l'aventure humaine

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230 PRÉSENCE ET REPRÉSENTATION James Porter Boursier Leverhulme, Université de Londres (1950-1955); diplômé de sociologie de la London School ofEconomics(1953) ; licencié ès lettres et en sociologie de I’éducation (1955). Enseignement pri- maire et secondairepuis chargé de cours en sociolo- gic et Education jusqu’en 1962. Proviseur adjoint du Coventry College (1962-1967) ; proviseur du Bulmershe College of Higher Education (1967- 1968). Membre du Comité national d’enquête sur I’éducation,et la formation des maîtres (1971) ; de la branche Education du Comité des bourses univer- sitaires (1978) ; du Conseil consultatif pour l’ensei- gnement du service de radiodiffusion indépen- dant ; du Bureau exécutif de 1’ICOM-Royaume- Uni ; de la Société royale des arts (1978) ; membre honoraire du College of Perceptors (1978) ; prési- dent du World Education Fellowship (1979) ; con- sultant de l’Unesco pour l’enseignement supérieur depuis 1976 ; directeur du Commonwealth Insti- tute. Coauteur (avec N. Goble) de L’évofution du rôle du maître -perspectives intemationafes (Paris, Unesco, 1977). 1. Museum, vol. XXXIII, no. 4, 1981. En novembre 1985, le Commonwealth Institute de Londres a organisé une expo- sition, <( The Human Story )> (L’aventure humaine), qui a duré trois mois. Cette manifestation tout à fait originale a rem- porté un tel succès que l’avenir des expo- sitions thématiques itinérantes pourrait bien s’en trouver modifié. Le Commonwealth Institute est un centre culturel qui regroupe les quarante- neuf pays du Commonwealth, soit le quart de la population du monde. L’un de ses objectifs est de ((faire connaître le patrimoine culturel de façon à éclairer le temps que nous vivons )>.I L’idée de l’exposition est née d’un ensemble de manifestations, U Focus on Africa ., (L’Afrique sous les projecteurs) que l’Institut se proposait d’organiser autour de l’Afrique en 1984 et qui devait durer six mois. I1 apparut aux responsa- bles de ce programme, tandis qu’ils en planifiaient le déroulement deux ou trois années à l’avance, que l’exposition envi- sagée en constituerait le couronnement parfait : en effet, elle illustrerait le rôle extraordinaire de l’Afrique dans les origi- nes et le développement du genre humain, en lui opposant, dans un con- traste saisissant, les dangers qui menacent aujourd’hui beaucoup d’Africains. Le projet fut appuyé par Richard Leakey, l’éminent directeur du National Museum du Kenya, qui y voyait l’occasion de faire mieux comprendre au grand public une science à laquelle il a tant contribué lui-même. I1 devint vite évident que les ressources exigées par une entreprise de cette enver- gure dépasseraient de loin celles dont dis- posait l’Institut. I1 fut donc décidé de lui trouver un sponsor. A l’époque, au début de 1983, je me trouvais à Paris, en mis- sion auprès de l’Unesco. Or, le siège de la

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230

P R É S E N C E E T R E P R É S E N T A T I O N

James Porter Boursier Leverhulme, Université de Londres (1950-1955); diplômé de sociologie de la London School ofEconomics (1953) ; licencié ès lettres et en sociologie de I’éducation (1955). Enseignement pri- maire et secondaire puis chargé de cours en sociolo- gic et Education jusqu’en 1962. Proviseur adjoint du Coventry College (1962-1967) ; proviseur du Bulmershe College of Higher Education (1967- 1968). Membre du Comité national d’enquête sur I’éducation,et la formation des maîtres (1971) ; de la branche Education du Comité des bourses univer- sitaires (1978) ; du Conseil consultatif pour l’ensei- gnement du service de radiodiffusion indépen- dant ; du Bureau exécutif de 1’ICOM-Royaume- Uni ; de la Société royale des arts (1978) ; membre honoraire du College of Perceptors (1978) ; prési- dent du World Education Fellowship (1979) ; con- sultant de l’Unesco pour l’enseignement supérieur depuis 1976 ; directeur du Commonwealth Insti- tute. Coauteur (avec N. Goble) de L’évofution du rôle du maître -perspectives intemationafes (Paris, Unesco, 1977).

