence de la Cour
à celle de la détermination de l’étendue de sa compétence, rappelant que la Cour devait avoir
une vocation de nature universelle1.
- Crimes relevant de la compétence de la Cour Le domaine de compétence matérielle déterminé par l’article 5 du Statut ne comporte
que les quatre catégories de crimes en rapport étroit avec le maintien de la paix et de la
sécurité internationales : les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de
guerre et le crime d’agression. Le Statut de Rome a précisément défini ces crimes par les
articles 6, 7,8 et 92. Toutefois, en ce qui concerne le crime d’agression, les Etats participant à
la Conférence diplomatique n’ont pu s’entendre sur sa définition. Par conséquent, le Traité
suspend à l’égard de ce crime la compétence de la Cour qui n’interviendra alors qu’après
l’adoption d’un Amendement définissant l’incrimination et fixant les modalités de la saisine3.
- La compétence ratione temporis La Cour est exclusivement compétente à partir du moment où le texte qui énonce son
Statut entre en vigueur. En ce sens, l’article 11 du Statut affirme en effet que « La Cour n’a
compétence qu’à l’égard des crimes relevant de sa compétence commis après l’entrée en
vigueur du présent Statut». Cette question de la compétence ratione temporis est importante
1 Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour pénale internationale, op. cit., p. 34. 2 Condorelli (L.), La Cour pénale internationale : un pas de géant, RGDIP, vol. 103-1999, N° 1, p. 9. Voir
aussi : le Statut de la Cour pénale internationale (article 6). Trean (C.), Adoption du Statut de la Cour pénale
internationale, les principaux points du traité adopté sous l’égide des Nations Unies, op. cit., p. 58. Pour plus
d’informations sur les définitions des crimes relevant de la compétence de la CPI, voir : le Statut de la Cour
pénale internationale (articles 6-7-8 et 9). Buchet (A.), Organisation de la Cour et procédure, op. cit., pp. 46-47.
Condorelli (L.), La Cour pénale internationale : un pas de géant, op. cit., p. 10. Weckel (P.), La Cour pénale
internationale, présentation générale, op. cit., p. 985. Pazartzis (P.), La répression pénale internationale des
crimes internationaux : justice internationale, Pédone, Paris, 2007, pp. 36-37. Bassiouni (C.), Etude historique
de la Cour pénale internationale, op. cit., p. 50. Trean (C.), Adoption du Statut de la Cour pénale
internationale, les principaux points du traité adopté sous l’égide des Nations Unies, op. cit., pp. 58-59. 3 Voir : infra, pp. 294-298 et 315-323. Voir aussi : Brana (P.), Rapport autorisant la ratification de la
Convention portant Statut de la Cour pénale internationale, Assemblée nationale, enregistré à la Présidence de
l'Assemblée nationale le 8 février 1999, Rapport fait au nom de la Commission des affaires étrangères sur le
projet de Loi N° 2065, 1999, pp. 16-25.
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s’agissant d’obligations consenties débouchant sur des sanctions pénales. Nous abordons
également cette question sous un autre angle complémentaire : dans le cas où un Etat
rejoindrait les signataires du Traité, la Cour ne serait compétente pour cet Etat qu’à l’égard
des crimes commis après l’entrée en vigueur du Statut1. Cette disposition signifie donc que les
crimes commis avant le premier juillet 2002, date de son entrée en vigueur, échappent à la
juridiction de la Cour mais nullement que ces crimes demeureront impunis. Ils doivent dès
lors être sanctionnés sur la base d’autres mécanismes de responsabilité2. Allons un peu plus
loin : peut-on envisager que l’Etat puisse faire rétroagir la compétence de la Cour à des crimes
commis avant son accession au Statut? En effet, l’article 11-2 du Statut dispose que « Si un
Etat devient Partie au présent Statut après l’entrée en vigueur de celui-ci, la Cour ne peut
exercer sa compétence qu’à l’égard des crimes commis après l’entrée en vigueur du Statut
pour cet Etat, sauf si ledit Etat fait la déclaration prévue à l’article 12, paragraphe 3 ». Et le
paragraphe 3 de l’article 12 énonce que : « Si l’acceptation de la compétence de la Cour par
un Etat qui n’est pas Partie au présent Statut est nécessaire aux fins du paragraphe 2, cet
Etat peut, par déclaration déposée auprès du Greffier, consentir à ce que la Cour exerce sa
compétence à l’égard du crime dont il s’agit. L’Etat ayant accepté la compétence de la Cour
coopère avec celle-ci sans retard et sans exception conformément au chapitre IX ». L’article
12/3 confirme dès lors cette possibilité : un Etat pourrait donc, dans ces limites, reconnaître
rétrospectivement la compétence de cette Cour3. La volonté stricte de cette Cour qui se
1 Le Statut de la Cour pénale internationale, (article 11). L’article 11 appelé Compétence ratione temporis,
stipule que : « 1. La Cour n'a compétence qu'à l'égard des crimes relevant de sa compétence commis après
l'entrée en vigueur du présent Statut.
