la mise en place d’une cooperation europeenne

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601 LA MISE EN PLACE D’UNE COOPERATION EUROPEENNE AU TITRE DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE PAR MARC MORSA Conseiller juridique principal, SPF Sécurité sociale, DG Appui stratégique INTRODUCTION Même si la fraude transnationale et le dumping social ne constituent pas une problé- matique récente, il reste que ces derniers mois, les cas d’abus, d’ingénierie en matière de détachement des travailleurs ont défrayé la chronique. Une réelle confusion s’est créée dans le discours politique et dans une certaine presse autour de la notion de détachement qui, en droit européen, recouvre deux réalités distinctes, à savoir celle retenue par la directive 96/71/CE en matière de droit du travail et l’autre visée par les règlements européens de coordination n os 883/2004 et 987/2009. Chaque Etat membre avec plus ou moins de succès fourbit ses armes pour tenter d’enrayer ces phénomènes à coup d’initiatives législatives, de plan d’action, etc. Il reste que le cadre juridique applicable aux travailleurs migrants est empreint de complexité, notamment en raison de l’hétérogénéité de ses sources de droit mobi- lisables (conventions internationales, règlements et directives européens, etc.) mais surtout parce que les réponses apportées par ces divers instruments ne sont pas com- munes aux deux champs du droit social : pour une situation de mobilité internatio- nale donnée ne trouveront pas nécessairement à s’appliquer simultanément le droit du travail et le droit de la sécurité sociale d’un même pays. La détermination de la loi de sécurité sociale est contrainte, pratiquement impérative en raison du principe de territorialité des législations de sécurité sociale ; en revanche, les parties à la rela- tion de travail disposent de davantage d’autonomie pour déterminer quel droit du travail régira le contrat, même si cette autonomie connaît d’indéniables limites 1 . Les éléments d’extranéité qui affectent certaines relations de travail peuvent conduire à des conflits de lois. Or, tout contrat de travail est nécessairement rattaché à la loi d’un Etat. Il existe en droit du travail deux instruments supranationaux susceptibles (1) S. Hennion, M. Le Barbier-Le Bris et M. Del Sol, Droit social européen et international, PUF, 2010, p. 213 et s.

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La mise en place d’une cooperation europeenne au titre de la lutte contre la fraude sociale transnationale RBSS - 03/2015

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    LA MISE EN PLACE DUNE COOPERATION EUROPEENNE AU TITRE DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    PAR MARC MORSAConseiller juridique principal, SPF Scurit sociale, DG Appui stratgique

    INTRODUCTION

    Mme si la fraude transnationale et le dumping social ne constituent pas une probl-matique rcente, il reste que ces derniers mois, les cas dabus, dingnierie en matire de dtachement des travailleurs ont dfray la chronique. Une relle confusion sest cre dans le discours politique et dans une certaine presse autour de la notion de dtachement qui, en droit europen, recouvre deux ralits distinctes, savoir celle retenue par la directive 96/71/CE en matire de droit du travail et lautre vise par les rglements europens de coordination nos 883/2004 et 987/2009.

    Chaque Etat membre avec plus ou moins de succs fourbit ses armes pour tenter denrayer ces phnomnes coup dinitiatives lgislatives, de plan daction, etc.

    Il reste que le cadre juridique applicable aux travailleurs migrants est empreint de complexit, notamment en raison de lhtrognit de ses sources de droit mobi-lisables (conventions internationales, rglements et directives europens, etc.) mais surtout parce que les rponses apportes par ces divers instruments ne sont pas com-munes aux deux champs du droit social : pour une situation de mobilit internatio-nale donne ne trouveront pas ncessairement sappliquer simultanment le droit du travail et le droit de la scurit sociale dun mme pays. La dtermination de la loi de scurit sociale est contrainte, pratiquement imprative en raison du principe de territorialit des lgislations de scurit sociale ; en revanche, les parties la rela-tion de travail disposent de davantage dautonomie pour dterminer quel droit du travail rgira le contrat, mme si cette autonomie connat dindniables limites1. Les lments dextranit qui affectent certaines relations de travail peuvent conduire des conflits de lois. Or, tout contrat de travail est ncessairement rattach la loi dun Etat. Il existe en droit du travail deux instruments supranationaux susceptibles

    (1) S. Hennion, M. Le Barbier-Le Bris et M. Del Sol, Droit social europen et international, PUF, 2010, p. 213 et s.

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    de rsoudre ces conflits de lois; ces instruments utilisent des concepts tels que celui de dtachement, mais en y confrant un sens et une porte diffrents et ncessitent quune brve analyse leur soit consacre.

    Aussi, dfaut dun cadre juridique harmonis, les Etats membres sont condamns cooprer en vue de lutter contre la fraude transnationale et le dumping social.

    La prsente contribution a pour objet de dcrire brivement les principales initia-tives prises lchelon europen (par la Commission europenne; par la Belgique ou encore au sein de lorganisation internationale Benelux) en vue de rendre plus efficiente cette coopration essentielle la lutte contre la fraude sociale transfronta-lire et le dumping social. Ces initiatives tant rcentes (certaines ntant dailleurs pas encore mises en uvre), il est difficile de mesurer si celles-ci seront la hauteur des objectifs qui leur sont assigns.

    1. LEUROPE ET LA FRAUDE SOCIALE

    LEurope nest pas absente du dbat (et des proccupations) relatif la lutte contre la fraude sociale dans la mise en uvre du droit de lUnion. Bien que le rglement euro-pen (CE) n 883/2004 du Parlement Europen et du Conseil du 29 avril 2004 por-tant sur la coordination des systmes de scurit sociale2 et son rglement dapplication (CE) n 987/2009 fixant les modalits dapplication du rglement (CE) n 883/2004 portant sur la coordination des systmes de scurit sociale3, en vigueur depuis le 1er mai 2010, ne contiennent pas de dispositions spcifiques concernant la lutte contre la fraude et les erreurs dans lapplication des dispositions communautaires4, il reste que sous limpulsion de ses institutions, lUnion europenne a dvelopp diffrents instruments ou textes pertinents dans la perspective dun dveloppement dune coopration plus troite entre Etats membres.

    (2) JOUE n L 166 du 30 avril 2004.(3) JOUE n L 284 du 30 octobre 2009.(4) Une coopration entre les autorits, pour ce qui est des prestations et des cotisations de scurit sociale, est prvue par le rglement (CEE) n 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif lapplication des rgimes de s-curit sociale aux travailleurs salaris, aux travailleurs non-salaris et aux membres de leur famille qui se dplacent lintrieur de la Communaut (J.O.C.E., L 149 du 5 juillet 1971, p. 2, modifi en dernier lieu par le rglement (CE) n 307/1999, J.O.C.E., L 38 du 12 fvrier 1999, p. 1), y compris dans les dcisions et recommandations pertinentes de la Commission administrative pour la scurit sociale des travailleurs migrants, et, pour ce qui est du dtachement transfrontalier de travailleurs, par la directive 96/71/CE du Parlement europen et du Conseil du 16 dcembre 1996 concernant le dtachement de travailleurs effectu dans le cadre dune prestation de services (J.O.C.E., L 18 du 21 janvier 1997, p. 1).

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    1.1. LA RECOMMANDATION N 19 DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE DU 24 NOVEMBRE 1992Dabord, dans la recommandation n 19 de la Commission administrative du 24 novembre 1992 concernant lamlioration de la coopration entre Etats membres dans lapplication de la rglementation communautaire5, il est prcis que les au-torits comptentes des Etats membres doivent prendre des mesures pour [] am-liorer lefficacit de la coopration [] pour mettre les rglements en uvre ; en encourageant les contacts spcialiss entre les institutions des Etats membres [] et en dveloppant les changes de donnes de manire empcher les abus . Il semble, cependant, quil nexiste aucune preuve que des mesures spcifiques de lutte contre la fraude aient t prises sur la base de cette recommandation6.

