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Canadian Journal of DevelopmentStudies / Revue canadienne d'études dudéveloppementPublication details, including instructions for authors andsubscription information:http://www.tandfonline.com/loi/rcjd20

Les politiques fiscales en AfriqueCentrale: une analyse empiriqueDésiré Avom aa Laboratoire d'Analyse et de Recherche en Économie Appliquée –Faculté des Sciences Économique et de Gestion (LAREA – FSEG) ,Université de Yaoundé II-Soa , Yaoundé, CamerounPublished online: 24 Nov 2011.

To cite this article: Désiré Avom (2011) Les politiques fiscales en Afrique Centrale: uneanalyse empirique, Canadian Journal of Development Studies / Revue canadienne d'études dudéveloppement, 32:3, 239-253, DOI: 10.1080/02255189.2011.622595

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Les politiques fiscales en Afrique Centrale1 : une analyse empirique

Desire Avom∗

Laboratoire d’Analyse et de Recherche en Economie Appliquee – Faculte des Sciences Economique et deGestion (LAREA – FSEG), Universite de Yaounde II-Soa, Yaounde, Cameroun

RESUME L’objectif de cet article est d’analyser les performances des politiques fiscales enAfrique Centrale. A cet effet, a partir des donnees du World Development Indicators nousconstruisons quelques indicateurs sur la base d’un panel de 150 observations portant sur 10pays de la sous-region et sur une periode de 15 ans. Notre analyse conduit a deuxprincipales conclusions. En premier lieu, les recettes fiscales sont parmi les plus faibles del’Afrique au Sud du Sahara ; en revanche, l’indicateur de dispersion montre une certainehomogeneite des depenses, lesquelles semblent plus ou moins orientees par les directivesdes institutions internationales. En deuxieme lieu, les faits stylises portant sur lesdeterminants de la politique fiscale ne semblent pas traduire une correlation forte entre lescombinaisons de variables retenues. Nous concluons sur les mesures de politiques fiscales amettre en œuvre pour accroitre les recettes fiscales, sans lesquelles il sera extremementdifficile de financer la realisation des Objectifs du Millenaire pour le Developpement dont legap de financement selon les etudes se situe entre 33 et 120 milliards de dollars US.

Mots cle : politique fiscale; Afrique Centrale

ABSTRACT This article analyses the performance of fiscal policy in Central Africa. Relyingon data provided by the World Development Indicators, we constructed our own indicatorsbased on the observations of 10 sub-Saharan countries over a span of 15 years. Our analysisleads to two conclusions. Firstly, while the fiscal revenues of these countries are among theweakest of the region, the dispersion indicator shows a homogenous distribution ofexpenses which seem to reflect the guidelines of international institutions. Secondly, thestylised facts drawn regarding the determinants of fiscal policy do not seem to reflect astrong correlation between the different combinations of variables selected. We concludethat fiscal policies should be put in place in order to increase tax revenue, without which itwould be extremely difficult to finance the objectives of the Millennium DevelopmentGoals, as the funding gap is reportedly between US$33 and 120 billion.

Introduction

Les pays de l’Afrique Centrale ont enregistre au cours de ces dernieres annees des performancesmacroeconomiques relativement fortes et tres au-dessus de la moyenne de l’ensemble des autrespays africains au sud du Sahara. Ces resultats sont d’une part la consequence d’un environnementmacroeconomique particulierement favorable du moins jusqu’au premier semestre de l’annee2008 et, d’autre part, celle de choix de politiques economiques appropriees sous l’impulsiondes institutions financieres internationales. Bien que la region dans son ensemble ait obtenu de

ISSN 0225-5189 print/ISSN 2158-9100 online

# 2011 Canadian Association for the Study of International Development (CASID)http://dx.doi.org/10.1080/02255189.2011.622595

http://www.tandfonline.com

∗Courriel: davom99@hotmail.com

Canadian Journal of Development StudiesRevue canadienne d’etudes du developpementVol. 32, No. 3, September 2011, 239–253

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bons resultats economiques, les taux de croissance y sont restes largement tributaires de quelquesproduits de base, et notamment le petrole. Il convient toutefois de relever que le niveau moyeneleve des taux de croissance masque de fortes disparites de performance au sein de la region.Pour certains pays, ils restent tres insuffisants pour leur permettre d’atteindre les Objectifs du Mil-lenaire pour le Developpement (OMD) d’ici la date butoir de 2015. En effet, Kakwani et Son(2006) ont procede a des projections sur la periode entre 1990-2015, a partir d’un echantillonde 15 pays africains, du cout pour reduire la pauvrete et atteindre les OMD. Ils montrent quela reduction de la pauvrete de moitie necessitera un investissement moyen variant entre 21,4 %et 33,1 % du produit interieur brut (PIB), soit 163 a 205 milliards de dollars US selon le scenariode croissance retenu. Le gap des besoins de financement par rapport a l’epargne domestique sesitue entre 33 a 120 milliards de dollars US selon que la croissance est pro-pauvre ou non.

Pourtant, d’une maniere generale, les flux financiers a destination de l’Afrique subsahariennese sont nettement accrus en volume depuis 1980. Par exemple, entre 1980 et 2006, l’aideexterieure nette (y compris l’allegement de la dette) a ete multipliee par cinq,2 les envois defonds des migrants par neuf, et l’investissement direct etranger par 50 (Keen et Mansour2008). De meme, sur le plan interne, le ratio impots-PIB est passe sur la meme periode demoins de 15 % en moyenne a plus de 18 %. Il convient toutefois de relever que la progressionde recettes fiscales enregistree est presque entierement liee a/aux : (1) l’exploitation desressources naturelles ; (2) contrats de partage de production ; (3) redevances et impots sur lesbenefices des societes petrolieres et minieres. Les recettes hors ressources naturelles ont progressede moins de 1 % du PIB en 25 ans. Bien plus, ces deux auteurs montrent que meme dans les paysriches en ressources naturelles, les recettes fiscales non liees a ces ressources n’ont pratiquementpas evolue.

