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revue sur l'alcoolisme et la toxicomanie L’intervenant Lintervenant Janvier 2003, vol. 19, n o 2 Envoi de Poste – publications – Numéro de convention 40065296 La célébrité du cannabis, la décriminalisation... et la prévention (2 e partie) Les jeux de hasard et d’argent revisités – Implication pour le traitement du jeu pathologique (2 e partie) La toxicomanie sort du placard! La violence – Quelques définitions « Je revenais de prendre une magnifique marche dans le bois avec ma mère lorsque j’ai pris cette photo. » « Je revenais de prendre une magnifique marche dans le bois avec ma mère lorsque j’ai pris cette photo. » 4,00 $ . La célébrité du cannabis, la décriminalisation... et la prévention (2 e partie) . Les jeux de hasard et d’argent revisités – Implication pour le traitement du jeu pathologique (2 e partie) . La toxicomanie sort du placard! . La violence – Quelques définitions

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Page 1: L’intervenantL ’’intervenantet la toxicomanie · envers les usagers de drogues, 2) un discours ouvert et respectueux et 3) surtout éducatif, c’est à dire non impro-visé

Association des intervenants entoxicomanie du Québec inc.

revue sur l'alcoolismeet la toxicomanie

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La célébrité du cannabis, la décriminalisation... et la prévention (2e partie)

Les jeux de hasard et d’argent revisités – Implication pour le traitement du jeu pathologique (2e partie)

La toxicomanie sort du placard!

La violence – Quelques définitions

« Je revenais de prendre une magnifiquemarche dans le bois avec ma mère lorsquej’ai pris cette photo. »

« Je revenais de prendre une magnifiquemarche dans le bois avec ma mère lorsquej’ai pris cette photo. »

4,00 $

. La célébrité du cannabis, la décriminalisation... et la prévention (2e partie). Les jeux de hasard et d’argent revisités – Implication pour le traitement du jeu pathologique (2e partie). La toxicomanie sort du placard!. La violence – Quelques définitions

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3 Mot de la présidente

4 La célébrité du cannabis, la décriminalisation... et la prévention (2e partie)Maurice Hotte

11 Les jeux de hasard et d’argent revisités – Implication pour le traitement du jeu pathologique (2e partie)Serge ChevalierCatherine GeoffrionÉlisabeth PapineauDenis AllardAmnon J. Suissa

15 Info Livres

16 La toxicomanie sort du placard!Nathalie Hudon

18 La violence – Quelques définitionsMartine Bovay

Calendrier Sommaire2003

Matériel rédactionnelVous désirez publier dans nos pages? N’hésitez pas à nous faireparvenir tout article abordant la problématique des toxicoma-nies. Vos textes peuvent traiter des initiatives pratiques degroupes dans la communauté, du rôle des intervenants pouraméliorer les services à la clientèle, d’études ou d’analyses de pro-grammes, etc.

AbonnementL’intervenant s’adresse aux professionnels et aux personnesintéressées au domaine de la toxicomanie. Vous pouvez obtenirun abonnement à L’intervenant au coût de 15 $ par an (20 $ à l’ex-térieur du Canada). Parutions : janvier, avril, juillet et octobre.

Responsabilité de l’éditeurL’éditeur ne se tient pas responsable des opinions émises danscette publication. Les auteurs ont l’entière responsabilité de leurtexte. Les écrits sont publiés tels que soumis, qu’ils rencontrentou non les orientations de l’AITQ, en autant qu’ils soient perti-nents et d’actualité.

Dates de tombéePour l’envoi de matériel rédactionnel : 1er mars, 1er juin, 1er sep-tembre et 1er décembre.

ReproductionToute reproduction totale ou partielle d’articles, de photos ou de graphiques est interdite à moins d’une entente écrite avecl’éditeur.

20 au 22 février 2003FAS and Other Drug Related Effects 2003Doing What Works!Vancouver, British Columbia

14 mars 2003Les toxicomanes judiciarisés : leur trajectoire et les interventions possiblesUniversité de Sherbrooke, Longueuil

28 mars 2003Les substances psychoactives et l’humeur :de la molécule à la cliniqueL’Hôtel Québec, Sainte-Foy

4 avril 2003Ados, jeunes et toxicomanie : relever lesnouveaux défisUniversité de Sherbrooke, Longueuil

9 mai 2003Les substances psychoactives et l’humeur :de la molécule à la cliniqueUniversité de Sherbrooke, Longueuil

6 juin 2003Toxicomanie et stress post-traumatique :théorie et pratiqueUniversité de Sherbrooke, Longueuil

6 au 10 juillet 200344th Annual Institute on Addiction StudiesPersonal Focus for ProfessionalDevelopmentBarrie, Ontario

Notre page couvertureConcours de photos « Entre nous ça clique »Photo soumise dans le groupe des 15-17 ans etréalisée par Lisandre St-Cyr LamotheSaint-Charles-sur-Richelieu

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Présidente : Lynda Poirier, Centre Casa

Vice-président : Daniel Desrosiers, Centre de réhabilitation Corps, Âme et Esprit

Secrétaire-trésorier : Maryo Larouche, La Croisée des Chemins

Administrateurs : Mario Boulais, CEMA enr.

Claude Gagné, Conseil régional - FTQ

Alain Vigneault, CRATCA et les CHSLD de Beauce

Lynda Villeneuve, Partage du Haut-Richelieu

Pierre Wilson, Pavillons du Nouveau Point de Vue

C O N S E I L D ’ A D M I N I S T R A T I O N ÉditeurAssociation des intervenants en toxicomanie du Québec inc.505, rue Sainte-Hélène, 2e étageLongueuil QC J4K 3R5

DirectriceCarmen Trottier

Abonnement et secrétariat(450) [email protected]

ImpressionImprimerie GG inc.

Revue trimestrielle.

Mois de parution : janvier,

avril, juillet, octobre.

Envois de publications

canadiennes : contrat de vente

no 40065296.

ISSN 0823-213X

Dépôt légal

Bibliothèque nationale du

Québec et du Canada

Indexée dans REPÈRE

Vœux de santé et de bonheur!

L’année 2002 tire sarévérence… Puisse l’an 2003être teinté de santé et demoments de bonheur pourchacun d’entre vous!

Puisse l’an 2003 permettrel’acquisition de nouvelles

connaissances, l’innovation dans nos pratiques etfaciliter les discussions, les réflexions et les actionsconcertées dans l’optique de continuer à répondre, et àmieux répondre, aux réalités nouvelles.

Pour plusieurs d’entre nous, ces souhaits sont des réa-lités, ou des réalités en devenir; mais pour plusieursd’entre nous aussi, la réalité du quotidien est bien dif-ficile : manque de financement, manque de ressourcesen santé mentale, pénurie de médecins spécialisés entoxicomanie… Puisse l’an 2003 (et nous tous!) apportercertaines solutions!

L’AITQ est aussi concernée par les dossiers de l’heure :la position de l’État sur l’usage du cannabis, les pro-blèmes reliés au jeu excessif… Au cœur de nos préoccu-pations demeure ce qui préoccupe nos membres.

La fin d’une année est aussi un bon moment pour fairele point, un bilan de nos actions passées. La perma-nence de l’AITQ a été particulièrement active dans desdossiers dont la mise à jour du Répertoire desressources en toxicomanie du Québec et celle des réper-toires des outils, d’activités et de programmes reliés à lasexualité et aux MTS-VIH/sida, la formation en parte-nariat avec l’Université de Sherbrooke, la réalisation

d’un outil de prévention en milieu carcéral, la coordi-nation d’une tournée provinciale de formation surl’hépatite C en milieu post-carcéral et finalement, laparticipation de la directrice générale au Comiténational de certification et à la tournée d’implantationd’un cours en toxicomanie destiné aux adultes en col-laboration avec le ministère de l’Éducation.

Et, plus récemment, le dernier colloque qui soulignaitle XXVe anniversaire de l’Association et qui a été unsuccès. Vos commentaires font l’éloge des confé-renciers et soulignent la qualité des ateliers. Je remerciesincèrement le Comité organisateur, nos nombreuxcommanditaires et le personnel de la permanence del’AITQ pour ce moment de ressourcement profession-nel et personnel.

Le prochain? Les 26, 27, 28 et 29 octobre 2003 sous lethème « Toxicomanie, jeu excessif et autres dépen-dances ». L’année 2003 promet déjà bien des projets;nous vous tiendrons, bien sûr, informés.

En terminant, je remercie chaleureusement madameCarmen Trottier et son équipe pour la qualité, ladisponibilité et l’engagement dont ils font preuve. Aunom du conseil d’administration composé de madameLynda Villeneuve, messieurs Mario Boulais, MaryoLarouche, Daniel Desrosiers, Claude Gagné, AlainVigneault et Pierre Wilson, meilleurs vœux à tous !

Lynda PoirierPrésidente 2002-2003

M O T D E L A P R É S I D E N T E

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L’efficacité des programmesL’efficacité des activités de prévention ne peut être impro-visée et celles-ci doivent contenir des caractéristiques précises.La complexité d’élaborer adéquatement et efficacement desprogrammes de prévention repose sur des principesdirecteurs importants28 29. Les plus importants font référenceà la compétence des intervenants et au lien de confianceréciproque entre les intervenants et la population ciblée30 31.Et, parlant de ce lien de confiance, il est carrément absent ence moment car les intervenants ont une approche morali-sante à l’égard des drogues illicites et des jeunes qui essaientces mêmes drogues. La plus fondamentale des caractéris-tiques est sans doute la participation de la population viséeaux différentes étapes de la mise en œuvre du programme deprévention. Ce pouvoir d’action reconnu aux individus et aux com-munautés, cette reconnaissance de leurs habiletés et compétences,correspond à un mouvement contemporain connu sous le nom d’em-powerment. Il y a aussi le partenariat et la concertation desressources formelles et informelles qui est importante dansl’efficacité des programmes de prévention32. Ce partenariatest actuellement absent pour les ressources et les inter-venants n’adhérant pas à la philosophie de contrôle social.Quand le partenariat est imposé ou obligé par les gouverne-ments ou les autres instances, il se transforme en « pater-nariat » ou les institutions tentent de dominer en imposantà sens unique leur philosophie de contrôle social. Les dis-cours répressifs doivent aussi faire place à 1) une attitude despontanéité, de flexibilité et d’empathie des intervenantsenvers les usagers de drogues, 2) un discours ouvert etrespectueux et 3) surtout éducatif, c’est à dire non impro-visé. On ne peut pas s’improviser infirmière, professeur defrançais ou encore technicien en éducation spécialisée. Cesgens ont reçu une formation pertinente qui fait d’eux desspécialistes dans leur domaine et ils ont généralement uncode d’éthique à respecter. Il est impératif que les gens quitravaillent en prévention des toxicomanies aient égalementune formation pertinente accompagnée d’un code d’éthique!

