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1 Université Marc Bloch STRASBOURG II UFR des Sciences Sociales Institut de Démographie La mise en place de l’ONPMP (Observatoire National des Populations des Majeurs Protégés) Yves Breem Année 2002-2003 Rapport de stage préparé sous la direction de Monsieur Gilles Séraphin et Monsieur Didier Breton en vue de l’obtention du diplôme de DESS 2003

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Université Marc Bloch STRASBOURG II

UFR des Sciences Sociales Institut de Démographie

La mise en place de l’ONPMP

(Observatoire National des Populations des

Majeurs Protégés)

Yves Breem

Année 2002-2003

Rapport de stage préparé sous la direction de Monsieur Gilles Séraphin et

Monsieur Didier Breton

en vue de l’obtention du diplôme de DESS

2003

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Introduction............................................................................... 3 I. La connaissance de la sous-population et de l’organisme qui l’étudie au centre de la problématique de création d’un observatoire............................................................................... 5

A) L’Union Nationale des Associations Familiales (UNAF) et les personnes majeures protégées ....................... 5

1) Une union des Familles pour les familles ..................... 5 2) Pourquoi créer un observatoire des personnes majeures protégées ?........................................................................... 6 3) Quelques définitions utiles ............................................ 8

B) L’intérêt des statistiques démographiques lors de la création d’un observatoire de la population ........................ 10

1) Une donnée n’est utilisable que quand elle est homogénéisée .................................................................... 10 2) La confection du nouveau questionnaire..................... 16

II. L’établissement de l’observatoire des populations majeures protégées : une observation continue qui doit durer dans le temps....................................................................................... 19

A) L’analyse statistique d’enquête au centre des premières conclusions sur les données de l’ONPMP........................... 19

1) L’analyse de l’exhaustif ou la pure analyse d’un « stock »............................................................................. 19 2) L’analyse partielle de l’échantillon ou l’approfondissement des connaissances de la population majeure protégée ............................................................... 25

B) Réflexion sur la notion d’observation continue de la population majeure protégée ............................................... 28

1) Les difficultés à étudier cette sous-population par le biais des UDAF................................................................. 28 2) Réflexion sur le renouvellement de la sous-population des majeurs protégés ......................................................... 31

Conclusion .............................................................................. 40

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Introduction

En cette fin de vie scolaire, l’importance d’un stage n’est pas à négliger. En effet, nous

nous retrouvons dans une situation paradoxale où nous sommes encore étudiant et où

pourtant, nous sommes déjà tournés vers le monde professionnel et la recherche d’un emploi.

Nous savons que c’est sur notre expérience professionnelle que nous serons jugés au cours de

la suite de notre vie et c’est pourquoi cette première expérience, pourtant située dans un cadre

extra-scolaire, est d’une grande importance. Peut-être que cette expérience va conditionner

tout notre projet professionnel futur car elle sera la première chose visible sur notre premier

CV.

On se plaint très souvent du fait que l’université ne donne qu’une formation trop

théorique par rapport aux véritables aspects du monde professionnel. Et c’est pourquoi

compléter une année de formation par un stage s’avère aussi utile que nécessaire. Utile car il

nous donne une première idée du monde professionnel. La recherche même du stage est déjà

un premier pas vers le développement d’une expérience professionnelle car c’est un pendant à

une future recherche d’emploi. Et que dire de nos premières impressions sur des concepts

souvent peu connus en université, tel le travail d’équipe, la prise de décision, les relations

professionnelles, les connexions parfois contradictoires entre notre mission et les moyens

(autant temporels qu’économiques) mis en œuvre pour la réaliser, etc.… Ils joueront sur notre

manière d’appréhender le monde du travail. Ce qui nous fait revenir au concept de stage

nécessaire : l’expérience que nous allons y entretenir est peut-être en effet ce qui sera

significatif dans notre avenir professionnel.

Mais pourquoi avoir choisi l’UNAF et l’Observatoire des Populations Majeures

Protégées pour réaliser ce dernier stage dans le cadre de mon cursus universitaire ? De fait,

notre formation de démographe nous attire vers ce genre de projet d’observatoire. Parce que

c’est un type d’organisme fortement lié à la méthodologie démographique : c’est le genre de

mission qui demande des connaissances dans la lecture des bases de données, dans le suivi

longitudinal de sous-populations, etc. De plus, cet observatoire était un projet nouveau, neuf,

et rares sont les projets sur lesquels on peut travailler depuis le début. La notion d’observation

est un concept nouveau mais en parfaite adéquation avec le savoir-faire des démographes. Car

toutes les connaissances théoriques dont nous disposons après notre formation servent dans le

cadre d’une observation.

Qui plus est, en dehors de l’observatoire en lui-même, j’ai été intéressé par l’étude de

cette population trop peu connue. Même à l’heure actuelle et à l’époque du tout informatisé,

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les problématiques à résoudre sur les majeurs protégés ne sont pas claires. Et ce constat ne

rend que plus intéressant la mission à accomplir. Il y a eu en fait un véritable attrait pour

l’inconnu, et cet attrait s’explique par le fait que quand on étudie une population sur laquelle

personne n’a jamais réellement travaillé, on a conscience que ce que l’on trouve est une

véritable découverte, une première. J’ai été attiré par l’étude de cette population car c’était

une mission qui promettait de « créer » des connaissances que jamais personne n’avait réalisé.

Enfin, il faut bien avouer que l’UNAF est un organisme d’autant plus intéressant qu’il

existe également au niveau régional et au niveau départemental, ce qui peut ouvrir à mon avis

de nombreuses portes après avoir eu une expérience dans un observatoire comme l’ONPMP.

Finalement, en quoi consiste la mise en place d’un observatoire ? Après avoir montré

que le départ d’un observatoire ne peut être engagé sans une véritable connaissance de la

sous-population et de la base de données dans laquelle celle-ci est transcrite, j’analyserai les

premiers travaux réalisés dans une optique d’analyse de stocks et d’observation continue

d’une sous-population.

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I. La connaissance de la sous-population et de l’organisme qui l’étudie au centre de la problématique de création d’un observatoire

A) L’Union Nationale des Associations Familiales (UNAF) et les personnes majeures protégées

1) Une union des familles pour les familles

L’UNAF est une institution nationale chargée de promouvoir, défendre et représenter

les intérêts de toutes les familles vivant sur le territoire français, quelles que soient leurs

croyances ou leur appartenance politique. C’est donc une union d’associations dont le but est

de permettre l’expression des familles par rapport à une politique familiale globale. Située à

Paris, l’UNAF est la tête d’un réseau constitué également de 22 URAF (Union Régionale des

Associations Familiales) et de 100 UDAF (Union Départementale des Associations

Familiales).

A l’origine de la création de l’UNAF, on retrouve une volonté d’organiser le dialogue

entre les familles et les pouvoirs publics. En effet, au XXème siècle, les associations

familiales, créées pour la plupart au XIXème, n’ont plus comme seule fonction l’entraide

entre les familles : elles veulent désormais dans une plus large mesure défendre les intérêts de

ces familles à tous les niveaux. En parallèle, à la même époque, le gouvernement reconnaît

aux familles une place spécifique dans les institutions de la République et développe une

politique familiale volontariste et ambitieuse. C’est de cette double volonté que naît l’UNAF

et les UDAF à la suite d’une ordonnance promulguée le 3 mars 1945. Cette institution est

renforcée par la loi du 11 juillet 1975. Depuis lors, l’UNAF et son réseau sont les partenaires

institutionnels des pouvoirs publics dans tous les domaines de la politique familiale.

Les missions principales de l’UNAF sont de quatre types :

• Imaginer et proposer : l’UNAF est en effet un laboratoire d’idées qui recherche les

mesures les plus adaptées de politique familiale. Les thèmes récurrents sont l’enfance

et l’éducation, la jeunesse, l’accès à la connaissance, la santé, le logement,

l’environnement, la sociologie-psychologie-droit, l’économie… Tout cela concernant

bien entendu les familles.

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• Représenter : l’UNAF est le porte-parole des familles. C’est-à-dire qu’à travers 25000

délégués, elle défend l’intérêt des familles dans plusieurs centaines d’organismes.

• Gérer des services : par leurs formations, l’UNAF et son réseau ont créé un certain

niveau de professionnalisme, de rigueur, de gestion et de qualité dans de nombreux

services directs aux familles comme les tutelles aux majeurs protégés ou les tutelles

aux prestations sociales, pour ne citer que les services sur lesquels s’est basée ma

mission.

• Défendre : l’UNAF se porte partie civile dans les procès mettant en cause les intérêts

des familles, surtout les affaires mettant en jeu le droit de la consommation.

En terme d’organisation, il faut noter que l’UNAF est doté de 2 organes principaux :

l’Assemblée Générale, composée des représentants des UDAF, des mouvements familiaux et

des groupements à but familiaux, ainsi que le Conseil d’Administration, élu par l’Assemblée,

et dont le but est la désignation d’un bureau selon cinq secteurs d’activité (Sociologie-

psychologie-droit de la famille, Grands équilibres économiques et sociaux, Education-

formation et petite enfance, Vie quotidienne et médias, Habitat-cadre de vie-environnement).

En plus de ses deux organes, l’UNAF comprend également un service de formation, un

service de documentation et publie deux revues : Réalités familiales et Le délégué au CCAS.

Enfin, l’UNAF et son réseau sont financés par un fond doté de 0.1 % du montant des

allocations familiales versées annuellement par la CNAF, soit 145 millions de francs en 1998.

2) Pourquoi créer un observatoire des personnes majeures protégées ?

a) Une absence de données fiables

Ce qui est gênant en ce qui concerne cette sous-population, c’est qu’il n’existe pas

actuellement de statistiques fiables la concernant au niveau national. En fait, on ne possède

quasiment aucune donnée sur la population majeure protégée. Ce qui est problématique vu sa

taille (550000 personnes environ) et le fait qu’elle rencontre des difficultés suffisamment

importantes pour qu’on puisse vouloir une base de données fiables dans le but d’intervenir

plus facilement. En effet, au fil du temps, les caractéristiques des majeurs protégés changent,

ainsi que leurs besoins et leurs espoirs. Leur environnement familial évolue continuellement,

l’environnement social se transforme également et, enfin, le législateur souhaite changer la loi

(directives européennes). L’UNAF a donc un réel besoin de connaître cette sous-population

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pour faire évoluer ses pratiques, ses priorités et ses attentes. L’ONPMP se place comme un

outil efficace pour adapter l’aide sociale aux situations rencontrées (ces situations ne pouvant

être montrées du doigt que par des données chiffrées et des informations véritables).

L’intérêt de la création d’une base d’informations pertinentes sur les PMP (Personnes

Majeures Protégées) et sur les TPSA (Tutelles aux Prestations Sociales Adultes) est multiple.

Elle permettrait en effet d’étudier cette population dans le détail (autrement dit, son stock)

ainsi que son évolution annuelle (autrement dit, les tendances des flux). Mais surtout cette

base a la possibilité de fournir des informations qui permettraient à terme l’analyse des

trajectoires individuelles et des problématiques des majeurs protégés. Ces informations

cumulées d’année en année faciliteront la légitimité d’une action sociale sur les PMP ainsi

que le choix de cette action.

b) En quoi consiste la création de l’ONPMP ?

L’intérêt de la création de l’ONPMP n’étant plus à prouver, les membres de l’UNAF

se sont attelés dès l’été 2002 à consolider les bases de sa création. La méthode qui a été

choisie sépare la base de données à créer en deux volets :

• Un volet « exhaustif » définit à l’instant t (1er janvier 2003). Pour ce faire, chaque

UDAF a envoyé à l’observatoire une base de données de quelques informations

précises sur toute la population majeure protégée présente. Les informations de cette

première base ne prennent sens que par des comparaisons allant d’une année à l’autre.

Mais si les variations sont perceptibles, elles permettent à l’UNAF de proposer une

prise en charge spécifique ou encore d’alerter les pouvoirs publics.

• Le second volet est appelé « échantillon ». Il se base sur un questionnaire que chaque

UDAF doit faire passer aux délégués à la tutelle de toutes les personnes majeures

protégées nées le 10 du mois, ces personnes représentant un stock représentatif de

l’ensemble de la population. Chaque année, des modules spécifiques seront abordés

(logement, santé, revenus…) mais le module commun sera renouvelé tous les ans, ce

qui permettra de définir des trajectoires de vie et à terme des typologies. En fait,

l’échantillon permet deux analyses : 1. la reconstitution des carrières des majeurs

protégés et le repérage des moments d’inflexion ou de rupture des parcours ; 2. la

production de savoir sur des thèmes spécifiques, leurs comparaisons dans le temps et

l’identification des spécificités de la population des PMP au sein de la population

nationale.

