l'ie à la marocaine
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Exposé en Intelligence économique :
Sous le thème :
Intelligence économique à la Marocaine
Préparé par : Encadré par :
Mohammed Amine HAFIANE Mr. M .ABAKOUY
Mohamed LAKRIZI
Année universitaire : 2012/2013
Introduction :
L’intelligence économique a vu le jour au Maroc dans les années 90, ainsi de
nombreux décideurs, universitaires et experts se sont penchés sur l’étude de cette pratique.
Des rencontres ont été organisées pour sensibiliser les entreprises et les établissements publics
sur l’importance et l’enjeu de l’intelligence économique comme une démarche de maîtrise de
l’information stratégique. Ces rencontres étaient aussi une occasion pour faire connaître
l’expérience de certaines entreprises qui se sont dotées de cellules de veille pour surveiller
leurs environnements.
Tout d’abord, il nous a semblé important de choisir un sujet en rapport avec l’actualité
récente. C’est pour cette raison que nous avons choisi : « L’Intelligence Economique au
Maroc ».
Pourquoi le Maroc ?
Tout simplement parce que nous ne sommes pas sans savoir que l’Union pour la
Méditerranée permettra un renforcement des relations commerciales les pays de l’UE et les
pays du Sud de la Méditerranée. Ce qui pose la problématique du rôle de l’IE dans les pays du
Sud.
Par ailleurs, ayant assisté aux conférences ICC 2008 sur l’IE et la prospective : un enjeu
pour la Méditerranée, nous avons constaté que le Maroc semble avoir pris de l’avance sur ses
pays voisins.
Nous souhaitons préciser que le temps consacré à cette veille est d’une semaine et demie,
ce qui ne permet pas un travail très élaboré. Nous avons fait de notre possible pour présenter
une ébauche de ce qu’aurait pu être notre travail si nous avions eu plus de temps.
Notre démarche de veille consiste à comprendre trois questions majeures :
Y a-t-il de l’IE au Maroc?
Quel est le rôle de l’IE au Maroc?
Qui sont les acteurs et que font-ils en matière d’IE?
Quels sont les avantages pour le Maroc de pratiquer l’IE?
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L’Intelligence Economique au Maroc : de 1990 à 2012Années 1990 : la genèse de l’IE
Les archéologues ont découvert au Maroc des traces d’Intelligence Economique qui
remontaient aux années 90. A l’époque cette activité était réservée à quelques entreprises
élites qui bénéficiaient de très grandes structures et souhaitaient protéger leurs investissements
face à la compétition internationale.
2004-2006 : le réel lancement de l’IE
C’est en 2004 que l’on peut considérer que la notion d’Intelligence Economique a réellement
été lancée. En effet, cette année-là, le royaume a connu la tenue de sa première conférence
internationale sous le thème Rencontres internationales de Tétouan « Intelligence économique
et veille stratégique, défis et stratégies pour les économies émergentes ». Un signal fort a été
donné puisque ces rencontrent étaient placées sous le haut patronage du Roi. L’association
R&D Maroc (Association marocaine pour la recherche-développement.) qui milite pour le
développement de la recherche et la compétitivité des entreprises a persévéré dans cet élan
pour organiser en 2005 le premier salon professionnel sur le thème « Veille stratégique et
compétitivité ».
L’année 2006 voit la création de l’AMIE (Association Marocaine d’Intelligence
Economique) qui s’était fixé comme objectif d’être un cercle de réflexion et un levier
d’impulsion à la disposition de toutes les organisations marocaines pour les informer, les
accompagner et les assister en matière d’intelligence économique. Au niveau de l’Etat, c’est
en 2006 que le Centre de Veille Stratégique (CVS) a été lancé au sein de la Direction des
Investissements. Ses missions principales étaient d’observer les Investissements Directs
Etrangers (IDE) dans le monde en rapport avec l’environnement et les secteurs Marocains.
C’est également durant cette période que le pôle Veille, Intelligence économique et Aide à
l’innovation Technologique de l’Institut Marocain de l’Information Scientifique et Technique
(IMIST) s’est développé.
2007-2009 : les années de l’IE au Maroc
Cette période a connu le lancement d’une initiative très intéressante : le programme
FINCOME. Lancé officiellement en avril 2007, le Forum INternational des Compétences
Marocaines à l’Etranger (FINCOME) a ainsi « fait appel aux différentes compétences de la
diaspora marocaine, pour accomplir des missions, sur place ou à distance, en appui ou dans
le cadre des programmes de développement de leur pays d’origine, sur la base du volontariat
et d’un engagement déontologique. »
Durant cette même année, l’Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES) a vu le
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jour en novembre 2007. Sa mission est de mener des études et des analyses stratégiques sur
les questions dont il est saisi par le Roi et d’assurer une fonction de veille, au niveau national
et international, sur des domaines jugés stratégiques pour le pays.
Les écoles supérieures commencent à s’emparer du phénomène de l’Intelligence
Economique et ajoutent des modules de formation spécialisés. C’est le cas notamment de
l’Ecole des Sciences de l’Information de Rabat (ESI).
Les banques ont elles aussi décidé de prendre en main l’information stratégique. C’est dans
ce contexte que la Banque Marocaine du Commerce Extérieur (BMCE Bank) a lancé en
2007 son centre d’Intelligence Economique. En 2009 c’est au tour du Centre National de
Documentation (CND), un service public d’information, à but non lucratif, sous tutelle du
Haut-Commissariat au Plan, de mettre en ligne le portail « Maraacid ». Il s’agit d’un
bouquet de portails de veille informationnelle dont le périmètre concerne principalement le
développement économique, social et durable du Maroc dans son environnement euro-
méditerranéen. Le CND avait organisé en 2007 un séminaire sur la veille.
Début 2009, l’Agence de développement de la région de l’Oriental a organisé les premières
journées sur le thème de l’Intelligence Economique Régionale. Ce fut le premier colloque
professionnel sur le thème de l’intelligence territoriale.
Enfin, c’est l’Agence Nationale pour la Promotion de la Petite et Moyenne Entreprise
(ANPME) qui a lancé en 2008 son premier bulletin de Veille mensuel.
Cette période fut placée sous le signe du début de la crise financière mondiale. Afin de
minimiser les impacts de cette crise au Maroc, un Comité de Veille Stratégique avait été mis
en place. Il regroupait des ministères, des banques, des organisations et des associations
professionnelles.
2010-2012 : L’IE pour les PMI-PME
L’institut National des Postes et Télécommunication (INPT) a organisé la première
conférence qui met l’entrepreneur au cœur du dispositif d’Intelligence Economique. Cette
manifestation était placée sous le thème « Intelligence économique au service de
l’entrepreneuriat régional : Un défi pour l’État et les Entreprises ». S’en est suivi la création
du Centre en Intelligence Economique et Management Stratégique (CIEMS).
En 2011 le Maroc a mis en place, à travers le ministère de l’industrie du commerce et des
Nouvelles Technologies, des observatoires sur trois secteurs clé : l’Industrie, les Technologies
de l’Information et de la Communication, et le Commerce et la Distribution.
Afin de soutenir le développement économique et social, un Conseil Economique et Social
(CES) a été mis en place en février 2011. Il peut se prononcer notamment sur des lois, des
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orientations politiques ou des plans de développement socioéconomique, analyser la
conjoncture économique nationale, régionale et même internationale. Il est composé de
syndicats, d’associations professionnelles, d’organisations transversales, de coopératives,
d’experts et de quelques personnalités institutionnelles.
Il existe une initiative transversale qui a été mise en place en 1996. Ce sont les agences
de développement régionales. Il existe quatre agences de développement régional au Maroc :
L’Oriental, le Nord (la plus ancienne, datant de 1996), le Sud, et la plus récente d’entre elles
qui s’occupera des régions oasiennes et de l’arganier. Elles ont développé des programmes
d’intelligence territoriale pour faire avancer leur région tant au niveau économique qu’au
niveau social et universitaire. Ces agences sont directement liées au pouvoir central, ce qui
leur procure une liberté d’action globale et totale.
L’Intelligence Economique en Algérie : de 2005 à 2012
2005-2007 : introduction de l’Intelligence Economique
C’est en 2005 que fut organisée la première conférence importante sur l’Intelligence
Economique à Alger. En seulement deux ans, il y a eu quatre manifestations internationales
sur l’IE à Alger. Cela démontre l’intérêt qui est donné à cette notion. Elles ont été organisées
soit par Vip Groupe soit par Nt2S Consulting et le Cabinet LOGE. Ces différentes
manifestations ont permis de mieux appréhender l’IE et de mettre en place des cycles de
formations professionnelles pour des cadres d’entreprises. Au niveau de la formation
Universitaire, un premier master a été créé à l’Université de la Formation Continue (UFC)
d’Alger durant cette période.
