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Trop c’est trop.On a compris et il n’est pas utile d’accumuler les détails sur la vie privée de Dominique Strauss-Kahn pour nous convaincre du caractère hors norme du comportement de celui qui, il y a six mois, était considéré comme élu alors même qu’il n’était pas encore offi- ciellement candidat. Et la nausée qui nous envahit n’a rien à voir avec celle du personnage de Sartre pris d’un malaise devant la découverte de sa contingence ! Dans le cas de l’ancien patron du FMI, il n’y a rien de métaphysique dans l’écœurement qui nous saisit face à cette double vie dont on se dit qu’elle aurait forcément donné prise à d’incroyables chantages si d’aventure il s’était retrouvé à l’Élysée. Mais Strauss-Kahn n’est pas le seul à nous donner la nausée. C’est pour le lecteur d’une presse qui habituellement n’a rien à voir avec les journaux trash ou people une forme de double peine. Car c’est la presse qui ajoute la complaisance au graveleux par son compte rendu minutieux et quasi quotidien de ce que fut la vie de l’ancien ministre de Jospin.Trop d’informations tue l’information, et la publication de sms à caractère privé par exemple n’apporte aucun élément nouveau de nature à modi- fier le jugement que chacun peut avoir sur les agissements de DSK. Est-il bien utile dans ces conditions d’ajouter à la sidéra- tion qui a stupéfié les Français, dès le 14 mai dernier, la curiosité voyeuriste d’une description inutilement détaillée ? Entre l’information légitime et même indispensable sur des faits et des affaires que les intéressés s’emploient méthodiquement à étouffer et les dérives d’un étalage qui n’est que le relais complice de fuites organisées, il y a nécessaire- ment un juste milieu. Libre à chacun de l’apprécier, pour éviter les manipulations dont la presse se fait parfois la victime consentante.Sinon le risque est grand que certains mauvais esprits à droite comme à gauche, surfant sur le discrédit dont souffrent tout autant les médias que les politiques, se saisissent de ces dérives pour tenter de museler l’information. Par exemple en proposant la création d’un conseil de l’ordre des journalistes dont la très mauvaise idée ressurgit régulièrement. Évitons de donner des bois pour se faire battre, évitons surtout que la liber- té d’information soit mise à mal sous couvert de morale et de déontologie imposées de l’extérieur. La nausée Et aussi Des socialistes verts de rage par Nathalie Segaunes > p. 6 L’opinion de Bruno Jeudy > p. 6 Hidalgo devant l’admiroir d’Éric Fottorino > p. 7 Hollande toujours dans le jeu par Brice Teinturier > p. 8 Le Front national découpé au scalpel de Philippe Tesson > p. 10 Les cahiers de campagne de Michèle Cotta > p. 11 Le congrès des maires par Joël Genard > p. 12 à 15 Bolloré et la Bourse par Axel de Tarlé > p. 18 Le photovoltaïque en berne par Jean-Louis Caffier > p. 20 Stop or go en Iran par François Clemenceau > p. 22 Le chiffre Éditorial Robert Namias Gérant-Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias L’HÉMICYCLE www.lhemicycle.com Retrouvez RTE sur son stand au Salon des Maires 2011 Stand K40, Hall 3 Autour du réseau électrique, il y a toujours un enjeu local à partager André Lambert P. 4 Jean-Jack Queyranne P. 3 Franck Louvrier P. 2 JACQUES DEMARTHON/AFP PHILIPPE DESMAZES/AFP MYCHELE DANIAU/AFP Le Sénat a voté la suppression du conseiller territorial, symbole de la réforme voulue par Nicolas Sarkozy qui devait compléter les lois Defferre et Raffarin. Sans conséquence aujourd’hui, ce vote confirme que le débat sera rouvert si la gauche devait l’emporter aux prochaines élections. L a décentralisation, tout le monde en parle, mais qui la veut vraiment ? Il a fallu l’arri- vée de Gaston Defferre au ministère de l’Intérieur en 1981 pour imposer un authentique transfert d’une partie de l’autorité de l’État vers les communes, les départements et les régions. Il aura fallu vingt ans pour que, tirant les en- seignements de ces lois fondamentales, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, complète ces textes par la création de nouvelles compétences dévolues aux collectivités locales. Depuis, les gouver- nements ont balancé entre protection des prérogatives de l’État centralisateur et réorganisation des administrations issues de la décentralisation. Nicolas Sarkozy a souhaité simplifier le fonc- tionnement régional en réduisant les intermédiaires. Mais pour l’heure le résultat est plutôt que le mille-feuille régional s’est encore gonflé de quelques strates supplémentaires. À l’époque la réforme a été fondatrice mais incomplète et inachevée. Elle l’est encore aujourd’hui et mérite d’être clarifiée, en particulier en ce qui concerne les compétences financières des différentes collectivités. Les idées sont nombreuses et parfois contradictoires. Elles nourriront un débat nécessaire qui devrait faire partie des grands travaux du prochain quin- quennat. Pour que la réforme enfin sinon s’achève, du moins se simplifie. R.N. > Lire p. 2, 3, 4 et l’analyse de Guillaume Tabard p. 5 Décentralisation La réforme inachevée Acte I : Defferre. Acte II : Raffarin. Qui pour l’acte III ? Jean-Pierre Raffarin. Il a fait adopter l’acte II de la décentralisation. 26 millions ! De tonnes de poissons pêchées illégalement chaque année dans le monde. Soit 15 % du volume mondial. Ce braconnage des mers met en danger les stocks et déstabilise l’environnement. Compte tenu de l’importance de sa flotte et de la taille de son marché, l’Europe porte une responsabilité particulière dans cette situation. Qui s’explique par le fait que les deux tiers des océans ne relèvent d’aucune juridiction nationale. C’est dans ces zones qu’a lieu l’essentiel des pêches illégales. NUMÉRO 425 — MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011 — 2,15 ¤ THOMAS SAMSON/AFP

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l'Hémicycle numéro 425 du mercredi 23 novembre 2011

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Page 1: l'Hémicycle - #425

Trop c’est trop. On a compris et il n’estpas utile d’accumuler les détails sur lavie privée de Dominique Strauss-Kahnpournousconvaincreducaractèrehorsnorme du comportement de celui qui,il yasixmois,étaitconsidérécommeélualorsmêmequ’il n’étaitpasencoreoffi-

ciellement candidat. Et la nausée qui nous envahit n’a rienà voir avec celle du personnage de Sartre pris d’un malaisedevant la découverte de sa contingence ! Dans le cas del’ancien patron du FMI, il n’y a rien de métaphysique dansl’écœurement qui nous saisit face à cette double vie dont onse dit qu’elle aurait forcément donné prise à d’incroyableschantages si d’aventure il s’était retrouvé à l’Élysée. MaisStrauss-Kahnn’estpas le seul ànousdonner lanausée.C’estpour le lecteur d’une presse qui habituellement n’a rien à voiravec les journaux trashoupeopleune formededoublepeine.Carc’est lapressequiajoute lacomplaisanceaugraveleuxparsoncompte renduminutieux et quasi quotidiendeceque futla vie de l’ancien ministre de Jospin. Trop d’informations tuel’information, et la publication de sms à caractère privé parexemplen’apporteaucunélémentnouveaudenatureàmodi-fier le jugementquechacunpeutavoir sur lesagissementsdeDSK.Est-il bienutiledanscesconditionsd’ajouterà lasidéra-tionquiastupéfié lesFrançais,dès le 14maidernier, lacuriositévoyeuriste d’unedescription inutilement détaillée?Entre l’information légitime et même indispensable surdes faits et des affaires que les intéressés s’emploientméthodiquementàétoufferet lesdérivesd’unétalagequin’estque le relais complice de fuites organisées, il y a nécessaire-ment un justemilieu. Libre à chacunde l’apprécier, pour éviterles manipulations dont la presse se fait parfois la victimeconsentante. Sinon le risque est grand que certains mauvaisesprits à droite comme à gauche, surfant sur le discrédit dontsouffrenttoutautantlesmédiasquelespolitiques,sesaisissentdecesdérivespourtenterdemuselerl’information.Parexempleenproposant lacréationd’unconseildel’ordredes journalistesdont la trèsmauvaise idée ressurgit régulièrement. Évitons dedonnerdesboispoursefairebattre,évitonssurtoutquelaliber-té d’information soit mise àmal sous couvert demoraleetdedéontologie imposéesde l’extérieur.

La nausée

Et aussiDes socialistes verts de rageparNathalieSegaunes> p.6 •L’opiniondeBrunoJeudy> p.6 •Hidalgodevant l’admiroir d’ÉricFottorino> p. 7 •Hollande toujours dans le jeuparBriceTeinturier> p.8 •

LeFrontnational découpéau scalpel dePhilippeTesson> p. 10 •

Les cahiers de campagnedeMichèleCotta> p. 11 •Le congrèsdesmaires par JoëlGenard> p. 12 à 15 •Bolloré et laBourseparAxeldeTarlé> p. 18 •Lephotovoltaïqueenbernepar Jean-LouisCaffier> p. 20 •Stopor goen IranparFrançoisClemenceau> p. 22

Le chiffre

ÉditorialRobert Namias

Gérant-Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias

L’HÉM

ICYCLE

www.lhemicycle.com

Retrouvez RTE sur son standau Salon des Maires 2011

Stand K40, Hall 3

Autour du réseau électrique,il y a toujours un enjeu local à partager

AndréLambert

P.4

Jean-JackQueyranne

P. 3

FranckLouvrier

P. 2

JACQ

UES

DEMAR

THON/AFP

PHILIPPE

DESM

AZES/AFP

MYCHELEDA

NIAU/AFP

Le Sénat a voté la suppression du conseiller territorial, symbolede la réforme voulue par Nicolas Sarkozy qui devait compléterles lois Defferre et Raffarin. Sans conséquence aujourd’hui,ce vote confirme que le débat sera rouvert si la gauche devaitl’emporter aux prochaines élections.

La décentralisation, tout lemonde en parle, mais qui laveut vraiment ? Il a fallu l’arri-

vée de Gaston Defferre au ministère del’Intérieur en 1981 pour imposer unauthentique transfert d’une partie del’autorité de l’État vers les communes,les départements et les régions. Il aurafallu vingt ans pour que, tirant les en-seignements de ces lois fondamentales,Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre,complète ces textes par la création denouvelles compétences dévolues aux

collectivités locales. Depuis, les gouver-nements ont balancé entre protectiondes prérogatives de l’État centralisateuret réorganisation des administrationsissues de la décentralisation. NicolasSarkozy a souhaité simplifier le fonc-tionnement régional en réduisant lesintermédiaires. Mais pour l’heurele résultat est plutôt que le mille-feuillerégional s’est encore gonflé dequelques strates supplémentaires. Àl’époque la réforme a été fondatricemais incomplète et inachevée. Elle

l’est encore aujourd’hui et mérited’être clarifiée, en particulier en ce quiconcerne les compétences financièresdes différentes collectivités.Les idées sont nombreuses et parfoiscontradictoires. Elles nourriront undébat nécessaire qui devrait faire partiedes grands travaux du prochain quin-quennat. Pour que la réforme enfinsinon s’achève, du moins se simplifie.

R.N.>Lire p. 2, 3, 4

et l’analyse deGuillaumeTabard p. 5

Décentralisation

La réforme inachevée

Acte I :Defferre.Acte II : Raffarin.

Qui pour l’acte III ?

Jean-Pierre Raffarin. Il a fait adopter l’acte II de ladécentralisation.

26 millions !De tonnes de poissons pêchées illégalement chaqueannée dans le monde. Soit 15 % du volume mondial.Ce braconnage des mers met en danger les stockset déstabilise l’environnement. Compte tenu del’importance de sa flotte et de la taille de son marché,l’Europe porte une responsabilité particulière dans cettesituation. Qui s’explique par le fait que les deux tiers desocéans ne relèvent d’aucune juridiction nationale. C’estdans ces zones qu’a lieu l’essentiel des pêches illégales.

NUMÉRO 425 —MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011 — 2,15 ¤

THOMAS

SAMSO

N/AFP

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2 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011

Agora

Enmatièrededécentralisation,sommes-nousaujourd’hui dansunentre-deux insatisfaisant?Il est clair qu’il faut ouvrir unenouvelle ère. D’abord l’architecturede notre organisation territorialeactuelle a été conçue pour satisfaireune gouvernance centralisée à uneépoque où l’Union européennen’existait pas. Inutile de dire quecela a depuis beaucoup changé.Ensuite l’abstention est de plus enplus élevée lors des élections inter-médiaires. Elle a été de plus de 50 %lors des régionales de mars 2010.Moins d’un Français sur cinqseulement connaît également sonprésident de conseil régional. Il fautrépondre à ce phénomène inquié-tant. Enfin, il y a la crise. Aujourd’huiil y a trop de chevauchements insti-tutionnels, parfois inutiles. Il fautfaire des économies. Ces vingt-cinqdernières années, les dépenses descollectivités locales ont augmentédeux fois plus que la richesse natio-nale. Il y a, pour faire simple, deuxgrands blocs de dépenses en France :celles de l’État, c’est 280 milliardsd’euros (en dehors des sommesversées aux collectivités locales dansle cadre de transferts de compé-tences) ; celles de l’ensemble des col-lectivités locales, qui représentent220milliards d’euros. Il faut donc àtout prix que, lorsque l’État prenddes mesures drastiques d’écono-mies, des mesures soient prises enparallèle par les collectivités. Il nepeut pas y avoir d’un côté uneFrance fourmi et de l’autre uneFrance cigale. Une France à deuxvitesses, cela ne peut pas marcher.

Quelle peut être cette nouvelleétape ?Il faut en finir avec l’empilementdes structures. Il doit y avoir désor-mais deux grandes familles : uncouple région-départements, uncouple communes-intercommu-nalité. C’est l’esprit de la réformeterritoriale entreprise par le Gou-vernement. Pour la première fois,synergie et travail en communont été préférés aux petits préscarrés et à la bunkérisation. Dansle futur, cela doit encore êtredavantage le cas.

Onnesupprimedoncaucunéchelon?Non. Il faut arrêter avec ce serpentde mer : il n’y aura pas de grandsoir des régions ou des départe-ments ! On ne pourra pas rayerde la carte un échelon. L’échelondépartemental est l’échelon his-torique. L’échelon régional estl’échelon économique. L’écheloncommunal est l’échelon de proxi-mité. Il faut qu’ils travaillentplus ensemble de manière mieuxcoordonnée. Il faut aussi réduirele nombre d’élus. Il faut qu’ilssoient moins nombreux et mieuxélus. Ce n’est pas une mesuredémagogique mais une mesured’efficacité. Dans nombre depays étrangers, ils sont d’ailleursbien moins nombreux qu’enFrance. C’est toute la démarchede la création des conseillers ter-ritoriaux. Grâce à cette réforme,nous passerons de 6 000 conseillersrégionaux et généraux à 3 500conseillers territoriaux.

L’Étatdoit-il sedéfairedecertainescompétences?Qui fait quoi ? C’est la vraie ques-tion. Les Français ne savent pasquelle compétence est rattachée àtelle collectivité. La compétencegénérale a été abrogée, c’est bien.Mais il faut une répartition plusclaire. Toutes les collectivités doiventrester compétentes sur le patri-moine, la culture et le sport, car cesont trois domaines qui façonnentl’identité nationale d’un territoire.Enmatière de logement, il pourraity avoir de nouvelles compétencesdonnées par l’État aux collectivités.Mais le poids et les prérogativesde l’État sont indispensables pourpermettre une répartition égalitairesur tout le territoire. En revancheune dose de « déconcentration »supplémentaire des administra-tions centrales vers les préfets estnécessaire.

Selonun rapportduministèreduBudget, les effectifsdescollectivités localesn’ont cesséd’augmenter cesdernièresannées.Comment les limiter?La règle du non-remplacementd’un fonctionnaire sur deux partantà la retraite édictée depuis 2007doit aussi s’appliquer au niveaudes régions. Ces dernières ontaugmenté leurs effectifs de 49 %depuis 2007. Il faut mettre unterme à cette explosion. Afin demieux contrôler l’évolution desdépenses, il faut aussi que les bilansdes régions, départements et com-munes soient présentés publique-ment chaque année, comme vient

de le proposer le Premier ministre.Entre 2003 et 2007, leurs dépensesont progressé de 50 milliardsd’euros. C’est inacceptable. Autressources d’économies : les prési-dents des exécutifs régionauxdevraient geler leurs indemnités,comme les ministres viennent dele faire, et cesser les dépenses ahu-rissantes des régions en matièrede communication. À ce propos jesouhaite par exemple que l’onrende obligatoire la mention ducoût des campagnes de publicitésur le support utilisé. Enfin il fautélargir les compétencesdes chambresrégionales des comptes en per-mettant aux élus locaux de lessaisir pour avis sur une législationapplicable.

Faut-il élire au suffrage direct lesconseillers intercommunaux?Je refuse l’élection au suffrage uni-versel du président dans l’inter-communalité, car ce serait de la« supercommunalité » et l’inversedu renforcement de la coopérationque nous recherchons. La légiti-mité des maires est essentielledans notre pays. Une électiondirecte du président des structuresintercommunales délégitimeraitle maire et nuirait à son statut. LesFrançais sont attachés à leurs36 000 maires. C’est un maillageessentiel.En revanche, il est normal de rap-procher nos conseillers intercom-munauxdenos concitoyens dès lorsque leurs compétences augmentent.C’est la raison pour laquelle nousavons proposé que dans chaque

commune l’élection puisse dési-gner directement (par un systèmede fléchage) ses représentants àl’intercommunalité.

Ya-t-il encore de vraiesdifférences entre droite et gauchesur la décentralisation ?Non. Il existe une vraie différenceentre réformateurs et conserva-teurs. Les élus sont confrontésaux mêmes problèmes ; les solu-tions sont souvent similaires.L’approche de gestion d’une villecomme Nantes est proche de cellede Bordeaux. Mais aujourd’hui, jedéplore que les régions soientutilisées pour des manœuvrespoliticiennes contre le Gouverne-ment. Elles prennent leurs élusen otage en organisant des débatssur les retraites ou la situationau Proche et Moyen-Orient alorsqu’elles n’ont aucune compétenceen la matière. L’Assemblée desrégions de France est égalementdevenue un organe du PS aulieu de faire des propositionsconcrètes. C’est inacceptable.

Et l’attitude duSénat, qui vient desupprimer le conseiller territorial ?Le Sénat est certes la chambredes collectivités locales, mais cen’est pas une chambre d’opposi-tion qui doit bloquer l’action duGouvernement. C’est une dérivedangereuse.

