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M. R ahou Page 1 sur 24 Etudes de marché Pour universitaires I. Introduction aux études de marché II. Les réflexions préalables à l’étude II.1. Formulation du problème II.2. Etudes et analyses préliminaires II.3. Projet d’étude III. La démarché d’étude qualitative III.1. Les techniques individuelles III.2. Les techniques de groupe III.3. Les techniques associatives IV. Les études quantitatives IV.1. Préparation de l’échantillonnage IV.2. Construction du questionnaire IV.3. Administration du questionnaire IV.4. Analyse de données V. Le rapport d’étude V.1. Rédaction du rapport d’étude V.2. Présentation orale V.3. Evaluation de l’efficacité d’étude V.4. Prise de décision après le rapport VI. Conclusion Cette note de synthèse est une duplication synthétique de l’ouvrage « Les études de marché » d’Eric Vernette et Jean-Luc Giannelloni. Sur certains points, notamment techniques, le traitement ne sera pas assez détaillé. Le lecteur intéressé se rapportera, dans ce cas, à l’ouvrage indiqué. GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2 ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Enquêtes, sondages d’opinion, panels, baromètres…, largement popularisées et utilisées par les médias, tous ces termes font parti du vocabulaire de base des études de marché qui peuvent être définis comme suit : « Les études de marché ont pour objectif d’analyser les marchés de produits et de services de toute nature. Elles consistent en particulier à étudier de façon systématique le comportement, les attitudes et les opinions des personnes physiques et morales. ». On s’accorde sur la mise en relief de trois éléments caractéristiques retenus comme définition. Une étude de marché, c’est : 1. Un objectif, centré sur la compréhension et la résolution d’un problème de nature marketing ; 2. Le choix raisonné d’une ou de plusieurs techniques de collecte et d’analyse, cohérentes par rapport à l’objectif ; 3. Une valeur ajoutée caractérisée par la production et l’analyse d’informations utiles pour réduire les risques de décisions ultérieures. Pour résoudre correctement le problème formulé au départ, c'est-à-dire atteindre l’objectif, le responsable de l’étude doit suivre un itinéraire rigoureux. Le déroulement des opérations est rythmé en quatre grandes étapes que l’on peut schématiser ainsi : 1. Etape 1 : réflexions préalables à l’étude, pour comprendre la véritable nature du problème posé par le demandeur de l’étude, et pour choisir la démarche d’étude la plus adéquate ; 2. Etape 2 : collecte et rassemblement des informations nécessaires pour résoudre le problème, opération dénommé par les professionnels : terrain de l’étude ; 3. Etape 3 : analyse des données recueillis afin d’étayer les futures conclusions ; 4. Etape 4 : rédaction du rapport d’étude.

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Page 1: Les études de marché : Synthèse de l’ouvrage « Les études de marché » d’Eric Vernette et Jean-Luc Giannelloni

M. R ahou Page 1 sur 24

Etudes de marché Pour universitaires

I. Introduction aux études de marché

II. Les réflexions préalables à l’étude

II.1. Formulation du problème

II.2. Etudes et analyses préliminaires

II.3. Projet d’étude

III. La démarché d’étude qualitative

III.1. Les techniques individuelles

III.2. Les techniques de groupe

III.3. Les techniques associatives

IV. Les études quantitatives

IV.1. Préparation de l’échantillonnage

IV.2. Construction du questionnaire

IV.3. Administration du questionnaire

IV.4. Analyse de données

V. Le rapport d’étude

V.1. Rédaction du rapport d’étude

V.2. Présentation orale

V.3. Evaluation de l’efficacité d’étude

V.4. Prise de décision après le rapport

VI. Conclusion

Cette note de synthèse est une duplication synthétique de l’ouvrage « Les études de marché » d’Eric Vernette et Jean-Luc Giannelloni. Sur certains points, notamment techniques, le traitement ne

sera pas assez détaillé. Le lecteur intéressé se rapportera, dans ce cas, à l’ouvrage indiqué.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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I. Introduction aux études de marché

Enquêtes, sondages d’opinion, panels, baromètres…, largement

popularisées et utilisées par les médias, tous ces termes font parti du

vocabulaire de base des études de marché qui peuvent être définis comme

suit : « Les études de marché ont pour objectif d’analyser les marchés de produits et de

services de toute nature. Elles consistent en particulier à étudier de façon systématique le

comportement, les attitudes et les opinions des personnes physiques et morales.1 ».

On s’accorde sur la mise en relief de trois éléments caractéristiques

retenus comme définition. Une étude de marché, c’est :

1. Un objectif, centré sur la compréhension et la résolution d’un

problème de nature marketing ;

2. Le choix raisonné d’une ou de plusieurs techniques de collecte et

d’analyse, cohérentes par rapport à l’objectif ;

3. Une valeur ajoutée caractérisée par la production et l’analyse

d’informations utiles pour réduire les risques de décisions ultérieures.

Pour résoudre correctement le problème formulé au départ, c'est-à-dire

atteindre l’objectif, le responsable de l’étude doit suivre un itinéraire

rigoureux. Le déroulement des opérations est rythmé en quatre grandes

étapes que l’on peut schématiser ainsi :

1. Etape 1 : réflexions préalables à l’étude, pour comprendre la

véritable nature du problème posé par le demandeur de l’étude, et

pour choisir la démarche d’étude la plus adéquate ;

1 GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert, pp. 1-2.

2. Etape 2 : collecte et rassemblement des informations nécessaires

pour résoudre le problème, opération dénommé par les

professionnels : terrain de l’étude ;

3. Etape 3 : analyse des données recueillis afin d’étayer les futures

conclusions ;

4. Etape 4 : rédaction du rapport d’étude.

Figure 1 : Les quatre grandes phases d’une étude de marché

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Les études d’opinion, souvent dénommées à tort « sondages d’opinion »,

ne sont qu’une variété d’études, où le marché mesuré est celui de l’opinion

d’un public sur un sujet d’ordre politique, socioculturel ou moral. En

d’autres termes, le mot marché doit être accepté dans un sens très large : il

englobe tout aussi bien des produits ou des services, gratuits ou payants,

que des jugements de valeur propres à l’individu.

S’agissant de la fréquence des études de marché, ces dernières sont le plus

souvent associées à des études ponctuelles, notamment aux études ad hoc

et omnibus. Pourtant, les études de marché, dans leur acception large,

couvrent des typologies aussi bien ponctuelles que périodiques :

Baromètre : étude réalisée périodiquement, afin de suivre les

indicateurs d'un marché ;

Bottom-up : source « au niveau du terrain », constituée des

remontées des services commerciaux, SAV, réclamations, etc. ;

Étude ad hoc : étude ponctuelle réalisée pour un seul demandeur.

Souvent réalisée par une société de conseil ;

Marché test : étude ponctuelle pour le compte d'un seul client. On

enregistre des achats effectifs pendant une période dans une zone

délimitée ;

Étude multi-client : étude de marché sectorielle commercialisée

simultanément auprès de plusieurs clients. Ces études permettent de

disposer d'analyses sectorielles approfondies pour un budget

modeste ;

Omnibus : étude périodique, réalisée par une société de conseil pour

plusieurs clients. Chaque client achète une ou plusieurs question(s).

Le nombre de clients permet de diviser les coûts fixes, et l'étude leur

revient donc moins cher ;

Panel : échantillon permanent qui permet de suivre l'évolution du

marché. Il peut s'agir d'un panel de consommateurs ou d'un panel

distributeur.

Dans le même ordre d’idées, selon Ludovic Belz2 (consultant et formateur

français en marketing), de façon schématique, dans le cadre d’une

entreprise développant et commercialisant un produit ou un service, les

études de marché ou d'opinion (EMO) interviennent en amont durant les

phases de recherche, pendant les phases de conception-développement, et

durant la phase de commercialisation.

Figure 2 : Types des EMO selon le processus de développement des produits

2 Cité par : http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tude_de_march%C3%A9

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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A coté, il existe d’autres natures des études marketing telles que : les

études sectorielles, analyse des coûts, étude des prix des concurrents,

études de marchés potentiels, marché témoin, études de canaux, études

médias, tests de messages, études d’image, études de segmentation, études

de fidélité et préférence.

Une étude réalisée auprès de 587 entreprises des Etats Unis montre que

les sociétés de conseil interviennent surtout pour l’évaluation des marchés

potentiels, les études publicitaires et le comportement d’achat du

consommateur. Les services d’études internes réalisent de leur coté la

quasi-totalité des études de prix et de distribution3.

3 KINNEAR T.C. et ROOT A.R., (1989), 1988 Survey of Marketing Research, American Marketing Association, Chicago, Illinois, p. 43. Cité par : GIANNELLONI J.L et VERNETTE E, (2001), Op. Cit., p. 57.

II. Les réflexions préalables à l’étude

Le novice sous-estime généralement l’importance de ces phases

préparatoires, au détriment des opérations de collecte et d’analyse des

informations. Pourtant, le chargé d’études confirmé sait, par expérience,

que ces trois étapes sont déterminantes pour la réussite globale du

processus.

Les réflexions préalables à l’étude se fondent sur trois étapes

séquentielles : (i) le chargé d’étude commence par démêler le problème

posé par le demandeur, pour en cerner la véritable nature. (ii) Puis il fait le

point sur les informations déjà disponibles et les analyse afin d’affiner son

jugement. (iii) Enfin, le projet d’étude, véritable plan de manœuvre, doit

être rédigé. Ce document précise notamment la démarche de la future

étude qui, selon la nature du problème initial, opte pour une approche

qualitative ou quantitative et, parfois, combine les deux, et on a :

II.1. Formulation du problème

L’adage voudrait qu’un problème bien formulé soit déjà à moitié résolu,

c’est d’ailleurs pourquoi bon nombre de problèmes, exprimés parfois de

manière vague, ne sont finalement pas résolus de manière satisfaisante. En

fait, la plupart du temps, le problème est clairement posé, l’objectif d’étude

est apparent. Le cas échéant, le chargé d’étude peut directement passer à la

troisième phase, c’est-à-dire, la rédaction du projet d’étude, s’il dispose de

toutes les informations nécessaires. Mais dans le cas contraire, il doit,

préalablement à la rédaction du projet, conduire des études préliminaires

afin d’arriver à la définition du problème à résoudre et à la compréhension

de l’objectif de l’étude.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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II.2. Etudes et analyses préliminaires

Les travaux préliminaires ne sont généralement guère appréciés par les

demandeurs ou les chargés d’étude. Les premiers pas toujours convaincus

de l’utilité de l’opération, considèrent qu’il s’agit là d’une source de retard

imputable, à l’inexpérience du réalisateur de l’étude. Les seconds, plus

favorables à cette perspective, seraient prêts à y consacrer le temps

nécessaire, mais les contraintes de leur planning militent pour une

réduction, voire une suppression de ces travaux préalables.