Les programmes que nous offrons à S.O.S. Contact Al-To àBuckingham dans l’Outaouais, au Québec, sont dans cettelignée. Nos programmes sont énoncés à partir de la prémisseque les jeunes et leur famille sont des personnes intelligenteset qu’elles décideront elles-mêmes des choix à faire. Nosintervenants formés se doivent d’adhérer aux attitudes ci-haut mentionnées et nos programmes de prévention sontconçus en collaboration avec les jeunes et leur famillefréquentant notre ressource. Notre mandat parascolaire nousamène à intervenir, entre autres, dans les maisons de jeunes(aménagement de milieu) du territoire de la Vallée de laLièvre, à éduquer, à accroître les connaissances et à dévelop-per les habiletés des jeunes. Par exemple, notre interventionéducative en collaboration avec la maison des jeunes M-Adojeunes de Buckingham dans les milieux fréquentés par les

jeunes (rues, parcs…) nous permet de jaser, d’éduquer, d’ac-compagner et surtout d’offrir aux jeunes une alternative touten respectant les choix qu’ils font. Nos interventions con-jointes ont permis une amélioration marquée de la qualité devie des jeunes du district Beauchampville à Buckingham. Eneffet, lors de l’arrivée de nos ressources dans ce district il y asix ans, celui-ci se démarquait avec une délinquance juvénilela plus élevée à Buckingham. Nos rencontres intersectoriellesavec la Sûreté du Québec depuis quelques années nousdémontrent que depuis deux ans, le district Beauchampvilleest maintenant le district où la criminalité juvénile est la plusbasse de la ville de Buckingham. Un exemple intéressant estle programme de prévention du tabagisme de la Direction dela santé publique de l’Outaouais avec le programme « Le 1er

mars j’arrête ». Ce programme mise sur le respect desfumeurs et offre de l’information précise (médecins, infir-mières et autres intervenants compétents) et est, en mêmetemps, respectueux à l’égard des fumeurs. Au lieu de frappersur la tête des fumeurs en les traitant de criminels, l’approcheprivilégiée remet entre les mains des fumeurs la décision decesser ou non leurs habitudes du tabagisme. Les gens ne sesentent pas bousculés par une telle approche. Depuis desannées ce programme connaît un franc succès.

Pour que la véritable prévention des toxicomanies et de pro-motion de la santé soit efficace, il sera important que desbudgets soient enfin disponibles pour les ressources s’occu-pant de la prévention mais aussi à une stratégie globalevisant à améliorer la qualité de vie de ceux qui sont les plusà risque. À cet égard, dans les nouvelles orientations du ministère, il est clairement indiqué les facteurs à risque quifavorisent la consommation de substances tant licites qu’il-licites. Sur le plan individuel, les facteurs de risques sont lescomportements antisociaux ou agressifs, le fait d’avoir unparent alcoolique ou toxicomane, l’initiation précoce auxdrogues illicites, etc.; sur le plan de l’environnement immé-diat, la présence de conflits familiaux, les conduitesparentales inadéquates, les conditions de travail difficiles,etc.33; sur le plan scolaire, l’inadaptation, le faible rendementscolaire ou encore le faible investissement des éducateurs enmilieu scolaire; et sur le plan de l’ordre social, la pauvreté, lapublicité ou les normes culturelles favorables : les facteurs derisques favorisant la consommation sont nombreux34.

M A U R I C E H O T T E

Travailleur social, spécialisé en prévention des toxicomaniesMembre de l’Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec

la décriminalisation...et la prévention (2e partie)

La célébrité du cannabis,

____________________28. Pransky, J. Prevention, The critical Need, Springfield, Miss. : Burrel Foundation et

Paradigm Press, 1991.29. Bouchard, C. Lutter contre la pauvreté ou ses effets ? Les programmes d’intervention

précoces, Santé mentale au Québec, XIV (2) 1989, p. 138-149.30. Ministère de la Santé et des Services sociaux. Un Québec fou de ses enfants, Rapport

du Groupe de travail pour les jeunes, Québec, Gouvernement du Québec, 1991.31. Heinicke, C. M., et al. « Early intervention in the family system », Infant Mental

Health Journal, 9 (2) 1988, p. 11-141.32. Blanchet, L. La prévention et la promotion en santé mentale, Préparer l’avenir. Le Comité

de la Santé mentale du Québec, 1993.33. Ministère de la Santé et des Services sociaux. Pour une approche pragmatique de

prévention en toxicomanie, Orientations, Axes d’interventions, Actions. Bibliothèque nationale du Québec, 2001, p. 17.

34. Vitaro, F., et coll. « L’approche développementale et les problèmes de consomma-tion chez les jeunes : prévalence, facteurs de prédiction, prévention et dépistage », in P. Brisson, L’usage des drogues et de la toxicomanie, 2000, vol. III, p. 279-312.

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Pour souhaiter diminuer le taux de consommation il faudrafavoriser le développement de facteurs de protection et laseule façon d’y parvenir est le développement d’unestratégie globale de prévention et de promotion de lasanté. D’abord une prévention adéquate et efficace, c’est-à-dire non improvisée, et des mesures socioéconomiques quipermettront une amélioration des conditions de vie desgroupes à risque. Ainsi, au lieu de dépenser des millions dedollars en répression, certains montants d’argent pourraientêtre redirigés dans 1) des mesures visant à aider concrètementceux qui sont dans le besoin et ainsi diminuer la souffrancequi rend ces gens à risque et 2) le financement de véritablesprogrammes de prévention et de promotion de la santé.Ainsi, ces budgets permettraient de former des spécialistesqui élaboreraient enfin des programmes de prévention et depromotion de la santé en tenant compte de toutes lesfacettes reliées à l’efficacité de ceux-ci.

Pour un changementAu cours des prochaines années les parents, les adultes signifi-catifs et les intervenants en toxicomanie des écoles aurontencore à éduquer les préadolescents et les adolescents en cesens. Que le cannabis soit décriminalisé ou non, il sera plus dif-ficile dans les années à venir de faire la « morale » aux jeunesconcernant la consommation de la marijuana. Les jeunes sontbien informés et savent que de plus en plus de personnes et deparents sont ouverts à la décriminalisation/légalisation ducannabis. Qu’il est moins immoral socialement de fumer unjoint de cannabis que d’avoir des aventures extraconjugales!De nombreux jeunes discutent maintenant entre eux des pré-supposés effets bénéfiques et inoffensifs du cannabis. Ilssavent également que les médecins peuvent maintenant pres-crire du cannabis à certains de leurs patients. Les techniques deculture du cannabis sont des plus accessibles sur Internet! Lescachettes face au cannabis se font et se feront de plus en plusrares pour les jeunes! La drogue ne fait plus peur ou elle faitpas mal moins peur qu’il y a 20 ans!

Comme le souligne très bien Bill Master, shérif du comté deSan Miguel au Colorado, dans son comté, les policiers arrê-tent encore des gens en possession de drogues, maispréfèrent concentrer leurs efforts sur des crimes comme laconduite en état d’ébriété. Ce même Master avait reçuquelques années auparavant de la Drug EnforcementAdministration un certificat d’appréciation pour son impli-cation dans l’arrestation d’un chef de police soupçonné detremper dans une affaire de drogue. Celui-ci croit main-tenant que les policiers sont davantage formés pour arrêterles trafiquants de drogues que les meurtriers d’enfants. Iltrouve désolant que 750 000 personnes aient été arrêtées pourpossession de drogues aux États-Unis avant le 11 septembre2001 et seulement 2 terroristes; que plus de 50 milliardssoient dépensés annuellement pour la répression et que celane donne pas de résultats! Il considère que si les gens veulentprendre des drogues, ils en prendront indépendamment dela répression! Que si les drogues étaient légales les prisonsne seraient pas surpeuplées! Que la très grande majorité desgens qui boivent de l’alcool ne se promènent pas dans lesrues avec une bouteille à la main et que la même chose seproduirait si le cannabis était légalisé35.

Le contrôle social ne fonctionnera jamais et il est tempscomme société de comprendre que le phénomène de la con-sommation des drogues est quelque chose à prendre ausérieux… Surtout quand de plus en plus de jeunes de 11-12ans expérimentent les drogues! Maintenant plus quejamais, il faudra tenir compte de la tolérance sociale à l’égarddes drogues illicites dans l’élaboration des programmes deprévention et de promotion de la santé. Et que, pour finale-ment tenter d’inverser à la baisse le nombre de consomma-teurs actuels des drogues illicites, il est temps de changernotre façon de faire concernant la prévention des toxicoma-____________________35. Laucius, J. « War on drugs can’t be won », says U.S. Lawman, in Ottawa Citizen,

(traduction libre), 12 février 2002, p. a1-a2.

Faculté de l’éducation permanenteLa faculté d’évoluer

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nies! La pratique nous a démontré que la tolérance, lerespect et surtout une vraie information objective sont beau-coup plus éducatifs, sont bien meilleurs conseillers auprèsdes jeunes et des adultes également. Une fois que ces infor-mations éducatives sont transmises, les humains font deschoix… et comme Suissa mentionnait ne devient pas abuseur quiveut, il faut des conditions psychosociales particulières pour dévelop-per un abus et entrer dans le cycle de la dépendance (voir 1re partie).

Le danger qui nous guette, par contre, est que l’initiation àla consommation des drogues illicites commence de plus enplus tôt et que cela est un facteur de risque énorme quipeut favoriser des problèmes psychosociaux importantspour les jeunes. De consommer des drogues illicites à 15-16ans est une chose alors que de consommer des droguesillicites à 11-12 ans est autre chose. Pour souhaiter mini-miser les dangers d’intoxication sévère qui sont beaucoupplus à risque de causer de la dépendance et de causer desméfaits sévères, le temps est venu comme société de regarderhonnêtement la possibilité de non pas décriminaliser, maisbien de légaliser le cannabis.

Plusieurs sursauteront devant la suggestion mentionnée ci-dessus. Vous comprendrez que c’est par mesure de promotionde la santé et du bien-être des consommateurs, et plus parti-culièrement des jeunes, qu’une telle mesure devient impéra-tive. Le cannabis est une drogue qui peut causer la dépen-dance (tout comme l’alcool) et, à ce titre, il est préférable dene pas en consommer. Par contre, devant cette réalité ouencore cette triste réalité pour certains, il faut comprendreque c’est plus de 50 % des adultes canadiens et québécois quisont en faveur de la légalisation; que 3 jeunes sur 4 en con-sommeront un jour; que près de 30 % des jeunes en consom-ment régulièrement à toutes les semaines; que ces chiffresrisquent d’augmenter au cours des prochaines années comptetenu de la tolérance sociale de plus en plus présente! C’estdans cette réalité que sont plongés le Québec et le reste del’Amérique. La légalisation signifiera peut-être pour certains :Faisons la fête et gelons-nous la face. Pour ceux qui ont à cœur lasanté et le bien-être des consommateurs de cannabis, cela signifiera enfin un contrôle de la qualité et de la distribution,et enfin beaucoup moins d’intoxication! Cette réalité des in-toxications étant très présente, il faut s’assurer comme sociétédu bien-être de nos jeunes. Ainsi, la réalité en ce moment estque de nombreux jeunes consomment du cannabis dont lateneur en THC est souvent très élevée ou encore qui estadultéré au PCP ou autres hallucinogènes puissants. Et c’estlà le danger. De faire une intoxication à l’alcool est une chosequi est traitable pour un médecin mais de faire une intoxica-tion à des substances inconnues et illicites est autre chose quipeut s’avérer très dangereux, voire mortel. En 1988, près desdeux tiers de tous les échantillons de drogues saisies sur lemarché noir qui ont été examinés par la Fondation de larecherche sur la toxicomanie de l’Ontario étaient différentsde ce que le vendeur avait prétendu : cela signifie que, près dedeux fois sur trois, la drogue achetée sur le marché noir n’é-tait pas ce que la personne croyait avoir acheté36.

Actuellement, des lois de plus en plus sévères tentent de con-trôler la distribution du tabac chez les jeunes, à tout le moinsdans les endroits où la vente du tabac est permise. Par contre,personne ne contrôle la qualité et la distribution du cannabis

(et des autres drogues illicites) dans les écoles ou autresauprès des jeunes. Il s’ensuit que la qualité des produits laissesouvent à désirer, que personne ne prend la responsabilitéd’informer objectivement les usagers du contenu et del’ensemble des effets de ces substances, que la production etla distribution de ces drogues sont laissées au crime organiséqui en tire des profits immenses, tant financièrement qu’entermes de leur pouvoir d'attrait, voire de corruption.

