les maquettes traversent-elles le mur du s en soufflerie

9
CENTRE NATIONAL D' ÉTUDES et de RECHERCHES AÉRONAUTIQUES (C. N. E. R. A.) (A. S. B. L.) 11, rue d'Egmont, Bruxelles Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie Supersonique ? PAR Jean J. GINOUX Ingénieur Civil Mécanicien et Electricien Ingénieur des Constructions Aéronautiques G 434 V UXELLES-UNIVERSITE No 4-1954 de la Revue Universelle des Mines

Upload: others

Post on 19-Oct-2021

2 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

C E N T R E N A T I O N A L D ' É T U D E S et de

R E C H E R C H E S A É R O N A U T I Q U E S (C. N. E. R. A.)

(A. S . B. L.)

11, rue d'Egmont, Bruxelles

Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie Supersonique ?

PAR

Jean J. GINOUX Ingénieur Civil Mécanicien et Electricien

Ingénieur des Constructions Aéronautiques

G 434 V

BRUXELLES-UNIVERSITE

N o 4 - 1 9 5 4 d e la Revue Universelle des Mines

Page 2: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

L E S M A Q U E T T E S TRAVERSENT-ELLES L E M U R D U S O N

E N S O U F F L E R I E S U P E R S O N I Q U E ?

par J ean J . G I N O U X , Ingénieur des Constructions Aéronautiques, Collaborateur du C. N. E. R. A.

Assistant à l'Université Libre de Bruxelles

Résumé. — La théorie unidimensionnelle des écoulements de fluides compressibles permet de décrire très facilement, d'une manière qualitative, l'évolution de l'air dans des tuyères convergentes-divergentes utilisées dans les souffleries super­soniques.

On peut ainsi montrer que dans la chambre d""expérience d'une telle soufflerie, la vitesse de l'air passe brusquement d'une valeur subsonique à une valeur supersonique par le passage d'une onde de choc normale, c'est-à-dire que les vitesses n'y sont jamais soniques.

Ces résultats sont vérifiés par des explorations axiales qui ont été effectuées dans la tuyère M = 2,2 de la soufflerie supersonique de Rhode- St-Genèse.

Introduction

Un avion qui décolle d ' u n aérodrome en vue d ' a t t e indre une vitesse supersonique doit néces­sairement, à u n momen t donné, passer pa r une vitesse sonique, c 'est-à-dire doit « f ranchir le mur d u son ».

Cette appellat ion imagée est entrée dans le langage courant , même dans les milieux scienti­fiques. Elle a été in t rodui te parce que la force de résistance à l ' avancement des avions actuels croît considérablement en approchant de la vitesse sonique, donnan t au pilote l ' impression de rencontrer un « m u r ».

Dans une soufflerie supersonique, dont le b u t est d 'é tudier le compor tement des modèles rédui ts (maquet tes) dans des écoulements super­soniques, la vitesse de l 'air p a r t de zéro (instal­lat ion à l 'arrêt) pour a t te indre finalement une vitesse supersonique.

On pourra i t donc croire que le modèle doit f ranchir le « mur du son », comme l 'avion que nous venons de considérer. E n fa i t , il n ' en est rien, ainsi que nous nous proposons de le démon­trer pa r un ra isonnement théorique, vérifié par

nos expériences à la soufflerie supersonique de Rhode- St-Genèse.

Les maquet tes passent pa r des vitesses soniques dans des souffleries spéciales que l 'on appelle « souffleries t ranssoniques », qui é tudient le comportement des modèles rédui ts un iquemen t à des vitesses voisines de la célérité d u son.

1. — Généralités sur les souffleries aérodynamiques

On désigne par soufflerie ou tunne l aérodyna­mique un complexe de canalisations à sections constantes, convergentes et divergentes à l ' inté­rieur desquelles l 'air est mis en mouvemen t soit pa r des vent i la teurs ou par des compres­seurs, soit par l 'emploi de réservoirs sous vide ou en surpression, e t c . .