L’étude préliminaire facilite la compréhension du problème et suggère des

directions pour des investigations ultérieures. Cette étape peut donc se

révéler une charnière importante pour la formulation du problème et la

remise du projet d’étude :

Les discussions avec le commanditaire de l’étude permettent de

cerner les axes majeurs de l’investigation et faciliteront la rédaction

du projet d’étude ;

L’analyse documentaire fait un point rapide sur les informations

disponibles, pour éviter de rechercher à grands frais des informations

déjà existantes ou pour comprendre rapidement les traits majeurs de

l’environnement d’un marché ;

Les panels4 offrent une multiplicité d’informations sur les

comportements d’achat, la position concurrentielle des marques et la

connaissance de leurs marketing-mix respectifs et dans bon nombre

de cas, une analyse approfondie de leurs résultats rend superflue une

autre étude. Mais, dans d’autres situations, les informations

4 Un panel est un échantillon permanent (individus, consommateurs, entreprises…) représentatif de l’unité étudiée et qui est interrogé régulièrement sur un sujet particulier.

disponibles sont insuffisantes ou inadaptées aux préoccupations de

l’entreprise. Les travaux préliminaires servent alors de fondations

pour l’élaboration du projet d’étude.

II.3. Projet d’étude

L’élaboration du projet d’étude représente la dernière phase avant le

démarrage de l’étude proprement dite. Elle concrétise les réflexions et les

investigations préliminaires. La rédaction de ce document conduit à de

nombreux choix :

La première décision a trait à la responsabilité de la conduite de

l’étude. Celle-ci peut être effectuée par une organisation (entreprise,

administration, collectivité locale) ou être confiée à un institut

spécialisé. Dans ce dernier cas, on procède généralement à un appel

d’offres pour mettre en concurrence les différents fournisseurs ;

Le chargé d’étude doit déterminer si les futures investigations

ressortent de la recherche marketing ou sont du domaine de l’étude

de marché. En réalité, toutes les deux doivent se plier aux mêmes

règles contraignantes de vérification de fiabilité et de validité, elles se

diffèrent néanmoins en termes de finalité. La recherche s’évalue par

sa contribution à la progression des connaissances dans la discipline

marketing, dans un strict respect des exigences de la démarche

scientifique. La valeur ajoutée d’une étude réside dans sa capacité à

apporter une réponse simple et efficace aux questions marketing

initiales5 ;

5 Le cas échéant, celle-ci se fonde sur des aspects théoriques simplifiés, ou adapte des instruments (méthodes, mesures) élaborés par les chercheurs marketing. En outre, la recherche marketing tient compte des travaux antérieurs : elle situe clairement le travail

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Pour résoudre le problème posé, le responsable de l’étude doit

choisir, ou parfois combiner, une approche qualitative ou

quantitative. Chaque option comporte des conséquences

méthodologiques importantes, puisque la taille des échantillons

nécessaires, la nature des interrogations, les méthodes d’analyse des

informations sont sensiblement différentes. Ce clivage est

suffisamment fort pour que les sociétés de conseil en études de

marché se présentent comme spécialistes de l’une ou de l’autre ;

Tableau 1 : Approche qualitative ou quantitative ?

OBJECTIFS PRINCIPALE

HYPOTHESES LIMITES

METHODOLOGIQUES

Approche qualitative

Apprendre un vocabulaire, recenser des caractéristiques d’un produit ou d’une marque. Explorer un secteur d’activité inconnu (concurrents, distributeurs, etc.). Identifier les grandes dimensions d’un problème. Formuler des hypothèses. Interpréter le sens d’un discours ou d’un acte. Comprendre l’origine des forces qui poussent à l’action (motivations).

Approche en profondeur L’individu ne connait pas les raisons de ses décisions, le discours est stéréotypé, rationalisé (réponses conventionnelles). Approche en surface Rôle des signes marqueurs, du sens latent : importance du contexte. Rôle de l’inconscient Le « non-dit » est important (silence, regard, lapsus, etc.). Neutralité de l’enquêteur Non directivité des questions : soutien par des relances.

Généralisation des résultats Non représentativité de l’échantillon : taille d’échantillon réduite, analyse des résultats (souvent) manuelle. Validité des techniques utilisées Rarement précisée (ou vérifiée) : interprétation des données variables selon l’analyste.

entrepris dans son arrière-plan théorique, puis précise l’apport de la recherche entreprise. L’étude marketing ad hoc utilise rarement les résultats des études antérieures, considérant que ceux-ci sont souvent périmés, l’environnement ayant évolué.

Approche quantitative

Evaluer des attitudes, comportements. Pondérer des variables. Associer ou regrouper différentes variables. Visualiser géographiquement des individus, marques.

Possibilité de mesurer, contrôler, paramétrer toutes les erreurs, construire un instrument de mesure adéquat. Possibilité de généraliser : respect des exigences statistiques, reproductibilité des résultats observés.

Qualité des réponses : rationalisation, respect des normes sociales, capacité à se souvenir, réponses au hasard. Qualité du plan de sondage : contrôle des variables exogènes, influence de l’enquêteur et du mode de collecte sur les réponses fournies.

Enfin, le contenu d’une proposition d’étude doit être arrêté. La

proposition est le projet d’étude envisagé par un institut pour le

compte d’un client, à partir des réflexions et discussions préliminaires

entre les partenaires. Ce document correspond à un devis détaillé

formulé par écrit, qui, en cas d’acceptation, engage contractuellement

la société d’études et son client. Il doit contenir pratiquement : les

objectifs d’étude, les choix méthodologiques (phase de collecte et

d’analyse de données), les prestations et analyses fournies au niveau

du rapport, le coût global de l’étude, le délai de réalisation de l’étude,

les modalités de règlement et enfin les dispositions diverses (noms et

qualités des responsables de l’étude, garanties relatives à la qualité de

l’institut, clauses de confidentialité, etc.).

Les principales décisions qui doivent être prises avant le démarrage effectif

d’une étude de marché concernent donc l’adoption d’une démarche

d’investigation et le choix d’une approche méthodologique. C’est sur ces

bases que la rédaction du projet d’étude est réalisée. Cette dernière tâche

marque la fin des travaux préparatoires avant de passer aux phases de

terrain et d’analyse des données.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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III. La démarché d’étude qualitative

Les techniques d’investigation qualitatives sont suffisamment spécifiques,

tant dans leur façon de recueillir les informations que dans l’analyse des

données, pour que la plupart des instituts d’études indiquent s’ils se

considèrent comme spécialistes de cette approche.

Nées aux Etats-Unis dans les années 1940, sous la conduite d’Ernest

Dichter6, les premières études qualitatives appliquées aux problèmes de

marketing ont été baptisées « études de motivation ». Leur utilisation s’est

développée de manière spectaculaire dans les années 1950 à 1970, puis a

lentement décliné jusqu’au milieu des années 1980, probablement en

grande partie parce que les praticiens « qualitatifs » ne sont guère sentis

concernés par la nécessité de valider leurs techniques, à la différence des

partisans de l’approche quantitative.

Depuis le début des années 1990, la famille des techniques qualitatives

connait un net regain d’intérêt. Celui-ci peut s’expliquer par la plus grande

sensibilité des praticiens vis-à-vis de la vérification de la fiabilité et de la

validité de leurs instruments. En outre, les logiciels informatiques

permettent maintenant de traiter quantitativement le vocabulaire d’un

discours, de représenter graphiquement des associations d’idées, etc.

Une des caractéristiques majeures de la démarché qualitative est sa nature

exploratoire. C’est le cas par exemple, lorsque l’on aborde un domaine

inconnu (marché, produits, consommateur, environnement, etc.). Ce type

6 DICHTER E., "Psychology in market research", Harvard Business Review, 25, été 1947, pp. 432-443 ; DICHTER E., (1960), The strategy of desire, Doubleday, New York. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 84.

d’approche permet de dégrossir un problème en identifiant et en recensant

ses différentes composantes.

Dans un même ordre d’idée, l’étude qualitative cherche aussi à

comprendre la nature des forces susceptibles d’expliquer un

comportement : motivation et frein pour l’achat d’un produit ou d’une

marque. Par abus de langage, certains réduisent les études qualitatives à

l’étude de motivation. Même s’il est fréquent, le tableau 6 montre bien que

cet objectif est loin d’être unique. En termes d’outils, les grandes familles

de techniques qualitatives se présentent ainsi :

III.1. Les techniques individuelles

Elles permettent d’interviewer ou d’observer séparément différents

individus et constituent un outil incomparable pour mieux comprendre les

ressorts d’une décision humaine. Ces techniques d’investigation trouvent

leurs racines théoriques dans la psychanalyse ou « psychologie des

profondeurs » dont l’objet principal est la compréhension de la vie

psychique de l’individu.

Les techniques individuelles s’intéressent prioritairement au « pourquoi »

d’un comportement d’une personne, c’est la raison pour laquelle, par abus

de langage, ces techniques sont souvent dénommées « études de

motivation ». On en distingue entre :

III.1.1. L’entretien en profondeur

Il existe trois principes de conduite d’un entretien en profondeur : la non

directivité pure, la semi-directivité et l’investigation « papier crayon » :

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Tableau 2 : Les différentes formes d’entretien en profondeur

CARACTERISTIQUES ENTRETIEN NON

DIRECTIF ENTRETIEN

SEMI-DIRECTIF ENTRETIEN

PAPIER-CRAYON

Thèmes d’études privilégiés

Motivations, pulsions, inhibitions. Représentations, symboles.