Comment contrôler dans une école secondaire de 2000élèves où 25 % des jeunes (donc 500 jeunes) consommentoccasionnellement et/ou régulièrement du cannabis noncontrôlé et autres substances illicites qui sont très dan-gereux? Comment faire pour tenter de dissuader des jeunesde fumer du pot quand ceux-ci, et 50 % des parents, croientque l’usage du cannabis n’est pas plus dangereux que la con-sommation d’alcool? Une personne qui fait le choix de pren-dre des drogues en trouvera, peu importe si la police effectuedes descentes. La répression a très peu d’impact sur la déci-sion de fumer du pot ou non. En effet, plus de 90 % des per-sonnes arrêtées pour possession de cannabis continuentmalgré la répression engendrée à leur égard de consommerdu cannabis l’année qui suit37. Comment s’assurer que nosjeunes ne sont pas en danger dans un tel contexte scolaire(ou encore dans la rue) alors que des revendeurs distribuentpour quelques dollars des produits nullement contrôlés etsouvent dangereux? Avec un scénario de légalisation parexemple, dans un dépanneur ou encore mieux dans unesociété comme celle de la Société des alcools, avec une loiinterdisant la revente aux jeunes de moins de 18 ans commepour le tabac, le cannabis serait un produit contrôlé et lesdangers d’intoxication seraient à tout le moins minimes. Ehoui! Les jeunes trouveront le moyen de s’en procurer commeils le font actuellement. Au moins, ils consommeront desproduits contrôlés et d’une qualité supervisée, comme ils lefont très bien avec l’alcool. Tel que mentionné plus haut, lecannabis en ce moment sur le marché peut être très dan-gereux à cause de sa teneur en THC et des produits que cer-tains revendeurs intègrent pour qu’il soit plus puissant.C’est à cette réalité que nos jeunes sont confrontés à tous lesjours dans les écoles et dans la rue!

Le cannabis non adultéré a un indice de sécurité aux environsde 40 000; en d’autres termes, il est presque impossible de faireune surdose de cannabis38. En 1972, la US National Commissionon Marihuana and Drug Abuse a conclu que même si la marijua-na n’était pas absolument sûre, ses dangers avaient étécopieusement exagérés. Depuis, des experts ont fait des mil-liers d’études sur les humains, les animaux et les cultures cel-lulaires. Aucune de ces recherches n’a produit de résultats trèsdifférents de ceux obtenus par la Commission américaine en1972. En 1995, les rédacteurs du journal médical britanniqueLancet, s’appuyant sur plus de 30 ans de recherches scien-tifiques, ont conclu que « la consommation de cannabis,même à long terme, n’est pas néfaste pour la santé ». En

S U I T E

____________________36. Beauchesne, L. La légalisation des drogues…Pour mieux en prévenir les abus, Éditions du

Méridien, 1999, p. 37.37. CCLAT. Cannabis Control in Canada, Option Regarding Possession, mai 1998.38. National Institute of Medecine. « The science of cannabis », in Comité spécial du

Sénat sur les drogues illicites, Document de discussion, Le cannabis, Washington, DC, mai 2002.

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novembre 1998, ce même journal médical a déclaré dans unéditorial que l’usage modéré de cannabis avait peu d’effet surla santé et que la décision d’interdire ou de légaliser lecannabis devrait se fonder sur d’autres considérations39.

Dans un document de discussion du Comité spécial duSénat sur les drogues illicites, il est clairement établi par cecomité que la consommation de cannabis n’est pas unedrogue d’escalade ou encore une drogue qui mène directe-ment à l’enfer comme le soutiennent les tenants du contrôlesocial40. Évidemment des recherches financées par des corpspoliciers d’envergure ne font que souligner les effets négatifsdu cannabis et des autres drogues illicites. Comme le souli-gnent Mc Bride et Schuler, respectivement policier et avocatde New York, les dirigeants de la police doivent justifier leursbudgets et leurs postes. Le public ainsi que plusieursdirigeants politiques attendent d’eux qu’ils produisent desrésultats, et la question qu’on leur pose est : combien de per-sonnes avez-vous arrêtées? Les patrons de la police peuventne pas être intéressés à savoir si les arrestations mèneront ounon à des condamnations; ils sont uniquement intéressés àaugmenter le nombre de personnes arrêtées de manière àmontrer au public qu’ils font leur travail41.

Dans ce document du Comité spécial du Sénat, il est indiquéqu’il n’existe aucune preuve convaincante de l’hypothèse del’escalade que peut causer le cannabis. Le National Instituteof Medecine, le National Drug Research et d’autresrecherches scientifiques soulignent que les données d’en-quête de population montrent qu’habituellement, sur 100usagers de cannabis à l’adolescence, environ 10 de ceux-cideviendront des consommateurs réguliers et 5 passeront àd’autres drogues; que les recherches et études pharma-cologiques sur les éléments actifs du cannabis n’ont pas per-mis à ce jour d’identifier des propriétés qui conduiraient àl’usage d’autres drogues et que le cannabis pourrait être unsubstitut efficace à la dépendance à d’autres drogues42.

En ce qui a trait à la dépendance au cannabis, différentesétudes pharmacologiques, épidémiologiques et de trajec-toire des consommateurs de drogues menées dans diverspays ont démontré que les substances psychoactives sontclassifiées selon leur capacité à créer une dépendance. Ainsi,le tabac et l’héroïne causent la dépendance chez 35 à 50 %des consommateurs; l’alcool et la cocaïne chez 15 à 20 % desconsommateurs, les médicaments psychoactifs chez 5 à 10 %des consommateurs et le cannabis chez 8 % à 10 % des con-sommateurs43.

Le Comité spécial du Sénat a le mérite, dans son document,de souligner les effets positifs (très rare pour un comiténommé par l’État) du cannabis qui sont de l’ordre de larelaxation, de la sociabilité, de l’euphorie et des effets d’or-dres thérapeutiques. De plus, le Comité spécial du Sénat estclair en ce qui concerne la criminalité reliée au cannabis. Denombreuses personnes pensent qu’une part significative dela criminalité serait due à l’abus de drogues. De fait, l’abusd’alcool est relié significativement aux agressions et celanotamment dans un contexte familial. L’abus des droguesdures (cocaïne, héroïne, etc.) serait aussi relié à des délitscomme les vols résidentiels, les vols d’autos et la prostitu-tion, en partie pour payer les doses quotidiennes; cependant,les experts soulignent que la corrélation drogues-crimes estplus complexe qu’on ne le soutient généralement. Et, desouligner le Comité spécial du Sénat, la recherche montreclairement que cette relation ne s’applique pas en matière de

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____________________39. Riley, Diane. La politique canadienne de contrôle des stupéfiants. Aperçu et commentaire,

novembre 1998, http://www.parl.gc.ca/37/1/parlbus/commbus/senate/com-f/ille-f/library-f.

40. Comité spécial du Sénat sur les drogues illicites. Document de discussion, Le cannabis, mai 2002.

41. Beauchesne, L. La légalisation des drogues…Pour mieux en prévenir les abus, Éditions du Méridien, 1999, p. 43.

42. Comité spécial du Sénat sur les drogues illicites. Document de discussion, Le cannabis, mai 2002, p. 3.

43. Comité spécial du Sénat sur les drogues illicites. Document de discussion, Le cannabis, mai 2002, p. 3.

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cannabis. Le cannabis n’est pas associé à des délits sauf dans deux casprécis : le fait que le cannabis soit illégal signifie que sa production etsa distribution sont au moins en partie contrôlée par le crime orga-nisé, et la conduite avec les facultés affaiblies44.

Nouvelles avenuesÉvidemment, à cause de traités internationaux, le Canada,comme n’importe quel pays, ne pourrait pas légaliser lecannabis mais pourrait par exemple le décriminaliser, ques-tion d’être une première étape à la légalisation qui pourraits’ensuivre dans 15 ou 20 ans!

Les lois actuelles ont très peu d’effet sur les tendances d’utili-sation du cannabis. Comme mentionné précédemment, c’estplus de 30 % des jeunes de 15-24 ans qui font usage ducannabis et plus de 50 % des Canadiens sont d’accord avec uneloi légalisant le cannabis. Cette situation entraîne un mépriset une indifférence sévère pour la règle de droit, du moinspour plus de la moitié des Canadiens. Les politiques actuellesempêchent une véritable approche de santé publique, d’infor-mation équilibrée et de contrôle de la qualité des substances.Ces traités internationaux datent de 1912, avant même qu’unprésupposé problème de drogue ne voit le jour.

Certains pays, dont le plus étudié sur cette question est laHollande, ont adopté des politiques plus tolérantes au sujetde la marijuana et les recherches sur le taux de consomma-tion dans ces pays indiquent qu’ils sont généralement plusbas que dans les pays où la marijuana est prohibée45.L’exemple néerlandais en est un autre intéressant. En effet,depuis 1995, les différentes commissions internationalesd’enquête visant à décriminaliser la consommation person-nelle de cannabis par les principales instances de ce pays(justice, police, ministère de la Santé et municipalités) s’ac-cordent pour affirmer que l’usage du cannabis n’induit pasde risque important pour la santé des consommateurs. Onretrouvait en 1995 aux Pays-Bas 712 coffee shops, dans 116municipalités qui sont des débits de boissons dans lesquels

le cannabis est vendu sous certaines conditions, dont cellede ne pas le vendre aux moins de 18 ans46. Un sondagerécemment effectué par le Centre de recherche sur lesdrogues de l’Université d’Amsterdam a révélé que seulement2 à 3 % des Néerlandais de plus de 12 ans avaient pris de lamarijuana au cours d’une période d’un mois. Aux États-Unis, où il est illégal de cultiver, d’acheter ou de consommerde la marijuana, une étude effectuée par le gouvernement en1996 a révélé qu’environ 5 % de la population prenait de lamarijuana au moins une fois par mois (les taux de consom-mation au cours de la dernière année sont de 34 % aux États-Unis comparativement à 29 % aux Pays-Bas). Le nombre deconsommateurs d’héroïne, le taux de meurtres, le nombre dedécès liés à des crimes et le taux d’incarcération sont tousbeaucoup plus élevés aux États-Unis qu’aux Pays-Bas47.

L’autorisation de ces points de vente contrôlés que sont lescoffee shops vise plusieurs objectifs : 1) établir une séparationentre le marché des drogues dures et celui des droguesdouces; 2) éviter que les consommateurs de drogues n’en-trent en contact avec les drogues dures; 3) protéger ces con-sommateurs contre le milieu criminel des trafiquants; 4)faciliter l’arrestation des narco-touristes étrangers qui voientles coffee shops comme des centres d’approvisionnement, etc.48.En 1989, le ministre de la Justice néerlandais, secondé parson ministre de la Santé, à la Conférence des Nations Uniessur les toxicomanies et le trafic de drogues illicites, expli-quait les objectifs de la politique néerlandaise en ces termes :La protection de la santé et du bien-être général de même que

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Association des intervenants entoxicomanie du Québec inc.

____________________44. Comité spécial du Sénat sur les drogues illicites. Document de discussion, Le cannabis,

mai 2002, p. 4-5.45. Cohen, P.D.A. « La place de la politique hollandaise de la drogue dans le contexte

de l’administration sociale », Psychotropes, 1989, vol. V (1-2), p. 125-129.46. Suissa A. « Cannabis, contrôle social et exclusion : L’importance des liens sociaux »,

in Intervention, 2000, no 111, p. 72-80.47. Riley, Diane. La politique canadienne de contrôle des stupéfiants. Aperçu et commentaire,

novembre 1988, http://www.parl.gc.ca/-37/1/parlbus/commbus/senate/com-f/illef/librairy-f

48. Suissa A. « Cannabis, contrôle social et exclusion : L’importance des liens sociaux », in Intervention, 2000, no 111, p. 72-80.