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Bien entendu, l’observatoire est prévu pour une durée longue, car plus il durera, plus

les informations qui en sortiront seront pertinentes. C’est pourquoi l’ONPMP a vocation à

accueillir d’autres acteurs que l’UNAF pour se développer.

3) Quelques définitions utiles

a) Les majeurs protégés

Il existe certaines notions qu’il vaut mieux connaître lorsque l’on s’occupe de

statistiques sur les personnes majeures protégées. En effet, les mesures de protection sont

nombreuses et variées et il faut impérativement savoir la signification de chacune d’entre elles

pour savoir vraiment de quoi on parle. Car si on ne le sait pas, on risque de faire des analyses

qui sont complètement à contresens de la vérité. C’est pourquoi il ne faut jamais faire de la

statistique sur des données sans connaître le sujet qu’elles abordent.

Tout d’abord, qu’est-ce qu’une personne majeure protégée ? Une personne majeure

protégée est un individu de plus de 18 ans qui est dans l’impossibilité d’exercer les actes de la

vie civile. Elle dispose donc de tous ses droits mais ne les exerce pas elle-même dans sa

totalité. Les circonstances qui mènent à la mise en place d’une mesure de protection sont

provoquées par une maladie, une infirmité ou un affaiblissement dû à l’âge, le fléchissement

des facultés mentales du majeur plaçant celui-ci « dans l’impossibilité de pourvoir seul à ses

intérêts ». On envisage également une mesure de protection en cas d’altérations des facultés

corporelles (traumatisme, cécité, aphasie, paralysie…) mais aussi dans certains cas

spécifiques comme la prodigalité, caractérisée par des dépenses excessives ou immorales,

l’intempérance, définie par l’excès de consommation d’alcool ou de stupéfiants ou encore

l’oisiveté, manifestée par un refus de travailler ou une renonciation injustifiée au revenu du

travail.

Pour qu’une mesure de protection soit prononcée, il faut qu’il y ait une demande

préalable venant de l’intéressé lui-même, de sa famille ou du Procureur de la République

accompagnée des circonstances qui appellent la protection. Ensuite, il faut qu’il y ait une

constatation médicale et une appréciation judiciaire (par un juge des tutelles après enquête)

des symptômes présentés ci-dessus. Si l’enquête est concluante, la mesure est proclamée. Les

personnes pouvant exercer la fonction de « protecteur » sont dans l’ordre de priorité : la

famille (et particulièrement le conjoint qui est le plus souvent le protecteur de son époux/se) et

les administrateurs spéciaux, inscrits sur la liste des gérants de tutelles (ce sont, soit des

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personnes physiques, soit des personnes morales (associations)). A noter que toutes les

mesures de protection sont issues de la loi du 3 janvier 1968 sauf les TPSA.

b) La classification des mesures de protection

L’ONPMP a classé les mesures de protection en six grandes catégories :

• 1. La tutelle est une institution créée pour protéger les personnes étant incapables de

mener des actes de la vie quotidienne exceptés les plus simples. La tutelle comporte

un conseil de famille dont le juge des tutelles fait partie. C’est ce conseil qui nomme

le tuteur du majeur dont la fonction est de le représenter d’une manière continue.

C’est donc une mesure de représentation totale : c’est le tuteur qui signe à la place de

la personne pour qu’un « acte » soit officialisé. Lorsque la tutelle ne peut être

assumée par personne, le juge défère celle-ci à l’Etat. A noter que si la personne

protégée peut réaliser certains actes, le juge peut déclarer une tutelle aménagée (qui

peut concerner tout acte excepté le droit de vote).

• 2. La gérance de tutelle a été volontairement séparée de la tutelle par l’ONPMP.

Celle-ci n’est choisie que lorsque les circonstances familiales ne permettent pas la

désignation d’un tiers. Dans ce cas, le juge de tutelle peut faire appel à un gérant de

tutelle, qui sera soit une personne physique, soit un établissement tutélaire officiel.

• 3. La curatelle est la mesure de protection préférée à la tutelle lorsque le majeur

possède un degré d’autonomie psychologique et physique suffisant. Dans ce cas, le

curateur ne fait que conseiller et contrôler la personne sous protection, et pas de

manière continue : seuls les actes les plus graves sont contrôlés par le curateur. C’est

donc une mesure d’assistance : il faut et la signature de la personne, et la signature du

curateur pour qu’un « acte » soit proclamé. La catégorie 3 de l’ONPMP comprend la

curatelle renforcée (curatelle 512) lorsque la gestion du majeur est défaillante. Dans

ce cas, le curateur s’occupe de la perception des revenus, le règlement des dépenses et

l’épargne de son protégé, qui garde quant à lui tous ses autres droits. Cette curatelle

renforcée peut être aménagée par l’article 511. C’est pourquoi nous avons aussi classé

les curatelles 511 dans cette catégorie.

• 4. La curatelle simple est la forme basique de la curatelle. La personne majeure

protégée n’est donc, dans ce cas, assistée par le curateur que pour les actes les plus

graves, c’est-à-dire les actes concernant son patrimoine.

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• 5. Le placement sous sauvegarde de justice est un régime de protection temporaire

qui, tout en laissant au majeur sa capacité juridique et la libre gestion de son

patrimoine, le protège des actes qu’il aurait inconsidérément réalisés ou accomplis et

de ceux qu’il aurait négligés d’effectuer. Cette mesure est en fait une institution

nécessaire, proclamée entre le moment où est demandée la mise sous protection et sa

mise en œuvre effective. La sauvegarde de justice est donc une mesure de protection

rapide mais temporaire. On place également dans cette catégorie ce qu’on appelle le

mandat spécial, autrement dit une sauvegarde de justice dont l’UNAF a été nommé

mandataire.

• 6. Les mesures ad hoc sont proclamées par le juge de tutelle dans des cas précis et

pour un temps précis. Exemple : lorsqu’un même tuteur représente les deux membres

d’un couple et que ceux-ci souhaitent divorcer. Pour éviter un conflit d’intérêt, on

proclame une mesure ad hoc

Enfin, il faut savoir qu’en dehors de ces mesures de protection (non cumulables), il

existe la possibilité d’être placé sous un régime de TPSA (Tutelle aux Prestations Sociales

Adultes). Ce régime est indépendant des autres et peut être cumulé. Cette mesure garantit en

fait pour le majeur protégé, le bon usage des prestations versées par la société et une action

éducative sur le budget. Ce n’est cependant pas l’adulte qui est placé sous tutelle, mais ses

prestations sociales. La TPSA n’intervient donc que lorsque les prestations sociales attribuées

à un majeur ne sont pas utilisées dans son intérêt. Dans ce cas, le juge défère à un tuteur le

soin de percevoir les prestations sociales d’une personne et de les utiliser au profit du

bénéficiaire.

B) L’intérêt des statistiques démographiques lors de la création d’un observatoire de la population

1) Une donnée n’est utilisable que quand elle est homogénéisée

a) Les problèmes de l’exhaustif

Le problème lorsque l’on essaye de créer un observatoire d’une sous-population, c’est

où trouver les données permettant de définir les stocks et les flux. La spécificité de l’UNAF

est qu’elle a, à disposition, une base de données sur les populations majeures protégées via les

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UDAF. En effet, il existe au moins 80 UDAF sur les 100 présentes qui s’occupent des

problèmes de mesures de protection. Résultat : une base de données couramment mise à jour

dans de très nombreuses UDAF et donc, des statistiques de stock très complètes. A partir de

ce constat, monter la base « exhaustive » de l’ONPMP paraissait facilité. Mais le principal

problème est que les données sur les majeurs protégés ne sont pas homogénéisées dans toutes

les UDAF.

En fait, chaque UDAF crée sa base de données selon ses propres critères, puisqu’il n’y

a pas de consignes nationales dans le domaine des majeurs protégés (sûrement dû au fait que

ces bases de données se sont développées avant que l’idée d’un observatoire national ne

naisse). Et ceci complique énormément la tâche. En effet, la classification des mesures de

protection en 6 catégories développée par l’ONPMP est rarement la même que la

classification des mesures de protection dans chaque UDAF. Par exemple, certaines UDAF

possèdent une classification des mesures très complète comprenant toutes les modalités

possibles plus les possibilités de mesures doublées (mesures de protection + TPSA). Mais

certaines autres UDAF ne possèdent que le minimum d’informations. De la même manière,

certaines définitions divergent. On trouvera ainsi deux appellations différentes pour une

même mesure. Voir même une seule appellation pour deux mesures non-similaires (exemple :

dans de nombreux cas, les UDAF parlent de curatelles mais ce mot peut vouloir dire selon le

département, soit curatelle simple, soit curatelle renforcée). Et ceci sans compter que certaines

UDAF ne s’occupent que de certaines mesures de protection (absence dans certains cas de

mesures doublées voir plus simplement de TPSA).

Imaginez donc le nombre de problèmes provoqués par ce manque d’homogénéité dans

les définitions et dans les bases de données. A l’origine du projet, l’ONPMP a demandé à

toutes les UDAF d’envoyer la totalité de ses statistiques sur les Personnes Majeures

Protégées. Mais rapidement, le problème de l’hétérogénéité s’est présenté, demandant que

chaque base soit retravaillée et recodifiée pour que les données deviennent véritablement

comparables. La vérification de toutes les bases a donc été une obligation avant même toute

tentative d’analyse, car il a été montré qu’on ne peut avoir une base fiable si elle n’est pas

vérifiée au moins une fois.

En général, la première vérification permet déjà de voir s’il existe des problèmes qui

ne peuvent être corrigés qu’après entretien avec la personne responsable de l’UDAF. En effet,

il existe tout un travail de rappel à effectuer quand la base paraît fausse. Ces missions de

rappels peuvent aller d’une simple vérification jusqu’au renvoi de la base. Voilà à peu près la

liste des problèmes pouvant être rencontrés :

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• Il faut toujours vérifier s’il est normal que certaines mesures soient absentes. En effet,

cette absence peut découler, soit de la volonté de l’UDAF de ne pas accepter ces

mesures, soit d’un oubli pur et simple qui doit alors être corrigé.

• De la même manière, il faut faire bien attention aux dates de naissance du XIXème

siècle car cela peut être un vrai centenaire mais aussi une erreur de saisie.

• Dans le cas de définitions inconnues, une description de la signification réelle du code

doit être impérativement demandée. La même chose doit être faite quand la

dénomination de la classe est peu claire car on ne peut se permettre le moindre doute

sur la signification de la mesure.

• Enfin, il existe tout un tas de problèmes liés à une possible erreur de l’UDAF. Par

exemple, nous avons trouvé certains cas d’UDAF où la date de naissance la plus

ancienne est 1977. Dans d’autres cas, des variables ont été oubliées. Dans ce genre de

situation, il faut obligatoirement demander que la base soit renvoyée.

A la fin des différentes vérifications, la base de données ne doit avoir qu’une seule

forme. Le tableau de données finales est constitué de 7 colonnes dont voici une description

succincte avec les problèmes qui y ont été rencontrés :

• DEPARTEMENT : indique tout simplement le numéro du département. Cette

démarche est obligatoire pour pouvoir différencier les départements entre eux après la

fusion de toutes les bases de données UDAF.

• CODE DOSSIER : indique le numéro du dossier dans chaque UDAF. Ce numéro est

complémentaire du département vu qu’il peut y avoir un même numéro de dossier

dans deux départements différents. Nous avons rencontré deux types de problèmes

pour cette modalité. Tout d’abord, l’existence de doublons (deux codes similaires au

sein du même UDAF). Ceci ne peut arriver que lorsque les fichiers sont classés par

type de mesure (soit TPSA, soit mesure de protection). Dans ce cas, il a fallu

restructurer la base en fusionnant les doubles codes entre eux. Plus problématiques

sont les cas des UDAF où il y avait un identifiant différent entre les TPSA et les

mesures de protection. Il pouvait donc y avoir un même code pour deux personnes

différentes. La seule solution possible est donc alors la recodification des identifiants.

• NAISSANCE : indique l’année civile de naissance. A l’origine on dispose de la date

exacte (jj/mm/aaaa) mais on la convertit pour n’obtenir que le aaaa. Comme l’ONPMP

est un observatoire des majeurs, toute date de naissance après 1984 (2002 – 1984 = 18

ans atteints dans l’année) a été effacée. Nous avons également dû corriger les bugs

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récurrents qui transforment les naissances d’avant 1930 en naissance des années 20??.

Pour toute autre date aberrante (avant 1900, naissance après la mesure de protection),

un rappel des UDAF concernées a été obligatoire.

