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Impact de l'Initiative sur la disponibilité et l'accessibilité des médicaments 115
Chapitre 3.1
L'impact de l'Initiative sur la disponibilitéet l'accessibilité des médicaments
Anne JUILLET, Claude MALAVAL, Jean-Paul MOATTI
Introduction
Rendre largement accessible les traitements liés au VIH à tous les
niveaux du système de santé dans les pays en développement de la
phase pilote, tel était l'objectif de départ de l'Initiative Onusida. Cet ob
jectif général impliquait de ne pas se limiter à la seule distribution de
médicaments antirétroviraux dans un certain nombre de centres accré
dités mais d'améliorer l'ensemble du circuit des médicaments destinés
aux personnes infectées par le VIH en y incluant l'accès aux médica
ments essentiels dans les formations sanitaires de premier échelon et à
ceux contre les infections opportunistes dans Jes centres de suivi.
Afin d'évaluer l'impact de l'Jnitiative sur le circuit du médicament,
nous nous sommes efforcés d'apporter des éléments de réponse sur les
points suivants. Quel a été l'impact effectif de l'Initiative sur la disponi
bilité, l'accessibilité et l'utilisation rationnelle des médicaments destinés
au traitement du VJH ? Quelles ont été les modifications introduites dans
l'approvisionnement et la distribution des médicaments? Quelles ont
été les évolutions des volumes de ventes et des prix?
Matériel et méthodes
L'objectifde l'Initiative d'améliorer le circuit du médicament contre
le VIH/sida intervenait dans un contexte où la Pharmacie de santé publi
que (PSP), grossiste-distributeur public, s'efforçait. depuis le début des
années 1990, de mieux remplir ses missions et d'améliorer globalement la
~116 L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
situation du secteur public de santé en matière de médicaments essentiels
pour l'ensemble des pathologies. Nous avons donc cherché à situer les
évolutions constatées depuis la mise en place de l'Initiative par ra pport
aux tendances antérieures. Dans cette optique, nous avons souhaité com
parer cette évolution à celle d'une catégorie de médicaments indépen
dants des traitemen ts contre le sida et contre les infections opportunistes:
les anti-hypertenseurs. Cette catégorie de médicaments a joué le rôle de
« groupe témoin» puisqu'elle n'avait a priori pas été influencée par la mise
en place de l'Initiative, ni par l'épidémie de VIH.
Par l'étude du circuit du médicament en général, des antirétrovi
raux (ARV) et d'un certain nombre d'autres médicaments destinés no
tamment aux traitements des infections opportunistes (MOP), nous
avions donc pour objectif non seulement de déterminer les éventuelles
modifications du circuit d'approvisionnement et de distribution de ces
différentes catégories de médicaments, mais aussi et surtout de mettre
en évidence l'évolution des volumes et des prix de vente de ces diffé
rentes catégories, depuis 1996.
Afin de mieux décrire l'évolution au cours du temps des prL'X. des
ARV, nous avons choisi d'analyser, d'une part, les prix des médicaments
disponibles sur le marché ivoirien en 1996, et d'autre part ceux qui n'ont
été introduits qu'à partir de 1997. Cette distinction devait permettre de
noter les différences d'évolution des prix des inhibiteurs nucléosidiques
de la transcriptase inverse et ceux des inhibiteurs de protéase qui n'ont été
in troduits qu'à partir de 1997 (tableau 3). Quant au premier inhibiteur non
nucléosidique, son introduction en Côte d'Ivoire date de l'année 2000.
L'analyse des trois catégories de médicaments détaillées dans le
tableau 3 a été réalisée aux différents niveaux du circuit d'approvision
nement et de distribution qui peut être décrit selon l'organigramme de
la figure 2 (p. 118).