    1.2. LA RESOLUTION DU CONSEIL ET DES REPRESENTANTS PERMANENTS DES GOUVERNEMENTS DES ETATS MEMBRES DU 22 AVRIL 1999

    Ensuite, le 22 avril 1999, le Conseil et les reprsentants permanents des gouverne-ments des Etats membres, runis en conseil, ont dfini dans une rsolution un code de conduite pour une meilleure coopration entre les autorits des Etats membres en matire de lutte contre la fraude transnationale aux prestations et aux cotisa-tions de scurit sociale et le travail non dclar, et concernant la mise disposition transnationale de travailleurs7. Le Conseil prend la mesure de la ncessit dam-liorer la coopration entre les Etats membres dans le secteur du travail transnatio-nal afin dviter des consquences ngatives pour la protection des travailleurs et le fonctionnement du march du travail. En effet, lamlioration de la coopration et de lchange dinformations aura des effets positifs sur la situation de lemploi et la protection des travailleurs, notamment pour ce qui concerne la lutte contre la fraude transnationale aux prestations et aux cotisations de scurit sociale (ci-aprs dnomme fraude la scurit sociale ), la lutte contre le travail non dclar et la mise disposition transnationale de travailleurs. Dans les domaines qui ne sont pas couverts par le rglement (CEE) n 1408/71 ou par la directive 96/71/CE, la rsolution estime quil est souhaitable dencourager les Etats membres amliorer la coopration et les changes dinformations au niveau bilatral dans les domaines viss par la prsente rsolution, en suivant un code de conduite non contraignant et en utilisant les structures et procdures existantes. Dans la mise en uvre du prsent code de conduite, un rle important revient aux organismes de scurit sociale ainsi que, le cas chant et dans la mesure o ils disposent des pouvoirs correspondants, aux services de linspection du travail des Etats membres.

    (5) Ce document nest pas repris sur le site web de la Commission europenne. Ce texte est paru au J.O.C.E., C 199 du 23 juillet 1993, p. 1, mais on peut en prendre connaissance galement dans le Recueil des dispositions communautaires sur la scurit sociale (4me d.).(6) Rapport du groupe ad hoc sur la lutte contre la fraude et les erreurs prpar par D. Coulthard (rapporteur), 18 septembre 2008. Ce rapport a t ralis sur la base du mandat de la Commission administrative pour la scurit sociale des travailleurs migrants (CASSTM).(7) J.O.C.E., C 125 du 6 mai 1999, p. 1.

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    Mais, au-del, le mrite de cette rsolution gt dans leffort de travail de dfinition des concepts centraux (voy. point A, 2. de la rsolution) tels que celui de la fraude la scurit sociale quelle dfinit comme tant le fait de poser ou de sabstenir de poser certains actes, en vue dobtenir des prestations de scurit sociale ou de tourner lobligation de cotiser la scurit sociale, en violation du droit interne dun Etat membre , ou encore celui de travail non dclar quelle circonscrit comme recouvrant toute activit rmunre qui est lgale par sa nature, mais qui nest pas dclare comme lexigent le droit interne ou les pratiques nationales et, enfin, celui de mise disposition transnationale de travailleurs qui, selon elle, dsigne le fait, pour un employeur dun Etat membre, de mettre des travailleurs la disposition dun utilisateur dans un autre Etat membre, tout en maintenant sa relation contrac-tuelle avec lesdits travailleurs ; le prsent code de conduite ne doit pas tre interprt comme autorisant la mise disposition de travailleurs dans les Etats membres dont la lgislation nationale ne le permet pas.

    1.3. LA COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPEEN, AU COMITE ECONOMIQUE ET SOCIAL EUROPEEN ET AU COMITE DES REGIONS SUR LINTENSIFICATION DE LA LUTTE CONTRE LE TRAVAIL NON DECLARE DU 24 OCTOBRE 20078

    Dans cette communication, la dfinition donne par la Commission la notion de travail non dclar (Ndlr : Le travail non dclar est dfini comme toute activit rmunre de nature lgale, mais non dclare aux pouvoirs publics, [] tenant compte des diffrences entre les systmes rglementaires des Etats membres ), en fait, tablit un lien entre le travail non dclar et la fraude fiscale et/ou le non-paie-ment des cotisations obligatoires de scurit sociale et recouvre diverses activits allant de la prestation de services informels aux mnages jusquaux travaux clandes-tins effectus par des rsidents en situation irrgulire ; elle exclut cependant toute activit criminelle. Il est gnralement admis que le travail non dclar, phnomne complexe subissant linfluence dune multitude de facteurs conomiques, sociaux, institutionnels et culturels, tend entraver les politiques conomiques, budgtaires et sociales visant la croissance.

    La communication rappelle limportance de lconomie informelle, qui ne flchit pas et semble mme prendre de lampleur dans certains secteurs (construction) et pour certaines formes de travail, et insiste pour quau niveau politique, une attention durable et suffisante soit accorde au travail non dclar. La communication entend donc souligner la pertinence des politiques de lutte contre le travail non dclar. La problmatique du travail non dclar avait dj t analyse dans la commu-nication de 1998 de la Commission9, qui analysait ses causes et ses rpercussions,

    (8) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2007:0628:FIN:FR:PDF.(9) COM(98) 219.

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    tout en mettant en lumire certaines des politiques appliques en la matire. Cette communication prparait le terrain un vaste dbat politique lchelle de lUE sur le sujet, qui sest achev par ladoption dune approche stratgique commune dans les lignes directrices pour lemploi concernant la priode 2003-200510. Ces lignes directrices prconisaient un dosage quilibr de mesures prventives (notamment une rglementation adapte sur la fiscalit et les prestations sociales et des rgles administratives appropries), dactions de sensibilisation, de sanctions et de mesures coercitives. Cette alliance de mesures a t reprise et toffe dans la rsolution du Conseil du 29 octobre 2003 relative la transformation du travail non dclar en emploi rgulier11, qui appelait galement une action des partenaires sociaux. Le livre vert sur le droit du travail 12 considre que le travail non dclar est lun des principaux facteurs de dumping social et, par consquent, lun des grands enjeux de la modernisation de la lgislation du travail dans lUE. De plus, le travail non dclar est souvent synonyme de conditions de travail inadquates et de risques pour la sant des travailleurs, de faibles perspectives de carrire et dune protection sociale insuffisante. Dans les politiques visant rduire le travail non dclar, la communication exhorte les autorits renforcer les mcanismes de surveillance et de sanctions, avec laide des services de linspection du travail, des administrations fiscales et des partenaires sociaux. Le livre vert de la Commission sur le droit du travail13 soulignait dj la ncessit dune coopration plus efficace, au niveau natio-nal, entre diffrents organes des pouvoirs publics, tels que linspection du travail, la scurit sociale et les autorits fiscales, affirmant que le renforcement des ressources et lamlioration de lexpertise de ces instances de contrle, de mme que la conso-lidation de leur collaboration avec certains partenaires, peuvent contribuer rduire les causes du travail non dclar .

    2. QUELLE(S) DEFINITION(S) ? POUR LA FRAUDE SOCIALE

    Il nexiste pas de dfinition du concept de fraude sociale transfrontalire qui sim-pose. Des diffrents instruments europens, voqus supra, il ressort quil doit sagir dune activit lgale par nature mais non rapporte aux autorits sociales et fiscales. Ainsi, seraient exclues les activits illgales.