Il apparaıt donc aujourd’hui plus qu’hier, que les ressources disponibles ne sont ni suffisantes,ni assez stables pour permettre a cette sous-region de realiser pleinement et avec efficacite sesobjectifs de developpement. De maniere plus specifique, la proximite avec l’echeance de 2015montre que plusieurs pays, a moins d’un investissement massif ne pourront atteindre la plupartdes OMD. L’un des problemes fondamentaux auxquels les pays de la sous-region font des lorsface est celui de la mobilisation des ressources necessaires au financement de sondeveloppement.3 L’experience empirique recente montre toutefois que la strategie du recours sys-tematique a l’endettement, privilegiee durant les trois premieres decennies apres lesindependances a montre ses limites objectives, avec l’ampleur de la crise de la dette qu’aconnue la plupart des Etats africains et des resultats plus que mitiges en termes de developpement.Desormais, la vision formulee par le Nouveau Partenariat pour le Developpement Economique del’Afrique (NEPAD)4 s’inscrit en totale rupture avec la strategie anterieure, et definit une nouvelleapproche de developpement qui est basee sur quelques concepts clefs dont la mobilisation del’epargne interieure, la promotion d’un secteur prive competitif, l’integration regionale et unerelation de partenariat gagnant-gagnant avec le reste du monde.

Les questions relatives aux politiques fiscales ont fait l’objet d’importants debats theoriquesanciens, mais toujours d’actualite (Diamond et Mirless 1971, Diamond 1975). Qu’on se rappellel’importante contribution des economistes de l’offre avec la question de l’optimalite de la pressionfiscale, illustree par la fameuse courbe de Laffer. Cette courbe en « cloche » traduit l’idee selonlaquelle il existe un niveau optimal de taxation – s’il est depasse, le produit de l’impot diminue.Autrement dit « trop d’impots tue l’impot ». La courbe de Laffer a le merite de rappeler auxdecideurs publics que la fiscalite affecte le comportement des agents economiques et entraınepar consequent des effets de substitution susceptibles, dans certains cas, de compenser leseffets de revenu (Benassy-Quere et al. 2004). Elle repose sur une generalisation intuitive des com-portements microeconomiques dont l’etude precise, dans les differents domaines de la fiscalite,ne permet pas, precisement, une conclusion generale (Gilbert 2001). De plus, en l’absence de

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specification precise des comportements, on ne peut determiner si le taux d’imposition moyen del’economie est superieur ou inferieur au taux optimal, et donc si une hausse des impots conduit aune hausse ou a une baisse des recettes fiscales (Benassy-Quere et al. 2004). Cependant, a la suitede ce qui precede, il semble que le nouveau paradigme fiscal pour les pays africains en general etceux de l’Afrique Centrale en particulier est de rechercher un equilibre entre d’une part le besoinde stabilisation des finances publiques a long terme, et celui d’autre part de garantir une offre debiens publics et d’amortir les fluctuations cycliques.

L’objectif de cet article est de prolonger certains aspects de ces debats en analysant les per-formances5 empiriques des politiques fiscales en Afrique Centrale afin de voir s’il ne sedegage pas des tendances lourdes et envisager par consequent les pistes d’une reforme appropriee.Il convient a cet effet de rappeler que la politique fiscale designe l’ensemble des mesuresreglementaires et administratives (outils et mecanismes) permettant aux autorites politiques decollecter les impots et taxes en vue de financer la production des biens collectifs et d’enassurer la redistribution. Ainsi definie, la politique fiscale est generalement contrainte par les rec-ettes fiscales dependant de la dynamique de l’economie, qui elles-memes sont souvent affecteespar des chocs exogenes qui pesent sur les economies. De ce fait, les autorites politiques sontsouvent amenees a mettre en place des politiques budgetaires pro-cycliques.6

La suite de l’article apres cette introduction est organisee de la maniere suivante. Dans la pre-miere section nous analysons les performances fiscales des Etats a partir de quelques variables depolitiques fiscales disponibles, en admettant que ces performances sont le reflet des politiquesmises en œuvre. Dans la deuxieme section, nous analysons les facteurs qui determinent ces per-formances fiscales en Afrique Centrale a partir d’un certain nombre de faits stylises.7 La troisiemeet derniere section porte sur la conclusion et les recommandations de politique economique sug-gerees par ces analyses et dont la mise en œuvre est susceptible d’accelerer le processus de mobil-isation des ressources dans la sous-region et d’accroıtre les ressources dont les pays ont besoinpour accelerer son processus de developpement.

Les performances fiscales en Afrique Centrale

Les comparaisons internationales en matiere de fiscalite revelent que les pays en developpement(PED) d’une maniere generale ont un taux de pression fiscale qui represente environ la moitie decelui des pays industrialises. Plusieurs explications peuvent etre avancees dont deux sont enrapport avec les traits caracteristiques de ces pays : l’etroitesse de l’assiette d’une part ; etd’autre part la forte dependance aux impots indirects, en particulier ceux lies au commerce inter-national. Les PED auraient ainsi une plus faible emprise sur leur economie par rapport aux paysdeveloppes. L’etroitesse de l’assiette pourrait etre rattachee a l’importance du secteur informel.Celui-ci comprend une multiplicite d’entreprises informelles qui echappent a toute formed’impot, en raison principalement du grand nombre d’unites individuelles informelles, quielles-memes sont difficilement reperables aussi bien en milieu urbain que rural. Ceci engendreun faible developpement fiscal, comme nous allons le montrer a partir de l’analyse de quelquesindicateurs du developpement. Une telle analyse n’est cependant pas aisee, car elle est complexeet souleve plusieurs problemes methodologiques dont deux au moins meritent d’etre indiques.

D’une part, il y a la difficulte de disposer des donnees statistiques sur une longue periode et surles variables de politiques fiscales et particulierement pour les pays concernes par l’etude. C’est laraison pour laquelle, nous avons utilise comme principale source le «World Development Indi-cators » (WDI) de la Banque Mondiale. Les donnees utilisees sont triennales, et couvrent laperiode 1991-2005. En effet, avant 1990, il est difficile de trouver les statistiques qui soient :(1) suffisamment homogenes et fiables, pour permettre de faire des comparaisons inter-Etats et(2) suffisamment detaillees, pour permettre de faire une representation empirique des differentes

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dimensions des politiques fiscales. L’exception notoire provient des series sur la consommationdes Gouvernements qui sont disponibles sur le WDI et qui commencent depuis le debut desannees 1970 pour la majorite des pays. Le decoupage a toutefois ete fait en fonction de la dispo-nibilite des donnees. Nous avons ainsi construit des donnees de panel sur 15 annees pour 10 paysde la Communaute Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC), soit un total de 150observations.