Le rôle des différents acteurs intervenant dans le circuit du mé
dicament a également été analysé. Toutefois, du fait de la faiblesse de la
part de marché privé dans le total des ventes d'antirétroviraux (ARV) en
Côte d'Ivoire, nous n'avons pas tenu compte dans notre analyse des deux
grossistes-distributeurs privés d'ARV coexistant sur Je marché ivoirien
Impact de l'Initiative sur la disponibilité et l'accessibilité des médicaments 117
avec la PSP (Copharmed qui a arrêté la distribution d'ARV en 1998 et
Laborex qui n'a jamais vendu plus de 400 boîtes par mois).
Débutée en décembre 1999, cette étude s'est poursuivie jusqu'au
mois de septembre 2000.
Tableau 3
Médicaments étudiés par catégorie
Catégorie Dénomination
ARV
Annéed'introductionsur le marché
AZT 100 mgAZT 250 mgAZT 10 mg/ml (enfant)AZT 300 mgddl 50 mgddl \00 mg
Inhibiteurs ddI 25 mg (enfant)nucléosidiques ddl 2 g/1 00 ml (enfant)
de la transcriptase ddl 4 g/200 ml (enfant)inverse d4T 30 mg
d4T 40 mgd4T 1 mg/ml (enfant)ddC 0,375 mg3TC 150mg3TC 10 mg/ml (enfant)Combivir (AZT/3TC)
Avant 1996199819992000
Avant 1996Avant 1996
1999199919991997199719991997199819991999
Inhibiteur nonnucléosidique
Inhibiteursde protéase
Efavirenz 200 mg
Saquinavir 200 mgIndinavir 400 mgIndinavir 200 mg (enfant)Nelfinavir 250 mgRitonavir 80 mg/ml (enfant)Ritonavir 100 mg
2000
199719971998199919992000
Médicaments pour les infections opportunistes (MOP)
Érythromicine 250 mgÉrythromicine 500 mgNystatine 0,5 MUNystatineO,1 MUTriméthoprime + sulfaméthoxazole80/400
Avant 1996Avant 1996Avant 1996Avant 1996Avant 1996
~118 L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
Tableau 3 (suite)
Médicaments pour les infections opportunistes (suite)
Triméthoprime + sulfaméthoxazole160/800Triméthoprime + sulfaméthoxazole40/200Amphotéricine B50 mgPéfloxacÎne 400 mg oralPéfloxacine 400 mg inj.Ciprofloxacine 250 mgCiprofloxacine 200 mg inj.Ciprofloxacine 500 mg
Anti-hypertensel1rs
Acébutolol400 mg ou Bétaxolol20 mgCaptopril25 mg ou Enalapril5 mgDihydralazine 25mgMéthyldopa 250 mgFurosémide 20 mgFurosémide 40 mgFurosémide 250 mgHydrochlorothiazide 25 mgSpironolactone 50 mg
Avantl996
Avant 1996
Avantl996Avant 1996Avant 1996Avant J996
19971999
Avant 1996Avant 1996Avant 1996Avant J996Avant 1996Avant J996Avantl996Avant 1996Avant 1996
Source: Évaluation de J'Initiative Onusida, Abidjan, 2000.
Figure 2
Organigramme du circuit du médicament en Côte d'Ivoireavant l'Initiative Onusida
Dans toutes les structures étudiées, l'objectif était de déterminer
et d'étudier:
-les différents clients, classés selon qu'ils appartenaient au secteur
public (PSP, centres hospitaliers), au secteur privé (cliniques, grossistes,
Impact de l'Initiative sur la disponibilité et l'accessibilrté des médicaments 119
officines), ou selon qu'il s'agissait de centres de l'Initiative (accrédités et
de suivi) ou de centres hors Initiative;
- pour chaque client, l'évolution de ses commandes;
- pour chaque client, les types de médicaments vendus sous forme
de spécialités ou de génériques;
- pour chaque client, l'évolution des volumes de vente selon le
type de médicaments;
- l'évolution des prix de vente des médicaments entre les four
nisseurs et leurs clients.
Au deuxième niveau du circuit (PSP1, nous avons également étu
dié la gestion des stocks de médicaments, les éventuelles ruptures d'ap
provisionnement, et notamment la gestion et l'approvisionnement des
tinés aux structures sanitaires faisant partie de l'Initiative Onusida.
