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LES ECHANGES DE DROnS DES LIVRES POUR ENFANTS par Catherine Lapautre* Si beaucoup de livres pour enfants passent les frontières et sont édités en dehors de leur pays d'origine, ces publications sont l'aboutissement du travail de multiples acteurs, souvent peu ou mal connus. Catherine Lapautre explique qui ils sont, quels sont leurs rôles et comment s'organisent les contacts et les négociations pour les ventes et achats de droits étrangers. L orsqu'un auteur ou un illustrateur - qu'il soit mondialement connu ou juste débutant - publie un livre dans sa langue d'origine, les « droits étrangers », c'est-à-dire les droits de publication en langues étrangères, sont rarement conservés par l'auteur lui-même. Le plus souvent il en confie la gestion soit à son éditeur d'origine, soit à un agent littéraire. C'est alors à l'un ou à l'autre de faire les démarches néces- saires pour faire connaître le livre, le pro- poser à un éditeur étranger en vue de lui céder les droits. L'un et l'autre (l'éditeur d'origine et l'agent de l'auteur) peuvent aussi décider de confier ce travail à un co- agent pour un territoire spécifique (les droits de langue française, italienne, alle- mande, etc.), à charge pour lui de les repré- senter dans ces pays pour le compte de l'auteur. Mais d'autres professionnels ont également un rôle important, notamment les traducteurs. Les maisons d'édition françaises ont pour la plupart un responsable des droits étrangers qui par ses multiples contacts va chercher à « vendre » les droits des livres français à des maisons étrangères. Pour l'éditeur, le mar- ché étranger est très important parce que ses auteurs s'attendent à être publiés dans d'autres langues. Cela fait partie du rôle de l'éditeur. Pour l'auteur, la traduction de ses livres est très valorisante. Un éditeur fran- çais retient en général 50% des droits d'auteur sur les cessions à l'étranger. Dans les pays anglo-saxons, où beaucoup d'auteurs ont des agents, l'éditeur est obligé de retenir un pourcentage plus réduit sur les droits qu'il négocie à l'étranger, allant de 25% à 10% selon les cas. Comment les éditeurs français prennent-ils des contacts avec les maisons étrangères ? Les lieux privilégiés sont la Foire internatio- nale du livre de jeunesse à Bologne au prin- temps et la Foire de Francfort à l'automne. * Catherine Lapautre est agent littéraire. 76 / LA REVUE DES LIVRES POUR ENFANTS

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LES ECHANGES DE DROnSDES LIVRES POUR

ENFANTSpar Catherine Lapautre*

Si beaucoup de livres pour enfants passent les frontièreset sont édités en dehors de leur pays d'origine, ces publications

sont l'aboutissement du travail de multiples acteurs, souvent peuou mal connus. Catherine Lapautre explique qui ils sont,quels sont leurs rôles et comment s'organisent les contacts

et les négociations pour les ventes et achats de droits étrangers.

L orsqu'un auteur ou un illustrateur- qu'il soit mondialement connu ou

juste débutant - publie un livre dans salangue d'origine, les « droits étrangers »,c'est-à-dire les droits de publication enlangues étrangères, sont rarement conservéspar l'auteur lui-même. Le plus souvent il enconfie la gestion soit à son éditeur d'origine,soit à un agent littéraire. C'est alors à l'unou à l'autre de faire les démarches néces-saires pour faire connaître le livre, le pro-poser à un éditeur étranger en vue de luicéder les droits. L'un et l'autre (l'éditeurd'origine et l'agent de l'auteur) peuventaussi décider de confier ce travail à un co-agent pour un territoire spécifique (lesdroits de langue française, italienne, alle-mande, etc.), à charge pour lui de les repré-senter dans ces pays pour le compte del'auteur. Mais d'autres professionnels ontégalement un rôle important, notamment lestraducteurs.

Les maisons d'édition françaises ont pour laplupart un responsable des droits étrangersqui par ses multiples contacts va chercher à« vendre » les droits des livres français à desmaisons étrangères. Pour l'éditeur, le mar-ché étranger est très important parce queses auteurs s'attendent à être publiés dansd'autres langues. Cela fait partie du rôle del'éditeur. Pour l'auteur, la traduction de seslivres est très valorisante. Un éditeur fran-çais retient en général 50% des droitsd'auteur sur les cessions à l'étranger. Dansles pays anglo-saxons, où beaucoupd'auteurs ont des agents, l'éditeur est obligéde retenir un pourcentage plus réduit surles droits qu'il négocie à l'étranger, allantde 25% à 10% selon les cas.Comment les éditeurs français prennent-ilsdes contacts avec les maisons étrangères ?Les lieux privilégiés sont la Foire internatio-nale du livre de jeunesse à Bologne au prin-temps et la Foire de Francfort à l'automne.