• SEXE : indique le sexe du majeur. Pour créer cette colonne, il faut faire une simple

conversion : masculin = 1, féminin = 2.

• TPSA : indique si le majeur est placé sous tutelle aux prestations sociales. Cette

colonne a été plus compliquée à faire étant donné que cette modalité n’existe pas

toujours dans les UDAF. Il a donc fallu le plus souvent utiliser la fonction SI (Excel).

Exemple : si la mesure de protection comprend une TPSA alors 1 ; sinon 2.

• TYPE : indique la mesure de protection selon la classification décrite précédemment

(comprenant aussi une modalité 7 en cas d’enquête sociale, une modalité 8 en cas de

curatelle non définie et une modalité 9 en cas de mesure MP « inconnue »). Comme

les codes sont différents dans toutes les UDAF, cette colonne est le plus gros travail de

recodification. De cette manière, il faut souvent classer plusieurs mesures par le même

code (exemple : curatelle d’état simple et curatelle simple sont toutes deux classées 4).

Par contre, dans certains cas, la définition de certaines mesures n’était pas clairement

donnée ce qui nous a obligé à rappeler les UDAF pour avoir tous les renseignements

nécessaires. A noter d’ailleurs certains cas où même les UDAF concernées ne savaient

la définition exacte de leur mesure (exemple : existence d’une curatelle en B dont la

signification est inconnue). Dans ce genre de cas, nous avons créé un nouveau code

pour cette mesure. En tous cas, ce genre de problème (classification inconnue même

de ceux qui l’ont réalisé) prouve bien qu’une homogénéisation nationale des

définitions ne puisse être que bénéfique.

• TRIBUNAL : indique le tribunal où a été prononcée la mesure. Cette colonne ne subit

aucune recodification.

A la fin de ce long travail réalisé département après département, on fusionne toutes

les bases entre elles pour obtenir la base de donnée finale. C’est alors que l’on réalise qu’il

existe toujours des erreurs, ce qui prouve que même en vérifiant petit à petit toutes les bases à

plusieurs, on continue à trouver des erreurs et des oublis. Pour exemple, nous avons remarqué

dans certains départements la trop grande présence de type de mesure « vide » sans TPSA,

alors que le vide signifie TPSA simple dans notre codification. En vérifiant alors la base

d’origine, nous avons révélé des problèmes au niveau de ces deux variables mais aussi au

niveau d’autres variables (exemple : type de mesure inconnu correspondant à des dates de

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naissance inconnues). Nous avons donc une dernière fois recodifié les données

« problématiques » avant de convertir la base pour l’analyse.

b) Les problèmes de l’échantillon

La vérification de l’échantillon demande moins de travail que celle de l’exhaustif car

la codification est prévue dans le logiciel même de saisie. L’échantillon concerne toutes les

personnes majeures protégées nées le 10 du mois et dont l’inscription à l’UNAF (autrement

dit, la première date de mesure de protection) a eu lieu entre le 1er janvier 2001 et le 31

décembre 2002 (autrement dit, toutes les nouvelles mesures de 2001 – 2002). Les délégués à

la tutelle de ces personnes se doivent alors de répondre à un questionnaire précis, les réponses

étant par la suite saisies sous le logiciel Question (© Grimmersoft). Ce questionnaire possède

deux volets : un module principal de 12 questions importantes concernant le majeur qui devra

se répéter tous les ans, et un module particulier qui changera de thème tous les ans et dont

chaque thème se répétera tous les 5 ans. Le thème de cette année est celui des ressources

économiques du majeur. L’année prochaine, le module particulier concernera le logement

puis les modules suivants parleront de l’accès au droit, le réseau social et la santé.

Mais si les résultats du questionnaire sont présents dans un logiciel (considéré comme

infaillible), la saisie a été réalisée par des êtres humains (donc faillibles). C’est pourquoi une

vérification est obligatoire. D’autant plus que la saisie a été réalisée par des personnes

différentes dans chaque UDAF. Il aurait été probablement plus rigoureux et plus pédagogique

de faire saisir tous les questionnaires papier de tous les départements par une seule et même

personne, engagée pour l’occasion et appliquant les mêmes méthodes pour chaque

questionnaire. Mais cela n’était pas en adéquation avec les prérogatives financières et

temporelles de l’UNAF.

Pour éviter d’énormes erreurs, la vérification ne tient lieu que sur les premières

questions de l’enquête échantillon. Dès qu’une erreur apparaît et qu’il n’y a aucun doute sur

elle, on fait passer le questionnaire en poids 0 (autrement dit, il ne compte plus dans les

résultats à la différence des poids 1, tous les questionnaires ayant à l’origine le même poids).

S’il existe un doute sur la présence d’erreurs, on consulte tout d’abord les données de la

personne en question dans l’exhaustif. Si ces données ne permettent pas de répondre au doute,

alors un appel dans les UDAF concernées devient la seule solution restante.

La première chose à vérifier est la date de naissance de l’enquêté. Si la personne n’est

pas née le 10 du mois, alors on efface le questionnaire (après vérification dans l’exhaustif,

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bien entendu). Par la suite, il faut vérifier les réponses concernant les mesures de protection :

type et date. Un problème peut venir du fait que ces mesures ne sont pas coordonnées : une

réponse parle de tutelle mais une autre de date de prononcé d’une curatelle par exemple. Ce

genre d’erreur est rare mais demande impérativement une vérification dans la base de données

exhaustives pour savoir quelle est la mesure réellement prise. Beaucoup plus courantes sont

les erreurs de dates de mesure. Certaines fois, on retrouve des personnes entrées à l’UDAF

avant 2001, soit parce que l’UDAF s’est trompée en interrogeant une personne non comprise

dans l’échantillon, soit parce qu’il y a bien eu une mesure pour cette mesure en 2001-2, mais

que cette mesure n’était pas la première (rappelons que l’échantillon ne comprend que les

primo-mesures). Quel que soit le cas, ces questionnaires doivent être effacés.

Il n’y a pas besoin d’aller plus loin dans la vérification pour savoir si le questionnaire

est bon ou s’il doit être supprimé pour l’analyse finale. A noter cependant qu’il faut toujours

faire attention aux questionnaires blancs (il n’y a aucune réponse mais le logiciel le place tout

de même au poids 1) mais aussi aux questionnaires saisis en double (dans ce cas, il faut en

effacer un et garder l’autre).

De la même manière, il faut bien faire attention à deux types de problème particuliers.

Tout d’abord, on a pu remarquer que certains questionnaires étaient quasiment incomplets. En

effet, seul le module principal a été rempli par l’UDAF. Hors, ces questionnaires « partiels »

doivent malgré tout être gardés au poids 1, car il concerne toujours des majeurs dont la

mesure soit, est trop récente pour avoir de plus amples renseignements (mesure de fin

décembre), soit, dont la durée a été trop courte pour que des renseignements aient pu être

saisis (mesure de moins de 15 jours). Enfin, dernier type de problème, certaines UDAF ont

créé leurs bases « échantillon » en saisissant des réponses sur des questionnaires trop anciens

et ne possédant pas la totalité des questions nécessaires à une analyse correcte. Dans ce genre

de situation, et pour éviter aux UDAF de tout recommencer, il a fallu ressaisir les réponses sur

les questionnaires définitifs en mentionnant « non-réponse » sur toutes les questions

n’existant pas dans l’ancien questionnaire.

Le travail de vérification a donc été plus ou moins laborieux selon la manière dont les

UDAF avaient saisi leurs réponses. Mais c’est un travail très important dans le but d’une

homogénéisation des données, prérogative obligatoire à toute étude. Dès que ce travail de

vérification est terminé, l’échantillon est prêt à être transformé en base et à être analysé.

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2) La confection du nouveau questionnaire

a) Le questionnaire est un débat d’idée

Comme dit précédemment, l’ONPMP possède deux volets de données : le volet

exhaustif et le volet échantillon. Ce dernier se base sur un module particulier qui change tous

les 5 ans. J’ai eu l’occasion de travailler sur la préparation du nouveau module sur le

logement, dit questionnaire « lieu de vie ».

La création d’un questionnaire débute toujours par une réunion entre différentes

personnes concernées par le devenir des personnes majeures protégées. L’objectif de ce type

de réunion est de définir les besoins d’un tel questionnaire vis-à-vis de l’existence des majeurs

eux-même. Dans le cas du questionnaire logement, le but est de créer des questions qui

peuvent donner des informations utiles sur les conditions d’habitat des majeurs. Le but final

étant bien entendu de pouvoir, en connaissance de cause, intervenir sur ces conditions

fortement liées aux conditions de vie. La réunion est donc un véritable brain storming où les

participants disent toutes les idées de questions qui leur passent par la tête. Ces idées donnent

ensuite lieu à des discussions sur la manière de mieux appréhender ces questions, les

modalités de réponse, etc. C’est une expérience très intéressante, d’autant plus qu’elle montre

bien la nécessité d’être à plusieurs pour réaliser un questionnaire, car une personne seule ne

peut pas penser à tout. De plus, la réflexion sur la manière de poser une question doit être

intense et surtout pas individuelle : la mise en place d’un questionnaire doit être la plus

possible collective.

A la fin de la réunion de préparation au questionnaire, certains thèmes se sont avérés

indispensables à traiter. Car ce type de réunion définit des thèmes à traiter, pas des questions à

poser. C’est seulement après que l’on réfléchit aux questions relatives aux thèmes que l’on a

décidés d’aborder. Prenons donc comme exemple concret le questionnaire sur le logement.

Plusieurs idées sont sorties de la réunion :

• Tout d’abord, la première idée à être sortie est celle de la définition du concept même

de logement dans notre enquête. Ici, on s’est mis d’accord sur le fait que le logement

est définit comme étant le lieu de vie du majeur et non pas le lieu qu’il possède

(propriété). Car ce qui est intéressant est de connaître tous les lieux dans lequels vivent

les personnes sous protection, y compris les chambres d’hôtels ou les squats, par

exemple.

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• Bien entendu, il faudra poser des questions classiques du genre : prix du loyer,

montant des charges, taille et nombre de pièces. Ces caractéristiques devront être

comparées avec les données du recensement.

• Dans le module principal du questionnaire actuel, on parle du logement des trois

derniers mois. Le questionnaire logement devra approfondir cette question car il est

intéressant de connaître les trajets effectués par le majeur au cours de l’année. Il a

donc été décidé de faire passer cette question sur l’année entière : il faudra savoir le

nombre de logements sur l’année, ainsi que les dates des déménagements et leurs

motifs.

• Une des idées les plus importantes à être ressorties de la réunion est la volonté d’aller

au-delà des notions administratives pour le logement : des questions sur le nombre de

personnes présentes, sur les équipements ou sur le cadre de vie seront posées.

• La question de la salubrité devra aussi être demandée : y-a-t-il une mesure

d’insalubrité prononcée, quels sont les problèmes rencontrés dans le logement

(luminosité, humidité, etc.) Il faut également trouver une caractéristique qui montre si

la personne habite réellement son logement (exemple : est-ce que le logement est

entretenu ? ; mais comment prouver l’entretien d’un logement) ?

• Enfin, la dernière idée concernait la notion d’ accessibilité et de sécurité du logement

Bien entendu, la création d’un questionnaire n’a rien de démographique mais il ne faut

pas oublier que le questionnaire est la base des données démographiques et statistiques. C’est

donc une expérience enrichissante et finalement très importante. En effet, c’est en connaissant

le processus d’amont en aval que l’on sait de quoi on parle. Il ne faut pas se lancer dans une

analyse sans connaître d’où viennent les données et ce qu’elles signifient. Sans cela, le risque

de faire des conclusions erronées est trop important et à terme dangereux. Car l’analyse de

base de données ne peut se faire que lorsque l’on connaît un minimum les notions de terrain.

b) Les erreurs à ne pas commettre quand on réalise un questionnaire

On a par trop souvent tendance à croire qu’un questionnaire est simplement une

adjonction de questions sur un sujet. Or un questionnaire ne se base pas sur des questions. Un

questionnaire se base sur un certain nombre de thèmes dont on veut réunir les informations.

Pour parler plus clairement, une erreur type quand on réalise un questionnaire est de poser des

questions intéressantes mais sans se demander où elles nous mènent. Dans la mise en place

d’un observatoire, on doit poser des questions amenant des réponses qui peuvent être

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collectées et analysables au sein d’une base de données. Or, il y a des thèmes paraissant

intéressants mais pour lesquels l’analyse ne pourra pas être réalisée.