Dans le t ronçon de la canalisat ion où la vitesse de l 'air est la plus grande, on aménage une chambre d 'expérience dans laquelle est placé l 'objet , ou son modèle rédui t , don t on veu t étudier le compor tement dans le v en t (ce sera par exemple, u n avion, u n e aile, vax fuselage, im pylône, un navire, . . .) . La m a q u e t t e est généralement montée sur des balances qui mesurent sa sollicitation aérodynamique .

I l f au t observer un cer ta in n o m b r e de condi­tions dans la réalisation des souffleries ; no t am­ment l 'obtent ion d ' ime répar t i t ion uni forme de la vitesse de l 'air dans la chambre d 'expérience. Cette condition est essentielle pour que l 'on puisse appliquer le principe d u mouvemen t relatif c'est-à-dire, déduire des essais sur la maque t t e immobile dans le couran t d 'a i r , le comportement réel d u corps en mouvemen t dans l 'air a tmosphér ique au repos.

Une classification des souffleries peu t se faire en comparant les grandeurs des vitesses dans les chambres d 'expérience. On démont re en aérodynamique théor ique que la célérité du

Page 3: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

2 Revue Universelle des Mines S» Série. T. X. - N» 4

Hélice

Chambre d'expérience

Fig. 1. — Schéma d'une soufflerie à basse vitesse.

son joue u n rôle fondamenta l dans les écoule­ments à grandes vitesses ; on n ' y doit pas considérer la vitesse du corps en mouvement (ou la vitesse relat ive de l 'air pa r r appor t au corps), mais le r appor t de cet te vitesse à la célérité locale du son. Ce rappor t s 'appelle le « nombre de Mach » et nous le désignons par M. Suivant la valeur de M nous distin­guerons les types suivants de souffleries :

M < 0,3 Soufflerie à basse vitesse 0,3 < M < 0,8 Soufflerie subsonique 0,8 < M < 1,2 Soufflerie t ranssonique 1,2 < M < 5 Soxifflerie supersonique 5 < M Soufflerie hypersonique

Nous verrons que la même canalisat ion ne peut pas être utilisée sans modification, pour donner indifl 'éremment des vitesses subsoniques, t ranssoniques ou supersoniques. Chaque t y p e de soufflerie a une forme particulière.

Le cas qui nous intéresse est celui des souffleries supersoniques dans lesquelles la valeur de M est comprise entre 1,2 et 5 environ. Nous nous

sommes familiarisé avec une instal lat ion de ce genre au laboratoire d'aérodyuamicfue de Rhode-St-Genèse, occupé par le Centre Nat ional d 'E tudes et de Recherches Aéronautiques (en abrégé C. N. E . R . A.).

Nous ne disposons pas en Belgique de soufflerie subsonique ou transsonique.

2. —' Une soufflerie à basse vitesse ne permet pas d 'at teindre des vitesses supersoniques

Considérons une soufflerie à basse vitesse d ' u n t y p e courant et examinons si elle peut fournir des vitesses supersoniques dans la chambre d'essai, en supposant que la puissance disponible ne soit pas limitée.

La f igure 1 schématise u n t tmnel aérodyna­mique à basse vitesse à circuit fermé. Une hélice, qui tourne à raison de N tours pa r minute , fourni t u n accroissement de pression :

qui m e t l 'air en mouvement à une vitesse telle que la chute to ta le de pression dans la tuyau­ter ie soit précisément Ap.

L 'a i r qui est accéléré dans le convergent (C) a t t e in t une vitesse (V) dans la chambre d'expé­rience. (V) sera faible si (Ap) est pe t i t . Si l 'on augmente (N), c 'est-à-dire (Ap), la vitesse (V) croît . E n d 'au t res termes, pour obtenir mie vitesse du ven t plus grande, l 'opéra teur augmente la vitesse de ro ta t ion de l 'hélice en fournissant plus de puissance au moteur d 'en t ra înement .

Cependant , même si la puissance disponible est illimitée, la vitesse (V) ne croît pas indé­finiment. Le calcul mont re en efl'et que l 'on

Fig. 2. — Photo de la tuyère.