Propos recueillispar Ludovic Vigogne

Chef du service politiquede Paris Match

FRANCK LOUVRIERCONSEILLER RÉGIONALDES PAYS DE LA LOIRE

Pour le conseiller de Nicolas Sarkozy, la réduction du nombre des élus locaux prévue par la nouvelleréforme des collectivités territoriales est une mesure d’efficacité indispensable.Cette réforme, selonFranck Louvrier,qui est également secrétaire national chargé des collectivités à l’UMP,doit marquerle début d’une ère nouvelle en matière de décentralisation.

«Ladécentralisationdoit en finir avec l’empilementdes structures.Deuxgrandes familles suffisent :

région-départementset communes-intercommunalité »

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/AFP

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FrançoisHollandeprometunenouvelle réformede ladécentralisationcenséeêtreporteused’économies.Quellepourrait-elle être?Il faut un acte III de la décentra-lisation qui redonne un sens àla dimension territoriale. Cetteréforme devra reposer sur troisprincipes : la responsabilité, lasolidarité et le respect. Elle doitreprésenter une nouvelle avancéeaprès la régression provoquée parla loi de décembre 2010. C’estl’intérêt du pays. La France a plusque jamais besoin de pouvoirslocaux forts alors que la réformede 2010 a organisé une reprise enmain des collectivités locales parl’État. Cet acte III est un impératifpour réformer celui-ci. Il doit êtreune rupture. L’État doit être re-centré sur ses responsabilités. Larévision générale des politiquespubliques (RGPP) a débouché surun double échec. Les administra-tions centrales et déconcentréessont toujours présentes, alors queleurs compétences ont été dé-centralisées. Quant aux domainesqui relèvent de la responsabilitéétatique comme la justice, l’édu-cation ou la police, la situation estpire car leursmoyens ont été rognés.Cette réforme doit égalementmettre un terme aux doublons,dont l’exemple le plus mani-feste est l’existence au sein duGouvernement d’un ministère del’Apprentissage alors que cette res-ponsabilité relève des régions. Lesgisements d’économies existent.Ils s’imposent alors quenos finances

publiques sont dans un étatdramatique.

Sincèrement, ladécentralisationa-t-elledéjàpermisde fairedeséconomies?Lesdépensesdescollectivités localesn’ont-ellespasflambécesdernièresannées?Il faut rapprocher cette augmen-tation des transferts de compé-tences. Prenons l’exemple des TOS1,ces agents des lycées et collègestransférés aux régions et départe-ments. À l’évidence, ils ont accrula masse salariale. Mais pourl’ensemble des régions, entre 2004et 2010, hors transferts de compé-tences, l’augmentation des effec-tifs n’a été que de 3 800 emplois.Cela me semble raisonnable auregard des responsabilités qu’ellesassument. C’est la même chosepour l’intercommunalité. Si sesemplois ont augmenté de 80 %,

ses missions aussi. La France n’estpas suradministrée localement.Sur ce point, l’État cherche unemauvaise querelle.

Faut-il supprimerunéchelon?Cedébatn’est-il pasunéternelserpentdemer?Je n’y suis pas favorable. C’est unefausse bonne idée. Notre organi-sation territoriale ressemble à cellede nos voisins européens. Il fautplutôt aller au bout de la décen-tralisation, c’est-à-dire clarifier en

recherchant la non-redondancedes politiques publiques avec ladésignation d’un chef de file. Jecrois aussi que la contractualisa-tion est une réponse à l’absencede tutelle d’une collectivité surl’autre.

Faut-il réduire lenombrederégions?DominiquedeVillepinproposede les rameneràhuit oudixafinqu’elles soientplusde taillede rivaliser avec lesLänderallemands…Les Länder de Hambourg, de Brêmeou le Pays basque espagnol sontl’équivalent des petites régionsfrançaises. S’il faut permettre desregroupements, ils doivent ré-pondre à la volonté des territoireset non être imposés. Créer desgrandes régions sans ancrageauprès des populations, à marcheforcée, serait une erreur.

Dequelle compétence l’Étatdevrait-il encore sedéfaire?Àquelles collectivités localesles confier?Il faut donner plus de pouvoirsaux régions. L’innovation, l’ensei-gnement supérieur et la recherchedoivent leur être transférés. L’Étatdoit conserver sa compétence enmatière de personnel et de défi-nition des diplômes. Il faut aussileur confier l’orientation, l’emploiet la formation. En 2010, le budgetde la région Bade-Wurtemberg

était de 35 milliards d’euros pour10,7millions d’habitants. Le budgetde la région Rhône-Alpes, jumeléeavec ce Land, est de 2,4 milliardsd’euros pour six millions d’habi-tants. Le rapport est de un à douze.La structure territoriale est certesdifférente entre la France et l’Alle-magne, l’histoire aussi. Mais il y aune sacrée marge !

Aufinal, l’Étatneva-t-il pas sortirtrèsaffaibli, pris enétauentre lescollectivitéset l’Europe?Pour être efficace, l’État doit pro-céder à un transfert de compé-tences à ces deux niveaux. Au-delàde l’euro, d’autres politiques pu-bliques doivent être transférées auniveau européen. C’est déjà le caset ce le sera encore plus demainpar exemple en matière écono-mique, migratoire ou diploma-tique. L’État, même s’il tente de

résister, y est contraint. On nepeut pas avoir de monnaie uniquesans une convergence budgétaireplus poussée. Lampedusa est unproblème européen… Quant auxcollectivités locales et surtout ence qui concerne les régions, ellesreprésentent un échelon de proxi-mité indispensable pour un bondéveloppement de l’action pu-blique. La transition énergétiquepasse par exemple principalementpar les régions. L’État doit aujour-d’hui se concentrer sur le régalien.

C’est une révolution tranquille qu’ilfaut opérer.

Avecdescollectivitésauxcompétencesbienplus larges,n’y a-t-il pasun risquede ruptured’égalité sur l’ensembledu territoire?C’est un argument classique, maisc’est la centralisation qui crée desinégalités. Je n’y crois pas. L’égalité,à laquelle les Français sont atta-chés, peut être assurée par unepolitique efficace de péréquation.

Leconseiller territorial est-ilmort-néaprès sasuppressionpar leSénat?L’Assemblée nationale se doitmaintenant d’achever le travail.Le conseiller territorial est un êtrehybride qui ne fait que renforcerla confusion des responsabilités. Ilfaut revenir à un conseiller régionalqui participe à de grandes orienta-tions stratégiques et un conseillergénéral en relation directe avecson territoire.

Onne fait doncpasbaisserlenombredesélus?L’économie que permettrait cetteréforme serait modeste (45millionsd’euros). De plus, il y avait desinvestissements à réaliser. Mais sur-tout, elle éloignerait trop les élus desFrançais qu’ils doivent représenter.

Propos recueillispar Ludovic Vigogne

Chef du service politiquede Paris Match

1. Personnels techniciens,

ouvriers et de service.

NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011 L’HÉMICYCLE 3

Agora

Très critiqueà l’égardde la réformede2010quiprévoit la créationduconseiller territorial, Jean-JackQueyranneaffirmeque laFrancen’estpas suradministrée localement.En revanche, leprésidentduconseil régionaldeRhône-Alpes,ancienministrede l’IntérieurdeLionel Jospin, reconnaîtquedeséconomies substantielles sontpossiblesà l’échelon régional.

«Il faut unacte III de ladécentralisationqui doitmarquer une rupture après la reprise enmain

des collectivités localespar l’État»

PHILIPPE

DESM

AZES

/AFP

JEAN-JACKQUEYRANNEPRÉSIDENT DU CONSEILRÉGIONAL DE RHÔNE-ALPES

«L’ACTE III DE LA DÉCENTRALISATION DOITDONNER PLUS DE POUVOIRS AUX RÉGIONS »

H425_p02-03:L'HEMICYCLE 21/11/11 17:45 Page 3

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4 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011

Agora

Faut-il unenouvelle étapededécentralisation?Pourquoi pas, mais un préalableest nécessaire : définir le conceptmême de décentralisation et re-positionner le rôle de l’État. Carcomment peut-on concilier uneprescription qui demeure nationaleavec unemise enœuvre et une res-ponsabilité financière locale ? C’estlà le défaut majeur de constructionde l’acte II de la décentralisation,dans la mesure où l’État continuede prescrire dans les domainesqu’il a transférés, tels que lesallocations de solidarité aux dé-partements. Le plus important estde définir d’abord l’objectif et lesmodalités de sa mise en œuvre. Leplus urgent est de cesser que tousles échelons territoriaux s’occupentensemble de la même chose enmême temps. La politique de laville en est un exemple : elle asso-cie une multitude de partenaires,elle coûte une fortune pour desrésultats insuffisants. Lorsque l’effi-cacité de l’action publique néces-site que certaines compétencesrestent partagées, un chef de filedevra être désigné et un guichetunique mis en place pour l’ins-truction des dossiers de demandede subvention.

Ladécentralisationest-elle, enthéorie, sourced’économies?Non, son principal mérite est derapprocher le centre de décisionde là où s’accomplit l’action pu-blique. Mais cela suppose que celuiqui agit dispose des pouvoirs, desressources et d’une libre apprécia-tion de la mise en œuvre. Or la

décentralisation à la Française,c’est l’État qui transfère – parexemple, aux départements, unepolitique sociale – en conservantpour lui seul le pouvoir de pres-cription, qui confie la gestionà un tiers, la caisse d’allocationsfamiliales, et confine le départe-ment au rôle exclusif de payeuravec des ressources sans aucunecorrélation avec la dépense. C’estune situationkafkaïenne. Lepouvoirde prescrire suppose le devoir definancer. Le corollaire naturel dela décentralisation doit être : Quicommande paie !

Laréformeterritorialeestcontestéeàdroitecommeàgauche.Quefaut-ilgarder, que faut-il changer?Il faut conserver l’évolution del’intercommunalité pour dessinerdes territoires correspondant à unréel bassin de vie en communavec une taille critique qui per-mette de financer des projets. Plusde souplesse doit être donnéepour que les nouvelles commu-nautés définissent librement leurscompétences et leurs ressources.La possibilité de mutualisationdes moyens et des services doitêtre étendue à l’ensemble desniveaux de collectivités. Enfin, ilfaut renoncer à cette idée deconseiller territorial, car elle diviseinutilement les élus au momentoù il faut les appeler tous ausursaut et à la solidarité. Et je necrois pas du tout aux économies

que cette fonction est supposéeapporter. En revanche, on peut dé-cider que les élus régionaux soientélus au sein des conseils généraux,pour mieux articuler l’action ré-gionale et départementale.

Commentmieuxgérer la fonctionpublique territoriale?C’est délicat. Autant il est im-portant que les agents puissentfacilement passer d’une fonctionpublique à l’autre, autant l’unifi-cation de leur statut semble diffi-cile, car ce sont des métiers biendifférents. Le temps est venu de

reconnaître que l’assouplissementdu statut est indispensable etque les syndicats n’en fassentpas un but de guerre. C’est ce quipermettra de mieux payer lesfonctionnaires et de contenir enmême temps la masse salariale !La rigidité actuelle aboutit à deuxperdants : l’agent, dont le salaireest faible, et la collectivité, dontla charge salariale explose. Ilfaut passer un accord gagnant-gagnant, plus de liberté sur lesrémunérations, mais une masseglobale qui ne doit plus augmen-ter et qui doit être plafonnée auniveau du montant global desrémunérations et des pensions.La mutualisation des moyenshumains entre collectivités doitdevenir la première règle degestion de la fonction publiqueterritoriale.

Quel est le schéma idéal qui alliecommunes, intercommunalités,départements, régions?Difficile d’avoir un schéma unique.Les solutions sont différentes selonque l’on se trouve ou non en zonede forte densité de population.Essayons de faire simple. Il existeun couple qu’il faut encore rappro-cher, celui des communes et desintercommunalités. L’audace seraitde faire de l’intercommunalité lanouvelle commune dont le prési-dent serait le maire. Puis chaquecommune aurait sonmaire déléguéavec un conseil restreint pour

l’assister comme lesmairies d’arron-dissement du système Paris LyonMarseille. Un second couple peutêtre formé par les départementset les régions. Les départementsont un rôle important de « tête deréseau » à jouer vis-à-vis des inter-communalités. Des schémas dépar-tementaux de compétences et demoyens pourraient être élaborésentre les conseils généraux et lesintercommunalités. Enfin, les rela-tions avec l’État doivent être clari-fiées. Après avoir été un facilitateur,l’État est malheureusement devenuun empêcheur – source de frein,de complexité, de bureaucratie, decoûts supplémentaires. Il doit seretirer des fonctions dans lesquellesil ne paie plus rien. Les préfetsdoivent conserver leur rôle decontrôle et de garant de légalité etd’égalité républicaine.

Le rapporteur général dubudget,GillesCarrez (UMP),assureque l’onobtiendrait 2à3milliardsd’eurosd’économiesen regroupant régionsetdépartements…La fusion des deux couplescommunes-intercommunalité etdépartements-région peut générerdes économies, à condition quel’intégration soit très forte etqu’il n’y ait qu’un seul centrede pilotage. Mais je me garderaibien de donner un chiffrage.

Jusqu’oùpousser l’autonomiefiscaledescollectivités locales?La réforme de la taxe profession-nelle a vidé de son sens la notiond’autonomie fiscale pour les dé-partements et les régions. L’auto-nomie financière, cela ne veutrien dire pour les dépenses obli-gatoires, celles qui résultent dela loi. Il faut plutôt instaurer unsystèmede remboursement puisqueles collectivités agissent pour lecompte de l’État. En revanche,pour le financement des dépensesdiscrétionnaires, l’autonomie fi-nancière est souhaitable touten respectant le programme destabilité européen auquel lescollectivités locales devraient êtreassociées, sous la forme d’unmandat donné à leurs associa-tions nationales représentatives(AMF, ADF, ARF). Lesquelles seraientsignataires du programme.

Propos recueillispar Éric MandonnetRédacteur en chef adjoint

de L’Express

ALAIN LAMBERTANCIEN MINISTRE UMP DU BUDGET,PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL DE L’ORNE

MYC

HELEDA

NIAU/AF

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L’ancienministre duBudgetmultiplie les propositions pour que la décentralisation sortede la contradiction d’un État qui ne laisse aux collectivités locales que la liberté d’appliquerses propres décisions. Alain Lambert souhaite que le prochain gouvernement renonceà la création du conseiller territorial voulue par Nicolas Sarkozy.

«Ladécentralisationà la française, c’est l’État quitransfère en conservantpour lui seul le pouvoir

deprescription !»

«AUJOURD’HUI, LA SITUATION PROVOQUÉEPAR LA DÉCENTRALISATION EST KAFKAÏENNE »

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Dans les meetings, à gauchecomme à droite, l’argumenta toujours fait un tabac : il

faut en finir avec le «mille-feuille »territorial. La commune, l’inter-communalité, le département, larégion. Au fil des décennies, leséchelons locaux se sont accumulés.Face à eux, l’État, le bon vieil Étatjacobin issu de la Révolution etde l’Empire, résiste. Depuis plusde quarante ans, l’idée de décen-tralisation avance en France ; leslois censées la mettrent en œuvres’accumulent.Mais les échelons ter-ritoriaux aussi. Comme si la simpli-ficationétait, finalement, impossible.Bien qu’attirée par le modèle desgrandes régions allemandes ou espa-gnoles, la France reste attachée à satradition, faite de fascination-répul-sion, pour un pouvoir central fort.C’est le général de Gaulle qui – onl’oublie souvent – a relancé l’idée ré-gionale. C’est, en 1964, la créationdes commissions de développementéconomique régionales (Coder), pré-figuration de nos vingt-sept régions.Puis, surtout, le référendum d’avril1969. Le projet était visionnaireet allait au-delà de ce qu’allaientinstaurer les lois futures de décentra-lisation.Mais le bulletin de vote ser-vit d’abord à renvoyer à Colombeyle fondateur de la Ve République.Pompidou apporta sa pierre à l’édi-fice territorial en créant, en 1972,les conseils régionaux, mais sanspouvoirs réels et sans les faire élireau suffrage universel.

Davantage de proximitéLe grand tournant est dû à unhomme : Gaston Defferre. MairedeMarseille, ministre de l’Intérieur« et de la Décentralisation » deFrançois Mitterrand, il fut lepère des grandes lois de 1982. Lesgaullistes crièrent alors à la miseen cause de « l’unité de la Répu-blique ». Mais trente ans plus tard,les lois Defferre sont un soclecommun. Les lois de 1982 furentune révolution dans la relationentre l’État et les collectivités lo-cales en les libérant de la tutelle dupréfet. Avant, les décisions des exé-cutifs locaux devaient attendre uneapprobation préalable de l’État.Depuis, ils ne sont plus soumisqu’à un contrôle a posteriori, juri-dique et budgétaire. Dans les dé-partements, les politiques ne sont

plus mises en œuvre par le préfetmais par le président du conseilgénéral. Les conseils régionauxaccèdent à la maturité démocra-tique en étant élus au suffrageuniversel. Des élus prenaientl’ascendant sur des fonctionnaires.D’importantes compétences sonttransférées de l’État aux collectivi-tés locales. L’objectif ? Davantagede proximité pour davantagede proximité. Aux communes lespermis de construire ; aux départe-ments les transports scolaires, parexemple. Transfert le plus connucar touchant le plus grand nombre,la construction et la gestion desétablissements scolaires : écoles(communes), collèges (départe-ments) et lycées (régions).Fut-ce pour autant le printempsdes territoires ? Les avancées furentréelles et la voie empruntée, irré-versible. Mais la médaille de ladécentralisation eut son reversaussi : la propension à la dépense,les dérives parfois, ou un goût dela grandeur des élus symbolisépar ces hôtels de département oude région, parfois démesurés. Ladécentralisation allait-elle périrvictime d’elle-même ? Après lesocialiste Gaston Defferre, c’est legiscardo-chiraquien Jean-PierreRaffarin qui, nommé Premier mi-nistre en 2002, décréta alors un« acte II » de la décentralisation.Jusqu’alors à la tête de la régionPoitou-Charentes, il voulut favoriserles régions, estampillées pôles

du développement économique. Ilfit inscrire leur existence dans laConstitution, laquelle précise désor-mais : « l’organisation de la Répu-blique est décentralisée ». Comme en1982, les lois de 2003 conduisirent à

des transferts de compétences.Après celle des bâtiments, la gestiondes personnels non enseignantsdes établissements scolaires futconfiée aux collectivités locales.Mais, à l’arrivée, ce sont les dé-partements qui furent les grandsgagnants.Raffarin rêvait d’aller plus loin.Accorder aux territoires plus d’au-tonomie par un droit à l’expé-rimentation dans de nombreuxdomaines ou la possibilité d’orga-niser des référendums locaux. Avecen ligne de mire la fusion derégions afin d’en réduire le nombreet de leur donner une taille com-parable à celle des länder alle-mands. Tout cela resta lettre morte.La décentralisation, oui, mais dansl’uniformité. Le cadre nationalrésiste bien.