1. Museum, vol. XXXIII, no. 4, 1981.

En novembre 1985, le Commonwealth Institute de Londres a organisé une expo- sition, <( The Human Story )> (L’aventure humaine), qui a duré trois mois. Cette manifestation tout à fait originale a rem- porté un tel succès que l’avenir des expo- sitions thématiques itinérantes pourrait bien s’en trouver modifié.

Le Commonwealth Institute est un centre culturel qui regroupe les quarante- neuf pays du Commonwealth, soit le quart de la population du monde. L’un de ses objectifs est de ((faire connaître le patrimoine culturel de façon à éclairer le temps que nous vivons )>.I

L’idée de l’exposition est née d’un ensemble de manifestations, U Focus on Africa ., (L’Afrique sous les projecteurs) que l’Institut se proposait d’organiser autour de l’Afrique en 1984 et qui devait durer six mois. I1 apparut aux responsa- bles de ce programme, tandis qu’ils en

planifiaient le déroulement deux ou trois années à l’avance, que l’exposition envi- sagée en constituerait le couronnement parfait : en effet, elle illustrerait le rôle extraordinaire de l’Afrique dans les origi- nes et le développement du genre humain, en lui opposant, dans un con- traste saisissant, les dangers qui menacent aujourd’hui beaucoup d’Africains. Le projet fut appuyé par Richard Leakey, l’éminent directeur du National Museum du Kenya, qui y voyait l’occasion de faire mieux comprendre au grand public une science à laquelle il a tant contribué lui-même.

I1 devint vite évident que les ressources exigées par une entreprise de cette enver- gure dépasseraient de loin celles dont dis- posait l’Institut. I1 fut donc décidé de lui trouver un sponsor. A l’époque, au début de 1983, je me trouvais à Paris, en mis- sion auprès de l’Unesco. Or, le siège de la

L ’auenture humaine 23 1

59 Panneaux de l’exposition montrant la technique utilisée pour illustrer les idées : un procédé sérigraphique permet d’imprimer des dessins sur le contre-plaqué et sur le panneau de Plexiglas amovible. Ce dernier peut être changé de manière à présenter les inscriptions dans la langue de chaque pays où l’exposition est présentée.

60 Panneaux présentant les découvertes les plus récentes. I1 s’agit ici d’un Homo erectus appelé prosaïquement WT-1500 par Richard Leakey, qui l’a découvert.

61 Mannequin grandeur nature d’un Homo erectas.

société IBM pour l’Afrique et le Moyen- Orient est également à Paris. Un après- midi de printemps, je pris contact avec le directeur général d’ IBM, responsable de cette région, et celui-ci manifesta un très vif intérêt pour une exposition consacrée à l’histoire de l’espèce humaine, à ses possibilités actuelles et à ses perspectives d’avenir. Le rôle extraordinaire de l’intel- ligence et de la technologie était un sujet qui convenait parfaitement à une organi- sation qui se consacre elle-même à certai- nes des productions les plus complexes de l’esprit humain. Après cette entrevue, qui fut à vrai dire une simple conversa- tion, il fallut présenter un dossier com- plet, et ainsi débutèrent des négociations franches, approfondies et exigeantes, qui devaient durer plus d’un an.

Dans le même temps, la réflexion con- sacrée au projet s’enrichissait de l’apport de trois grands savants : M. Yves Cop-

pens, alors directeur du Musée de l’Homme, M. David Pilbeam, chef du Département d’anthropologie de Har- vard, et M. Carl Gustaf Bernhard, con- seiller scientifique du roi de Suède et pré- sident du Programme international pour l’étude des origines de l’homme. La firme Ron Herron Design Associates fut choisie pour concevoir l’exposition, et l’assistante exécutive de son directeur, Mme Marie-Louise Makris, fit office de coordinatrice du projet.