Page 4: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

Avril 1954. Mur du Son en Soufflerie supersonique 3

ne pourra j amais dépasser ainsi une vitesse sonique.

Pour obtenir des vitesses supersoniques, le convergent (C) doit ê t re prolongé par un conduit divergent c 'est-à-dire qu' i l f au t utiliser des « tuyères convergentes-divergentes ».

E tudions théor iquement , puis expér imenta­lement , de telles tuyères .

3. —• Analyse théorique d'une tuyère convergente-divergente

Les tuyères convergentes-divergentes des t im-nels supersoniques ont généralement des sections rectangulaires. Elles sont plus faciles à calculer que des tuyères à sections circulaires.

La f igure 2 représente une tuyère qui équipe la soufflerie supersonique de Rhode. L 'a ir s 'y écoide de la droi te vers la gauche. La par t ie à section cons tante qui suit le divergent est la chambre d 'expérience oil sont placées les maque t tes à étudier .

Cette tuyè re est insérée dans un circuit fermé dans lequel l 'air est mis en mouvement pa r im compresseur axial. L a photo de la f igure 3 donne une vue d 'ensemble de la soufflerie supersonique de Rhode .

Représentons schémat iquement à la figure 4 une coupe longi tudinale de la tuyère considérée. Les sections d 'en t rée et de sortie sont désignées respect ivement pa r SE et pa r Ss- La section min imum qui sépare le convergent du divergent est notée Se ; c 'est le « col de la tuyère ». La section cons tante de la chambre d'expérience est Sj = Ss. Une section quelconque S est repérée par l 'abscisse {x) comptée à par t i r du col.

Le compresseur é t an t en rota t ion à raison

de (N) tours pa r minute , il existe \me différence de pression {ps — ps) entre l 'entrée et la sortie de la tuyère . Cette différence augmente avec (N),

La soufflerie de Rhode est munie d 'une valve de régulat ion qui main t ien t p^ cons tan t quel que soit (N). Une var ia t ion du nombre de tours du compresseur s 'y t r adu i t donc pa r ime diminution de pa, pe r e s t an t cons tan t .

E tudions l 'évolution de l 'air dans la t uyè re lorsque {ps—ps) croît à par t i r d 'une valeur nulle donc lorsque (N) croît à par t i r de zéro.

Fig. 4. — Coupe de la tuyère.

Le calcul peut se faire en supposant que l 'écoulement est à t ranches parallèles, c 'est-à-dire que les vitesses de l 'air sont répar t ies uni formément dans chaque section (S) de la tuyère . Cette façon de procéder pe rme t u n examen quali tat i f de l 'évolution du fluide ; la vérification expérimentale que nous avons fa i te nous en donne la preuve.

Nous avons développé ailleurs la théorie des écoulements unidimensionnels en tuyè re (^). Nous l 'avons appliquée à la tuyère considérée et nous avons obtenu les résul ta ts consignés

(') Jean J. Ginoux. —- « Dynamique des fluides compres­sibles. Ecoulements uni et bidimensionnels », C. N. E. R. A., 11, rue d'Egmont, Bruxelles,

Fig. 3. — Vue d'ensemble de la soufiflerie.

Page 5: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

4 Revue Universelle des Mines 9" Série. T. X. - N» 4

Fig." 7. — M.

Page 6: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

Avril 1954. Mur du Son en Soufflerie supersonique 5

aux figures 5, 6 et 7. La figure 5 donne la fo rme de la tuyère pa r le r appor t d 'une section quel­conque (S) à la section au col (Se) en fonction de la distance (x) ati col. A la figure 6, nous avons représenté les répar t i t ions des pressions (^) en fonction de {x) pour différentes valeurs de la pression de sortie ps- La figure 7 fourni t les valeurs correspondantes du nombre de Mach, la vitesse est stibsonique ou supersonique suivant que le point représentat if se t rouve au-dessous ou au-dessus de la droi te (M = 1).