En annexe, je présente ma première tentative de questionnaire sur le logement et le

questionnaire final. C’est un bon exemple pour voir ce qui est efficace et ce qui ne l’est pas. A

noter que le module « lieu de vie » commence à la question 13. Attardons-nous un peu sur les

questions de « parler ». Mettre par exemple des appellations de taille de logement au lieu du

nombre de pièces n’est qu’une simple question de vocabulaire. Par contre, certains termes

utilisés doivent être bannis dans ce genre de questionnaire. Prenons la question 16.2) de mon

questionnaire. Le mot « trop » n’a aucune signification en lui-même, car tout dépend ce que

l’on appelle « trop ». Il faut éviter le plus possible ce genre de terme qui laisse trop de place à

la subjectivité de celui qui répond. Car dans cet exemple, ce qui sera « trop » pour l’un, ne le

sera pas pour l’autre. Enfin, regardons la question 19.1). Là aussi le terme « en cas de

problème » doit être défini, car tout dépend du degré de ce que l’on appelle un problème.

Mais voyons plutôt le type de questions qui ne donnent pas de données viables.

Prenons la question 11 de mon questionnaire. Je répète trois fois cette question pour

avoir le plus de données possibles sur les trois derniers lieux de vie du majeur protégé. Si

l’idée de parler du logement précédent est une idée intéressante dans un cadre biographique,

elle n’est cependant pas traitable car « trop d’informations peuvent tuer l’information ». Ainsi,

avoir tous ces détails sur les motifs de départ font perdre de l’intérêt à la question en elle-

même. Cette information n’est pas transposable dans une base de données car celle-ci serait

trop lourde et répétitive. D’autant plus que remonter trop loin dans le passé n’est pas

intéressant pour ce type d’enquête : mieux vaut se concentrer du dernier motif de départ, ce

qui met tous les enquêtés sur un même pied d’égalité. En effet, une analyse de réponses à ces

questions renforcerait le poids des personnes ayant le plus déménagé, ce qui biaiserait les

résultats car nous enquêtons sur le logement, pas sur les déménagements. Et tout ceci sans

compter le fait qu’une répétition de questions puisse alourdir énormément le questionnaire et

fatigue plus facilement celui qui y répond. Or la fatigue augmente la probabilité de mauvaises

réponses ou de mauvaises saisies.

Cet exemple est une bonne manière de voir que certaines questions ne sont pas

analysables. En tant que démographe, il ne faut pas oublier que nous travaillons à terme sur

des bases de données. Et cette base se doit d’être claire pour être l’objet d’une analyse. Or

certaines questions ne permettent pas cette clarté qui est obligatoire pour donner une

explication à un phénomène. Il faut donc toujours penser à ce qu’une question va nous

apporter avant de penser à la créer.

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II. L’établissement de l’observatoire des populations majeures protégées : une observation continue qui doit durer dans le temps

A) L’analyse statistique d’enquête au centre des premières conclusions sur les données de l’ONPMP

1) L’analyse de l’exhaustif ou la pure analyse d’un « stock »

a) Comment travailler sur une base de données de stock ?

La base exhaustive ne possède pas assez d’informations pour que l’on y pratique une

analyse pointue. De plus, c’est une base qui présente un état de la population au 31 décembre

2002. C’est donc une analyse de stock, avec tous les défauts que cela peut avoir pour un

démographe : absence d’analyse sur le temps (flux de population), difficultés à trouver

quelquechose de significatif à dire sur un nombre aussi important, etc. Cependant,

l’importance du nombre d’individus contenu dans la base (80589) permet de révéler, a priori

de manière quasi sûre, les véritables caractéristiques de la population majeure protégée. Or,

ces caractéristiques sont de première importance, puisque ce sont elles qui permettent de

connaître l’originalité de la population, originalité qui définit par la suite les problématiques à

résoudre concernant les majeurs protégés. Si l’analyse de stock n’est donc pas nécessairement

le travail le plus révélateur, il est la prérogative indispensable pour savoir réellement de quelle

sous-population on parle et pour ne pas faire de contre-sens au cours de l’analyse plus

poussée.

Pour analyser une base de données comme celle de l’exhaustif des majeurs protégés,

on utilise des outils d’analyse statistique de données socio-démographiques. L’UNAF

(comme toutes les UDAF d’ailleurs), utilise dans ce but le logiciel Question (© Grimmersoft).

Pour en résumer rapidement l’intérêt, Question est un logiciel qui possède une double

fonction. A l’origine, c’est un outil qui permet la saisie d’enquête par ordinateur (facilite le

CAPI, Computer Assisted Portable Interview). On peut y créer toutes choses en amont et en

aval d’une enquête : du masque de saisie (autrement dit, le questionnaire en format

informatique) à la saisie des réponses, en passant par les filtres du questionnaire (si tel choix à

telle question, alors aller automatiquement à telle autre question). Par la suite, Question s’est

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de plus en plus développé comme un outil d’analyse des données, avec tout ce que cela

implique : recodification, tris, analyse factorielle et toute sorte de travail et de fonctions

statistiques utiles en sociologie et en démographie. C’est bien entendu cette dernière fonction

qui est la plus importante pour l’analyse du stock de l’exhaustif.

J’attire votre attention sur la fonction « tris ». En effet, une simple manière de trier est

la méthode la plus facile pour caractériser la population. Un tri simple dénombrera

simplement chaque modalité, mais c’est ce style de tris qui permet de définir des profils

moyens ou encore de connaître l’importance de telle ou telle modalité dans la sous-

population. Ainsi, on peut savoir tout simplement la structure de la population majeure

protégée selon telle ou telle variable, ce qui permet de connaître efficacement les problèmes

inhérents à cette distribution. De la même manière, on peut réaliser des tris croisés entre n

variables. Cette dernière méthode permet plus spécifiquement d’obtenir des tableaux croisés

(avec pourcentage en ligne et en colonne), ce qui, à terme, permet par différents tests (dont

surtout le test du khi2) de connaître s’il y a corrélation entre telle et telle variable qualitative.

Or, il n’existe rien de mieux que la corrélation pour connaître les variables significatives sur

une population et les problèmes sociaux qui en découlent.

Dans ces conditions de travail, les règles d’or pour réaliser une analyse de qualité sont

celles-ci :

• Bien connaître toutes les fonctions du logiciel Question car la base de l’analyse est

un travail purement informatique.

• Le test du khi2 est essentiel dans une analyse de stock. Par contre, la

compréhension de l’importance du khi2 en lui-même n’est pas obligatoire. Ce qui

compte, c’est la probabilité qui en découle. Plus celle-ci est proche de 0, plus les

variables ont de chances d’être dépendantes l’une de l’autre. A noter que Question

permet également, par un système de – et de +, de connaître sur quelle modalité de la

variable se situe la dépendance.

• Enfin, dans toute analyse, le choix du graphique est plus important que le

commentaire en lui-même car un graphique bien fait permet de voir du premier coup

d’œil ce qu’il faut connaître.

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b) La réalisation du rapport d’analyse du stock des populations majeures protégées

A noter que ce rapport est voué à terme à une publication. Dans l’optique de faire une

analyse la plus claire possible, toute une réflexion est nécessaire avant de réaliser le rapport en

lui-même. La méthode de présentation (autrement dit la mise en page) est une des clés de

cette réussite. Celle que nous avons adoptée divise l’analyse en fiches, avec autant de fiches

que de caractéristiques à analyser. Nous avons réalisé 6 fiches pour l’exhaustif : présentation,

effectifs bruts, structure par âge, structure par sexe, pyramide et effet genre. Ces fiches sont

disponibles en annexe.

La présentation de la base exhaustive est un texte simple montrant comment a été

réunie la base et comment nous l’avons recodifié pour en faire une base nationale. Ayant déjà

consacré une partie de mon rapport sur ce sujet, je n’y reviendrai pas ici. D’ailleurs, il faut

noter que j’ai repris en grande partie la partie traitée plus haut dans cette fiche de présentation.

Pour analyser le nombre « brut » de mesures de protection, il a fallu de nouveau

procéder à un recodage. Ce qui prouve bien que c’est seulement devant l’analyse finale que

l’on réalise pleinement les variables dont on a besoin dans la base. Ici, nous avons recodé la

variable TPSA avec la variable TYPE de manière à pouvoir différencier les mesures simples

des mesures doublées TPSA, mesures ne concernant pas les mêmes personnes. Le graphique

le plus apte à « montrer » la composition des mesures de protection est bien entendu

l’histogramme, avec une division dans la barre pour différencier les simples des doublées.

Foncièrement, l’analyse du stock brut n’est pas la plus intéressante, mais à terme les chiffres

de l’ONPMP doivent être comparés avec les chiffres du fond spécial (nombre de mesures

dans les UDAF) et les chiffres des nouvelles mesures du ministère de la Justice. Tout ceci

dans le but d’une vérification de la qualité des données : ainsi, l’ONPMP et le fond spécial

doivent avoir le même nombre de mesures (puisqu’ils concernent tous deux les UDAF). Par

contre, ne pouvant pas comparer nos stocks avec les flux du ministère de la Justice (nouvelles

mesures seulement), le but de la dernière comparaison est de savoir si les proportions dans le

nombre de mesures totales sont proches, ce qui est le cas. L’inverse aurait pu grandement

nuire au concept d’exhaustivité de notre base.

La structure par âge est déjà une analyse un peu plus complexe. Les crédos de la

démographie favorisent en général une classification quinquennale de l’âge (quand il doit y

avoir une classification). Cependant, pour plus de clarté pour les futurs lecteurs qui ne seront

pas en majorité des démographes, nous avons recodé les naissances en 7 classes décennales

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d’âge révolu. Une classification somme toute moins rigoureuse démographiquement, mais

plus lisible. D’un point de vue graphique, nous avons favorisé pour la structure de la

population majeure protégée totale la méthode du camembert (là aussi particulièrement

lisible). Mais ce qui est intéressant est de savoir s’il y a des différences de structure par âge

selon le type de mesures de protection. Au début, nous avions voulu représenter cette

structure différentielle en faisant tout simplement un camembert différent pour chaque

mesure. Mais il est mieux de comparer des mesures entre elles en les représentant sur un

même graphique. C’est pourquoi nous avons créé un graphique en courbe : une courbe par

mesure ; chaque courbe représentant la proportion de personnes concernées par cette mesure

au sein de la population de chaque âge. Chaque colonne de points cumulés est égal à 1. Une

fois n’est pas coutume, cette représentation n’est pas classique mais elle permet très

rapidement de voir les âges caractéristiques de telle ou telle mesure.

Pour la structure par sexe, nous avons utilisé l’indicateur le plus classique mais aussi

le plus pratique pour savoir s’il y a sur ou sous-représentation d’un sexe vis à vis de l’autre :

le rapport de masculinité. J’avais tout d’abord commencé par calculer les rapports de

masculinité à chaque âge (d’après les données d’un tri croisé sexe et âge) mais les courbes qui

en résultaient étaient illisibles, tant le rapport pouvait passer du simple au double entre chaque

année de naissance. Après réflexion, j’ai recalculé ces rapports en prenant les classes

décennales d’âge et en enlevant certaines valeurs aberrantes (les mesures ad hoc pouvaient

atteindre à certains âges un rapport de masculinité de 10, ce qui « écrasait » les courbes des

autres données). Au final, ce graphique pour les mesures totales et pour toutes les mesures

permet de comprendre quelles mesures sont plus masculinisées que féminisées et à quel âge.

La fiche concernant les pyramides a été une des plus intéressantes à réaliser. Nous

savions que faire une pyramide des âges de la population sous protection n’avait que peu

d’intérêt en soi car elle n’aurait permis qu’un simple commentaire sur la composition par âge.

Le but recherché était de savoir quelle était l’originalité de la population protégée. Or, on ne

peut définir une originalité que par rapport à quelque chose. Nous avons donc décidé de

comparer les pyramides des âges de la population de l’ONPMP avec la population totale

(chiffres de l’INSEE). De cette manière, nous avons pu facilement connaître les âges et les

sexes de la population majeure protégée sur-représentés par rapport à la population totale.

Bien entendu, nous avons comparé deux populations aux tailles complètement différentes (45

millions contre 80000). C’est pourquoi nous avons utilisé la méthode de la pyramide relative :

on calcule pour chaque population la proportion de chaque âge dans le total. Ainsi, chaque

pyramide est sur la même base de 100 et chaque âge exprime sa proportion dans le total en

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pour cent. Bien entendu, cette méthode doit être expliquée dans le rapport final. Mais par la

suite, en superposant les deux pyramides entre elles, on peut voir du premier coup d’œil

l’originalité de la structure des majeurs protégés par rapport au reste de la population

française et c’est dans cette originalité, répétons-le que se trouve l’intérêt de ce type

d’analyse.