Motivations, freins. Recueil d’éléments d’image de marque. Usage réel d’un produit.

Recueil d’éléments d’image de marque. Usage réel d’un produit.

Attitude enquêteur Compréhension. Ecoute totale. Neutralité encourageante.

Bienveillance. Relance progressive. Orientation thématique.

Bienveillance. Relance thématique. Liste précise de thèmes.

Support d’interview Magnétophone. Interrogations fondées sur un schéma « clinique ».

Magnétophone. Guide d’entretien.

Stylo. Guide répertoire.

Avantages Fondations théoriques solides fournissant un cadre explicatif du discours.

Interview plus « maniable ». Bonne adaptation à un contexte marketing.

Grande flexibilité de l’interview. Formation rapide des enquêteurs.

Inconvénients Formation de « cliniciens ». Adaptation à un contexte marketing ?

Formation spécifique des enquêteurs.

Investigation superficielle.

Echantillonnage 10-20 personnes. Profils variés.

20-30 personnes. Profils très variés.

30-50 personnes. Profils plus segmentés.

III.1.2. Les techniques d’observation

Parmi les modalités d’observations existantes, on distingue deux types

susceptibles d’être appliquées à un contexte marketing : (i) là où

l’observateur n’est pas repérable ; c’est le cas de l’observation sur un lieu

de vente avec une caméra cachée ou derrière une glace sans tain et (ii) où

l’observateur énonce au sujet son activité, puis cherche à se faire oublier.

La méthode des protocoles verbaux, où l’on demande au sujet de « penser

à voix haute », ou les capteurs électroniques destinés à mesurer les

réactions d’une personne, entrent dans cette deuxième catégorie.

Les domaines d’investigation où l’observation peut se substituer à

l’interview sont larges. Elle est particulièrement utile dans deux situations :

d’abord, l’observation est la seule méthode envisageable lorsque le langage

est incompréhensible par l’homme, par exemple pour l’étude des

comportements animaliers ou le suivi de très jeunes enfants. Ensuite,

l’observation est un mode d’approche original de l’activité humaine car

elle permet d’aller plus avant dans la compréhension d’un comportement,

notamment lorsque les techniques classiques d’interviews sont douteuses.

L’observation directe identifie des comportements complexes, tels que

ceux liés à la conduite automobile. De même, l’observation du

mouvement des yeux offre une voie intéressante pour déterminer quels

sont les éléments d’une publicité qui sont vus en premier. Cependant, dans

le domaine marketing, l’utilisation des méthodes d’observation pose le

problème de la subjectivité et difficulté d’interprétation : il est parfois

difficile de trancher entre ce qui s’est effectivement passé et ce qui a été

décodé par l’observateur (Ex : un consommateur s’arrête un instant

devant une tête de gondole où se trouve un produit en promotion.

L’observateur peut noter qu’il a été impressionné favorablement par

l’offre spéciale alors qu’en fait, l’arrêt n’était dû qu’à un besoin de repos).

Dans le cas de l’observation, plusieurs biais ont été identifiés. Les plus

courants sont l’effet de halo (l’observateur plaque un sentiment personnel

dominant sur l’ensemble des observations), l’effet de cobaye

(l’observateur tend à produire, chez les individus observés, des

comportements différents de ceux de la réalité) et l’effet de focalisation

de l’observateur sur les seuls faits saillants.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Sur le plan méthodologique, les différents outils d’investigation individuels

présentent un point commun : ils fondent leurs mesures sur l’étude de

chaque individu pris isolément. Les données obtenues grâce aux

interviews ou aux observations peuvent être directement attribuées a

chaque sujet. On cherche à éliminer, durant la collecte, les influences que

pourraient avoir l’entourage du sujet (amis, famille, etc.) sur les réponses

ou sur le comportement de l’individu.

III.2. Les techniques de groupe

Ces techniques procèdent d’une logique inverse à celles individuelles ; leur

démarche repose sur la collecte et l’analyse de données fournies par un

groupe d’individus. Les mesures obtenues prennent pour unité de base

l’ensemble des sujets et résultent des différentes interactions entre les

membres. En réalité, bon nombre de ces techniques reposent sur des

principes de collecte et des modes d’analyse similaires aux méthodes

individuelles : nous y trouvons des termes déjà connus, comme non

directivité, analyse de contenu, etc.

Il ne faudrait pas pour autant en conclure que l’approche suivie par les

techniques individuelles a été simplement transposée au niveau d’un

groupe. Cela tient à deux raisons : d’une part par ce qu’un groupe n’est pas

égal à la somme des éléments qui le compose ; des interactions entre

individus conduisent à des résultats différents, d’autre part, il existe des

principes et des hypothèses spécifiques à certaines techniques de groupe,

sans équivalent dans les méthodes d’entretien individuel.

Parmi les techniques de groupes, quatre d’entre elles sont particulièrement

adaptées aux études de marché : le focus groupe, le groupe nominal, le

groupe Delphi et le cercle d’influence :

Tableau 3 : Nomenclature des méthodes de groupe

TYPES DE

GROUPES PRINCIPES THEORIQUES APPLICATIONS ET

OBJECTIFS TAILLE –

DUREE

Groupe de discussion

Variante : Interview de

groupe

Non directivité de l’animateur. Projection de l’individu. Investigation non structurée.

Motivations et freins. Thérapie et groupe.

4 à 8 membres. 3 à 4 heures.

Non directivité de l’animateur. Plusieurs thèmes abordés.

Formulation d’hypothèses. Apprentissage d’un vocabulaire.

4 à 8 membres. 3 à 4 heures.

Groupe de réflexion ou Focus group

Variante : mini-groupe

Variante : groupe de créativité

Dynamique des groupes restreints. Investigation structurée. Un seul thème familier au groupe. Groupe familier avec le thème.

Recueil d’éléments d’image. Identification des axes d’un problème. Apprentissage d’un vocabulaire.

6 à 12 membres. 2 à 4 heures.

Alternance de phases non structurées et structurées. Groupe familier avec le thème.

Recherche d’idées et de solutions. Motivations et freins.

3 à 4 membres. Demi-journée à journée complète.

Expertise des membres réduite. Investigation non structurée.

Recherche d’idées et de solutions.

5 à 10 membres. 1 à 2 jours.

Groupe nominal

Dynamique des groupes restreints. Réduction de la pression vers la conformité. Investigation très structurée. Phases de groupe et individuelles. Un seul thème familier par groupe.

Génération de critères de choix d’un produit. Recueil d’éléments d’image. Recherche d’idées.

8 à 12 membres. 3 mois. Plusieurs étapes.

Groupe Delphi

Prévision par l’expertise. Recherche d’un consensus. Forte expertise des membres. Investigation très structurée.

Prévision à long ou moyen terme (technologie). Evaluation d’image de marque et critères de choix.

8 à 12 membres. 3 mois. Plusieurs étapes.

Cercle d’influence

Théorie des réseaux sociaux. Sociométrie. Mesure de centralité et de cohésion. Influence réciproque.

Processus d’information et de formation des croyances. Thèmes et valeurs d’un groupe.

Très variable (une dizaine à plusieurs centaines de membres).

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Variante : Chat Room,

News Groups

Variante : méthode

Delphi-leader

Variante : monographie

familiale

Observation externe. Apprentissage du vocabulaire. Valeurs d’un groupe. Segmentation d’un marché. Choix de positionnement.

1 semaine à plusieurs mois.

Leadership d’opinion. Recherche d’un consensus entre les leaders par itérations successives.

Identification de critères de choix et évaluation d’image de marque.

8 à 10 membres. 1 à 2 heures.

Ethnométhodologie. Observation participante. Triangulation : entretien individuel et groupe.

Mesure de l’influence des membres sur les choix de marques de produits ou services. Observation des usages et pratiques de consommation.

Cellule familiale : 2 vagues d’interviews : Individuelles : 1h. Groupe : 1-2h.

L’utilisation des méthodes de groupe entant qu’instrument d’étude

exploratoire varie sensiblement selon les pays. Aux Etats-Unis, les études

qualitatives exploratoires sont pratiquement toujours des réunions de

groupe du type focus-groupe : la part des entretiens qualitatifs individuels

est très réduite. En France, la répartition est à peu près équilibrée entre les

méthodes qualitatives individuelles et les groupes. Mais le fait que ces

méthodes soient courantes et relativement simples à mettre en œuvre ne

doit pas faire oublier que leur champ d’application reste limité, sauf pour

la méthode Delphi, à un contexte exploratoire : apprentissage d’un

vocabulaire, étude d’un processus d’influence d’idées ou de

caractéristiques de marques, recensement des motivations, formulation

d’hypothèses, etc. A condition de respecter ces limites, les techniques de

groupe constituent un indéniable outil en faveur des études de marché.

III.3. Les techniques associatives

Il s’agit là d’autres formes d’études qualitatives, moins utilisées que celles

exposées précédemment, mais qui offrent une approche originale et

stimulante du marché.

Elles sont appelées techniques associatives par ce qu’elles cherchent avant

tout à établir des relations entre différents éléments, grâce à divers

supports, tels que mots, objets, dessins, photos. Le raisonnement par

analogie7 est souvent utilisé par les méthodes associatives qui s’articulent

autour de deux branches :

III.3.1. Les techniques projectives

Elles ont été initialement appliquées aux études de marché vers 1950, par

Mason Haire8. Leur objectif consiste à faire remonter à la surface les

pulsions d’un individu pour expliquer son comportement. Elles reposent

sur l’hypothèse que, devant une situation donnée (achat ou autre),

l’interviewé interprète les informations en se fondant sur ses propres

préoccupations, besoins et valeurs, généralement inconscients. Le test

projectif est donc « comme un rayon X qui, traversant l’intérieur de la personnalité,

fixe l’image du noyau secret de celle-ci sur un révélateur (passation du test) et en permet

ensuite une lecture facile par agrandissement (…) Ce qui est caché est ainsi mis en

lumière ; le latent devient manifeste ; l’intérieur est amené à la surface.9 ».