Nous utilisons ces figures pour décrire l 'évo­lution du fluide dans la t uyè re convergente-divergente lorsque la pression ps à la sortie prend des valeurs de plus en plus petites, la pression pE à l 'entrée ga rdan t une valeur constante.

1° Lorsque ps = pn l 'air est immobile. 2° Lorsque ps = psi est légèrement inférieur

à JIE, les répart i t ions de (p) et do (M) en fonction de (x) sont données par la courbe [c^). Cette courbe mont re que d 'une p a r t la pression dimi­nue dans le convergent , a t t e in t une valeur min imum dans le col et augmente dans le diver­gent, et que d ' au t r e pa r t le nombre de Mach augmente, passe par u n m a x i m u m (Me) et décroît pour a t te indre la valeur Mj dans la chambre d'expérience. L 'écoulement est entièrement sub-sonique.

3° Pour ps2 inférieur à psi, nous avons obtenu une courbe (cg) semblable à (cj^). Les nombres de Mach dans le col et dans la chambre d'expé­rience (Mg) ont augmenté .

4° Une diminut ion progressive de ps entraîne un accroissement de la vitesse dans le col j u squ ' au moment ovi elle y devient sonique. La courbe correspondante est (cg) et les conditions dans la chambre d 'expérience sont ps^ et M3. Excepté au col, les vitesses sont subsoniques en tous les points de l 'écoulement.

50 La pression é t an t ps^ inférieure à psg, l 'évolution du fluide dans le divergent est représentée par la courbe OABC. E n t r e le col et la section S5 correspondante au point A, le nombre de Mach augmente de 1 à MA (supé­rieur à 1), puis dans ce t te section repasse brusquement à une valeur MB subsonique ; ensuite le nombre de Mach cont inue à diminuer jusqu ' à la valeur M4 qu' i l a dans la chambre d'expérience. La discontinuité de M dans la section s 'accompagne d 'une recompression brusque du fluide, la pression passant de la valeur à la valeur ps- Une telle discontinuité s 'appelle une « onde de choc normale ».

6° Diminuons encore la pression à la sortie jusqu ' à la valeur ps^ pa r exemple. L'évolution

(') Les pressions sont rapportées à la pression totale Po qui est la pression que l'on obtiendrait en immobilisant le fluide en amont de la tuyère.

se fai t suivant la courbe 0 A ' B ' C c 'est-à-dire que l 'onde de choc normale s 'est déplacée vers l 'aval , son intensi té (MA' — Mu') a y a n t augmenté.

7° Lorsque ps a t te in t la valeur psg le choc se t rouve dans la section S^, à l 'entrée de la chambre d'expérience.

E n amont de la discontinuité le n o m b r e de Mach est M7 supersonique et la pression est p^^, tandis qu 'en aval le nombre de Mach est Mg sub­sonique et la pression vau t psg.

Quelle que soit la valeur de ps comprise entre pa^ et ps^, il existe une onde de choc dans le divergent d 'une intensi té telle que la pression du fluide dans soit précisément ps. La position de la discontinuité dans le divergent est stable en ce sens qu'elle se main t ien t dans une section donnée aussi longtemps que ps reste constant .

La diminut ion de la pression de sortie j u s q u ' à la valeur a permis d 'a t te indre la valeur Mg sub­sonique du nombre de Mach dans la chambre d'expérience.

8° On démontre que le choc normal n e peu t pas se stabiliser dans une section constante . P a r suite en d iminuant ps légèrement en dessous de la valeur psg, l 'onde de choc t raverse la chambre d'essai laissant derrière elle u n écoule­ment supersonique M, et une pression psi- On dit que la tuyère s'est « amorcée ».

Dans la chambre d''expérience, le nombre de Mach passe donc brusquement de la valeur Mg sub­sonique à la valeur M j supersonique par le passage d^une onde de choc normale. En d''autres termes, la vitesse rCy est jamais sonique, c'est-à-dire que les maquettes ne traversent pas le « mur du son » en soufflerie supersonique.

Fig. 8.