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l’amélioration de la santé de ceux qui sont devenus toxicomanesdoivent être notre objectif premier. Nous avons toujours gardé à l’esprit que le problème de l’abus des drogues est fondamental et prin-cipalement une question de santé et de bien-être social. De notrepoint de vue, ce n’est pas un problème qui relève en premier lieu dela police et du droit pénal… Nous voyons la nécessité de prévenirautant que possible une situation dans laquelle plus de dommagessont causés par les procédures judiciaires que par l’usage de drogueslui-même. Nous donnons la priorité aux services dont la fonction pre-mière est l’amélioration de la santé et de l’intégration sociale des toxi-comanes, sans nécessairement mettre fin à la toxicomanie, parce queplusieurs toxicomanes ne sont pas prêts ou pas encore capables demettre fin à leurs habitudes49.

C’est avec des certitudes de la sorte que les Néerlandais ontété les premiers à offrir un programme d’échanges deseringues pour contrer le sida : grâce à ces politiques préven-tives, leur taux de personnes atteintes du sida est un des plusbas des pays industrialisés. Le choix d’avoir des politiquesdifférentes en matière de drogue pour les Pays-Bas est queceux-ci ont des politiques de promotion de la santé plusavancées et des politiques sociales qui favorisent l’épa-nouissement des gens et non pas le contrôle social; con-trairement à une politique de laisser-aller, la politique néer-landaise sur les drogues s’appuie sur du pragmatisme plutôtque sur un idéalisme utopique; au lieu de viser une sociétéutopique sans drogue (prohibitionnisme), les Pays-Bas privi-légient l’approche de réduction de méfaits, en se basant surl’importance des liens sociaux dans la création de solutionsde rechange à l’incarcération50.

L’expérience de Brixton à Londres en est une autre intéres-sante. Depuis un an, les policiers se contentent de donner desimples avertissements aux consommateurs de cannabis duquartier. Plus question de les arrêter, de leur coller uneamende ou de les traîner en justice. Dans les faits, les con-sommateurs de marijuana de Brixton ne sont plus considé-rés comme des criminels. De plus, la criminalité a diminuéde 50 % depuis l’instauration de cette nouvelle politique. Leministre des Affaires intérieures, David Blunkett, a annoncéau début juillet 2002 que l'expérience de Brixton sera éten-due à l'ensemble de Londres. Dans tout le pays, le cannabissera considéré comme une drogue moins dangereuse, del'ordre des antidépresseurs et des stéroïdes anabolisants.L'initiative a choqué la presse conservatrice, mais séduit legouvernement travailliste : en pratique, cela veut dire qued’avoir de petites quantités de marijuana ne sera plus undélit passible d'arrestation51.

Au moment d’écrire cet article, le rapport du Comité spécialdu Sénat sur les drogues sera rendu public (le 4 septembre2002) et risque selon Pierre-Claude Nolin, président ducomité, de faire du bruit52. En souhaitant que ce soit le cas etque par la suite, les politiciens canadiens se tiennent deboutdevant cette nouvelle réalité!

Et, en l'absence de décision courageuse et d'une révision dela législation, les intoxications, les expulsions des écoles, lesdossiers criminels, la police et les pseudo spécialistes conti-nueront leur propagande à l’égard de ceux qui décident deconsommer du cannabis. Comme l’articule bien Nadelmann,

les drogues sont plus dangereuses parce qu’elles sont illégales. De lamême façon que des milliers de gens sont morts, devinrent aveugles oufurent emprisonnés à cause de leur consommation d’alcool frelaté il ya 60 ans, probablement que la majorité des morts par overdoseaujourd’hui sont le résultat de la Prohibition. (…) Essayez d’imagi-ner qu’à chaque fois que vous buvez une bouteille de vin, vous nesavez pas si le pourcentage d’alcool est à 8 ou à 80 %, ou encore si c’estde l’alcool éthylique ou de l’alcool méthylique. Imaginez qu’à chaquefois que vous prenez une aspirine, vous ne savez pas si c’est 5 mil-ligrammes ou 500 milligrammes que vous absorbez53.

C’est exactement ce qui se produit en ce moment pour lesdrogues illicites. Ceux qui en consomment ne savent jamaissi la dose consommée sera mortelle! Comment commepoliticien, comme parent, comme travailleur social, commeenseignant, et comme policier aussi, etc., être insensibledevant le bien-être de notre collectivité? Comment s’assurercomme parents que nos enfants ne consommeront pas dedrogues qui leur seront fatales? Pourquoi adhérer à unevieillerie de politique qui date de 1916 qui est dangereuse,malsaine et qui est loin de favoriser la promotion de la santé?Plus de 600 000 Canadiens (et 30 000 par année) ont un casier judiciaire. Ils ont été arrêtés en possession - simple - demarijuana. Les statistiques indiquent pourtant que moinsde 1 % des consommateurs sont interceptés!!54 La prohibi-tion des drogues coûte plus de 500 millions de dollars, prin-cipalement pour le cannabis. Les recherches révèlent que lavaste majorité des consommateurs en font un usage récréatiftemporaire et irrégulier!!!

On pourra toujours, comme société, continuer d’appuyer laprohibition… Ça sera un choix tout à fait légitimé. Des per-sonnes (peut-être vos enfants) continueront de se fairearrêter et condamner pour un simple joint et ainsi êtretraitées comme de vrais criminels! D’autres en mourront,certains iront en prisons! Et même les plus respectables! Est-ce un choix légitimé?

Il ne s’agit pas de faire la promotion du cannabis, loin de là,mais plutôt d’offrir aux gens de vraies informations, unevraie éducation et des outils nécessaires pour les aider à faireleur choix dans le domaine aussi controversé et dangereuxque les drogues illicites, mais dans une optique de promo-tion de la santé… De leur santé!

La décriminalisation ne signifiera pas le libre accès au pro-duit du cannabis, et c’est là le risque. Cela voudra encore direque c’est le crime organisé qui en contrôlera la distributionet la qualité. Le seul aspect positif de la décriminalisation, si

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____________________49. Beauchesne, L. La légalisation des drogues…Pour mieux en prévenir les abus, Éditions du

Méridien, 1999, p. 248.50. Suissa A. « Cannabis, contrôle social et exclusion : L’importance des liens sociaux »,

in Intervention, 2000, no 111, p. 72-80.51. Hachey, Isabelle. « Cannabis : Londres prend le virage de la décriminalisation », La

Presse, 11 juillet 2002, http://www.cyberpresse.ca/reseau/monde/0207/mon_102070117202.html

52. Sirois, Alexandre. « Cannabis : le Canada suivra de près l'expérience britannique »,La Presse, 11 juillet 2002, http://www.cyberpresse.ca/reseau/actualites/0207/act_102070117150. html

53. Beauchesne, L. La légalisation des drogues…Pour mieux en prévenir les abus, Éditions du Méridien, 1999, p. 41.

54. Rivest, Dominique. Décriminalisation de la marijuana; la route est longue, http://www.er.uqam.ca/nobel/sshalc/unite/99_11_18/marijuana.html

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elle est dans la même lignée que celle des Britanniques, serale désengorgement des palais de justice.

En attendant la légalisation, la décriminalisation permettraau moins à environ 30 000 Canadiens de moins chaqueannée d’hériter d’un dossier judiciaire pour un geste banal.Évidemment, ceux qui se feront prendre hériteront d’uneamende de quelques centaines de dollars et les plus pauvresse retrouveront en prison car ils seront incapables de payerces amendes!

De maintenir un aspect criminel au cannabis favoriseraencore des abus de pouvoir des corps policiers, des écoles etdes milieux de travail à l’égard de certains qui ne posentqu’un geste banal. Au-delà de tous ces abus de pouvoir, il nefaut pas oublier que la demande du cannabis est à la hausseet qu’il est de plus en plus puissant en teneur de THC; quede plus en plus de jeunes de 11-12 ans consommeront de cepot superpuissant et que cela favorisera chez ces jeunes desméfaits importants!

Parce qu’inévitablement la décriminalisation aura pour effetde banaliser davantage la consommation de cannabis, ce quifavorisera assurément les jeunes à essayer de ces produits quisont de plus en plus puissants.

Nous savons tous que l'usage de cannabis est répandu, qu'ilfait maintenant partie des mœurs, et qu'il ne fait pas plus deravages que d'autres drogues légalement reconnues commel'alcool et le tabac. Rien ne sert de faire le jeu de l'autruche.La tolérance sociale accordée au cannabis et la décriminalisa-tion seront la meilleure promotion que le crime organisé, quicontrôle le trafic de drogue, n’ait eu depuis des décennies.

Le temps est venu de remâcher la question. Il y a eu pendantdes années des querelles insignifiantes sur la question desavoir si la consommation de drogues illicites était un pro-blème criminel ou médical. Je crois qu’il est dorénavant clairqu’il s’agit en fait d’un problème politique.

À quand la véritable promotion de la santé?

L’Association des parents d’ados de Jonquière et le Dr PierreLauzon honorésL’Association des intervenants en toxicomanie du Québec (AITQ)a décerné deux prix d’excellence, l’un à l’Association des parentsd’ados de Jonquière et l’autre au Dr Pierre Lauzon pour leur con-tribution exceptionnelle à la cause de la toxicomanie.

Le prix Ubald-Villeneuve décerné à l’Association des parentsd’ados de JonquièreLe prix Ubald-Villeneuve est remis à un organisme ou à unregroupement dont la participation active dans la prévention et letraitement des toxicomanies contribue à la qualité des servicesofferts aux personnes toxicomanes. Ce prix porte le nom d’un desfondateurs des cliniques Domrémy qui viennent en aide aux per-sonnes toxicomanes.

Fondée en 1992, l’Associa-tion des parents d’ados deJonquière a été mise sur piedpar un groupe de parents afinde répondre à leurs besoinsface aux problèmes de com-portement et de toxicomaniequ’avaient leurs adolescents.Préconisant plusieurs appro-ches et méthodes d’interven-tion, cet organisme offreactuellement différents pro-grammes destinés aux parentsmais aussi aux jeunes.

Les groupes de soutien pour les parents proposent aux adultes lapossibilité de s’informer et d’échanger entre eux sur les difficultésqu’ils vivent à l’intérieur de leur famille. Le Centre de jour LeTransit permet aux jeunes de 9 à 18 ans de participer à plusieurs

ateliers axés sur l’estime de soi, le développement des habiletéssociales, la violence, etc. Ces ateliers ont pour but de prévenir oude diminuer les problèmes de toxicomanie. Encadré par des inter-venants qualifiés, l’Association des parents d’ados de Jonquièrepermet aux familles de la région d’avoir accès à des ressources etdes services conçus sur mesure pour leur venir en aide et les guiderà travers la problématique de la toxicomanie.

Le prix Jeanne-d’Arc Bouchard décerné au Dr Pierre LauzonLe prix Jeanne-d’Arc Bouchard est décerné à un individu poursouligner sa contribution exceptionnelle auprès des personnesalcooliques ou toxicomanes que ce soit en prévention, en inter-vention, en réadaptation ou en recherche. Ce prix porte le nomd’une personne déterminée qui œuvre depuis plusieurs annéesauprès de la clientèle alcoolique et toxicomane.

Le récipiendaire, Dr Pierre Lauzon, travaille actuellement auprès depatients toxicomanes à l’Hôpital Saint-Luc, au CRAN (Centre de

recherche et d’aide pour narcomanes) et à Relaisméthadone. Fondateur du CRAN et de Relaisméthadone, le Dr Pierre Lauzon est égalementimpliqué dans plusieurs projets de recherche et dedéveloppement en toxicomanie. Il est aussi formateurauprès de médecins et d’étudiants en médecine et fait

partie de plusieurs comités de recherche reliés à la toxicomanie.