Mais ce qui a surtout marqué ces deux années, c’est la création de la Direction Générale de
l’Intelligence Economique au sein du Ministère de l’Industrie, de la Petite et Moyenne
Entreprise et de la Promotion de l’Investissement. Son rôle est d’accompagner les entreprises
algériennes dans leur démarche de Veille et d’Intelligence Economique, et de constituer une
force de proposition sur les questions liées à la formation. Au même moment, de grandes
entreprises algériennes se dotent en toute discrétion (compétitivité oblige) de systèmes d’IE
afin de faire face à la compétition internationale et afin de pérenniser et protéger leurs
investissements. Pour n’en citer que quelques-unes : les laboratoires pharmaceutiques
SAIDAL, ou encore le groupe SONATRACH, la compagnie d’hydrocarbures.
2008-2012 : L’IE au plus haut niveau de l’Etat
C’est en 2008 que la présidence de la république algérienne a parrainé un colloque
international sur la Gouvernance des institutions et l’Intelligence économique. Ce colloque a
en effet obtenu le parrainage du Président de la République algérienne, Abdelaziz Bouteflika.
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Des travaux et ateliers avaient été organisés avec la participation d’experts internationaux
pour définir les actions globales à mener en termes d’IE.
En septembre 2010, La Direction Générale de l’Intelligence Economique, des Etudes et de la
Prospective du Ministère de l’Industrie, de la Petite et Moyenne Entreprise et de la Promotion
de l’Investissement a lancé le premier Manuel de Formation en intelligence économique en
Algérie. Ce document répond à la volonté de contribuer à l’encadrement des actions de
formation dans un domaine nouveau en Algérie. Cette même direction du ministère a lancé
dernièrement un programme d’accompagnement de 11 entreprises publiques algériennes pour
le développement de l’intelligence économique.
En 2011, et dans le cadre de la première édition du Challenge Francophone VEILLE
organisé par le premier Magazine Français dédié à la Veille « Veille Magazine », le jury a
retenu une candidature algérienne. Il a ainsi primé l’algérien Mohammed Faouzi Boucheloukh
pour Système de Veille, démarche stratégique chez FERTIAL, groupe de production
d’ammoniac et de fertilisants (Algérie).
Au niveau des formations, l’Ecole Nationale Supérieure de Management - ENSM - va
lancer en 2012 un master professionnel sur l’Intelligence Economique avec des experts
nationaux et internationaux.
L’Intelligence Economique en Tunisie : de 2006 à 2012
2006-2009 : Une genèse mais un développement rapide de l’IE
La première agence gouvernementale à s’être intéressée sérieusement à l’Intelligence
Economique fut le centre de promotion des exportations (CEPEX). Le centre a mis en place
en 2008, à travers le Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD), un projet
d’IE afin de répondre au mieux aux besoins des entreprises exportatrices tunisiennes.
C’est en 2008 que la première conférence internationale sur les Systèmes d’Information et
l’Intelligence Economique (SIIE) a été organisée par L’université de Loria et l’Ecole
Supérieure de Commerce Electronique de l’université de la Manouba. La 5ème édition de
SIIE s’est déroulée en février 2012.
Au niveau des entreprises, la Banque de Tunisie avait mis en place un système d’Intelligence
Economique suite à la crise des subprimes.
2010-2012 : Période de professionnalisation
L’Institut Arabe des Chefs d’Entreprise a lancé le Centre Tunisien de Veille et d’Intelligence
Economique (CTVIE). Son objectif est de fournir une information primaire, précise et
prospective aux entreprises tunisiennes. L’Ecole Supérieure de Commerce Electronique
(ESCEM) a introduit un module de Veille dans leur formation initiale.
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L’année 2012 a connu deux évènements majeurs en Intelligence Economique en Tunisie. Le
premier est la création de l’Association Tunisienne d’Intelligence Economique (ATIE). La
nouvelle association s’est fixée pour mission la promotion et la diffusion de l’intelligence
économique et son appropriation par les divers acteurs économiques nationaux, publics et
privés. Au travers de son réseau d’experts, d’universitaires, de décideurs, de hauts
fonctionnaires et de diplomates, l’ATIE compte offrir un espace privilégié de rencontres et de
débats entre acteurs de divers horizons. L’ATIE travaille déjà sur un Schéma Régional
d’Intelligence Economique en Tunisie.
Le deuxième événement est le lancement officiel du Réseau Tunisien d’Intelligence,
d’Analyse, de Veille Economique et Commerciale (RIAVEC). Lancé en Novembre 2008 avec
le soutien du Centre du commerce international de Genève (ITC), ce réseau a été conçu pour
répondre aux objectifs de développement des exportations tunisiennes. Il vise ainsi à renforcer
les capacités nationales afin de mieux s’adapter aux exigences des marchés extérieurs. Il est
composé de Veilleurs experts en poste dans différentes administrations nationales, et la
gestion de ce réseau a été confiée à la Chambre de Commerce et d’Industrie de Tunis (CCIT).
Il y a d’autres initiatives qui ont été lancées en Tunisie soit par l’Etat soit par les
entreprises privées. Pour n’en citer que quelques exemples, il y a l’expérience du Groupe
tunisien CHAKIRA, l’un des plus importants spécialistes mondiaux dans la production de
faisceaux de câbles électriques, et les recherches concédées aux chercheurs et étudiants de
l’Ecole Supérieure du Commerce. Notons aussi la veille réglementaire mise en place par
l’Institut National de la NORmalisation et de la Propriété Industrielle (INNORPI), et le
technopôle de l’agroalimentaire de Bizerte qui est opérationnel depuis 2010 et composé
d’espaces de formation, industriels et de production.
Analyse des approches maghrébines
Plusieurs initiatives ont donc été lancées durant ces dernières années. Certaines avec
une grande réussite et d’autres qui ont connu un échec total suite à une mauvaise évaluation
des besoins.
Ce qu’il faut retenir c’est que chaque pays a finalement choisi une approche différente de
l’autre. En effet le Maroc a fait le choix de la décentralisation en mettant en avant
l’Intelligence Economique Régionale à travers les agences de développement. L’Algérie a
plutôt opté pour une centralisation de l’IE au sein de la Direction Générale de l’Intelligence
Economique du ministère de l’Industrie. Quant à la Tunisie, elle a préféré une veille
collaborative regroupant plusieurs institutions à travers son réseau RIAVEC. Vous vous posez
la question de savoir quelle est la meilleure approche ? Ce serait une grave erreur.
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L’intelligence Economique s’adapte au contexte socio-économique, culturel et politique de
chaque pays. Il n’y a pas d’approche idéale ou de modèle défini. Il n’existe que des
expériences desquelles il faut s’inspirer et s’adapter. L’approche peut aussi évoluer dans le
temps parce qu’un un pays est en constante évolution et sa politique d’Intelligence
Economique aussi.
Il serait par contre très intéressant que le Maroc, l’Algérie et la Tunisie puissent
échanger entre eux pour s’enrichir de l’autre afin d’améliorer la politique d’IE mise en place.
A Veille.ma nous avons toujours souhaité une approche Maghrébine de l’Intelligence
Economique pour permettre un partage et la mise en place d’une force économique en se
regroupant. Par exemple le programme marocain FINCOME pour faire participer la diaspora
marocaine au développement du pays peut être adapté aux besoins de l’Algérie et de la
Tunisie. Autre exemple d’échange : un investisseur étranger malhonnête qui met en place des
affaires douteuses ou ne tient pas ses promesses dans le pays cible, risque de refaire la même
chose dans un autre pays. La mise en place d’un fichier d’investisseurs frauduleux qui peut
être partagé par les pays du Maghreb limiterait les risques. Par ailleurs les marchés
économiques n’ont plus de frontière. Si ces 3 pays regroupent leurs compétences et leurs
capacités, ils pourront prétendre répondre à des marchés auxquels ils ne pouvaient pas accéder
en étant seul. Il existe plusieurs pistes de partage possibles. D’autres pays l’ont déjà compris.
L'intelligence économique au Maroc : innover dans le développement
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Depuis plusieurs années, les décideurs marocains, les chefs d'entreprises, les animateurs
de l'appui économique et les universitaires ses ont progressivement appropriés l'intelligence
économique, comme démarche de maîtrise de l'information stratégique utile au
développement des entreprises, des organisations publiques, mais aussi de projets et de
territoires.