D’autre part, il y a le fait que meme apres les annees 1990, les donnees de plusieurs pays nesont pas completes en raison de l’instabilite socio-politique qui les a caracterises a certainsmoments. C’est ainsi que les series de plusieurs variables fiscales presentent d’enormes ecartset des observations defaillantes. Ceci a pour effet de desequilibrer l’echantillon des donneesfixees, de compliquer l’agregation pour obtenir les moyennes regionales, et d’introduire desbiais dans l’analyse statistique de l’echantillon. De ce fait, les moyennes regionales pourraientetre biaisees, puisque les donnees tendent a etre plus disponibles pour les pays qui presententde meilleures performances. Certes, ce probleme existe pour tous les pays en developpementdu monde, mais il paraıt plus prononce en Afrique et particulierement en Afrique Centrale, oules donnees sont systematiquement inexistantes pour un nombre de pays en conflit qui sontegalement ceux qui enregistrent les plus faibles performances fiscales. C’est pourquoi un traite-ment de valeurs manquantes a ete effectue pour certaines annees selon la disponibilite desdonnees dans les pays. Dans la plupart des cas, et pour des raisons de simplicite la methode dela mediane a ete utilisee. L’analyse des donnees nous montre tour a tour : (1) un faible niveaude recettes fiscales ; (2) une evolution en dents de scie des depenses gouvernementales et (3)une forte volatilite des recettes par rapport aux depenses.

Un faible niveau de recettes fiscales

Le tableau 1 presente l’evolution des indicateurs de revenu en Afrique Centrale en comparaisonavec le reste de l’Afrique. Les indicateurs pris en compte sont les memes que ceux utilises dansune etude realise par la Commission Economique pour l’Afrique (CEA) (2008). Il s’agit notam-ment du total des recettes (excluant les dons) en pourcentage du PIB (revenu), des impots sur le

Tableau 1. Moyenne comparee des indicateurs de revenu en % du PIB.

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Afrique CentraleRecettes hors dons 12,28 11,69 11,67 18,75 ..Impots sur le revenu 9,19 9,21 9,28 6,71 7,29Droits de sortie 4,11 7,30 3,13 1,32 ..Taxes indirectes (TVA) 21,77 22,77 23,53 18,53 19,51Taxes directes 17,97 17,64 17,89 13,44 8,80Droits d’entree 19,38 22,39 21,23 13,11 13,05

Reste de l’AfriqueRecettes hors dons 26,32 28,11 23,29 22,68 23,86Impots sur le revenu 20,75 21,62 19,17 19,21 19,72Droits de sortie 2,15 4,46 4,15 4,85 3,26Taxes indirectes (TVA) 23,80 20,29 23,97 25,96 31,39Taxe directe 21,57 24,63 23,08 24,99 21,50Droits d’entree 28,11 29,58 28,37 23,23 18,90

Note : les variables d’impot prises en compte ne constituent pas l’ensemble des impots, c’est pourquoi on n’a pas un totalde 100 %.Source : World Development Indicators (World Bank 2007).

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revenu (excluant les ventes des actifs immobilises) en pourcentage du PIB (impot sur le revenu),des recettes domestiques sur biens et services en pourcentage du total des recettes (impots indir-ects), recettes sur les revenus, benefices et capitaux en pourcentage du total des recettes (impotsdirects), et taxes sur le commerce international en pourcentage du total des recettes (fiscalite deporte). Les chiffres sont ainsi obtenus par agregation des donnees des pays de la sous-region etdu reste de l’Afrique. Le calcul de la moyenne est effectue uniquement par rapport aux payspour lesquels les observations sont effectivement disponibles sur la sous-periode consideree.8

Ce tableau degage au moins trois principaux enseignements. Le premier enseignement est queles efforts en matiere de recettes sont plus faibles en Afrique Centrale comparativement au reste del’Afrique. En effet, en pourcentage du PIB, les recettes oscillent en moyenne entre 11,67 % et18,75 % du PIB sur les sous-periodes 1991-1993 a 2000-2003, alors qu’ils variaient pour lereste de l’Afrique, sur les memes sous-periodes entre 23,29 % et 22,68 %. En elargissant la com-paraison a d’autres sous-regions du monde, seule l’Asie de l’Est presente sur une periode certesdifferente, un taux eleve de recettes fiscales par rapport au ratio du PIB (CEA 2008). Cette pro-gression montre toutefois que la tendance prend depuis au moins la fin des annees 70 une courbeascendante. Le second enseignement est que les taxes liees au commerce international et al’exportation diminuent egalement en Afrique Centrale a partir de 1997, annee de l’entree envigueur du tarif exterieur commun notamment pour les pays de la Commission de la CommunauteEconomique et Monetaire de l’Afrique Centrale (CEMAC). Cette baisse est bien marquee aucours de la periode 2003 a 2005 avec un pourcentage de pres de 13 %. Au meme moment, surla periode 1991-1993, les recettes des taxes sur le commerce international ont represente unpeu plus de 28 % des recettes totales pour le reste de l’Afrique, pour atteindre pres de 19 %entre 2003-2005 comparativement a la meme sous-periode en Afrique Centrale. Cette tendancede l’incidence des taxes sur le commerce international est une caracteristique importante despays a faibles revenus en raison de la nature de leur commerce, et de la faible diversificationde leur structure productive. La difference entre l’Afrique Centrale et d’autres regions est toutefoistres marquee. La faiblesse des taxes au commerce international aurait pu etre compensee par lataxe indirecte. En effet, alors que cette taxe a augmente de pres de huit points pour l’Afriqueentre 1991-1993 et 2003-2005, elle progresse faiblement pour les pays de l’Afrique Centrale.Cette situation n’est cependant pas specifique a la sous-region, puisque l’Asie du Sud a aussi enre-gistre une baisse vertigineuse des taxes sur le commerce international, mais celle-ci a ete large-ment compensee par l’augmentation des taxes directes domestiques (CEA 2008). Le troisiemeet dernier enseignement est la baisse drastique des taxes directes qui sont passees de 17,97 % a8,80 % alors qu’elles sont restees relativement stables pour le reste de l’Afrique.9

Les moyennes des indicateurs de recettes sont importantes, car elles permettent d’apprecier lacapacite des Etats a collecter les ressources. Aussi bien que cela puisse s’apparenter a la politiquebudgetaire, il convient pour des raisons methodologiques de voir comment les recettes sont affec-tees dans les differents postes de depenses.