Pionnier dans son domaine, le Dr Lauzon a été honoré pour lesservices qu’il a mis en place pour les clientèles peu rejointes par lesystème de santé, la conception de projets innovateurs, son impli-cation dans divers conseils d’administration et comités scientifi-ques, ses nombreuses publications, sa participation à de multiplescolloques internationaux, mais aussi pour la constance de sonengagement, son humanisme, son ouverture face à la marginalitéet aux nouvelles approches, sa rigueur et sa façon d’être avec sescollègues et ses clients.

REMISE DE PRIX D’EXCELLENCE EN TOXICOMANIE

Dr Pierre Lauzon

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6. Essayer ou expérimenterUn des motifs les plus simples et probablement assez répandupour commencer à jouer (en soi ou à un jeu en particulier)est celui de la curiosité (aucune donnée n’existe à cet effetpour la population adulte). Chez les adolescents, il s’agitd’un motif maintes fois évoqué et mesuré (Gupta etDerevensky, 1997). Il est clair qu’un produit bien connu, misen marché agressivement à prix accessible pourrait tentercertains consommateurs qui n’en ont pas encore fait l’essai(Herpin, 2001; Ritzer, 2001). La commercialisation des jeuxpossède de telles caractéristiques. On peut citer une visite aucasino comme exemple d’expérimentation (autant pourceux qui ne jouent pas du tout que pour ceux qui participentà d’autres jeux ailleurs qu’au casino). Il suffit aussi de men-tionner les loteries instantanées. Au Québec, comme dans laplupart des juridictions, plusieurs loteries instantanées sontdisponibles simultanément sur le marché et de nouvellesloteries sont mises en marché presque hebdomadairement.On peut penser qu’une telle stratégie de la part des gestion-naires du jeu soit, au moins partiellement, basée sur l’ex-ploitation de ce désir d’exploration ou d’essai perpétuel denouveautés. Tous les jeux d’ailleurs offrent à intervalles plusou moins réguliers des innovations ou des promotions sus-ceptibles de titiller la curiosité et conséquemment d’en justi-fier l’essai ou l’expérimentation par la clientèle potentielle(les tournois de blackjack des casinos, les nouveauxappareils [ou jeux] de loterie vidéo, les immenses lots desloteries sur terminaux, etc.).

7. Divertissement, occupation, passe-tempsLa raison principale, voire primordiale, de jouer est sansdoute que les jeux de hasard et d’argent sont tout simple-ment des jeux et, qu’à ce titre, ils promettent ou permettentle délassement, la détente, la récréation, l’amusement, la dis-traction, le divertissement. Il s’agit d’une façon d’utiliser uneportion de son temps de loisir. Une personne peut jouer

pour s’occuper, pour passer, meubler ou tuer le temps, pourcombattre ou prévenir l’ennui. Les jeux de hasard et d’ar-gent, comme les autres formes de loisir et de divertissement,servent à délaisser ou fuir momentanément soucis et tracasliés à d’autres portions de sa vie (le travail professionnel oudomestique, les études, la vie conjugale, la vie familiale, lasanté, la vie communautaire, etc.) (Pronovost, 1998).

8. Développer ou utiliser des habiletésLes jeux de hasard et d’argent requièrent tous, à des degrésdivers, des habiletés physiques ou mentales. Un large éven-tail de connaissances est aussi associé à la pratique de chacunde ces jeux. Les règles du jeu peuvent s’avérer plus ou moinscompliquées; le niveau de mémorisation peut être substan-tiel (pour le comptage des cartes par exemple); les façons defaire et les manières d’agir peuvent être intégrées dans uncode d’une grande complexité (course de chevaux) ou d’unegrande rigueur (baccara); le vocabulaire associé peut s’avérerparticulièrement développé (bingo, courses de chevaux,combats de chien); le niveau de motricité spécifique ou demotricité fine peut exiger une pratique considérable (golf,billard ou dards); les stratégies de jeu peuvent être fortdéveloppées (blackjack et poker); le niveau de contrôle de soirequis peut être phénoménal (poker); le niveau de concen-tration élevé (aussi pour le comptage des cartes); la coordi-nation motrice ou visuelle-motrice peuvent être détermi-nantes (encore à propos de paris sur les jeux d’adresse aux-quels le joueur participe lui-même); des calculs complexespeuvent être nécessaires (paris sportifs, courses de chevaux,roulette, loterie); on peut aussi parler de résistance physique,de force physique, de capacité d’analyse, de rapidité de déci-sion, etc. Les efforts déployés s’appuieront tantôt sur desstratégies dites rationnelles tantôt sur des considérationsfumeuses, superstitieuses ou franchement spécieuses. Lescaractéristiques susnommées s’appliquent autant au joueurqui veut devenir un expert qu’à des débutants ou des dilet-tantes. Le développement d’habiletés est aussi fonction duniveau d’habileté actuel du joueur. Ainsi, pour certains, leshabiletés physiques requises pour jouer au bingo sont prisespour acquis. Pour d’autres personnes, l’effort à déployerpour se rendre, participer à un événement de trois heures(inconfortablement assis sur des chaises de métal) et revenirà la maison sera substantiel voire même impossible. Il en vaexactement de même pour les habiletés mentales. Une per-sonne peut considérer dérisoire l’effort mental requis pourjouer au craps, d’autres seront absolument incapables oudifficilement aptes à suivre le rythme rapide des décisions àprendre dans ce jeu. Il faut aussi noter que les efforts pourjouer, tant physiques que mentaux, peuvent rendre le joueurmeilleur ou non à ce jeu et améliorer les chances de gagnerou non.

Une modalité particulière d’utilisation des habiletés au jeuest la compétition. Certaines personnes vont jouer dans unbut d’affrontement contre un adversaire ou contre eux-

Implication pour le traitementdu jeu pathologique (2e partie)

Les jeux de hasard et d’argent revisités –

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Institut national de santé publique du Québec et Direction de la santé publique de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre

C A T H E R I N E G E O F F R I O N

Institut national de santé publique du Québec

É L I S A B E T H P A P I N E A U

Institut national de la recherche scientifique

D E N I S A L L A R D

Institut national de santé publique du Québec et Direction de la santé publique de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre

A M N O N J . S U I S S A

Université du Québec en Outaouais

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mêmes. Curry et Jiobu (1995) ont montré que les étudiants-athlètes dans les universités des États-Unis gagent sur unesérie d’événements, sportifs ou autres, et qu’il ne s’agit là qued’une forme supplémentaire de compétition – la forme prin-cipale est évidemment celle du sport qu’ils pratiquent. Lacompétition peut prendre différentes formes : les jeux àadversaire direct unique (le croupier au black jack), à adver-saires directs multiples (les autres joueurs au poker), à adver-saires indirects (au bingo, on peut considérer les autresjoueurs comme des adversaires). La compétition peut êtreréelle, comme au poker ou dans les jeux d’adresse, où leshabiletés entrent effectivement en ligne de compte. Elle peutaussi n’être que perçue, dans le cas du joueur d’appareil deloterie vidéo ou de machine à sous qui se perçoit opposé à lamachine ou à lui-même.

Quand les habiletés sont intégrées au jeu, on mise, le plussouvent, plus que de l’argent. Les paris incluent la comparai-son des habiletés, l’honneur, le prestige, etc. – voir les parissportifs, les combats de coq (Worden et Darden, 1992) ou dechiens (Evans et al., 1998). Le joueur s’investit alors lui-même dans le pari.

La compétition nous ramène à la notion de gain. Il ne s’agitplus ici de gain monétaire, il s’agit de gagner une partie, unejoute, un match, un tirage. Ce faisant une personne peutgagner en estime de soi, gagner l’estime des autres, réaf-firmer son image personnelle, gagner en statut social.Généralement, le seul fait de gagner est ou apparaît commeun accomplissement. Le gain du pari est d’une importancecomparable ou supérieure au gain de la mise.

Le gain en soi est aussi un événement d’importance pour lesjoueurs dans le cadre de jeux où la compétition est pourainsi dire inexistante. Un gagnant de loterie instantanée (unjeu où l’intervention, les connaissances et les habiletés dujoueur sont insignifiantes) sera satisfait de lui-même; sesproches, ses amis, ses collègues le féliciteront, proportion-nellement à l’importance du gain, d’ailleurs. Le gain

s’accompagne de recon-naissance.

9. ConsommerLes jeux de hasard et d’ar-gent sont aussi des objetsde consommation ou desservices qui s’offrent ets’achètent sur le marché.Une personne peut se pro-curer un billet de loteriedans le seul but d’alignerson comportement de con-sommation sur celui d’unemajorité, réelle ou perçue,de ses pairs ou d’une popu-lation dont il fait partie(Ritzer, 2001; Rochefort,2001). À titre d’objet deconsommation, on peutaussi imaginer que desloteries instantanées, par

exemple, puissent être achetées par simple impulsivité. Unconsommateur en voit au magasin, ou s’en fait offrir par unecaissière, et s’en procure d’office, en simple réaction à l’op-portunité d’acheter. Sur le moment, la personne ne pense pasau gain, ni au jeu, ni à passer le temps, l’emphase repose alorssur l’émotion, la sensation, le plaisir de l’achat en soi (dontl’objet, accessoirement, relève des jeux de hasard et d’argent).

10. EsthétismePour certains, les jeux de hasard et d’argent (ou des portionsde ces jeux) mènent à la vision ou à l’atteinte du sublime, dela pureté ou à de quelconques quintessences. Clairement, larelation entre esthétique et jeux de hasard et d’argentprovient surtout d’œuvres littéraires (et secondairementd’œuvres cinématographiques) : on pense immédiatement àDostoïevsky 1997), mais on ne doit pas oublier Balzac(1974), Zweig (1981), Goldoni (1992) et jusqu’à tout récem-ment Boudard (1999). Il est relativement facile de concevoirl’esthétisme de la boule d’ivoire (maintenant en compositede plastique ou de porcelaine) qui tourne à l’intérieur ducylindre d’une roulette (souvent lui-même une œuvre esthé-tique), l’intensité de ces quelques instants, le sublime de cemoment furtif qui s’étire et perdure en éternité où toutdemeure possible, où le bien côtoie le mal, où la jubilation sefrotte au désespoir.

Certaines sources nous fournissent aussi des renseigne-ments sur ce motif spécifique de participation au jeu.Hayano (1978) traite du poker comme d’un esthétisme :comment reconnaît-on les vrais joueurs des aspirants, lesméthodes de jeu, la patience, les façons de perdre sontautant de facettes de l’esthétisme « pokerien ». D’ailleurs,une série mondiale du poker est organisée annuellement,dans laquelle les joueurs paient des droits de participation,reçoivent tous une somme équivalente en jetons, et dont legagnant remporte le grand prix d’un million de dollars US.Cet événement attire quantité de spectateurs et la finale,regroupant de 6 à 8 joueurs, est retransmise à la télévision(chaîne ESPN). Le jeu devient spectacle, que les amateurs,avertis ou non, peuvent apprécier, commenter et coter tantpour ses aspects techniques qu’esthétiques.

On peut aussi penser aux salons de hautes mises dans les casi-nos. Ces endroits protégés offrent (ou prétendent offrir) unesophistication du décor et du décorum largement supérieureà celle des autres aires de jeu. D’ailleurs, les casinos eux-mêmesfont souvent l’objet de recherche esthétique tant sur le planarchitectural extérieur que sur celui de l’utilisation de l’espaceintérieur. L’esthétisme de Las Vegas fait à lui seul l’objet devolumes entiers (Bégout, 2002; Hannigan, 1998).