2. Si un État devient Partie au présent Statut après l'entrée en vigueur de celui-ci, la Cour ne peut exercer sa
compétence qu'à l'égard des crimes commis après l'entrée en vigueur du Statut pour cet État, sauf si ledit État
fait la déclaration prévue à l'article 12, paragraphe 3 ». Voir aussi : Bourdon (W.), Duverger (E.), La Cour
pénale internationale, op. cit., p. 74. Bassiouni (C.), Note explicative sur le Statut de la Cour pénale
internationale op. cit., p. 8. 2 Katansi (L.), Crimes et châtiments dans la région des Grands lacs, Cour pénale internationale, tribunaux
internationaux, tribunaux nationaux. L’Harmattan, Paris, 2007, p. 170. 3 David (E.), La Cour pénale internationale, RCADI, 2005, N° 313, p. 345. Voir aussi : Le Statut de la Cour
pénale internationale, (article 12). Cette modalité de la compétence de la CPI a été expérimentée dans la situation
de la Côte d’Ivoire : des violences et des graves violations des droits de l’homme et du droit international ont été
commises dans ce pays. La Côte d’Ivoire a signé le Statut de Rome le 30 novembre 1998 mais ne l’a jamais
ratifié. En avril 2003, la Côte d'Ivoire a accepté la compétence de la CPI en vertu des dispositions de l'article 12-
3 du Statut de Rome. C’est la première fois que la Cour a ouvert une enquête sur cette base. Le Procureur a
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manifeste d’abord dans la définition de sa compétence1 présente alors le double avantage de
faciliter l’adhésion au Traité et d’éviter certaines saisines polémiques qui risqueraient de
politiser l’action du juge. Par ailleurs, la doctrine semble le tolérer dans le respect de la règle
nullum crimen sine lege. Il semble pourtant difficile d’imaginer que la Cour puisse être saisie
de crimes commis avant l’entrée en vigueur du Statut. En revanche, le Statut n’exclut pas
nettement la compétence de la Cour à l’égard de crimes commis entre cette date et le moment
où un Etat reconnaît la compétence de cette Cour2.
- Les conditions préalables à l’exercice de la compétence Le Statut de Rome, dans son article 12, dispose des conditions préalables à l’exercice
de la compétence de la CPI. Cette disposition contient deux règles3 :
examiné la situation dans ce pays depuis 2003 afin de déterminer si une enquête était nécessaire, à la suite de la
communication par le gouvernement ivoirien d’une déclaration de reconnaissance de la compétence de la Cour.
Le 14 décembre 2010, le Président de la Côte d’Ivoire nouvellement élu, Alassane Ouattara, a envoyé une lettre
au Bureau du Procureur réaffirmant la reconnaissance de la compétence de la Cour par le gouvernement ivoirien.
Le 4 mai 2011, le président Ouattara a rappelé son souhait de voir la Cour ouvrir une enquête. Après un examen
préliminaire, le Procureur a conclu qu’il existait une base raisonnable pour croire que des crimes relevant de la
compétence de la Cour avaient été commis en Côte d'Ivoire depuis le 28 novembre 2010. Le 30 novembre 2011,
Laurent Gbagbo a été transféré à la CPI nationale en application d'un mandat d'arrêt délivré sous scellés par la
Chambre préliminaire III le 23 novembre 2011. Gbagbo, ancien Président de la Côte d’Ivoire, aurait engagé sa
responsabilité pénale individuelle, en tant que coauteur indirect, pour quatre chefs de crimes contre l’humanité à
raison de meurtres, de viols et d’autres violences sexuelles, d’actes de persécution et d’autres actes inhumains,
qui auraient été perpétrés dans le contexte des violences sur le territoire de la Côte d’Ivoire entre le 16 décembre
2010 et le 12 avril 2011. Pour plus d’informations sur ce point, voir : Communiqué de presse, Le Greffe
confirme que la République de Côte d’Ivoire a accepté la compétence de la Cour, ICC-20050215-91-Fr, 15
février 2005. CPI, site officiel de la Cour pénale internationale, disponible sur : http://www.icc-
cpi.int/FR_Menus/icc/Pages/default.aspx, référence de la page consultée le 23 mai 2011. La résolution 1975 du
Conseil de sécurité, UN.DOC.S/RES/1975 (2011). 1 Le Statut de la Cour pénale internationale (article 11). 2 Della morte (G.), Les frontières de la compétence de la Cour pénale internationale : observations critiques.
RGDIP, 73-2002, N° 12, pp. 33-34. Voir aussi : Weckel (P.), La Cour pénale internationale, présentation
générale, op. cit., p. 988. Coulée (F.), Sur un Etat tiers bien peu discret : les Etats-Unis confrontés au Statut de
la Cour pénale internationale, op. cit., pp. 32-38. 3 L’article 12 du Statut de Rome déclare que : « la Cour peut exercer sa compétence si l’un des Etats suivants ou
les deux sont Parties au présent Statut ou ont accepté la compétence de la Cour conformément au paragraphe 3
: a) L’Etat sur le territoire duquel le comportement en cause a eu lieu ou, si le crime a été commis à bord d’un