Une baisse continue des indicateurs de depense

Le tableau 2 ci-dessous presente l’evolution de quelques indicateurs de depenses calcules sur lameme logique que ceux resumes dans le tableau 1. Les variables considerees dans ce tableausont : les depenses courantes de l’Etat pour les activites operationnelles (depense), le budgetsurplus/deficit (balance), les depenses de sante et d’education publique. Toutes ces variablessont exprimees en pourcentage du PIB.

Un nombre important d’informations peut etre tire a partir de ce tableau. Au debut des annees1990, la taille de l’Etat en Afrique Centrale mesuree par le pourcentage des depenses dans le PIBapparaıt relativement faible par rapport au reste de l’Afrique, soit 19,5 % sur la periode 1991-1993

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contre 26,65 %. Cette faible taille de l’Etat peut etre associee d’une part a la mise en place despolitiques d’ajustement structurel qui pronaient la reduction de la participation de l’Etat (sousforme de subventions et de prises de participation) dans le processus de production des bienset services et, d’autre part et de facon specifique a la resurgence des conflits qui a contribue a affa-iblir l’administration dans les pays concernes, bien que cela ne soit pas une specificite des pays del’Afrique Centrale. Cette situation a permis a la sous-region de voir son deficit budgetaire globaldiminuer progressivement pour devenir excedentaire au cours de la derniere periode. Il convienttoutefois de noter le role important des facteurs conjoncturels dans la resorption de ce deficit. Eneffet, la reduction progressive du deficit budgetaire global observee en Afrique Centrale au coursde la periode 2003-2005, soit 2,98 %, a ete rendue possible grace aux surplus realises par les paysexportateurs de petrole, consequence de l’augmentation progressive du prix du baril de petrole aucours de la derniere periode avec un pic historique enregistre au deuxieme semestre de l’annee2008.

Une autre tendance importante observee est l’augmentation des depenses de sante qui passentde 4,28 % du PIB a 7,12 % entre 2000 et 2005. Meme si cette augmentation intervient a uneperiode de baisse progressive des depenses globales qui passe de 17,08 % a 14,62 %, ellemontre en revanche que les pays d’Afrique Centrale plus que les autres pays africains ontreoriente leurs allocations budgetaires vers les secteurs sociaux notamment celui de l’educationet celui de la sante. Cette meme tendance s’observe dans les autres sous-regions, notammenten Asie du Sud et a un degre relativement moindre en Amerique Latine.

Les moyennes sous-regionales de variables des politiques fiscales precedemment presenteescachent bien evidemment des differences significatives entre pays comme cela apparaıt dansl’analyse de la dispersion de ces indicateurs de la politique fiscale. Bien qu’il soit assez difficilede savoir ce qui s’est reellement passe en raison de l’heterogeneite des economies qui repondent ades criteres differents (convergence pour la CEMAC) et ayant des structures differentes (petrole etnon petrole).

Une forte dispersion des variables de la politique fiscale

La dispersion est evaluee ici par l’ecart-type des variables fiscales, ce qui permet d’apprecierl’importance de telles differences et leur evolution dans le temps. Ainsi, le tableau 3 presentel’ecart-type de chaque indicateur utilise dans les tableaux 1 et 2.

La comparaison des donnees de l’Afrique Centrale est toujours faite par rapport au reste del’Afrique. Les calculs des ecart-types sont effectues uniquement pour les pays pour lesquels les

Tableau 2. Moyenne comparee des indicateurs de depenses en pourcentage du PIB.

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Afrique CentraleDepenses 19,51 14,43 14,74 17,08 14,62Balances 27,03 22,72 22,16 22,55 2,98Depense de sante .. .. .. 4,28 7,12Depense d’education .. .. 2,51 2,40 2,50

Reste de l’AfriqueDepense 26,65 28,65 23,37 22,79 22,58Balance 0,02 20,840 23,25 22,83 20,97Depense de sante .. .. .. 5,14 5,45Depense d’education 4,34 .. 4,20 4,85 5,26

Source : World Development Indicators (World Bank 2007).

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observations sont disponibles. Compte tenu du desequilibre du panel, le nombre de pays pour les-quels l’ecart-type est calculee augmente en fonction du temps. Il est tres difficile d’etablir a priorisi l’ajout de nouveaux pays fera varier l’ecart-type a la hausse ou a la baisse. Si l’on n’inclut pas denouveaux pays, lorsque les donnees deviennent disponibles, l’on contribue a reduire larepresentativite des echantillons, et par consequent a mettre en cause l’utilite de l’exercice.

Le tableau 3 montre a cet effet que les indicateurs de recettes se traduisent generalement par unecart-type tres eleve traduisant ainsi une forte volatilite par rapport aux indicateurs de depenses.Ceci pourrait signifier que les pays de l’Afrique Centrale ainsi que ceux du reste de l’Afrique sontrelativement homogenes dans leurs choix de depenses. En effet, ceux-ci sont plus orientes vers lasatisfaction des exigences des bailleurs de fonds internationaux qu’ils ne le sont dans leur choix depolitique fiscale. Plus generalement, pour toutes les variables, il y a peu d’evidence de conver-gence a travers les pays dans le temps. Les deux indicateurs de recettes en Afrique Centralepour lesquels l’ecart-type semble diminuer constamment sont l’impot sur le revenu et la taxesur l’exportation. Ceci resulterait probablement de la liberalisation progressive des politiquescommerciales mise en œuvre par les pays africains dans le cadre des initiatives sous-regionaleset multilaterales, notamment pour etre en regle avec les accords de l’Organisation Mondiale duCommerce.