I1 ressortit des discussions que l’exposi- tion, en raison de ses visées, aurait une portée universelle et que, même si 1’Afri- que demeurait au centre du projet, le reste du monde devait y participer égale- ment. En outre, le temps qu’il fallait pré- voir pour faire le point des connaissances dans le domaine considéré et pour les concrétiser sous la forme d’une exposi- tion à la fois efficace et originale ne per-

mettrait pas d’achever les préparatifs avant la fin de 1985. Finalement, on décida qu’étant donné l’universalité de son thème, l’exposition ne pourrait être qu’itinérante et qu’elle devrait donc être conçue dès le départ comme une manifes- tation qui se déplacerait de par le monde.

A la fin de 1983, les crédits nécessaires ayant été obtenus, il fallut entreprendre. de traduire les idées, les éléments d’infor- mation et les théories scientifiques sous la forme d’une exposition. Dès le début, tous les membres de l’équipe de planifi- cation participèrent pleinement à sa con- ception et à son agencement. La triple question : cQue dire ? Comment le dire ? Comment assurer la cohérence de l’entreprise ? )> servit de cadre aux discus- sions et aux débats qui se déroulèrent à Londres, Paris, Nairobi, Stockholm et Boston. En tant que discipline, la paléoanthropologie se prêtait parfaite-

232 James Porter

ment à une exposition qui répondrait à moins de questions qu’elles n’en soulève- rait. Suivant la démarche caractéristique de cette science, l’exposition fut conçue pour solliciter le visiteur, et pour l’inviter à se forger une opinion et à remettre en question les conjectures des savants. Le dynamisme de cette discipline, qui conti- nuait à faire des découvertes alors que l’exposition ouvrait déjà ses portes, a été mis en relief par des panneaux annonçant des trouvailles toutes récentes, et par les débats, dramatisations et présentations de matériels didactiques qui furent orga- nisés parallèlement.

L’exposition devait relever un autre défi : retracer les principales étapes de l’histoire de la terre, de ses origines à son avenir incertain, et ce avec un matériel pouvant être emballé dans de grandes caisses et expédié en Irlande du Nord, en Europe et en Scandinavie, retourner à Londres en passant par Paris, avant d’être rénové et mis àjour, pour prendre enfin le chemin de l’Afrique. Les exigences particulières d’une exposition itinérante furent donc étudiées d’une manière très approfondie. On inventa un éclairage totalement nouveau et on eut recours à la sérigraphie pour l’impression des pan- neaux (fig. 59 et 60). Un parcours très étudié ferait découvrir successivement au visiteur les débuts de la planète, les origi- nes de la vie, puis l’évolution du genre humain jusqu’aux temps présents, et enfin, l’avenir, le tout étant présenté dans des décors très divers.

Pour que le visiteur fasse siennes les interrogations soulevées par l’exposition, il fallait que les objets soient accessibles et que l’on puisse les prendre en main et les examiner de près. C’est pourquoi les squelettes et les crânes présentés étaient des moulages d’excellente facture et très fidèles, qui s’offraient à la manipulation sans la protection d’une vitrine. Sur son parcours, le visiteur pouvait aussi se trou- ver face à face avec des mannequins inspi- rés des dernières découvertes scientifi- ques et représentant avec un réalisme saisissant les premiers êtres humains qui foulèrent la terre, il y a plus de trois mil- lions d’années (fig. 61, 62, 67).

Toutes ces idées et ces projets durent évidemment subir l’épreuve du public lors de l’exposition proprement dite. I1 va sans dire qu’on ne réalisa pas, en fin de compte, tout ce qu’on aurait voulu faire. Cependant, l’immense succès remporté auprès des critiques et du public montra bien que les visiteurs avaient compris le propos de l’exposition et qu’ils avaient été touchés par l’histoire qu’on leur