Les experts et les universitaires ont considéré la démarche comme « l'atout-maître» dans
la bataille économique et la gestion des rapports de force internationaux. Les chroniqueurs se
sont émus de la lenteur de la diffusion de la démarche et plus encore de la culture de
l'intelligence économique. Ennovembre2004, les Rencontres internationales de Tétouan
Ont marqué, selon nous, deux grandes évolutions: la décision au plus haut niveau de
l'État de doter le Maroc d'institutions permettant de structurer progressivement une politique
publique d'intelligence économique, à l'échelle nationale et territoriale.
Le passage d'une politique de transcription/imitation des concepts de l'intelligence
économique pratiqués dans les pays du Nord (anglo-saxonsou francophone- France,
Canada, Province du Québec) à une politique d'innovation vers une intelligence économique
et stratégique adaptée à la réalité économique et sociale des pays émergents, mais avant tout
du Maroc.
Ces évolution sont été confirmées à l'occasion d'un colloque sur le thème« Veille
stratégique et compétitivité» organisé par l'association R&D Maroc en mars 2005.
L'importance géostratégique du sujet n'est pas des moindres.
En effet, les luttes d'influence redoublent. La politique d'intelligence économique du
Maroc, sa volonté pour ainsi dire de se doter d'une capacité d'agir « en stratégie et en
influence », devient un enjeu entre l'Europe, plus précisément pour la France et les États-Unis:
USaid a très tôt proposé de financer le projet d'observatoire d'étude de l'intelligence
économique, dont l'inspiration est maroco-française. Notre tentative de dresser ici une
première monographie du dispositif marocain d'intelligence économique nous permettra
d'entrevoir l'originalité ou l'absence d'originalité de la culture de l'intelligence économique au
Maroc. Existe-t-il un modèle marocain (culture, pratique et organisation, objectifs et
politique) ou le modèle se construira-t-il à partir de l'apprentissage ou dans l'imitation d'un
modèle français ou américain ?
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Comme toute nation dotée d'une économie émergente, le Maroc est préoccupé par la
pérennisation de son développement, voire par sa survie, par la préservation de son identité
entre Europe et Afrique et la recherche de nouvelles capacités de puissance économique et
culturelle (accord de libre-échange avec les États-Unis, avec l'Union européenne , avec la
Turquie).
L'offensive commerciale chinoise déstabilise des pans entiers de l'activité économique
marocaine. Elle condamne les décideurs marocains au sursaut prospectif et stratégique.
Aussi, les stratèges marocains conjuguent-ils en permanence la tension entre la nécessaire
interaction avec les dynamiques dès la mondialisation la recherche obsédante du rattrapage
économique et technologique et la conception d'un modèle de développement plus solidaire,
plus coopératif et durable: un autre mode de développement valorisant l'identité et l'histoire
culturelle marocaine comme levier d'influence et « d'avantage compétitif ». Cette réalité rend
d'autant plus nécessaire la construction d'un véritable système de connaissance des enjeux, des
potentiels, des menaces de l'environnement mondialisé permettant d'irriguer les systèmes de
décision des stratèges, d'enrichir leurs visions, de lire le futur, de gérer les rapports de force et
les négociations essentielles, par exemple les accords de libre-échange.
À défaut, chacun ne puits que constater le recul des capacités de développement et la
multiplication des risques de dépendance stratégique dans les secteurs essentiels de
l'économie marocaine.
La captation des cerveaux par les grands réseaux de domination technologique et du
savoir d'économies émergentes ou développées constitue l'un des facteurs préoccupant de
l'affaiblissement des capacités de R&D et de management du Maroc. La perception de
l'intelligence économique par les décideurs illustre cette tension.
M. Rachid Talbi El Alimi, Ancien ministre des Affaires économiques et générales, maire
de Tétouan, ne conçoit pas l'intelligence économique comme un effet de mode, mais bien
comme « un outil de performance économique, un facteur de compétitivité et de consolidation
du rayonnement du Maroc au sein du concert des nations modernes », un outil d'influence.
«La mise en place de dispositifs de surveillance fournissant des informations fiables,
permettant de scruter les concurrents, les opportunités d'affaires, les technologies et les
nouveaux procédés ne cèdent aucunement à un effet de mode, mais correspond bien à un
impératif de premier plan pour les acteurs exposés à la compétition mondiale» . À la question
qu'il pose – comment anticiper, décider les meilleurs choix, adapter les capacités et gagner la
bataille du développement durable?
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- M. Mohammed Mbarki, Ancien wali de Tétouan en 2004, répond que « l'intelligence
économique représente un arsenal pour faire gagner la bataille du développement face ou dans
le nouveau système mondial de domination, une méthode indispensable aux entreprises, aux
gouvernants, aux développeurs ». Il traduit l'intelligence économique dans sa dimension
territoriale et n'hésite pas à parler de l'ardente obligation qui doit animer ces derniers pour
soutenir et porter la compétitivité des territoires, la vraie mesure- selon lui - de la
compétitivité de demain.
Pour Driss Guerraoui, professeur à l'université de Rabat- Agdal, ancien conseiller du
Premier ministre, « le rôle vital» de l'intelligence économique pour un pays émergent, en
l'occurrence pour le Maroc, réside dans les méthodes qu'elle fournit aux entreprises et aux
développeurs pour accéder à la maîtrise de technologies dans une stratégie de recherche de
raccourcis technologiques. Elle contribue à la « promotion du génie national, comme avantage
stratégique» et nourrit le processus de «transformation d'inégalités en égalités de production ».
Un événement essentiel à cet égard est survenu au début de l'année 2006. Il est pourtant
resté sans grand écho. De quoi s'agit-il? De la réunion à Skhirate, près de Rabat, les 27 et 28
janvier 2006, du premier Forum de coopération décentralisée entre le Maroc et la France.
Plutôt que de négocier et conclure des accords et projets de coopération au niveau des
États et de leurs administrations centrales, se sont entendus pour réunir les décideurs et
animateurs qui sur le terrain pilotent des politiques de développement économique, social et
culturel. Ainsi, se sont rencontrés des maires, des présidents d'associations, de collectivités
locales, d'universités, des animateurs de programmes de coopération, issus des deux côtés de
la Méditerranée afin de conclure des accords de coopération. Cette rencontre marque, selon
nous, les débuts d'une approche nouvelle nécessitant de part et d'autre, France et Maroc, une
démarche d'intelligence économique et sociale pour piloter des coopérations dans lesquelles
chacun puise performances économique, technologique et sociale.
Dès 2002, Rachid Benmokhtar, Ancien président de l'université Al Akhawayn d'Ifirane
appelait au changement de paradigme de croissance, pour résoudre l'équation marocaine,
s'agissant d'articuler libéralisation et entrée dans la mondialisation avec réduction de la facture
sociale et technologique:
« Se focaliser sur le rôle dévolu aux organisations qui symbolisent le nouvel ordre
économique (OMC, Banque mondiale, FMI...) ou sur le rôle spécifique des grands ensembles
économiques, Amérique du Nord, Japon, Europe, n'est suffisant ni pour évaluer les risques de
leurs politiques, ni pour appréhender des options nouvelles plus porteuses d'avenir.
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Une réflexion profonde sur la théorie de la croissance économique est indispensable et un
changement radical des paradigmes économiques est nécessaire. Comment réfléchir à une
approche intégrée de l'économie qui associe l'économie, la technologie, le social et
l'environnement. »
Revenons un instant sur la définition de l'intelligence économique, en prenant en compte
cette tension entre compétitivité accrue et développement durable.
Intelligence économique et développement: définition Depuis 1975,il existe une école de
l'intelligence économique
Appliquée aux pays en développement ou émergents. Elle a été développée par Stevan
Dedijer, professeur à l'université de Lund en Suède et se poursuit en France à travers les
travaux de l'AFDIE le réseau du cabinet Sopel International, partenaire des Rencontres
internationales de Tétouan et qui pilote le Forum intelligence économique et
développement(FIED).
Stevan Dedijera très tôt introduit la démarche d'intelligence sociale comme l'approche la
mieux adaptée pour« faire émerger» les systèmes d'intelligence nationaux, voire pour les pays
en voie de développement, les créer. Il définit l'intelligence sociale comme « l'ensemble des
activités d'une société, reliées à l'intelligence, la capacité à s'adapter, répondre à des
circonstances changeantes, afin de réaliser des objectifs de développement décidés ».'