La presentation de l’evolution de quelques indicateurs de la politique fiscale qui vient d’etrefaite donne une vue d’ensemble de la situation mais ne permet pas d’identifier les determinantsdes performances enregistrees. La section suivante confronte les recettes fiscales et les depensesa quelques determinants classiques rencontres dans la litterature pour apprecier le niveau de cor-relation possible.

Tableau 3. Dispersion comparee des indicateurs de politique fiscale.

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Afrique CentraleRecettes hors dons 6,287 6,234 4,824 14,617 16,170Impots sur le revenu 5,035 5,000 4,075 2,391 1,768Droits de sortie 3,676 4,873 2,616 0,446 ..Taxes indirectes (TVA) 5,150 8,492 10,660 4,714 5,306Taxes directes 3,691 3,450 2,953 9,624 6,726Droits d’entree 5,052 7,934 6,053 8,389 9,047Depense 5,594 7,441 5,561 8,979 7,406Balances 5,330 2,984 2,257 1,987 4,869Depenses de sante .. .. .. 2,028 2,637Depenses d’education 2,281 .. 1,051 1,060 1,340

Reste de l’AfriqueRecettes hors dons 12,20 11,42 11,328 9,847 11,435Impots sur le revenu 8,15 7,91 8,286 7,638 8,288Droits de sortie 2,98 7,66 6,435 7,390 7,622Taxes indirectes (TVA) 10,60 11,10 12,026 12,038 11,983Taxes directes 9,47 14,57 14,344 16,069 10,667Droits d’entree 11,83 14,58 14,179 12,709 13,124Depense 7,74 8,64 10,788 9,004 8,609Balance 6,27 4,78 4,241 4,255 4,088Depenses de sante .. .. .. 1,440 1,793Depenses d’education 1,84 .. 2,097 2,060 2,214

Note : la dispersion est mesuree comme l’ecart-type entre les pays pour les periodes pour lesquelles les donnees sontdisponibles.Source: World Development Indicators (World Bank 2007), nos calculs.

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Les determinants de la politique fiscale en Afrique Centrale : quelques faits stylises

Une maniere utile d’analyser empiriquement les determinants de la politique fiscale est celled’observer les faits stylises. A cette fin, les differents graphiques qui seront commentes dans ceparagraphe representent des nuages de points avec les variables de politique fiscale sur l’axe ver-tical, quelques principaux determinants potentiels de politique fiscale sur l’axe horizontal pour lesgraphiques 3 a 10, et une disposition contraire pour les Graphiques 1 et 2. Certains nuages depoints sont obtenus par simple ajustement lineaire des donnees disponibles. Mais la plupartdes graphiques montrent des courbes ajustees a partir d’une regression polynomiale localeavec largeur de bande, basee sur l’idee des voisins les plus proches telle que developpee par Cle-veland (1993, 1994). Ces courbes ajustees sont supposees recapituler assez bien les carac-teristiques du nuage de points, sa pente devrait donc indiquer l’existence ou non d’unecorrelation, et le signe eventuel. L’avantage d’utiliser l’eparpillement avec l’ajustement devoisin le plus proche est qu’il n’impose pas une structure parametrique a la relation entre les vari-ables dependante et independante. Puisque la forme reelle de la relation n’est pas necessairementconnue ex-ante, le choix arbitraire d’une structure parametrique, s’il s’avere faux, pourrait menera des inferences incorrectes. L’approche non parametrique a plutot permis aux donnees de s’expri-mer, et elle est donc plus appropriee pour l’identification des faits stylises.

Par ailleurs, dans la litterature empirique sur les determinants de la croissance economique enrapport avec la politique fiscale, la procedure standard est de faire des moyennes de donnees surdes periodes de cinq ou dix ans. Cette procedure permet de se concentrer sur les effets a longterme, qui constitue en realite le premier interet pour l’analyse des determinants de la croissance.Comme nous l’avons signale plus haut, nos donnees sont triennales. Cela peut expliquer l’ambi-guıte des nuages de points obtenus et surtout la difficulte a les interpreter et a faire des compar-aisons fiables avec les autres sous-regions. Les nuages de points qui portent essentiellement surles pays de la CEEAC ont ete crees pour plusieurs indicateurs a partir de deux principales vari-ables de politique fiscale pour lesquelles les donnees etaient disponibles. Il s’agit des taxes sur lerevenu d’une part, et des depenses totales d’autre part. Les determinants potentiels de la politiquefiscale consideres ici sont le logarithme du PIB par habitant, le commerce international (c’est-a-dire la somme des exportations et des importations) des biens et services en pourcentage du PIB,la valeur ajoutee du secteur agricole en pourcentage du PIB qui tient compte de l’importance de cesecteur pour les pays de notre echantillon, le logarithme de la population totale du pays et le loga-rithme du PIB reel par tete. Nous considerons pour les besoins de presentation deux groupes devariables : le role de la croissance et de la redistribution d’une part et l’incidence du commerceinternational et de la structure du systeme productif d’autre part.

Le role de la croissance economique et de la redistribution

La croissance economique depend de la double capacite d’un pays a accumuler d’une part, lesfacteurs de production en grande quantite et d’autre part a mobiliser les ressources financiereset d’en a assurer une meilleure redistribution. Nous considerons respectivement les relationsentre les variables fiscales avec la croissance economique, le developpement et la population.

Relation entre les variables fiscales et la croissance economique

Les Graphiques 1 et 2 montrent que les depenses publiques et les revenus ne semblent pas etresignificativement correles avec la croissance economique. Cependant, pour les depenses gouver-nementales, il y a l’evidence d’une cassure structurelle dans la relation, comme si une masse cri-tique des depenses (qui varie selon les pays entre 20 % et 30 % du PIB) etait necessaire pourdeplacer le sentier de la croissance de long terme vers le haut. Les caracteristiques de l’association