Résultats
Le circuit d'approvisionnement et de distribution des ARV
Initialement, conformément au schéma élaboré au plan interna
tional par Onusida (voir chapitre 1), l'Initiative prévoyait de modifier le
circuit d'approvisionnement des ARV (fi9ureJ1. 1\ s'agissait d'établir une
Figure 3
Schéma initialement prévu par l'Initiative pour l'approvisionnementenARV
ill1R?) 120 L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
structure à but non lucratif « pour assurer la coordination des transac
tions financières sans compromettre la compétition internationale et
J'ouverture aux règles du marché ». Toutes les firmes pharmaceutiques
intéressées par l'Initiative étaient alors invitées à co-financer cette struc
ture. En Côte d'Ivoire, cette structure intermédiaire, Medical Acœss, a été
mise en place en aoüt 1998.
Figure 4
Évolution des fournisseurs d'ARV de la Phannacie de santé publique(t 996-1999)
fournisseurs 96 fournisseurs 971 Ofo 20/0
• Apotex inc.
fournisseurs 98
DBMS • Apotex inc.• Merck
fournisseurs 99
DBMSRod1e
..'. 1'. . ...
DflMS• VCF inc.
o Medical Access.Glaxo W
12 ~o
o BMS • Merck .. Rocheo Medical Access • Glaxo W
Face aux rapides mouvements d'entrée et de sortie des laboratoi
res pharmaceutiques sur le marché ivoirien au début de la période étu-
Impact de l'InITiative sur la disponibilité et l'accessibilité des médicaments 121
diée (} 996-1997), Medical Access a effectivement joué un rôle important la
première année de l'Initiative (998) (figure 4). Mais très rapidement, les
problèmes de gestion et les dysfonctionnements l'ont empêché de se
maintenir sur le marché et l'ont fait disparaître du circuit d'approvision
nement en ARV dès la seconde année (999).
Alors qu'en 1996, on ne pouvait compter que deux fournisseurs
d'ARV, en 1999, on retrouve les principaux laboratoires pharmaceuti
ques producteurs d'AR\!. En définitive, c'est bien la Pharmacie de santé
publique (PSP), structure publique chargée de l'approvisionnement et de
la distribution du médicament dans le secteur public, qui a joué le rôle
de structure à but non lucratif assurant le contrôle du circuit d'appro
visionnement et de distribution des ARV 1 pour l'ensemble des structures
sanitaires (publiques et privées) du pays. La figure 5 illustre la situation
qui prévaut de fait depuis 2000.
Figure 5Circuit actuel de distribution des ARV en Côte d'Ivoire (2000-2001)
Grossistes privés
Centres de santéAutres cliniques
Cliniques privées f-------1accréd itées
Cette évolution s'est accompagnée d'une rationalisation significa
tive du circuit de distribution qui doit clairement être mise au crédit de
J'Initiative. Alors qu'avant le lancement de celle-ci, la PSP distribuait des
médicaments antirétroviraux à une multitude de centres 1, depuis 1999,
les ARV ne sont quasiment plus distribués que dans huit centres
1 la PSP revend sans aucune mMge les ARV qu'elle achète par appel d'offres en début
d'année au;'( centres accrédités par l'Initiative Onusida.
, Au cours des douze mois qui ont précédé le lancement effeclir de l'Initiative, environ 50 0/0
~122 L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
accrédités 3, comprenant d'ailJeurs une clinique d'Abidjan, principale
structure de prescription d'ARV dans le secteur sanitaire privé (Cirba).
Figure 6
CJients de Ja PSP pour les ARV entre 1996 et 1999
Clients 973 % 0.4 0/0
CNTS .CHU• Clinique la Madone. PSP infinnerieo Hospital gallakota D PISAME
Clients 98
DeNTS• PSP infirmerieo FPTS • Cirba
J9%
24 %
1.6%DCHU• HôpitalLx gallxD Client occas
DCNTSDFPTSDCAT• Mal/infTreimviUe
• PSP infirmerie.Cirba.8Cc/PNlSDUSAC
DCNTSDCATDUSAC• CIE Treichville
• Cirba• MallinfTreichvilleD Pédiatrie Yopougon• Hôpital militaire
Abrdjan
des ARV étaient distribués à des centres qui n'ont pas été retenus par la suite dans le pro
cessus d'accréditation mis en place dans le cadre de l'Initiative.