Plus modestement, un peu, on peut encore souligner les bil-lets de loteries instantanées qui font l’objet d’un travailesthétique considérable pour attirer et plaire aux clientèlesvisées. Les courses de chevaux attirent parmi les parieurs cer-taines personnes pour qui le cheval est esthétique en soi. Onparle aussi d’une belle course; celle qui sera chaudement dis-putée, dans laquelle un cheval fera une remontée vers la pre-mière place, un classique dans lequel un cheval qui « partvite » en affronte un autre qui « finit fort », l’épique hip-pique qui se dénoue seulement au fil d’arrivée.

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En fait, chaque jeu possède ses aficionados qui définissentl’esthétisme propre et mouvant à l’activité qu’ils pratiquent.Ce pourra être l’esthétisme de la concentration et de larapidité d’exécution d’une personne qui parvient à joueravec 30 cartes de bingo simultanément, la manière impecca-ble de déterminer sur quelle équipe miser dans un parisportif, la façon désinvolte de miser des jetons au baccara ouà la roulette (comme le James Bond de Ian Fleming), le codevestimentaire de certains casinos, surtout européens, lafaçon de se débarrasser des débris de latex grattés des billetsdes loteries instantanées! Toute activité de jeu, finalement,est susceptible d’appréciation et génère des normes esthé-tiques que l’on admire ou auxquelles on adhère.

11. Expérience religieuse ou spirituelleUne des questions fondamentales à laquelle l’humain ait àfaire face demeure le sens à donner à la vie. Traditionnelle-ment, c’est à la société et à ses institutions qu’il incombait defournir un tel sens. Nos sociétés postmodernes jouent demoins en moins cette fonction de guide, tout en exigeantque l’individu trouve de lui-même une signification à sa vie.En conséquence, la vie sociale et la quête de sens reposentaujourd’hui sur beaucoup d’incertitudes.

L’individu doit donc trouver un sens à sa vie pour s’accomplirpleinement et la valider, pour réduire ses incertitudes existen-tielles. Dans un tel contexte, le jeu représente une façon d’in-terroger le destin; il apparaît comme un oracle permettant dedéterminer et valider le sens que nous donnons à chacune denos vies (France, 1902; Papineau, 2000; Chevalier et al., 2001).

Le jeu permet de remplir ce vaste programme par le méca-nisme suivant : règles, répétitions et résultats. Les règles desjeux sont claires et simples – contrairement aux règles de lavie. Les répétitions sont rassurantes par leur régularité – con-trairement aux aléas et imprévus du quotidien. Face à l’in-certitude au sujet du futur, les résultats sont essentielspuisqu’ils fournissent une réponse claire aux questions fon-damentales telles que « qu’est-ce qui m’attend? que meréserve le futur? » (Chevalier et al., 2001).

Le jeu peut être d’utilité dans la confirmation de l’adéquationde son « alignement astrologique », la vérification de son « équilibre cosmogonique » ou tout simplement pour validerla consécration de son statut d’élu divin. Le fait de gagner aujeu établit alors l’un ou l’autre de ces faits : le fait de passerproche de gagner (« near miss ») prouve que le joueur est surla bonne voie mais que quelque chose cloche encore; le fait deperdre indique soit le chemin spirituel qu’il reste à parcourir,soit une mécompréhension des signes par le joueur, ouencore un changement in extremis du monde astral, cos-mique ou divin (ce qui peut toujours arriver) (Gabriel, 2000).

Le jeu peut aussi apparaître comme une action posée en vuede plaire à une déité ou répondant à la volonté spirite de cettemême entité. Le cas patent est celui des rêves. Selon plusieursdoctrines (Vyse, 1997) le rêve représente une communicationdivine; communication codée par laquelle une divinité ouune déité transmet ses intentions, ses volontés, ses désirs, sesréponses ou tout autre message d’intérêt au récipiendaire. Ils’agira alors pour le rêveur de bien décoder le message et d’a-

gir en conséquence. Une des conséquences est de participerau jeu ou, la plus connue, de miser sur certains numéros pré-cis (au « numbers » ou à des loteries à trois chiffres). Deslivres entiers sont dédiés à la traduction de rêve en chiffres etcertains ministres de culte s’en font aussi une spécialité(Drake et Clayton, 1993; Wolcott, 1997). Pour mémoire, onpeut rappeler que rêver d’un concierge signifie qu’il faillerésolument miser le 2, 14, 63 et 70 (de Barsy, 1990, p. 203).

D’autres utilités pourraient encore être définies. Celles présen-tées plus haut ne sont pas mutuellement exclusives : une per-sonne peut jouer pour plusieurs motifs simultanés ou consé-cutifs, consciemment ou non. Plus encore, l’utilité peut êtrespécifique à chacun des jeux et un même joueur participera àla loterie pour certaines raisons et au bingo pour d’autres.

Les motifs évoqués pour jouer représentent aussi les effetsbénéfiques pressentis ou ressentis par les joueurs. Nos con-naissances sur ces effets pourraient être mises à contributiondans les domaines de la prévention et du traitement du jeupathologique (Griffiths, 2002). En effet, il est permis depenser que tous les motifs de participation au jeu ne présen-tent pas le même potentiel d’induction à un problème de jeu :les personnes qui jouent pour des motifs caritatifs sont-ellesplus à risque de développer un problème de jeu que celles quijouent pour se divertir?

La dépendance est d'abord un phénomène multifactoriel; ledéclenchement du cycle de la dépendance est principale-ment inscrit dans le motif sous-jacent à l'activité. Si le motifpremier est le plaisir, les prédispositions à développer ladépendance sont probablement faibles comparativement àun jeu motivé par la fuite systématique d’un problème oud’une émotion difficile. En fait, c'est dans la relation indi-vidu-activité-contexte que se développe la dépendance etnon dans l'activité en soi (Suissa, 2001); même les passion-nés du jeu peuvent ne présenter qu’un faible risque dedévelopper une dépendance (Rousseau et al., 2001).

Sur le plan de la prévention, sachant les motifs qui contri-buent à favoriser le jeu chez une personne ou une popula-tion, on pourrait concevoir des solutions alternatives quirempliraient les mêmes fonctions ou auraient les mêmes significations ou stimuleraient les mêmes intérêts sanstoutefois présenter les mêmes risques pour la santé. Si uneportion substantielle de personnes développe un problèmede jeu à partir d’une motivation exclusivement pécuniaire, ily aurait dès lors lieu de se questionner sur les opportunitésde promotion sociale dans nos sociétés actuelles; si le jeureprésente un mécanisme financier pour suffisamment depersonnes, il serait sans doute rentable pour une institutionbancaire de développer et de proposer des services mieuxadaptés à la thésaurisation de petites sommes; peut-être y a-t-il lieu de se questionner sur la taille des lots, sur les tauxde retour aux joueurs, il faudrait peut-être envisager desmodifications aux lois en vigueur.

Plusieurs approches de traitement des joueurs pathologiquespréconisent des modifications comportementales, des trans-ferts d’activité pour aider le joueur à s’en sortir ou encore, pourprévenir la rechute. Le plus souvent on recommande des acti-

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vités telles qu’aller voir un film ou aller prendre un café avec saconjointe. Dans ce contexte, il nous apparaît plus intéressantencore de tirer profit des motifs qui avaient présidé au plaisirdu jeu (avant que celui-ci ne devienne un problème).

Certains traitements favorisent déjà cette idée d’activitésalternatives, le plus souvent sur la base de ce qui est immédia-tement accessible au joueur ou à l’organisation qui le traite,mais plus rarement sur la base d’une exploration systéma-tique des utilités et des plaisirs ressentis dans le jeu. Un desobjectifs doit plutôt être de créer des lieux d’investissementqui offrent des défis suffisants et des plaisirs comparables,individuels ou de groupe, dans le respect de l’individu et desa sécurité et à l’intérieur des limites pécuniaires, physiqueset psychologiques de la personne. Pour un joueur qui aimaitla convivialité du poker et les risques qu’il prenait en jouant,la proposition d’un club de cueillette de champignons pour-rait tomber à plat. Plutôt, on pourra envisager proposer àquelqu’un qui appréciait jouer pour le défi intellectuel desactivités nécessitant un investissement intellectuel; de même,la personne qui recherchait des sensations fortes pourra êtreorientée vers le visionnement de films à sensation, à sus-pense; la personne qui cherchait à socialiser vers la participa-tion à une activité de groupe; celle qui voulait s’isoler possi-blement vers l’observation d’oiseaux. Certaines personnespourraient être tentées, par exemple, de contribuer àdévelopper et gérer un atelier d’art-thérapie. Plusieurs per-sonnes ont déjà réussi à contrôler leur dépendance en créantleur propre alternative dans l’aide offerte à leurs semblables(du simple bénévolat occasionnel à la création de lieux desoutien et de traitement). Mieux connaître leur histoire etleur cheminement semble un bon moyen pour identifier cequ’ils y ont trouvé de plaisirs et de défi.

À ce chapitre, tout reste à faire et nous ne sommes limitésque par nous-mêmes.

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Les addictionsMarc Valleur et Jean-Claude MatysiakLe concept d’addiction commence à changer de registre : utilisé, ily a encore peu, par les spécialistes des toxicomanies, de l’al-coolisme, du jeu pathologique, il devient un objet de discours àl’intention d’un vaste public. L’ouvrage démontre la pertinence decette notion, mais aussi ses dangers et ses limites. Destiné à faireréférence, il utilise les éléments saillants des formes les moins dis-cutées de « pathologies », pour dégager une vision globale des pro-blématiques liées à la notion d’addiction.Disponible à l’AITQ au coût de 36,95 $ (34,95 $ pour les membres).

L’alcool, les drogues, le jeu : les jeunessont-ils preneurs?Ce rapport est tiré de l’Enquête québécoise sur le tabagisme chez les élèvesdu secondaire 2000, financée par le ministère de la Santé et desServices sociaux. Il s’agit de la deuxième d’une série d’enquêtesbiennales ayant pour objectif premier le suivi des habitudes tabagi-ques des adolescentes et adolescents québécois. Dans la mesure oùl’étude a été conçue pour documenter une problématique de com-portements à risque chez les jeunes, elle se prête particulièrementbien à l’insertion d’un volet sur l’alcool, les drogues et les jeux dehasard et d’argent. Le présent rapport, auquel ont activement par-ticipé des chercheurs en toxicomanie et dépendance, contient desdonnées précises sur la prévalence de ces comportements ainsi quesur la fréquence à laquelle les élèves québécois de niveau secondaires’y adonnent. Les instruments de mesure utilisés pour documenterl’ampleur de ces phénomènes permettent en outre de se prononcersur la présence de problèmes associés à l’usage de l’alcool et desdrogues et à la participation aux jeux de hasard et d’argent.Pour recevoir un exemplaire, téléphonez au : (514) 873-4749 ou (418) 691-2401.

Drogues et adolescence –Réponses aux questionsdes parentsÉtienne GaudetLes parents voient généralement arriverl’adolescence avec inquiétude. Ils éprou-vent le besoin de se situer par rapport auxchangements qu’ils observent chez leurenfant dans tous les domaines. À cela s’a-joute un phénomène qui prend de plus enplus d’ampleur : les drogues, leurs effets etleur présence accrue dans la vie des ado-lescents, ainsi que nous le rappellent les

statistiques récentes. Les parents veulent comprendre, ils surveil-lent les comportements de leur jeune pour découvrir des indices deconsommation, ils cherchent des pistes pour intervenir et rétablirl’équilibre dans la vie familiale lorsqu’il y a lieu. « Drogues et ado-lescence » consiste en une suite de réponses aux questions que lesparents posent depuis quelques années à ceux qui interviennent entoxicomanie auprès des jeunes. Ces questions portent sur l’adoles-cence, sur les substances, sur le dépistage de la consommation etsur les interventions qu’ils peuvent faire. L’auteur veut partageravec le lecteur l’expérience acquise au cours d’une vingtaine d’an-nées de pratique professionnelle. Il n’offre pas de solutions magi-ques, mais il propose aux parents un cadre pour entreprendre unedémarche de communication avec leur adolescent. Ceux-ci, armésde nouvelles connaissances, pourront avancer plus aisément,estime-t-il, sur les chemins parfois ardus des relations familiales.Disponible aux Éditions de l’Hôpital Sainte-Justine au coût de 13,95 $(www.hsj.qc.ca/editions).