L’intercommunalitéParallèlement, une autre évolutions’esquissa depuis le début desannées quatre-vingt-dix : l’inter-communalité. Les Français sontsolidement attachés à leurs 36 000communes mais celles-ci mirenten commun au fil des ans leurscompétences et leurs ressourcesavec leurs voisines d’un mêmebassin de population. De toutesces évolutions, Nicolas Sarkozy,appuyé sur les travaux du comitéBalladur, espéra tirer une simplifi-cation de la carte administrativefrançaise. Fusionner les départe-ments et les régions d’une part, les

communes et les structures inter-communales de l’autre. C’était aufond le pari. Mais une fois encore,les territoires surent résister à unedécision perçue comme autori-taire. La mobilisation populaire

autour des plaques minéralogiquestomba à point nommé pourprouver l’attachement au dépar-tement. Le Gouvernement secontenta d’une clarificationdes échelons en supprimant la« clause de compétence générale »et en créant un « conseiller terri-torial », siégeant à la fois au dé-partement et à la région, préludeau rapprochement des deux éche-lons. Le « conseiller territorial »verra-t-il le jour en 2014 commeprévu ? En cas de victoire, lagauche a prévu de l’abroger.Mais de la décentralisation, le ci-toyen ne retient que la dimension

politique. Celle qui lui permet desanctionner la majorité en place àParis et de lui imposer un contre-poids local. Sous Mitterrand, ladroite prit la quasi-totalité desrégions et une majorité des villeset des départements. Sous Chiracet Sarkozy, c’est la gauche qui s’im-posa dans la France des territoires.À l’équilibre des pouvoirs voulupar les pères de la décentralisations’est donc ajouté, sinon substitué,l’équilibre politique.

GuillaumeTabardest rédacteurenchefadjoint chargéde lapolitique

au journal LesÉchos

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Agora

Unmille-feuille indigesteParGuillaumeTabard

Jacobins contre Girondins. La guerre vieille de deux cents ans n’est pas terminée. Et depuistrente ans l’État semble vouloir reprendre d’unemain ce qu’il accorde de l’autre. Du coupl’équilibre entre Paris et les régions souhaité par GastonDefferre reste à trouver.

Gaston Defferre.Ministrede l’IntérieurdePierreMauroysouslaprésidencedeFrançoisMitterrand, il est l’auteurdes loisde 1982etde 1983sur ladécentralisation. PHOTODR

«DE LA DÉCENTRALISATION,LE CITOYEN NE RETIENT

QUE LA DIMENSIONPOLITIQUE. CELLE QUI LUIPERMET DE SANCTIONNERLAMAJORITÉ EN PLACE À PARISET DE LUI IMPOSER UNCONTREPOIDS LOCAL »

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Stupeur et tremblements ! Lescouloirs du Palais-Bourbonrésonnent encore des hauts

cris de ces députés socialistes sacri-fiés, mardi dernier, sur l’autel, auchoix, de l’accord électoral avec lesécologistes, de la parité ou de ladiversité. « Je me présenterai quandmême, et je gagnerai ! » s’exclameainsi Danièle Hoffman-Rispal,députée de Paris, dont la circons-cription vient d’être promise parson parti aux écolos. « J’irai coller sesaffiches », promet, solidaire, sa col-lègue Sandrine Mazetier, tout aussicolère. Ni particulièrement âgée(60 ans), ni cumularde (elle a aban-donné le Conseil de Paris en 2008),ni élue depuis trop longtemps(2002), n’ayant pas démérité (elle aété vice-présidente de l’Assembléeen 2008-2009), Danièle Hoffman-Rispal pouvait légitimement secroire à l’abri d’une éviction. Dès lami-mai cependant, elle entend lesécologistes du XIe arrondissement,dont elle est l’élue, revendiquer sacirconscription pour Cécile Duflot,secrétaire nationale d’Europe Écolo-gie-Les Verts (EELV). « Je n’y croyaispas, ça me semblait impossible, se sou-vient-elle. C’est par la presse qu’elleapprend, la semaine dernière, sonéviction. Personne ne m’a prévenue,confie-t-elle.Même après, ni Martine,ni Duflot, personne ne m’a donné uncoup de fil… »Fille d’immigrés polonais, arrivée àvingt ans dans la capitale,militanteau PS depuis 1974, cette anciennevendeuse-comptable du Sentiers’était vue proposer, il y a vingt ans,

lorsque Paris était encore unecitadelle imprenable pour la gauche,d’aller se présenter en banlieue.« J’ai refusé le parachutage », dit-elle.Bien lui en a pris. La mairie du XIe,dès 1995, passe à gauche. En 2002,elle est investie aux législativespar son parti contre le sortantchevènementiste Georges Sarre(MDC), avec lequel le PS règle sescomptes. Elle l’emporte au secondtour avec 63 % des voix, puis en2007 avec 69 % des suffrages. La6e circonscription de Paris est dé-sormais une circonscription en orpour la gauche. « C’est parce que jefais 69 % qu’on veut venir chez moi,dit-elle. Mais une circonscription,ça se travaille ». Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne), où CécileDuflot est élue, a eu pour députépendant vingt ans le radical degauche Roger-Gérard Schwartzen-berg, rappelle-t-elle. Hoffman necomprend pas que Duflot, au lieude « travailler » ce territoire àreconquérir, vienne lui piquer saplace. « On a besoin de davantagede femmes à l’Assemblée, remarque-t-elle. Ce n’est pas en prenant sacirconscription à une femme qu’ondépassera les 18 %. » Hoffman, quise dit « déçue, furieuse et amère »,note qu’évincer une sortante, « celane s’était jamais fait dans l’histoiredu parti ». Elle promet désormais,forte du soutien des élus parisiens,« d’entrer en résistance ». « Qu’est-ceque je peux faire d’autre ? interroge-t-elle.Accepter d’être limogée ? J’adoremon parti, mais il me vire… »Serge Blisko, dans le XIIIe arrondisse-

ment, subit le même sort : sa cir-conscription (la 10e) est « donnée »aux écolos. Mais lui a vu venir lecoup dès le redécoupage de la carteélectorale, avec l’ajout de bureauxde vote favorables à la gauche :« J’ai dit à Alain Marleix : Tu ne merends pas service. Quand le gâteaudevient trop appétissant, ça suscite desconvoitises. » Pour ce médecin de61 ans, élu depuis 1997, l’accordPS-EELV est « la consécration ducynisme des Verts et d’une partie dela direction du PS ». Il va quitterl’Assemblée parce qu’un « appa-ratchik de l’ombre a pris son stylo etbarré des noms ». Surtout, observe-t-il, les trois députés parisienssacrifiés par la rue de Solférino« ont été précurseurs en matière denon-cumul des mandats : tout lemonde demande aux élus de ne pascumuler, et quand on le fait, on s’entrouve lésé. Alors que de gros cumu-lards, dans d’autres coins de Paris, nesont pas inquiétés ». Pour autant,Blisko, contrairement à Hoffman,n’envisage pas de se présenter sansl’étiquette PS : « La dissidence n’estpas ma culture, dit-il. Et la politique,à Paris, ce n’est pas nominatif. » Sansdoute parce qu’il est un homme,son éviction a été beaucoupmoinsmédiatisée que celle de sa collèguedu XIe : « Qui se souviendra, enjuin, qu’on m‘a fait une mauvaisemanière en novembre ? », soupire-t-il, résigné.Tony Dreyfus, malgré ses états deservice, va lui aussi devoir tirer sarévérence, après quinze ans passéssur les bancs de l’Assemblée : sa cir-conscription a été « gelée », comme

on dit au PS, pour un candidat issude la « diversité ».Malgré ses 72 ans,l’ex-secrétaire d’État de MichelRocard aurait bien enchaîné sur unquatrième mandat. Mais « Martineétait contre », et l’a fait savoir. Dotéd’une haute estime de lui-même,cet avocat d’affaires, membre duclub Le Siècle, ne s’abaissera pas à« pousser des cris d‘orfraie ». Maisn’apprécie guère le coup de grâce,et promet qu’il saura riposter « parsurprise, et là où ça fait mal ».La situation de Daniel Goldbergenfin, en Seine-Saint-Denis, est unautre cas de figure inédit : ce députéde 46 ans, qui milite dans le « 9-3 »depuis 1977, qui avait pris soin dedémissionner du conseil régionalet de l’agglomération lors de sonentrée à l’Assemblée en 2007, vadevoir céder son siège à…ÉlisabethGuigou. À 65 ans, l’ex-ministrede FrançoisMitterrand, vieille amiede Martine Aubry, et fortementsoutenue par Bertrand Delanoë, ademandé que la circonscription deGoldberg soit « réservée femme ».Afin de s’y présenter, le départe-ment ayant perdu une circonscrip-tion du fait du redécoupage. « Ducoup, je ne peux même pas me portercandidat pour permettre aux militantsde nous départager », proteste Gold-berg. À ses yeux, la parité est ici utili-sée « pour faire passer une désignationde confort ». « On n’a jamais vu undéputé PS empêché de se représenter dufait du parachutage d’un autre députéPS, c’est une première ! » peste-t-il.Combatif, Goldberg croit que« l’histoire n’est pas finie », et que « lasagesse va revenir » au PS.

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Plan largeAux Quatre Colonnes

Ce serait donc ça la « gauche durable ».Étonnant attelage fait surtout de rose, devert et d’un peu de rouge. Pour l’instant,la période d’essai de cette équipe d’aspi-rants au pouvoir n’est pas très enga-geante. Le vaudeville joué par FrançoisHollande et ses équipières écologistes– Eva Joly et Cécile Duflot – pourraitprêter à sourire. Mais voilà, il s’agitni plus ni moins des protagonistes dufutur pouvoir de gauche si les Françaisdécidaient de mettre Nicolas Sarkozyen préretraite en mai 2012.L’accord au forceps signé et validépar le Parti socialiste et Europe Écologie-Les Verts a non seulement plongé lafilière nucléaire dans le doute, il a aussifait deux victimes de choix : FrançoisHollande et Eva Joly.Le candidat socialiste se serait bien passéde ce couac aumoment où sa campagneentre en zone de turbulences. Le députéde Corrèze voit sa cote de popularitéfondre et ses intentions de vote baisser.Après sa forte progression, conséquencede sa victoire dans la primaire, FrançoisHollande ne pouvait pas surclasseréternellement ses rivaux. Le retour surterre est aussi logique qu’attendu.Pour Eva Joly, les conséquences sontplus fâcheuses. L’ancienne magistratea raté l’intégralité de la séquence. Enmultipliant les ultimatums, la candidateécologiste n’a pas vu que le tandemDuflot-Placé était en train de négocierdans son dos des fermetures de centralesnucléaires contre des circonscriptions.Mise au pied dumur, Eva Joly s’est retiréesur son Aventin pour tenter un rebond.Une opération « Baden-Baden », façonde Gaulle, au moment de la crise deMai-68. La référence ne manque pas desel de la part d’un parti dominé parquelques soixante-huitards célèbres(Dany Cohn-Bendit en tête). Pas sûr quece silence de six jours suffise à relancerune campagne brouillonne. L’ex-magis-trate est créditée pour l’instant de… 4%.Pas de quoi mettre les écologistes enposition de force par rapport au PS.Au final, il est évident que cet épisodea mis sous pression François Hollande.Mais la droite aurait tort d’en faire unargument majeur pour attaquer lagauche.Car le nucléaire apparaît bien loindans les préoccupations des Français,qui placent toujours tout en haut deleurs priorités l’emploi et le pouvoird’achat. De ce point de vue, il y a fortà parier que le psychodrame entre le PSet les écologistes apparaît aux yeuxd’une majorité de Français plus commeune péripétie de campagne comparéeà l’annonce par Peugeot de 5 000 sup-pressions d’emplois.

L’opinionde Bruno Jeudy

DR

François et Evasont dans unbateau…

L’accordPS-EELVn’a guère suscité d’enthousiasmeà l’Assemblée. Lesdéputéssocialistes dont les circonscriptions ont été dévolues à des candidatsécologistes ne décolèrent pas. Et beaucoupmenacent de se présentercontre le candidat officiel d’Europe Écologie-Les Verts.ParNathalie Segaunes

Des socialistes verts de rage

David MessasMort duGrand rabbin de Paris, DavidMessas, ce dimanche, à l’âge de 77 ans.Grande figure du judaïsme, il étaitoriginaire d’une famille de rabbins deMeknès, auMaroc. Son père avait étéGrand rabbin de Jérusalem.De 1994 àaujourd’hui, sa voix aura porté la parolejuive au grand rabbinat de Paris. Le Crif,par l’intermédiaire de son président,Richard Prasquier, lui a rendul’hommage de la communauté.« Son action et son rayonnement ontlargement dépassé les frontièresde Paris et de la France », a saluéle Consistoire.

Danièle Hoffman-Rispal. Elle est parmi les députés socialistesqui devront céder leur place pour faire… de la place aux écologistes.

OLIVIERLABA

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Anne Hidalgo, future candidate socialiste à la mairie de Paris, a très mal vécu l’accord PS-EELVqui prévoit l’arrivée de Cécile Duflot dans la capitale. Portrait d’une militante nourrie du combatdes républicains antifranquistes et dont l’âme et l’esprit ont emprunté les chemins de Simonede Beauvoir, Anaïs Nin et autre Rosa Luxemburg.

La belle Hidalgo, les femmes et Lorca

Rencontrer Anne Hidalgo,c’est sentir l’Espagnepoussersa corne comme dans une

chanson de Nougaro. Tout en ellerespire la force du Sud. Le regardfier et brûlant qui vous enveloppe,adouci par le sourire malicieux. Leteintmat frotté à tous les soleils deson Andalousie natale, quittée àl’aurore de sa vie, mais dont ellerayonne intensément. On devineau premier instant que ses admi-rations sont en droite ligne de safiliation.Pour nous mener aux grandesfigures du féminisme qui ontbouleversé ses quinze ans, Simonede Beauvoir, Anaïs Nin, RosaLuxemburg, mais aussi les com-battantes de son époque, GisèleHalimi dans le procès de Bobigny,il faut d’abord passer par Málaga,où naquit Picasso. Il faut ressentirsa fierté qu’un tel génie soit nési près de chez son grand-père,modeste paysan dans un granddomaine agricole. Remonter commele saumon, à contre-courant, etdécouvrir le lit des origines.

VexationsPour la première adjointe aumaire de Paris, ce grand-père pa-ternel, viscéralement homme degauche, profondément socialisteet républicain, a tout enclenché.En juillet 1936, après une luttesans merci contre les franquistes,il entraîna les siens dans la co-lonne de réfugiés partant versAndorre. Puis gagna la France en1939, pour trouver la paix et lerépit « quelque part en Lot-et-Garonne ». Cet homme modestecroyait en la République et en sesvaleurs, qu’il résumait à deux ap-ports essentiels : l’éducation pourles enfants et l’accès à la culture. Ilespérait que ses enfants devien-draient des gens lettrés. L’idéalà ses yeux était même qu’ilstravaillent « dans les postes », unemanière de prendre son souhaitau pied de la lettre. Pas étonnantque sa petite-fille s’emplit de fi-gures intellectuelles et artistiquesdavantage que de purs politiques.C’est en France que le père d’AnneHidalgo fréquenta l’école pour lapremière fois. Mais après la guerre,son grand-père commit l’erreur devouloir revenir en Espagne. Il fut

emprisonné, condamné à mort,et finalement libéré au bout dequelques années. La grand-mèreétait morte du typhus pendantle voyage du retour. Leurs cinqenfants, dont le père d’Anne,avaient connu l’orphelinat, le « re-dressement » infligé aux fils et fillesde « rouges », les vexations, la faim.On est encore loin du féminisme.Comment va-t-il faire irruptiondans la vie de la future éluesocialiste de Paris ? Au début desannées 1960, son père revient enFrance avec ses deux filles. Annen’a pas trois ans. Pourtant elle serappelle les habits qu’elle portait,le sac qu’elle tenait, l’illustréqu’elle lisait. Ils ont quitté défini-tivement l’Espagne pour atterrirdans une cité ouvrière lyonnaise.Comment a-t-elle gardé le souve-nir aussi précis du passage de lafrontière ? L’air de la liberté a unparfum inoubliable.Douée pour les études, mue parune volonté d’intégration fa-rouche, elle s’instruit, elle travaille,toujours tirée à quatre épingles.Chez les Hidalgo, on est légerd’argent. Mais sa mère couturièrelui dessine de jolies robes dont ellechoisit les modèles dans les cata-logues. À l’adolescence, la jeunefille qui parle espagnol à ses pa-rents, mais français avec sa sœur,ressent la pesanteur du machisme,plutôt répandu chez les hommesen général, les Ibères en parti-culier… Son père veut pour ellel’éducation la plus poussée possible,et il l’encourage à trouver un bonmétier plutôt qu’un bon mari. Cen’est pas rien. Mais elle chercheà s’affirmer comme fille, à ne pasplier devant l’autorité paternelle,à ne pas toujours obéir.

Combat féministeLa voici à la Librairie des femmesde la place des Célestins, à Lyon.Bonjour Simone de Beauvoir. Àla seule lecture de ce titre, LeDeuxième Sexe, elle frémit. Décou-verte par hasard, « parce que j’aimaisles livres », celle qui va libérer lacondition de plusieurs générationsde femmes va « parler » à la jeuneAnne Hidalgo. Lui révéler que lesfilles ont autant de droits que lesgarçons. Au moins doivent-ellesse battre pour qu’il en soit ainsi.