racontait et par le fait indubitable qu’ils en faisaient eux-mêmes partie. La réac- tion du public, donc, fut extraordinaire- ment positive ; les mannequins soulevè- rent l’enthousiasme et la grande majorité des visiteurs s’attardaient dans les locaux, un bon nombre d’entre eux revenant même plusieurs fois. I1 n’était pas rare de voir des gens engager un débat, prendre d’autres visiteurs à témoin pour discuter des problèmes soulevés, ou faire des remarques sur les objets exposés. Si le public eutà se plaindre, ce fut essentielle- ment de l’affluence, surtout pendant les week-ends : des milliers de personnes ne sont pas parvenues à pénétrer dans 1’Ins- titut pendant tout le temps qu’a duré l’exposition. Les foules qui s’y sont pres- sées étaient motivées par l’excellente publicité qui avait été faite et par les comptes rendus très élogieux parus dans la presse, mais surtout, elles étaient atti- rées par le sujet de l’exposition. I1 faut

espérer que celle-ci sera abritée dans des locaux plus spacieux, permettant à davantage de visiteurs de la visiter dans des conditions plus confortables, même en cas de grande affluence.

Les visiteurs se sont arraché le catalogue qui proposait à la fois un commentaire sur certains aspects de I’évolution du genre humain et un guide de l’exposi- tion. Ce succès montre bien à quel point les gens se passionnaient pour le sujet traité et voulaient en savoir davantage.

L’Institut a toujours pensé qu’une exposition doit s’inscrire dans un véri- table programme de communication. Ainsi, <<L’aventure humaine P s’est ac- compagnée d’un très riche programme incluant du théâtre, du cinéma, des pro- jections d’images réalisées par ordinateur (fig. 63, 64), des conférences nationales

I I !

et internationales, des séminaires, des programmes scolaires, du matériel péda- gogique, et un manuel destiné aux ensei-

L’aventure humaine 233

62 Mannequins grandeur nature d’un Homo erectus de sexe féminin.

63 Images réalisées par ordinateur, illustrant le mécanisme de la marche chez l’homme et l’anatomie des gorilles.

64 Images réalisées par ordinateur, illustrant le mécanisme de la marche chez l’homme et l’anatomie des gorilles.

65 Le module 6 présente des cartes des guerres, des échanges commerciaux, de la pauvreté et des types d’environnement dans le monde contemporain.

gnants. Parmi toutes ces manifestations, l’une des plus remarquables fut une expérience théâtrale très originale faisant intervenir un groupe de comédiens, de musiciens et de danseurs africains de Tan- zanie, et une troupe britannique de théâ- tre d’avant-garde. Présentés pendant une semaine dans le théâtre de l’Institut par le groupe britannique Welfare State et la compagnie tanzanienne Bagamoyo, ces spectacles ont mis en lumière l’impor- tance de ce que l’art dramatique peut apporter à un thème d’intérêt universel.

Un autre programme de théâtre, des- tiné aux groupes scolaires et aux familles, s’est déroulé pendant les trois mois de l’exposition. Intitulé e Gaïa’s Song,, (le chant de Gaïa, l’ancêtre mythologique de la terre), il a eu pour cadre un décor spécialement créé afin de simuler avec beaucoup de réalisme une machine à remonter le temps, qui transportait les enfants dans une caverne d’il y a trente

66 Reproduction d’un heaume royal anglais, datant de 470 ans environ.

234 lames Porter

L’aventure humaine 235

68 Reproduction d’un masque No en bois (Kobé, Japon), datant de 1.300 ans environ.

67 Mannequin grandeur nature de Lucy, doté d’yeux mobiles. I1 est monté sur une base dans laquelle ont été moulées des traces de pas fossilisées trouvées à Laetoli (Tanzanie), sur un sol vieux de 3,6 millions d’années.

69 Reproduction d’une tête de femme en

ivoire, la Vénus de Bressempouy (Dordogne, France), vieille de 18.000 ans

dont l’original se trouve au Musée de Saint- Germain-en-Laye (France).

mille ans, avec des marches taillées dans le roc, des chutes d’eau, des animaux, des coquillages, et même quatre spécimens d’homme des cavernes. A la fin, les parti- cipants, propulsés dans le présent par la machine à remonter le temps, se retrou- vaient dans un studio où ils pouvaient U choisir leur avenir D. Cette expérience pédagogique, théâtrale et musicale avait été imaginée par Eric Madden, éminent éducateur australien et artiste de talent. Beaucoup de participants ont essayé par la suite de la reproduire en milieu scolaire et de créer leur propre représentation du passé, du présent et de l’avenir.