Savoir lâcher prise 2 – 366 nouvelles méditationsquotidiennesMelody BeattieLes relations, surtout les relationsamoureuses, nécessitent notre attention.Qui peut nous guider mieux que MelodyBeattie dans ces moments de question-nement? Amalgamant récits et médita-tions, ce livre offre les réflexions de cetteauteure à succès sur les joies et les défis queprésentent chaque jour les relations.

Divulguant ses pensées empreintes de compassion sur la meilleurefaçon de soigner sa santé spirituelle et émotionnelle, Melody Beattieaborde les questions de l’honnêteté et de la capitulation, du com-portement défensif et de la dépendance au drame, de la communi-cation saine et des tendances malsaines. Son style, direct commetoujours et dénué de sentimentalité, évoque les pensées et les senti-ments répandus chez les femmes et les hommes en recouvrance, etindique la voie de la guérison et de l’espoir en créant avec son cœur.Disponible à l’AITQ au coût de 24,95 $ ( 22,95 $ pour les membres).

Les psychotropes – Pharmacologie ettoxicomanieSous la direction de Louis Léonard et Mohamed Ben AmarCe traité constitue une somme de données scientifiques sur la phar-macologie et la toxicomanie des psychotropes présentés selon laclassification suivante : les dépresseurs du système nerveux central(SNC), les stimulants du SNC, les perturbateurs du SNC, lesmédicaments psychothérapeutiques, les androgènes et les stéroïdesanabolisants. Cette étude des drogues qui agissent sur le psychismedes individus présente les notions de base d’anatomie, de physiolo-gie, de pharmacologie et de toxicomanie; elle analyse les conceptsd’échec, de tolérance, de pharmacodépendance et de sevrage.Disponible à l’AITQ au coût de 125 $ (112 $ pour les membres).

La guérison par le plaisirYvon St-ArnaudCe livre, fruit de plusieurs années de recherche scientifique, fait ladémonstration que le plaisir est un élément à prendre en comptedans le traitement de certaines maladies. Le côté scientifique de cetouvrage intéressera les spécialistes de santé mentale et physiqueainsi que les personnes soucieuses de leur qualité de vie.Disponible à l’AITQ au coût de 39,95 $ ( 36,95 $ pour les membres).

Tout savoir sur les plantes qui devien-nent des droguesKurt HostettmanL’histoire des drogues est présentée dans ce livre d’une manière scien-tifique, mais accessible à tous avec de nombreuses anecdotes,comme celle des plantes qui permettaient aux sorcières du Moyen-Âge de voler sur un manche de balai ou celle des personnes qui sedroguent en buvant l’urine de consommateurs d’amanites tue-mouches. Cette mise au point recense les principales drogues d’o-rigine naturelle, leur histoire, le hasard de leur découverte et lesdangers que peut représenter leur utilisation. Ce livre est un aver-tissement destiné aux jeunes tentés d’expérimenter des nouvellessensations, à ceux qui ont goûté aux drogues, aux parents, auxenseignants et éducateurs car il contient de nombreuses informa-tions très utiles. Il s’adresse aussi aux médecins, biologistes, phar-maciens et à toute personne désireuse de s’informer sur un sujetqui concerne chacun. Le livre est illustré par de nombreuses pho-tographies en couleur des plantes traitées.Disponible à l’AITQ au coût de 32,95 $ (30,95 $ pour les membres).

Bon de commande, voir page 19Info Livres

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La dépendance aux drogues, à l’alcool et au jeu n’est plus leproblème de quelques « anonymes »! À preuve, en septembrede cette année, Montréal a été la scène du Forum mondialDrogues et dépendances où l’on a réuni plus de 3 000délégués de 50 pays et une trentaine des organismes inter-nationaux de grande envergure. Pour souligner l’occasion etavoir un regard actuel sur cette problématique enMontérégie, j’ai rencontré François Pierre Ménard, directeurgénéral de Virage, le centre de réadaptation régional mon-térégien en toxicomanie, alcoolisme et jeu excessif.

À l’aube d’un réseau intégré de servicesen toxicomanie Il n’est pas surprenant que la prévention de la toxicomanieet de l’alcoolisme se retrouve parmi les priorités de santépublique. Elle devrait même faire partie du prochainProgramme national de santé publique. Ces deux problèmes,en plus d’être assez répandus, font partie de la toile de fond deplusieurs autres comme l’absentéisme, les accidents de la route et dutravail, le suicide et la détresse psychologique, la transmission de MTSet du sida, des problèmes de santé physique et mentale. Sans oublierla lourdeur des dépenses qu’ils occasionnent au sein du système desanté lorsque la personne dépendante est rendue à un état critique,rappelle, d’entrée de jeu, monsieur Ménard.

Il souligne que l’écart entre lesbesoins et l’offre de services estmajeur dans ce dossier, car onestime qu’il y a plus de 13 000Montérégiens qui ont besoin detraitement ou d’une aide quel-conque en réadaptation. Or, seule-ment 3 000 d’entre eux en bénéfi-cient, soit à peine le quart de lacible. Le Virage et les CLSC sesont vu octroyer une premièreallocation récurrente de 616 000 $ qui servira à amorcer

l’implantation du réseau intégré en toxicomanie et à aug-menter l’accès au programme de désintoxication offert parle centre de réadaptation francophone.

En attendant que les budgets atteignent le niveau d’équitéespéré, monsieur Ménard fait observer que le contexte actuelforce Le Virage, comme beaucoup de partenaires, à desservirla clientèle avec des critères serrés de priorisation, les servicesétant offerts partiellement. De plus, notre mode de financementactuel tend à faire obstacle au développement du partenariatpuisqu'on se trouve parfois en concurrence avec ceux qu'on appelleles « partenaires ». On risque alors des dédoublements de services encertains domaines alors qu’il y aura des vides ailleurs, faute de visionglobale au plan régional. C’est justement l’un des buts poursuivis parle réseau intégré qui précisera les modalités d’accès aux services, laplace qu’occupera chaque partenaire, les modes de coordination etd’allocation de financement. Ce qui est poursuivi, situation uniqueau Québec, c’est l’arrimage de la prévention et de la promotion ainsique de la première et de la deuxième lignes en toxicomanie. Onprévoit que, pour obtenir des services, le client s’adressera d’abord auCLSC à qui reviendra la tâche de la première évaluation afin de leréférer ensuite, selon les besoins, à Virage ou à tout autre organismecompétent du réseau.

Même si les modalités de cet arrimage ne sont pas encorearrêtées, François Pierre Ménard croit fermement auprincipe prôné par les promoteurs du réseau intégré : stan-dardiser les critères d’accueil, d’évaluation et de référencetout en accompagnant la clientèle aux prises avec des pro-blèmes d’alcoolisme et toxicomanie… C’est un pari gagné d’a-vance. Il n’y aura pas de menace de perte de clientèle pour aucunpartenaire puisque, selon lui, le réseau intégré met l’accent sur unemeilleure accessibilité aux services. De plus, on mise sur unemeilleure coordination et on compte sur des mécanismes d’alloca-tion prévisibles et adaptés à cette fin. C’est ça, la beauté de la chose etça force chacun d’entre nous à sortir de sa bulle.

Le Virage au ForumLe Virage a accompagné la Fédération québécoise des centresde réadaptation au Forum mondial. Les centres de réadapta-tion se sont fait connaître de même que le réseau auquel ilsappartiennent. Souvent perçus de l'extérieur comme une fuite dela réalité, la toxicomanie, la consommation problématique ou le jeusont intimement liés à une recherche de plaisir. Leur présence est indi-catrice, au fond, d’un manque d’amour de soi qui a un grand impactsur la façon d'aborder la réalité quotidienne, affirme monsieurMénard.

Au-delà de grandes solutions aux problèmes croissantsdécoulant de la consommation de drogues, d’alcool et dujeu, le Forum a contribué surtout à démontrer l’ampleur duproblème et à le faire sortir finalement de la garde-robe.Mais surtout, on sera davantage sensibilisé au fait qu’ilcoûte cher de ne pas s’en occuper, conclut-il.

L O U I S E N A D E A U , P H D

La toxicomaniesort du placard!N A T H A L I E H U D O N

Entretien avec François Pierre Ménard de Virage en Montérégie

La toxicomanie en région

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La toxicomanie et autres dépendances en chiffresOn estime que près d’un tiers des personnes conduisent sous l’effet del’alcool ou de la drogue.

En Amérique et en Montérégie, environ une personne sur dix a un pro-blème de consommation et une sur 100 a besoin de services maintenant.

L’alcool au féminin • 3,5 % des buveuses prennent plus de 14 consommations d’alcool au

cours d’une période de sept jours.• 15 % des femmes de 15 ans et plus ont eu au moins cinq épisodes de

consommation élevée d’alcool au cours des derniers 12 mois.• 5 % des femmes de 15 ans et plus se sont saoulées au cours d’une

période d’un an.• Le plus gros problème associé à la surconsommation d’alcool et de

drogues est l’impact sur les femmes enceintes, car cela peut occasion-ner des naissances prématurées, des bébés de poids insuffisant et, ultérieurement, des problèmes de développement général de l’enfant.

S U I T E

Si jeunesse savait…La proportion des jeunes admettant avoir déjà consommé de la droguedans leur vie s’élève avec l’âge et le niveau scolaire :• 9 ans . . . . . . . . . . . . . . . . .2 % • 12-13 ans . . . . . . . . . . .12-15 %• 14-15 ans . . . . . . . . .7-40 % • 16-18 ans . . . . . . . . . . .50-58 %• On estime que la consommation réelle s’élève à 20 % de plus, dû au carac-

tère d’illégalité de l’ensemble de substances, incluant l’alcool et le tabac.

Chaque dollar investi en traitement de la dépendance aux drogues et àl’alcool entraîne des économies de sept dollars sur l’ensemble des coûtssociaux générés par ce problème.

Le coût approximatif de nos facultés affaibliesUne année d’emprisonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .60 000 $Indemnisation de deux personnes gravement blessées dans un accident de la route . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .130 000 $Traitement d’une personne ayant contracté le sida . . . . . . . . . . .150 000 $Le traitement d’une personne dans un centre de réadaptation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 000 $

Au Québec, on accorde 6,50 $ en moyenne par habitant pour les services entoxicomanie. En Montérégie, l’investissement est près de 3,50 $.

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Qu’est-ce que la violence ? Aujourd’hui, c’est le thème phare(porteur et vendeur d’audience) qui alimente les différentsmédias et stigmatise jeunes et autres cibles privilégiées. Mieuxdéfinir ce terme aux significations si larges, c’est nous permet-tre de redéfinir nos priorités et notre éthique d’humain...