« C’était la fin du MLF. J’allais dansles manifs. Les femmes qui luttaientmenaient un combat réel. Bien sûr,j’ai aussi crié des slogans comme“Oui patron, oui papa, oui chéri,c’est fini !” » sourit-elle.Elle se plonge dans les romans deVirginia Woolf, dévore le journald’Anaïs Nin, découvre RosaLuxemburg. Pourquoi cet attraitpour l’ennemie jurée des socio-démocrates, qui fut assassinée pareux, tuée d’une balle dans la tête,et son corps jeté dans un canal dela Spree ? « C’était une idéaliste,plaide Anne Hidalgo, et elle l’a payéde sa vie. Elle n’était ni anarchiste,ni éprise des théories de dictature. Jene crois pas qu’elle était ennemie dela social-démocratie. Son mouvementétait d’une grande pureté. » À traversle pacifisme de Rosa Luxemburg,son combat acharné contre laguerre, l’élue de Paris viendra à

Jaurès, à Zola. Enmême temps, ellesera attirée par les combats fémi-nistes de Clara Zetkin, militantemarxiste allemande qui rejoignitet soutint Rosa Luxemburg danssa révolution spartakiste.

Admirations esthétiquesPlus tard, tentée par les Beaux-Arts et par le droit, Anne Hidalgochoisira la deuxième voie, ayantretenu la leçon du féminisme :obtenir son autonomie financière.Celle qui deviendra à 23 ansl’une des plus jeunes inspectricesdu travail en France n’oublierajamais ses racines, qui s’incarnentdans ses admirations esthétiqueset politiques : Picasso bien sûr,mais aussi Antonio Machado,le poète qui se rangea au côtédes républicains et qui mourutd’épuisement en fuyant son pays.Machado que célébra Aragon,

et que chanta Ferrat :Machado dort à CollioureTrois pas suffirent hors d’EspagneQue le ciel pour lui se fît lourdIl s’assit dans cette campagneEt ferma les yeux pour toujours.Son cœur palpite encore despoèmes et des combats de Fede-rico García Lorca, et c’est unravissement de l’écouter pronon-cer son nom comme on ne l’ajamais entendu, dans une grandedouceur, comme unmurmure quiparcourt soudain son vaste bureaude l’Hôtel de Ville. Lorca assassinépar les franquistes, « parce qu’il dé-nonçait l’ordre établi, l’Église d’Es-pagne repliée sur elle-même ». Lorcajeté à la fosse commune pouravoir exprimé sa soif de liberté.Hidalgo battante et combattante,qui redit doucement, lentement,comme un secret, Federico GarcíaLorca.

Par Éric Fottorino

L’admiroir

«C’ÉTAIT LA FIN DUMLF. J’ALLAIS DANS LESMANIFS. LES FEMMES QUI LUTTAIENTMENAIENT

UN COMBAT RÉEL TOUJOURS D’ACTUALITÉ »

JOEL

SAGE

T/AF

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Les fondamentaux de l’élection présidentielle restent pour l’instant favorables au candidatsocialiste. C’est ce quemontre le directeur général d’Ipsos, chiffres à l’appui. Pour Brice Teinturierle rééquilibrage souligné par les récents sondagesmarque une remontée deNicolas Sarkozy,mais ce rebond est encore insuffisant pour renverser des rapports de force qui continuentde donner unemajorité à la gauche au deuxième tour de la présidentielle.

Hollande s’érode mais resteau centre du jeu

La grande enquête réaliséepar Ipsos pour Le Monde, laFondation pour l’innovation

politique, la Fondation Jean-Jaurèset leCevipofauprèsde6 000électeursconstitue unemine d’informationsvenant compléter les nombreusesautres études existantes. Elle permetde faire le point sur les forces etles faiblesses de François Hollande,au-delà des commentaires média-tiques qui jamais, s’agissant desrapports de force, n’ont été aussiéloignés des réalités.

Une domination

forte

La domination de François Hol-lande dans l’opinion est en effetextrêmement forte. En termes depopularité, il l’emporte ainsi trèsnettement sur tous ses autresconcurrents ou adversaires. 60 %des Français ont une bonne opi-nion de lui, 38 % une mauvaise. Àtitre indicatif, ces scores sont de45 % et de 50 % pour le second,François Bayrou. Nicolas Sarkozyarrive en 3e position, avec un retardde 23 points : 37 % de bonnes opi-nions et 62 % de mauvaises, soitun différentiel négatif de 27 pointsalors que celui de François Hol-lande est positif de 22 points.La popularité de François Hollandevarie relativement peu selon l’âge etla profession ; il est populaire aussibien chez les jeunes que chez lesactifs et les plus de 60 ans, aussibien chez les employés et lesouvriers que chez les professionsintermédiaires et les cadres supé-rieurs. Ses seuls points de faiblessessont les artisans, commerçants etchefs d’entreprise (46 %), les agri-culteurs (45 %) et les catholiquespratiquants réguliers (47 % maisqui constituent uneminorité dansla société). Il est également presqueaussi fort chez ceux qui déclarentque leurs revenus leur permettentdifficilement de s’en sortir au quo-tidien que chez ceux qui déclarent

s’en sortir facilement, alors que cepoint est très discriminant s’agis-sant du Président. Enfin, lorsquel’on croise la popularité du leadersocialiste avec les préoccupationsdes Français, elle reste forte et nevarie pas fondamentalement selonla plupart des enjeux sauf chezceux qui font de la sécurité et del’immigrationunequestionmajeure– et qui ont alors majoritairementune opinion négative de FrançoisHollande.Au-delà de la popularité globale,la première des qualités associées àFrançois Hollande est d’avoir desconvictions : 74 % des Français lejugent ainsi. Seule Marine Le Penfait un peumieux tandis que Nico-las Sarkozy est à 69 %. FrançoisHollande est aussi sympathique(67%, contre 33% seulement pourNicolas Sarkozy) ; compétent (59%,contre 49 % s’agissant de NicolasSarkozy) ; honnête (62 % contre32%) ; sincère (56% contre 31%) ;comprenant les problèmes desgens comme vous (55 % contre…24 %) ; ayant la stature présiden-tielle (53% contre 57%). Il n’est enrevanche dynamique que pour47 % des Français alors que 73 %reconnaissent cette qualité à Nico-las Sarkozy. 43 % « seulement »pensent également qu’il tiendra sesengagements (et 30% s’agissant duPrésident). En résumé, le candidatsocialiste l’emporte nettement surpratiquement toutes les dimensionssauf le dynamisme.Ses données sont très largementcorroborées par l’analyse électo-rale : suivant les instituts, FrançoisHollande obtient de 30 à 35% desintentions de vote au 1er tour etne s’est que très peu érodé depuisles primaires. Il écrase toujoursNicolas Sarkozy au second tour(entre 57 % et 59 % des intentionsde vote). Il l’emporterait nette-ment dans toutes les classes d’âgeet il faut avoir plus de 60 ans pourchoisir un peu plus souvent Nico-las Sarkozy. Le constat est le mêmesociologiquement : chez les cadressupérieurs, intermédiaires, les

employés et plus encore les ou-vriers, l’avance est de 15 à 20 points.En réalité, Nicolas Sarkozy nel’emporte que chez les agricul-teurs, les artisans / commerçants,les retraités et les catholiques pra-tiquants réguliers, ceux qui s’ensortent très facilement en termesde revenus et ceux qui font del’immigration et de la sécurité unenjeu central. Sur la question desdéficits publics, les choses sont àégalité quand on considère quec’est un problème important pourla France et en faveur du Présidentquand on en fait un enjeu d’in-quiétude personnelle (mais cedernier cas ne correspond qu’àune minorité de Français).

La remontée de

Nicolas Sarkozy

L’analyse des données fait doncapparaître une réelle force deFrançois Hollande, au moins àce stade de la campagne. C’esten réalité moins lui qui, au coursdes dernières semaines, a baissé

– mais il s’est érodé – que NicolasSarkozy qui a remonté dans l’opi-nion : un peu en intentions devote, davantage en popularitéet surtout en leadership. De fait,le seul véritable point faible deFrançois Hollande concerne cettedimension : mis en concurrence,60 % des Français estiment quec’est le chef de l’État qui est leplus capable de prendre des déci-sions difficiles, 39 % FrançoisHollande. En cas de crise diplo-matique et militaire, il en va demême (61 % contre 37 %) et dansune moindre mesure s’il s’agitde diminuer l’insécurité (54 %contre 44 %). Le dynamisme et lacapacité à trancher sont donc unedes forces majeures de NicolasSarkozy. Ce n’est pas pour autantun signe d’efficacité absolue auxyeux des Français sur la crise ac-tuelle : 50 % considèrent ainsi quele chef de l’État est le plus capablede faire face à la crise économiqueet financière actuelle, 48 % quec’est François Hollande, soit unequasi-égalité. Et 55 % font mêmedu leader socialiste celui qui peutle plus « protéger les Français des

conséquences de la crise écono-mique », contre 44 % qui optentpour Nicolas Sarkozy. Le Présidentprotecteur n’a donc pas encoreconvaincu, d’autant que 78 %estiment que François Hollandeest le plus capable de réduire lesinégalités sociales et 20 % seule-ment que c’est le chef de l’État.

La crédibilité reste

l’enjeu majeur

L’enjeu central de François Hol-lande, dans une campagne qui enréalité a déjà commencé, est doncde maintenir l’avance considé-rable qu’il a sur toute une série dedimensions ainsi que la capacitéde rassemblement dont il a faitsa marque de fabrique tout enenvoyant des signes forts sur sacapacité à prendre des décisionsdifficiles. Tout dépendra doncdes mesures qu’il proposera et del’évolution de la crise, qui décons-truit tout autant qu’elle permet àNicolas Sarkozy de se reconstruire,au moins partiellement.

Par Brice Teinturier

Analyse

François Hollande. À Strasbourg devant les jeunes socialistes, le 19 novembre. PHOTOPATRICKHERTZOG/AFP

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10 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011

Par Philippe Tesson

S’il y avait une logique,Marine Le Pen arriverait entête du premier tour de la

prochaine présidentielle. Quellelogique ? La logique tirée duprofondmécontentement qui agiteactuellement l’opinion. La logiquede l’inquiétude, de l’angoissequi gagne le peuple. La logiquede l’indignation, comme on ditaujourd’hui. La logique de la criseet de ses effets directs sur un certainnombre de catégories sociales. Lalogique des échecs de la majorité.La logique de la pauvreté des pro-positions de la gauche. La logiquede la défiance dans laquelle lesFrançais tiennent les politiqueset la politique. Etc. Une logiquequ’accréditent les sondages. UnFrançais sur trois déclare partagercertaines idées du FN ; un Françaissur trois se dirait prêt à apporter sesvoix à Marine Le Pen.

Du talent et une voixCelle-ci, en effet, est de fait lavoix la plus forte de l’opposition.Opposition à Sarkozy. Oppositionà Hollande. Opposition à l’Étatlibéral. Opposition aux pouvoirsfinanciers. À l’ordre marchand.À l’euro. À l’immigration. Aux juges.Aux institutions. Au « système ».À tout. À chacune des parties dutout. Or rares sont les Français quine soient d’accord avec elle dansla dénonciation de l’une de cesparties. Combien sont d’accordavec l’ensemble ? Environ 20 %,disent les enquêtes. C’est déjàénorme. Et la crise, le chômage,les scandales vont gonfler cechiffre.Elle a du talent. Elle fait tripe dumoindre prétexte que lui offrel’actualité. On l’entendait parlerau cours du dernier week-enddevant ses troupes puis au microd’Europe 1. Sur la crise financière,sur la mondialisation, sur l’euro,sur la fin de l’euro, le retour auprotectionnisme, la défense denotre souveraineté, bref sur tousles sujets majeurs elle était inexis-tante, ajournant à l’échéance dejanvier les réponses aux questions.Mais il n’empêche, elle marquaitdes points, elle ébranlait des

consciences, en écho à ce qu’onentend désormais développer iciet là avec de plus en plus de faveur,à gauche mais aussi à droite,sans autre forme d’expertise ni defondement, comme s’il s’agissaitd’une nouvelle mode. Elle étaitdans l’air du temps. Et puis elle en

vint aux problèmes dits de société.Et là ce fut un festival. Elle faisaitson miel du moindre événement,passant de la sécurité à la corrup-tion, et non sans arguments,allant jusqu’à commenter les faitsdivers : le viol et l’assassinatodieux d’une adolescente par l’unde ses camarades, ce qui lui permitde dénoncer le laxisme judiciaireet la psychiatrisation de la société ;ou encore relevant les déclarationsstupides de Yannick Noah sur ledopage des sportifs, ce qui l’amenaà faire le procès de la drogue. Etc.

Un boulevard d’oppositionCe n’est pas nouveau ? Certes.Depuis trente ans, depuis qu’onlui a ouvert les vannes, le FN surfede la sorte sur les vagues de la

protestation tous azimuts. Obser-vons en passant, pour l’histoire,qu’on l’a voulu ainsi. Le FN n’estpas le produit d’une générationspontanée. Il a prospéré artificiel-lement sur un terrain fertilisé parle calcul des uns et l’impéritie desautres. Ce n’est pas d’aujourd’hui

que sa présence fausse le jeu poli-tique français.Mais les circonstancesfont qu’aujourd’hui la nature desa fonction d’opposition n’est plusla même qu’hier. En premier lieupour une raison qui lui est in-terne : la passation des pouvoirsde la direction du parti entre Jean-Marie Le Pen et sa fille. Il futun temps où la personnalité dupremier, ses écarts de langage etce qu’ils signifiaient idéologique-ment pouvaient moralement jus-tifier la sanction de quarantaine,voire d’exclusion, qui le frappa etdont il tira très habilement profitaux dépens de la droite. Le pro-blème se pose différemmentaujourd’hui où la seconde, dontle casier moral est vierge, ne ré-pugnerait pas à « entrer dans le

système », fût-ce en l’attaquant,ce qui n’est pas contradictoire etce en quoi elle n’est pas la seule.Cela change beaucoup de choses.Encore faut-il que le « système »l’accepte. À terme, ce n’est pasexclu. En second lieu pour une rai-son externe qui tient à la crise et

aux ravages économiques, sociauxet politiques qu’elle provoque. Lacrise en effet ouvre devant MarineLe Pen un boulevard d’oppositioninespéré, ce qui nous renvoie ànotre propos initial.La logique, donc, voudrait qu’ellearrivât en tête du premier tour.Mais cela ne se fera pas. D’abordparce que la crise n’est pas parve-nue à son point ultime. La rigueurannoncée n’a pas encore produitdes effets tels que le FN puisse entirer des profits électoraux à lamesure de ses espoirs. Une additiond’humeurs ne fait un triompheélectoral que dans des circons-tances historiques de caractèrerévolutionnaire. Et puis se posela question de la crédibilité dela candidate. Les enquêtes nous

disent que son crédit s’affirme.Mais pas au point qu’il atteignele niveau de compétence à gou-verner, il s’en faut de loin. La« vigueur » revendiquée ne tientpas lieu de programme. Or lesélecteurs de demain obéiront sansdoute à leurs pulsions de révolte,mais la gravité de l’enjeu de cescrutin les conduira également àse déclarer en fonction de critèresplus sérieux et plus exigeants.Enfin la pesanteur du passé limi-tera la montée prévisible du FN,on veut parler ici des séquellesde cette diabolisation qui a histo-riquement pesé sur ce parti, augrand dam de la droite.

Politiquement dangereuxIl n’empêche, une donne nouvelles’annonce. Il faudra bien qu’unjour, ne serait-ce que par précaution,on vienne à bout du problèmeposé par le FN, problème quipollue la vie politique françaiseet qui est à l’origine d’une ambi-guïté démocratique insupportable.Qu’un Français sur cinq enmoyenne vote à peu près régu-lièrement depuis des années pource parti en sachant que ce vote nedébouchera sur rien, cela a peut-être été pendant longtempsmoralement légitime, mais celaest démocratiquement anormalet politiquement dangereux. Ladiabolisation dont le FN resteaujourd’hui l’objet est une formede négation. C’est en ce sens quel’on peut parler de perversion dujeu politique. Marine Le Pen necesse d’évoquer le sens commun,la vérité et la morale. Elle se veut,contre tous, le défenseur intran-sigeant de ces trois concepts. Ceserait dérisoire si encore une foiselle n’entraînait derrière elle unemasse importante de citoyens.La France doit sortir de ce cercleinfernal qui a fini par s’institu-tionnaliser. La crise que nousvivons exige cette révision,d’une façon qu’il appartiendraaux responsables politiquesd’imaginer et de gérer. La crisel’exige, parce qu’elle exige lerassemblement des consciences,la clarté et la vérité.

En finir avec le Front national

Regard

Marine le Pen. La présidente du Front national devant ses militants, le 19 novembre à Paris. PHOTOMARTINBUREAU/AFP

Marine Le Pen a promis une « révolution bleumarine » en présentant à Paris, le 19 novembre,le programmedu Front national. Un projet encore peu détaillémais qui permet à la candidatefrontisted’être très hautdans les sondagesà cinqmois de laprésidentielle. PourPhilippeTesson,cette situation doit obliger les responsables des autres partis à réévaluer leur propre échelle devaleur et redéfinir le fonctionnement du systèmepolitique français.