Pour terminer, nous avons essayé de savoir s’il y avait un véritable effet genre dans la

population majeure protégée. En effet, le rapport de masculinité, la corrélation entre type de

mesure et âge ainsi que la pyramide relative de notre sous-population nous ont prouvé qu’il y

avait sur-représentation des femmes aux âges élevés et sur-représentation des hommes aux

âges intermédiaires. Mais cette sur-représentation est biaisée, par exemple par le fait que les

femmes sont toujours plus nombreuses que les hommes aux âges élevés tout simplement

parce qu’elles vivent plus longtemps. La question que nous nous sommes posée est donc de

savoir si, les hommes sont plus touchés par des mesures de protection que le sexe opposé à

âge égal. Il fallait donc supprimer l’effet âge pour ne connaître que l’effet sexe. Un premier

élément de réponse se trouve dans les pyramides. On peut en effet observer sur chaque ligne

d’âge la proportion d’hommes et de femmes dans chaque population. Si à tel âge, la

différence de proportion entre les majeurs protégés et les majeurs est plus forte pour un sexe

que pour un autre, alors il y a logiquement sur-représentation de ce sexe vis à vis de l’autre à

âge égal. Pour exemple, on peut voir qu’à 90 ans, il y a 4 fois plus de femmes protégées que

de femmes totales alors qu’il n’y a que 2 fois plus d’hommes protégés. On peut donc penser

qu’il y a sur-représentation des femmes à cet âge.

Pour confirmer les dires de la pyramide, nous avons procédé à une analyse de

covariance sous Question. Ce test est très peu appliqué en sciences sociales mais il permet de

comparer plusieurs variables en retirant l’effet qu’une variable peut avoir sur l’autre. C’est

ainsi que nous avons pu prouver qu’il y a un effet sexe quel que soit le type de mesure et sans

que cet effet sexe soit dépendant de l’âge. Ceci prouvé, c’est la pyramide qui définit de quel

côté est l’effet sexe (sur-représentation des hommes ou des femmes ?). Tout ce travail nous a

au final permis de réaliser que les problématiques de mise sous protection sont différentes

selon le sexe.

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c) Résultats de l’exhaustif : qui est la population majeure protégée ?

L’analyse (non-définitive) de l’exhaustif est présente dans les fiches situées en annexe

3 à 8. Il est cependant intéressant, à mon avis, d’en faire ici un court résumé.

La population majeure protégée est une sous-population originale dont les

caractéristiques sont fortement liées avec le type de protection juridique. C’est une population

plus âgée que la population totale, avec un très faible nombre de jeunes de moins de 30 ans

alors que les plus de 60 ans (et surtout les plus de 80 ans) sont fortement représentés par

rapport à la population totale, et ceci particulièrement chez le sexe féminin. Cette structure

s’explique aisément par le fait que plus une personne est âgée, plus elle a de chance d’être

touchée par un handicap quelconque qui va provoquer son incapacité à subvenir à ses propres

besoins, et donc, qui va provoquer une mesure de protection. Ce qui prouve qu’il existe une

forte corrélation entre l’âge et la mise sous protection. Parallèlement, les âges intermédiaires

ne sont sur-représentés que pour le sexe masculin, ce qui prouve la plus forte propension des

hommes à être placé sous mesure de protection. Au final, les hommes sont plus nombreux en

majeur protégé que les femmes (54 % contre 46 %) mais bien entendu les femmes deviennent

majoritaires avec l’âge (dès 60 ans).

En ce qui concerne les mesures plutôt que les individus : on remarque que la

population majeure protégée est placée à près de 50 % sous curatelle renforcée puis à 25 %

sous tutelles. Les TPSA, mesures qui n’affectent que les prestations sociales et pas les

individus, concernent également 30 % des majeurs protégés. A noter que l’on retrouve une

forte corrélation entre l’âge et le type de mesure ainsi qu’entre le sexe et le type de mesure,

l’une indépendamment de l’autre. Ainsi, les tutelles concernent plus les personnes âgées et les

femmes, les curatelles plus les personnes d’âge intermédiaire et les hommes, les TPSA plus

les personnes d’âge intermédiaire (les prestations sociales disparaissant pour la majorité des

gens après 60 ans).

Ces conclusions sur la population majeure protégée ne demandent qu’à être désormais

complétées par l’analyse de l’échantillon.

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2) L’analyse partielle de l’échantillon ou l’approfondissement des connaissances sur la population majeure protégée

a) Une première idée d’un rapport complet sur l’échantillon

Hélas, par manque de temps, l’analyse de l’échantillon n’a pu être réalisé dans son

entier. En fait, je n’ai pu participer qu’à une toute petite partie de cette étude, qui s’avérait

bien plus complète que celle de l’exhaustif et beaucoup plus longue. De fait, les méthodes

appliquées à la partie à laquelle j’ai pu participer sont très proches de celles de l’exhaustif, ce

qui signifie que j’ai n’ai pas pu aller au-delà de l’analyse de stock de l’échantillon. Cependant,

les simples pourcentages créés grâce aux tris à plat et aux tris croisés m’ont déjà donné des

informations très claires sur la vie des majeurs protégés, informations qui n’étaient pas

disponibles sur la base exhaustive qui ne révélait que de la structure de la population majeure

protégée.

L’échantillon représente 427 individus entrés à l’UDAF en 2001 ou 2002 et nés tous le

10 du mois. Sur ma partie de travail, nous avons repris la méthode des fiches avec une

première partie graphique et une seconde partie commentaire. 7 débuts de fiches ont pu être

réalisé avant la fin de mon stage : présentation de la structure, logement, revenus du travail,

revenus de la redistribution, revenus du capital et de l’épargne, hospitalisation et structure des

fins de mesure.

L’analyse de la structure de l’échantillon n’est pas foncièrement obligatoire puisque

les variables traitées (sexe, âge, type de mesures) le sont déjà dans l’exhaustif, qui, étant sur

un nombre d’individus beaucoup plus important, est donc plus significatif à traiter.

Cependant, le véritable but de l’analyse de la structure de l’échantillon est de comparer celle-

ci avec celle de l’exhaustif. En effet, dans le cas où les deux structures sont trop différentes

l’une de l’autre, alors cela signifie que l’échantillon n’est pas représentatif et donc qu’aucun

travail « réaliste » ne peut être effectué dessus. Dans notre cas précis, l’échantillon s’est avéré

représentatif de l’exhaustif et pourtant la structure n’est pas foncièrement la même. En effet,

on trouve par exemple plus d’âges extrêmes et plus de sauvegardes de justice dans

l’échantillon alors que l’on trouvait plus de TPSA dans l’exhaustif. Mais cette différence n’est

pas due à un échec de l’échantillon mais à une différence de définition. En effet, l’exhaustif

est une base de stock alors que l’échantillon parle bien des « nouvelles mesures en 2001 et

2002 », soit une base de flux. Toute la différence est là.

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S’il y a plus de personnes âgées, c’est parce que les personnes décédées sont

comprises dans l’échantillon et pas dans l’exhaustif. Parallèlement, s’il y a plus de jeunes,

c’est parce que l’on parle de nouvelles mesures. Or, plus une personne est jeune, plus elle a de

chances d’être à l’UDAF depuis une courte durée. Pour la sur-représentation des sauvegardes

de justice, l’explication vient du fait que ce sont des mesures courtes souvent transformées en

mesure longue. Ainsi, dans l’exhaustif, on parle de dernière mesure, ce qui, très souvent,

« écrase » les sauvegardes de justice précédentes. Alors que pour l’échantillon, on demande

les trois dernières mesures. Or, comme la sauvegarde de justice est souvent le début d’une

série de mesures, elle apparaît dans cette base mais pas dans l’exhaustif. Enfin, le fait que les

TPSA soient moins nombreuses dans l’échantillon est dû à une volonté politique de limiter la

prononciation de TPSA ces dernières années. S’il reste alors beaucoup de TPSA dans le stock,

les flux, eux, diminuent d’année en année. L’échantillon s’étant avéré réaliste, il n’y a donc

pas eu besoin de faire un redressement (c’est-à-dire, donner plus de poids à certains individus

sous-représentés par rapport à la réalité).

Le logement du majeur protégé est une variable très intéressante car elle signifie le

lieu de vie et donc le mode de vie du majeur. Nous avons cependant dû (pour des raisons de

temps) nous limiter à une simple analyse de la structure (via un tri à plat) et une analyse des

moyennes du nombre de personnes habitant dans le logement du majeur (la moyenne étant

plus réaliste bien entendu lorsqu’elle est confirmée par une proportion importante de

répondants à la question sur le nombre total d’individus, c’est-à-dire lorsqu’elle est confirmée

par un intervalle de confiance limité en taille). La même chose a été réalisée pour

l’hospitalisation des majeurs protégés.

En fait, la même méthode a été appliquée à toutes les fiches sur le revenu à l’exception

de celles sur les fins de mesures. La fiche s’est toujours présentée comme suit : un tableau de

la structure du revenu avec un camembert. Nous avions voulu au départ calculer les revenus

moyens des majeurs ayant des revenus (c’est-à-dire en supprimant les non-répondants), mais

ce chiffre est biaisé par le fait que de nombreuses personnes sont entrées à l’UDAF au cours

de l’année, et que leurs revenus ne sont pas connus sur la totalité de l’année, ce qui les rend

incomparables avec ceux qui ont répondu pour l’année 2002 dans son entier. N’ayant pas eu

le temps de calculer les revenus au prorata de la présence (en mois) dans l’UDAF, j’ai

abandonné l’idée de parler du niveau de revenu de la population majeure protégée.

Pour terminer, un dernier mot sur les caractéristiques de fin de mesure. Ces dernières

sont d’un grand intérêt pour un observatoire puisqu’elles définissent le type de sortie de la

sous-population majeure protégée. Est-ce que sortir de cette population est courant ? Quels

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types de mesures se terminent le plus couramment ? Pour quelles raisons ? Cependant, dans

ce cas encore, nous n’avons pas pu faire autre chose qu’une simple analyse de la structure des

fins de mesure (selon le type) et des raisons des fins de mesure (tout ceci en retirant de la

structure les non-répondants, beaucoup trop important car la population majeure protégée à

des taux de sortie très faibles).

b) Une analyse plus qualitative des majeurs protégés

L’analyse que nous avons pu réaliser sur l’échantillon s’est montrée plus qualitative

car elle permet de mieux connaître le mode de vie des majeurs sous protection. Cependant,

comme le manque de temps ne m’a pas permis de connaître la fin de l’analyse, je ne

résumerai ici que l’analyse des structures. Nous ne pouvons pas en effet dire à l’heure actuelle

s’il existe des dépendances entre telle ou telle variable. A noter que l’analyse véritable est

présente dans les annexes de 9 à 15.

En résumé, les caractéristiques plus sociales de la population majeure protégée sont

assez homogènes. C’est une population vivant le plus souvent seule ou en couple, le plus

couramment en appartement ou en maison. Mais un bon tiers de la population majeure

protégée vit dans des établissements tels les maisons de retraite ou les hôpitaux, car c’est bien

entendu une population âgée. De ce fait, les majeurs protégés ne vivent que rarement en

famille (ils n’ont pas d’enfants à charge ce qui ne prouve pas qu’ils n’ont pas ou qu’ils n’ont

jamais eu d’enfants). Dû à leur faible état de santé, précisons aussi que le tiers des majeurs

protégés a fait un séjour en hôpital au cours de l’année 2002.

Au niveau économique, la population majeure protégée vit dans une situation

relativement précaire. Rares sont en effet ceux qui disposent d’un salaire. De plus, les majeurs

n’ont pas non plus beaucoup de revenus du capital. Pour pallier ces défauts, la majorité de

cette sous-population dispose de revenus de redistribution, surtout de l’Allocation Adulte

Handicapé. Malgré cela, les majeurs protégés ont apparemment des entrées d’argent trop

faibles par rapport à leurs sorties : un cinquième d’entre eux est endetté et la majorité limite

souvent son pouvoir d’achat aux dépenses les plus courantes. A noter toutefois l’existence

d’une minorité de cette sous-population ayant un niveau économique supérieur avec des

valeurs mobilières et des sommes placées fructifiantes.

Pour conclure, la probabilité qu’une personne majeure protégée quitte cette sous

population est faible. Mais, si ce cas se produit, la main levée et l’échéance de la mesure

représentent 70 % des départs et les décès 16 %. Bien sûr, ces résultats sont biaisés par la

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transformation des sauvegardes de justice en mesure longue, considérées comme une sortie de

la population.