    Ces difficults autour du concept de fraude sociale et du travail non dclar se sont invites au sein de lenceinte genevoise de lOIT o ces dernires ont suscit dpres discussions lors des deux dernires confrences internationales du travail concernant ladoption de la recommandation n 204 sur la transition de lconomie informelle

    (10) J.O.U.E., L 197 du 5 aot 2003 (ligne directrice spcifique n 9 sur le travail non dclar).(11) J.O.U.E., C 260 du 29 octobre 2003, p. 1.(12) Moderniser le droit du travail pour relever les dfis du XXIe sicle , COM(2006) 708 du 22 novembre 2006.(13) Ibid., p. 9.

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    vers lconomie formelle. Ainsi, larticle 2 de ladite recommandation ne vise pas exclure tous les travailleurs exerant une activit non dclare (mme sils ne se conforment pas la lgislation nationale) des mesures tendant faciliter la transition vers lconomie informelle, mais plutt ceux qui participent des activits crimi-nelles transnationales particulirement graves, comme celles qui sont vises par les traits internationaux pertinents; telle est la porte de larticle 2, b) qui stipule que les termes conomie informelle ne dsignent pas les activits illicites, en particu-lier la fourniture de services ou la production, la vente, la possession ou la consom-mation de biens interdites par la loi, y compris la production et le trafic illicites de stupfiants, la fabrication et le trafic illicites darmes feu, la traite des personnes et le blanchiment dargent, tels que les dfinissent les conventions internationales pertinentes.

    Au niveau des travaux mens au sein de la Commission administrative pour la coor-dination des systmes de scurit sociale, les dfinitions suivantes des concepts de fraude sociale et erreurs sont communment partages. Fraude la scurit sociale : le fait de poser ou de sabstenir de poser certains actes,

    en vue dobtenir des prestations de scurit sociale ou de tourner lobligation de cotiser la scurit sociale, en violation du droit interne dun Etat membre.14

    Lerreur est dfinie15 soit comme : - Une erreur du client lorsque une information incorrecte est produite sans

    intention frauduleuse. - Erreur officielle lorsque celle-ci est due une faute occasionne par un acte

    ou une omission du personnel, que le client na pas caus ou laquelle il na pas matriellement contribu et que le client ne pourrait pas, au moment o il reoit le paiement ou paie les cotisations, tre raisonnablement au courant.16

    Certains auteurs autoriss utilisent une dfinition trs englobante de la notion de fraude sociale puisqu leur estime celle-ci doit se dfinir comme suit : La fraude sociale peut se comprendre comme un abus en matire de droit du travail, de droit la scurit sociale et de laide sociale afin de se soustraire aux rgles administratives et aux charges y lies. Lventail des exemples est trs large et dpasse de loin les affaires de fraude aux allocations. Il sagit galement du travail au noir , de la dissimulation de revenus qui non seulement permet dviter une partie de limpt mais permet galement de profiter davantages sociaux lis aux niveaux des revenus dclars (bourses dtudes, tarifs divers dtermins au prorata du revenu). Lexemple du travail au noir ou de la dissimulation dune part des revenus montre

    (14) Partie A, Section 2, littera a, de la rsolution du Conseil du 22 avril 1999, 1. J.O.C.E., C 125 du 6 mai 1999.(15) UK National Audit Office Report International Benchmark Report on Fraud and Error in social security systems, HMSO 2006.(16) Adopt par le prcdent ad-hoc groupe (2008).

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    combien la limite entre la fraude fiscale et la fraude sociale est tnue et pourquoi certains la considrent comme inexistante. En effet, les fraudes opres touchent aussi bien les contributions fiscales et parafiscales. Que ce soit la fraude fiscale ou la fraude sociale leffet principal est identique, savoir la rduction de lassiette fiscale et ce faisant des recettes de lEtat et des ressources dont il dispose pour mener des po-litiques de redistribution et produire des biens et services lusage de la collectivit. Les phnomnes de fraude voqus ci-dessus ont des consquences nfastes autant pour les entreprises, et les individus que pour les pouvoirs publics 17.

    Par contre, ce qui nest pas discut cest le constat qu la suite de la crise conomique et sociale (2008), la proccupation relative au niveau lev du travail non dclar figure parmi les priorits de la politique de lUE visant amliorer la cration dem-plois, la qualit de lemploi et lassainissement budgtaire. Le travail non dclar entraine de lourdes consquences budgtaires du fait quil entrane une perte de recettes fiscales et de cotisations sociales. Il nuit lemploi, la productivit et aux conditions de travail, lacquisition de comptences et lapprentissage tout au long de la vie. Il ne permet gure la constitution de droits pension et noffre gure accs aux soins de sant18.

    3. LIMPORTANCE, LA NECESSITE DE LA COOPERATION AU NIVEAU EUROPEEN

    3.1. COOPERATION ET COORDINATION, FACTEURS CLEF DUNE LUTTE EFFICIENTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE

    La coopration et la coordination entre acteurs dans la lutte contre la fraude sociale constitue un enjeu central. Il sagit de deux activits interdpendantes. Ainsi, alors que la coopration vise laction par laquelle les institutions des Etats membres de lUE mues par un intrt commun (celui de la correcte application des rglements europens de coordination; de la correcte perception des cotisations sociales, etc.) collaborent une action commune (la lutte contre la fraude sociale), la coordination renvoie la ncessit dharmoniser les activits diverses lies cette collaboration dans un souci defficacit.

    3.2. POURQUOI LA COOPERATION EST-ELLE INDISPENSABLE POUR LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE AU NIVEAU EUROPEEN ?

    Le cadre juridique applicable aux travailleurs migrants est empreint de complexit notamment en raison de lhtrognit de ses sources de droit mobilisables (con-ventions internationales, rglements et directives europens, etc.) mais surtout parce

    (17) M. Monville, Fraude : Fiscale vs sociale , Lettre mensuelle socio-conomique, n 152, octobre 2009, Conseil Central de lEconomie, pp. 11-12.(18) Commission europenne, 4 juillet 2013, C(2013) 4145 final, ibidem.

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    que les rponses apportes par ces divers instruments ne sont pas communes aux deux champs du droit social : pour une situation de mobilit internationale donne ne trouveront pas ncessairement sappliquer simultanment le droit du travail et le droit de la scurit sociale dun mme pays. La dtermination de la loi de scurit sociale est contrainte, pratiquement imprative en raison du principe de territorialit des lgislations de scurit sociale ; en revanche, les parties la relation de travail disposent de davantage dautonomie pour dterminer quel droit du travail rgira le contrat, mme si cette autonomie connat dindniables limites19.

    Les lments dextranit qui affectent certaines relations de travail peuvent conduire des conflits de lois. Or, tout contrat de travail est ncessairement rattach la loi dun Etat. Il existe en droit du travail deux instruments supranationaux susceptibles de rsoudre ces conflits de lois : le premier instrument est lorigine une conven-tion internationale non spcifique aux contrats de travail20 laquelle a succd le rglement n 593/2008 du Parlement europen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I)21 ; le second est la directive 96/71/CE, dite dtachement , du 16 dcembre 199622. Ces instruments utilisent des concepts tels que celui de dtachement, mais en y confrant un sens et une porte diffrents23.

    Bref, ces normes juridiques de droit europen sont toutes des normes de coordina-tion puisque tant le droit du travail que le droit de la scurit sociale relvent de la souverainet nationale.