Page 7: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

6 Revue Universelle des Mines 9" Série. T. X. - N» 4

L'analyse ci-dessus mont re également que le nombre de Mach final que l 'on a t te in t a tou jours la même valeur M,. Pour en obtenir d 'aut res , il f audra i t utUiser des tuyères de formes différentes ; d 'où la difficulté pour faire des essais à des nombres de Mach supersoniques variables.

L 'aspect et l 'emplacement de l 'onde de choc après son passage à t ravers la section constante de la tuyère dépendent de la forme de la cana­lisation en aval de la chambre d 'expérience.

Si la tuyère débouche b rusquement dans un conduit à section plus grande, il se forme deux ondes de choc obliques, schématisées à la figure 8a, dont l ' intensité décroît et dont l'incli­naison augmente lorsque la pression ps d iminue en dessous de la valeur psg. Ces deux chocs s 'évanouissent pour pa = ps^ et se t r ans fo rment en deux ondes de détente centrées lorsque la pression devient inférieure à ps? (fig. 86). Nous n' insistons pas sur ce point qui nous écar te du suje t t ra i té .

Fig. 9. — Prises de pression à la paroi.

Si la tuyè re se prolonge par un condui t convergent-divergent avec u n « second col » (cas f réquent) , le choc normal se stabilise dans ime section de cet te seconde tuyère (fig. 8c), la posit ion de la discontinuité é t an t fonct ion de la pression de sortie ps.

4. — Etude expérimentale d'une tuyère convergente-divergente

Nous avons vérifié la théorie ci-dessus pa r des mesures effectuées à la soufflerie supersonique de Rhode-Ste-Genèse équipée de la tuyè re que nous avons considérée.

On démontre que l 'on peut calculer le nombre de Mach en u n poiat quelconque d ' un écoule­m e n t , si l 'on coimaît en ce point la pression sta­t ique et la pression totale (*).

(•) La pression statique (p) est la pression mesurée en un point en mouvement avec le fluide. La pression totale (po) est la pression obtenue en immobilisant le fluide par une évolution isentropique.

La pression totale est p ra t iquement constante en tous les points de l 'écoulement lorsqu'il n ' y a pas d 'onde de choc. I l suffit dans ce cas de la mesurer en \m point quelconque où la vitesse est subsonique avec une sonde dont le nez est percé d 'un orifice relié à vm manomètre pa r une tuyauter ie appropriée (il y a im point d 'a r rê t au nez de la sonde et l 'on y obt ient la pression to ta le jpo). Les pressions stat iques se mesurent par des prises de pression aux parois verticales de la tuyère (figure 9).

Pa r contre, lorsqu'on se t rouve en présence d 'une onde de choc, la pression totale change à cause de la variat ion d 'entropie à t ravers la discontinuité. I l f au t alors mesurer la pression to ta le en aval du choc.

Le dispositif que nous avons réalisé (*) est représenté à la figure 2. I l est formé pa r une sonde en forme de fourchet te montée sur im tube axial qui coulisse dans deux paliers fixés à la paroi par des supports amovibles vert icalement. La sonde est déplacée longitudi-nalement pendan t l 'essai pa r une commande extérieure à la canalisation (qui est d'ailleurs é tanche et sous vide part iel) . De plus, elle peu t tourner de 180° au tour de son axe de façon à amener successivement les deux branches de la fourchet te au même point de l 'écoulement, (figure 10).

Fig. 10. — Détails de la sonde.

L 'une des branches mesure la pression to­tale (/Jq), l ' au t re donne la pression s ta t ique (p) . Les deux prises de pression sont raccordées, par des t u y a u x en plast ique qui passent à l ' intérieur du t ube axial, à deux manomètres .

La figure 11 donne les résul ta ts des explorations faites avec cet te sonde pour des valemrs décrois­santes de Ps c 'est-à-dire pour des vitesses angulaires (N) croissantes d u compresseur. Les courbes tracées à la figure dorment les var ia t ions du nombre de Mach en fonct ion de la dis tance au col {x) exprimée en centimètres. L 'é ta lement axial des discontinuités provient de l ' in teract ion de la sonde avec l 'onde de choc.