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entre recettes fiscales et croissance economique ne coıncident pas etroitement avec celle de larelation entre depenses et croissance. Le rapport est fortement positif pour des niveaux plusbas de recettes fiscales, signifiant qu’un niveau minimum de mobilisation des ressourcespubliques nationales est necessaire pour declencher le processus de croissance. A des niveauxplus eleves de taxes sur le revenu, l’effet devient toutefois ambigu. Cette ambiguıte refleteprobablement la combinaison de deux effets d’equilibrage de l’imposition : l’effet positif lie ala mobilisation des ressources pour financer l’acquisition de biens publics et l’effet negatif liea l’eviction de l’investissement prive lorsque le poids des impots devient plus lourd. En effet,dans le contexte neo-classique ou le taux de croissance est une fonction du taux d’interet, uneaugmentation de la taxation reduit l’accumulation du capital prive. Si la taxation est utiliseepour financer les depenses non productives du Gouvernement, le taux de croissance del’economie va diminuer ainsi que le revenu par tete d’equilibre du pays concerne. Si la taxationfinance l’investissement public, l’effet net sur la croissance est ambigu et depend du taux de crois-sance de la population. Dans les modeles de croissance endogenes, les depenses du Gouverne-ment peuvent contribuer a la croissance de long terme en influencant la fonction de productionavec des cœfficients positifs. A cet effet, Alesina et Rodrik (1994) montrent qu’en incorporantla production de services publics dans la fonction de production classique, l’augmentation dela taxe stimule la croissance si elle est utilisee pour financer des depenses favorables a laredistribution.10

Relation entre les variables fiscales et le niveau de developpement

De nombreuses etudes theoriques et empiriques ont considere que le niveau de developpementeconomique etait l’une des variables importantes les plus explicatives du taux de pressionfiscale mesure habituellement par le rapport des recettes fiscales sur le PIB de l’annee.Cette evidence empirique confirme l’idee simple selon laquelle, plus un pays est riche etplus il peut consacrer une part de sa richesse a la fiscalite et a la production des biens et ser-vices publics. Avec le developpement, ce n’est pas seulement le niveau de recettes fiscales quitend a s’elever mais la structure des recettes se transforme egalement ce qui permet d’accroitrenon seulement les financements en infrastructures de transport, telecommunication,energetique, hospitaliere, scolaire mais de mettre en œuvre des systemes de protectionsociale appropries.

Graphiques 1 et 2. Fiscalite et croissance economique. Source : World Development Indicators (2007), nosconstructions.

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En observant les nuages de point fournis par les Graphiques 3 et 4, l’on peut noter que pour lesdepenses, les points sont sous forme de nuage et la courbe d’ajustement ne donne aucune relationa priori entre les depenses du Gouvernement et le niveau de developpement. En effet, la forme dela courbe montre un ajustement polynomial et suppose donc que la relation est non parametriqueavec une forte dispersion des donnees tout au long de la courbe. Ceci peut refleter le caracterestructurellement desequilibre des finances publiques des pays de l’Afrique Centrale. Cette situ-ation est similaire a celle des autres pays en voie de developpement. Dans cette perspective, onpourrait affirmer qu’en ce qui concerne l’association entre les variables de politique fiscale etle developpement, l’Afrique Centrale n’est pas structurellement differente des autres pays envoie de developpement. En revanche, la courbe ajustee des taxes sur le revenu par rapport auPIB par tete fait apparaıtre une relation positive et lineaire entre les deux variables, ce quisemble corroborer l’idee precedente de l’existence d’une correlation positive entre les recettes fis-cales et le PIB par tete en Afrique Centrale. Ainsi, en se focalisant sur les determinants potentielsspecifiques de politique fiscale, il s’avere qu’un PIB par habitant plus eleve est positivementassocie a des recettes elevees, mais moins que les depenses.

Relation entre les variables fiscales et la taille de la population (y compris l’urbanisation)

Les Graphiques 5 et 6 montrent qu’il y a un effet de taille evident lie a la population en AfriqueCentrale. La courbe ajustee suggere que la relation pourrait devenir non lineaire avec des niveauxeleves de population. Une plus grande population reduit les recettes et les depenses, suggerant dece fait que la taille relative du secteur public est en moyenne plus petite dans les plus grands pays.En effet, Alesina et Wacziarg (1998) soutiennent que la taille de la population a travers l’existencedes economies d’echelle affecte celle du secteur public dans la production des biens publics.Cependant, plus la population rurale est importante plus la demande d’investissement en infra-structures et par consequent les depenses gouvernementales sont elevees (Sturm 2001). L’autrefacteur demographique qui peut etre pris en compte, et susceptible d’expliquer la forme de lacourbe est la structure de la pyramide des ages. Comparativement au reste de la population, lespersonnes agees disposent de moins de revenu et sont plus concernees par la consommationimmediate. De plus, une forte proportion des jeunes sans emploi comme c’est le cas des paysde la sous-region peut expliquer le faible niveau des revenus mais egalement le volume important

Graphiques 3 et 4. Fiscalite et developpement. Source : World Development Indicators (2007), nosconstructions.

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des depenses. Parmi les autres facteurs les plus souvent cites, il y a le degre d’urbanisation quioccupe une grande place. Beaucoup d’arguments logiques sont mobilises en faveur de cette vari-able. En effet, reunies sur un espace geographique plus reduit, les entreprises urbaines dont lesactivites commerciales et industrielles s’accompagnent de l’amelioration des qualifications sontplus susceptibles de s’acquitter facilement d’impots a la complexite croissante. L’urbanisationcree par ailleurs une demande forte pour l’amelioration des infrastructures et par consequentun besoin d’expansion des depenses publiques. En outre, la ville reduit considerablement lapart des productions autoconsommees et se traduit donc par une marchandisation ou une mon-etarisation des echanges.

L’incidence du commerce international et de la structure du systeme productif

Le commerce international et la structure productive essentiellement dominee par les activitesagricoles, constituent dans les pays en voie de developpement les principales sources de mobil-isation des ressources publiques. Mais leur fiscalisation suscite a la fois difficultes et controverses.Ainsi, pendant longtemps comme l’ont montre divers travaux et particulierement le rapport Berg(1981), les mauvaises performances agricoles des pays africains provenaient en partie deprelevements excessifs sur l’agriculture.