Finalement, le temps a manqué pour réaliser une analyse complète de l’échantillon. De

plus, le but d’un observatoire est une analyse longitudinale. Or, comme l’ONPMP vit sa

première année, il n’a pas été possible de se lancer dans le calcul d’indicateurs

démographiques montrant les caractéristiques et les trajectoires des majeurs protégés. Pour

pallier cette absence, j’ai réalisé pour la fin de mon rapport une réflexion sur le concept

d’observatoire et sur les choses qui pourront peut-être être réalisées dans les années à venir.

B) Réflexion sur la notion d’observation continue de la population majeure protégée

1) Les difficultés à étudier cette sous-population par le biais des UDAF

Pour pouvoir mener à bien une réflexion sur l’observation continue d’une sous-

population, il faut se poser deux types de questions. 1. Quel type de biais peut exister au sein

des bases de données qui vont permettre l’analyse de cette catégorie de population. 2. Quels

indicateurs peut-on calculer via ces bases de données ?

Tout d’abord, une première question simple : est-ce que l’ONPMP inclut toutes les

personnes majeures protégées existantes sur le territoire français ? Autrement dit, quel est le

taux de couverture de l’observatoire ? Premièrement, un des grands intérêts de la population

majeure protégée est que c’est une population légale. C’est-à-dire que les personnes

deviennent protégées à la suite de la prononciation légale d’une mise sous protection. On ne

peut pas devenir personne majeure protégée sans avoir été déclarée telle quelle par la loi.

C’est donc une population qu’on peut étudier (à l’inverse de certaines autres comme la

population sans abris, par exemple).

Par contre, la population protégée n’est pas suffisamment suivie pour pouvoir être

analysée de manière exhaustive. Ce n’est donc pas une « population statistique » au sens où

elle n’est pas répertoriée dans une base de données au niveau national ou à un niveau

moindre. Les seules statistiques exhaustives disponibles viennent du fichier national des

tribunaux d’instance, et elles ne peuvent donner que le nombre de mesures selon le type au

niveau national. C’est pourquoi l’intérêt d’un Observatoire National de la Population des

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Majeurs Protégés est d’une haute importance. Maintenant, il faut se demander si l’observation

de cette population par les seules UDAF est suffisamment exhaustive ?

Or, comme dans toute observation continue de population, on réalise qu’il existe

certains biais à prendre en compte dans l’analyse finale des majeurs protégés. Tout d’abord,

du point de vue de la couverture, les bases de données des UDAF ne suffisent pas pour avoir

la totalité de la population majeure protégée au sein de l’observatoire. Et ceci pour plusieurs

raisons. Tout d’abord, car une dizaine d’UDAF ne possède pas de service tutelle (c’est-à-dire

que certains UDAF ne sont pas des organismes tutélaires). Par exemple, aucun département

de la région Nord-Pas-de-Calais ne dispose de service tutelle. Or, quand on connaît le poids

démographique de cette région, on ne peut pas « oublier » cette région sans parler de biais

dans l’exhaustivité.

Secundo, il faut savoir que toute personne mise sous protection n’est pas obligée de

rentrer à l’UDAF. En effet, elles peuvent s’inscrire dans d’autres organismes tutélaires. Or,

nous savons qu’un des principes inconditionnels de l’observation continue est l’obligation de

l’enregistrement. Mais cette obligation est impossible dans le cadre de notre sous-population

étudiée car il n’existe pas d’organisme tutélaire au niveau national. Par contre, ce second biais

d’exhaustivité est diminué par le fait que les UDAF sont de nos jours le premier organisme

tutélaire de France.

Tertio, toutes les mesures de la base sont des mesures d’état. Hors, il existe un certain

nombre de mesures qui ne le sont pas (mesures sous la direction de la famille).

Enfin, dernier problème d’exhaustivité et non des moindres : le fait que certains

UDAF, pour des raisons diverses, n’envoient tout simplement pas leurs données. Dans ce cas-

là, selon l’intérêt des UDAF, certains départements risquent d’être sur-représentés par rapport

à d’autres, ce qui doit impérativement être pris en compte dans l’analyse finale : on ne peut

parler que de résultats partiels. Ceci révèle le problème de systématicité de la collecte. Avec

les refus et les retards, il n’y a pas systématicité dans la saisie. Il y a donc un biais de

représentativité selon la région géographique. D’autant qu’avec autant de manières de saisir

que d’UDAF, il n’y a pas systématicité des contrôles non plus. Pour éviter ce dernier biais,

peut-être que saisir tous les questionnaires papier à l’UNAF aurait été une solution plus

pratique, mais aussi plus coûteuse.

A tous ces biais d’exhaustivité, s’ajoute d’autres biais qui ne facilitent pas

l’observation continue des flux. La base exhaustive est foncièrement beaucoup moins traitable

que la base échantillon. En effet, le nombre d’informations est trop faible pour être vraiment

intéressant et les sorties sont difficilement étudiables car on ne peut pas connaître leurs

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causes. Il n’y a donc pas le choix : dans la base exhaustive, une sortie correspondra à une

disparition de l’identifiant. On ne pourra pas définir si c’est une sortie par décès, par fin de

mesure ou par sortie de l’UDAF. On ne pourra pas non plus corriger les problèmes des

fausses sorties. En effet, quand une personne protégée change de département, elle ne garde

pas son ancien identifiant mais en prend un nouveau à son arrivée dans sa nouvelle UDAF.

Dans la base, on aura donc l’impression qu’il y a eu une sortie et une entrée alors qu’en fait, il

n’y a eu aucun mouvement réel au niveau national. Ceci prouve combien la fervente

indépendance de chaque UDAF entre eux peut poser des problèmes quand on veut raisonner à

l’échelon national. Car comme chaque UDAF a son propre système d’identifiant, on ne peut

pas suivre les personnes qui déménagent souvent. Heureusement, ce biais est limité car les

personnes protégées ne migrent que très rarement.

Dans la base échantillon, on pourra retrouver ces fausses sorties car la cause de la

sortie est présente dans le questionnaire. Nous allons voir d’ailleurs que les données du

questionnaire regorgent d’informations bien plus facilement traitables dans le cadre d’une

observation continue. Mais revenons aux biais sur l’observation continue. Si les sorties sont

problématiques, il faut cependant remarquer que les entrées ne posent aucun problème, vu

qu’on se base dans l’échantillon sur la date de prononcé.

Par contre, il faut noter qu’il existe un léger biais dans la définition même des

mesures. Nous avons déjà parlé en première partie du problème de certaines mesures non

fixées (exemple : curatelle pouvant aussi bien dire curatelle simple que renforcée). Ce

problème est cependant un problème de bases des données. Or, ici, le problème est plus un

souci de définition. Dans les prérogatives nécessaires à l’observation continue, il faut savoir

que les définitions doivent toujours être comparables entre elles avec le temps. Ce qui est bien

avec les mesures de protection, c’est qu’elles se font dans un cadre de définition légale et

inchangée depuis leur création en 1968. Toutes les définitions de mesure sont donc censées

être comparable dans toute la France. Or, on réalise, en connaissant bien le sujet, que ça n’est

pas toujours le cas. Prenons ainsi l’exemple des curatelles. Les définitions légales des

curatelles sont 508, 510, 511 et 512. Et bien on trouve des cas où les juges parlent de curatelle

allégée, ce qui peut aussi bien dire curatelle 510 que 512 aménagée par l’article 511. Or ces

deux types de curatelles sont bien séparés dans la classification de l’ONPMP. Bien entendu,

ce biais de comparabilité est léger car cette appellation n’est pas très utilisée par les juges

mais il faut le prendre en compte comme un biais de définition.

Un tableau récapitulatif (sur le modèle de Fichiers administratifs et suivi de sous-

population à l’échelon local, F. Bouchut, D. Breton, P. Cordazzo, F. Cornuau) présente en

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annexe 16 les problèmes de l’analyse de la population majeure protégée en observation

continue. Ces biais sont bien présents, mais on peut compter sur le fait que le problème soit

tempéré par le constat que l’on raisonne à l’échelon national, où les biais ont plus de chances

de se fondre dans la masse d’information de la base. Quoi qu’il soit, via la base échantillon,

on réalise qu’il est fortement possible de pouvoir faire des choses intéressantes,

démographiquement parlant.

2) Réflexion sur le renouvellement de la sous-population des majeurs protégés

On appelle renouvellement de la population la manière dont une population évolue via

des entrées et des sorties. Ces flux sont identifiables dans une logique d’observation continue

comme celle que l’on applique à l’ONPMP. L’intérêt de la démographie dans ce genre

d’observatoire est justement l’analyse des entrées et des sorties et le calcul d’indicateurs dit

« synthétiques ». On parle d’indicateur d’intensité lorsque celui-ci définit l’intensité finale du

phénomène et on parle d’indicateur de calendrier lorsque celui-ci définit la répartition de ce

phénomène dans le temps. Chacun de ces indices est calculable selon une méthode

transversale (sur une année) ou longitudinale (sur une génération). On utilise bien entendu

pour l’intensité finale transversale l’artefact de la cohorte fictive (où chaque âge possède le

comportement des personnes ayant cet âge à l’année t). Ces indicateurs transversaux sont

moins rigoureux que les longitudinaux mais ils sont et resteront longtemps les seuls

calculables (étant donné la date récente de création de l’observatoire, on ne pourra faire des

analyses par génération réalistes qu’au moment du décès de ces générations). A noter que

cette réflexion n’a pu être effectuée que sur le module principal de la base « échantillon », la

base exhaustive n’ayant pas assez d’informations pour pouvoir être intéressante ou pour

connaître les flux de population. A noter également que tous les indicateurs calculés sont des

mesures nettes.

a) Les indicateurs d’ « entrée »

Il n’existe qu’un seul type d’entrée dans la population majeure protégée : la

prononciation de mesures de protection. Ceci facilite la création d’indicateur car on ne peut

pas entrer dans cette sous-population de manière illégale. Les personnes majeures protégées

ont donc subi deux entrées : la naissance (qui ne doit pas avoir eu lieu avant l’année t-18) et

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l’entrée dans une mesure de protection. On peut dès lors calculer des taux généraux d’entrée

selon la date d’inscription dans l’UDAF. On ne parle alors que de primo-mesure (vu que c’est

la date d’entrée dans l’UDAF qui prévaut et non pas la date de prononciation de la mesure).

Les taux d’entrée sont bien entendu calculés par âge atteint (selon l’année de naissance). A

partir de ces taux, on peut calculer deux types d’indicateurs synthétiques :

• L’intensité de l’entrée sous mesure de protection sera une proportion finale de

nouveaux majeurs protégés calculable de cette manière : � (primo-mesures de

protection à chaque âge / population moyenne de la France à chaque âge (selon

les estimations annuelles de l’INSEE)). Cet indicateur montrera la proportion de la

population finissant majeure protégée dans une UDAF chaque année et à terme en

longitudinal la proportion d’une génération finissant majeur protégé (ce dernier calcul

n’étant possible qu’après le décès de tous les individus d’une même génération). Voici

quelle serait la forme du tableau de données (en prenant l’exemple de l’année 2001).

Tableau de calcul d’une proportion de nouveaux majeurs si une cohorte

fictive subissait les taux de primo-mesure de protection de l’année 2001 Age atteint dans l’année

Primo-mesures prononcées selon l'âge en 2001

population moyenne par âge en 2001

taux de primo-mesure par âge

18 19 20

,,, 97 98 99

Total des primo-mesures Population totale moyenne

Proportion finale de nouveaux majeurs protégés dans la population totale

• La mesure de calendrier est l’âge moyen des nouveaux majeurs protégés dans les

UDAF, autrement dit, l’âge moyen à la protection. On le calcule comme suit : �

(primo-mesures de protection * âge + 0.5) / total des primo-mesures.

A partir de là, on peut définir des cohortes de mesure de protection (selon la date

d’entrée dans l’UDAF, la mesure de protection étant l’évènement immédiatement antérieur).

Ces cohortes sont caractérisées par les indices précédemment calculés, mais peuvent aussi

servir à la création d’autres indices.

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b) Les indicateurs d’entrée de rang n

A travers ces cohortes de mesure de protection, on peut maintenant définir des

mouvements inter-cohortes. En effet, au sein d’une cohorte de majeurs protégés, on peut

définir des sous-cohortes selon la mesure même (exemple : cohorte de tutelle). On peut alors

raisonner en mesures (et non plus en primo-mesures). En parlant de ces sous-cohortes, on peut

appliquer les mêmes indicateurs que ceux calculés précédemment. Sauf que l’on calculera des

taux d’entrée selon la mesure et selon l’âge (taux de prononciation de tutelle, taux de

prononciation de curatelle, etc.). Cela pourra définir des proportions finales de la population

finissant sous tutelles ou sous curatelle, etc. Mais ces cohortes vont surtout nous permettre de

calculer des taux de passage d’une mesure à l’autre.