* Catherine Lapautre est agent littéraire.

76 / LA REVUE DES LIVRES POUR ENFANTS

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Le responsable des droits a un emploi dutemps chargé. Sur son stand, il a rendez-voustoutes les demi-heures avec des éditeursétrangers (directeurs de maisons d'édition,responsables éditoriaux, responsables de col-lections). Il dispose d'une demi-heure pourcerner ce que son interlocuteur recherche etpour lui présenter une sélection de livres quipourraient plus spécialement l'intéresser. Leresponsable des droits sera plus efficace s'il alu les livres. Il doit aussi connaître les collec-tions et les auteurs de la maison étrangère.Pour tel livre, il mettra en avant le nombred'exemplaires vendus en France, tel ou telprix littéraire décerné à l'auteur, l'accueilpositif de la presse ou les maisons étrangèresqui ont déjà acquis les droits.

De nombreuses maisons ont des affinités plusou moins grandes entre elles. Un éditeur quirencontre un confrère étranger découvriraqu'ils publient plusieurs auteurs en com-mun. Par la suite, l'éditeur sera plus attentifà la production de ce confrère étranger etplus enclin à publier les livres qu'il lui recom-mande. Il existe des liens forts entre certainesmaisons d'édition. L'Ecole des loisirs etFukuinkan Shoten au Japon, par exemple.Gallimard Jeunesse publie de nombreuxauteurs et illustrateurs d'Andersen Press enAngleterre tels que Tony Ross, Michael Fore-man ou Buth Brown.Ces liens sont d'autant plus serrés que les

responsables éditoriaux sont dans une mai-son depuis longtemps et ont eu le temps dedévelopper des relations avec des éditeursétrangers. Les responsables éditoriaux sontprésents dans les foires pour acheter desdroits mais ils peuvent aussi présenter leurspropres créations aux maisons étrangères.Les liens qui se tissent peu à peu entre lesmaisons étrangères sont parfois réciproques.En dehors des foires, les maisons d'éditionentretiennent des contacts tout au long del'année, à l'occasion de voyages ponctuels.Les auteurs eux-mêmes sont quelquefois pré-sents sur les foires et peuvent ainsi aider leuréditeur à vendre les droits de leurs livres.Les maisons d'édition s'appuient aussi surdes « scouts » (prononcé « scaowts »). Lesscouts ont un rôle de conseiller littéraire àl'étranger. Basés dans un pays, ils sont char-gés de repérer les livres qui paraissent et quiseraient susceptibles d'intéresser leur mai-son. Pour cela, ils perçoivent un honorairemensuel. Ils font un véritable travail dedéfrichage et, grâce à leurs conseils et leursrapports de lecture, ils permettent à leurmaison d'être en première ligne pour acheterles droits d'un livre. Cependant, les scoutstravaillent quasi exclusivement sur les livrespour adultes. Souvent les grands éditeursfrançais ont des scouts aux États-Unis, lesgrands éditeurs allemands et italiens ont desscouts en France, etc. Mais il n'y a pratique-ment pas de scouts s'occupant de livres dejeunesse. C'est probablement que la concur-rence est moins importante que pour leslivres pour adultes... et que les droits sontmoins élevés.

Les agents littéraires en France sont en majo-rité des « co-agents » : ils représentent desmaisons d'édition étrangères (ou des agentsétrangers) et sont chargés de gérer les droitsde langue française des auteurs de ces mai-sons étrangères. Les agents se rendent égale-ment à la Foire de Bologne et à la Foire deFrancfort où ils rencontrent les éditeurs et les

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traducteur chercheur pour qui la traductionest en fait une activité finale : au courant dece qui se publie dans un ou plusieurs pays, illit puis propose. Ce très long travail derecherche, qui n'est payé que par une traduc-tion occasionnelle3, est rarement possible : ilexige un goût prononcé pour l'étude, unaccès aux sources et aux informations que letraducteur doit souvent payer de ses propresdeniers et de son temps, conditions pratique-ment incompatibles avec une activité régu-lière de traducteur. Quant au « bon texte » àtraduire, c'est volontiers que je le définiraispar la négative : il ne peut s'agir de cestextes de pédants de la littérature qui neveulent donner aux enfants que ce qu'ilspensent comme devant au mieux leur conve-nir (d'où des textes incompréhensibles), oude pédagogues qui veulent bannir le non-sens de l'esprit de l'enfant (oublieux quel'imaginaire est une donnée fondamentale dela formation de l'esprit), ou de ces vieillesdames qui pensent que, puisqu'il est avéréque les enfants sont petits, il faut écrire àgenoux .̂ Positivement : il n'y a rien de tropbeau pour les enfants, mais il convient ausside les emmener dans les arcanes d'une viesociale où les réalités de l'autre sont paral-lèles aux leurs, de même qu'il y a une uni-versalité de l'esprit, il y a une universalitédu vécu de l'enfant (diachronique et syn-chronique).