, CAT d'Adjamé, (jrba, CNTS, Hôpital militaire, Service de pédiatrie du CHU de Yopougon,
Service des maladies infectieuses du CHU de Treichvil.le, USAC. Ces sept centres accrédités
représentent 98 010 des ventes d'ARV de la PSP en 1999. Le huitième centre accrédité de
l'Initiative, PPH Cocody, est entré en fonction pour la distribution des ARV en 2000.
Impact de l'Initiative sur la disponibilité et l'accessibilité des médicaments 123
Évolutions des volumes de ventes
Hormis un pic de ventes d'ARV enregistré en décembre 1997 suite
à la forte médiatisation de l'annonce initiale de l'Initiative lors de la
xe Conférence internationale sur le sida en Afrique (Cisma) qui s'est dé
roulée à Abidjan, les ventes mensuelles d'ARV étaient demeurées très
limitées avant le démarrage effectif de l'Initiative en août 1998 (figure 7).
Ce démarrage effectif a logiquement correspondu à un changement si
gnificatif des tendances et une augmentation régulière des volumes de
ventes d'ARV dans le pays. On note également sur la figure 7 que l'aug
mentation de la part des inhibiteurs de protéase dans le total du volume
des ARV a été concomitante, à partir de la fin de l'année 1999, de la mise
en place du système de subventions publiques des trithérapies dans le
cadre de l'Initiative.
Figure 7
Évolution des ventes d'ARV en Côte d'Ivoire
Juillet 97 .Atelier deconsensusnational
160 000-r;:======:::;-----------------;~==~=::;l• Total inhibiteurs Nov. 99 .
Changementde protéase subvention
o Total inhibiteursnucléosidi ues
140000
'"'1! 600002::JC 40000Q)
20000
'c 120000.915.'': 100000~~0. 80000Q)
-0
o+---""-'T-.........-+----="-r-'--.y.--'~-.L.Li=--,---l.__-_._-.,._-__.___=ijanv, mai sept. janv. mai sept. janv mai sept. janv. mai sept.I~J~ 1~lm lm lm 1~ I~ I~ 1~1~1~
* Comprimés, gélules, doses de sirop.
Des données recueillies directement auprès de centres accrédités
de l'Initiative confirment que des problèmes de fond entre la PSP, le
ministère de la Santé et ces centres ont malheureusement abouti à des
~124 L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
épisodes de rupture en approvisionnement des médicaments ARV (voir
chapitre n Précisons que ces problèmes n'ont pas affecté le taux d'in
corporation des patients mis sous ARV dans le cadre de l'Initiative, mais
qu'ils n'ont donné lieu à aucune recommandation ni aux patients ni aux
cliniciens qui devaient faire face aux ruptures 4.
l'évolution du volume des ventes est à rapprocher des efforts fi
nanciers croissants effectués par les pouvoirs publics ivoiriens (en dépit
des difficultés soulignées au chapitre]) pour le soutien à l'accès aux
médicaments antirétroviraux. le budget consacré à cet objectif est passé
de 600 millions de FCFA en 1998 à 738 millions en 1999, puis à 1 milliard
en 2000 et qu'il a été reporté pour l'exercice 2001. A cela, il faut ajouter
les financements apportés par le F5TI, s'élevant à environ 250 millions
de FCFA sur deux années (] 999-200]) pour le soutien à l'Initiative Onu
sida, et à 750 millions de FCFA pour le soutien à la prévention de la
transmission mère-enfant incluant notamment la prescription d'AZT aux
femmes enceintes.
la figure 8 indique cependant qu'au cours de la même période, les
volumes de ventes des anti-hypertenseurs ont également augmenté ré
gulièrement, suggérant une amélioration générale de l'accessibilité aux
médicaments dans le pays.
la figure 8 met également en évidence une augmentation très si
gnificative du volume total des ventes pour les médicaments des infec
tions opportunistes (MOP), Entre 1996 et 1999, le volume de vente pour
cette catégorie de médicament a plus que doublé. Précisons toutefois,
que cette tendance a débuté depuis le début de cette période, soit avant
le lancement effectif de l'Initiative.
