le bilan comptable

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33 pratique exercice professionnel Actualités pharmaceutiques n° 479 Novembre 2008 Afin de bien connaître sa pharmacie, il est essentiel de savoir lire et interpréter les deux grands documents comptables, le bilan et le compte de résultats, qui sont établis par votre expert-comptable. L e bilan comptable est un document de synthèse que le Code du commerce impose d’établir au moins une fois par an. Photographie de l’officine à la clôture de l’exercice, il donne un aperçu de son patri- moine et de sa structure financière. Il per- met de réaliser une évaluation de l’officine et, plus précisément, de savoir combien elle vaut et si elle est solvable. Les documents nécessaires à son établisse- ment sont tirés de la “liasse fiscale”, tableaux n° 2050 et n° 2051. Ils présentent l’avantage d’être identiques pour toutes les pharma- cies ainsi que pour l’ensemble des sociétés. Ces tableaux établissent une présentation des comptes avec un comparatif sur l’année précédente. Cette comparaison peut porter sur des périodes identiques ou non. La durée du bilan est inscrite sur le tableau n° 2050, en haut à droite : “Durée de l’exer- cice en mois”. Il est nécessaire de connaître cette période afin de pouvoir analyser pré- cisément l’évolution des différents para- mètres : chiffre d’affaires (CA), résultat, charges. Les grands postes du bilan Les postes de l’actif Les éléments du bilan sont classés par ordre de liquidité croissante (la trésorerie est plus rapidement mobilisable qu’une immobilisation). Un actif est un élément identifiable ayant une valeur économique positive. Sauf cas parti- culiers, les comptes apparaissant à l’actif du bilan présentent un solde débiteur. Les actifs sont comptabilisés au coût d’acquisition si acquis à titre onéreux, au coût de production si produit et à la valeur vénale si acquis à titre gratuit. Le montant de chaque élément de l’actif correspond au solde du compte correspondant (par exemple, le montant qui apparaît pour le compte “client” correspond au solde de ce compte). L’actif se décompose en deux catégories principales : l’actif non courant ou immobi- lisation et l’actif circulant. L’actif non courant ou immobilisation (AI) L’actif non courant correspond à un délai de recouvrement supérieur à douze mois (il peut être dit durable). Ce sont les immobilisations et les créances de longue durée. Ce poste regroupe les immeubles, matériels, brevets, fonds de commerce... La plupart de ces immobilisations perdent de la valeur avec le temps. Cette dévalorisation, déduite de la valeur comptable, s’appelle les amortissements. Les immobilisations nettes sont les dif- férences entre les immobilisations à leur valeur d’achat (immobilisation brute) et ces amortissements. Elles sont scindées en trois parties dis- tinctes : incorporelles, corporelles et financières. Les immobilisations incorporelles L’immobilisation incorporelle est un actif non monétaire identifiable et d’utilisation durable. Elle correspond en grande partie au capital immatériel de la pharmacie, bien que les deux notions ne soient pas stricte- ment identiques. Contrairement aux immo- bilisations corporelles, ces immobilisations ne sont pas amorties mais provisionnées lors d’une dépréciation à une valeur la plus élevée entre valeur vénale et valeur d’utilité (tableau 1). Tableau 1 : Immobilisations incorporelles Frais d’établissement Frais de recherche et de développement Concession, brevets et droits similaires Fonds commercial Autres immobilisations incorporelles Avances et acomptes sur immobilisations incorporelles Les immobilisations corporelles L’immobilisation corporelle est un actif contrôlé par le pharmacien qui peut être utilisé dans la production de biens ou de services, utilisé a des fins administratives (ordinateurs...) ou loué a des tiers (location des murs...). Cette évaluation est clairement définie. Elle comprend le coût d’achat du matériel (coût + frais de livraison + frais d’installation + hono- raires professionnels) mais ne comprend pas les frais généraux dus à cette installation ainsi que les intérêts (charges d’emprunts) contractés pour acquérir cette immobilisa- tion (tableau 2). Tableau 2 : Immobilisations corporelles Terrains Constructions Installations techniques, matériels et outillages industriels Autres immobilisations corporelles Immobilisations en-cours Avances et acomptes sur immobilisations corporelles Les immobilisations financières En complément des immobilisations corpo- relles et incorporelles, les immobilisations financières désignent toutes les participa- Le bilan comptable Le bilan en pratique Le bilan correspond à une liste chiffrée présentée en deux parties (figure 1). L’actif : « Où est l’argent ? » Cette partie dresse l’inventaire des emplois de la pharmacie : tout ce qu’elle possède à la date du bilan. Le passif : « D’où vient l’argent ? » Cette partie définit les ressources et les sources de financement du patrimoine à la date du bilan. Le total de l’actif (état des emplois) est forcement égal au total du passif (source de financement). Figure 1 : Le bilan Liquidité croissante Actif Passif Exigibilité croissante Actif immobilisé (AI) Ressources stables (RS) Actif circulant (AC) Passif circulant (PC) Trésorerie (T) Les grands postes du document comptable : années n et n-1.