7 Le raisonnement par analogie est à la base de nombreuses théories et découvertes scientifiques. Une analogie est un rapprochement entre deux éléments distincts, mais présentant des ressemblances. En observant un phénomène, le chercheur émet l’hypothèse que ce qui se passe dans un domaine connu pourrait s’appliquer à un domaine inconnu. Le raisonnement par analogie met donc en œuvre des séries d’associations, plus ou moins hasardeuses et surprenantes, pour déboucher sur une idée nouvelle : stimuler la créativité. 8 HAIRE M., "Projectives techniques in marketing research", Journal of marketing, octobre 1950, n°14, pp. 649-656. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 160. 9 ANZIEU D. et CHABERT C., (1992), Les méthodes projectives, PUF, Coll, Le psychologue, 9ème Edition, pp. 17-18. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 160.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Les techniques projectives se caractérisent par l’ambigüité de matériel

(questionnaires, images, dessins, etc.) ou des situations (histoires,

événements, etc.) proposées aux répondants et par l’extrême liberté de

réponse qui leur est offerte. Le matériel est soigneusement standardisé et

présenté dans un ordre identique d’un sujet à l’autre. L’interviewer se

limite à l’exposé de la situation de travail, à la fourniture des documents et

à l’enregistrement des réponses.

III.3.2. Les techniques de créativité

Dans un contexte de marché difficile (forte concurrence, conjoncture

défavorable), les méthodes classiques conduisent parfois à des

recommandations à faible valeur ajoutée ou banales. La production de

solutions originales ne peut être fournie que par des méthodes

fonctionnant hors des sentiers battus. Bref, ce sont les techniques de

créativité qui favorisent la venue de « bonnes idées ». La recherche de

nouveaux produits et la communication publicitaire en sont les champs

d’application privilégiés. D’autres secteurs d’application sont possibles :

Tableau 4 : Domaines d’application des techniques de créativité

DOMAINES D’APPLICATION PRINCIPALES METHODES DE

CREATIVITE UTILISABLES

Création de nom de marque, nom de société, logos

Brainstorming, analogies.

Recherche de nouveaux produits, services, packaging

Brainstorming, matrices de découvertes. Analyse fonctionnelle, morphologique.

(Re) positionnement de produits ou marques

Brainstorming, analogies, rêve éveillé.

Communication (axe et thèmes publicitaires, PLV, jeux et concours…)

Toutes méthodes possibles.

Techniques de ventes (argumentation, supports de vente)

Toutes méthodes possibles.

Distribution (nouveaux canaux, agencement des points de vente)

Brainstorming, rêve éveillé. Matrice de Moles, analogies.

Pour conclure, le caractère original des méthodes projectives et créatives

les réserve à deux cas de figures : (i) pour formuler des hypothèses sur les

mécanismes d’achat du consommateur et (ii) servir de cure d’oxygénation

de l’esprit, afin de renouveler une vision trop usée du marché.

III.3.3. Les techniques de recherche du sens

Dernière famille des méthodes qualitatives, les techniques de recherche du

sens misent sur la découverte du sens manifeste d’un « texte » à partir

d’analyses spécifiques. Le chargé d’étude pénètre alors dans un nouvel

univers des constructions et des interprétations. Bien que formant un

ensemble relativement hétérogène, elles partagent des points communs.

Ces approches considèrent qu’il n’existe pas de réalité objective, mais

plutôt des représentations multiples que les individus se construisent : le

chargé d’étude doit renoncer à la quête d’une vérité objective pour se

concentrer sur ce que les acteurs disent et font, et les manières dont ils le

disent et se comportent.

Les champs de représentation sont enchâssés dans ce que l’on appelle « le

texte », c'est-à-dire tout système d’expression linguistique, iconique,

gestuel, mélodique, etc. La différence entre les méthodes réside dans la

place qu’elles accordent au texte pour l’interprétation du sens :

1. Construction du sens à partir du « texte » : la sémiotique : cette

première famille considère que « tout est dans le texte ». La

sémiotique/sémiologie10 est utilisée depuis une trentaine d’années

10 Les frontières entre sémiotique et sémiologie n’est pas facile à établir. Certains considèrent que la sémiologie est restreinte à la compréhension d’une communication à

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comme technique d’étude de marché. Elle offre, en fait, des solutions

à de nombreuses interrogations marketing :

Tableau 5 : Domaines d’application de la sémiotique/sémiologie

APPLICATIONS

DE LA

SEMIOTIQUE

AU NIVEAU DE

LA STRATEGIE

MARKETING

Veille stratégique : l’étude de l’évolution des rapports d’activité publiés par les sociétés, sur une période de dix ans, a été réalisée à partir d’une analyse sémiotique. Le repérage des ruptures énonciatives des discours des dirigeants (éditorial, synthèse d’activité) a relevé des changements de cap stratégique et a permis d’anticiper les performances ultérieures des entreprises11.

Segmentation et positionnement : l’analyse du positionnement de marques de jeans, parfums, dentifrices ou d’eaux minéraux est explicable par la sémiologie. De même, cette technique a servi à comparer les positionnements concurrentiels d’Ikea et d’Habitat12.

APPLICATIONS

DE LA

SEMIOTIQUE

AU NIVEAU DU

MARKETING-MIX

Conception produit : la régie Métrobus de la RATP a conçu de nouvelles formes de supports publicitaires, à partir de l’analyse sémiotique des différents types de déplacements dans le métro13. La réflexion sémiotique permet d’évaluer le design d’un produit, de concevoir un packaging adapté aux attentes des consommateurs ou d’agencer un hypermarché14. La sémiotique joue un rôle central dans la construction du « Contrat de lecture » qui s’établit entre un titre de presse et son lectorat.

partir de l’analyse des signes ou des codes. La sémiotique poursuivrait une mission plus large, visant à élaborer une théorie de la signification : pour ce faire, elle embrasse toutes les formes signifiantes, les pratiques sociales ou les langages. Dans une acception élargie, la sémiotique intègre tous les types de signes : image, odeur, code du goût, geste, pratique, rite, mélodie, spectacle, architecture, etc. Il est à noter que sur le plan international, le terme anglo-saxon « semiotic » désigne indifféremment les deux domaines. 11 BITOUN C. et MAIER C., "La sémiologie au service de la prévision industrielle", Revue française du marketing, n°175, 1999/5, pp. 25-35. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 205. 12 SEMPRINI A., (1992), Le marketing de la marque, approche sémiotique, Edition Liaisons ; FLOCH J.M., (1995), Identités visuelles, PUF, pp. 145-179. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 205. 13 FRAENKEL B., et LEGRIS-DESPORTES C., (1999), Entreprise et sémiologie, Dunod, chap. 4, pp. 59-75. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 205. 14 MARECHAL F., "Pertinence de la sémiotique appliquée au design", Revue française du marketing, n°175, 1999/5, pp. 57-66 ; DANO F., "Contribution de la sémiotique à la conception des conditionnements", Recherche et Applications en marketing, 1998, pp. 9-29 ; FLOCH J.M., "La contribution d’une sémiotique structurale à la conception d’un hypermarché", Recherche et Applications en marketing, vol 4, 2, 1989, pp. 37-59. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 205.

Publicité et logos : la sémiologie a été appliquée, dès les années 1970, à l’évaluation de la création publicitaire15. De même, les logos d’Apple et IBM ont été comparés dans le but de repérer leurs oppositions et complémentarités16.

2. Interprétation du sens élargie au « hors-texte » : rhétorique,

l’herméneutique et la phénoménologie : pour ce second groupe,

le véritable sens doit être découvert à partir des interactions entre le

« hors-texte », c'est-à-dire le contexte, et le texte lui-même. Partant,

cette constellation de méthodes, si elle ne renie pas l’importance du

« texte » pour comprendre le sens, considère cependant qu’une étude

focalisée sur ce seul angle donnerait une interprétation du sens sujette

à caution. Il est nécessaire pour pallier ces défauts, d’étudier les liens

entre l’intention de l’émetteur et l’interprétation possible (l’effet

produit) sur le récepteur. Pour cela, la prise en compte de ce qui est

situé au-delà du « texte », le « hors-texte », est indispensable.

Les techniques de recherche de sens offrent un apport original, parfois

déroulant, dans la compréhension du processus de consommation d’un

produit ou d’un service. La richesse de cet éclairage permet au chargé

d’étude de découvrir de nouvelles perspectives pour décrire ou expliquer

le choix d’une marque ou pour orienter des décisions marketing :

segmentation, conception d’un produit, publicité, packaging, etc.

Lorsqu’il s’agit d’analyser les données issues des études qualitatives, voire

d’un discours (article, interview, document, etc.), le chargé d’étude fait

appel à une analyse de contenu, analyse transactionnelle, analyse textuelle

quantifiée… L’analyse du contenu repère dans un premier temps les

15 PENINOU G., (1972), Intelligence de la publicité, Edition R. Laffont. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 205. 16 FLOCH J.M., (1995), Op. Cit. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 205.

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catégories du discours, leur structuration et leur fréquence d’apparition.

L’analyse transactionnelle identifie ensuite, dans le cas d’une étude du

comportement des consommateurs, la nature des relations profondes qui

existent entre le consommateur et une marque : les besoins et désirs

latents sont décelés au travers de l’analyse des transactions simples ou à

double sens.

Elle conduit ainsi à des orientations utiles pour le positionnement d’un

produit, le choix d’un axe de communication ou la compréhension des

composantes d’une image de marque. De sa part, l’analyse textuelle

quantifiée est une technique d’analyse du discours fondée sur un

ensemble de statistiques textuelles qui enrichissent les résultats de l’analyse

du contenu. Les logiciels de traitement automatisé des textes ouvrent

aujourd’hui de nouvelles perspectives là-dessus.

IV. Les études quantitatives

Deuxième grande famille d’études, l’approche quantitative repose sur une

méthodologie plus structurée et rigide que sa concurrence qualitative. Les

phases de terrain et d’analyse de données sont plus facilement séparables.

Les techniques quantitatives reposent sur un plan d’échantillonnage, sur la

rédaction d’un questionnaire, véritable clé de voute de cette démarche, et

sur l’administration sur le terrain de ce questionnaire.

L’analyse des données s’appuie sur une vaste panoplie d’outils statistiques.