Foncièrement, il est possible en France de passer d’une mesure de protection à une

autre. Mais mesurer la proportion finale de mesures qui passent à une autre mesure

(transformation de la mesure) n’est pas très facile. Dans notre observatoire, comme il est

possible de définir des cohortes de chaque mesure de protection, cette proportion peut être

calculée. Le but est de comparer pour les personnes ayant des identifiants communs, la sortie

de rang n d’une mesure de protection et l’entrée de rang n dans une autre mesure. Prenons

l’exemple d’une curatelle renforcée transformée en curatelle simple. La proportion finale de

personnes dont la curatelle renforcée est transformée en curatelle simple se calcule comme

suit :

• ���� (prononciation de curatelle simple concernant les individus étant sortie d’une

curatelle renforcée selon la durée de cette curatelle renforcée / main levée de

curatelle renforcée selon la durée de celle-ci). L’indicateur synthétique ainsi créé

définit la proportion finale d’une année ou d’une génération qui finira en curatelle

simple après être rentrée dans les Personnes Majeures Protégées sous le régime de la

curatelle renforcée.

Voici le tableau de calcul de cette proportion en prenant comme exemple le passage de

la curatelle renforcée à la curatelle simple en 2001 (cohorte fictive selon les données

transversales) :

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Tableau de calcul d’une proportion de majeurs entrant en curatelle simple

après avoir été en curatelle renforcée si une cohorte fictive de majeurs

subissait les taux de transformation d’une curatelle renforcée en curatelle

simple de l’année 2001

durée de la curatelle renforcée en année atteinte

main levée de curatelle renforcée selon la durée

prononciation d'une mesure de curatelle simple pour les identifiants concernés par la main levée d'une curatelle renforcée selon la durée de celle-ci

taux de transformation selon la durée

0 1 2

,,, 28 29 30

Total des mainlevées de curatelle renforcée

Total des prononciations de curatelle simple pour les identifiants concernés par la main levée d’une curatelle renforcée

Proportion finale de majeurs passés d'une curatelle renforcée à une curatelle simple

• L’indicateur de calendrier est dans ce cas la durée moyenne de la curatelle renforcée à

la transformation en curatelle simple. Elle se calcule ainsi : ���� (prononciation de

curatelle simple pour les identifiants précédemment sous curatelle renforcée *

durée de la curatelle renforcée + 0.5) / total des prononciations de curatelle

simple à identifiant précédemment sous curatelle renforcée. Sous ce même

principe, on peut calculer plus simplement la durée moyenne d’une curatelle renforcée

à la main levée.

L’exemple pris ici n’est qu’indicatif. En fait, il est possible de calculer ces indicateurs

de « transformation finale » [proportion finale de personnes passant d’une mesure à une autre

entre toutes les sous-cohortes de mesure (y compris TPSA)]. Et de cette même manière, on

peut bien entendu calculer l’intensité de la sortie finale d’une mesure (toute sortie d’une

mesure n’étant pas transformée est en fait une sortie « définitive » du système de protection).

On peut donc connaître grâce à ces indices les mesures les plus aptes à la sortie (main levée,

etc.) sans transformation. Cependant, les changements de mesures ne sont pas toujours très

courants. Ainsi, les tutelles sont beaucoup plus figées et le calcul d’indicateur sur cette

catégorie sera moins intéressant. Les catégories pour lesquelles ces indicateurs sont

intéressants sont :

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• Le passage d’une curatelle renforcée à une curatelle simple, situation plus courante

dans le cas où l’état du majeur protégé évolue positivement.

• Encore plus intéressant est le calcul de ces indicateurs pour toutes les transformations

concernant les sauvegardes de justice. En effet, celles-ci sont par définition des

mesures temporaires et il est intéressant de voir quelle type de mesure ressort le plus

souvent à la fin d’une sauvegarde de justice. En calculant la proportion finale de

sauvegarde transformée pour chaque mesure, on peut obtenir les mesures les plus

appropriées à la sauvegarde mais aussi une intensité finale de sortie de la sauvegarde

de justice. Cette dernière étant plus intéressante que les autres, car il est plus probable

qu’une sauvegarde de justice ne soit pas reconduite en mesure de protection à la suite

de l’enquête qui a été réalisée (la sauvegarde est une mesure temporaire qui dure le

temps de l’enquête démontrant s’il y a lieu d’avoir une mesure ou pas). On peut donc

savoir, par cet indicateur, si la sauvegarde de justice est une mesure qui mène à une

vraie mesure de protection.

A noter plusieurs choses d’un point de vue méthodologique. Tout d’abord, la durée

entre une main levée et la prononciation d’une autre mesure est très courte. Donc, il est

inintéressant d’étudier le temps entre une sortie de rang n et une entrée de rang n + 1. On

pourrait aussi imaginer une entrée de rang 1 en sauvegarde de justice, une sortie de rang 1 de

cette même sauvegarde, et puis, x années après, une entrée de rang 2 dans une mesure de

protection. On pourrait calculer une durée moyenne de non-présence dans la population

majeure protégée mais ce serait impossible car l’identifiant change.

c) Etude du logement usuel

La question 6 du module principal demande quel est le logement usuel du majeur.

Cette question est particulièrement intéressante pour un démographe car en posant cette

question chaque année, on peut définir des migrations entre type de logements (attention, on

parle bien de migration entre type de logement : quelqu’un peut migrer dans le même type de

logement que précédemment, nous ne pourrons pas le voir). Bien entendu, l’enquête ayant

lieu chaque année, on ne peut étudier ces migrations que d’année en année et l’on ne peut pas,

à l’instar du recensement de la population, définir le nombre réel de déménagements au cours

de l’année (la question demande le logement usuel des trois derniers mois).

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Ici, la sous-cohorte de base sera la cohorte de logement (cohorte habitant dans tel type

de logement depuis l’année t). En prenant l’exemple de l’appartement (un des cas les plus

courants), on peut créer deux types d’indicateur :

• Intensité : proportion finale de déménagements dans une cohorte de logement =

���� ( effectifs ayant déménagés d’un appartement selon le nombre d’années vécues

dans cet appartement) / effectif moyen des personnes habitant en appartement

selon le nombre d’années vécues dans cet appartement.

• Calendrier : durée de vie moyenne dans un appartement avant un départ

(déménagement) : ���� (effectifs ayant déménagé * nombre d’années vécues + 0.5 )/

total des effectifs ayant déménagé.

Le problème de ces cohortes de logement est qu’elles sont définies selon l’année du

questionnaire et non pas selon une date réelle. On ne peut donc calculer ces indices qu’à partir

de 2002 (le questionnaire étant au 31 décembre 2002). Il est cependant très intéressant de

calculer ce type d’indice pour connaître l’intensité finale du déménagement chez les majeurs

protégés. Mais bien sûr, on ne pourra calculer cette intensité finale qu’après le décès de toute

la cohorte de logement (étant donné que l’on a pas la date d’entrée dans ce type de logement,

on ne peut pas avoir le nombre d’années vécus dans ce type de logement chaque année et l’on

ne peut donc pas calculer d’indice transversal). Tous les logements peuvent servir à calculer

cet indicateur. On peut calculer une intensité finale du déménagement entre deux types de

logement seulement. Dans tous les cas, le tableau de calcul a cette forme :

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Tableau de calcul de l’intensité finale du déménagement pour la cohorte

arrivée dans ce type de logement en 2002

années vécues dans le logement

nombre de déménagements selon la durée de vie dans le logement précédent

effectifs de personnes vivant dans ce type de logement selon la durée de vie dans le logement

taux de déménagement selon la durée de vie dans le logement précédent

1 2 3

,,, 28 29 30

nombre total de déménagements

effectifs de personnes vivant dans ce type de logement

intensité finale du déménagement

On peut également appliquer cette méthode à la question 10, en créant des cohortes de

« vie psychiatrique » ou de « vie hospitalisée ». On peut alors calculer l’intensité finale du

départ de l’hôpital selon la durée du placement dans cet établissement. On peut aussi calculer

le nombre moyen d’années passées dans un hôpital.

d) Les indicateurs de sortie

Une des choses intéressantes que l’on peut savoir via la base échantillon (et non pas

via la base exhaustive) est le type de sortie. En effet, quand on étudie le renouvellement d’une

population, il faut connaître ses sorties et le mieux est de connaître les types de sortie qu’elle

peut avoir. Dans la population majeure protégée étudiée au sein de l’ONPMP, on dénombre 6

types de sortie : le décès, la fin de la mesure (pour les mesures en temps limité comme la

TPSA ou la sauvegarde de justice), la perte des prestations sociales (qui met fin, bien entendu,

à la TPSA), la main levée de la mesure, le changement de tuteur (le majeur quitte l’UDAF

pour aller dans un autre organisme tutélaire) et le changement de département (sortie

considérée comme définitive vu que l’identifiant change à chaque changement de tribunal).

A partir de ces différents types de sortie, on peut réaliser toutes sortes d’indicateurs

comme ceux que l’on a vu dans les parties précédentes (sortie d’un logement, main levée

d’une curatelle, etc.). Tout d’abord, on peut simplement calculer des indicateurs de sortie du

système sous-protection en procédant de cette manière :

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• Intensité finale de la sortie : ���� (effectifs de sortants selon la durée de la mesure de

protection) / population moyenne (entre x et x+1) des majeurs protégés selon la

durée de la mesure. Autrement dit, on fait la somme des taux de sortie selon la durée

vécue depuis l’entrée dans le système de protection pour obtenir une intensité finale de

la sortie de ce système.

• De la même manière qu’auparavant, on peut bien entendu calculer aussi l’âge moyen à

la sortie de la population majeure protégée : ���� (effectifs de sortants * durée de la

mesure de protection de ces sortants + 0.5) / effectifs des sortants.

Le tableau de calcul prendra cette forme (exemple de l’année 2001) :

Tableau de calcul de l’intensité finale de la sortie du système majeur

protégé si une génération fictive subissait les conditions de sortie par âge

observée en 2001

durée de la mesure

Sorties du système en 2001 selon la durée vécue dans ce système

population moyenne de majeurs protégés en 2001 selon la durée de la mesure de protection

taux de sortie par durée de la mesure de protection

0

1

2

,,,

28

29

30

Total Total des sorties Population majeure protégée totale moyenne

Intensité finale de la sortie de la population majeure protégée

A partir de ces deux indicateurs classiques, on peut maintenant tout calculer selon les

motifs de sortie :

• La somme des taux de mortalité selon la durée écoulée depuis la prononciation d’une

mesure nous donnera l’intensité finale de sortie de la population majeure protégée en

décédant ainsi que la durée moyenne de vie dans cette population avant de mourir. Cet

indicateur ne sera pas égal à 1 comme celui de la mortalité dans la population totale

car la mort n’est pas, dans une sous-population, le seul type de sortie.

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• La somme des taux de main levée selon la durée de la mesure (� mains levée au bout

de x années / total des mesures depuis x années) nous donnera l’intensité finale de

sortie de la population majeure protégée par une prononciation de fin de mesure.

• La somme des taux de perte de prestations sociales selon la durée de la TPSA (�

pertes au bout de x années / TPSA prononcée à t-x) nous donnera la sortie pour cause

de perte finale de prestations sociales.

• La somme des taux de migration selon la durée de la mesure nous donnera l’intensité

finale de la migration interdépartementale pour la population majeure protégée sous

mesure d’état dans les UDAF.

Bien entendu, tous ces indicateurs sont calculables pour une année (transversal) ou

pour une génération (longitudinal) selon les besoins et les possibilités.

Finalement, toute cette réflexion montre le nombre important de choses que l’on peut

réaliser dans une observation continue de population. L’analyse démographique permet une

meilleure compréhension du renouvellement d’une sous population grâce aux calculs

d’indicateurs d’intensité et de calendrier. Maintenant, la question qui se pose est celle de la

possibilité de ce type d’analyse dans un organisme comme l’UNAF. Il est clair qu’il est

impossible dans le cadre d’un stage de réaliser des calculs allant au-delà de cette réflexion. Et

ceci pour plusieurs raisons. La raison principale est que ce genre de mission est très long et

qu’elle demande bien plus de temps que celui d’un stage de 3 mois. La deuxième raison est

d’ordre plus économique, car ce qui paraît intéressant pour un démographe n’est peut-être pas

prêt à être financé par les organismes qui nous emploient. Ce qui nous lie à la troisième et

dernière raison. Les organismes qui s’intéressent à la démographie sont-ils vraiment intéressés

par ce genre d’analyse démographique pointue ? La question doit être posée dans tous les

organismes qui ne sont pas à vocation strictement démographique, c’est-à-dire quasiment tous

les organismes qui peuvent nous employer. Et ce problème d’adéquation entre travail

démographique et besoin réel de l’employeur est central dans la recherche d’un emploi.