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Page 1: Le bilan comptable

33 pratique

exercice professionnel

Actualités pharmaceutiques n° 479 Novembre 2008

Afin de bien connaître

sa pharmacie, il est essentiel

de savoir lire et interpréter

les deux grands documents

comptables, le bilan

et le compte de résultats,

qui sont établis par votre

expert-comptable.

Le bilan comptable est un document de synthèse que le Code du commerce impose d’établir au moins une fois par

an. Photographie de l’officine à la clôture de l’exercice, il donne un aperçu de son patri-moine et de sa structure financière. Il per-met de réaliser une évaluation de l’officine et, plus précisément, de savoir combien elle vaut et si elle est solvable.Les documents nécessaires à son établisse-ment sont tirés de la “liasse fiscale”, tableaux n° 2050 et n° 2051. Ils présentent l’avantage d’être identiques pour toutes les pharma-cies ainsi que pour l’ensemble des sociétés. Ces tableaux établissent une présentation des comptes avec un comparatif sur l’année précédente. Cette comparaison peut porter sur des périodes identiques ou non.La durée du bilan est inscrite sur le tableau n° 2050, en haut à droite : “Durée de l’exer-

cice en mois”. Il est nécessaire de connaître cette période afin de pouvoir analyser pré-cisément l’évolution des différents para-mètres : chiffre d’affaires (CA), résultat, charges.

Les grands postes du bilanLes postes de l’actif

Les éléments du bilan sont classés par ordre de liquidité croissante (la trésorerie est plus rapidement mobilisable qu’une immobilisation).Un actif est un élément identifiable ayant une valeur économique positive. Sauf cas parti-culiers, les comptes apparaissant à l’actif du bilan présentent un solde débiteur. Les actifs sont comptabilisés au coût d’acquisition si acquis à titre onéreux, au coût de production si produit et à la valeur vénale si acquis à titre gratuit. Le montant de chaque élément de l’actif correspond au solde du compte correspondant (par exemple, le montant qui apparaît pour le compte “client” correspond au solde de ce compte).L’actif se décompose en deux catégories principales : l’actif non courant ou immobi-lisation et l’actif circulant.

L’actif non courant ou immobilisation (AI)L’actif non courant correspond à un délai de recouvrement supérieur à douze mois (il peut être dit durable). Ce sont les immobilisations et les créances de longue durée. Ce poste regroupe les immeubles, matériels, brevets, fonds de commerce...La plupart de ces immobilisations perdent de la valeur avec le temps. Cette dévalorisation, déduite de la valeur comptable, s’appelle les amortissements.Les immobilisations nettes sont les dif-férences entre les immobilisations à leur valeur d’achat (immobilisation brute) et ces amortissements.Elles sont scindées en trois parties dis-tinctes : incorporelles, corporelles et financières.

Les immobilisations incorporelles

L’immobilisation incorporelle est un actif non monétaire identifiable et d’utilisation durable. Elle correspond en grande partie au capital immatériel de la pharmacie, bien que les deux notions ne soient pas stricte-

ment identiques. Contrairement aux immo-bilisations corporelles, ces immobilisations ne sont pas amorties mais provisionnées lors d’une dépréciation à une valeur la plus élevée entre valeur vénale et valeur d’utilité (tableau 1).