    4. LES PLATEFORMES DE COOPERATION EUROPEENNES EXISTANTES

    4.1. LA DECISION H5 ET LE RESEAU DE POINTS CONTACT NATIONAUXMatres mots au niveau de lintensification de la lutte contre la fraude la scurit sociale en Belgique, la coopration et la coordination lchelon europen fi-gurent parmi les principes directeurs (obligatoires)24 du rglement n 883/2004 du Parlement Europen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination

    (19) S. Hennion, M. Le Barbier-Le Bris et M. Del Sol, Droit social europen et international, op. cit., p. 213 et s.(20) La convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles.(21) J.O., n L 177 du 4 juillet 2008, entre en vigueur le 24 juillet 2008 ; voy. St. Francq, C. Henricot, S. Sarola et P. Wautelet, Actualits de droit international priv, Louvain-la-Neuve, Anthemis, 2009, pp. 61-65.(22) Directive 96/71/CE du Parlement europen et du Conseil du 16 dcembre 1996 concernant le dtachement de travailleurs effectu dans le cadre dune prestation de services, J.O., n L 018 du 21 janvier 1997, pp. 1-6.(23) A ce sujet, voy. M. Morsa, Libre circulation, scurit sociale et citoyennets europennes, Anthmis, bibl.de droit europen, Paris, 2012, 482 pages.(24) M. Morsa, libre circulation, scurit sociale et citoyennets europennes, o.c.

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    des systmes de scurit sociale25. En effet, ce dernier (art.7626) introduit le principe directeur dit de bonne administration qui comprend deux branches : dune part, une coopration accrue et une assistance mutuelle entre les instituti-

    ons des Etats membres au bnfice des citoyens, afin dviter que le citoyen soit renvoy sans fin dune institution une autre ;

    dautre part une obligation, pour les institutions, de rpondre toute demande dans un dlai raisonnable et de communiquer aux personnes concernes tou-tes les informations ncessaires pour faire valoir leurs droits. titre rciproque, les personnes concernes devront galement communiquer aux institutions tout changement dans leur situation qui est susceptible davoir une incidence sur leurs droits aux prestations 27.

    En outre, larticle 8, par. 2, du rglement prvoit la possibilit pour Deux ou plu-sieurs Etats membres peuvent conclure entre eux, si ncessaire, des conventions fondes sur les principes et lesprit du prsent rglement. La Belgique a ainsi conclu avec la France (et dautres Etats frontaliers: voy. infra) des traits sur cette base juridique en vue de renforcer la coopration interinstitutionnelle dans le combat contre la fraude sociale transfrontalire.

    4.1.1. La prise de conscience au sein de la Commission administrative dun renforcement de la coopration entre institutions de scurit sociale pour lutter contre la fraude sociale transfrontalire

    Durant sa 307me runion en dcembre 2007, la Commission administrative pour la coordination des systmes de scurit sociale (C.A.) a dcid dtablir un groupe ad-hoc. Le but assign ce groupe ad-hoc tait dassister la Commission administra-tive en renforant la coopration entre institutions de scurit sociale comptentes et plus particulirement dans le combat contre la fraude et les erreurs en matire de scurit sociale. Ceci dboucht sur la publication de deux rapports sur les fraudes et

    (25) JOUE n L 166 du 30 avril 2004.(26) Le principe de bonne administration oblige les institutions rpondre toute demande dans un dlai raisonnable et lobligation de communiquer la personne concerne les informations ncessaires en vue de lac-quisition et la prservation de ses droits. En guise de rciprocit, les citoyens sont tenus dinformer dans les meil-leurs dlais les institutions de lEtat membre comptent et de lEtat membre de rsidence de tout changement dans leur situation personnelle ou familiale ayant une incidence sur leurs droits aux prestations. Par ailleurs, le remplacement programm des formulaires papier par des nouveaux documents lectroniques (les Structured Electronic Documents SED ), utiliss pour les changes entre les institutions europennes et la rduction des documents portables (papier) pour les relations avec lassur contribuent une simplification et une mo-dernisation des changes et des traitements dinformations en matire de scurit sociale. Ce nouveau systme permet de mieux rpartir les comptences et les responsabilits entre les institutions des divers Etats membres et dacclrer et de faciliter le traitement des donnes par une rduction considrable de la charge administrative.(27) Ces dispositions ont dj t reprises dans le rglement n 631/2004 du 31 mars 2004 qui modifie les rglements n 1408/71 et n 574/72 en ce qui concerne lalignement des droits et la simplification des procdu-res et qui est entr en vigueur le 1er juin 2004 (J.O., n L 100 du 6 avril 2004).

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    erreurs rdigs par ce groupe ad-hoc ainsi qu lidentification des problmes majeurs dans ce domaine. Les conclusions et recommandations mises dans ces rapports ont finalement conduit ladoption par la CA le 18 mars 2010 de la dcision H5 ayant trait la coopration dans le domaine de la lutte contre les fraudes et les erreurs dans le cadre du rglement (CE) n 883/200428

    4.1.2. La dcision H5 contenu objectifsEn liens troits avec la problmatique de la fraude, dans sa dcision H529 du 18 mars 2012 dcision figurant parmi les dispositions de type horizontale, la Commis-sion administrative pour la coordination des systmes de scurit sociale (CACSS)30 tablit (considrants 3 et 4), dune part, que La lutte contre les fraudes et les erreurs sinscrit donc dans le cadre de la bonne application des rglements (CE)n883/2004 et (CE) n987/2009 et, dautre part, qu une coopration plus troite et plus efficace entre les autorits comptentes et les institutions est un facteur cl dans la lutte contre les fraudes et les erreurs. La Commission administrative reconnait, cet gard, que pour tre, une coopration efficace dans le domaine de la lutte contre les fraudes et les erreurs doit reposer sur les mcanismes de fourniture dinformations notamment sur des changements de la lgislation applicable.

    La dcision H5 souligne que les mesures de lutte contre les fraudes et les erreurs sont troitement lies aux branches de scurit sociale dfinies larticle 3, paragraphe 1, du rglement (CE) n 883/2004 et visent garantir que les cotisations sont verses lEtat membre quil faut et que les prestations ne sont pas octroyes indment ou obtenues de manire frauduleuse.

    Quant aux moyens clefs pour lutter contre les fraudes et erreurs, la dcision H5 pointe: dune part, lidentification des personnes qui revt une importance fondamen-

    tale pour la gestion administrative des rglements, aussi bien pour retrouver une personne dans la base de donnes dune institution que pour vrifier quune per-sonne est bien celle quelle prtend;

    et dautre part, le droit (et partant lobligation dans le chef de linstitution de lEtat de sjour) pour linstitution comptente, en cas de doute, demander

    (28) JOUE n C149 du 8.06.2010 p. 5.(29) Dcision H5 concernant la coopration dans le domaine de la lutte contre les fraudes et les erreurs dans le cadre du rglement (CE) n 883/2004 du Conseil et rglement (CE) n 987/2009 du Parlement europen et du Conseil portant sur la coordination des systmes de scurit sociale.(30) Avec lentre en vigueur des nouveaux rglements ns 883/2004 et 987/2009, la Commission administrative pour la scurit sociale des travailleurs migrants (CASSTM) a chang dappellation pour devenir la Commission administrative pour la coordination des systmes de scurit sociale. Ce changement dappellation nest pas que formel mais fait suite llargissement du champ dapplication personnel des nouveaux rglements de coordina-tion qui ne sont plus uniquement ancrs sur lexercice dun activit (non) salarie.

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    linstitution du lieu de sjour ou de rsidence de vrifier les informations fournies par la personne concerne ou la validit dun document.

    A cette fin, la dcision H5 fixe comme principe gnral celui de la coopration entre institutions et autorits comptentes (art. 1). En outre signe de la prise en compte de la dimension fraude et erreurs dans la gestion de ses activits la dcision H5 prvoit que la CA organisera une runion annuelle consacre aux discussions des cas de fraudes et erreurs partir des rapports fournis titre volontaire par les Etats membres concernant leur exprience et leur progrs en la matire (art. 2). Larticle 3 de la dcision H5 prvoit le dveloppement dun rseau de points de contact nationaux en matire de fraudes et derreurs, auquel les autorits comptentes ou les institutions peuvent signaler des risques de fraudes ou dabus ou des difficults systmatiques lorigine de retards et derreurs. Ce point de contact est inscrit sur une liste publie par le secrtariat de la Commission administrative.