Nous avons re t rouvé les conclusions de la théorie précédente :

1° Une discontinuité se localise dans le diver-

{*) Inspiré d'un système que nous avons utilisé à la soufflerie supersonique de l'E. P. F. à Ziirich.

Page 8: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

Avril 1954. Mur du Son en Soufflerie supersonique 7

50 > cm 30 20 10

Fig. 11. — Résultats expérimentaux.

gent de la tuyère . Elle est d ' a u t a n t plus près de choc après lequel il est devenu brusquement de la chambre d 'expérience que la pression supersonique. de sortie pa est plus basse. L'expérience m o n t r e que les valeurs de M sub-

2° L'écoulement reste subsonique dans la soniques que l 'on peu t a t te indre sont plus chambre d 'expérience j u s q u ' a u passage de l 'onde élevées que celles prévues pa r la théorie uni-

Fig. 12. — Enregistrement cinématographique du passage du choc dans la chambre d'expérience.

Page 9: Les Maquettes traversent-elles le Mur du S en Soufflerie

6 Revue Universelle des Mines Q' Série. T. X. - N« 4

dimensionnelle qui ne donne qu 'une description qual i ta t ive du phénomène.

3° Dans une section donnée, le nombre de Mach supersonique que l 'on obt ient est toujours le même quel que soit le régime de fonct ionnement de la tuyère .

Remarques a) La figure 11 mont re que le n o m b r e de Mach

supersonique dans la chambre d 'expérience v a u t environ 2,0 au lieu de la valeur 2,2 pour laquelle la tuyère est construi te .

Cela provient d 'une « onde de choc de conden­sation » qui se situe entre le col et la chambre d'essai. Cette discontinuité provoque la chute AB du nombre de Mach (voir fig. 11). La courbe en t ra i t s pointillés représente la répar t i t ion du nombre de Mach que l 'on aura i t en l 'absence de la condensation.

On démontre que la t e m p é r a t u r e s ta t ique du fluide diminue lorsque la vitesse augmente . Dans la tuyère considérée elle descend à 50 degrés centigrades sous zéro au voisinage du col et à 100 degrés sous zéro environ dans la chambre d'expérience. De ce fa i t , l 'air est sursaturé d 'eau et dans certaines conditions réalisées en aval du col, ime condensat ion brusque de la vapeur se produi t .

L ' intensi té du choc de condensat ion varie avec le degré d 'humidi té de l 'air , avec la tempé­ra tu re totale, etc... I l en résulte que le nombre de Mach supersonique de la veine d'essai varie pendan t l 'essai ou d 'un essai à l ' au t re et modifie

l 'uniformité de l 'écoulement. Nous avons signalé cet inconvénient dans u n rappor t de labo­ratoire (*) et l 'on procède actuellement à l ' instal­lation d ' un dessiccatcur d 'air qui sera branché sur la soufflerie.

6) Nous avons constaté pa r des mesures de pressions aux parois, que les ondes de choc obtenues dans le divergent de la tuyère lors de son amorçage étaient des ondes obliques. Nous avons également mis en évidence un décol­lement des couches-limites sur les parois de la tuyère provoqué par la recompression à t ravers le choc.

c) I l est possible de visualiser et de photo­graphier les ondes de choc à l 'a ide d ' im dispo­sitif opt ique spécial lorsque les parois de la tuyère sont en verre.

L'emploi d 'une caméra à grande vitesse de prise de vues pe rmet de saisir le choc lors de son passage à t ravers la chambre d'expérience. La figure 12 donne quelques images de cet te évolution. La forme complexe de l 'onde de choc provient de son interact ion avec des ondes de choc obliques issues d' irrégularités des parois situées en amont de la section constante de la tuyère . La pho to en bas à droite représente le modèle dans l 'écoulement supersonique (vitesse égale à deux fois la célérité du son) après l 'amor­çage de la tuyère .

(') Jean J. Ginoux. — Sur la présence d'ondes de choc de condensation dans la tuyère M = 2,2 du tunnel super­sonique. Rapport B B 1 du C. N. E. R. A.