L'intelligence sociale dès lors fournit les outils pour« piloter» en connaissance de cause,
c'est-à-dire en disposant de la connaissance nécessaire à la réalisation des objectifs des
différents systèmes sociaux composant une nation. Stevan Dedijer avait l'habitude d'interpeler
la capacité d'intelligence d'une nationale son «collectif». L'efficacité de l'intelligence sociale,
beaucoup parlent aujourd'hui d'intelligence collective d'un pays, repose sur la taille et le
dynamisme des activités de production et de développement de la connaissance, ainsi que sur
la densité et la qualité de ses réseaux d'information et d'expertise. Le Forum de partenariat
ftanco-marocain sur la coopérationdécentraliséedejanvier2006aparfaitementillustré cette
approche. Il a retenu dans ses conclusions la nécessité de développer une approche
d'intelligence sociale pour piloter plus efficacement les différents projets de coopération « au
service des populations et des territoires ».
En France, l'intelligence économique s'entend à la fois comme une politique publique de
compétitivité industrielle fondée sur la maîtrise de l'information utile et comme une démarche
d'appui à la décision stratégique. Il s'agit alors d'une pratique légale de renseignement
économique, d'organisation et de protection des savoir-faire, d’analyse et d'interprétation de la
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dynamique des marchés et des acteurs par des entreprises ou des organisations, dans une
perspective de déploiement commercial, technologique ou culturel.
L'intelligence économique se présente alors comme la capacité à comprendre et
interpréter en dynamique, de façon permanente et systématique, les enjeux et les« signaux
précoces d'alerte» en provenance de l'environnement de toute organisation ou territoire, pour
un pilotage plus efficient- en connaissance de cause- des stratégies de développement. La
démarche procure un véritable apprentissage de la perception, par l'utilisation de savoir-faire
d'analyse stratégique, de sécurité économique,
De détection des signaux faibles et« avant-coureurs» (mouvement de concurrents, de
donneurs d'ordre clés, risque de dépendance stratégique- compétences, technologies clés -,
mutations industrielles...). Elle sert alors le faible comme le fort, chacun en fonction de la
puissance de son industriel de la connaissance et de la performance du capital social (identité
culturelle, compétences, savoir-faire de gestion de crise, de partage d'information, culture du
réseau et de la confiance...) dans sa stratégie de développement.
L'intelligence économique est hybride: stratégie du court terme, chasse aux mouvements
des concurrents, elle s'articule avec le temps long de l'anticipation et de la prospective
planifier le futur. Les deux temps se complètent. Le temps synchrone de la surveillance
permanente pour détecter et identifier les mouvements stratégiques d'entreprises sur le
territoire ou les mouvements stratégiques de pays ou de territoires concurrents ou partenaires.
Et puis, le temps a synchrone de la planification stratégique à long terme, dont l'objectif
est bien de « partager une vision, créer un ciment», pour structurer en suite l'action. On
imagine
Aisément l'intelligence organisationnelle, dont il faut alors faire preuve, de l'agilité aussi:
créer les organisations d'observation systématiques et de diagnostic permanents des
mouvements perturbants et susceptibles d'influencer les stratégies, tout en construisant un
futur.
Désormais on parle volontiers de véritables systèmes d'intelligence économique, dont les
acteurs et les pilotes construisent les finalités sont déclinables selon plusieurs axes à l'échelle
nationale comme à l'échelle des territoires:
Production de connaissances adaptées aux enjeux de la mondialisation et utiles
aux stratégies individuelles et collectives.
Développement d'organisations mettant en œuvre les capacités collectives
d'analyses sur des cibles stratégiques et définies en concertation entre l'État, les
collectivités territoriales et les entreprises.
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Définition d'une doctrine de sécurité globale pour la protection « offensive »
des secteurs clés essentiels de l'économie.
Élaboration et mise en œuvre de stratégies d'influence par la promotion du
modèle culturel, économique, social national et européen (actions d'influence).
Partant de cette grille de lecture, nous tenterons de cerner le système d'intelligence
économique et sociale marocain. En premier lieu, nous décrypterons les éléments constitutifs
du dispositif d'intelligence économique marocain(les entreprises, l'économie de la
connaissance, la maîtrise des technologies de l'information, les premières formations à
l'intelligence économique, les réseaux de développement et l'influence). Nous identifierons
des freins au développement de l'intelligence économique et plus globalement, nous tenterons
ici de faire apparaître des éléments de la culture stratégique marocaine.
En second lieu, nous nous interrogerons sur les prémices d'une politique publique
d'intelligence économique au Maroc à travers les récentes annonces de décideurs marocains.
Décryptage des éléments constitutifs du dispositif d'intelligence économique au
Maroc
Interrogé sur l'état des lieux de l'intelligence économique au Maroc, le professeur Driss
Alaoui Mdaghri, ancien ministre, décrivait« les efforts disparates» de plusieurs
administrations ou organisations disposant d'« entités de veille » qu'elles n'exploitaient pas
systématiquement. L'un des vecteurs de l'intensification des pratiques passe, selon lui, par
l'usage intensif des technologies de l'information et la « formation urgente et en nombre de
data-miners (experts en logiciels de recherche de données) et de spécialistes de la veille sur
internet». Cette vision très empreinte d'une approche techniciste, par les outils et les
technologies de l'information n'épuise certainement pas le champ de la pratique de la veille
stratégique et de l'intelligence économique, plus riche, et qui se structure progressivement.
Les entreprises marocaines
Le Maroc compte à peine dix mille entreprises industrielles de plus de dix salariés. Le
tissu productif est à plus de 90% composé de PME et de TPE, pourcentage somme toute
classique, retrouvé dans une très large mesure en Europe. Au Maroc, les
PME réalisent plus de 40 % du chiffre d'affaires du secteur industriel et emploient plus de
50% de la main-d’œuvre.
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Les experts marocains voient en elles et leurs réseaux de PME« le support d'une
diversification économique nouvelle » permettant de « répondre à une multitude de marchés
nouveaux ».
Ils voient dans la PME la source de « stratégies nouvelles de croissance et de
développement » pour le Maroc. Elles portent les avantages de l'agilité: «dimension
maîtrisable du capital, autonomie de la décision, possibilité de porter des expérimentations
économiques et sociales, flexibilité de la gestion, capacité d'adaptation avec l'environnement,
faculté d'innovation, facultés d'anticipation et de restructuration à moindres coûts sociaux et
financiers », autant de caractéristiques qui permettent d’envisager un apprentissage aisé des
modes d'organisations et des méthodologies de veille et d'intelligence économique. Il va de
soi que ces derniers ne rempliront leur office de performance qu'à condition que l'esprit
d'entreprise et les environnements administratif, juridique, financier, mais aussi la lutte contre
la corruption améliorent considérablement, au même titre que l'instruction et la formation.
N’oublions pas,
aumomentoùnousnouspenchonssurl'identificationdesavoirfaireenmatièred'intelligence
économique, que le taux d'illettrisme au Maroc reste encore très élevé (50%) L'accroissement
de la réactivité des PME aux changements des marchés et de leur environnement devient
également une condition importante de développement. Les techniques de veille et
d'intelligence économique y participent grandement, et cela aux différents stades de leur
maîtrise. L'Institut marocain de l'information scientifique et technique a effectué ce qui est
peut-être la première enquête destinée à identifier les besoins en information scientifique et
technique et en veille des entreprises de cinq secteurs des industries de transformation. Dans
l'entreprise marocaine, il apparaît clairement que l'apprentissage de l'intelligence économique
passe et passera encore longtemps par la pratique de veille (réglementaire, commerciale,
concurrentielle, technologique) comme c'est le cas en Europe. L'étude élaborée à partir d'un
faible taux de réponses montre cependant que les responsables de PMI ont conscience que
l'information est un déterminant désormais clé pour le développement de l'entreprise et que la
pratique de la veille devient incontournable.
Mais, l'information demeure non structurée et les pratiques de la veille aléatoire, peu
formalisées. Les moyens, l'organisation et les outils font défaut.
Les avancées semblent plus significatives dans les grandes structures, notamment du
secteur bancaire. Le groupe ONA conduit une démarche d'introduction de l'intelligence
économique
15
Dans l'entreprises 'appuyant sur une dynamique de management des compétences ; chez
BaridAl-Maghrib (la poste) la démarche de veille stratégique est pilotée à partir des
orientations du plan stratégique 2003-2008. La Banque marocaine du commerce
Extérieur (BMCE) entend se doter d'un département d'intelligence économique, dont la
vocation est clairement l'analyse des concurrents et l'anticipation des risques. La Caisse des
dépôts marocaine s'est doté d'un institut en charge de la prospective et de la veille. L'ouverture
à la mondialisation pousse les entreprises à la pratique de l'intelligence économique. L'entrée
de la RAM (Royal Air Maroc) dans l'accord Open Sky a déterminé l'engagement de la
direction, confrontée à la concurrence internationale, à organiser un dispositif de veille et
d'analyse. L'enjeu a été clairement défini: passer de l'organisation de la veille orientée vers
l'accès à l'information à l'organisation renforçant la capacité à la traiter en temps réel.