    Larticle 4 dcrit les mesures prendre en vue de prvenir les cas derreurs. Ces dernires portent sur la ncessit dchanger en temps utile des donnes de qualit en particulier dans le cadre du systme dchange lectronique dinformations sur la scurit sociale (le systme EESSI31).

    Larticle 5 est consacr la coopration en matire de notification de dcs en vue de prvenir les cas doctroi indu de prestations sociales notamment en matire de pen-sion de vieillesse. A cet gard, la Commission exhorte les Etats changer les bonnes pratiques quils auraient mises au point et surtout changer le plus rapidement possible les notifications de dcs.

    Quant aux articles 6 et 7 de la dcision H5, ces derniers portent sur les demandes de renseignements. La dcision prvoit, cet gard, que les institutions ou autorits comptentes ne peuvent rejeter de telles demandes que si elles ont procd un examen minutieux de ces dernires. En outre, les institutions ou autorits comp-tentes doivent aider les institutions requrantes lidentification dun tiers comme source approprie.

    4.1.3. La dcision H5 La mise en place dun rseau de points de contact nationaux

    a) La situation initiale: un rseau de points de contact inoprant et inefficaceLe principe de la mise en place dun tel rseau de points de contact est prvu par larticle 3 de la dcision H5 (voy. supra). En outre, une liste de ces points de contact nationaux a t publie par le secrtariat de la CA en juillet 2011.

    (31) EESSI = Electronic Exchange Social Security information.

    FC

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    Deux annes suivant lentre en vigueur de la dcision H5, un constat simposait : le rseau des points de contact est inoprant et ce pour diffrentes raisons (toutes interdpendantes). En effet la liste publie par le secrtariat tait incomplte, incoh-rente et partant inoprante pour soutenir le fonctionnement du rseau des points de contact nationaux. Ainsi, nombre dEtats navaient pas dsign de points de contact, dautres navaient fourni quun nombre insuffisant de donnes relatives leur point de contact, etc. Non seulement ceci a nui gravement la communication, mais les premiers rsultats ont dmontr que les tentatives pour changer de linformation sur les risques et les difficults systmatiques concernant les fraudes et erreurs taient totalement infructueuses.

    b) Un nouvel lan pour le rseau des points de contact: le projet H5NCPLa Commission europenne consciente de limportance de rendre effectif le rseau des points de contact nationaux pour une lutte efficiente contre la fraude sociale transfrontalire a lanc un appel proposition32. Les dlgations belge (SPF Scurit sociale) et nerlandaise (Social Insurance Bank SVB) ont introduit une proposition conjointe pour relancer le fonctionnement du rseau des points de contact par la cration dune E-plateforme soutenue par des lignes directrices claires. Ce projet accept par la Commission europenne se terminait le 14 janvier 2014.

    Eu gard aux rsultats gnrs par le projet - et la demande unanime des dlga-tions au sein de la CA, la Commission a dcid de poursuivre pendant deux annes le financement de la plateforme H5NCP dans lattente de trouver une solution structurelle. A cette fin, les dlgations belge et nerlandaise ont reu le mandat de la CA aux fins de grer le rseau des points de contact jusquau 31 dcembre 2015.

    (32) Call for proposals no. VP/2012/004 Actions for Cooperation and Information on Social Security Coor-dination 04.03.0500.

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    FIGURE : CALL FOR PROPOSALS NO. VP/2012/004 ACTIONS FOR COOPERATION AND IN-FORMATION ON SOCIAL SECURITY COORDINATION 04.03.0500*

    * Propre traduction.

    Trait caractristique majeur concernant limplmentation du projet, celle-ci chaque stade sest base sur les besoins des institutions ainsi que sur leur adhsion et implication constantes.

    La plateforme lectronique a t dveloppe en intgrant les fonctionnalits mo-dernes de communication permettant une coopration relle distance (vi-do-confrences; travail conjoint sur un mme document; cration de sous-groupe dchanges sur des thmatiques spcifiques en matire de pensions, soins de san-t, lgislation applicable, notification de dcs33). En outre, la plateforme permet de lancer des enqutes (surveys), de tirer des statistiques, des rapports partir des changes entre points de contact sur des bonnes pratiques.

    Un modrateur gnral a t dsign en vue de rguler les changes, garantir le respect des dispositions relatives la protection des donnes et veiller ce que des r-ponses soient apportes toutes les questions poses sur la plateforme. Chaque sous-groupe est chapeaut par un modrateur qui veille dynamiser les changes dans la matire traite par le sous-groupe et faire rapport sur les activits dveloppes au sein du sous-groupe.

    (33) Les sous-groupes ont t crs en tenant compte des changes et des priorits mises en avant par les insti-tutions concernes.

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    REVUE BELGE DE SECURITE SOCIALE - 3e TRIMESTRE 2015

    Les rsultats du projet (plateforme lectronique; lignes directrices) ont t valids par la CA et les lignes directrices ont t publies sur le site Web de la Commission confrant ainsi un statut officiel ces dernires ; lignes directrices qui simposent dornavant lors de la dsignation de nouveaux points de contact.

    Il sagit dune plateforme paneuropenne ds lors que cette dernire couvre non seu-lement les 28 Etats membres de lUnion europenne, mais aussi Les Etats membres de lEEE non-membres de lEU (Islande, Liechtenstein et Norvge) ainsi que la Suisse.

    Au 1er janvier 2016, la plateforme sera hberge par la Commission europenne: il sagit, ds lors, de la premire plateforme europenne de coopration dans la lutte contre la fraude sociale transnationale.

    c) Les rsultats produits par le rseau des points de contact H5NCPLes points de contact ont unanimement exprim le souhait et la ncessit dorgani-ser une runion annuelle durant laquellesont notamment : analyses de manire approfondie des bonnes pratiques; discutes les difficults rencontres dans le fonctionnement du rseau; prsents des points dactualit en matire de fraude sociale lchelon europen,

    international ou national; prsents les rsultats dtudes statistiques ou autres analyses juridiques ralises

    par le rseau dexperts FreSsco (contractant de la CA); prsents les rapports du modrateur gnral ainsi que ceux des modrateurs de

    chaque sous-groupe.

    En outre, ces runions constituent une relle opportunit pour les experts nationaux pour changer, en marge de la runion annuelle, sur des dossiers (individuels) sen-sibles et envisager des stratgies communes pour y apporter des solutions.

    Outre les reprsentants nationaux, la Commission europenne et dautre experts (nationaux, europens ou internationaux) assistent ces runions annuelles.

    Le rseau des points de contact et leurs experts constituent galement un outil per-tinent pour la Commission pour lui permettre de tester certains flux dchanges lectroniques (EESSI) ou affiner certains documents lectroniques en lien (in)direc-tement avec les fraudes et les erreurs dans le cadre de lapplication des rglements europens de coordination n 883/2004 et 987/2009.

    Un rapport de ces runions est tabli pour chacune des runions annuelles. Ces rap-ports sont ensuite diffuss et prsents aux dlgations au sein de la CA.

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    Outre ces runions annuelles, le rseau dexperts permet de dvelopper un approche bottom-up vers la Commission en lui communiquant les difficults rencontres, les cas problmatiques en matire de fraude sociale transfrontalire sur lesquels la CA doit se pencher pour y rpondre.

    Plus immdiatement le rseau des points de contact permet aux points de contact dchanger sur des problmatiques lies lapplication des rglements europens et dy apporter des solutions ; solutions qui seront diffuses dans tout le rseau. Par consquent, ces changes aident vritablement la rsolution de cas individuels concrets.