La vérité du traducteur est, à sa manière,complexe et n'a pas fini de faire couler del'encre. Rappelons, à l'encontre d'une idée

reçue, et tenace, qu'une traduction repro-duisant à l'identique toutes les qualités del'original est impossible - elle n'est tout sim-plement pas souhaitable - et que donc la« traduction » d'une œuvre n'est jamaisachevée. Que signifie pour le traducteur lebout de phrase parfois ajouté à la fin d'unarticle de critique par un critique qui veutjuger de la qualité d'une traduction (et fairegentiment plaisir à son auteur) : « bonne tra-duction » ? Parcimonieusement distribuée,la formule peut, dans un premier temps,combler d'aise le traducteur qui, commetout un chacun, est avide de compliments,et, dans un deuxième temps, le plonger dansune mer d'interrogations : a-t-il été, pourmériter ce compliment, trop formaliste ou àl'inverse trop libéré, à moins qu'il ait su setenir en équilibre sur le filin tendu entre lesdeux chaises éloignées de la langue de départet de la langue d'arrivée. La traduction estun art du doute, un art du tourment (ce enquoi elle est un art). Assis donc entre deuxchaises, le traducteur, tour à tour philo-logue, styliste, historien, etc., n'est cepen-dant ni une machine à traduire ni une sage-femme. Et pourtant il doit « saisir » un texteoriginal d'une manière quasi mécanique etlui garder sa tonalité, son rythme, l'air entreles mots et, à l'autre bout, faire que sontexte soit reconnu cliniquement viable dansla langue d'arrivée. Quel labeur ! Un brefpassage du Faust donne l'idée d'un travailqui exigerait des pages pour le décrire''.Après une promenade hors de la ville avec

3. Une enquête effectuée au cours du second semestre de 19% à laquelle ont répondu 31 traducteurs delittérature pour la jeunesse membres de l'Association des Traducteurs Littéraires de France (ATLF)signale que la traduction des albums est essentiellement rémunérée au forfait avec une rétribution variantde 600 à 3000 francs « pour des longueurs de texte similaires ». Les romans sont rémunérés au feuillet(1500 signes) : généralement 100 francs le feuillet, sans grande distinction de langues, avec des droits pro-portionnels souvent limités à 0,5%. Voir François Mathieu : « Traduire pour la jeunesse : un état deslieux », Translittérature, été 97, n°13 (ATLF et ATLAS, 99 rue de Vaugirard, 75006 Paris).4. Luiselotte Enderle : Erich Kàstner mit Selbstzeugtiissen und Bilddokumenten (Erich Kàstner, auto-témoignages et documents iconographiques), Reinbeck, 1989. Citation d'Erich Kàstner.5. Ce même numéro de Translittérature en partie consacré à la traduction de la littérature pourl'enfance et la jeunesse publie plusieurs journaux de traducteurs.

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préhension mutuelle entre des points de vuesouvent très différents, celui de l'éditeurd'origine et celui de l'éditeur français. Lescontrats précisent généralement que l'édi-teur ne doit pas modifier le titre, le texte etles illustrations sans l 'approbat ion del'ayant droit. Mais un livre a quelquefoisbesoin d'être adapté pour avoir toutes seschances sur le marché français. Parexemple, les traductions de l'anglais vers lefrançais rallongent le texte d'environ 20%.L'éditeur français peut souhaiter pratiquerdes coupes dans le texte original pour res-pecter les impératifs d'une collection (lon-gueur, format). L'agent doit convaincrel'éditeur étranger et l'auteur du bien fondéde la position de 1 éditeur français.Cela peut parfois poser des cas de conscienceà l'agent. Dans quelle mesure faut-il respecterles intentions et l 'œuvre originale deFauteur ? Dans quelle mesure faut-il adapterun livre pour qu'il touche un public aussiimportant que dans son pays d'origine ? Lecas de l'édition américaine du Monde deSophie de Jostein Gaarder est un bonexemple de ces difficultés. Un traducteur arécemment révélé que dans l'édition améri-caine, publiée par le prestigieux éditeur Far-rar, Straus & Giroux, toutes les citations etallusions empruntées aux auteurs majeursenseignés à l'école en Norvège avaient été sup-primées et remplacées par des références plusconnues des Américains. Le journaliste duFrankfurter Allgemeine Zeitung qui relatecette affaire1, indique que la traductrice « avoulu créer un sentiment de familiarité chezdes lecteurs dont elle pensait qu'ils neconnaissaient que leurs propres traditionsculturelles et linguistiques. » Mais « l'œuvrequi mettait en lumière le pouvoir du question-nement comme créateur de culture a étéréduite d'une façon si partiale qu'il n'y a plus

de questions. Gaarder déclare ne rien avoir sudes modifications et condamne l'éliminationdu contexte original (...). » L'article indiqueégalement qu'un million d'exemplaires ont étévendus en Amérique du Nord [et 1,3 milliond'exemplaires vendus en France]. Cependant,le plus souvent, loin de provoquer des conflitsentre Fauteur et sa maison d'édition étran-gère, ces questions se règlent préalablement àla publication, avec l'accord de l'auteur.