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Conclusion

La mise en place d’un observatoire n’est pas une mission aisée car elle dépasse le

cadre purement théorique de l’observation continue. En fait, la création d’un observatoire est

une réflexion perpétuelle sur l’organisation de la collecte, les variables intéressantes à

demander, mais aussi sur bien d’autres choses. Dans le cadre de l’ONPMP, il a fallu relancer

les demandes, et tout le travail de relationnel avec les UDAF est une chose énorme à réaliser,

mais obligatoire si l’on veut réussir à collecter des bases de qualité.

En fait, la mise en place de l’observatoire s’est faite au cours de mon stage en deux

phases. Et ces deux phases devraient être réalisées dans toutes missions de ce type. La

première phase consiste à « plonger » réellement dans le sujet pour savoir « simplement » de

quoi on parle. En effet, les travaux en statistique reposent quelquefois exclusivement sur des

analyses, alors même que les personnes travaillant sur celles-ci ne savent pas la signification

des variables qu’ils étudient. Pour comprendre le fonctionnement d’un observatoire, il faut

donc impérativement connaître les définitions concernant la sous-population étudiée, la

signification des variables qui vont être traités, le mode de collecte de ces informations et

surtout les problèmes inhérents à ces trois choses. Car il faut par la suite être capable de

« créer » et de comprendre la base de données finale sur laquelle tous les futurs travaux vont

être réalisés.

En ce qui concerne l’ONPMP et la collecte des données sur les majeurs protégés, il a

fallu faire tout cela de manière pratique. Il a fallu connaître les définitions juridiques des

différentes mesures de protection, si peu connues du grand public. Il a fallu collecter les

données en les vérifiant, en les recodant de manière à simplifier leurs futurs traitements. Au

final, il a fallu organiser la base d’une manière homogène, alors que les bases des UDAF sont

si hétérogènes. Je n’aurais pas pu me lancer dans une analyse si je n’avais pas connu ce

travail, soit, plus fastidieux, mais tellement nécessaire pour comprendre la base de données

sur laquelle tout repose. Il y a donc eu des difficultés à réunir ces bases, difficultés bien

entendu accrues par le fait que toutes les UDAF ont des fonctionnements différents. C’est

donc en travaillant avec l’absence de systématicité de la collecte que nous avons pu réaliser

une véritable base proche de l’exhaustive pour la première base « exhaustif », et proche de la

représentativité de l’exhaustif pour la seconde base « échantillon ».

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C’est seulement après cette première phase que l’on peut réaliser la seconde : le travail

d’analyse. Nous avons réalisé une véritable analyse d’enquête où nous avons pu définir la

vraie originalité de la population majeure protégée via un travail sur sa structure, sur les

variables qui font ces caractéristiques, etc. Nous avons pu découvrir le véritable visage des

majeurs protégés, ce qu’aucun travail n’avait réussi à faire dans le passé. Et si nous avons

réussi à prouver que cette sous-population est plus âgée, ou plus ou moins masculine selon les

âges et les mesures, c’est tout simplement parce que nous connaissions le véritable sens des

variables sur lesquelles nous avons axé nos travaux. Nous n’avons pas juste fait un travail

statistique sur des variables socio-démographiques : nous avons pu expliquer ces chiffres pour

éviter qu’ils soient autre chose que de simples données numériques creuses. Nous avons voulu

que ces données quantitatives soient explicitées comme des données qui expriment la

« qualité » (c’est-à-dire la particularité) de la vie des majeurs protégés.

Il est dommage de voir que tout le côté longitudinal d’un observatoire n’a pas pu être

mis en avant dans la durée de mon stage. En effet, un observatoire est un organe qui se

développe avec le temps. Si j’ai donc pu réfléchir sur ce qu’il était possible de faire avec ces

données collectées de manière continue, je n’ai pas eu la chance de voir ce que cette réflexion

pouvait donner dans l’avenir. Mais je ne doute pas que cette observation continue permettra

de connaître prochainement les « tendances » de la population majeure protégée, tendances

une fois de plus bien trop peu connues de nos jours.

Dans tous les cas, les différentes phases de mon travail ont prouvé l’intérêt que

pouvait avoir un démographe au sein d’un observatoire. Au-delà même des connaissances et

des techniques spécifiques à la démographie, ce qui m’a paru le plus important au sein de

cette mission est la méthode utilisée. En effet, un démographe a une certaine méthodologie et

des automatismes devant une base de données qui, je pense, donne une certaine aisance à

l’analyse, même si elle est plus statistique que démographique. Un démographe sait travailler

sur ce genre de bases et peut donc être efficace sur un observatoire de ce type. Le choix des

indicateurs et des graphiques pour les représenter est aussi partie de nos compétences. Il y a

donc une réelle méthodologie de travail « du démographe » qui joue dans ce genre de

missions, même si ce n’est pas une mission strictement démographique. Ce qui prouve que

cette méthodologie est adaptable à de nombreux types d’études. La démographie est une

science suffisamment ouverte pour être capable d’adapter ses méthodes à d’autres sciences

(comme ici la sociologie). Je tiens également à préciser que la manière de faire les

commentaires, point fondamental de l’analyse, est également parfaitement appropriée dans ce

type d’observatoire.

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Toutefois, si la méthode a prédominé la technique, cela prouve que ce genre de

missions n’est pas non plus exclusivement dédié aux démographes. Mais d’un autre côté,

peut-on vraiment trouver un métier que l’on dirait 100 % démographique ? Je pense qu’il est

concluant de savoir adapter les techniques démographiques à d’autres types de professions

que celle de « démographe ». Et c’est dans cette facilité d’adaptation que la démographie

trouve sa grande force. Certaines missions seront toujours dédiées aux démographes. Mais ces

missions étant peut-être trop souvent à « durée déterminée », je pense que c’est la rigueur et la

méthode du démographe qui permettent de faire face à d’autres types de missions. On

demande de nos jours de plus en plus de compétences multiples. Et c’est pourquoi je pense

que l’on engage peut-être plus facilement un démographe quand on sait qu’il est capable de

s’adapter à d’autres missions proches mais tout de même différentes d’une pure analyse

démographique.

Tout cela nous relie à la formation de DESS que j’ai suivi au sein de l’Institut de

Démographie de Strasbourg. Cette formation a permis le développement de cette méthode et

de ces réflexes de travail. Il y a donc une réelle adéquation entre ma formation et le stage.

Cependant, comme je l’ai noté plus haut, beaucoup de points vus dans le programme de DESS

dépassent largement le cadre de l’analyse d’enquête. Le DESS donne une très bonne

formation en démographie mais le problème est que ces connaissances ne sont pas toujours

assez connues pour attirer l’employeur. Toutefois, je n’ai pas eu l’occasion au cours de ce

stage de voir toutes les possibilités d’un observatoire. Si la réflexion réalisée en dernière

partie peut réellement intéresser l’UNAF, alors il y a vraiment une forte adéquation entre ce

que l’on apprend et ce que l’on peut faire au niveau professionnel. Mais je ne peux pas savoir

si cette réflexion est réellement intéressante pour ce type d’organisme de même que je ne sais

pas s’il est capable de financer ce genre de projet.

Quoi qu’il en soit, la méthode me paraît être un des éléments les plus importants à

développer, car c’est la première chose qui est vue par un employeur. De ce fait, la formation

de DESS de démographie m’a bien préparé au monde du travail. D’autant plus qu’elle a su

dépasser l’analyse démographique pure pour nous donner une formation en statistique. Or,

mes connaissances en statistiques m’ont été d’un grand secours. Je pense que c’est l’un des

points forts de ma formation : elle est capable de s’ouvrir sur la statistique ou la méthode

d’enquête pour permettre une meilleure adéquation entre la volonté des employeurs et

l’intérêt du démographe. Et de fait, la statistique est plus connue en tant que mot que la

démographie alors que ce sont deux aspects complémentaires l’un de l’autre. Ignorer une

formation statistique ne nous aurait pas permis d’être bien reconnu sur le marché de l’emploi.

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C’est parce que nous pouvons nous déclarer démographe-statisticien que nous pouvons

espérer à une embauche à l’avenir.

Pour conclure, ce stage a été intéressant même si la partie analyse n’a pas été à mon

goût assez prononcée. Pris par des impératifs de temps et par le retard des UDAF par rapport

à la date limite de rendu du rapport, je n’ai pas pu participer comme prévu à la totalité de

l’analyse des deux bases. Je suis cependant conscient que la première phase du stage est

nécessaire à la juste compréhension des indicateurs sur lesquels nous avons travaillé par la

suite. J’ai de plus appris à connaître quelques rouages du monde professionnel comme le

travail à deux, ou les qualités relationnelles nécessaires à l’obtention de données de qualité

(les relations avec les UDAF ont été en effet très importantes dans le nombre final d’envois de

données). Ce qui montre bien que le monde professionnel dépasse le cadre strict des

compétences personnelles. C’est un tout dans lequel notre savoir doit être continuellement

confronté aux impératifs de temps et de coût économique.

Ce stage a d’autant plus été enrichissant grâce à la formation que j’ai reçu dans

certains domaines extra-démographiques. Ainsi, j’ai pu accroître mes connaissances

informatiques (utilisation du logiciel Question) ainsi que mon savoir sur l’analyse d’enquête

socio-démographique. Une fois de plus, je pense que cette multiplication des savoirs et des

compétences me sera utile à l’avenir.

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Annexes Questionnaire « lieu de vie » d’origine .....Erreur ! Signet non défini. Questionnaire « lieu de vie » final Erreur ! Signet non défini. Présentation de l’exhaustif ............Erreur ! Signet non défini. Les mesures de protection des majeurs.....Erreur ! Signet non défini. Structure par âge de la population majeure protégée dont la mesure de protection est assurée par une UDAF.........Erreur ! Signet non défini. Structure par sexe de la population majeure protégée .Erreur ! Signet non défini. Pyramides de la population majeure protégée au sein des UDAF et de la population majeure totale .Erreur ! Signet non défini. Y-a-t-il un effet genre selon le type de mesure de protection ?........................................................Erreur ! Signet non défini. Présentation de la structure de l’échantillon .... Erreur ! Signet non défini. Le logement chez les majeurs protégés dont la mesure est nouvellement assurée par une UDAF en 2001 ou 2002.........................................................Erreur ! Signet non défini. Les revenus du travail de la population majeure protégée dont la mesure de protection est assurée par un UDAF.......Erreur ! Signet non défini. Les revenus de la redistribution pour la population majeure protégée dont la mesure de protection est assurée par un UDAF.............................................Erreur ! Signet non défini. Les revenus du capital et de l’épargne pour la population majeure protégée dont la mesure de protection est assurée par un UDAF .......................................Erreur ! Signet non défini.

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L’hospitalisation des personnes majeures protégées ...Erreur ! Signet non défini. La structure des fins de mesure de protection des majeurs........................................................Erreur ! Signet non défini. Type de problèmes rencontrés pour l’analyse longitudinale de la population majeure protégée .............................................. 46

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Type de problèmes rencontrés pour l’analyse longitudinale de la population majeure protégée

TYPE DE PROBLEMES RENCONTRES POUR L'ANALYSE LONGITUDINALE DE LA

POPULATION MAJEURE PROTEGEE

LOGIQUE DE GESTION FLUX DEFINITION

problème de couverture organisation informatique identifiant date d'entrée migration

modalités de sorties comparaison

toutes les personnes protégées n'étant pas

sous mesure d'état (tutelle familiale) +

toutes les personnes protégées étant

inscrites dans un autre organisme tutélaire + toutes les personnes

protégées vivant dans les départements sans service tutelle dans les UDAF + UDAF n'ayant pas envoyé leurs bases

de données

identifiant

méthode différente selon

les UDAF : même

identifiant possible entre deux UDAF,

même identifiant au

sein du même UDAF (si

classification selon la mesure),

changement de l'identifiant en

cas de déménagement

ou en cas de fin de mesure puis reprise

date exacte de prononcé de la

mesure

changement de

départements

type de sortie

précisé

pour les curatelles, le terme utilisé par le juge peut vouloir dire deux choses

différentes

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Yves Breem

DESS de démographie

2 rue Montaigne

78180 Montigny-le-Bretonneux

2003