    4.2. ICENUW ET ICENUW BEYOND : PLATEFORME COOPERATIVE ET INTERACTIVE POUR LES SERVICES DINSPECTION ET DE CONTROLE

    Une tude ICENUW Mise en uvre de la coopration dans un rseau euro-pen contre le travail non dclar (2010), a examin la faon dont la coopration transfrontalire des inspecteurs du travail contre le travail non dclar pouvait mieux fonctionner34. Ltude sest concentre sur les documents et procdures ncessaires la conduite dune inspection et la ncessit dune comparabilit entre les Etats membres. Le 18 fvrier 2011, dans le cadre de la coopration ICENUW, la charte de Bruges Avances dans la lutte transfrontalire contre le travail non dclar a t signe par 11 Etats membres de lUE et la Norvge.

    Mais il ne sagit pas que dune tude puisque, outre ltude ralise portant sur lenvi-ronnement lgal pour lchange des donnes (de lege lata et de lege ferenda) et ltude sur les mesures dissuasives, le projet a surtout livr deux outils directement opra-tionnels pour les services dinspection, savoirdune part, une plateforme lectro-nique interactive permettant la digitalisation du catalogue reprenant les documents lis au contrle dimension transfrontalire et, dautre part, les pratiques y lies et aux inspecteurs dchanger avec leurs homologues trangers en temps rels.

    Etant donn la pression morale exerce par les Etats membres partenaires dans le projet, la Belgique a dcid de poursuivre le dvelopp des livrables du projet Icenuw dune part en ltendant gographiquement tous les Etats membres de lUnion europenne et EEE et matriellement en couvrant les documents (et pratiques y lies) de contrle en matire de droit fiscal et droit du travail. Ces matriaux jettent les bases sur lesquelles peut reposer une inspection europenne.

    (34) http://www.socialsecurity.fgov.be/fr/nieuws-publicaties/conferenties/icenuw/deliverables.htm.

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    5. LES ACCORDS BILATERAUX INSTAURANT UNE COOPERATION RENFORCEE DANS LESPRIT DES REGLEMENTS DE COORDINATION OU DAUTRES INSTRUMENTS DE DROIT DERIVE35

    Paralllement aux dmarches et projets prcits, la Belgique a galement dvelopp un nouveau modle daccord-cadre en vue de renforcer la coopration mutuelle entre les institutions des Etats membres de lUE dans lesprit des rglements europens. La gamme de ces instruments est varie puisquil peut sagir de simples arrangements ad-ministratifs entre directeurs de services dinspection/contrle excutant des normes de droit de lUE driv (par ex. la directive 96/71 dite dtachement des travailleurs), mais aussi dinstruments beaucoup plus dvelopps permettant par exemple un croi-sement transfrontalier de fichiers de donnes (datamining/datamatching), voire la mise en place dun embryon dinspection lchelon europen.

    Laccord-cadre conclu avec la France en octobre 2008 visant renforcer la coop-ration mutuelle appartient la seconde catgorie dinstruments prcits ( 55). Un accord de coopration en matire de scurit sociale a t conclu entre la Belgique et la France le 17 novembre 2008 destin rduire la fraude, les erreurs et les abus et garantir lefficience des droits sociaux36. Cet accord met en place un cadre de coo-pration pour les institutions de scurit sociale et permet notamment un change (massif ) de flux de donnes entre les deux pays, lchange dagents en vue deffectuer des contrles conjoints, la mise en place de bonnes pratiques et le recouvrement transfrontalier des dus et indus en cotisations (contributions) sociales et allocations. Pour la France comme pour la Belgique, cest la premire fois quun accord prvoit la transmission et le croisement de fichiers entre deux pays pour lutter contre la fraude37 ; cest aussi la premire fois quun accord international prvoit la possibilit aux services dinspection du travail dun Etat de pouvoir prendre part des contrles organiss sur le territoire de lautre Etat.

    Il sagit dun accord-cadre fixant les rgles gnrales de la coopration et de la coordination dont les mesures dexcution sont prcises dans un arrangement ad-ministratif ; cet ensemble permettant ensuite aux institutions de dfinir, dans le cadre ainsi trac, les modalits concrtes de leur coopration.

    (35) Ne seront abords ici (sommairement) que les accords relevant de la scurit sociale. De tels arrangements et accords existent galement dans la matire du droit du travail.(36) http://www.socialsecurity.fgov.be/fr/nieuws-publicaties/nieuwsoverzicht/2008/11.htm ; voy. aussi http://www.gouvernement.fr/gouvernement/un-an-de-lutte-contre-les-fraudessociales-premier-bilan ; voy. aussi M. Morsa, Les inspections sociales en mouvement, o.c., p. 60 et s.(37) Dans son rapport du 16 novembre 2009 la Commission administrative pour la scurit sociale des travail-leurs migrants (CASSTM), le groupe ad hoc Combating fraud and error (rf. CASSTM/560/09) indique en annexe n 3, Report on data matching survey on original AHG report (CASSTM 349/09), que la directive 95/46/CE en combinaison avec larticle 84 du rglement (CEE) n 1408/71 leave sufficient room for data exchange for the social security sectors under Regulation (EEC) n 1408/71 .

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    Il sagit daccords de type mixte dans la mesure o dans lEtat fdral belge ceux-ci portent sur des matires relevant la fois de celles de lEtat fdral mais aussi de celles des entits fdres. Cette prcision constitutionnelle ncessite que ces accords soient soumis lassentiment de chacun des parlements (fdral et fdrs).

    Un accord-cadre similaire a t conclu avec les Pays-Bas le 6 dcembre 2010 et sign en marge dune runion des ministres europens Bruxelles. Cet accord de coopra-tion a pour finalit de lutter ensemble contre les fraudes aux allocations, permettra de mieux contrler les allocations verses aux Nerlandais vivant ou travaillant en Belgique, et inversement. A cet effet, les deux pays schangeront et compareront les donnes sur les revenus de leurs citoyens tablis par-del la frontire, ainsi que les biens des personnes bnficiant dune assistance sociale. Les signataires entendent de la sorte mieux contrler la lgitimit des allocations verses, et viter que certains ne profitent de la frontire pour frauder et toucher des allocations auxquelles ils nont pas ou plus droit.

    Ces accords permettent galement de renforcer le contrle des conditions mises au dtachement ainsi de vrifier lexactitude de la nature de lactivit exerce (salarie ou non salarie).

    Les deux conventions ont t dclares mixtes, respectivement en mai 2011 et en octobre 2011, ce qui implique que les diffrentes entits fdres sont devenues comptentes pour ces conventions et que, par consquent, les Parlements respectifs doivent les approuver. A lheure actuelle, ces deux conventions ont dj t approu-ves par la Communaut flamande, la Communaut franaise, la Communaut ger-manophone et lautorit fdrale. En France et aux Pays-Bas, ces textes ont dj t entrins depuis longtemps par les Parlements respectifs. Seule la Commission com-munautaire commune na malheureusement pas encore approuv ces conventions.

    La Belgique a conclu pareil accord-cadre avec le Luxembourg. Dautres le seront certainement avec dautres Etats membres de lUnion europenne dans un avenir proche comme latteste le plan daction 2015 de lutte contre la fraude sociale et le dumping social du gouvernement fdral qui prvoit que De nouveaux accords de coopration seront conclus, par exemple avec des institutions en Bulgarie, en Roumaine, au Portugal, etc.38.

    (38) Plan daction de lutte contre la fraude sociale et le dumping social (2015) du gouvernement fdral bel-ge, page 49. Il nest pas explicit, pour lheure, sous quelle forme juridique cette coopration sera concrtise (accord au sens du droit international public, Mou) ni sur quelle matire portera cette coopration (coordination des systmes de scurit sociale et/ou directive dtachement des travailleurs ) 96/71/CE.