Les experts de la RAM ont défini trois veilles : la veille réglementaire (règles et normes
pour l'exportation des avions, tarifs, échanges, interlignes...), les veilles technologique et
commerciale. Cette dernière se décline en niveaux: les marchés (remontée d'informations des
représentants vers les fonctions pricing) et pilotage au siège: calcul évolution des parts de
marché et de tarifs.
Des dispositifs d'appui et de remise à niveau empreints de l'esprit de veille et
d'intelligence économique
L'un des freins à l'animation économique au Maroc pourrait' bien être la faiblesse des
réseaux d'appui territorialisés au développement, dont on sait aujourd'hui combien ils sont
essentiels pour organiser l'approvisionnement des bassins d'activités et des réseaux
d'entreprises en ressources: informations, veilles, innovation, financement, conseil, transfert
de technologie. Ce sont ces structures, telles que les centres techniques, les chambres de
commerce et d'industrie, les réseaux de diffusion technologiques, qui devront être mis en
capacité d'agir et de se densifier par les institutions telles que les ministères de l'Industrie, de
la Recherche, du Commerce extérieur. Mais, plus précisément encore, l'intelligence
économique nécessaire aux stratégies de développement des PME et des territoires doit être
coproduite par les entreprises,
Les professions, les collectivités locales et les centres de ressources au sein de véritables
clusters à organiser. Le BIPE (Bureau d'information et de prévision économique) définit « les
clusters comme des réseaux d'entreprises et d'institutions proches géographiquement et
interdépendantes, liées par des métiers, des technologies, des savoir-faire communs ».
16
Cela signifie un changement de paradigme, le passage de politiques d'appui
traditionnelles d'allocation de ressources à des politiques basées sur la coproduction des
ressources et notamment de l'intelligence économique.
Deux décisions et la création des organisations qui les ont accompagnées, ont ouvert la
voie vers plus d'efficacité : la création en 2002, de 16 Centres régionaux d'investissement
(CRI) pour l'aide à la création, aux investisseurs et à la promotion des régions auprès des
investisseurs et la création de l'agence nationale pour la promotion de la PME (ANPME). Les
responsables des CRI ont été formés aux techniques de veille et d'intelligence économique
grâce à un module créé au sein de l'institut ISCAE (Institut du commerce et d'administration
des entreprises) et piloté par l'ancien ministre M. Driss Alaoui Mdaghri. L'ANPME, de
création récente (fin 2002), développe des programmes de soutien à la mise à niveau des PME
(17). Les priorités concernant les investissements immatériels illustrent les priorités de
développement des petites entreprises, qui au mieux devront accompagner la mise en place de
stratégie de veille: améliorer le système d'information comptable, renforcer la maîtrise des
coûts, introduire de nouvelles techniques de production basées sur la technologie,
l'innovation, inciter à introduire les technologies de l'information. Dans le cadre d'actions de
soutien aux structures d'appui, l'Agence développe en particulier «des systèmes de veille ».
Elle propose une panoplie complète, De prestations impliquant les experts-consultant privés,
les organisations professionnelles et les réseaux d'appui (diffusion technologique, chambres
de commerce...) : observatoires, Etudes stratégiques de filières (études de potentiel sur la
conserve végétale, le traitement des métaux, l'imprimerie-édition...), études d'opportunité de
création de zones industrielles. Ces services constituent les bases d'un dispositif de diagnostic
et d'intelligence stratégique fort utile à la politique d'intelligence territoriale, dont les contours
furent esquissés lors des Rencontres internationales de Tétouan.
Le savoir-faire des conseillers de l'Agence a-t-il été transmis au CTTH (Centre
technique du textile et de l'habillement) ?
Les documents que ses représentants produisent et présentent en matière de veille et
d'intelligence économique sont d'une grande qualité et attestent de leur maîtrise des concepts,
des enjeux et des méthodes, mais le fossé n'est-il pas encore grand entre cette maîtrise et sa
mise en œuvre dans les indispensables stratégies d'anticipation vis-à-vis des ruptures à l'œuvre
sur les marchés mondiaux du textile, en particulier le désarmement douanier actuel et ses
conséquences concurrentielles.
17
Il convient ici de rappeler l'intérêt que portent les experts marocains au développement
local, au développement endogène, ainsi qu'aux nouvelles dynamiques de compétitivité des
territoires portées par les grappes industrielles et les cluster. En 2001, des économistes
français ont réalisé une étude sur « les conditions de développement des systèmes productifs
localisés au Maroc» et ont validé l'intérêt de cette forme d'organisation pour un pays émergent
comme le Maroc. Nul doute que cette étude et l'investissement quelle a représenté serviront de
base aux créateurs de la politique d'intelligence territoriale qui se profilent au Maroc. Il est
intéressant de constater qu'en Indonésie des expériences de' ce type ont été lancées avec
succès et se poursuivent grâce au professeur Henri Dou de l'université Paul Cézanne à Aixen
Provence.
Au final, se dessinent des briques de savoir-faire et de pratiques non négligeables en
matière de veille et d'intelligence économique au niveau essentiel des organismes
d'intermédiation entre marché et entreprises, entre État et entreprises.
Économie de la connaissance: la production et la diffusion du savoir au coeur du système
d'intelligence économique
À l'occasion des rencontres de Tétouan, le directeur du Centre national de planification de
la recherche scientifique et technique a dressé un état des lieux exhaustif de l'économie du
savoir au Maroc .Nous retiendrons quelques données caractérisant les fondements de
l'économie de la connaissance Marocaine.
La population des personnels scientifiques et techniques est évaluée à environ 17 000 et
se répartit ainsi : 39 % dans les sciences exactes, 28% dans les sciences de l'ingénieur et25 %
dans le secteur des sciences humaines et sociales.
Les établissements publics de recherche se situent dans les secteurs traditionnels (INRA,
agro-alimentaire IPM, Institut Pasteur marocain.. .), mais aussi dans les secteurs de haute
technologie (CRTS: centre royal de télédétection spatial).
Plusieurs des 14 universités marocaines participent aux 17 pôles de compétences
développés sur le territoire, associant en réseau les centres de recherche et les entreprises
(biotechnologies, chimie, technologies de l'information et de la communication (TIC),sciences
de la mer. ..) L'Institut marocain d'informations scientifiques et techniques (IMIST) a vocation
à irriguer ce dispositif de recherche et de développement grâce à son réseau de veille
produisant :
18
Une lettre d'information signalant les opportunités scientifiques et
technologiques nationales et internationales intéressant les acteurs du développement
économique et de la recherche du Maroc.
Un bulletin de l'information technologique (BIT)ou veille collective qui
permet à des groupes de développeurs ayant des préoccupations communes de suivre
les évolutions technologiques et économiques internationales dans leur domaine
d'activité.
Des veilles personnalisées sur demande d'une entreprise privée ou d'un
organisme public.
La grande question et la grande urgence résident dans l'articulation de ce premier
dispositif de veille aux besoins des réseaux de recherche et des entreprises.
Le dispositif de production et de diffusion de connaissance du Maroc, dont nous avons
retenu quelques éléments permet au pays de se classer troisième producteur scientifique en
Afrique, après l'Afrique du Sud et l'Égypte.
Toutefois, le rapport de l'université Al Akhawayn sur les enjeux de l'économie de la
connaissance au Maroc (22) pointe « l'absence de capitalisation du savoir et le manque de
vision à long terme ». Les publications scientifiques annuelles sont jugées peu nombreuses et
le rapport relève que trois quarts d'entre elles sont des publications conjointes, notamment
présentées avec des partenaires français. Le rapport poursuit sur le nombre insuffisant de
chercheurs et la désaffection des filières scientifiques (chutede40%des inscriptions)en faveur
des filières de management et d'économie.
Ces analyses sont corroborées par un rapport de la Banque mondiale sur les systèmes
nationaux d'innovation, qui explique le retard marocain dans le domaine scientifique et
technique par le choix qu'ont fait les décideurs de dessiner une croissance tirée par le marché
et une industrialisation financée par les investissements étrangers. En terme de politique de
rattrapage, aujourd'hui, le rôle structurant que jouent par exemple le CNRST (Centre national
de la recherche scientifique et technique) et l'association R&D Maroc, l'organisme de
promotion de l'innovation, est un atout majeur. Mais, l'intensification de l'appui aux PME des
secteurs clés de l'économie marocaine et le développement de c/uster piloté par des systèmes
de veille et d'intelligence économique constituent la voie centrale vers une capacité
d'innovation et de création de richesses.