Relation entre les variables fiscales et le commerce international

Les Graphiques 7 et 8 montrent un ajustement entre le commerce international et les indicateursde revenu et de depenses. Ils font apparaıtre que plus la part du commerce international dans lePIB augmente, plus la taxe sur le revenu et les depenses du Gouvernement baissent, mais faible-ment. Les points sont moins disperses autour de la droite de regression ce qui temoigne d’un meil-leur ajustement. Le commerce international joue pourtant un role important dans la croissanceeconomique des pays. Il est generalement admis que l’association entre ouverture commercialeet les recettes/depenses est positive. En effet, la structure des taxes sur le commerce exterieur,quel que soit le niveau de revenu par tete, fait apparaıtre une part preponderante des taxesassises sur les importations. La part des taxes sur les exportations ne depasse que rarement les

Graphiques 5 et 6. Fiscalite et population. Source : World Development Indicators (2007), nosconstructions.

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10 % des taxes du commerce exterieur pour les pays pauvres en general et devient quasi insignif-iante pour les pays riches. La justification theorique a la base de cette analyse est plutot favorable aune taxation des importations. Elle permet en effet non seulement d’obtenir des recettes fiscalesmais aussi de proteger certains secteurs vulnerables de l’economie nationale.11 Taxer les exporta-tions revient au contraire a elever le prix international et a exercer un effet depressif sur lademande externe. Une taxation des exportations ne se justifie donc que dans le cas d’une situationde monopole sur les marches internationaux ou si l’elasticite prix des biens taxes est faible.12

Relation entre les variables fiscales et la valeur ajoutee de l’agriculture

L’association entre la part de la valeur ajoutee agricole et les taxes sur le revenu/depenses nepermet pas d’obtenir une droite d’ajustement classique et suffisamment claire (Graphique 9 et10). L’observation des nuages de points laisse supposer qu’il n’existe pas de correlation netteentre les taxes sur le revenu/depenses et la valeur ajoutee de l’agriculture. A des niveaux plusbas de valeur ajoutee agricole, une augmentation de la taille du secteur agricole est generalementassociee a une augmentation de l’investissement public. L’idee selon laquelle les petits produc-teurs agricoles echappent a toute forme d’imposition est largement repandue, en particulier au

Graphiques 7 et 8. Fiscalite et commerce international. Source : World Development Indicators (2007), nosconstructions.

Graphiques 9 et 10. Fiscalite et valeur ajoutee agricole. Source : World Development Indicators (2007), nosconstructions.

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sujet des producteurs africains qui de surcroıt, ont des proportions d’autoconsommationsuperieures a celle des autres PED. Cependant, ces pays ont utilise des instruments de fiscaliteindirecte a travers des organismes charges de la collecte de la production et la stabilisation desprix. Ces caisses de stabilisation des prix des matieres premieres chargees de stabiliser les prixpayes aux producteurs sur la base des prelevements dans les periodes de hausse des cours ontete, principalement dans les pays africains, l’un des moyens les plus efficaces pour taxer lesrevenus des agriculteurs.13

Conclusion et recommandations

En conclusion de cet article, les statistiques disponibles et les faits stylises qui en decoulent mon-trent que la sous-region est, comparativement au reste de l’Afrique et d’autres regions du monde,a des niveaux de taxation faible (en raison de la faiblesse des mecanismes de collecte, des struc-tures du systeme d’imposition complexe, etc.), et en baisse au cours des periodes considerees. Ellepresente pourtant des taux de croissance eleves, mais fragiles et a faible contenu en emploi. Si elleveut s’engager resolument vers la recherche de taux de croissance suffisamment stables et favor-ables aux pauvres, elle devrait mettre en place des mesures et mecanismes adequats permettant demobiliser les ressources interieures. A cet effet, et sans etre exhaustif les actions suivantes peuventetre mises en œuvre : (1) simplifier la legislation fiscale et renforcer la gouvernance. Il va de soique la qualite de l’administration fiscale, son organisation, le nombre, la formation, la qualite desfonctionnaires fiscaux jouent un role decisif dans la capacite de mobilisation de l’impot. Par ail-leurs, la legitimite de l’Etat conditionne directement la facon dont l’impot est percu par les agentseconomiques. Si l’Etat n’apparaıt que comme le lieu d’appropriation du pouvoir par un groupe dela population, soit ethnique, soit de classe, alors l’impot sera probablement considere comme uneforme de tribut dont la legitimite serait remise en cause et dont la fonction ne serait pas ledeveloppement du bien commun ; (2) elargir l’assiette fiscale a tous les acteurs economiquesen imaginant un mode de fiscalisation du secteur informel et en encourageant le civismefiscal14 (lutte contre la corruption); (3) renforcer la recherche analytique et statistique sur les poli-tiques budgetaires afin d’en comprendre les determinants et effets au niveau national etd’ameliorer l’efficience dans la formulation des politiques. La reflexion sur la mobilisation desressources devrait s’etendre aux recettes douanieres. Il s’agit de creer les mecanismes permettantde les securiser dans un contexte de liberalisation des echanges commerciaux ou se posent de nou-veaux defis dans le cadre de la mondialisation (trafics illicites des marchandises, criminalite orga-nisee, etc.). Enfin, la cooperation douaniere peut prendre la forme d’une aide renforcee auxorganisations regionales qui s’affirment de plus en plus en tant qu’echelons de coordination, depilotage et de controle des politiques communes, notamment en matiere agricole et commerciale.De plus, il faut combiner les incitations fiscales avec des mecanismes d’evaluation des perform-ances en vue d’assurer l’allocation efficiente des ressources aux entreprises economiquementrentables operant dans les secteurs traditionnels. La mise en place de ces mesures est susceptibled’accroitre la collecte des ressources interieures et de reduire la dependance des pays de l’AfriqueCentrale vis-a-vis des flux de capitaux exterieurs tels que l’aide publique au developpement,l’emprunt a l’etranger et les investissements directs etrangers. De meme, une plus grandedependance aux ressources interieures, en particulier les recettes publiques, peut conduire al’amelioration du systeme de gouvernance.

Remerciements

L’auteur remercie particulierement les deux rapporteurs anonymes de la revue pour leurs com-mentaires sur la version anterieure de cet article. Il remercie egalement Mademoiselle Laura

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Ngomegni pour son assistance dans la construction de la base de donnees. Messieurs FoudaOwoundi Jean Pierre, Mignamissi Dieudonne, Gandjon Fankem Gislain Stephane et MadameEtogo Messomo Mireille epouse Sandji ont a travers leurs precieux commentaires positivementameliore la version anterieure de cet article. Nos remerciements s’adressent enfin a MonsieurEkoumbamaka Paul, Mesdames Nyamouth Zanga Bernadette, Nyassam Angeline, MetaSophie, Ikito Badiwedi Claude Cecile qui ont assure la mise en forme de l’article. Toutefois,l’auteur reste cependant comme il se doit, seul responsable des erreurs et omissions quipeuvent subsister dans cette contribution.