Toutefois, les calculs nécessaires, bien que parfois sophistiqués, ne doivent

pas perdre de vue que la quantification n’a d’intérêt que si elle repose sur

une compréhension correcte du marché, généralement obtenue après une

réflexion de nature qualitative. Pratiquement, une étude quantitative

s’articule autour de quatre phases :

IV.1. Préparation de l’échantillonnage

Dans une étude quantitative, nous nous intéressons à une certaine

catégorie d’« objets » : individus, automobiles, entreprises, etc. Pour les

études marketing « grand public », il est pratiquement impossible, pour des

raisons de coût et de délai, d’étudier tous les individus d’une population,

c'est-à-dire d’effectuer un « recensement ». La question initiale devient :

« Puis-je réaliser mon étude sur une petite partie de la population qui

m’intéresse, tout en obtenant des résultats qui me permettent de formuler

des conclusions à propos de cette dernière, et non de la petite partie ? ».

Pour que la réponse à cette question soit positive, il faut que la sélection

de la « petite partie », que l’on appelle « échantillon », soit faite de

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manière rigoureuse. Là-dessus, le chargé d’étude doit passer, grosso-modo,

par les étapes suivantes :

1. Définir la population à étudier : au niveau de cette première étape,

il s’agit donc de définir très clairement la population de référence ou

population cible, qui forme « l’ensemble des objets possédant les informations

désirées pour répondre aux objectifs d’une étude.17 ». Une fois la population

est définie, le chargé de l’étude fait un arbitrage entre un recensement

et échantillonnage : si la population est petite et facilement

identifiable, il est préférable de faire un recensement. Dans le cas

contraire, le chargé de l’étude procède à la définition du cadre

d’échantillonnage ;

2. Déterminer le cadre d’échantillonnage : la détermination du cadre

d’échantillonnage (en anglais sampling frame) est plus concrète

puisqu’elle consiste à se procurer ou construire une liste à partir de

laquelle les unités d’échantillonnage vont être recrutées ;

3. Choisir une méthode de tirage : dès lors que l’on dispose du cadre

d’échantillonnage, il s’agit de choisir la méthode de sélection de ces

unités. Deux familles de méthodes sont à disposition : celles qui font

appel au hasard appelées « probabilistes », et celles qui reposent sur

un choix plus ou moins structuré, appelées non probabilistes ou

« empiriques ».

Les premières nécessitent l’existence, ou la construction d’une liste

nominative et exhaustive de la population concernée. Le recours au

hasard implique que chaque élément de la liste ait la même

probabilité, connue à l’avance, d’appartenir à l’échantillon. Ceci

17 GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 229.

permet la généralisation valide des résultats par les méthodes dites

d’inférence statistique. Il faut avoir à l’esprit que de telles listes,

notamment pour les études en grande consommation, sont rarement

disponibles.

Les seconds s’affranchissent du besoin d’une liste de la population et

opèrent un choix plus orienté et pragmatique des éléments

composant l’échantillon. En contrepartie, la validité des calculs de

généralisation n’est pas garantie : malgré tout, parmi ces dernières, la

méthode des quotas est probablement celle qui préserve au mieux la

représentativité de l’échantillon.

4. Déterminer la taille de l’échantillon : la taille de l’échantillon se

détermine d’un point de vue théorique en s’appuyant sur le principe

d’inférence statistique définit comme « une logique de nature inductive qui

conduit à estimer la valeur de paramètres dans une population à partir de

résultats observés sur des statistiques d’échantillon.18 ».

Ce processus permet de généraliser à la population mère, à l’intérieur

de marges de fluctuation, un résultat (moyenne, fréquence, etc.)

observé dans l’échantillon. Dans ce sens, on peut dire qu’un gros

échantillon garantit une bonne précision de l’estimation statistique.

Notons que le principe d’inférence implique un tirage d’échantillon

aléatoire, car les méthodes empiriques d’échantillonnage n’autorisent

pas les calculs d’estimation nécessaires à la généralisation des

résultats.

La détermination de la taille d’échantillon dépend de deux facteurs

antagonistes : la précision souhaitée et le budget disponible. D’un

18 GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 245.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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côté, plus que l’on souhaite des résultats précis, plus l’échantillon

nécessaire est important. De l’autre coté, plus on augmente la taille,

plus le coût de l’enquête, notamment le terrain s’accroit. Enfin, les

propriétés des lois statistiques sous-tendent les principes de

l’estimation, nécessaires pour évaluer la taille qu’il convient de retenir

pour l’échantillon.

Après avoir choisi de manière raisonné un échantillon et calculer sa taille,

il est le temps maintenant de construire le questionnaire nécessaire au

recueil des informations.

IV.2. Construction du questionnaire

La préparation de la collecte des informations constitue l’étape clé du

terrain de l’étude. Cette phase dépend très étroitement de la définition des

objectifs de l’étude et, en conséquence, de ce que l’on cherche exactement

à connaitre et/ou à mesurer. Elle conditionne à son tour, la nature et la

validité des traitements que l’on effectue sur les données recueillies, avec,

en fin de compte, la possibilité ou non de répondre aux questions posées.

Cette étape se concrétise par la construction du questionnaire qui se

définit comme « un ensemble de questions construit dans le but de générer

l’information nécessaire à l’accomplissement des objectifs d’une étude.19 ».

La caractéristique primordiale d’un questionnaire est d’être un instrument

de standardisation de l’information collectée dans une enquête. Si la

démarche a été accomplie avec rigueur tout au long du processus, chaque

répondant verra et/ou entendra les mêmes questions. Les réponses, c’est-

19 GATES R. et MC DANIEL C., (1991), Contemporary Marketing Research, West Publishing Cy, p. 384. Cité par : GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Op. Cit., p. 252.

à-dire l’information recueillie, seront donc comparables pour l’ensemble

des répondants. La construction d’un questionnaire n’est pas une science

exacte mais, plutôt, un art établi sur quelques règles liées à l’expérience

acquise dans les recherches en sciences sociales :

IV.2.1. Les règles liées au fond du questionnaire

Elles se réfèrent en premier lieu au contenu des questions, c'est-à-dire à

l’information que l’on cherche à obtenir : « Que vais-je écrire dans le

questionnaire ? ». Le type (ou la forme) de la question correspondante est

un second critère : « Doit-on par exemple donner des choix de réponses

ou utiliser des échelles ? » :

Tableau 6 : Panorama des règles liées au fond du questionnaire

LE CONTENU

DES

QUESTIONS

Liste des informations à rechercher : les informations à recueillir dépendent directement des hypothèses et objectifs de l’étude. Le questionnaire sera construit à partir de cette liste des informations. Cette démarche permet de n’oublier aucune information importante tout en évitant les questions inutiles.

Nature des informations à rechercher : suivant les objectifs d’étude, généralement les résultats de la réflexion préalable à l’étude (théorie, modèles, questions de recherche, type d’étude, hypothèses de travail) on privilégiera la recherche de tel ou tel type d’information. En outre, on ne recueillie pas les mêmes données selon que l’on s’intéresse à une population d’individus, d’entreprises ou de marques.

Check-list du rédacteur : avant de formuler une question, le rédacteur doit la soumettre à quatre interrogations : « Cette question est-elle strictement nécessaire ? », « Pour l’information recherchée, une seule question suffira-elle ? », « La personne interrogée pourra-t-elle fournir l’information ? » et « La personne interrogée voudra-t-elle fournir l’information exacte ? ».

LE TYPE DES

QUESTIONS20

Les questions ouvertes : elles laissent l’individu interrogé totalement libre du choix de sa réponse, dans sa forme et sa longueur. Ce type de questions est à manier avec la plus grande précaution dans les enquêtes quantitatives où l’on tente de standardiser les questionnaires autant que possible.

20

En général, les chargés d’études novices préfèrent les échelles dichotomiques ou à choix

multiples. Les praticiens plus expérimentés ont un faible pour le différentiel sémantique et l’échelle de Likert.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Les questions fermées : sont des questions pour lesquelles on impose au répondant une forme précise de réponse et un nombre limité de choix de réponses. Trois types de questions fermées sont possibles selon le nombre de choix de réponses proposé et le nombre de réponses souhaité : Questions dichotomiques ; Questions à choix multiples ;

Questions multichotomiques à réponses multiples.

Echelles à catégories spécifiques : elles constituent une forme particulière des questions fermées et sont destinées à évaluer les prises de position sur des variables psychologiques. Ainsi, avec les échelles à catégories spécifiques, on identifie plus un comportement, ou une caractéristique socio-économique, mais, une croyance, une importance ou une intention, c’est pourquoi on les qualifie d’échelles d’attitudes. Celles-ci prennent des formes nombreuses et variées dont les plus couramment employées sont : Echelle de Likert ; Différentiel sémantique ; Echelle à supports sémantiques ; Echelles d’intention ; Autres échelles : l’échelle à somme constante et l’échelle à icones (smiling faces).

Une réflexion trop superficielle sur ces deux critères peut, au bout du

compte, limiter l’étendu des traitements statistiques applicables aux

données et, par conséquent, restreindre la portée des analyses que l’on

mènera sur le problème traité.

IV.2.2. Les impératifs de la forme du questionnaire

Les règles de forme ont trait, pour une part, à la rédaction proprement

dite du questionnaire. Les choix du vocabulaire et du style de rédaction

sont typiques de cette problématique. Par ailleurs, le chargé d’étude doit

réfléchir à la structure du questionnaire, voire à l’ordre dans lequel vont

apparaitre les différentes questions.

Enfin, un questionnaire ne saurait être achevé avant que l’on y ait inclus

un codage qui permettra à l’information recueillie d’être beaucoup plus

rapidement exploitée via un traitement informatique des données.

Tableau 7 : Revue sur les impératifs de forme d’un questionnaire

REDACTION DU

QUESTIONNAIRE

Vocabulaire utilisé Tout vocabulaire technique est, sauf cas particulier à éviter : sauf si l’étude est menée auprès de spécialistes. D’une manière générale, le jargon du marketing, du management ou de la production est également à proscrire. Tout vocabulaire ambigu est à bannir : c'est-à-dire tout mot ou expression dont la compréhension prête à confusion.