Évolution des prix
C'est en lançant des appels d'offres sur le marché interna
tional que la Pharmacie de santé publique procède pour acheter les
4 Dans certains cas. des combinaisons et des dosages sous-optimaux ont été prescrits plutôt
que de stopper momentanément les traitements, ce qui aurait réduit les risques de résis
tance.
Impact de l'Initiative sur la disponibilité et l'accessibilité des médicaments 125
Figure 8
Évolution comparée des ventes de médicaments anti-hypertenseurs,ARV et pour le traitement des infections opportunistes par la PSP
(I996-1999)
Vente PSP de 1996 à 1999 (nombre d'unités vendues)1 BOO 000[;=========::::;-------------1
-+- Tolal antirétroviraux...... Total anti-hypertenseurs~ Total médicaments contre
infections opportunistes
.. ,.. '\
1 600 000
1 400 000
1 200 oon
1 000 000
BOO 000
600 000
400 000
.. '.. ...
...;..
médicaments destinés au secteur public. Au début de chaque année 5, en
présence d'un représentant de la Direction de la pharmacie et du médi
cament (OPME), toutes les offres sont examinées pour chaque médica
ment. Pour pallier un éventuel défaut d'approvisionnement d'un four
nisseur, des précautions sont prises par la PSP qui s'adresse
systématiquement à un ou deux autres fournisseurs. Il faut également
noter qu'à la différence de ce qui peut se produire pour d'autres patho
logies et en relation avec l'Initiative, la PSP n'est légalement pas autorisée
à prélever une marge de gestion en matière de prix des médicaments
du VIH, les prix d'achat à la source auprès des fournisseurs devant être
répercutés sans modifications auprès des centres acheteurs.
Entre 1997 et 2000, globalement, les prix moyens des inhibiteurs
nucléosidiques ONT]) qui étaient déjà distribués avant 1996 (AZT, ddI),
d'une part, et d'autre part des inhibiteurs de protéase ou IP (saquinavir,
, C'est généralement en janvier de chaque année que les appels d'offres sont lancés. Pour
J'année 2000, l'appel d'offres n'a pu être lancé qu'au mois de mars du fait des changements
politiques intervenus en décembre 1999. Les prix d'achat et de vente par la PSP, de 1996 à
2000, sont présentés dans les tllb/eaux 4 et 5, p. 131 et 132.
ill1R§) 126 L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
indinavir, nelfinavir, ritonavir) et des inhibiteurs nucléosidiques (d4T,
ddC) introduits en 1997, diminuent respectivement de 12 %, 13 % et
40 %6. L'annonce de ('Initiative Onusida en décembre 1999 peut partiel
lement expliquer la diminution des prix des inhibiteurs nucléosigues
observée en 1998 comparativement à 1997, bloquant ainsi provisoire
ment la tendance à la hausse enregistrée entre 1996 et 1997. De nouvelles
augmentations apparaissent cependant entre 1998 et 1999 (figure 9).
Figure 9
Prix PSP des ARV par type de médicament et selon les dates de misesur le marché ivoirien
c 1400.2."§.I 200...\.J
~ 1 000Q.,
v ..."0 800~
2 600::l...'" 4000..
~U 200u..