Notice biographiqueDesire Avom est professeur agrege des sciences economiques en poste a la Faculte des scienceseconomiques et de gestion de l’Universite de Yaounde II-Soa, ou il occupe les fonctions de vice doyencharge de la programmation et du suivi des activites economiques. Il a cree et dirige le Laboratoired’analyse et de recherche en economie appliquee (LAREA). Ses domaines de recherche portent surl’economie internationale dans sa dimension regionale, la croissance en lien avec la reduction de la pauvrete,les matieres premieres et developpement etc. Il a publie dans de nombreuses revues internationales.

Notes1. Comprend 10 pays : Angola, Burundi, Cameroun, Congo, Gabon, Guinee-Equatoriale, Republique

Democratique du Congo, Republique Centrafricaine, Sao Tome et Principe et Tchad. Ces pays sontregroupes au sein de la Communaute Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) creeeen octobre 1983. La population de la CEEAC est aujourd’hui estimee a pres de 150 millions d’habi-tants, inegalement repartie sur une superficie d’environ 6 666 900 km2. Il convient de noter que leRwanda s’est retire de la CEEAC en 2007.

2. Malgre cette progression, presqu’aucun pays developpe n’a atteint l’objectif de 0,7 % du PIB.3. Plusieurs autres raisons peuvent etre avancees pour justifier la necessite de mobiliser les ressources

internes pour les pays africains en general et ceux de l’Afrique Centrale en particulier (Gupta et Sham-suddin 2008) : (1) le caractere aleatoire, limite et toujours conditionnel de l’aide publique audeveloppement milite en faveur de la recherche d’autres sources de financement. L’objectif fixe parles pays developpes en matiere d’aide de consacrer 0,7 % de leur PIB est bien loin d’etre atteint parde nombreux pays ; (2) les projets finances par des apports de capitaux etrangers generent le plussouvent des couts d’exploitation et d’entretien supplementaires qu’il faut financer par des ressourcesinterieures ; (3) une mobilisation accrue des recettes favorise la stabilisation macroeconomique, surtoutdans les pays qui dependent plus d’apports financiers exterieurs. Par ailleurs, elle augmente lacredibilite des pays dans leur effort de developpement economique et social ; (4) l’augmentationdes recettes interieures est susceptible d’aider l’Afrique Centrale a relever certaines contraintes lieesa la mondialisation de plus en plus croissante. En effet, dans le cadre des accords de partenariatseconomiques avec l’Union Europeenne, les pays africains sont soumis aux exigences des reglesedictees par l’Organisation Mondiale du Commerce, en liberalisant davantage leurs regimes fiscaux,en supprimant ou en baissant substantiellement leurs droits de douane; (5) la fiscalite surtout lors-qu’elle est decentralisee accroıt l’incitation des agents economiques a participer au processus politiqueet renforce l’obligation pour les gestionnaires de rendre compte sur la gouvernance et l’efficacite desdepenses publiques; (6) la mobilisation des ressources interieures peut participer au renforcement desinstitutions budgetaires.

4. Plan de developpement politique, economique et social, approuve par le sommet de l’Organisation del’Unite Africaine, a Lusaka, en juillet 2001.

5. Le terme performance signifie que l’on apprecie le niveau des recettes publiques en tenant compte desspecificites des differents pays et notamment de leurs caracteristiques structurelles.

6. Une depense est pro-cyclique quand elle accentue le cycle economique : forte depense quand la con-joncture des produits primaires est favorable et, au contraire, restriction de depenses quand la conjonc-ture est defavorable.

7. Une analyse econometrique des determinants de la politique fiscale est en cours.8. Ce qui pourrait laisser presager l’existence des outliers susceptible de tirer selon les cas les moyennes

vers le haut ou vers le bas.

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9. Il est couramment montre dans la litterature que les taxes directes domestiques sont tres difficiles acollecter. En revanche, les taxes directes offrent plus de progressivite et sont egalement les plus redis-tributives de la fiscalite. Dans cette perspective, le changement de la structure du systeme d’impositionfiscale en vue de renforcer l’incidence des recettes des taxes directes devra aider a la promotion del’egalite dans la distribution.

10. La plupart des pays africains ont cependant un PIB par habitant faible et donc le rapport entre PIB parhabitant et les recettes/depenses dans l’echantillon africain ne deviennent plat a aucun point significatif(CEA 2008).

11. En ce qui concerne les pays de l’Afrique Centrale, la taxation des importations serait essentiellementmotivee par le souci d’augmenter leurs recettes budgetaires. En effet, ces pays sont structurellementdeficitaires et la part de leurs recettes douanieres dans le total des recettes oscille entre 30 et 35 %.

12. L’une de ces deux conditions n’etant que rarement remplie, il est comprehensible que la taxation desexportations se limite a quelques biens et a quelques pays seulement.

13. Le fait que le taux de cette taxe est le meme quel que soit le volume de production des agriculteurs,implique une distribution non progressive de la charge. La taxe implicite supportee par les petits pro-ducteurs sera proportionnellement identique a celle supportee par les gros producteurs. Mais cescaisses ont connu des problemes enormes de gestion du fait qu’elles servaient de Tresors annexesaux Etats. La plupart ont d’ailleurs ferme ou subsiste sous de formes nouvelles.

14. En effet, les travaux menes par Diamond et Mirless (1971) et Diamond (1975), montrent que le niveaudes taxes depend de plusieurs facteurs. Il depend positivement de la variation des recettes fiscales auxvariations du revenu des menages. Plus le niveau du revenu initial est faible, plus la propension a con-sommer les biens est eleve et plus importantes sont les recettes de l’Etat. En revanche, le niveau destaxes est d’autant plus faible que le poids social que l’Etat accorde aux consommateurs les moins aisesest eleve.

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