Tableau 1 : Immobilisations incorporelles

Frais d’établissement

Frais de recherche et de développement

Concession, brevets et droits similaires

Fonds commercial

Autres immobilisations incorporelles

Avances et acomptes sur immobilisations incorporelles

Les immobilisations corporelles

L’immobilisation corporelle est un actif contrôlé par le pharmacien qui peut être utilisé dans la production de biens ou de services, utilisé a des fins administratives (ordinateurs...) ou loué a des tiers (location des murs...).Cette évaluation est clairement définie. Elle comprend le coût d’achat du matériel (coût + frais de livraison + frais d’installation + hono-raires professionnels) mais ne comprend pas les frais généraux dus à cette installation ainsi que les intérêts (charges d’emprunts) contractés pour acquérir cette immobilisa-tion (tableau 2).

Tableau 2 : Immobilisations corporelles

Terrains

Constructions

Installations techniques, matériels et outillages industriels

Autres immobilisations corporelles

Immobilisations en-cours

Avances et acomptes sur immobilisations corporelles

Les immobilisations financières

En complément des immobilisations corpo-relles et incorporelles, les immobilisations financières désignent toutes les participa-

Le bilan comptable

Le bilan en pratique

Le bilan correspond à une liste chiffrée présentée

en deux parties (figure 1).

L’actif : « Où est l’argent ? » Cette partie dresse

l’inventaire des emplois de la pharmacie : tout ce

qu’elle possède à la date du bilan.

Le passif : « D’où vient l’argent ? » Cette partie

définit les ressources et les sources de financement

du patrimoine à la date du bilan.

Le total de l’actif (état des emplois) est forcement

égal au total du passif (source de financement).

Figure 1 : Le bilan

Liqu

idité

cro

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nte

Actif Passif

Exig

ibili

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rois

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Actif immobilisé (AI)Ressources stables (RS)

Actif circulant (AC)

Passif circulant (PC)Trésorerie (T)

Les grands postes du document comptable : années n et n-1.

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34pratique

exercice professionnel

Actualités pharmaceutiques n° 479 Novembre 2008

tions de la pharmacie, les prêts qu’elle a consentis à d’autres sociétés ou bien encore diverses créances liées aux participations financières (tableau 3).

Tableau 3 : Immobilisations financières

Participations évaluées par mise en équivalence

Autres participations

Créances rattachées à des participations

Autres titres immobilisés

Prêts

Autres immobilisations financières

Elles s’opposent aux disponibilités et aux valeurs mobilières de placement par leur caractère à moyen-long terme.

L’actif circulantL’actif circulant est le terme comptable dési-gnant les actifs détenus par la pharmacie et dont la vocation n’est pas de rester durable-ment en son sein (tableau 4).

Tableau 4 : L’actif circulant

Sto

cks

Matières premières, approvisionnements

En-cours de production de biens

En-cours de production de services

Produits intermédiaires et finis

Marchandises

Avances et acomptes versés sur commandes

Cré

ance

s Clients et comptes rattachés

Autres créances

Capital souscrit et appelé, non versé

Div

ers Valeurs mobilières de placement (dont actions propres)

Disponibilités

Ce poste peut se scinder en deux parties : les valeurs d’exploitation (stocks et avan-ces) et les valeurs réalisables et disponibles (créances et disponibilités).

Les stocks

Les principaux stocks sont :– les stocks de marchandises, c’est-à-dire l’ensemble des médicaments qui seront revendus sans transformation ;– les stocks de matières premières corres-pondant généralement au stock du prépara-toire, achetées en vue d’une transformation ultérieure ;– les produits intermédiaires et finis (les pro-duits en-cours de production sont géné-ralement nuls au sein de la pharmacie) qui correspondent aux préparations magistrales réalisées et non encore vendues.

Les avances et acomptes versés sur

avance

L’avance est un versement anticipé (versé avant exécution de la commande) à valoir

sur le prix stipulé au contrat, le contrat étant définitivement conclu. C’est la preuve de l’engagement ferme et définitif.L’acompte, tout comme l’avance, est un versement anticipé, entraînant les mêmes engagements, mais il est versé sur justifi-cation d’exécution partielle. Il correspond à une partie due, il n’est donc pas remboursa-ble de plein droit comme l’avance en cas de non-exécution par le fournisseur de la vente ou de la prestation des deux parties.

Les créances

À l’inverse d’une dette, la créance est le droit en vertu duquel le créancier (ou le prêteur) peut exiger des droits sur un bien, un ser-vice ou sur la pharmacie. Ce créancier peut être une personne (le client), une entreprise (acompte versé sur commande), ou l’État et ses organismes (FISC).