5 01996 1997 1998 1999 2000
-+- Prix moyen pour les1NTI présents sur lemarché en 1996
.... Prix moyen pour les1NTI introduits surle marché en 1997
-- Prix moyen pour lesIP introduits sur lemarché en 1997
Une analyse plus détaillée montre gue les diminutions les plus
significatives sont à relier à la capacité de la PSP de mettre en compétition
les firmes pharmaceutiques notamment grâce à la confrontation, chaque
fois qu'elle est possible, avec les producteurs de médicaments génériques
(figure 4). Alors que les diminutions de prix pour le ddl, pour lequel il
n'existe qu'un fournisseur ŒMS), varient sur la période en moyenne en
tre 5 et Il % selon le dosage (50 ou 100 mg), on observe une diminution
de 24 010 entre 1996 et 2000 pour l'AlT du fait de la compétition introduite
par les fabricants de génériques. En effet, jusqu'en 1997, Apotex, produc
teur canadien de génériques, était le fournisseur de la zidovudine; en
" Les indices de prix à la consommation du poste santé des ménages ouvriers ivoiriens
indique une évolution de 154,9 en janvier 1996 il 161,5 en janvier 2000 (indice 100 en janvier
1992) ONS).
Impact de l'Initiative sur la disponibilrté et l'accessibilité des médicaments
1998, VCF Ine. (Brésil) apparaît sur le marché, conduisant GlaxoWelcome
à diminuer ses prix pour l'AZT 100 mg afin de rétablir sa position sur le
marché en 1999 (figure 4). Enfin, en 2000, le générique espagnol vendu
par Combinopharm évince de nouveau GlaxoWelcome du marché. De
façon similaire, alors que jusqu'en 1999 BMS était le seul fournisseur de
d4T, aucune diminution n'était alors observable. L'introduction du gé
nérique indien vendu par CI PLA en substitution du d4T de BMS a permis
une diminution des prix de 39 % entre 1999 et 2000.
La diminution du prix des inhibiteurs de protéase pour lesquels
il n'existait pas de substituts génériques dans la période étudiée est restée
très faible entre 1998 et 2000, excepté pour le saquinavir vendu par Ro
che pour lequel on enregistre une diminution d'environ 23 0/0 entre 1997
et 2000. Malgré les annonces faites en mai 2000 peu avant la Conférence
internationale sur le sida de Durban, il n'y a pas eu de diminution consta
tée jusqu'en décembre 2000. Précisons surtout qu'aucune corrélation
nette n'apparaît entre J'augmentation des volumes de ventes et la dimi
nution des prix des ARV au cours des quatre années étudiées.
Par comparaison, sur la même période, la tendance pour les anti
hypertenseurs a été une augmentation moyenne de 17°/0, suggérant que
les efforts convergents de la politique de la PSP et de l'Initiative ont contre
balancé, pour les ARV, la tendance à la hausse du marché (figure 10).
Figure 10Évolution des prix d'achat des médicaments présents sur le marché
ivoirien en 1996
~
~ -+- Prix moyen pour lesMOP
..... Prix moyen pour les.,....------~
anti-hyper1enseurs....... Prix moyen pour
les ARV
• •• •
c 800.30..700.:u~ 6000..
'" 500-0
~ 400ë:: 300
2.. 200~ii 100c'" 0
1996 1997 1998 1999
~128 L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
Par ailleurs, parallèlement à l'augmentation déjà signalée des vo
lumes de ventes (figure 8), on remarque une forte baisse (60 0/0) du prix
des médicaments pour les infections opportunistes. Cette baisse est par
tiellement due à la diminution du prix des quinolones de seconde gé
nération. Parce que la pefloxacine 400 mg est concurrencée par la cipro
110xacine depuis 1997, et a été introduite dans les algorithmes destinés
aux traitements des MST depuis 1998, cette molécule a vu son prix chuter
considérablement et explique en grande partie la diminution du prix
moyen des médicaments pour les infections opportunistes. Cependant.
une diminution de 15 Ofo sur la période étudiée apparaît même quand
ces deux molécules ne sont pas incluses dans l'analyse (figure Il).