19
Freins socioculturels au déploiement de l'intelligence économique
L'analyse du fonctionnement de la société du savoir et de la connaissance au Maroc a
permis d'identifier des freins socioculturels, que nous estimons susceptibles de bloquer la
large diffusion de la culture d'intelligence économique au sein des entreprises comme au sein
de l'administration et des organismes d'appui. Au-delà des facteurs habituellement mis en
avant, telle que la bureaucratie, les analyses font ressortir, en particulier, une difficulté à
appréhender les faits objectifs de situations, un manque d'initiative dans la relation au pouvoir
et à l'autorité qui provoque line relative marginalisation des contre-pouvoirs, un manque de
responsabilité, un déficit de responsabilisation et de prise d'initiatives dans les relations au
travail, une représentation faussée de l’entreprenariat et du succès vécu comme un privilège et
non le résultat d'un investissement, une représentation biaisée du consensus vécu comme une
non-décision, enfin une difficulté à appréhender la gestion des conflits par manque
d'instrument de résolution.
La maîtrise des technologies de l'information
Deux questions sont posées: d'abord celle de la diffusion et de l'appropriation des
technologies de l'information, celle des usages dans un pays émergent en expansion, ensuite
celle de la sécurité des échanges et de la confiance. Les PME marocaines utilisent peu de
technologies de l'information. Le réseau public marocain de télécommunication est numérisé.
Il offre la quasi-totalité des services de base .Mais, les entreprises ne font que peu appel à
ces services qui leur sont spécifiquement destinés. On a noté par ailleurs que les grandes
entreprises utilisent encore des réseaux privés étendus, dont les coûts d'exploitation sont
élevés. Par ailleurs, le taux d'acquisition d'ordinateurs par la population était de 14pour
1000en 2003.
Le gouvernement et notamment Rachid Talbi El Alimi, Ancien ministre des Affaires
économiques et générales, poursuivent une politique d'équipement et d'organisation de la
gouvernance des échanges en ligne : récemment une loi a été promulguée pour organiser la
confiance et régir par exemple le droit de signature électronique.
Paradoxalement, la progression lente de l'appropriation des technologies de l'information
s'accompagne d'un nombre très important d'attaques informatiques contre les sites nationaux,
« Dénotant une grande réactivité aux systèmes de défense et une ingéniosité hors pair de la
part des pirates». Les ingénieurs en sécurité marocains, expatriés aux États-Unis, en France
ou en Allemagne, ont créé un club, le Chaos Computer Club Morocco (CCC) en 2003, afin
d'optimiser la sécurité des sites marocains. « L'extrême vulnérabilité » de l'infrastructure et
des réseaux de l'administration marocaine sont d'origine organisationnelle et technique. Face à
20
cette menace, le Club suggère la création d'un observatoire. Le cybercafé, lieu privilégié de
l'apprentissage et de la pratique d'internet pour les jeunes et une grande partie de la
population, est aussi le siège des pirates informatiques marocains.
Des formations à l'intelligence économique
La diffusion et l'apprentissage des technologies de l'information comme nouveau vecteur
de compétitivité, mais surtout d'accès au savoir est l'objet d'une grande attention dans les
universités marocaines, et des projets avancés, y compris de coopération internationale, voient
le jour.
L'École des sciences de l'information (ESI) dispense des cours sur la veille
informationnelle, qui incluent l'approche de la fonction de veille informationnelle stratégique,
l'étude des comportements informationnels dans les organisations, des stratégies et des
cultures organisationnelles, ainsi que de l'éthique. Le cours resitue bien la veille
informationnelle dans la chaîne de valeur constituée par les documentalistes, de plus en plus
affûtés à la maîtrise des outils de recueil et de traitement d'information sur internet jusqu'au
spécialiste de l'intelligence organisationnelle. L'orientation du cours sur les techniques
d'interprétation (sense making) et de création de connaissance nous apparaît tout à fait
innovant. L'École des sciences de l'information (ESI) a été dès 2000, l'une des toutes
premières organisations d'enseignement à publier des mémoires d'étudiants sur la veille et
aujourd'hui l'intelligence économique. L'École développe par ailleurs un programme' en ligne.
Le programme FORCIIR (Formation continue en information informatisée en réseau), financé
par le ministère des Affaires étrangères français.
L'ancien ministre Driss Alaoui Mdaghri conduit depuis 2004 un projet de coopération
international avec l'Italie. Le projet consiste dans la création au Maroc d'un centre de
compétence lié à l'économie du savoir, en coopération avec e-BMS (e-management Business
School) à l'université de Lecce au sud de l'Italie. Il s'agit de créer un réseau reliant les
institutions des deux rives de la Méditerranée, qui s'intéressent à la formation, la recherche
appliquée et l'incubation d'activité dans le domaine de l'économie du savoir. L'intelligence
économique est la démarche structurante du projet Medi1.net, à la fois pour la création des
réseaux (identification, caractérisation, évaluation des liens, analyse des contextes...), et pour
piloter la stratégie de mise en place des centres de compétence.
Au nord et au sud de la Méditerranée
Une innovation est développée actuellement par le professeur Joseph Chaines et ses
étudiants de 1'ESITH (Ecole supérieure des industries du textile et de l'habillement). Ils ont
21
créé un club de veille dénommé « Compétitive Intelligence Service» qui coproduit un bulletin
de veille informationnelle« Perspectives Textiles », dont l'ambition est d'ouvrir des
perspectives aux entreprises du secteur textile, considéré comme détenteur d'« un fantastique
potentiel d'innovation et de développement pour le Maroc ». Leur conception de l'intelligence
économique se traduit par l'explication qu’il nous donne ici: « Les renseignement au sens
guerrier du terme, s'il ne fait pas gagner la guerre directement sur le champ de bataille, est un
élément majeur de la victoire, car il permet d'anticiper les mouvements de l'adversaire et de
préparer les stratégies gagnantes»
Elle est aussi inspirée par la démarche de prospective technologique qui, selon leur
professeur, doit permettre d'innover en « connaissance de cause », c'est-à-dire à partir de
l'identification des technologies clés que l'industrie textile marocaine doit maîtriser, si elle
veut dépasser la crise actuelle et de l'identification de nouvelles niches technologiques.
La diaspora marocaine: des réseaux d'influence
L'association R&D Maroc inscrit l'intelligence économique au coeur de ses missions en
se donnant pour objectif de créer un lieu opérationnel entre l'association et les chercheurs
National d:'une part, avec les Marocains à l'étranger d'autre part. Il est envisagé la création de
réseaux constitués de clubs de recherche et de développement.
Cette orientation nous apparaît essentielle et constitue l'une des réponses prometteuses
aux faiblesses que nous avons décrites plus haut. Il s'agit de la capacité de la société
marocaine,
Et plus précisément de la communauté universitaire, scientifique et des affaires, à créer
de la valeur grâce aux diasporas. Les réunions annuelles de R&D Maroc sont l'occasion de
rencontrer les membres de ces diasporas. Ainsi en est-il de l'association basée en France et
dénommée Savoir et développement qui constitue un réseau informel d'enseignants et
d'hommes d'affaires de la diaspora marocaine dans ce pays. On y retrouve des enseignants
dans les universités technologiques, ainsi que des dirigeants, souvent jeunes, d'entreprises de
hautes technologies.
C'est dans cet esprit qu'a été créé le FINCOME, le Forum international des compétences
marocaines à l'étranger.
Rencontrant les fondamentaux d'une stratégie d'intelligence économique, le Forum
incarne la stratégie nationale de mobilisation des compétences marocaines résidant à
l'étranger, selon plusieurs objectifs : le soutien à la recherche, au développement et à la
formation, le transfert de technologie et de savoir-faire, l'aide à l'expertise, à l'élaboration de
22
stratégies sectorielles de développement et à l'évaluation des projets et programmes de
recherche, l'attraction de l'investissement et du partenariat d'affaires.
La nouvelle volonté politique : vers une politique publique d'intelligence économique?
L'engagement des pouvoirs publics dans une politique d'intelligence économique se lit
dans la définition progressive d'un corps de doctrine en la matière. Ils semblent pour cela
s'appuyer sur l'université qui joue un rôle moteur et visible, mais aussi sur les réseaux de chefs
d'entreprise plus discrets, plus informels, mais opérationnels à travers la diaspora et les
Associations professionnelles et patronales.