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NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011 L’HÉMICYCLE 11

Par Michèle Cotta

Lundi 14 novembreDans son intervention à Europe 1la semaine dernière, plus encoredans son interview à La Tribune,et enfin hier soir, sur son blog,Jacques Attali est revenu sur lavraie fausse dégradation du AAAfrançais. Pour l’ancien président(nommé par Nicolas Sarkozy) de lacommission pour la croissance, laFrance a « dans les faits » perdu son

triple A. Il persiste et signe, mêmesi, comme il l’écrit, « en campagne,les porteurs de sombres nouvellessont considérés comme coupablesde ce qu’ils annoncent ou commede mauvais Français ». Selon lui,95 milliards d’économies sont né-cessaires en trois ans, et 35milliardstout de suite, pour que la Francesorte la tête de l’eau. Le budget,deux fois réaménagé depuis l’été,est loin du compte.François Hollande s’attendait, aprèsavoir été propulsé au firmamentdes sondages, à un coup de tabacen retour. Peut-être pas à ce point-là. Déjà chahuté pendant le week-end, attaqué sur sa gauche et sur sadroite, le voici, ce soir, devenu lacible n°1 du Premier ministre.François Fillon n’a pas fait dans ladentelle en fin de soirée en Loire-Atlantique. Dans le programmesocialiste, pas une proposition poursauver l’autre : ses promesses sontirresponsables, qu’il s’agisse du re-crutement de nouveaux professeurs,ou de la retraite à 60 ans. C’est surce terrain, sans aucun doute, quese développera l’offensive majori-taire dans les mois qui viennent.Et aussi sur un thème bien précis,celui de l’autorité du leader socia-liste. Dans les sondages, pour lemoment, c’est son point faible.Fillon enfonce le clou.Là n’est pourtant pas la pire diffi-culté que François Hollande ait àaffronter. Venant de la droite, les

attaques ne le surprennent pas.Lorsqu’elles viennent de la gauchede la gauche, l’affaire se complique.Le plus dur à contrôler, de ce pointde vue, c’est Jean-Luc Mélenchon.D’abord parce qu’il s’agit en quelquesorte d’une bête de scène, qui s’estfait en quelques mois un fondsde commerce de ses attaques tousazimuts, qu’il s’agisse de la pressemalmenée depuis longtemps par

le meneur du Front de gauche, oudu PS, auquel il reproche d’enta-mer l’air de la rigueur nécessaire. Ils’est fait également une spécialitédes méchants mots d’esprit sur sesconcurrents. Hier dans Le JDD, ila traité Hollande de « capitainede pédalo » dans la tempête. Ils’étonne de ce que le candidatsocialiste ait accusé le coup. « Cen’est tout de même pas FrançoisHollande, pourtant pas avare debons mots, qui peut me reprocher lesmiens ! » a-t-il plaidé, tentant deminimiser les choses, lorsque lemal a été fait.Critiques croisées, donc, contreHollande, accusé par la droite

d’être trop à gauche et par le Frontde gauche de ne pas l’être assez.Et les écologistes dans tout cela ? Etbien justement, les négociationsentre EELV et le PS sont cet après-midi au point mort : pas question,pour Hollande, de reculer sur laconstruction de la tranche finalede l’EPR de Flamanville, Eva Jolyen a fait une condition sine quanon : si le PS ne recule pas surl’EPR, aucune alliance de deuxièmetour ne sera conclue entre verts etroses.Pendant ce temps, dans sonmeeting, Fillon avance ses pions :l’avenir de l’industrie française,plaide-t-il, est menacé. La conclu-sion s’impose : si Hollande cèdeaux écolos sur Flamanville, il aurareculé devant eux, donc échouéà asseoir son autorité. S’il ne cèdepas, la gauche se divise. Dans tousles cas de figure, la majorité sortgagnante.

Mardi 15 novembreEh bien non, les négociationsn’étaient pas interrompues,puisqu’un accord a été trouvédans la nuit. Mais il n’est pas sûrqu’aujourd’hui un désaccord n’aitpas été préférable à la recherche,à marche forcée, d’un consensussur le nucléaire. Car une chatte n’yretrouverait pas ses petits.Manifestement, les deux déléga-tions ont conclu un accord plusqu’incomplet. Un accord laissantla place, en tout cas, à beaucoupde désaccords, notamment sur lafermeture de Flamanville et surl’avenir du combustible nucléaire,le MOX, non prévu dans le pre-mier communiqué commun, etrajouté, à la ferme demande deFrançois Hollande, dans le com-muniqué final du PS.Au-delà du sort fait au MOX,l’erreur de communication est

grave : avoir l’air de troquer la fer-meture de 24 centrales (dont lamoitié au moins aurait de toutefaçon été interrompue d’ici à 2030)contre autant de circonscriptionsdonnées aux verts lors des législa-tives qui suivront la présidentielle,reste plus qu’une maladresse dela part des deux partis. Si FrançoisHollande continue de déléguerce genre d’accord, il lui faudra laprochaine fois être plus sûr de lafinesse de ses négociateurs.Ce matin, au petit déjeuner de lamajorité, Nicolas Sarkozy a laisséentendre qu’il donnerait bientôt sa

vision de l’Europe, sans doute le11 décembre, anniversaire du réfé-rendumdeMaastricht. Une Europesans doute plus confédérale, avecune zone euro mieux structurée.

Mercredi 16 novembreLes écologistes et les socialistestombent enfin définitivementd’accord. François Hollande n’apas reculé, sensible, dit-il, à l’ave-nir de l’industrie nucléaire et àl’emploi en France. Eva Joly conti-nue de bouder. Les uns et les autresauraient gagné à être plus habiles.

Jeudi 17 novembrePour la première fois, Nicolas Sar-kozy (qui n’est toujours pas encampagne) met en cause publi-quement les qualités d’hommed’État de François Hollande : lesconséquences de la réduction dunucléaire d’ici à 2030 causeraient,selon le chef de l’État, des « dom-mages considérables » sur l’emploi.S’ensuit une bataille des chiffres,où chacun voit midi à sa porte.Ce serait un surcoût de 60 ou de125 milliards d’euros, plaident lesuns. D’accord, mais la sécurité descentrales doit être améliorée, ce qui,d’après le président de l’Autorité desûreté nucléaire, nécessitera des

« investissements massifs ». Pourla majorité, 250 000 salariés serontréduits au chômage. C’est sanscompter, affirme l’opposition, surles nouveaux emplois qui pour-raient être parallèlement crééspar les énergies renouvelables. Lapolémique ne fait que commencer.Dans la soirée, Jean-François Copéconfronté à Jean-Luc Mélenchonsur France 2 : Eva Joly, qui boude,a annulé sa présence sur le plateau.La bonne humeur du secrétairegénéral de l’UMP, en forme, n’estréellement bousculée que par lesquestions, en fin d’émission, de

Franz-Olivier Giesbert : celui-ci luidemande, non sans quelque insis-tance, de donner le bilan de la luttedu Gouvernement, depuis quatreans, contre le désendettement dela France. Réponse embarrassée.

Vendredi 18 novembreLe tohu-bohu de la semaine ne doitpas faire oublier qu’à l’exceptionde l’Allemagne tous les pays de lazone euro sont maintenant atta-qués par les marchés. Que, sur lerôle et l’intervention de la BCE,Allemands et Français campent surun total désaccord. Que les diffé-rents plans de rigueur adoptés nemettent pas un terme aux spécula-tions des bourses.Les marchés sont-ils en passe detriompher de la démocratie ? Ladestitution de Papandréou, celle deBerlusconi, l’arrivée des techno-crates de la finance, d’ailleurs assezbien accueillis, à la tête de l’Italieet de la Grèce, sonnent-ils le glasdes politiques ?À qui la faute, sinon aux pays euro-péens qui n’ont pas su prendre lamesure de leur endettement, ni lesmoyens de le réduire. Et aux diffé-rents peuples européens, qui veu-lent, selon l’expression de Françoisde Closets, « toujours plus » ?

Cahiers de campagne

Jacques Attali. Il persiste et signe en affirmant que la Franceest déjà dégradée de facto. PHOTO MIGUEL MEDINA/AFP

Jean-Luc Mélenchon. Un humour grinçant qui passe malchez ses ex-camarades socialistes. PHOTO THOMAS SAMSON/AFP

Cécile Duflot. Sa candidature à Paris a provoqué la colère de BertrandDelanoë et un clash entre Martine Aubry et Anne Hidalgo. PHOTO FRED DUFOUR/AFP

Plan large

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Trois jours d’intenses débats,une double manifestationquimobilise les élus locaux

réunis àParis, à laportedeVersailles :le 94e congrès des maires et desprésidents de communautés s’ouvresur le thème de l’intérêt généralet du citoyen. Comme chaqueannée, le salon des maires et descollectivités locales se tient enparallèle. « La synergie entre ces deuxrendez-vous annuels crée la forcede l’événement », souligne JacquesPélissard, député-maire de Lons-le-Saunier.Le dernier baromètre de confiancepolitique, réalisé par le Cevipof etTNS Sofres, a mis en évidence uneaggravation de la perte de confiancedes citoyens envers leurs élus et,pour la première fois, envers leurmaire. Même si celui-ci reste l’élupréféré des Français. C’est pourquoil’AMF a souhaité retenir commethème : « Lemaire, l’intérêt généralet le citoyen ». Mais cette annéece congrès s’ouvre sur un fondd’inquiétudes, très concrètes. Ainsipour André Laignel, le secrétairegénéral socialiste de l’AMF, « Lerecul de la décentralisation s’ajouteà celui, massif, des investissementsdes collectivités locales, qui a atteint- 8 % en 2010. »

Des réformes qui passent malAvec en arrière-plan la réformeterritoriale, le plan d’austérité, letour de vis sur les finances descollectivités locales, le congrès, quise tient en présence de nombreux

ministres, est pour l’essentielconsacré aux incertitudes desélus locaux devant le paysageintercommunal en préparation(périmètres, compétences, gou-vernance). La dégradation desfinances des collectivités locales(gel des dotations, rareté de l’accèsau crédit, recettes fiscales incer-taines), qui réalisent pourtant71 % de l’investissement public,est également au cœur de tous lesdébats.La gestion au quotidien des

municipalités vécue par les maireset qui constitue parfois un véri-table casse-tête est traitée à traversune vingtaine de débats, ateliersou points info : habitat, gestionde la voirie, utilisation des sols,

vieillissement de la population,attractivité des territoires. Surtoutes ces questions, les échangessont depuis les dernières réformestendus et passionnés, car de nom-breuses missions de service publicmises en œuvre par les communeset les intercommunalités sont encomplète transformation.

Moins d’argent pourles collectivités localesÀ quelques mois de la présiden-tielle et des législatives, le congrès

Bonjour,monsieur lemaire. Ils sont plusieursmilliers à se retrouver du 22 au 24 novembreà la porte deVersailles, à Paris, pour le 94e congrès desmaires. Chacun est venu témoigner desa passion pour la vie publique.Mais cette passion nemasque pas l’inquiétude des élus devantdes réformesqui s’accumulent et qui souvent soulèventplusdequestionsqu’elles n’en résolvent.Dossier réalisé par Joël Genard

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Initiatives

Au congrès des maires : p

François Fillon. Le Premier ministre, devant les maires réunisà l’occasion du 94e congrès de leur association, défend la réformeterritoriale engagée par le Gouvernement. PHOTOPHILIPPEWOJAZER/AFP

Àla question « Avez-vousl’intention de solliciter unnouveau mandat de maire

en 2014 ? », 47 % des élus interro-gés répondent qu’ils ne savent pas,34 % oui et 19 % non.« À mi-mandat, les élus sont sansdoute plus attachés à achever lesréalisations engagées qu’à dessi-ner les lignes d’une candidaturefuture. Mais la complexité de latâche actuelle ainsi que le manque

de visibilité sur les moyens pèsentaussi très certainement dans cetteindécision », écrit le mensuel.66 % des maires considèrentd’ailleurs qu’ « il est plus difficiled’être maire en 2011 qu’en 2001 »,10 % étant d’un avis contraire, et24 % ne sachant pas.Interrogés sur les finances lo-cales, 92 % des maires estimentque le gel des dotations de 2011à 2013 constitue un frein à

l’investisseur local. 74 % consi-dèrent qu’ils n’ont pas lesmoyens de réaliser les objectifsdu Grenelle de l’environnement,notamment la maîtrise des dé-penses d’énergie, que près de 54 %considèrent comme prioritaire.Ils ne sont que 10 % à estimerqu’ils en ont les moyens et 16 %ne savent pas.52 % des maires affirment que laloi sur la réforme territoriale est

« un frein », contre 16 % qui ré-pondent que c’est « un progrès »et 32 % ni l’un ni l’autre. 52 %également répondent que lacréation du conseiller territorial,au cœur de cette réforme, est« une mauvaise chose » et 31 %« une bonne chose ». Enfin, 76 %considèrent que « la réformemenace les cofinancements ».Ce baromètre a été conçu par LeCourrier des maires, en partenariat

avec Income Consulting et avecle soutien d’Énergies CommunesGDF Suez. Il a été réalisé du20 septembre au 6 octobre 2011.Un questionnaire a été adressépar mail aux maires et adjoints.360 élus y ont répondu. Ils sontà 85 % élus dans des communesde 5 000 habitants et moins.Ce baromètre sera actualiséchaque année à l’occasion ducongrès de l’AMF.

Prèsd’unmaire sur deuxne sait pas s’il se représenteraauxprochainesmunicipales. C’est cequerévèle unbaromètre réalisépar lemensuel LeCourrier desmaires.Uneenquêtequi témoignedesétatsd’âmedespremiersmagistrats,quiprésidentauxdestinéesdeplusde36000communes.

Sondage

Les maires s’interrogent sur leur avenir

«CE CONGRÈS ESTL’OCCASION POUR

LA DROITE ET LA GAUCHEDE S’AFFRONTER SUR LESMODALITÉS D’ACHÈVEMENTDE L’INTERCOMMUNALITÉ »

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est aussi l’occasion pour la droiteet la gauche de s’affronter surles modalités d’achèvement del’intercommunalité et la créationdu conseiller territorial, qui est aucentre de la réforme territoriale deNicolas Sarkozy. Enfin les financesdes collectivités sont un sujet dedébat permanent entre les élus degauche et ceux de droite.En ce qui concerne ces dernières,le président de l’AMF, JacquesPélissard (UMP), estime que le geldes dotations de l’État, décidé

pour trois ans en 2010, constituela « contribution des collectivitésà l’effort national de contrôle desfinances publiques ».Mais « il n’estpas possible d’aller en dessous »,ajoute-t-il.En revanche, pour le secrétairegénéral de l’association, AndréLaignel (PS), le compte n’y est pas :« Ce n’est pas un gel en monnaiecourante. De plus, une nouvelletranche d’un milliard d’euros d’éco-nomies a été votée, dont 200 millionspour les collectivités locales. »

Un congrès sur fond d’électionà la tête de l’AMFCe congrès est également l’occa-sion d’élire pour trois ans le pré-sident de l’AMF. L’UMP JacquesPélissard se représente face no-tamment à l’ancien ministre so-cialiste André Laignel (PS), maired’Issoudun (Indre).En prélude au congrès s’est tenuele 21 novembre la journée desmaires d’Outre-mer à l’Hôtel deville de Paris, avec la participationen particulier d’élus de Mayotte,

île française de l’océan Indientouchée par une grave crise socialedepuis près de six semaines.Parallèlement, le salon des mairesespère attirer, comme l’an dernier,55 000 visiteurs, a indiqué son or-ganisateur, le président du groupede presseMoniteur, Guillaume Prot.Regroupant près de 36 000 maireset présidents de communautés,l’AMF est administrée par un bureaude 36 membres, 18 de droite et 18de gauche. Son président est élupour trois ans dans le cadre d’un

scrutin majoritaire à deux tours.Chaque maire a une voix.Association plus que centenaire,l’AMF est devenue, au fil des ans,un puissant relais d’opinion et unenjeu politique.Et parmi les nombreux débats quiintéressent en priorité les maires,l’Hémicycle a retenu plus parti-culièrement ceux qui concernentl’éducation, l’intercommunalitéet le financement des collectivitéslocales.

>Lire ci-dessous et p. 12

NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011 L’HÉMICYCLE 13

s : passionet inquiétude

Comment interprétez-vous legelglobaldesdotationsauxcollectivitéspour2012?Philippe Laurent : Ce gel fait suite àcelui de 2011. Voici donc deux ansque les concours financiers del’État ne progressent plus du tout,ce qui correspond à une perteréelle en termes de pouvoir d’achat.Compte tenu de la situation del’État, nous avons accepté ce gell’année dernière, en obtenant dehaute lutte que certains transfertsne soient pas concernés, commele produit des amendes de police,dû en grande partie à l’activité despolices municipales et au relève-ment du tarif de 11 à 17 euros del’amende de première catégorie.Or, l’État vient de préempter lamajeure partie de la progressionde ce produit entre 2011 et 2012,soit 33 millions d’euros. Ce n’estpas conforme à ce qui avait étéconvenu.

Lescollectivités localesont-elleset auront-ellesencore lesmoyensd’investir danscecontextedecrise ?P.L. : Même si elle reste encoreélevée (avec près de 30 milliardsd’euros), la capacité d’auto-financement des collectivitéslocales s’érode régulièrement.Compte tenu, par ailleurs, de ladifficulté nouvelle d’accès àl’emprunt – qui s’explique pardes considérations propres ausecteur bancaire et absolumentpas par la qualité de crédit du

secteur public local –, les moyensdestinés au financement desinvestissements sont en baisse,et les investissements eux-mêmesdiminuent en volume depuisdéjà deux ans. Cela continuera.À l’heure actuelle, les projetssont étalés, ou repoussés, pas

encore abandonnés. Mais celaviendra, inévitablement. C’estextrêmement préoccupant : pourl’équipement du territoire etdonc pour l’avenir du pays,d’une part, pour la bonne marchedu secteur du bâtiment et destravaux publics, qui va voir son

activité et ses emplois amputés,d’autre part.

Comment les collectivitésvont-ellespouvoir se repositionnerfaceà lanouvelledonnefiscaleet comment répartir les ressourcesau traversnotammentde lapéréquation?P.L. : La nouvelle donne fiscaleest toujours pleine d’incertitudes.Par exemple, nous ne connaissonstoujours pas, début novembre, ledétail de nos recettes pour 2011,et notamment la part que prendle fonds de garantie individuelle

de ressources. Nous ne sommesdonc pas à même d’estimer laprogression éventuelle de cesressources sur les années qui

viennent, ni de contrôler le ni-veau de ces ressources. Ces in-certitudes pèsent sur la décisiond’investir. Quant à la péréqua-tion, elle est désormais totale-ment horizontale, des collectivitésvers les collectivités, puisquel’État n’ajoute plus un centime.Elle est nécessaire, utile et juste,mais ne peut absolument pas àelle seule résoudre les difficultésimportantes que connaissentcertains territoires : seule la soli-darité nationale peut y pourvoir,ce d’autant plus que ce sont bienles erreurs commises par l’État

dans sa politique d’aménage-ment d’après-guerre qui portentla principale responsabilité deces difficultés.

Les villes et leurs finances

Investissements en bernePhilippe Laurent,maire divers droite de Sceaux, s’inquiète de réformes territorialesqui assèchent les finances desmunicipalités. Il dénonce une situation dans laquellela capacité d’autofinancement des collectivités locales s’érode régulièrement.