Figure Il
Évolution des prix PSP des médicaments pour les infectionsopportunistes (1996/1999)
.- -~-. -------A -+- Prix moyen pour lesMOP présents sur lemarché en 1996
...... Prix moyen 1996 sa ns
~pefloxacine 400 mg inj
--.au Prix d'adlat ciproflo-xacine 200 mg inj
• • • •
c 1 200.00.20...;: 1 000.00v'"Q,)
0.. 800,00Q,)
"Cl
'~ 600,00C:J.... 400,00'"0.
~ 200.00Uw...cQ,) 0.00
1996 1997 1998 1999
La diminution limitée des prix des ARV explique qu'en 2000 le
coût moyen des régimes ARV les plus courants pour un adulte reste hors
de portée financière pour une grande majorité des personnes infectées
par le VIH en Côte d'Ivoire. Le coût mensuel moyen d'une bithérapie
«ddI-d4T» est supérieur à 100 000 FCFA et converge vers une valeur qui
se situerait entre 270 000 et 285 000 FCFA pour un régime thérapeutique
incluant des inhibiteurs de protéase (ddI-d4T-indinavir/AIT-3TC-indi
navir) (figure 12). Ceci est il comparer au salaire mensuel minimum ga
ranti officiellement qui est inférieur à 50000 FCFA et aux données de
Impact de l'Initiative sur la disponibilité et l'accessibilité des médicaments 129
Retro-CI montrant que 40 Ofo des personnes infectées par le VIH se pré
sentant au bilan initial pour entrer dans l'Initiative n'ont aucun revenu
et que 45 Ofo ont moins de 240000 FCFA par mois.
Figure 12
Évolution des prix mensuels de bi- ou trithérapies courantes(I997-2000)
.... • ~~• or~_)( )(
I-+- ddl-d4T....... ddl-d4T-indinavir-- AZT-3TC-indinavir--><- combivir-inclinavir
350 000
300 000
v> 250 000<)E 200 000
~U 150 000"-
c::""' 100 000
50 000
a1997 1998 1999 2000
Conclusion
Cette étude montre que le circuit d'approvisionnement et de dis
tribution des ARV a beaucoup évolué sur la période 1996-2000 et s'est
nettement rationalisé. Le modèle prévu par \'Onusida qui supposait la
création d'une structure intermédiaire à but non lucratif n'a pas su s'im
poser sur le marché ivoirien dans la mesure Ol! un circuit préexistant
fonctionnait déjà dans Je secteur public. C'est la Pharmacie de santé pu
blique, unique grossiste-distributeur public, qui a su jouer ce rôle en
devenant le distributeur prédominant d'ARV en Côte d'Ivoire. Le marché
s'est également rationalisé dans la distribution finale des médicaments
puisque l'Initiative a permis de limiter les centres de santé accrédités à
délivrer des ARV. Dès le lancement de l'Initiative en août 1998, seuls huit
centres étaient habilités à délivrer ces médicaments.
On a pu, par ailleurs, constater des ëlugmentations significatives
dans les volumes de prescriptions, non seulement pour les médicaments
L'accès aux traitements du VIH/sida en Côte d'Ivoire
destinés à la prophylaxie et au traitement des infections opportunistes,
mais aussi pour les antirétroviraux.
Des diminutions significatives de prix ont été enregistrées pour
les médicaments des maladies opportunistes.
Les diminutions de prix des ARV sont limitées; de l'ordre de 40 %
pour les inhibiteurs nucléosidiques et de 12 % pour les inhibiteurs de
protéase. Elles sont principalement dues à la politique de la Pharmacie
de santé publique qui utilise dans ses appels d'offres la mise en concur
rence avec les médicaments génériques, que ceci se traduise en définitive
ou non par des achats de génériques. Ceci souligne l'importance de la
mise en concurrence pour obtenir des baisses de prix significatives. Il est
intéressant de comparer la situation en Côte d'Ivoire à celle de j'Ou
ganda, autre pays pilote de l'Initiative où, dans la période étudiée, aucun
recours à la concurrence par les génériques n'a été effectué et où les prix
sont demeurés très supérieurs à ceux pratiqués dans l'Initiative en Côte
d'Ivoire (figure 13). En revanche, les prix ivoiriens sont demeurés supé
rieurs à ceux pratiqués au Brésil qui dispose d'une capacité nationale de
production de génériques des médicaments ARV.