Style de rédaction : le style de rédaction est fréquemment source de biais, soit dans la compréhension des questions ou dans les réponses : Style et compréhension des questions : ici, il faut adopter un style direct (éviter les questions contenant une négation et s’interdire absolument d’employer des doubles négations) et bref (une question devrait rarement dépasser une ligne à une ligne et demi). Style et pertinence des réponses : le style peut directement influer sur la validité des réponses, selon le caractère direct ou non des questions. Ceci dit, pour des questions personnellement importantes, l’approche indirecte est donc souvent préférable. L’utilisation de termes neutres, ou de plusieurs questions indirectes, dont on déduit l’information recherchée, est un moyen de procéder.

STRUCTURE21 DU

QUESTIONNAIRE

Phase 1 : présentation de l’enquêteur et de l’enquête : la première chose à dire c’est bien sur « Bonjours Madame (Monsieur) ». La présentation se fait ensuite en quelques phrases. En principe, il est souhaitable de cacher le thème exact de l’étude, dès lors que l’annonce de celui-ci risque de provoquer un biais.

Phase 2 : questions d’introduction : le but de cette (ces) question (s) est de s’attirer les bonnes grâces du répondant et de l’intéresser au questionnaire qui va suivre. L’information fournie peut, et c’est le seul endroit « autorisé » dans le questionnaire, ne pas être utile.

Phase 3 : questions qualifiantes : elles n’ont lieu d’être que si l’on a besoins de savoir si l’individu possède l’information recherchée et servent d’aiguillage. Leur forme est plutôt dichotomique.

Phase 4 : questions de mise en route : elles servent à cerner progressivement le thème de l’étude, en commençant par des questions simples de comportement qui ne demandent pas, ou peu, d’effort de réflexion ou de mémoire de la part du répondant. Petit à petit, les questions deviennent plus complexes et/ou personnelles.

21 La méthode de structuration du questionnaire proposée est la technique d’entonnoir qui va du général simple au précis compliqué. Sur un autre plan, en dehors des 6 phases autour desquelles se structure un questionnaire, le rédacteur peut avoir recourt à des questions spécifiques qui nécessitent tout aussi une réflexion à propos de leur ordre d’apparition au niveau du questionnaire. Pour les étudiants curieux, il s’agit de s’informer à propos des questions « filtres » (branching questions, en anglais) et questions « pièges ».

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Phase 5 : questions spécifiques : elles doivent amener les informations les plus importantes pour l’étude. A ce stade, on peut demander au répondant des efforts de réflexion et/ou des informations personnelles et, d’une manière générale, tout ce qui a trait aux motivations, aux opinions, aux jugements personnels doit être inclus à cet endroit.

Phase 6 : questions d’identification (fiche signalétique) : elles décrivent les répondants. On peut utiliser deux critères d’identification : les variables socio-démographiques classiques (sexe, âge, profession…) et des éléments plus psychologiques (tels que les valeurs personnelles, l’implication pour la catégorie de produit, les traits de personnalité…). Cette partie fournit les informations qui serviront à classer les répondants en groupes distincts. En d’autres termes, il s’agit de variables de segmentation.

MISE EN PAGE

DU

QUESTIONNAIRE

Coté mise en page, cinq éléments nécessitent d’être rappelés : Aérer les questions ; Utiliser de temps à autre des symboles (Ex : attirer l’attention avec des caractères « Wingdings ») ; Soigner la typographie du texte : l’alternance des polices est possible mais ne doit pas être multipliée à l’excès (deux suffisent largement) ; Imprimer sur du papier de qualité, avec en-tête de la société ou de l’institut responsable du questionnaire ; Utiliser, le cas échéant, de la couleur : la quadrichromie valorise considérablement l’émetteur du questionnaire, mais conduit à une augmentation sensible des coûts de reprographie. L’impression bicolore est une solution intermédiaire souvent satisfaisante.

CODAGE22 DU

QUESTIONNAIRE

Coder la, ou les, variable (s) relative (s) à chaque question : chaque item, c'est-à-dire chaque proposition, est une variable. Les noms ou codes affectés aux variables sont choisis en fonction du goût du chargé d’étude, de leurs qualités mnémoniques ou des impératifs liés au logiciel de traitement statistique utilisé (Ex : contraintes sur le nombre de caractère)23.

Prévoir un code pour les « non réponses » : une « non-réponse » peut survenir dans diverses circonstances où le répondant refuse ou oublie de répondre à une question. Il faut donc prévoir une modalité de secours qui indique que l’information n’a pas pu être recueillie. Certains logiciels d’analyse statistique utilisent automatiquement le « 0 » (Ex : Sphinx).

Prévoir l’identification individuelle du questionnaire et de l’enquêteur : il peut être utile par sécurité, d’identifier chaque questionnaire par un numéro d’ordre. Cette identification peut être couplée à celle de l’enquêteur. On note également la date et le lieu exact où fut administré le

22 Le codage a pour objectif de faciliter la transformation des informations d’un état brut (telles qu’elles ont été fournies par les répondants) à un état qui permet leur traitement statistique. Inclure le codage dès la rédaction du questionnaire est une tâche délicate pour les débutants. La première difficulté vient de la distinction à opérer entre une question et une variable, c'est-à-dire, les propositions offertes pour chaque question. 23 Les questions sous forme de classements de préférence sont les plus difficiles à coder.

questionnaire. Ces informations servent de contrôler à postériori la qualité du travail effectué, et peuvent être utiles si l’on pense, par exemple, que certaines réponses varient d’un quartier à l’autre.

Prévoir l’identification de la personne interrogée : elle doit être faite avec précautions, car on déroge alors au principe d’anonymat qui est la règle en matière d’étude. En fait, l’identification précise de la personne interrogée n’est pas systématique mais peut également se justifier par : A nouveau, le contrôle des enquêteurs : si on dispose d’un nom et d’un numéro de téléphone, on peut vérifier que le questionnaire a bien été administré le jour dit et à la personne indiquée et comment il a été administré ; La nécessité éventuelle de devoir administrer aux mêmes individus plusieurs questionnaires, identiques ou différents, à des intervalles de temps espacés.

En réalité, la construction d’un questionnaire est une étape longue,

difficile et ingrate. Lorsque cette élaboration est achevée, on soumet le

questionnaire à l’échantillon retenu : c’est l’administration du terrain,

dernière phase du processus de collecte des données.

IV.3. Administration du questionnaire

Cette phase se décline en trois étapes : (i) prétest du questionnaire, (ii)

administration proprement dite ou méthodes d’intervention possibles et

(iii) les contrôles nécessaires pou vérifier la qualité de l’administration :

IV.3.1. Prétest

Le prétest permet de lever les ambigüités du questionnaire, de manière à

ce que celui-ci puisse être administré exactement de la même façon à tous

les individus de l’échantillon. Il peut se subdiviser lui-même en trois

étapes : un premier test auprès d’experts, un second auprès d’individus

appartenant à la cible, réalisé en face-à-face par des enquêteurs, et un

troisième dans les conditions exactes de l’administration définitive. A

chaque étape, les erreurs sont progressivement éliminées.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

Page 18: Les études de marché : Synthèse de l’ouvrage « Les études de marché » d’Eric Vernette et Jean-Luc Giannelloni

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Tableau 8 : Nature et mode de détection des erreurs

NATURE

DES

ERREURS

Mauvais choix de vocabulaire ou de style : les répondants ne comprennent pas ce que l’on attend d’eux et demandent fréquemment des explications à l’enquêteur. Le danger est alors double. D’un enquêteur à l’autre, les explications peuvent varier, ce qui revient à poser des questions différentes et rend donc les réponses difficilement comparables. Le second danger est celui d’une lassitude rapide : la personne ne demande plus d’éclaircissements et répond au hasard. C’est le cas notamment pour les questionnaires auto-administrés (sans enquêteur).

Mauvais choix de modalités de réponses : lorsque pour une variable donnée, 80% des réponses se concentrent sur une seule modalité « autre » ou « ne sait pas », on a affaire à cette situation. Il s’agit de réexaminer les résultats de la phase exploratoire, ou de songer à en faire une si cette étape a été éludée.

Erreurs dans la conception et la localisation des questions « filtres » : certains renvois ou aiguillages (vers des questions filtres) peuvent être inexistants ou erronés après une modification du questionnaire…

Manque de clarté des instructions d’emploi : ceci concerne surtout les questionnaires auto-administrés, notamment par voie postal. Si les instructions d’emploi ne sont pas claires ou pas complètes, le répondant risque de mettre très vite le questionnaire au panier. Le prétest avec enquêteurs est le seul moyen de repérer ce type d’erreurs.

MODE DE

DETECTION

DES

ERREURS

Méthode des protocoles verbaux : on demande au répondant de formuler à voix haute ses réactions et remarques à l’encontre du questionnaire tout en le remplissant. Si possible, ces réactions sont enregistrées pour mieux les analyser ensuite.

Technique du « debriefing » : le répondant remplie le questionnaire dans les conditions finales prévues de l’enquête. Puis on explique qu’il s’agit d’un prétest et on en indique les objectifs. Le répondant précise alors la signification de chaque question, explique ses réponses et expose les problèmes qu’il a pu rencontrer. L’enquêteur note sur le questionnaire l’essentiel des remarques formulées.

IV.3.2. Méthodes d’administration

Faut-il d’abord choisir la méthode, et rédiger ensuite le questionnaire, ou

l’inverse ? Les réponses théoriques et celles pratiques diffèrent en fait.

Alors qu’en théorie, le choix de la méthode d’administration dépend du

questionnaire, qui découle lui-même de l’information à recherchée

(objectifs de l’étude), en pratique, le budget alloué à l’enquête conditionne

souvent le choix du mode de collecte, ainsi que la taille de l’échantillon.

Figure 3 : Panorama des méthodes d’administration du questionnaire

Les enquêtes en face-à-face mettent en présence un enquêteur et le

répondant. On peut distinguer trois manières de procéder : les interviews à

domicile, les interviews dans la rue ou en sortie de caisse et les interviews

menés directement au moyen d’un ordinateur (système CAPI).