Le programme cinématographique portait sur les identités culturelles con- temporaines, notamment dans les pays en développement, et sur la lutte que les peuples doivent mener pour affkmer leur conscience culturelle dans un monde qui, souvent, impose’aux populations rurales une image aliénante et destructrice pro- venant des cultures urbaines dominantes (fig. 65) .

Le matériel pédagogique se composait de cinq grands dossiers éducatifs distri- bués aux écoles et d’un livre sur l’histoire de l’humanité, que les enseignants utili- sèrent notamment pour animer des tra- vaux en classe et explorer I’environne- ment local. Tous les week-ends, des spécialistes se tenaient à la disposition des parents et des enfants pour les aider à identifier les fossiles qu’ils apportaient ; une série de séminaires fut organisée pour réfléchir à l’enseignement de la préhis- toire à I’école (fig. 6 9 ) , aux modalités de la vie en communauté avec d’autres espè- ces et aux aspects philosophiques de l’his- toire de l’humanité (fig. 66-68). D’autre part, une grande conférence organisée sous l’égide de l’Unesco au sujet des expositions itinérantes prit U L’aventure humaine )> pour exemple de travail.

Cependant, ce furent les discussions et les débats spontanés, sur les lieux de l’exposition ou à l’extérieur, à la radio, à la télévision, dans la presse, qui donnè- rent à la manifestation le pouvoir de modifier la façon dont les gens se conce- vaient eux-mêmes et percevaient le monde. Quarante-neuf émissions de radio et de télévision évoquèrent l’expo- sition ; certaines furent transmises en Afrique, en France, en République fédé- rale d’Allemagne, aux Etats-Unis et en Grèce. Le service international de la BBC en diffusa d’autres. Les quotidiens natio- naux et les magazines du dimanche pré- sentèrent des photos et des commentai- res. Vingt revues, spécialisées dans des domaines extrêmement divers, publiè-

236 James Porter

rent des articles, et toute la presse éduca- tive rendit compte avec force détails de l’exposition et du programme qui lui était lié. La presse d’actualité en parla dans des pays aussi éloignés que le Zim- babwe, la Jamaïque, les Pays-Bas, 1’Ita- lie, la Nouvelle-Zélande et Maurice, sans compter un certain nombre de journaux régionaux. Une vingtaine de magazines populaires publièrent aussi des articles et des comptes rendus.

Selon les critères généralement appli- qués pour juger du succès d’une manifes- tation dans un grand centre urbain, l’exposition fut une réussite. Son inaugu- ration à Londres par Sa Majesté la Reine Elizabeth ne fut toutefois que le signal de départ pour un voyage qui devait amener l’exposition en Irlande du Nord, aux Pays-Bas, en République fédérale d’ Alle- magne, en Suède, en Autriche et en France. Après cette tournée européenne, elle reviendra à Londres pour être remise à neuf et réorganisée, avant d’entrepren- dre son long voyage en Afrique, en com- mençant par le Zimbabwe, pour passer ensuite sur la côte occidentale et retraver- ser le continent en direction de l’Afrique de l’Est. A la fin de son périple, elle res- tera sur la terre africaine qui a joué un rôle si décisif dans l’évolution de notre es- pèce.

Les organisateurs avaient voulu que l’exposition soit aussi souple que possi- ble, afin de pouvoir la modifier en fonc- tion des réactions du public et du dyna- misme de la discipline -la paléoanthro- pologie - qui fournissait l’essentiel de la matière traitée. C’est pourquoi, au cours de sa présentation à Londres, ils lui apportèrent quelques changements des- tinés à en accroître la lisibilité et le pou-