Figure 13
Comparaison des prix des antirétroviraux (par dose journatière)en 2000 <Brésil, Côte d'Ivoire, Ouganda, USA)
Brésil Ouganda Côte d'Ivoire USA
3TC (amivudine) ],66 3,28 2,95 8,70ddC (zalcitabinel 0,24 4,17 3,75 8,80ddl (didanosine) 2,04 5,26 3,48 7,25
AZT/5TC ],44 7,34 NA ]8,78
AZT (zidovudine) ],08 4,34 2,43 10,]2
d4T (stavudinel 0,56 6,19 4,1 9,07
Source.Onusicla.
Tableau 4
Prix des médicaments antirétroviraux à la Pharmacie de santé publique (PSP) par comprimé
Laboratoire Nomde Molécule 1996 1997 1998 1999 2000spécialité
achat vente achat vente achat vente achat vente achat vente
Videx'" ddl50 mg )35 402 296,03 296 299 300 298,66 300 298,66 300ddllOOmg 596,84 597 597 600 596,85 600 563,83 nd
1 BMSN
Zéril'" d4T30 mg 1354,64 1355 1355 1360 1 354,64 1360T d4T 40 mg 1405,89 1406 1406 1410 1405,9 1 410
31 -0
générique d4T30 mg 857 nd '"CI PLA ~
génériquf d4T 40 mg 1044 nd 0-CD
Apolex Ine. gfl1friquf AV 100 mg 352,42 423 390,4 390 ~~<'vcr 1ne. gfl1ériquf AV 100mg 380,93 309 CDCf>
~
Combino-pharm générique AZT 100 mg 267 nd ro-0-Ui'
AZTlOO mg 309 309 278 278 -00:::J
Rélrovirr, AV 250 mg 762,59 767 707,97 767 ~
Glaxo AZT300 mg 688 nd ~CD
Wellcome -EpivirA 3TC 150mg 885 885 825,25 885 803 nd ",-
nnet>
Combivir'" AZT 300 + 3TC 150 1 333,34 1 334 1 334 1334 Cf>Cf>
~Hivid'" ddC 375 mg 1200 1200 375 375 487,96 446 446 446 ro-
0-
Roche [nvlrase" Sclquinavir 200 mg 877,8 878 698,94 552 741,4 745 677,27 nd et>Cf>
[ Viracept" Nelflnclvir 250 mg 731,5 732 726,36 nd 3CD·0-
PAbbol Norvir'· Ritonavir 100 mg 471 nd
0'
'"3et>
MSD Crivixan"" Indinavir400 mg 1091,4 1091 1040 1040 1037 1037 1037 1037:::J
ur
INN Stocrin'" Efavirenz 200 mg 1 474,59 nd
nd . non déterminé. ....W....
Tableau 5
Prix des médicaments antirétroviraux pédiatriques vendus à la Pharmacie de santé publique (PSP)par comprimé
Labora- Nomde 1998 1999 2000Moléculetoire spécialité achat vente achat vente achat vente
dd[ 25 mg 149 149
1 BfvlS Videx'" dd[2g/[00 ml JO 275 10275N ddl4 g/200 ml 20545 20545T Zérit"' d4T 1 mg/ml 18700 18700 18700 187001
Glaxo Relrovir'" AZT JO mg/ml 14500 14500 16200 16200Wellcome Epivir" 3TC [0 mg/ml 14000 14000
MSD Crivixan~ Indinavir 200 mg 520 520 520 520IP
Abbot Norvir'~ Ritonavir80 mg/ml 39045 39045
Source' Pharmacie de santé publique de Côte d'Ivoire.Les différences éventuelles prix de vente/prix d'achat PSP ne sont pas liées à l'application de marges mais à des décalages entre ddtes d'achat surle marché internation,ll et moments de la vente aux centres en Côte d'Ivoire.
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