Les méthodes téléphoniques ont également bénéficié de cette assistance

par ordinateur (système CATI), sinon, les méthodes téléphoniques

classiques consistent à contacter téléphoniquement l’échantillon

sélectionné et à lui administrer un questionnaire (réponses notées au

crayon sur un exemplaire papier du questionnaire). L’enquête par

courrier est surtout exploitée dans les enquêtes sur panels.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

Page 19: Les études de marché : Synthèse de l’ouvrage « Les études de marché » d’Eric Vernette et Jean-Luc Giannelloni

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Le terme « enquête on line » regroupe un ensemble de pratiques assez

hétérogènes. Le web n’étant après tout, qu’un média, le chargé d’étude

n’est pas dispensé des étapes fondamentales de définition des objectifs de

l’étude et de ciblage de la population de référence (entre autres).

En ce qui concerne la préparation et l’administration du terrain, le champ

des possibles va de l’envoi d’e-mails incluant le questionnaire (le document

attaché étant déjà un élément de sophistication non négligeable) à ce l’on

nomme CAWI qui est un mélange de CAPI et de CATI que l’on a porté

sur le web.

Une évaluation comparative des méthodes d’administration est proposée

par le tableau ci-après qui évalue le niveau de performance (faible-moyen-

élevé) de chaque méthode sur une liste de critères d’analyse relatifs aux

différents aspects de la collecte de données (nature du processus de

collecte et contrôle de ce processus) :

Tableau 9 : Comparaison des méthodes d’administration

FACE-A-FACE VOIE

POSTALE TELEPHONE ON LINE

Méthodes Critères d’évaluation

Interviews à domicile

Interviews en sortie de caisse

CAPI Enquête courrier

Téléphone classique CATI E-mail

Script CGI (HTML ou autre)

Flexibilité de la collecte

E E M à E F M M à E F à M M à E

Diversité des questions

E E E M F F M E

Utilisation de stimuli physique

M à E M à E E M F F F E

Envergure géographique de

la collecte

M M M E E E E E

Contrôle du processus

E E E F E E E E

Contrôle de l’échantillon

E M M F M à E M à E F à M F à M

Contrôle de l’environnement

de la collecte

M à E E E F M M M M

Contrôle des enquêteurs

F M M E M M E E

Quantité d’infos E M M M F F M E

Taux de réponse E E E F M M M M

Caractère anonyme de

l’enquête

F F F E M M M M

Biais de désirabilité sociale

E E E F M M M à E M à E

Possibilité d’obtenir une info sensible, personnelle

F F F à M E E E F à M F à M

Potentiel de biais dus à l’enquêteur

E E F N M M Quasi N Quasi N

Rapidité d’obtention des

informations

M M à E M à E F E E M à E M à E

Coût E M M à E F à M M M M M à E

N : Nul / F : Faible / M : Moyen / E : Elevé / CGI : Common Gateway Interface / Info : Information

IV.3.3. Contrôle de la validité de recueil

Il est assez rare, sauf pour les recherches universitaires, que

l’administration d’une enquête soit réalisée par son concepteur. Dans les

instituts d’études, même importants, l’administration est souvent sous-

traitée auprès de sociétés spécialisées dans le terrain. Le réalisateur du

terrain est responsable de la qualité de ce dernier : il la vérifie par des

contrôles en vue de s’assurer de la qualité de l’information recueillie. Ce

contrôle intervient à plusieurs niveaux : sélection des enquêteurs,

formation24, contrôle et évaluation à postériori du travail des enquêteurs :

24 La formation se réalise sous forme d’exposés ou de cours, ou, en cas de dispersion géographique des enquêteurs, par courrier. Elle vise à garantir que tous les questionnaires

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Tableau 10 : Eléments du contrôle de la validité de recueil

SELECTION

DES

ENQUETEURS

1. Définir précisément la tâche que les enquêteurs auront à accomplir, en tenant compte du mode d’administration.

2. Définir les caractéristiques que devront posséder les enquêteurs (âge, sexe, santé physique et morale, apparence, formation, expérience, traits de personnalité25…).

3. Recruter les personnes appropriées en fonction des critères retenus.

FORMATION

DES

ENQUETEURS

1. Prise de contact initiale : à cette étape, l’enquêteur doit apprendre à se présenter, à présenter le thème de l’enquête et à valoriser le répondant.

2. Formulation des questions : les enquêteurs posent les questions telles qu’elles sont rédigées car l’improvisation modifie très vite le sens de la question et par conséquent celui de la réponse. Les instructions liées au questionnaire (présentation de photographie, aiguillage liés aux questions filtres…) sont respectées scrupuleusement.

3. Enregistrement des réponses : c’est le cas surtout des questions ouvertes où l’enquêteur doit être formé à ce qu’il utilise les mots du répondant, ne pas résumer sa réponse, noter toutes les relances et reformulations et relire la réponse une fois qu’elle est écrite.

4. Conclusion de l’entretien : l’enquêteur ne doit pas laisser « tomber » le répondant dès que l’on a eu ce qu’on voulait ; il doit noter ostensiblement les commentaires et remarques du répondant s’il en formule, le remercier de sa participation en rappelant l’importance des informations retenues et ne doit pas oublier le « au revoir » ou « bonne (fin de) journée »…

CONTROLE

DES

ENQUETEURS

1. Qualité des questionnaires : sont-ils correctement et entièrement remplies ? Quel est le pourcentage de réponses absentes ou incomplètes ?

2. Qualité de l’échantillonnage : les individus interrogés sont-ils ceux prévus à l’origine ? Assez souvent, les enquêteurs choisissent la facilité : éviter certains quartiers (chauds ou moins facilement accessibles), rendre « élastiques » les quotas (une personne de 58 ans sera classée dans les 45-55), interroger celui qui est présent au foyer, plutôt que de rappeler plus tard…

3. Tricheries : des enquêteurs plus scrupuleux maquillent les réponses, complètent les questionnaires, par exemple en cas d’oubli de questions, voire remplissent eux-mêmes les questionnaires, chose qui est appelée « bidonnage ». Parmi les méthodes de contrôle dans ce cas, il y a le rappel téléphonique d’un échantillon de personnes ayant remplis le questionnaire, le prétexte du rappel peut être : « Madame, vos réponses à l’étude XYZ ont retenu notre attention, nous aimerions just revenir sur un point, etc. ».

seront administrés de la même manière : la prise de contact initial, la formulation des questions… 25

Extravertis et empathiques : la capacité à nouer des contacts rapidement avec des personnes inconnus et à attirer la sympathie sont 2 qualités importantes des enquêteurs.

EVALUATION

DES

ENQUETEURS

1. Coût total de chaque enquêteur : si les enquêteurs sont rémunérés à l’heure, la tentation est grande de « faire durer » les interviews et la collecte. Pour cela, il est préférable de rémunérer au questionnaire, en fixant un tarif réaliste. En effet, dans le cas d’un prix trop bas, la tentation est, à l’inverse, d’accélérer les interviews pour remplir le plus de questionnaires possibles.

2. Taux de réponse obtenu : un taux de refus élevé allonge le temps total de collecte des données et augmente le risque de biais : événements impromptus qui modifieraient radicalement les comportements et opinions, etc. Un taux de refus supérieur à la moyenne traduit souvent une mauvaise prise de contact.

3. Qualité des données recueillies : elle est liée au nombre de questions restées sans réponse, au pourcentage de « sans opinion », aux erreurs dans la transcription des réponses…

Au terme de l’administration du terrain, le chargé d’étude dispose d’une

pile de questionnaires représentant un volume considérable d’informations

brutes. Les traitements et analyses ont pour objet d’extraire de cette masse

les données les plus significatives à travers la diversité des méthodes

statistiques offertes là-dessus.

IV.4. Analyse de données

L’information collectée doit être traitée de manière à pouvoir répondre

aux questions posées lors de la définition des objectifs. Pour ce faire,

différents analyses se présentent à ce niveaux. Elles prennent des formes

plus ou moins complexes :

Les analyses de base : stade d’analyses les plus simples qui décrivent

l’information à partir de calcul de fréquences ou de moyenne ;

Les tests statistiques : il s’agit de techniques plus performantes qui

permettent de savoir si des différences apparentes sont réelles ou

probablement dues au fait du hasard ;

Les analyses d’association et de causalité : analyses de régression

et de corrélation simples vérifiant l’existence de relations

significatives entre deux variables ;

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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Les analyses multivariées : elles prennent simultanément en

compte plusieurs variables pour tenter de dégager une structure

commune dans les données ou pour établir des relations de

dépendance entre divers groupes de variables telles que l’analyse

factorielle, la régression multiple, les méthodes typologiques ;

Les méthodes mixtes : mi-quantitatives, mi-qualitatives (analyse

conjointe, expérimentation, analyse de variance).

L’analyse des données s’effectue à l’aide de logiciels tels que : SPSS26,

Sphinx27, SAS28, SPAD 829… Une fois les analyses achevées, le chargé de

l’enquête quantitative30 arrive à l’aboutissement de l’étude de marché : c’est

à ce moment-là que sont livrées les réponses aux questions initiales. Les

conclusions sont récapitulées dans un rapport de synthèse : le rapport

d’étude.

26 Statistical Package for the Social Sciences, un des logiciels les plus compréhensibles techniquement. 27 Logiciel de traitement statistique des données d'enquêtes d'opinion. 28 Statistical Analysis System, un des logiciels les plus complets techniquement. 29 Logiciel français d'analyse de données, de statistique et de data mining. 30 On note ici l’enquête quantitative, à titre particulier, car dans les études qualitatives, les phases de terrain et d’analyse de données sont difficilement séparables.

V. Le rapport d’étude

Au fur et à mesure de l’avancement des traitements de données, le chargé

d’étude dégage progressivement des éléments de réponse aux questions

qui ont motivé l’investigation. La synthèse de ces analyses forme l’ossature

du rapport remis au demandeur du travail. Ce document, généralement

présenté en oral, doit clairement préparer et servir de base aux futures

décisions managériales :

V.1. Rédaction du rapport d’étude

C’est un travail qui exige des qualités, parfois contradictoires, telles que :

esprit de synthèse et intuition, rigueur et pragmatisme. Les conclusions

doivent répondre clairement aux questions initiales du client, listées dans

le projet d’étude.