La situation des livres de jeunesse en Francea évolué ces dernières années. Il n'existe pas 'de chiffres sur la part des traductions dans laproduction totale de livres de jeunesse enFrance, mais l'on remarque une nette dimi-nution des traductions depuis une quinzained'années. C'est peut-être qu'en période decrise les éditeurs ont tendance à réduire lenombre d'achats de l'étranger et à privilégierles auteurs français dont ils pourront exploi-ter l'œuvre plus largement. Mais c'est sûre-ment aussi qu'un nombre croissant d'auteurset d'illustrateurs français se distinguent parleur qualité et par leur innovation.Parallèlement, on observe l'accroissementspectaculaire des ventes de droits de livresfrançais à l'étranger depuis dix ans, notam-ment grâce aux documentaires de Gallimard

1. « Le Monde de Sophie et de l'Oncle Sam » in Courrier International, n°348 du 3 au 9 juillet 1997,Paris, p . 33.

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Jeunesse dont des séries entières ont étépubliées dans de nombreux pays (à titred'exemple « Mes premières découvertes » aété vendu dans 28 pays en l'espace de 4 ans).Depuis le milieu des années 1980, les auteurset illustrateurs français sont de plus en pluspubliés à l'étranger, même quelquefois auxEtats-Unis, résultat des contacts toujoursplus nombreux entre éditeurs, de voyages àl'étranger. Les ventes de droits entre payseuropéens se sont également beaucoup déve-loppées, et les pays asiatiques sont de plus enplus acheteurs de droits de livres français.

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Parallèlement, les éditeurs français tradui-sent des livres de jeunesse d'une plus grandevariété de langues, notamment d'Europe del'Est (depuis la chute du mur de Berlin), etdes pays asiatiques (Japon et Taïwan princi-palement). Les éditeurs français peuventavoir accès à ces livres en traduction dansd'autres langues. De nombreux livres Scan-dinaves, par exemple, sont traduits en alle-mand ce qui permet aux éditeurs français deles lire plus facilement. Le rôle des traduc-teurs est primordial. Grâce à des rapportsde lectures, des traductions d'extraits d'unouvrage ou d'un ouvrage dans sa totalité, ilsintroduisent ces auteurs auprès des éditeurset jouent ainsi un rôle important dans lapromotion de la littérature d'un pays. Ils

peuvent aussi être associés à titre de conseilaux décisions éditoriales. Pour des livres quiposent de réels problèmes de traduction, ladécision de publier ou non peut reposer surle jugement du traducteur.L'ouverture des éditeurs français à desauteurs de différentes nationalités et, réci-proquement, la plus grande présence deslivres français à l'étranger sont aussi duesaux incitations et aux aides publiques fran-çaises : accueil d'éditeurs et d'auteurs étran-gers au Salon du livre de Paris chaqueannée, présence de France-Edition sur lessalons à l'étranger, présence des livres pourenfants aux « Belles étrangères » pour lapremière fois en 1995, création d'un Salondu livre franco-britannique, par exemple,sont autant d'efforts qui petit à petit portentleurs fruits.

L'accroissement des échanges crée, dans leslivres pour enfants comme dans les livrespour adultes, un certain mimétisme : quandun livre a du succès, plusieurs éditeurs depar le monde essaieront de l'imiter. Mais ilest rare que le succès se reproduise à l'iden-tique. La qualité littéraire seule permettra àun sujet « local » de devenir universel. Au-delà du caractère particulier d'une histoire,le lecteur sera touché par la façon dontl'auteur ou l'illustrateur transmet un pro-blème universellement humain. LorsqueAllen Say - auteur et illustrateur américaind'origine japonaise - évoque les déchire-ments d'une identité partagée entre deuxcontinents, nul doute qu'il peut être comprisaussi bien en Afrique, qu'en Amérique latineou qu'en Europe. C'est sa façon unique derépondre à ces interrogations qui lui permetde traverser les frontières.

Les illustrations de cet article sont de Manu Boisteau, extraites de Livre publié au Seuil Jeu-nesse dans la collection Guide pratiquelUn métier en poche.

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