L’argent disponible ou placé à court

terme

La trésorerie de la pharmacie est la somme de tous ses avoirs et dettes à court terme. La majeure partie correspond aux comptes bancaires courant de la pharmacie.La gestion de cette trésorerie est très impor-tante. Elle consiste à maintenir une liquidité suffisante pour faire face aux échéances, tout en optimisant la rentabilité des fonds.

Les postes du passif

Le passif regroupe les ressources à la dispo-sition de la pharmacie afin de financer l’actif. Ils sont enregistrés à la date de livraison du bien ou du service rendu.Si la valeur du passif augmente, l’augmen-tation est considérée comme une provision si elle est réversible, comme une dette si elle est irréversible. Par prudence, si la valeur diminue de façon irréversible, elle n’est pas comptabilisée.Le passif est constitué des capitaux propres et des dettes à long et court terme.

Les capitaux propresLes capitaux propres (tableau 5) corres-pondent :

au capital social : il s’agit du capital initial de la pharmacie apporté par le ou les phar-maciens titulaire(s) ;

aux bénéfices qui ont été mis en réserve (part non distribuée des bénéfices des exer-cices passés) pour contribuer à financer la pharmacie ;

au résultat net qui peut être un bénéfice ou une perte.

Tableau 5 : Les capitaux propres

Capital social ou individuel (dont versé)

Primes d’émission, de fusion, d’apports...

Écarts de réévaluation

Réserve légale

Réserves statutaires ou contractuelles

Réserves réglementées (dont réserve spéciale des provisions

pour fluctuations des cours)

Autres réserves (dont réserve relative à l’achat d’œuvres

originales d’artistes vivants)

Report à nouveau

Résultat de l’exercice (bénéfice ou perte)Subvention d’investissement

Provisions réglementées

Total

Les dettesLes dettes correspondent à ce que la phar-macie doit à ses créanciers : laboratoires, grossistes, banques, obligataires... Elles sont divisées en dettes financières (découverts bancaires, emprunts contractés...), d’exploi-tation et hors exploitation (tableau 6).

Tableau 6 : Les dettes

Emprunts obligataires convertibles

Autres emprunts obligataires

Emprunts et dettes auprès des établissements de crédit

Emprunts et dettes financières

(dont emprunts participatifs)

Avances et acomptes reçus sur commandes en-cours

Dettes fournisseurs et comptes rattachés

Dettes fiscales et sociales dont impôt sur les sociétés

Dettes sur immobilisations et comptes rattachés

Autres dettes

À moyen et à long terme, elles correspon-dent au montant des emprunts à rembourser à plus d’un an.

À court terme, ou passif courant, leur échéance est à moins d’un an.Il est à noter que le bilan n’est pas une sim-ple liste composée de deux parties, mais comprend aussi des notes et des annexes.

L’analyse du bilanAvec les chiffres du bilan en main, le phar-macien peut extraire différents ratios concer-nant sa pharmacie. Cette méthode des ratios sert à évaluer de façon simple s’il y a des déséquilibres. Les ratios se divisent en deux grands groupes, ceux concernant le haut du bilan pour les grands équilibres et ceux du bas du bilan concernant l’argent disponible pour faire face aux échéances immédiates.Ces ratios ne sont intéressants que quand ils sont comparés soit aux normes de secteur, soit aux ratios antérieurs.

Page 3: Le bilan comptable

35 pratique

exercice professionnel

Actualités pharmaceutiques n° 479 Novembre 2008

Valeur du patrimoine

(actif net, capitaux propres)

Avant toute analyse, il est essentiel de s’intéres-ser aux richesses de la pharmacie diminuées de ses dettes. L’actif net correspond à l’actif au bilan moins la partie servant à couvrir les dettes du passif. Souvent confondu aux fonds propres, l’actif net correspond à ces derniers plus ou moins les subventions et provisions.

Les ratios de solvabilité

et d’indépendance financière

L’objectif du bilan n’est pas seulement de définir les richesses de la pharmacie mais aussi de s’assurer que son financement est solide et équilibré.

Les ratios de solvabilité générale

Les ratios de solvabilité décrivent la capacité de la pharmacie à s’acquitter de ses obliga-tions financières à long terme et à résister à l’adversité économique. Être solvable, c’est être capable de régler toutes les dettes rem-boursables devant la loi. Il est question ici de la santé financière et des risques de défaut de paiement.