La violence est une forme de bêtise.1

Définir la violence ? D’abord, la réflexion consiste en une navi-gation difficile entre une série d’écueils opposant l’affectif et lecognitif, le mythique et le raisonné, le ressenti et l’affectif. On estconduit à se demander si la violence est véritablement définis-sable. Cette problématique repose sur l’acte même de définir, quiimpose de trouver les limites à un phénomène précisément caractérisé par son absence de limites, et qui renvoie ensuite àune intrication de facteurs à la fois internes et externes.2

Le terme violence, communément employé, recouvre en fait desréalités multiples, complexes, subtiles, souvent éloignées de latrop grande simplification induite par le recours à un terme tropgénéral pour qu'il puisse offrir du sens. Il est des formes de vio-lence plus évidentes, plus connues que d'autres : l'agressionphysique est certainement celle qui vient en premier à l'esprit. Ily a les violences liées au langage (d'ailleurs n'entend-on pas direque 20 % des Occidentaux ont la violence comme mode de com-munication) : agressions verbales sous forme d'insultes, de dis-qualifications, de rejets, de banalisation, de culpabilisations, dechantages; plus subtils : les messages contradictoires, les doublesmessages qui engendrent des situations paradoxales, le déni.

Il existe aussi les violences non verbales, principalementexprimées par le corps : ton de la voix (menaçant, agressif,moqueur), soupirs, regards, gestes, mimiques. Enfin, les formesplus insidieuses que peuvent être le silence, les confusions entreles générations (par exemple un climat incestueux), le chaos etla rigidité relationnels, la présence d'un secret non exprimé, lapseudo amabilité ou pseudo collaboration, l'absence imprévuede quelqu'un d'attendu, la victimisation, les croyances rigides,enfermantes, les certitudes absolues, définitives. On le voit laviolence n'est pas quelque chose de massif, qui fait peur et qu'ilfaut combattre; on peut désormais reconnaître sa complexité,ses spécificités variables selon ses nuances.3

Issue du latin « violentia », la violence signifie « abus de la force ».Un phénomène est violent s’il s’exerce avec impétuosité et sansretenue contre ce qui lui fait obstacle, s’il passe outre les résis-tances, endommage, blesse détruit, tue.4

La violence est une réaction désespérée d’un système qui subitune entrave persistante à la satisfaction de l’un ou l’autre de sesbesoins.5

On peut distinguer trois types de violence en fonction de leurorigine : la violence née de l’émotion, la violence légitimée par lepouvoir, la violence en réaction à la violence.6

La plupart des chercheurs sont sûrs d’une chose : il ne faut pasvoir la violence seulement par le biais des faits divers spectacu-laires ou des attaques physiques violentes mais par les toutes petites violences qui se répètent au quotidien. Des chercheursanglo-saxons ont ainsi montré qu’un jeune brimé par d’autres

connaît un risque quatre fois plus grand de faire une tentativede suicide, quel que soit son milieu social. Il faut comprendrel’importance de ces petits faits qui finissent par pourrir la vie deceux qui en souffrent.

Ça peut être des surnoms injurieux qui finissent par dévaloriser,des bousculades, du petit « racket », etc. Cela peut se produirepartout, mais l’intensité de ces actes est quand même plus impor-tante là où les jeunes sont les plus « sceptiques » sur leur avenir.7

La violence, c’est la désorganisation brutale ou continue d’unsystème personnel, collectif ou social se traduisant par uneperte d’intégrité qui peut être physique, psychique oumatérielle.8

La violence, c’est la force déréglée qui porte atteinte à l’intégritéphysique ou psychique pour mettre en cause, dans un but dedomination ou de destruction, l’humanité de l’individu.9

La violence, c’est l’usage immodéré de la force. Elle est parfoisnécessaire (la modération n’est pas toujours possible), jamaisbonne. Toujours regrettable, pas toujours condamnable. Soncontraire est la douceur (qu’on ne confondra pas avec la fai-blesse, contraire de la force). La douceur est une vertu; la fai-blesse, une faiblesse; la violence, une faute – sauf quand elle estindispensable et légitime. Contre les faibles ou les doux, la vio-lence est impardonnable : ce n’est que lâcheté, cruauté, bruta-lité, bestialité. Contre les violents, en revanche, on ne peut sel’interdire absolument : ce serait laisser libre cours aux barbaresou aux voyous. La non-violence ? Elle n’est bonne, souligneSimone Weil, que si elle est efficace. Cela indique assez le but etle chemin : « S’efforcer de substituer de plus en plus dans lemonde la non-violence efficace à la violence ». Cela supposebeaucoup de maîtrise, de courage, d’intelligence, mais « dépend

L O U I S E N A D E A U , P H D

La violence – Quelques définitionsM A R T I N E B O V A Y

Psychopédagogue

Illustration de Bénédicte Thiémard

____________________1. Valéry, Paul. (1974). Cahiers II, Gallimard, Paris, p. 1411.2. Floro, M. (1996). Questions de violence à l’école. Pratiques du Champ social, Érès,

Ramonville, p. 8.3. Genton, Nicole, et Philippe Beytrison (printemps 1999). « Violences et dépen-

dances » Nouvelles du Levant, no 14.4. Guérin V. (2001). A quoi sert l’autorité ? S’affirmer - respecter - coopérer. Chronique

sociale, Lyon, p. 37.5. La pyramide des besoins de Maslow est un outil (parmi d’autres) pour aborder les

phénomènes de « violence à l’école ». Voir La théorie des besoins, Bovay Martine, Lausanne, (1989/1993). Voir également les théories de Laborit : « Stratégies de gestion du stress ». Document interne SPES Lausanne, Ausloos/Bovay, (1994).

6. Guérin V. (2001). Voir note 4 et l’illustration de Bénédicte Thiémard.7. Debardieux, Éric. Interview (mai 2000). « La petite violence peut pourrir la vie »,

dans Phosphore Magazine, p. 62.8. Debardieux, Éric. (1996). La violence en milieu scolaire. 1. État des lieux. ESF, Paris, p. 180.9. Définition de la violence sur laquelle s’appuie la philosophe Blandine Kriegel qui

préside la Commission sur la violence à la télévision dans le cadre d’un rapport à rendre au ministre de la Culture et de la Communication (France, 15.11.2002).

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aussi de l’adversaire » ibid. Gandhi, contre les Anglais, estadmirable. Mais cela ne donne pas tort aux Résistants, contreles nazis, ni aux Alliés, contre la Wehrmacht. La violence n’estacceptable que lorsque son absence serait pire. Elle l’est doncparfois. Reste à la limiter, à la contrôler, à l’encadrer. C’estpourquoi on a besoin d’un État, pour exercer, comme disaitMax Weber, « le monopole de la violence légitime » : on a besoind’une armée (pour se défendre contre la violence extérieure), delois, de tribunaux, de prisons... Et besoin aussi, entre les indi-vidus, d’une paix au moins minimale. Le contraire de la vio-lence, c’est la douceur; mais son antidote, à l’échelle de la Cité,c’est l’art de gérer les conflits avec le moins de violence possible :police, politesse, politique.10 La violence est la force brutalequ’un être impose à d’autres, pouvant aller jusqu’à la contrainteexercée par l’intimidation ou la terreur. Elle est aussi représen-tée par toutes les conduites agressives qu’un sujet plus fortphysiquement ou moralement fait subir à un plus faible : mau-vais traitements, sévices sur le conjoint ou même actions crimi-nelles pouvant aller jusqu’au viol et au meurtre. Par extension,les comportements violents vont se retrouver aussi bien dans ledomaine de la délinquance que dans celui de la dangerosité [..].11

Le mot violence recouvre des paroles et des actes différents. Onpourrait distinguer la violence qui nous échappe de manièreimpulsive de la violence brutale, des mauvais traitements don-nés sans colère par des individus qui la pratiquent comme s’ilsn’avaient pas été humanisés, comme s’ils n’avaient pas renoncéau plaisir de faire souffrir. Et puis il y a la violence qu’on déploiepour se défendre, quand elle est la seule solution pour nousprotéger, quand notre vie est en danger.12

Violence : usage de la force pour obtenir, sans son accord, quelque chose de quelqu’un.13

Intimidation : menaces, pression.14 C’est une forme de vio-lence qui, en apparence, est moins domma-geable que la violence physique. Elle apparaît lorsque l’un des protagonistes est en position de faiblesse évidente et qu’il ne peut se défen-dre. L’intimidation se définit à la fois par un rapport de force inégal et par son aspect répétitif et chronique.15

Violence urbaine: expression communément employée par la

police et la presse pour qualifier des actes anti-institutionnels (insultes, gestes contre les représentants des autorités). Ce terme plutôt nouveau englobe ce qui est en dessous du code pénal mais qui peut être pris en compte dans les règlements de police communaux. Les dégradations de boîtes aux lettres, tags, graffitis, « gravages », bras d’honneur aux adultes, oppositions aux actes d’autorité sont des incivilités.

Incivilité : manque de courtoisie et de politesse. Acte, comportement qui manifeste l’ignorance ou le rejet des règles élémentaires de la vie sociale.16

Insécurité : situation où l’on est menacé, exposé aux dan-gers.17 Le sentiment d’insécurité est une ma-nière de se saisir de la question de l’augmen-tation de la délinquance sans avoir à se prononcer sur ses causes.18

Terrorisme : emploi systématique de la violence pour atteindre un but.

Terroriste : qui terrorise, qui cherche à rallier par la menace, le mépris.19

La tendresse est plus forte que la dureté, l’eau est plus forte quele rocher, l’amour est plus fort que la violence.20

S U I T E

____________________10. Comte-Sponville, A. (2001). Dictionnaire philosophique. PUF, Paris, p. 622 - 623.11. Postel, J. (1998). Dictionnaire de la Psychiatrie et de la Psychopathologie clinique,

Larousse, Paris, p. 505.12. Dolto, C., sous la direction de Dico Ado (2001). Les mots de la vie. Gallimard

Jeunesse, Paris, p. 348 - 349.13. Ausloos, G., Bovay, M. (1997-2002). Violences : Finalités, moyens, résultats. Document

interne, Lausanne.14. Le Petit Larousse illustré 2002.15. Gagné R. (2002) dans revue RND, « Haro sur l’intimidation », vol. 100, no 8, p. 16 - 28.16. Le Petit Larousse illustré 2002, p. 538.17. Selon le dictionnaire Robert.18. Dit Sebastian Rochè, (politologue et chargé de recherche au CNRS), dans 24 Heures,

10.10.01.19. « La violence vue par les enfants », Le Petit Robert et revue RND, vol. 100, no 8,

septembre 2002.20. Hermann Hesse

PrixTITRE Quantité membre /non-membre

Les addictions _______ 34,95 $ 36,95 $

Savoir lâcher prise 2 _______ 22,95 $ 24,95 $

Les psychotropes – Pharmacologie et toxicomanie _______ 112,00 $ 125,00 $

Tout savoir sur les plantes quideviennent des drogues _______ 30,95 $ 32,95 $

La guérison par le plaisir _______ 36,95 $ 39,95 $

Veuillez ajouter 5,00 $ pour les frais de manutention. Si plus de deuxlivres, veuillez calculer 2,50 $ par livre (maximum 12,50 $).

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Association des intervenants entoxicomanie du Québec inc.

Programmation de formation continue2002-2003

Programmation de formation continue2002-2003

Les toxicomanes judiciarisés : leur trajectoire et les interventions possibles

Serge Brochu, Ph.D et Roger Roy, criminologue___________________________________________________

Les substances psychoactives et l’humeur : de la molécule à la clinique

Jean-Yves Roy, MD, FRCP (C)___________________________________________________

Ados, jeunes et toxicomanie : relever les nouveaux défisPierre Paquin, agent de planification

et de programmation___________________________________________________

Les substances psychoactives et l’humeur : de la molécule à la clinique

Jean-Yves Roy, MD, FRCP (C)___________________________________________________

Toxicomanie et stress post-traumatique : théorie et pratique

Évelyne Donnini, psychologue et Catherine Séguin-Sairoz, psychothérapeute

Longueuil14 mars 2003

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Québec 28 mars 2003

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Longueuil4 avril 2003

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Longueuil9 mai 2003

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Longueuil6 juin 2003

SUJET LIEU et DATE