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    6. LES INITIATIVES PRISES AU SEIN DE LORGANISATION INTERNATIONALE BENELUX39

    Depuis 2010 (concidant lanne de mise en uvre du trait Benelux), lorganisa-tion Benelux entend poursuivre concomitamment deux objectifs: dune part, pour-suivre la coopration Benelux en tant que banc dessais pour lEurope et, dautre part, largir la coopration transfrontalire.

    Dans ce cadre, plusieurs initiatives en matire de lutte contre la fraude sociale ont t inities telle que la mise sur pied de groupe de travail associant des experts (inspecti-ons sociales, etc.) issus des trois Etats membres (Belgique, Pays-Bas et Luxembourg) portant sur des thmatiques varies: la concertation entre les trois pays du Benelux dans le cadre de la Concertation stratgique Rglementation sociale et lutte contre la fraude (SOC-STRAT), le groupe de travail Socits fictives/dumping social (SOC-SSOF), le groupe de travail Agences dintrim frauduleuses (SOC-AIFU) et le groupe de travail Fraude aux allocations (SOC-UFA), institus confor-mment larticle 12, sous b), du Trait instituant lUnion Benelux. De mme, diffrentes dclarations et instruments pour la lutte contre la fraude sociale ont t adopts au sein du Benelux, et notamment la recommandation du Conseil inter-parlementaire consultatif de Benelux faisant suite la Confrence trilatrale tenue La Haye le 20 avril 2012 sur la fraude fiscale et sociale et la rponse du Comit de Ministres celle-ci en date du 12 dcembre 2014, la dclaration commune du sommet Benelux Dumping social du 13 fvrier 2014, le trait Benelux du 3 octobre 2014 relatif la coopration transfrontalire en matire dinspection du transport routier et le rgime transitoire y affrent du 16 dcembre 2014, ainsi que la dclaration commune Un plan daction Benelux pour lemploi et la croissance du 29 avril 2015 loccasion du sommet Benelux des chefs de gouvernement. Plus rcemment llaboration dune recommandation du Comit de Ministres Benelux relative au dveloppement dune coopration multilatrale dans la lutte contre la fraude sociale transfrontalire au niveau du Benelux et de lUnion europenne lattention de lUnion europenne40. Cette recommandation est un texte politique dpourvu de toute force juridique contraignante41. En effet, le Comit de Ministres peut faire des recommandations pour les besoins du fonctionnement du Benelux. Ces recommandations nont pas de force juridiquement contraignante, mais elles imposent une certaine obligation morale aux Etats membres de conformer leur l-gislation la recommandation.

    (39) Le Benelux est unaccord de coopration intergouvernementaleentre laBelgique, lesPays-Baset leLuxembourg.(40) Recommandation du Comit de Ministres Benelux relative au dveloppement dune coopration multila-trale dans la lutte contre la fraude sociale transfrontalire au niveau du Benelux et de lUnion europenne M (2015) 7 M (2015) 7.(41) Voy. larticle 6(2) du Trait portant rvision du Trait instituant lUnion conomique Benelux sign le 3 fvrier 1958 offre au Benelux quatre instruments qui peuvent tre utiliss pour fixer sa politique.

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    Cette recommandation insiste sur la ncessit de disposer dun cadre juridique qui doit permettre une coopration transfrontire approfondie entre les diffrents ser-vices dinspection en vue de la lutte contre la fraude sociale. Cette recommandation vise trois objectifs prcis (article 2). Ainsi, les gouvernements des pays du Benelux prennent ensemble des initiatives afin que lUnion Benelux puisse jouer un rle de prcurseur au sein de lUnion europenne : en luttant au niveau international contre la concurrence dloyale et le dumping

    social grce une meilleure collaboration et un meilleur change de donnes ; en prenant autant que possible et ncessaire des mesures pour remdier cer-

    taines lacunes dans le cadre rglementaire ou aux problmes de coopration ; en recherchant au sein du Benelux et conjointement avec dautres pays le soutien

    ncessaire pour prendre au niveau europen les mesures appropries aux fins pr-cises sous le premier point ci-dessus.

    Afin de raliser ces objectifs, les gouvernements Benelux prendront des initiatives au niveau Benelux ainsi quau niveau europen (articles 3 et 4). Ainsi, au niveau Benelux: Les gouvernements des pays du Benelux prennent notamment les mesures sui-

    vantes en vue de la ralisation de lobjectif vis larticle 2 ci-dessus : - la concertation Benelux en matire de rglementation sociale et de lutte contre

    la fraude est soutenue pleinement, y compris au moyen dune coopration scientifique, pour clarifier et analyser certaines formes et certains aspects par-tiels de la fraude sociale, en particulier en ce qui concerne la lutte contre les constructions fictives, la fraude aux allocations et les agences dintrim frau-duleuses ;

    - les diffrentes formes de fraude sociale transfrontalire sont mieux dtectes grce une coopration multidisciplinaire et un change de donnes par le biais dune utilisation transfrontalire de banques de donnes, en examinant plus particulirement si un systme dindicateurs et de clignotants est souhai-table et faisable au niveau Benelux pour dtecter certaines formes de fraude sociale ;

    - les mesures prvues dans la directive dexcution sont mises en uvre de ma-nire analogue et sont renforces, le cas chant, en assurant notamment une meilleure mise en concordance des notifications lectroniques au niveau Be-nelux sur la base des dispositifs nationaux existants ;

    - dans le cadre de lUnion Benelux, il est examin comment la coopration visant dterminer la lgislation de scurit sociale applicable peut tre opti-mise et comment les autorits concernes peuvent tre responsabilises dans le cadre de la perception des cotisations de scurit sociale pour dtecter et rprimer la fraude sociale transfrontalire ;

    - des inspections communes sont mises sur pied entre les services dinspection des pays du Benelux en vue dune lutte efficace contre le dumping social ;

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    REVUE BELGE DE SECURITE SOCIALE - 3e TRIMESTRE 2015

    - lapplication effective des sanctions infliges dans un pays du Benelux pour rprimer la fraude sociale est assure ;

    - ils recherchent la coopration avec et lappui politique dautres Etats membres de lUnion europenne et en particulier les pays limitrophes du Benelux, les Etats baltes et les pays nordiques, pour insister conjointement auprs de lU-nion europenne sur ladoption de mesures europennes dans la lutte contre le dumping social.

    Les gouvernements des pays du Benelux crent de commun accord un cadre juri-dique appropri pour dterminer les principes gnraux applicables aux mesures vises lalina premier.

    Au niveau de lUnion europenne, les gouvernements des pays du Benelux deman-dent la Commission europenne : de procder une rvision du rglement de coordination et du rglement dappli-

    cation, ainsi que des modalits dapplication concernes, en particulier afin que : - en cas de dtachement au sens du rglement de coordination, la dure nor-

    male de deux ans soit effectivement respecte et quil soit examin comment les dlais du rglement de coordination et de la directive sur le dtachement peuvent tre mieux harmoniss et ventuellement rvalus;

    - la procdure en matire de litiges avec les formulaires A1, vise larticle 5 du rglement dapplication, soit rforme pour en accrotre leffectivit, la rapi-dit et la fiabilit;

    - soit examin comment les dispositions concernant la lgislation de scurit sociale applicable peuvent tre modifies pour viter des situations de fraude ventuelle, notamment en ce qui concerne les articles 5 et 6 du rglement dapplication portant respectivement sur la valeur des formulaires A1 et lap-plication provisoire dune lgislation de scurit sociale;

    - soient examines les possibilits de lutter contre les abus transfrontaliers de socits botes aux lettres et du rgime de scurit sociale applicable;

    de promouvoir une meilleure coordination des notifications lectroniques dans lUnion europenne pour dtecter et combattre les situations de fraude sociale transfrontalire, par analogie avec les mthodes appliques cette fin au sein du Benelux et de tendre ventuellement des systmes communs ;

    de renforcer lchange transfrontalier de donnes en vue de dtecter et de com-battre les situations de fraude sociale transfrontalire, en particulier par la mise en uvre du systme informatique prvu EESSI (Electronic Exchange of Social Security Information) pour lchange lectronique de donnes et lauthentifica-tion conformment au rglement de coordination et au rglement dapplication ;

    de crer la possibilit pour les services dinspection de deux ou plusieurs Etats membres deffectuer et de renforcer des inspections communes en cas de fraude sociale transfrontalire ;

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    dtudier la question de savoir comment les autorits concernes peuvent tre responsabilises dans le cadre de la perception des cotisations de scurit sociale pour dtecter et rprimer la fraude sociale transfrontalire.