Par ailleurs, plusieurs faits et plusieurs actions engagées illustrent la volonté du
gouvernement et des autorités marocaines de conduire une politique d'intelligence
économique et de se doter des instruments et des organisations qui l'enrichiront.
À bien observer les actions de ces dernières années, on distingue les lignes de force d'une
stratégie à moyen terme, accompagnée des premiers systèmes d'informations et d'intelligence.
Pour élaborer et piloter l'économie marocaine, confrontée à l'accélération des cycles de la
concurrence et de l'innovation, et pour entrer de façon plus offensive dans la mondialisation,
l'Etat, pour l'ensemble des acteurs du développement économique, a entamé des actions
essentielles pour structurer une politique d'intelligence économique. Il s'agit de:
déterminer le périmètre des actifs industriels clés à défendre et à promouvoir.
Le plan Hassan II pour le développement économique et social définit des secteurs
traditionnels (cuir, textile), mais aussi des secteurs de pointe (électronique, mécanique
de précision) et innovants (préservation de l'environnement) ; plus récemment, le
programme « Émergence» définit la stratégie de développement des nouveaux métiers
mondiaux du Maroc. L'objet du programme est de déterminer des filières industrielles
stratégiques (textile/cuir, agroalimentaire et automobile) permettant de faire du Maroc
une plateforme de production et d'exportation privilégiée dans la région du bassin
méditerranéen;
suivre les marchés émergents pour évaluer l'évolution des Performances
marocaines. L'observatoire de la compétitivité internationale de l'économie marocaine
évalue le potentiel compétitif du Maroc en comparaison avec des pays émergents ou
de même niveau de développement. Mettre en place, au sein du ministère de
l'Industrie, un système d'information, comprenant un dispositif statistique et d'analyse
économique, un réseau national d'information industrielle, ainsi qu'une documentation.
Deux innovations dans le dispositif d'intelligence économique en émergence
23
Les briques que nous venons de présenter sont les prémices d'un système « d'intelligence
permanente », permettant de suivre en temps réelles tendances de marché, les tendances
technologiques et les risques de rupture (modification des structures de marché, changement
de paradigmes d'organisation, sciences et techniques, financement),afin de mieux décider les
orientations des politiques.
Par ailleurs, l'organisation marocaine se densifie. Deux innovations paraissent
fondamentales pour le futur : celle liée au nouveau dispositif institutionnel de gouvernance de
la politique publique d'intelligence économique et celle de la naissance d'une doctrine
d'intelligence territoriale.
Les annonces faites à Tétouan en novembre 2004 sont un signal fort. Pour Driss
Guerraoui, conseiller du Premier ministre, la création d'une cellule d'analyse et de réflexion
stratégique devrait apporter l'instance d'orientation nécessaire au dispositif En construction.
On imagine aisément son efficacité dans l'appui à la stratégie d’attractivité du Maroc. La
réactivité des décideurs marocainsaétésansfaille.En2006,le Centre de veille stratégique est
opérationnel. Rattaché à la Primature, le CVS est intégré à la direction des Investissements
extérieurs. L'équipe est animée par M. Saad Salhi, fondateur du Centre avec M. Karim
Benjelloun.
Elle comporte une dizaine dejeunes diplômés de haut niveau chargés de la veille et de
l'analyse. Leur mission principale est de fournir des informations pertinentes au gouvernement
pour améliorer la compétitivité des exportations marocaines et l'attractivité du Maroc (IDE).
Pour y parvenir, ils observent l'évolution des IDE dans le monde en les rapportant à
l'environnement et à la situation du Maroc. Ils se focalisent sur des secteurs et des pays cibles,
mais aussi sur des activités niches. Le CVS assure également un suivi de l'activité des
entreprises internationales déjà installées au Maroc. Il produit de l'information pour les
entreprises marocaines via un portail et diffuse des méthodologies de veille au sein de
l'entreprise.
À moyen terme, il est prévu que le CVS accompagne les entreprises dans leur processus
décisionnel par la fourniture d'outils de veille liés à la prise de décision.
Mohammed Mbarki, Ancien Wali deTétouanen2004,en annonçant la création d'un
observatoire d'étude et de recherche sur l'intelligence économique basé à Tétouan, a désigné
l'organisme qui devrait être le garant du développement d'une conception marocaine de la
démarche, en intégrant en particulier, la richesse du socle culturel marocain, comme avantage
culturel et de fait concurrentiel. À ce propos, Mohammed Mbarki rappelle la richesse que
24
constitue la rencontre au Maroc, des cultures arabo-musulmanes, latino-andalouse, africaines
et françaises.
Cette première innovation n'est pas seulement organisationnelle, elle réside aussi dans la
formulation d'une doctrine élaborée de l'intelligence économique.
L'intelligence économique apporte une forme de « gouvernance nouvelle », articulant
compétitivité, développement culturel et social et sécurité économique, c'est-à-dire «prenant
en compte la sécurité des citoyens, des entreprises, des informations, des institutions ».
Ce projet devrait être placé au rang de priorité, afin de permettre au Maroc de disposer
d'un think tank sur le sujet, susceptible de lui donner une « avance stratégique » dans
l'organisation de l'espace économique, social et culturel méditerranéen.
La seconde innovation de l'approche marocaine réside dans la volonté de mettre en place
une politique d'intelligence territoriale. Son objet est simple: il s'agit d'organiser à l'échelle des
territoires, des bassins d'activités, la capacité collective à bâtir les dynamiques de
développement:
Identifier les savoir-faire, les expertises, coordonner les actions, organiser les réseaux de
recueil de connaissances nouvelles pour mieux servir les stratégies innovantes.
La première ou l'une des toutes premières formulations de l'intelligence territoriale
appliquée à un territoire au Maroc a été proposée par Mohamed Assouali, Ancien vice
président de la commune urbaine de Tétouan, le 26 novembre 2004:
« L'intelligence économique permet au territoire et aux organisations d'agir efficacement
sur l'environnement, d'anticiper les grandes tendances et opportunités, d'alerter sur les
menaces de perte d'attractivité, de compétitivité ou d'information. »
L'observatoire dont nous avons parlé précédemment devra prendre en compte, voire
redynamiser le projet de mise en place, par le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la
mise à niveau d'un réseau de veille industrielle sur l'ensemble du territoire, suite au séminaire
d'initiation qui s'est tenu en mai 2004 à Rabat. Une opération pilote d'évaluation est en train
de se mettre en place sur un secteur d'activité avant sa généralisation.
Pour apporter plus de gouvernance et comme pour marquer l'entrée du Maroc dans le
club des pays innovants en matière de veille et d'intelligence économique, le Ministère de
l'Industrie et l'association R&D Maroc ont élaboré un avant-projet de «norme
Pour la veille stratégique en matière d'industrie et de commerce» dont l'intérêt sera de
définir un corpus terminologique pour le Maroc, incluant l'intelligence économique et surtout
d'organiser le marché et la qualité des prestations de veille stratégique.
25
Nous avons tenté de décrypter les briques constitutives de la culture d'intelligence
économique marocaine, car, que cela soit entendu, chaque pays qu'il soit émergent ou
développé, possède une intelligence économique, composée de savoir faire tacites ou formels
de gestion de crise, de pratique du réseau par la solidarité, d'esprit de vigilance et de veille, de
mutualisation, de partage de connaissance et d'information.
Il s'agissait dans notre approche de recomposer cette « intelligence », cette capacité à
connaître l'environnement,
à gérer les rapports de force, à ruser dans la relation du faible au fort. Il s'agissait de
commencer à lire les ingrédients de « cette capacité d'intelligence» et d'identifier ses freins et
ses originalités pour contribuer humblement à éclairer le chemin d'une nouvelle efficacité,
d'un autre mode de développement entre hyper-concurrence et coopération durable.
Car, l'intelligence économique, par l'état d'esprit et le mode d'action qu'elle porte s'impose
dans le champ des instruments porteurs d'innovation en matière de gouvernance des politiques
Publiques comme de stratégies d'entreprise. Ouvrir les horizons, délier les crispations
stratégiques des décideurs, bousculer les rites décisionnels établis, mais surtout tenter
d'associer le plus grand nombre à la résolution de l'équation suivante pour avancer sur la route
obsédante du développement:
« La connaissance des problèmes clés du monde doit être tentée sous peine d'infirmité
cognitive: comment acquérir l'accès aux informations sur le monde et comment acquérir la
possibilité de les articuler, de les organiser? Comment percevoir et concevoir le Contexte, le
Global, le Multidimensionnel, le Complexe? »
Ainsi dans ce cheminement plein d'urgence, le Maroc doit il comme chaque nation fonder
et nourrir une communauté d'intelligence économique pour répondre aux défis qui lui sont
propres. Et si la France qui vient d'organiser la première rencontre France Amérique sur
l'intelligence économique est pionnière en la matière, elle ne possède qu'un privilège: celui de
pouvoir analyser ses erreurs et ses aveuglements, avant d'autres et le partager avec eux pour
mieux coopérer.