«À L’HEURE ACTUELLE,LES PROJETS SONT ÉTALÉS,

OU REPOUSSÉS, PAS ENCOREABANDONNÉS. MAIS CELAVIENDRA, INÉVITABLEMENT.C’EST EXTRÊMEMENTPRÉOCCUPANT POURL’ÉQUIPEMENT DU TERRITOIREET POUR L’AVENIR DU PAYS »Philippe Laurent

Philippe Laurent. LemairedeSceauxs’interrogesur lanouvelledonne fiscale. PHOTOPASCAL LESEGRETAIN/AFP

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Initiatives

Quel serad’aprèsvous lepaysageintercommunaldedemain?Jacqueline Gourault : La mise enœuvre de la réforme territorialeinterpelle les maires. C’est d’unecertaine façon une bonne chosequ’il n’y ait plus demain decommune isolée et c’est bienque toutes les communes soient,d’ici la fin de l’année, dans uneintercommunalité.Mais, selon les départements, laréforme se passe plus ou moins

bien. Cela dépend de la manièredont les préfets se sont accaparésle dossier. Certains ont provoquédes blocages. Il faut reconnaîtreque certains élus sont favorablesà un certain immobilisme. Ily a des difficultés à promouvoirdes périmètres pertinents. Lesblocages sont parfois des deuxcôtés.Cela dit, le paysage intercommu-nal va évoluer dans le bon sens.Les élus veulent surtout éviter des

mégastructures. Ils croient à laréalité des territoires.

A-t-onbienmesuré toutes lesconséquencesde lagouvernance?J.G. : Dès le prochain renouvelle-ment général des conseils muni-cipaux, les élus intercommunauxdevraient être désignés au suffrageuniversel direct dans le cadre del’élection municipale dans lescommunes dont le conseil mu-nicipal est élu au scrutin de liste.

Dans les autres communes, lemaire serait automatiquementdélégué au sein du conseil del’Établissement public de coopéra-tion intercommunal (EPCI). Il estclair qu’il y aura des conséquencespour la rénovation de la gouver-nance des intercommunalités.Les élus devront à l’avenir réfléchirà la nécessaire collaboration entreles communes et les EPCI, etmenerainsi des stratégies de territoireavec leurs voisins.

Les municipalités souhaitents’impliquer dans la vie scolaire

La réforme provoque autant de réticence que d’adhésion

Avez-vous le sentimentquel’organisation territorialeactuellefavorise la réussite scolaire?Jean Germain : La question souligneun problème récurrent, celui dela répartition des moyens. Lescollectivités ont assuré, pour l’écoleprimaire en 2009, 37 % du finan-cement des établissements scolairescontre 62 % à l’État. Le montantde leur participation croît d’annéeen année. Autant dire qu’il estnécessaire que les transferts decompétences s’accompagnent d’untransfert de moyens. Les villes nese contentent plus de financersimplement les personnels desécoles et l’entretien des bâtiments,mais participent de plus en plus à« l’offre éducative » en proposantdes intervenants de qualité dansle temps scolaire. Aujourd’hui,l’organisation territoriale de l’Édu-cation nationale est telle qu’ellen’est pas suffisamment proche duterrain. La déconcentration del’Éducation nationale en primaireest faible : pas de véritable statutdu directeur d’école, gestion dupersonnel par le rectorat, affaiblis-sement des inspecteurs d’académieau profit des recteurs… Les villespallient cette absence. Par exemple,la dotation en tableaux numé-riques et chariots mobiles infor-matiques dans les écoles doitfavoriser la réussite scolaire etatténuer la fracture numérique.Cependant, un des risques est la

création d’inégalités entre com-munes riches et communes pauvrescar ce sont encore les collectivitésterritoriales qui assurent la trèsgrandemajorité des financements.Là aussi, la question des moyensest fondamentale.

Commentaméliorer ouoptimiserl’offre scolaire?J.G. : Optimiser l’offre scolaire,c’est réfléchir à l’école dans sonensemble. L’amélioration de l’offrepasse par le développement d’unpartenariat soutenu entre l’Édu-cation nationale et les collecti-vités locales. Ces dernières, parle biais de leur réseau avec lesassociations de terrain, peuvent

présenter de nouvelles actionséducatives aux enfants, dans lecadre des programmes définis parl’Éducation nationale. Par ailleurs,l’Association nationale des direc-teurs de l’éducation des villes(Andev) propose un « temps globaléducatif », qui dépasse la prise encharge par l’Éducation nationale.Ceci permettrait de sortir dudébat qui oppose les partenairessur les limites des différents temps– scolaire, péri et extrascolaire –et sur la légitimité des communesà mettre en œuvre de véritablespolitiques éducatives concertéesavec les différents acteurs édu-catifs et notamment les parents.L’effacement des frontières laisserait

la place à un continuum éducatifpartagé, concerté et nécessairepour la réussite de tous, une réus-site scolaire s’intégrant dans laréussite éducative. Enfin, il est im-portant que l’Éducation nationalefavorise le maintien des écolesen milieu rural, pour une offreétendue sur tout le territoire. Laconcentration à outrance n’estpas favorable à l’optimisation del’offre scolaire.

Quelles sontaujourd’huilespréconisationsdesélus?J.G. : Les collectivités locales ontbesoin d’interlocuteurs ayant unevéritable reconnaissance et unpouvoir hiérarchique sur leurscollègues. Concernant l’écoleprimaire, la question du statutdu directeur d’école est doncessentielle. Comment une per-sonne seule peut-elle gérer unétablissement parfois équivalent

à un collège sans les moyens etl’autorité nécessaires ? En outre,les collectivités locales ne peuventse contenter d’être de simplesfinanceurs. Beaucoup d’élus pré-conisent un effort en matièrede mixité sociale : désenclavercertaines écoles de quartier, éta-blir une nouvelle sectorisationpour donner la liberté à chacund’inscrire son enfant là où il leveut. Face à un repli sur soi, à uneaccentuation du communauta-risme, les élus doivent pouvoirpromouvoir l’école publique,creuset d’égalité. À eux dedémontrer que l’école reste lemoyen principal de monter dansl’ascenseur social. Être acteur del’éducation, ce n’est pas seulementassurer l’entretien des bâtiments,c’est aussi s’impliquer dans lavie scolaire au quotidien. De trèsnombreux élus se sont déjà enga-gés sur ce chemin.

Pour le maire PS de Tours, Jean Germain, les municipalités ne veulent pas seulement financerune partie de l’éducation. Au-delà de l’entretien des bâtiments, les villes entendent être partiesprenantes dans l’organisation de la vie scolaire.

«FACE À UN REPLI SUR SOI,À UNE ACCENTUATION

DU COMMUNAUTARISME,LES ÉLUS DOIVENT POUVOIRPROMOUVOIR L’ÉCOLE PUBLIQUE,CREUSET D’ÉGALITÉ »Jean Germain

Les villes et l’école

Les villes et l’intercommunalité

JACQUELINEGOURAULTSÉNATRICE MODEM, MAIRE DELA CHAUSSÉE-SAINT-VICTOR

DR

Jean Germain. LemairedeTours souhaiteque le statutdudirecteurd’école soit repensé. PHOTO ALAIN JOCARD/AFP

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Échaudé commed’autres éluspar l’affaire Dexia, JacquesPélissard, le président de

l’AMF, vient de proposer unamendement pour permettred’étudier l’impact d’une tellestructure sur les finances del’État et des collectivités locales.« Cette agence permettrait la complé-mentarité et surtout une régulation

d’ensemble afin que les collectivitéspuissent continuer à emprunter », pré-cise d’emblée le président de l’AMF.Les collectivités territoriales fran-çaises sont porteuses de 71 % del’investissement public. Elles sontaussi des emprunteurs réguliers etstructurels.Si leurs besoins d’emprunts ont été,jusqu’à aujourd’hui,majoritairement

satisfaits par un recours au créditbancaire, les collectivités territo-riales souhaitent diversifier etsécuriser leurs sources d’approvi-sionnement en monnaie. « Ellessouhaitent donc créer une Agencede financement des investissementslocaux chargée d’émettre des obliga-tions en direct sur le marché obli-gataire, au bénéfice de ses membres :

collectivités territoriales, groupementset leurs établissements publics. L’agenceainsi créée viendrait utilement complé-ter une offre insuffisante, même aprèsla mise en place de la future banqueissue du sauvetage de Dexia », ajouteJacques Pélissard.Une telle agence passe par lacréation d’un établissement publicdestiné à regrouper les collectivitésterritoriales désireuses de bénéfi-cier de cette nouvelle source definancement. Dans la mesure oùcette structure constitue unenouvelle catégorie d’établissementpublic, l’article 34 de la Consti-tution impose l’intervention dulégislateur.Jacques Pélissard est favorable àcette nouvelle structure qui pourraitagir sur le marché pour trouver desfonds et prêter ensuite aux collec-tivités adhérentes, sans traitementdifférencié en fonction de la taillede la collectivité. La mise de fondsserait de 150 millions d’euros avecune montée en puissance et en« représentant 20 % du marché »,conclut l’actuel président de l’AMF.

Cette agence ne pourrait prêterque 50 % des sommes pour ne pasentrer en concurrence avec lesautres structures.

NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011 L’HÉMICYCLE 15

Vous considérez que la situationdes collectivités locales esttrès grave,mais celles-ci nedoivent-elles pas participer àl’effort de rigueur ?André Laignel : Elles y ont déjàlargement contribué avec la sup-pression de la taxe profession-nelle qui leur a été imposée. Àcela se sont ajoutées la pseudo-péréquation, qui va taxer lescommunes les plus pauvres, etla loi de finances pour 2012.Quelles que soient les raisons,cela fera 1 milliard 370 millionsd’euros en moins dans les caissesdes collectivités. À cette baisseconsidérable, il faut y ajouterla prévision de 2 % d’inflationl’an prochain. Cela aboutit à unvéritable étouffement financiercar, de plus, les compensationsen dotations sont gelées.

Ces collectivités sont-ellesau bord de l’asphyxie ?A.L. : Le supplice du garrot qui acommencé en 2007 avec le plafon-nement de la taxe professionnelleconduit aujourd’hui à l’asphyxie.On ne peut mettre en panne lesinvestissements des collectivitéslocales. Ils ont reculé de 4,7milliardsauxquels s’ajoute la baisse du fondsde compensation de la TVA. Au lieud’utiliser les collectivités pour larelance de l’économie, on les obligeà devenir des agents de la récession.La règle d’or existe depuis longtempspour les collectivités. Nous avonsdégagé 30,2 milliards d’eurosd’excédent de fonctionnement en2010, alors que l’État était endéficit de fonctionnement de plusde 100 milliards. Les collectivitéslocales représentent 71 % de l’in-vestissement public en France.

Ce n’est donc pas la dette descollectivités locales qui pèse surl’endettement de la France. Lescollectivités, par rapport au PIB,dépensentmoins qu’en 1995. Pource qui est de la dette, celle-ci semonte à 1 660milliards pour l’Étatet les collectivités locales n’enreprésentent que 160 milliards !

Ce congrès se tient donc sur fondd’inquiétude ?A.L. : Je partage cette inquiétude.On ne peut mettre en panne lescollectivités locales, qui sont lepremier investisseur public. Jamaisles collectivités locales n’ont étéutilisées comme des variablesd’ajustement, ce qui est malheu-reusement le cas aujourd’hui.

Comment voyez-vous lamiseen place de la péréquation

horizontale entre les communes ?A.L. : L’AMF a de tout tempsdéfendu le principe de la péré-quation. Mais la période de baissedes recettes est le plus mauvaismoment pour la mettre en place.En 2011, il y a quelques com-munes riches qui ont participé,mais il y a surtout une immensemajorité de communes pauvresqui ont payé pour les communestrès pauvres.Toute péréquation doit s’appuyersur les véritables écarts de richesse,sur l’effort fiscal de chacun, maisdoit aussi être abondée par l’État,car la solidarité nationale ne peutpas être assurée uniquement parles collectivités entre elles.Les maires doivent dire aujour-d’hui la vérité de leur fonctionactuelle et les difficultés qu’ils ren-contrent au quotidien.

L’Agence permettra de réduire les coûts definancement des investissements des collectivités,

par la valorisation de leur excellente solidité financière.Elle créera une émulation saine entremarchés bancaireet obligataire et ouvrira un accès pérenne des collectivitésà la liquidité. L’Agence, qui n’a pas vocation à créer de ladette supplémentaire, est conçue pour servir lemondelocal dans un souci d’intérêt général, et sera soumiseà une obligation d’exemplarité impliquant une structurefinancière simple, régulée et transparente.

Forme juridique� L’Agence sera constituée d’un établissement publiclocal et d’une société anonyme (SA). L’Établissement

public des investissements locaux, rassemblant les élusreprésentant les différents niveaux de collectivités,fixera les orientations stratégiques de l’Agence. Il seraactionnaire d’une SA, établissement financier employantdes professionnels chargés de la gestion opérationnelle.

Modèle économique� L’Agence se conformera dès son lancement auxexigences de la réglementation prudentielle (dont lesratios de Bâle III). Capitalisée par sesmembres, l’Agencefonctionnera sans garantie de l’État et au bénéficeexclusif des collectivités locales. Elle a ainsi vocationà devenir un instrumentmajeur au service dudéveloppement économique et social des territoires.

André Laignel, secrétaire général de l’AMF, considère que les collectivités locales devraient êtreutilisées commeun instrument de la relance économique. Il s’alarmede la diminutiondesmoyens qui leur sont accordés.

Lamise en place de cette agence aura des conséquences pour le budget de l’État etdes collectivités locales. Un rapport sera remis auParlement avant le 15 janvier 2012.

Vers la créationd’uneagencepubliquede financementdescollectivités

Lescollectivités localesaubordde l’asphyxie?

Le futur fonctionnement de l’Agence

André Laignel.MairePSd’Issoudun. PHOTOBERTRANDGUAY/AFP

Jacques Pélissard.Député-mairedeLons-le-Saunier.PHOTOPATRICKKOVARIK/AFP

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Interview

Untramwaypour villesmoyennes

Peut-onparler d’unevolontéd’Alstomdepartir à la conquêtedesvillesmoyennes?Le tramway est aujourd’hui le meil-leur et le plus adapté des moyensde transport pour lutter contre lacongestion routière et pour dimi-nuer la pollution atmosphérique,tout en désenclavant certains quar-tiers. Il est aussi là pour dynamiserle tissu économique et social, et per-mettre lemeilleurmaillage du cœurde ville. Tout a été dit sur ses nom-breux avantages compétitifs. Maisdu fait de son coût, de l’importancedes infrastructures qu’il nécessiteet des modifications urbaines qu’ilinduit, il a longtemps été considérécomme l’apanage exclusif desgrandes villes. C’est un mode detransport que jusqu’alors leurs« consœurs » de taille moyennen’envisageaient pas du tout.

Alstomestdoncau rendez-vouspour conquérir cemarché?Nous avons observé demanière trèsattentive l’évolution dumarché, étéà l’écoute des élus et des clients.Nous avons recensé et mis à platl’ensemble des remarques des col-lectivités déjà équipées. La prise encompte affinée des besoins émer-gents nous a paru aussi très impor-tante. Au cours de ces dernièresannées, Alstom s’est enrichi desnombreux échangesmenés avec sespartenaires. Cette démarche volon-tariste a permis de développer plu-sieurs innovations en adéquationcomplète avec lemarché etmainte-nant réunies dans la gammeCitadis Nouvelle Génération. Loinde s’afficher en rupture avec l’héri-tage des 1 500 Citadis vendus àtravers lemonde depuis 1997, cettenouvelle gamme continue résolu-ment la saga et régénère les fonda-mentaux qui ont fait le succèsCitadis. La première référence decette nouvelle gamme est CitadisCompact. Il s’agit d’une « navetteécologique » intra-muros, à la taillebien ajustée et adaptée aux agglo-mérations de taille moyenne.

Quels sont les avantagesdeCitadisCompact?Citadis Compact est un objetsimple. Simple dans sa conceptionavec une excellente accessibilité àses composants clés et autant de

temps de maintenance gagné.Simple à conduire grâce à sa nou-velle cabine de conduite. Simple àutiliser pour les passagers avec sondesign optimisé.Cette simplicité apparente cacheun très haut niveau de technolo-gie et de qualité. Ce tramway dedernière génération et aux dimen-sions modestes – 22 mètres contre32 à 43 mètres habituellement –peut transporter jusqu’à 130 passa-gers. Grâce à sa motorisation à100 % alimentée par des moteursà aimants permanents1, il serévèle particulièrement fiable etperformant. Plus compacts, cesmoteurs consomment moinsd’énergie et contribuent à rendrece tramway plus respectueux del’environnement. Il est équipé debogies Ixège hautement efficients.Il est le premier tramway à offrirune cabine de conduite conforme

à la nouvelle réglementation entermes de sécurité et d’ergonomie.Sa conception rend par ailleursson design personnalisable àmoindre coût.Enfin, son couloir – le plus largedu marché – et ses portes doublesà l’avant et à l’arrière, inédites surun matériel de cette longueur,favorisent les échanges de passa-gers et donc les gains de temps.Ses aménagements intérieurs sontmodulaires : de deux à quatresièges de front. L’ensemble contri-bue au confort des voyageurs. Aufinal, je parlerais d’une trilogiegagnante : attractivité-capacité-performance.Citadis Compact ouvre de nouvellesperspectives pour les grandes agglo-mérations en leur permettant dedéployer un réseau secondairecomplémentaire de leurs lignesde tramway principales. L’objectif

est de faire profiter l’ensemble desquartiers et/ou des communeslimitrophes de « l’effet tram »,et optimiser ainsi la desserte desecteurs plus éloignés du centre etmoins fréquentés. Citadis Compactfavorise donc l’émergence d’unsegment de marché jusqu’alorsinexploré. Ultime avantage pources grandes agglomérations déjàéquipées d’une flotteCitadis, l’acqui-sitionde cesmatériels pour les lignessecondaires permettra une mutua-lisation de la maintenance et, parvoie de conséquence, une baissedu coût global de possession desflottes.

Vousdécriviez leCitadisCompactcommeune«navetteécologique».Pouvez-vouspréciser ?Citadis Compact participe d’unedémarche de développement du-rable. Il s’inscrit parfaitement àla confluence des trois objectifsphares du Grenelle II de l’envi-ronnement, lancé en 2008 par leGouvernement français.Écologique, il participe à l’amélio-ration de la qualité de l’air et à laréduction des émissions de gazà effet de serre. Social, il favorisele désenclavement de certainsquartiers et offre la possibilité àde nombreux citadins de rejoindrele centre-ville plus facilement. Éco-nomique, il l’est à double titre.

Tout d’abord, son exploitationconstitue un levier de croissancepour les agglomérations. Ensuite,il garantit un coût global de posses-sion maîtrisé et un investissementinitial rapidement amorti grâceà sa capacité, sa consommationénergétique et sa durée de vie.