Le rapport d’étude est remis au commanditaire du travail, client extérieur

ou service interne de l’entreprise. Au niveau de la rédaction, il faut prêter

attention notamment aux éléments suivants :

Le volume et rubriques usuelles : le nombre de pages du rapport

dépend de la complexité de l’étude et de la finesse des analyses

effectuées. Pour fixer un ordre de grandeur, 40 à 80 pages (hors

annexes) constituent un volume usuel. Le plan type comporte sept

rubriques : sommaire (1 à 2 pages), résumé managérial (1 à 3 pages),

introduction (2 à 5 pages), méthodologie (1 à 3 pages), analyse des

résultats (30 à 60 pages), conclusions (2 à 10 pages), annexes (0 à 25

pages) ;

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Les recommandations et conseils : la mission du chargé d’étude

s’achève dès que les conclusions ont été présentées. Pourtant dans

bon nombre de cas, le demandeur souhaite que le réalisateur s’engage

plus en avant, puisque ce dernier dispose d’une grande quantité

d’informations pour résoudre le problème. Cet engagement peut se

limiter à un premier stade, la recommandation, ou aller plus loin : on

parle alors de conseil31 : Conclusions Recommandation

Conseil ;

Les illustrations graphiques et schémas : les graphiques et

schémas remplissent deux fonctions principales : (i) une fonction de

synthèse : c’est présenter de manière simplifiée les informations

initiales brutes ou les résultats des analyses effectuées sur ces

données, et (ii) une fonction de communication par ce qu’ils

permettent de comprendre plus vite « ce qui émerge, ce qui est

essentiel ».

V.2. Présentation orale

La présentation orale du rapport est un face-à-face crucial entre le client,

demandeur de l’étude, et le chargé de l’étude, réalisateur de la mission. En

effet, c’est à ce moment là que le client évalue l’efficacité réelle de l’étude.

En fonction de cette perception, il prendra ou ne prendra pas les décisions

qui découlent des conseils ou des recommandations formulés par le

31 Les recommandations sont une traduction des conclusions en termes de choix marketing. Elles se justifient par l’expérience accumulée. Le conseil suppose une implication plus grande encore : c’est le « service après-vente » du rapport d’étude. Il indique quels types d’actions marketing doivent être mis en œuvre. Le chargé d’étude se substitue au manager (acheteur de l’étude) en indiquant quelle stratégie, plan ou tactique marketing, il pratiquerait s’il était à sa place.

chargé d’étude. Complément indispensable du rapport écrit, la

présentation orale poursuit un triple objectif :

Sélectionner : la présentation orale n’est, en aucun cas, une lecture

linéaire du rapport d’étude. Le premier travail du chargé d’étude

consiste à sélectionner les conclusions majeures qui doivent être

transmises au client car toutes les informations n’ont pas la même

importance ;

Expliquer : c’est souvent à ce moment-là que le client prend

connaissance du rapport. Le chargé d’étude doit, de façon

pédagogique, dégager et analyser les principaux résultats et

conclusions tirés de l’étude. Puis répondre de manière claire aux

interrogations de son client ;

Convaincre : l’interactivité offerte par l’exposé orale est nécessaire

au chargé d’étude, car c’est une occasion majeure de convaincre son

client de la validité des résultats. Cela se révèle difficile lorsque les

participants à une présentation sont de profils et statuts différents ou

ont des attentes opposées.

V.3. Evaluation de l’efficacité d’étude

Cette évaluation est par nature subjective. Le contenu du rapport et la

manière dont il a été présenté jouent un rôle essentiel pour la perception

de la qualité de l’étude ; le demandeur n’étant que rarement un expert des

questions méthodologiques, la qualité globale d’une étude est souvent

évaluée sous un angle pragmatique : le bon rapport d’étude repose sur une

méthodologie simple, répond clairement aux questions initiales et formule

des recommandations opérationnelles.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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V.4. Prise de décision après le rapport

Posséder l’information est une chose, l’utiliser en est une autre car même

lorsque l’étude présente un caractère décisionnel marqué, la mise en œuvre

des recommandations dépend de plusieurs facteurs :

L’organisation de l’entreprise : généralement, plus le mode

d’organisation de l’entreprise est rigide ou centralisé, moins les

résultats seront utilisés. En effet, dans une organisation centralisée, la

décision de réaliser l’étude est prise à un niveau hiérarchique élevé,

éloigné du « terrain », de ce fait, les conclusions de l’étude sont

souvent perçues comme inadaptées aux contingences locales et

jugées inapplicables. Même si l’initiative de l’étude vient de la base, la

recommandation a de fortes chances de s’égarer ou de se diluer dans

les méandres organisationnels. A l’inverse, une caractéristique de base

des systèmes décentralisés est la grande autonomie de prise de

décision des individus. De surcroit, les demandeurs et utilisateurs de

l’étude sont fréquemment les mêmes personnes, et sont proches de

leurs marchés ;

L’acceptabilité du rapport d’étude : plus les conclusions

s’éloignent des croyances ou intuitions dominantes du client, moins

les recommandations seront appliquées. En fait, l’effet de surprise

constitue un facteur de blocage important dans l’application des

recommandations ; le manager tend à considérer que son expertise

est plus ancienne et plus profonde que celle d’un chargé d’étude qui

aborde peut être ce marché pour la première fois. De plus, il est

toujours désagréable de constater que son intuition était fausse.

Partant, des recommandations contraires à l’intuition de départ

deviennent alors suspectes, c'est-à-dire supposées entachées d’erreurs

méthodologiques32 ;

L’établissement d’un climat de confiance : plus les relations entre

le client et le chargé d’étude se fondent sur une confiance réciproque,

plus les résultats de l’étude seront utilisés. La volonté de réduire

l’incertitude du manager en l’aidant à interpréter des résultats

ambigus, l’expertise et la discrétion sur le caractère confidentiel des

informations contribuent à l’établissement d’un bon climat

relationnel. Aussi, le chargé d’étude doit faire preuve de tact là où il

serait amené à présenter des conclusions embarrassantes, contraires

au résultat attendu33.

L’élaboration du rapport constitue la partie visible du travail du chargé

d’étude. Sa présentation orale en présence du client est une opération

délicate pour le réalisateur de la mission qui, à ce stade, doit souvent

convaincre son client de la validité des conclusions proposées.

Dans la mesure où l’on admet qu’une étude de marché contribue à réduire

l’incertitude du décideur, il est nécessaire que les conclusions proposées

reposent sur des résultats fiables et valides, d’une part, et que les

éventuelles recommandations soient pertinentes et politiquement

acceptables pour l’environnement de l’entreprise, d’autre part. Si ces

conditions sont remplies, l’étude sera efficace et débouchera sur une prise

de décision concrète et performante.

32 DESPHANDE R. et GALTMAN G., "Factors affecting the use of market information : a path analysis", Journal of Marketing Research, février 1982, pp. 14-31. Cité par : GIANNELLONI J.L et VERNETTE E, (2001), Op. Cit., p. 490. 33 DESPHANDE R. et al., "Factors affecting trust in market research relationships", Journal of Marketing Research, janvier 1993, pp. 81-101. Cité par : GIANNELLONI J.L et VERNETTE E, (2001), Op. Cit., p. 491.

GIANNELLONI J.L. et VERNETTE E., (2001), Les études de marché, 2ème Edition, Vuibert Note de synthèse _ Janvier 2014

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VI. Conclusion

L’étude de marché est une forme d’investigation cruciale pour

accompagner la démarche marketing d’une entreprise. Elle permet de

réduire sensiblement, mais certes pas de supprimer, le risque inhérent à la

prise de décision.

Il s’agit d’un investissement rentable. Sa valeur ajoutée est, dans la majorité

des cas, largement supérieure aux coûts d’obtention des résultats : les

délais de réponse et le budget représentent des coûts globalement

inférieurs aux gains offerts par le choix d’une meilleure décision. Il est

clair, cependant, qu’elle n’est pas une fin en soi. En particulier, la

multiplication systématique des études entraine souvent l’absence de

décision.

La démarche à mettre en œuvre par les études de marché, pour répondre

de manière satisfaisante aux objectifs fixés, est rigoureuse et astreignante.

Les exigences méthodologiques sont parfois jugées pénibles et superflues,

mais elles représentent des garanties sérieuses de fiabilité et de validité

pour les conclusions. En contrepartie, l’homme d’étude ne doit pas

succomber à la fascination des techniques d’analyse, ni oublier que la

finalité de son travail consiste à formuler des conclusions simples

assorties, le cas échéant, de recommandations réalistes.

D’après P. Volle : « Les méthodes d'étude reflètent autant les changements

sociologiques que les ruptures technologiques et scientifiques qui jalonnent l'histoire du

marketing. Elles suivent notamment l'évolution des canaux de distribution et de

communication. Par exemple, l'invention du libre-service dans les années vingt aux

Etats-Unis a été suivie par l'invention des données de panel au début des années trente.

Avec la méthode des panels est apparu le concept de part de marché. Parallèlement, le

développement des études de marché s'accompagne de la création d'instituts spécialisés :

AC Nielsen en 1923 et Gallup en 1935 aux Etats-Unis, GfK en 1934 en

Allemagne, l'Ifop en France en 1938.

Depuis une quinzaine d'années, en lien avec le développement de la communication sur

Internet, on assiste à l'émergence des méthodes d'analyse des comportements en ligne, à

de nouveaux concepts comme le taux de clic et l'engagement des fans, ainsi qu'à la

naissance d'acteurs spécialisés dans l'analytics. A chaque nouvelle technologie

commerciale ses méthodes d'études et ses concepts associés. Plus spécifiquement, les études

qualitatives ont elles aussi ont une histoire riche. Aujourd'hui, les entreprises disposent

de bases contenant des quantités phénoménales de données, mais les études qualitatives

jouent toujours un rôle essentiel, car elles apportent du sens. Par exemple, l'observation

est une méthode qui a le vent en poupe.34 ».

34 Cité par : http://www.e-marketing.fr/Marketing-Magazine/Article/Pierre-Volle-la-veritable-histoire-du-marketing-44864-1.htm

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