Ratio de solvabilité = dettes / total du passif

Les ratios d’autonomie financière

Les capitaux stables correspondent à tout ce qui n’est pas financé sur le court terme, soit l’actif net, ainsi que les dettes à moyen et long terme (MLT).

Ratio d’indépendance financière =

actif net / capitaux stables

Ce ratio permet de contrôler le niveau d’en-dettement. À titre d’exemple, un pharmacien qui achète une pharmacie avec 30 % d’ap-port – le reste étant intégralement financé à long terme, aura un ratio d’indépendance financière de 30 %. En dessous de 20 %, les dettes MLT deviennent un poids écrasant à rémunérer et à rembourser.

Les ratios de rentabilité

et de performance économique

À partir du résultat de la pharmacie (extrait du compte de résultat), différents ratios de rentabilité de l’officine peuvent être détermi-nés. La rentabilité est le rapport entre, d’une part, les résultats obtenus et, d’autre part, les moyens utilisés pour arriver à ce résultat.

Il existe différents ratios qui permettent de définir et calculer la rentabilité.

La rentabilité globale

La rentabilité globale mesure la rentabilité de l’ensemble des actifs utilisés. Elle est calcu-lée en faisant le rapport suivant :

Rentabilité globale =

(résultat net x 100) / actif total

La rentabilité globale est une mesure parfois trop générale, et elle est souvent complétée par d’autres ratios plus significatifs.

La rentabilité économique

La rentabilité économique, qui mesure la ren-tabilité mesurée par rapport aux actifs immo-bilisés utilisés, se calcule en faisant le rapport suivant :

Rentabilité économique =

(résultat net x 100) / investissement total

Ce ratio est en indicateur plus pertinent de la rentabilité mesurée en termes d’efficacité.Le pharmacien peut améliorer sa rentabilité économique de deux manières :– à volume de ventes constant, en augmen-tant la marge réalisée sur chaque produit ;– à marge constante, en augmentant le mon-tant des ventes, c’est-à-dire la rotation.Ces deux voies de l’amélioration de la rentabilité économique peuvent évidement se combiner.

La rentabilité financière

Le taux de rentabilité financière mesure la capacité à rémunérer les dirigeants de l’officine.Les capitaux propres représentent l’en-semble des ressources “risquées” pour le pharmacien titulaire dans la pharmacie. Le résultat est la rémunération qu’il tire de ces montants. Il mesure la rentabilité de l’of-ficine par rapport aux capitaux investis dans celle-ci.

Rentabilité financière =

(résultat net x 100) / capitaux propres

Si la rentabilité financière est supérieure à la rentabilité économique, il est dit que l’entre-prise bénéficie d’un effet de levier.Il est possible d’améliorer la rentabilité finan-cière de deux manières (figure 2) :– en améliorant la rentabilité économique dégagée par l’utilisation de l’actif ;

– en modifiant la composition du passif, dans le sens du recours plus grand à des moyens financiers empruntés et une limitation relative des ressources risquées par les associés.

La rentabilité commerciale

Ce ratio exprime la rentabilité en fonction du volume d’activité. Il se calcule de la manière suivante :

Rentabilité commerciale =

(résultat net x 100) / chiffre d’affaires

Le taux de marge de l’officine est alors déter-miné. Il permet d’estimer le résultat futur en fonction de la variation de son volume d’ac-tivité mesuré par le chiffre d’affaires.

Les ratios de trésorerie

Le fonds de roulement (FDR)Le fonds de roulement est la grande notion de l’analyse du bilan. Il est lié au décalage entre les achats et la vente de marchandise – c’est le stock à financer – et le décalage de trésorerie entre la vente de marchandise et l’encaisse-ment – le financement des créances clients.Il est réduit par le décalage de trésorerie entre l’achat et le paiement des marchandi-ses : le délai fournisseur.Il doit être positif pour financer les besoins d’exploitation, le besoin en fonds de roulement (BFR). Plus le FDR est élevé, meilleure est la solidité financière (solvabilité) de la pharmacie.Il représente donc l’excédent des ressources sta-bles sur le total des dépenses d’investissement.

FDR = ressources stables – emplois stables

L’élaboration d’un bilan fonctionnel permet de regrouper l’ensemble des dépenses et des ressources à long terme (tableau 7) :– au passif du bilan, les capitaux propres, les amortissements, les provisions pour risques et charges, les dettes financières stables (dettes financières hors concours bancaires) ;

Figure 2 : Les leviers de la rentabilité financière.