Quels sont les sitesAlstomchoisispour construire ce tramway?Citadis Compact sera conçu etassemblé dans les sites Alstom enFrance : Valenciennes, La Rochelle,Ornans, Le Creusot et enfinVilleurbanne. Cette innovationindustrielle d’importance signe lacapacité d’adaptation et d’évolutionde l’entreprise. Mais égalementson aptitude – en réunissant autourd’une même table ingénieurs,mainteneurs et designers – àmutualiser les talents pour donneraux clients le meilleur.

Propos recueillispar Joël Genard

1. Alstomamis au point desmoteursà aimants permanents pour la traction

dematériel roulant, permettantune amélioration des performances,de la consommation d’énergie et des

frais demaintenance. Alstomappliquecette technologie innovante à ses

tramways Citadis, ses trains régionauxCoradia ainsi qu’à sa dernière génération

de trains très grande vitesse : l’AGV.

Le tramway va devenir accessible aux agglomérations de taillemoyenne. Alstoma conçuun nouveau tramwayplus petit que ceux actuellement en circulation et qui devrait convenirà de très nombreuses communautés d’agglomérations. Le premier Citadis Compact sera livréd’ici deux ans àAubagne. InterviewduPDGd’AlstomTransport, Henri Poupart-Lafarge,qui porte ce projet.

16 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011

Henri Poupart-Lafarge.AvecCitadisCompact, leprésidentd’AlstomTransportpromet la créationd’unenouvellegénérationde tramwaysàvocationécologique.

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NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011 L’HÉMICYCLE 17

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IMPRESSION Roto Presse Numéris, 36-40, boulevard Robert-Schumann, 93190 Livry-Gargan. Tél. : 01 49 36 26 70. Fax : 01 49 36 26 89.Parution chaque mercredi ABONNEMENTS [email protected] COMMISSION PARITAIRE 0413C79258 ISSN 1620-6479

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Entreprise

18 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 425, MERCREDI 23 NOVEMBRE 2011

Les premières Autolib’ devraient circuler dans Paris début décembre. Elles permettrontd’expérimenter les batteries électriques fabriquées par l’industriel Vincent Bolloré. L’opérationsera coûteuse les premières années, mais elle doit permettre de démontrer la supérioritéde ces batteries made in France. Qui ne verront le jour que parce que le groupe Bolloré estdétenu à 82 % par son créateur.Par Axel de Tarlé

Bolloré et le made in France

La Bourse est-elle l’ennemidu « made in France » ? La« dictature » des marchés

nous interdit-elle toute créativité ?C’est le terrible aveu de VincentBolloré pour la voiture électrique.Pour satisfaire les marchés, nousdevrions renoncer à la technologiefrançaise…Il est maintenant entendu quel’automobile doit changer detechnologie, passer du modèle àcombustion, qui émet du CO2, aumodèle électrique, zéro émission.Le grand défi de ce saut technolo-gique, c’est la batterie. L’électricitése stocke très mal. Les batteriesne permettent qu’une faible auto-nomie, à peine 160 kilomètres. Etencore, si vous roulez, tous feuxéteints, sans climatisation, sansmusique et sans faire fonctionnerles essuie-glaces ! Gênant. Mora-lité : Qui maîtrisera la batterieélectrique, maîtrisera la voiture duXXIe siècle.Aujourd’hui, les Asiatiques règnenten maître sur ce secteur avec leurbatterie liquide dite « lithium-ion ».Tous les grands constructeursont adopté cette technologie :Renault, PSA, Volkswagen, Ford,General Motors… En France,Renault a choisi d’équiper ses voi-tures électriques avec les batterieslithium-ion de Nissan. Seul petitsouci, cette batterie chauffe ets’enflamme !!! Dernier exempleen date : la toute nouvelle Che-vrolet Volt de General Motorss’est enflammée toute seuledans un parking, brûlant lesvoitures situées à côté ! L’agence

américaine de sécurité routièrea décidé d’ouvrir une enquêteet demandé des comptes auxconstructeurs qui utilisent cettetechnologie.

Une batterie très sûreVoilà qui donne raison à VincentBolloré. Tout le monde s’estdemandé pourquoi l’hommed’affaires s’était aventuré dans leprojet de voitures en libre partageà Paris, Autolib’, qui – de sonpropre aveu – va perdre de l’argentpendant au moins sept ans.Vincent Bolloré explique vouloirainsi « démontrer les capacités deses batteries électriques ». Car onne le sait pas, mais le groupeBolloré est numéro un dans lescondensateurs, et – à ce titre –travaille depuis plus de trente anssur le problème de stockage d’élec-tricité. Ainsi Vincent Bolloré a-t-ildéveloppé une batterie dite « sèche »au lithiummétal polymère (PLM).Une technologie qu’il est le seul àposséder. Cette batterie « made inFrance » présente deux avantages.Elle offre une autonomie de250 kilomètres, sensiblementsupérieure aux 160 kilomètres dela technologie lithium-ion. Et puiscette batterie « sèche » ne chauffepas. Pas de risque de voir la voitures’enflammer, contrairement àla batterie liquide lithium-ion.« Notre batterie sèche s’enflamme à180 degrés Celsius, contre 70 degréspour celles de nos concurrents »,explique Vincent Bolloré : « C’estla meilleure technologie sur le plande la sécurité. »

Problème : Aucun constructeurautomobile n’a voulu de sa batte-rie sèche. Vincent Bolloré a doncdécidé de la tester lui-même,grandeur nature, avec le projetAutolib’. À terme quelque 3 000voitures Bluecar équipées de cettebatterie « Bolloré » vont ainsisillonner les rues de Paris. Le lan-cement officiel d’Autolib’ auralieu le 5 décembre. Et, l’hommed’affaires breton ajoute benoîte-ment : « L’avantage, lorsque l’oncontrôle 82 % du capital de songroupe familial, c’est que personnene peut vous débarquer quand vousdécidez de vous lancer dans un projetqui va perdre de l’argent »… Toutest dit ! Cette batterie françaiseaurait été enterrée si Vincent Bol-loré avait eu à rendre des comptesaux analystes financiers ! Si vousêtes coté en Bourse, et que vousvous aventurez dans une batterie« made in France », vous risquezde vous faire débarquer ! Les yeuxrivés sur les comptes trimestriels,les analystes financiers évaluent

un projet à l’aune de sa rentabilitéimmédiate. C’est affligeant ! Ima-gine-t-on Michelin renoncer aupneu radial, au lendemain de laSeconde Guerre mondiale, sousprétexte que son invention n’étaitpas immédiatement rentable ?

Décision ahurissanteTout se passe comme si les marchéssusurraient, en permanence, àl’oreille des grands patrons cettefameuse petite phrase que Renaulta utilisée dans ses publicités : « Çanemarchera jamais ! » De fait, c’estprobablement ce que s’est dit le pa-tron de Renault, qui a opté pour latechnologie Nissan. Et ce au granddam de Christian Estrosi. L’ancienministre de l’Industrie ne déco-lère pas : « Cette décision est ahuris-sante. Carlos Ghosn avait pris desengagements très forts envers le prési-dent de la République et moi pourfavoriser le “fabriqué en France”.Je constate, une nouvelle fois, que cetengagement n’est pas tenu. »On ne sait pas encore si la batterie

« Bolloré » se montrera à la hauteurdes espérances. Mais, on peut tirerun coup de chapeau à celui qu’onappelait dans les années 1980,le « Petit Prince du cash flow ». Lefinancier s’est mué en industriel àla fibre entrepreneuriale. VincentBolloré a déjà dépensé 1,5milliardsd’euros pour mettre au point savoiture électrique. Et il ira jusqu’aubout de « l’aventure ». Là où lesmarchés martèlent « Ça ne mar-chera jamais », Vincent Bolloré po-sitive, avec pour devise « essayer,se planter, corriger ». « Si notrebatterie est vraiment meilleure quela concurrence, nous aurons un déve-loppement très important », s’en-thousiasme l’homme d’affairesbreton, qui possède aujourd’huideux usines, l’une au Québec, etl’autre dans le Finistère, à Ergué-Gabéric. Si le concept fonctionne,ce serait bien pour la France, et sur-tout pour l’esprit d’entreprise. Ceserait là une fantastique leçoninfligée aux analystes financiers età leurs ratios étriqués !

Vincent Bolloré. Le président du groupe éponyme. PHOTO ÉRIC PIERMONT/AFP

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Expertise

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Paradoxe : alors que tout lemonde en France vante lesmérites des énergies renouvelables,le secteur du solaire photovoltaïque va perdre cette année lamoitié de ses 25000emplois !La politique française accumule les ratés. Les concurrents asiatiques en profitent.

Photovoltaïqueenberne

C’était une belle vitrine ausoleil : trente ans après sacréation, la société française

Photowatt, installée à Bourgoin-Jallieu, est en liquidation judiciaireaprès son dépôt de bilan. Elle avaitdéjà perdu une centaine d’emploisl’été dernier. 450 sont aujourd’huimenacés. « Photowatt, c’est un gâchisincroyable », s’insurge ThierryMueth, PDG de Coruscant et pré-sident d’Enerplan, l’associationprofessionnelle de l’énergie solaire.« En même temps, c’est un véritablesignal d’alarme ! »Le solaire photovoltaïque enFrance est comme le symbole desdifficultés qui s’annoncent dansle passage, plus arpenté que l’onne le croit, vers une transitionénergétique a priori forcémentheureuse. Tout était pourtant partisur de très bonnes intentions, dutemps du Grenelle et d’un minis-tère hyperpuissant qui faisait deJean-Louis Borloo le numéro 2 duGouvernement. Tout le mondeavait suivi pour soutenir cettefilière dans l’obligation, alors, derecevoir des aides publiques. Ettout a dérapé. Les tarifs de rachatobligatoires pour EDF ont été fixésbeaucoup trop haut. Le photovol-taïque chez les particuliers a re-présenté un moment le meilleur

placement dumonde sur vingt ansavec 8% par an garantis par l’État !Évidemment, ce paradis énergé-tique et « environnemental » a attirétous les margoulins imaginables,des financiers aux « installateurs »incompétents. Tous avaient biencompris, sans aucun intérêt pourl’environnement, qu’il y avaitd’abord une très belle piste pourfaire des bénéfices. Les tarifs derachat ont ensuite été revus à labaisse et tout le monde reconnaîtaujourd’hui que cette baisse,certes justifiée, aurait dû être plusprogressive. Le moratoire décrétépour tenter de sortir de cettelogique spéculative a achevé dedésorienter le marché. Les acteursde la filière, qui s’étaient basés surun cadre qu’ils pensaient solide,se sont retrouvés face à des règlesdu jeu sensiblement différentes. Ilfaut ajouter à cela une surproduc-tion mondiale de panneaux et desprix imbattables pratiqués en Asie,mais avec une qualité médiocre(un panneau chinois n’est garantique cinq ans, contre vingt-cinqpour un panneau Photowatt !).« La gestion française a été chaotique.Unmarché s’est arrêté net », se plaintThierry Mueth. « Les politiques enplace doivent reconnaître qu’ils onttout cassé et nous dire comment on

repart. Ceux qui veulent les remplacerdoivent nous expliquer précisémentce qu’ils veulent faire. Nous sommesprêts à discuter de tout avec tout lemonde. Rien n’est tabou, même pas,par exemple, une baisse progressivedes tarifs. Nous avons besoin d’unevisibilité réelle et sérieuse. Sans elle,rien ne pourra se faire. L’avenir de lafilière en France se joue lors des pro-chaines élections. Le monde entier vadans ce sens. Nous ne pouvons paslaisser passer 2012 ! »Les récents états généraux du so-laire photovoltaïque ont montréque le marché mondial était enplein boum. La production va aumoins doubler tous les cinq ans etpourrait atteindre 135 gigawatts(GW) en 2020 contre 25 aujour-d’hui. Le besoin de trouver desalternatives au pétrole se renforceavec le maintien d’un prix du barilélevé et l’accroissement dangereuxdes émissions de gaz à effet deserre. À l’inverse, le coût du solairebaisse chaque année grâce à desperformances qui ne cessent deprogresser. En France, les profes-sionnels réclament de multiplierpar quatre les objectifs fixés par leGouvernement à l’horizon 2020pour atteindre 20 GW. Une vraiestructuration de la filière pourraitcréer jusqu’à 100 000 emplois.

Pour cela, les états généraux dusolaire photovoltaïquene réclamentpas… la lune mais « un mécanismede soutien stable et pérenne, visantà la création d’un marché intérieur

suffisant et d’une industrie capablede rivaliser à l’international ».Comme quoi, dans le vaste etpassionnant débat sur l’énergie,il n’y a pas que le nucléaire !

LedépôtdebilandePhotowatt,c’est uncoupvraimentdurpourlephotovoltaïqueenFrance?Évidemment ! C’était la seulesociété au monde qui maîtrisaittout ! Trente ans d’expertise dis-paraissent. Il y a dix ans, neuf desdix plus grosses sociétés dans lesecteur étaient Américaines ouEuropéennes. Aujourd’hui, huitsont Asiatiques. Il y a trois ans,Total voulait racheter Photowattmais les actionnaires canadiensont refusé. J’ai bon espoir que dessolutions soient trouvées pourune bonne partie des 450 salariés.

Quel est leproblème?J’assume ma part car, avec tous lessocialistes, j’ai voté la loi Grenelle 1.Les torts à ce moment-là étaient

partagés avec des tarifs de rachattrop hauts. Mais ensuite, le Gou-vernement a fait toutes les bêtisespossibles avec la baisse brutale destarifs de rachat, le moratoire et despseudo-concertations. En plus, ona laissé filer la spéculation alorsque l’on connaissait dès fin 2009la liste des sociétés spécialisées quialimentaient cette bulle. Le risquede tout perdre est grand ! La Chineforme des milliers d’ingénieurs paran. On est naïf. Si nos possibilitésen recherche et développementdisparaissent, nous n’aurons plusd’avenir dans le secteur !

NousnemanquonspasdegrandessociétésenFrancedans ledomainede l’énergie.Pourquoin’investissent-ellespasplusdans

le solaire et lephotovoltaïque?Parce qu’elles n’ont aucune visionà long terme. Exemple : nousavions auditionné à l’Assembléeun représentant de Saint-Gobainpour mieux comprendre le pro-blème. Réponse : « en Allemagne,on sait où on va. En France, on nesait pas. Donc, on n’investit pasen France. » Et toutes les autres so-ciétés françaises sont sur la mêmeligne, EDF, Areva ou GDF Suez, ettoutes touchent des crédits d’im-pôts pour la recherche. Elles at-tendent quoi ? Il manquecruellement un vrai et granddonneur d’ordre en France.

On jouesouvent cetteAllemagnevertueuse faceàuneFranceà latraîne, c’est unpeu facilenon?

Pas du tout ! En France, il faut at-tendre au moins quatre mois pourraccorder au réseau une électricitéproduite par le photovoltaïque.En Allemagne, c’est quinze joursmaximum. La France a pour trèsgrande ambition, en 2020, decompter 5 800 mégawatts en puis-sance installée. En Allemagne, cesera 68 000, juste 12 fois plus !Il n’est pas trop tard. La France aencore l’occasion de revenir dansle jeu grâce par exemple à l’INES,l’Institut national de l’énergiesolaire, à Chambéry, qui travaillesur les générations futures depanneaux, sur les couches mincesou le solaire à concentration. Ilne faut pas accepter une défaiteface à l’Asie qui n’est pas du toutécrite !

Thierry Mueth.Leaderdans lephotovoltaïque, il adûdéposer lebilan.

GENEVIÈVEFIORASODÉPUTÉE PS DE L’ISÈRE

Par Jean-LouisCaffier

Questions à « N’acceptons pas la défaite face à l’Asie. Rien n’est écrit,mais il manque un véritable donneur d’ordre en France »

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Communiqué

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Beaucoupd’enseignesmettent enavant leur lienavec lesproducteurslocaux.Enquoi êtes-vouspluslégitimequed’autresgrandesenseignesde lagrandedistributionpar rapport à cettedémarche?C’est vrai que toutes les enseignesen parlent. Mais depuis quaranteans nous fonctionnons commedes PME et nous travaillons avecdes PME locales. Nous menons cesactions au quotidien. Nous avonsété des précurseurs en la matière.Intermarché, dès sa création, a dûpour une question de survie setourner vers des entreprises locales.Nous avons donc à l’époquecommencé à travailler avec depetites PME et nous sommes restésfidèles. Plus d’un produit surdeux vendu aujourd’hui dansnos magasins est issu d’une PME.15 % de notre chiffre d’affaires sefait localement ou régionalement.

Quelle est ladifférenceavecvosconcurrentsdanscedomaine?Nous sommes des décideurs et

nous avons ce vrai pouvoir dedécision libre. Et cela n’est pasle cas des groupements d’intérêtcomme la très grande distribution.Nous faisons travailler le produc-teur de salades ou de tomates enlocal. Ces petites PME sont par-faitement intégrées dans le tissulocal de leur région. Nous fonc-tionnons avec la richesse locale. Àchaque fois que nous pouvons lefaire, nous initions cette démarche.

Commentcela se traduit-il entermesdedémarchegagnant-gagnant?Le consommateur ne consommepas seulement un produit. Ilréalise un acte sociétal en termesde consommation et il préservedes emplois. C’est une économiegagnant-gagnant. C’est cependantl’éducation du consommateur quis’impose dans cette démarche.Mais toutes ces actions nousaident. Nous organiserons d’ailleursen 2012 la troisième édition des« journées découverte PME »,

pendant lesquelles nous invi-terons tous les consommateursà venir découvrir les PME quifabriquent ces produits. Plus de1 000 entreprises ouvriront ainsileurs portes en juin prochain danstoute la France.C’est le trait d’union entre leconsommateur et la PME localequi nous semble indispensable. Decette façon le consommateur saurapourquoi il choisit telle marqueplutôt qu’une autre. Il n’y a pasque le prix qui compte !

Quelles sont lesautresactionsmenées?Il s’agit du « grand prix innova-tion PME » que nous sommes entrain d’organiser. Nous allonsainsi faire participer les consom-mateurs à l’élection d’un produitd’une PME. La présélection a déjàeu lieu. Nous sommes dans laphase de sélection. Nous feronsainsi découvrir de nouvellesentreprises. Nous garantissons àces PME qui participent et qui

sont sélectionnées un référence-ment de six mois et sans margepour nous. Celle-ci sera rétrocédéeaux PME pour leur permettrede financer leur recherche etdéveloppement. La survie d’unePME, vous le savez, passe parl’innovation. La recherche etdéveloppement coûte cher pourdes PME. Ce sera ainsi grâce ànotre démarche l’occasion pourun chef d’entreprise de réinvestirces sommes qui représenterontentre une et plusieurs annéesd’investissement en recherche etdéveloppement.Grâce à notre démarche nouspouvons maintenir des emploisdirects et indirects et nous contri-buons à la survie du tissu éco-nomique local.Nous avons par ailleurs établi unecharte professionnelle en 15 en-gagements, la charte « Mousque-taires, partenaires des PME », quigarantit entre autres de ne jamaismettre en péril une entrepriselocale travaillant à nos côtés.