voir d’évocation. Il faut espérer que cet effort se poursuivra à mesure que I’expo- sition sera présentée dans d’autres envi- ronnements culturels et adaptée aux besoins de publics différents. Pour qu’elle puisse définitivement être consi- dérée comme une réussite, il est essentiel que son message fondamental, élaboré au terme d’années d’échanges de vues et de réflexion par trois des paléoanthropo- logues les plus éminents du monde, puisse être modulé selon la sensibilité de milieux très différents. C’est en Afrique, évidemment, que cela posera le plus de problèmes, mais auparavant, les concep- teurs et les présentateurs de l’exposition rencontreront longuement les scientifi- ques et les muséologues locaux, les res- ponsables des institutions d’accueil. Les sections finales de l’exposition, qui sont consacrées au présent et àl’avenir, se prê- tent particulièrement à des adaptations. En outre, on peut penser que chaque pays visité ajoutera sa contribution à l’exposi- tion et que chaque établissement mettra lui-même au point son programme d’activités. Les hôtes de l’exposition rece- vront chacun un rapport détaillé sur l’expérience acquise au cours des présen- tations précédentes, ainsi qu’un manuel technique de montage, d’entretien et de démontage extrêmement détaillé. Tous les textes ont été conçus de manière à pouvoir être faciles àtraduire dans les lan- gues des pays concernés.

Contrairement au livre, au film ou à la télévision, une exposition peut constituer une forme de communication dynami- que et interactive, capable de s’adapter aux intentions de l’institution qui l’orga- nise, ainsi qu’aux réactions et à lavolonté de participer de ses visiteurs. Pour attein-

dre son but, elle doit signaler les domai- nes où tout n’est pas absolument prouvé et où différentes interprétations sont pos- sibles, et montrer que la science est sou- vent aussi subjective, aussi guidée par l’inspiration et aussi vulnérable que l’art. Une exposition itinérante doit offrir aux présentateurs, aux éducateurs et aux communicateurs la possibilité d’apporter une nouvelle dimension à ce qui a été conçu, à l’origine, pour un certain public, à une certaine époque et dans un certain endroit. En fin de compte, la valeur d’une exposition en tant que forme de communication internationale se mesure à la facilité avec laquelle on peut la modlfier tout en lui conservant son impact et son pouvoir d’expression dans des milieux culturels et face à des publics différents.

((L’aventure humaine >> réaffirme la communauté de nos origines et la vanité de facteurs superficiels tels que la couleur de la peau ou l’origine géographique au regard des sources biologiques et cultu- relles dont nous sommes tous issus. L’idée qui sous-tend l’histoire racontée par l’exposition est que ce qui unit les êtres humains est infiniment plus impor- tant que ce qui les sépare. Cette vérité ainsi que les réalisations accomplies par l’homme jusqu’à ce jour et les immenses ressources que nous offrent notre planète et ses alentours sont les données en fonc- tion desquelles il nous faut agir, et sans tarder. Espérons que le sentiment de la fraternité historique et de l’urgence des problèmes auxquels l’humanité est con- frontée animera l’exposition partout où elle sera présentée.

[ Tradait de Z’anglais]

70 Publicité du Commonwealth Institute pour l’exposition et pour les manifestations annexes.

Les grades étapes de Za tournée .

L’exposition ((L’aventure humaine D a été inaugurée au Com- monwealth Institute à Londres, le 2 1 novembre 1985 ; elle a fermé ses portes le 23 février l9S6. Elle sera accueillie ensuite dans les grandes institutions européennes suivantes : l’Institut royal des tropiques, Amsterdam (Pays-Bas) ; le Musée ethnogra- phique de Suède, Stockholm (Suède) ; 1’Ubersee Museum, Brême (République fédérale d’Allemagne) ; le Muséum d’his- toire naturelle, Vienne (Autriche) ; le Musée de l’homme (Grand Palais), Paris (France).

L’exposition retournera ensuite au Royaume-Uni pour être modifiée et mise à jour avant d’être présentée dans les institu- tions africaines suivantes : The National Museum, Accra (Ghana) ; The National Museum, Lagos (Nigéria) ; Le Musée historique, Dakar (Sénégal) ; Le Musée préhistorique, Kinshasa (Zaïre) ; The National Museum, Harare (Zimbabwe) ; The National Museum, Nairobi (Kenya).