26
Les acteurs de l’Intelligence Economique au Maroc
LES ORGANISMES PUBLICS
Le Centre National pour la Recherche Scientifique et Technique
Il a été crée dans les années 1960-1970, sous la direction du Centre
National de Coordination et de Planification de la Recherche
Scientifique et Technique (CNCPRST).
Ses objectifs du CNRST sont de :
« • mettre en oeuvre des programmes de recherche et de développement
technologique dans le cadre des choix et priorités fixés par l’autorité
gouvernementale de tutelle ;
• contribuer à la diffusion de l’information scientifique et technique, et à
la publication de travaux de recherche et d’assurer des travaux de veille
technologique ;
• apporter son concours au renforcement de l’infrastructure nationale de
recherche ;
• effectuer des prestations de services au profit des opérateurs de
recherche et de contribuer à la valorisation et au transfert des résultats
de recherche ;
• établir des conventions ou contrats d’association, dans le cadre des
activités de recherche ou des services, avec les établissements et
organismes de recherche publics ou privés ;
• créer des synergies entre les différentes équipes de recherche qui
travaillent sur des thématiques prioritaires (réseaux, pôles de
compétence) ;
• procéder à l’évaluation et d’assurer le suivi de toutes les activités de
recherche ou de services dans lesquelles il est impliqué. » [Source : site
internet du CNRST]
27
L’Institut Marocain d’Informations Scientifiques et
Techniques
Crée en 2003, sous la tutelle du CNRST et constitue son opérateur de
recherche, il a pour objectif de mettre à disposition des différents acteurs
du tissu économique national les informations scientifiques et techniques
présentes. Il a également un rôle d’accompagnement et de soutien des
différents usagers de tous les secteurs économiques. Enfin, il établit des
recherches afin de s’adapter continuellement à la forte compétitivité
internationale et dans le but de mettre à niveau le tissu économique
marocain.
Le Ministère de l’Industrie du Commerce et de la Mise à
Niveau
Le Centre de Veille Stratégique
Sous l’initiative du gouvernement et institué auprès des
services du Premier Ministre, le Centre de Veille
Stratégique a été crée afin de s’inscrire dans la stratégie
nationale d’intelligence économique. Il a pour mission
d’observer les mouvements de capitaux découlant des
investissements directs étrangers (IDE) à travers le monde
et en rapport avec le Maroc.
L’Institut Royal d’Etudes Stratégiques
La création de l’IRES fut une initiative pour le développement de
l’Intelligence Stratégique au Maroc prise après un bilan des 50 dernières
années pour une exploration de l’avenir.
28
Son objectif est de faire de la veille stratégique sur des questions confiées
par le Chef de l’Etat afin d’éclairer les choix stratégiques (expertises,
analyses stratégiques…).
Schéma des différentes fonctions de l'IRES
L’Association Marocaine d’Intelligence Economique
« L’Association marocaine d’intelligence économique (AMIE) a été créée
en novembre 2006 par des acteurs appartenant au secteur privé, à
l’administration et au monde de la recherche.
L’AMIE se fixe comme objectif d’être un cercle de réflexion et un levier
d’impulsion à la disposition de toutes les organisations (entreprises,
administrations et associations professionnelles…) pour les informer, les
accompagner et les assister en matière d’intelligence économique et […]
de fédérer les efforts des acteurs et des structures d’intelligence
économique au Maroc. Enfin, l’AMIE vise le développement et la
promotion des formations en intelligence économique au Maroc. »
L’Association R&D au Maroc
Créée le 12 mars 1997, elle a été reconnue d’utilité publique le 12 avril
2001.
Membres : entreprises publiques et privées, organismes publics,
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départements ministériels en charge de la gestion de l’innovation et de la
recherche.
Elle contribue à la promotion de l’innovation et la R&D au niveau
national.
L’Association pour les progrès des dirigeants
L’APD a pour mission de réunir les dirigeants marocains
lors de séminaires et de formations, afin qu’ils acquièrent
les savoirs faire présentés par des experts et autres
dirigeants. L’objectif est de mettre au même niveau que les
autres pays les dirigeants marocains.
LA PRESSE
L’Economiste
Mohammed Benabid, journaliste à l’Economiste, publie
régulièrement des articles sur l’Intelligence Economique au
Maroc.
LES PORTAILS
Veille.ma
c’est le premier portail marocain qui traite de la Veille et de
l’IE. Il a été lancé par Mounir Rochdi et Siham Harroussi.
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Conclusion :
Avec l’émergence de la société de la connaissance et de l’information, nous sommes de
plus en plus amenés à réfléchir sur une nouvelle politique de développement régional
susceptible de rendre nos territoires « intelligents ».
La volonté du Maroc de se doter d’une stratégie de développement territoriale, à travers
son plan de régionalisation avancée, doit être accompagnée par une déclinaison territoriale de
l’intelligence économique. Chaque région doit bénéficier d’un processus d’intelligence
territoriale pour évaluer ses atouts économiques, sociaux et culturels. Cela nécessite de
mobiliser l’ensemble des acteurs (public, privé, société civile) autour d’un projet de veille
stratégique pour interpréter la complexité de l’environnement de la région et ses dynamiques
afin de mettre en place ensuite une stratégie de sécurité et d’influence (protéger et
promouvoir).
Les objectifs d’une politique d’intelligence territoriale sont comme suit :
Accroitre l’attractivité des régions
Doter le territoire d’un instrument d’anticipation
Développer des projets créateurs de richesses et d’emploi
Mobiliser et mutualiser les compétences et développer une culture de projet et de
réseau.
Pour mener à bien cette politique territoriale, l’Etat doit être vigilant sur plusieurs enjeux.
Nous en citons quelques uns :
Définir une stratégie de développement économique et technologique de la région en
s’appuyant sur les pôles de compétitivité.
Mettre en place une coopération interrégionale pour favoriser le regroupement des
acteurs autours de projets stratégiques communs.
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Créer une dynamique sociale en intégrant les acteurs de la société civile dans la
définition du projet de développement.
Doter les territoires des moyens d’innovation, d’anticipation et d’influence au service
du rayonnement international des régions.
La mise en place d’une démarche d’intelligence territoriale peut susciter des réticences de
la part des acteurs locaux. C’est pour cela qu’il faut avoir l’adhésion de tous les acteurs du
territoire. L’adoption d’une nouvelle gouvernance signifie pour certains acteurs, une perte
partielle du pouvoir d’où la nécessité d’une action de sensibilisation autour des enjeux de
cette nouvelle politique ainsi que l’effet de levier qui en résulte.
Face à cette mutation, la politique de développement marocaine doit opter pour la
construction d’ensembles régionaux à la fois autonomes et complémentaires aussi bien sur le
plan économique que politique. L’objectif étant de mobiliser toutes les énergies et les forces
pour mettre en valeur la spécificité des réalités locales ainsi que la richesse de l’ensemble des
territoires marocains.
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Webographie
Intelligence économique et veille stratégique - Défis et stratégies pour les économies
émergentes
http://www.decitre.fr/livres/Intelligence-economique-et-veille-strategique.aspx/
9782747590969
L’association R&D Maroc
http://www.rdmaroc.com/
Conférence "Veille stratégique et compétitivité"
http://www.leconomiste.com/article/veille-strategique-et-competitivite-en-colloque
Association Marocaine d’Intelligence Economique (AMIE)
http://www.amie.net.ma/
Institut Marocain de l’Information Scientifique et Technique (IMIST)
http://www.imist.ma/
Forum international des compétences marocaines à l’étranger (FINCOME)
http://www.fincome.cnrst.ma/
Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES)
http://www.ires.ma/
Ecole des Sciences de l’Information (ESI)
http://www.esi.ac.ma/
Banque Marocaine du Commerce Extérieur (BMCE Bank)
http://www.bmcek.co.ma
Portail Maraacid du Centre National de Documentation (CND)
http://www.cnd.hcp.ma/Portail-de-Veille-du-CND-Maraacid_a21.html
Comité de Veille Stratégique
http://www.leconomiste.com/article/comite-de-veille-strategiquebrle-bilan-comptable-
du-plan-de-soutien
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