L’idée avait été lancée en2005…À l’époque, il s’agissaitde formaliser cette relation

engagée avec les PME avec lasignature d’une première charte.Six ans après, Les Mousquetairesont franchi une nouvelle étapeen renouvelant et en renforçantencore leurs engagements. Lanouvelle charte « Mousquetaires,partenaires des PME » capitalisesur cette culture du « réussirensemble » et constitue la réponsedu Groupement aux nouvellesattentes de ses partenaires, désor-mais au nombre de 5 000 !Les PME constituent en effet le ferde lance de la stratégie commer-ciale du Groupement : 80 % desfournisseurs ne sont autres quedes PME qui conçoivent, dévelop-pent et produisent plus de 90 %des produits vendus sous marquespropres et marques premiers prix.Les engagements pris de part etd’autre dès 2005 ont favorisé etencouragé le développement depratiques communes qui facilitentles relations commerciales.« Ces échanges ont permis de définir6 objectifs prioritaires et d’arrêter15 engagements précis. Ils constituentl’ossature de notre relation avec les

milliers de petites et moyennes entre-prises françaises qui nous accom-pagnent et dont nous favorisons ledéveloppement. »

Les pratiques à l’épreuvedu terrainCe travail de proximité avec lesPME locales a d’ores et déjà portéses fruits. Le Groupement est ainsiperçu comme un partenaire plusattentif qu’il y a six ans (+ 5 pointsau baromètre de confiance parrapport à 2005). Au total, 87 %des PME interrogées estimentsatisfaisante la relation d’affairesqu’ils entretiennent avec Inter-marché. Sur la place permanenteaccordée en région aux produitsde petites et moyennes entreprises,77 % des responsables sollicitésont déclaré que celle-ci étaitsatisfaisante (+ 20 % par rapport à2005). Concernant l’innovation,une proportion identique dechefs d’entreprise (77 %) estimequ’Intermarché accorde un accueilsatisfaisant aux nouveaux produits,soit 12 % de plus en cinq ans.Un climat qui pousse les entre-prises à investir : 57 % des PMEinterrogées affirment envisagerdépenser plus (57 %) ou de

manière identique (39 %) pourinnover dans les trois prochainesannées.

Les points à renforcerMême si le climat de confiance estlargement établi, il n’en demeurepasmoins qu’en six ans les attentesdes PME se sont développées etont évolué. Sur certains domainesprécis, il est nécessaire qu’Inter-marché prenne de nouveauxengagements, ou renforce ceuxqui ont déjà été pris.Ces demandes, réaffirmées parles dirigeants de PME, portentessentiellement sur l’appui audéveloppement à l’international(72 % des PME qui travaillentà l’exportation le font peu avecIntermarché), sur l’allongementdu délai précédant l’exécutiond’une décision de déréféren-cement et enfin sur le niveaud’informations fournies auxPME sur l’orientation desmarchés.Ce sont ces points d’améliorationqui ont amené Intermarché àfranchir une nouvelle étape danssa relation avec les PME avecl’édition d’une charte réactualiséeet renforcée.

Depuis sa création, il y a plus de quarante ans, le Groupement desMousquetaires s’est attachéà développer une relation de confiance avec les PME françaises, notamment dans le secteuragroalimentaire. Unemanière de participer ainsi au développement et au soutien de l’économie locale.

Les « Mousquetaires» au servicede l’économie locale

DANIEL SBERNARESPONSABLE PMEINNOVATIONADHÉRENT INTERMARCHÉDE NICE

PUBLI-COMMUNIQUÉ

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Àdistance

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Après la publication du dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA),quimanifeste une profonde inquiétude concernant l’état d’avancement du programmenucléaire iranien, les Israéliens ont renouvelé leurmenace de bombarder l’Iran. LesOccidentauxont-ils lesmoyens d’éviter une crisemajeure et un foyer d’incendie ?ParFrançois Clemenceau

Bombarder l’Iran.Stoporgo?

Ce n’est que dans les pagesannexes du rapport de l’AIEAet notamment à partir du

paragraphe 38 que les informationsles plus sensibles ont été divul-guées. Recoupées par une dizainede services de renseignement depays différents, elles font état desprogrès réalisés par les scientifiquesiraniens dans la technique desdétonateurs d’armes nucléaires.Les experts de l’Agence s’alarmentdu silence ou des explicationsconfuses des Iraniens à ce sujet.D’autant plus qu’un physicienrusse, VyacheslavDanilenko, auraitpassé cinq ans en Iran pour colla-borer avec les ingénieurs iraniensdans le domaine des détonateursde haute précision tout endonnant des conférences dans les

universités du pays. Des images dusite de Parchin, à 30 kmdeTéhéran,laissent entendre qu’une activité detests d’explosion nucléaire pourraits’y dérouler. Autre révélation, desagents auraient découvert dans lamallette d’un savant iranien unordinateur portable contenantdes schémas très précis d’ogivesnucléaires : rien donc de très civildans ces découvertes. Conclusiondes experts, l’Iran est techno-logiquement au seuil de l’armenucléaire si ce n’est déjà fait. Ellepourrait disposer d’ici quelquesmois d’une à deux bombes.

Précautions et rusesL’Agence n’apporte pas la preuveque les autorités politiques àTéhéran ont donné l’ordre d’assem-bler un engin et de le reproduireni que les militaires iraniens sontà même de maîtriser la balistiqueappropriée, de transporter cesarmes sur des lanceurs capablesde frapper loin des bases avecprécision et puissance. Mais le rap-port prouve de façon éclatante queles autorités iraniennes n’ont riencédé dans leur détermination surle chemin de la bombe atomique.La lecture en creux du rapport de25 pages1 des analystes de l’AIEAindique également que les effortsdéployés sur tous les fronts par lesOccidentaux ces dernières annéesn’ont fait que ralentir la progression

iranienne. Sanctions financières,embargo technologique, pressionssur la communauté scientifiqueiranienne, piratages informatiquesgrâce aux virus Stuxnet en 2010et Duqu en 2011, assassinatsciblés d’ingénieurs, retournementsd’experts, autant de parades quiont obligé les atomistes iraniensà multiplier précautions et rusespour camoufler davantage leprogramme militaire clandestin.La mort brutale le 12 novembredernier, sur une base militairedes Gardiens de la Révolutionproche de la capitale, du général

Hassan Moghaddam, pionnierdu programme balistique iranien,n’est-elle due qu’au hasard ? Ilétait sur la liste noire des servicesspéciaux occidentaux et singuliè-rement du Mossad. Une violenteexplosion entendue à plus de50 km à la ronde a provoqué lamort ce jour-là d’une quarantainede personnes. Accident au coursd’une manipulation d’explosifs,selon la version officielle, maisla coïncidence est troublante.Comme l’écrit Mark Fitzpatrick del’Institut international d’étudesstratégiques de Londres (IISS),un spécialiste de la balistiqueiranienne2, « je serai très surprissi d’autres efforts comparablesn’étaient pas en cours pour obligerles scientifiques iraniens impliquésà regarder constamment par-dessusleurs épaules… »Mais pour Israël, la réponse aurapport de l’AIEA est simple, il fautbombarder les sites nucléairesiraniens avant qu’il ne soit troptard. « Il faut stopper l’Iran car tousles moyens utilisés jusqu’à présent nel’ont pas dissuadé de continuer », adéclaré le Premierministre israélien,Benyamin Netanyahu. Pas si évi-dent. D’abord parce qu’il n’y a pasde consensus total en Israël pourl’option militaire. Une partie de lacommunauté du renseignementcomprend que cette décision ou-vrirait une période d’incertitudeset de dangers imprévisibles. À com-mencer par une série de ripostesmilitaires ou terroristes à partirde l’Iran, qui dispose de missilesconventionnels capables de frapperIsraël, du Liban via le Hezbollahchiite pro-iranien ou depuis Gazavia les groupes armés radicauxpalestiniens. Ensuite, des raidsaériens massifs conjugués à desactions de sabotage au sol n’ontaucune garantie de succès. Mêmesi Israël a reçu effectivement deses alliés américains des munitionsperforantes anti-bunker, le pro-gramme iranien serait largementperturbé par des bombardementsmais pas forcément anéanti.Il existe ensuite une forte réticenceaméricaine à laisser les Israéliensassurer seuls cette opérationde guerre préventive. Lors de ladernière visite en Israël du secrétaired’État à la Défense, l’ex-patron

de la CIA Leon Panetta, l’absencede promesse des Israéliens d’agiren concertation avec les États-Unisen cas de déclenchement d’uneopération a été très mal vécueà Washington. Pour l’administra-tion Obama, l’option militaire estun cauchemar. En pleine cam-pagne de réélection pour rester àla Maison-Blanche, une éventuellefermeture en représailles par lesIraniens du détroit d’Ormuz (parlequel transite 40 % du pétrolemondial) ferait flamber les prix dubrut et replongerait brutalementdans le chaos les économies lesplus fragiles.

Sanctions unilatérales cibléesRetour aux sanctions donc ? Àcondition que les Russes et lesChinois suivent. Ce n’est pas le caspour l’instant car les deux puis-sances disposant du droit de vetoau Conseil de sécurité de l’ONUont été échaudées par l’aventurelibyenne, rendue possible grâceà une interprétation très large d’unerésolution onusienne qu’ellesavaient votée. À condition égale-ment que les nouvelles sanctionsne touchent pas au circuit pétrolieriranien3. Selon l’adjointe d’HillaryClinton aux affaires iraniennes,toute montée des cours qui s’ensuivrait pénaliserait la populationiranienne tout en profitant aux

autorités de Téhéran pour continuerà financer leurs activités illicites.Il s’agirait donc de sanctions uni-latérales ciblées consistant essen-tiellement à désinvestir d’Iran, àrenforcer davantage les embargosdéjà en place tout en engageantune grande campagne de soutienvis-à-vis des camps les plus modé-rés sur l’échiquier politique iranien.Selon Kenneth M. Pollack de laBrookings Institution, un ancienanalyste de la CIA très écouté àla Maison-Blanche4, « il est tempsde se rendre compte que notre poli-tique de la carotte et du bâton n’a pasmarché ». Il faut donc trouver autrechose. La marge de manœuvren’est pas immense. Alain Juppérefuse d’embarquer la France dansune « spirale non maîtrisable ». Lechef de la diplomatie françaisepense qu’il est encore temps d’éviterd’un côté la bombe iranienneet de l’autre les bombardementsisraéliens. Il reste peu de tempspour le prouver.

1. http://isis-online.org/uploads/isis-reports/documents/IAEA_Iran_8Nov2011.pdf

2. IAEA reportputs Iranonback foot,IISS,9novembre2011

3.Cf. Iran : les sanctionsnemarchentpas,ThierryCoville, IRIS,mars2011

4. InDoublingDownon Iran, theWashingtonQuarterly,Fall 2011

Benyamin Netanyahu.Pour lePremierministre israélien, il fautstopper l’Iranà toutprix. PHOTO JACKGUEZ-POOL/GETTY IMAGES

Alain Juppé. Leministre françaisdesAffairesétrangères refused’embarquer laFrancedansunespirale«nonmaîtrisable».PHOTOMIGUELMEDINA/AFP

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L’informatique connaît en cemoment une évolutionmajeure s’appuyant sur les technologies d’Internet :le « Cloud computing » ou informatique en nuage.

Microsoft propose un cloudcomputing au service des communeset citoyens de demain

Communiqué

L’enjeu de cette mutationréside dans la capacité duréseau à fournir des outils et

services informatiques aux acteurspublics et privés sans que ceux-cisoient obligés d’acquérir des plates-formes lourdes et coûteuses, maisen s’appuyant sur la puissance decalcul et de stockage offerte pardes prestataires mettant à disposi-tion leurs propres serveurs.L’infrastructure informatique étantdéjà créée, le passage sur le Cloudva donc permettre aux communesde disposer, à un moindre coût,d’un outil informatique puissant,flexible, adaptable à leurs besoins.Pour Marc Mossé, directeur desAffaires publiques et juridiqueschez Microsoft France, « le Cloudoffre un accès facilité aux outilsnumériques, permettant de faire faceaux montées en charge sans néces-siter l’acquisition d’une infrastruc-ture qui resterait sous-utilisée le restedu temps, le tout à un coût d’usageréduit ».

Des économies budgétairesfacilitant le travail collaboratifdes agents et l’interactionavec les citoyensL’informatique en nuage offre sesatouts aux collectivités locales etaux citoyens. L’une des forces du« nuage » est de pouvoir stocker etrendre accessible l’intégralité desoutils de travail via le Net sousla forme d’un abonnement enréduisant ses coûts généraux. Les

agents qui travaillent en mobilité– acteurs de l’action sociale parexemple – pourront par l’utilisa-tion de l’informatique nomadesaisir sur place les informationsfournies par les usagers et, enconsultant des données des ser-vices d’action sociale, proposerimmédiatement une réponse per-sonnalisée à la personne en faced’eux. Outre le confort apportéaux conditions de travail par laréduction des déplacements entreterrain et bureaux, cette réponserapide sera un facteur d’une

action sociale fluidifiée. L’offreCloud de Microsoft Office 365 en-globe ainsi un ensemble d’outilson line de collaboration parmiles plus performants, y comprisla vidéoconférence. Des agentspeuvent ainsi modifier un texteen étant dans des lieux différents.Ainsi, une collectivité locale peutproposer des outils correspondants

aux différents besoins des servicespublics et de leurs agents, le toutavec les niveaux de sécurité etde protection des données néces-saires. Ces usages on line sontaccessibles sur PC, téléphone etdepuis le navigateur selon l’accèsà Internet.La coexistence des solutionssur site et en ligne permet demaximiser les investissements enmatière de technologies, d’effec-tuer des déploiements au rythmede chaque collectivité. La com-mune peut alors se concentrer sur

ses projets créateurs de valeurajoutée pour les citoyens.Le Cloud est aussi un outil derénovation de la vie publiquelocale et de l’interaction avec lescitoyens. L’adaptation des outilsde CRM (gestion de la relationclient), tel Dynamics Online de Mi-crosoft, va ouvrir la possibilitéd’un suivi plus fin des demandes

des citoyens et d’une gestionmodulée et adaptée des réponsesapportées dans le meilleur délai.

Des villes plus intelligentesen passant par le « nuage »Les technologies de l’informationirriguant le territoire communalvont ouvrir la porte à des change-ments importants dans la gestiondes infrastructures de la commune :suivre finement et de manièredynamique les flux de transportsroutiers, gestion optimisée del’éclairage public et du réseau dedistribution d’électricité… À Issy-les-Moulineaux, le projet Issygrid,dont Microsoft est partenaireavec plusieurs autres industrielsfrançais, dessine le visage de noscommunes de demain. L’objectif,ambitieux, est de gérer en continul’espace urbain en fonction del’évolution des besoins des habi-tants.Le Cloud peut aussi devenir unformidable levier de développe-ment durable. Il peut favoriser letélétravail pendulaire pour lessalariés et les agents publics. PourM. Mossé, il s’agit « de favoriser unnouvel équilibre entre vie personnelleet vie professionnelle en prévoyantdes garde-fous comme le droit à ladéconnexion et en s’assurant que le

télétravail soit seulement complé-mentaire de la présence sur site pouréviter l’isolement et développer le tra-vail d’équipe ». Cela bénéficieraità toute la société car aboutissantà une baisse des déplacements envoiture. Une décrue de 10 % dutrafic automobile aux heuresd’embauche le matin déconges-tionnerait les nœuds routiers,synonymes de stress et de pertede temps. Le nuage peut aussidevenir une opportunité pourles communes rurales et les villesmoyennes. « Par la création d’hôtelsde télétravail, les investissementsde création de réseau à haut débitpourront être concentrés en régénérantdes sites industriels en friche, encréant des lieux d’émulation pourles TPE et PME. » Les solutions detravail collaboratif de Microsoft,commeOffice 365 ou la plate-formeAzure, offrent cette capacité d’uneactivité collaborative nomade.Le Cloud est aussi un atout pourles projets Open Data à l’origined’innovations démocratiques,sociales et économiques. La miseà disposition des donnéespubliques va susciter la créationde nouveaux services aux citoyenspar des start-up. Par exemple :création d’une application acces-sible depuis un smartphone affi-chant pharmacies ou médecins degarde à proximité de l’usager. Celaouvre de nouvelles perspectivespour les seniors trop souventisolés. Le projet Open Data dudépartement de Saône-et-Loirebasé sur Azure – la solution deplate-forme Cloud de Microsoft –et développé par CaptainDashest un exemple de traductionconcrète de ce potentiel. À terme,c’est tout un écosystème de PMEqui devrait fleurir dans les collec-tivités territoriales, synonymed’emplois nouveaux. L’Open Datafacilitant transparence et concer-tation contribuera au développe-ment de villes encore plusapaisées.La ville du futur passe par lenuage mais elle n’est déjà plus unrêve…

«LE CLOUD OFFRE AUXCOMMUNES LA POSSIBILITÉ

DE SIMPLIFIER ET D’INNOVERÀMOINDRE COÛT »

Document Microsoft. PHOTOMAGGIEHALLAHAN

Marc Mossé. Directeur desAffaires publiques et juridiqueschez Microsoft. PHOTODR

PUBLI-COMMUNIQUÉ

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L’HOMME A TOUJOURSEU BESOIN DE L’EAU.

AUJOURD’HUI,C’EST L’EAU QUI A BESOIN

DE L’HOMME.

Tous, nous sommes responsables d’une eau devenue fragile. Si les comportements doivent évoluer,

c’est par l’innovation que l’on gagnera en effi cacité. Lyonnaise des Eaux s’engage à apporter

des solutions nouvelles pour restaurer le bon état écologique de l’eau et permettre à tous les usagers

(agriculteurs, industriels, consommateurs,…) de protéger et d’économiser l’eau.

21 NOVEMBRE 2011, LYONNAISE DES EAUX LANCE

LE CONTRAT POUR LA SANTÉ DE L’EAU.

www.contratpourlasantedeleau.fr

DES IDÉES NEUVES POUR L’EAU

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