Page 4: Le bilan comptable

36pratique

exercice professionnel

Actualités pharmaceutiques n° 479 Novembre 2008

– à l’actif du bilan, les actifs immobilisés qui sont évalués à leur valeur brute afin de tenir compte du coût réel de leur acquisition sans tenir compte des amortissements déjà réa-lisés. Les immobilisations sont distinguées selon leur nature (elles sont incorporelles, corporelles ou financières).

Tableau 7 : Le bilan fonctionnel

Actif PassifActif immobilisé : immobilisations corporelles

immobilisations incorporelles

immobilisations financières

Capitaux permanents : capitaux propres

amortissements et provisions

dettes financières à long terme

Fonds de roulement

Le FDR peut être positif, nul ou négatif.Le fonds de roulement est positif

Dans ce cas, les ressources stables de la pharmacie sont supérieures à l’actif immo-bilisé constitué, c’est-à-dire que les res-sources stables couvrent les besoins à long terme de la pharmacie.L’équilibre financier est donc respecté et la pharmacie dispose, grâce au fonds de rou-lement, d’un excédent de ressources sta-bles qui lui permettra de financer ses autres besoins de financement à court terme.

Le fonds de roulement est nul

Dans ce cas, les ressources stables sont égales à l’actif immobilisé constitué, c’est-à-dire que les ressources stables couvrent les besoins à long terme.Mais, même si l’équilibre de l’officine semble atteint, celle-ci ne dispose d’aucun excédent de ressources à long terme pour financer son cycle d’exploitation, ce qui rend son équilibre financier précaire.

Le fonds de roulement est négatif

Dans ce cas, les ressources stables sont infé-rieures à l’actif immobilisé constitué, c’est-à-dire qu’elles ne couvrent pas les besoins à long terme. La règle prudentielle de l’équili-bre financier n’est donc pas respectée. Il faut donc financer une partie des emplois à long terme à l’aide de ressources à court terme, ce qui fait courir un risque important d’insolva-bilité. Une telle situation doit être rapidement corrigée en augmentant les ressources à long terme afin de retrouver un fonds de roulement excédentaire.

Le besoin en fonds de roulement (BFR)Le besoin en fonds de roulement ou BFR permet de prendre en compte, dans les analyses de flux de trésorerie, les délais

clients et fournisseurs. En résumé, il résulte des décalages entre les décaissements et encaissements des flux liés à l’activité.Le BFR est appelé également “ressource en fonds de roulement” lorsqu’il est négatif.Le besoin de financement correspond à l’ex-cédent des emplois (réels) d’investissement de l’exercice sur les ressources (réelles) d’investissement de l’exercice, hors endet-tement à long et moyen terme (figure 3).Le bilan fait apparaître les éléments de l’ac-tif et du passif qui se rapportent à l’activité de l’officine et qui permettent de déterminer ses besoins de financement à court terme (tableau 8).

Tableau 8 : Le besoin en fonds

de roulement

Actif Passif

Actif circulant stocks

créances clients

Passif circulant dettes fournisseurs

dettes fiscales et sociales

autres dettes d’exploitation

Besoin en fonds de roulement

Les principaux éléments constitutifs de l’ac-tif circulant sont :– les stocks et en-cours, fonctions du cycle d’exploitation, pour les médicaments, les matières premières et autres marchandises ;– les créances clients et comptes rattachés, fonctions des délais de paiement accordés aux clients.Les éléments constitutifs du passif circulant :– les avances et acomptes reçus sur commande ;– les dettes fournisseurs et comptes rat-tachés, fonctions des délais de paiement accordés par les fournisseurs ;– les dettes fiscales et sociales dues aux administrations publiques et aux organismes sociaux ;– l’ensemble des autres dettes constatées au cours du cycle d’exploitation.

BFR = emplois d’exploitation

– ressources d’exploitation =

actif circulant – passif circulant

positif

Les emplois d’exploitation sont supérieurs aux ressources d’exploitation. La pharma-cie peut donc financer ces besoins à court terme, soit à l’aide de son excédent de res-sources à long terme (fonds de roulement), soit à l’aide de ressources financières complémentaires à court terme (concours bancaires...).