    A lheure actuelle, force est de constater que la concrtisation de ces diffrentes ini-tiatives issues de cette organisation internationale lchelon europen reste peu visibles. Mais, ces initiatives sont trop rcentes pour en mesurer la porte relle et en tirer quelque conclusion que ce soit.

    CONCLUSIONS

    Les initiatives en vue de renforcer le cadre de la coopration pour lutter contre la fraude sociale transfrontalire et le dumping social sont nombreuses, trop nom-breuses? Le risque rel est, toutefois, que certaines dentre elles ne sarticulent pas, voire mme se contredisent; do limportance dinstaurer un cadre multilatral de dialogue linstar de celui que lorganisation Benelux tend mettre en place entre ses membres mais aussi vis--vis de lUnion europenne.

    Au niveau de lUnion europenne, de nombreuses actions sont entreprises. Ainsi, de nombreux problmes lis la fraude au dtachement font lobjet actuellement din-tenses discussions au sein de groupe de travail ad-hoc au sein de la CACSS sur les questions de dtachement dont les conclusions sont attendues au printemps 2016. Dautres mesures ont dj fait lobjet de dcision au sein de la CACSS comme celle visant insrer une base juridique dans le rglement n 987/2009 dapplication en vue de permettre le croisement de donnes en matire de lutte contre la fraude trans-frontalire42. En outre, sagissant de la rvision des rglements de coordination ns 883/2004 et 987/2009, la Commission europenne doit dposer dbut dcembre 2015 un paquet damendements auxdits rglements dans le cadre de la mobilit du travail (labour mobility package) ; ce paquet damendements devrait, en principe, contenir des propositions relatives au titre 2 du rglement de base n 883/2004 ayant trait aux rgles relatives la dtermination de la lgislation applicable. Sur le plan de la coopration entre institutions et autorits des Etats membres de lUnion europenne, il faut relever qu partir du 1er janvier 2016 la Commission europenne hbergera le rseau des points de contacts nationaux en matire de lutte contre les erreurs et fraudes en application de la dcision H5 de la CACSS43.

    La Commission europenne est consciente de limportance accorder cette coo-pration troite entre institutions dEtats membres comme en tmoigne dailleurs sa

    (42) Vraisemblablement cette base juridique serait considre comme simple modification technique au rgle-ment n 987/2009.(43) Voy. supra.

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    REVUE BELGE DE SECURITE SOCIALE - 3e TRIMESTRE 2015

    communication du 4 juillet 2013 (212) sur le renforcement de la coopration entre Etats membres de lUnion europenne pour la prvention et la discussion du travail non dclar. Ces dernires annes, la Commission a men ou encourag plusieurs tudes destines renforcer la connaissance du phnomne et promouvoir les acti-vits des parties prenantes. Ces tudes ont conclu quune plus grande coopration au niveau de lUnion europenne est ncessaire pour lutter de faon plus efficace contre e travail non dclar dans les Etats membres. Elles suggrent qutant donn que le travail non dclar est trait au niveau national par diffrents acteurs, tels que les inspections du travail ou les autorits de la scurit sociale et fiscales, il est ncessaire dassocier tous ces acteurs toute forme de coopration qui serait dcide au niveau de lUnion europenne.

    La Commission examine actuellement la faon de renforcer la coopration au ni-veau de lUnion europenne entre les autorits de rpression, tels que les inspections du travail, la scurit sociale, les autorits fiscales et de limmigration, qui ont pour but de dpister, prvenir et sanctionner le travail non dclar. Une telle coopration renforce doit contribuer au renforcement de lefficacit et du rendement des au-torits nationales de rpression et, partant, exercer un impact positif sur la cration demplois (par un transfert de lemploi illgal lemploi lgal), une meilleure appli-cation de la lgislation europenne, un travail dcent et la perception des recettes fiscales. Une coopration renforce prserverait la rpartition actuelle des comp-tences entre le niveau national et celui de lUnion. Les Etats membres disposent des instruments daction la fois pour prvenir le travail non dclar (par exemple, au moyen dincitations fiscales ou de campagnes de sensibilisation) et pour le dissuader (par exemple, au moyen de mesures de contrle et de sanctions). Toutefois, le carac-tre transnational du phnomne ne cessant de saffirmer, limportance dun volet Union dans la prvention et la dissuasion du travail non dclar est de plus en plus reconnue.

    Cest dans la foule de ces considrations que la Commission europenne considre quune dmarche possible pour renforcer la coopration entre les organismes de rpression au niveau de lUnion europenne rside dans ltablissement dune plate-forme europenne. La plateforme pourrait tre cre par la Commission et pourrait comprendre des reprsentants des Etats membres et dautres parties prenantes. Cette plateforme europenne dans lobjectif de renforcer la coopration visant prvenir et dcourager le travail non dclar ajoute nouveau une pierre ldifice de la coopration transnationale.

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    LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE

    INTRODUCTION 601

    1. LEUROPE ET LA FRAUDE SOCIALE 602

    1.1. LA RECOMMANDATION N 19 DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE DU 24 NOVEMBRE 1992 6031.2. LA RESOLUTION DU CONSEIL ET DES REPRESENTANTS PERMANENTS DES GOUVERNEMENTS DES ETATS MEMBRES DU 22 AVRIL 1999 6031.3. LA COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPEEN, AU COMITE ECONOMIQUE ET SOCIAL EUROPEEN ET AU COMITE DES REGIONS SUR LINTENSIFICATION DE LA LUTTE CONTRE LE TRAVAIL NON DECLARE DU 24 OCTOBRE 2007 604

    2. QUELLE(S) DEFINITION(S) ? POUR LA FRAUDE SOCIALE 605

    3. LIMPORTANCE, LA NECESSITE DE LA COOPERATION AU NIVEAU EUROPEEN 607

    3.1. COOPERATION ET COORDINATION, FACTEURS CLEF DUNE LUTTE EFFICIENTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE 6073.2. POURQUOI LA COOPERATION EST-ELLE INDISPENSABLE POUR LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE AU NIVEAU EUROPEEN ? 607

    4. LES PLATEFORMES DE COOPERATION EUROPEENNES EXISTANTES 608

    4.1. LA DECISION H5 ET LE RESEAU DE POINTS CONTACT NATIONAUX 6084.2. ICENUW ET ICENUW BEYOND : PLATEFORME COOPERATIVE ET INTERACTIVE POUR LES SERVICES DINSPECTION ET DE CONTROLE 615

    5. LES ACCORDS BILATERAUX INSTAURANT UNE COOPERATION RENFORCEE DANS LESPRIT DES REGLEMENTS DE COORDINATION OU DAUTRES INSTRUMENTS DE DROIT DERIVE 616

    6. LES INITIATIVES PRISES AU SEIN DE LORGANISATION INTERNATIONALE BENELUX 618

    CONCLUSIONS 621

    TABLE DES MATIERES

    LA MISE EN PLACE DUNE COOPERATION EUROPEENNE AU TITRE DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE TRANSNATIONALE