Les emplois d’exploitation sont égaux aux ressources d’exploitation. Il n’y a pas de besoin d’exploitation à financer puisque le passif circulant suffit à financer l’actif circulant.

Les emplois d’exploitation sont supérieurs aux ressources d’exploitation. Le passif cir-culant excédant les besoins de financement de son actif d’exploitation, la pharmacie n’a pas besoin d’utiliser ses excédents de res-sources à long terme (fonds de roulement) pour financer d’éventuels besoins à court terme.Dans tous les cas, les besoins éventuels de financement du cycle d’exploitation d’une pharmacie dépendront en grande partie de la gestion même de la pharmacie :– de son pouvoir de négociation envers ses fournisseurs (délais de paiement plus ou moins long). Le crédit moyen est de l’ordre de 37 jours d’achats hors taxes (HT) ;– de sa gestion des tiers payant, avec envois réguliers des télétransmissions (délais client réduits). À titre d’exemple, pour une pharma-cie moyenne, une journée de créance clients gagnée correspond pratiquement à 1 000 € de trésorerie en plus. À titre de comparatif, le ratio de crédit-client de la profession est de 9 jours de CA ;– de sa gestion des stocks : d’un ratio de 44 jours pour les pharmacies de centre commercial, à 37 jours d’achat HT pour les officines rurales.

La trésorerieLa trésorerie peut s’évaluer de deux maniè-res différentes selon l’approche retenue.Elle correspond à la différence entre les besoins et les ressources de financement (tableau 9). Les besoins peuvent être éva-lués à l’aide du BFR alors que les ressour-ces disponibles pour financer ces besoins

Figure 3 : Le BFR, décalage financier entre l’achat et l’encaissement d’un produit.

Page 5: Le bilan comptable

37 pratique

exercice professionnel

Actualités pharmaceutiques n° 479 Novembre 2008

sont le FDR. La trésorerie nette correspond alors au solde net entre ces besoins et ces ressources. Si les besoins excédent les res-sources, la trésorerie sera négative (au passif du bilan), alors que si les ressources sont supérieures aux besoins, la trésorerie sera positive (à l’actif du bilan).

Trésorerie = ressources financières

– besoins financiers = FDR - BFR

La trésorerie représente aussi l’ensemble des disponibilités qui permettront de finan-cer les dépenses à court terme (tableau 10). Dans ce cas, la trésorerie nette se calcule en faisant la différence entre la trésorerie d’actif et la trésorerie de passif.

Trésorerie = trésorerie d’actif – trésorerie du passif

L’analyse du solde de la trésorerie permet de se faire une idée sur la situation financière de la pharmacie.

Les ressources financières sont suffisantes pour couvrir les besoins (soit FDR > BFR), ce qui signifie que la situation financière est saine est qu’elle est même en mesure de financer un surcroît de dépenses sans recourir à un emprunt.

Les ressources financières suffisent juste à satisfaire ses besoins (FDR = BFR). La situa-tion financière est équilibrée mais la phar-macie ne dispose d’aucune réserve pour financer un surplus de dépenses que ce soit en termes d’investissement ou d’ex-ploitation (achat d’un frigo, changement de l’informatique).

La pharmacie ne dispose pas de suffisam-ment de ressources financières pour combler ses besoins. Elle doit donc recourir à des financements supplémentaires à court terme (découverts bancaires...) pour faire face à ses besoins de financement d’exploitation.Il y a donc un risque financier à court terme si elle ne parvient pas à accroître rapidement ses ressources financières à long terme, ou à limiter ses besoins d’exploitation à court terme.

Nicolas Julien

Pharmacien, Bezouce (30)

[email protected]

Tableau 9 : La trésorerie,

différence entre les besoins

et les ressources de financement

Trésorerie nette négativeActif PassifBesoin en fonds de roulement Fonds de roulement

Trésorerie nette positiveActif PassifBesoin en fonds de roulement Fonds de roulement

Trésorerie nette

Tableau 10 : La trésorerie,

ensemble des disponibilités

Trésorerie négativeActif PassifTrésorerie d’actif Valeurs mobilières

de placement

Disponibilités

Trésorerie du passif Concours bancaires

Soldes créditeurs des banques

Trésorerie nette

Trésorerie nette positiveActif PassifTrésorerie d’actif Valeurs mobilières

de placement

Disponibilités

Trésorerie du passif Concours bancaires