l’implémentation des outils de management modernes au sein

16
1 L’implémentation des outils de management modernes au sein des établissements publics marocains Mohamed AMEDJAR Enseignant chercheur à l’Université Hassan II Abderrahim AMEDJAR Enseignant chercheur à l’Université Hassan 1 er Résumé Suite à l’adoption de la nouvelle loi organique relative à loi de finances en 2015, cet article a pour but d’étudier les nouvelles orientations prises par le Maroc pour l'amélioration de la gouvernance publique, tout en mettant l’accent sur l’introduction d’un nouveau système de gestion basé sur la mesure et l’évaluation de la performance. De ce fait, notre recherche a pour objectif : d’identifier les nouveaux outils introduits dans la comptabilité de l’Etat, dans la gestion et dans l’audit des dépenses publiques ; et d’analyser les nouvelles variables instaurées dans la gestion des organismes publics . Mots-clés : Audit, Comptabilité, LOF, NPM, Performance, Programme Budgétaire. Abstract Following the adoption of the new Organic Law on Finance Act in 2015, this article aims to explore new directions taken by Morocco in improving public governance, while emphasizing the introduction of a new management system based on the measurement and evaluation of performance. Therefore, our research aims to: identify new tools introduced in the accounts of the State, in the management and auditing of public expenditure; analyze new variables introduced in the management of public organizations. Keywords: Audit, Accounting, LOF, NPM, Performance, budgetary program

Upload: others

Post on 30-Nov-2021

2 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

1

L’implémentation des outils de management modernes au sein des

établissements publics marocains

Mohamed AMEDJAR

Enseignant chercheur à l’Université Hassan II

Abderrahim AMEDJAR

Enseignant chercheur à l’Université Hassan 1er

Résumé

Suite à l’adoption de la nouvelle loi organique relative à loi de finances en 2015, cet article a

pour but d’étudier les nouvelles orientations prises par le Maroc pour l'amélioration de la

gouvernance publique, tout en mettant l’accent sur l’introduction d’un nouveau système de

gestion basé sur la mesure et l’évaluation de la performance.

De ce fait, notre recherche a pour objectif :

d’identifier les nouveaux outils introduits dans la comptabilité de l’Etat, dans la

gestion et dans l’audit des dépenses publiques ;

et d’analyser les nouvelles variables instaurées dans la gestion des organismes publics.

Mots-clés : Audit, Comptabilité, LOF, NPM, Performance, Programme Budgétaire.

Abstract

Following the adoption of the new Organic Law on Finance Act in 2015, this article aims to

explore new directions taken by Morocco in improving public governance, while emphasizing

the introduction of a new management system based on the measurement and evaluation of

performance.

Therefore, our research aims to:

identify new tools introduced in the accounts of the State, in the management and

auditing of public expenditure;

analyze new variables introduced in the management of public organizations.

Keywords: Audit, Accounting, LOF, NPM, Performance, budgetary program

2

Introduction

Au cours de la dernière décennie, le Maroc a connu une série des réformes au niveau

politique, économique, juridique qui sont traduites par la mise à jour de la constitution (2011),

le lancement de la politique de régionalisation avancée et par le changement de la loi

organique relative à la loi de finance.

Cette dernière qui constitue un thème d’actualité et un nouveau débat au Maroc, est

considérée comme étant une solution vers la modernisation de l’Etat et notamment au profit

des administrations publiques.

En fait, la LOF est instaurée en 2015 afin de satisfaire aux besoins et à la demande des

différentes parties (parlement, citoyens, organismes internationaux, banque mondiale, fond

monétaire internationale….) dans un cadre démocratique de suivi, d’évaluation et du contrôle

des politiques publiques.

Dans le but d’améliorer le système de gestion et de management des actions publiques au sein

des établissements publics, la LOF a prévu un ensemble des outils depuis la conception des

prévisions budgétaires jusqu’à le contrôle des politiques publiques tout en accordant une

importance primordiale à une nouvelle variable « performance » qui constitue

jusqu’aujourd’hui un sujet central de l’ensemble des réformes administratives dans le monde

(Jackson, 1993 ; Bouckaert, 2006), et une principale promesse faite par le secteur public (Van

Dooren, 2006).

Notre travail a pour objectif d’étudier les nouveaux apports de la LOF en matière :

d’élaboration des programmes budgétaires ;

de gestion et d’information des comptes de l’Etat ;

du contrôle et d’évaluation de la performance des politiques publiques.

Pour répondre aux objectifs précités ci-dessus, nous présentons dans un premier lieu le

contexte général de la nouvelle loi de finances et sa relation avec le concept du NPM, ensuite

nous essayons d’appréhender les conceptions de la performance et de comprendre comment

une multiplicité d’outils et de conceptions s’articulent.

3

1. Le contexte général de la réforme de la LOF au Maroc

La réforme de la LOLF constitue un acte politique primordial qui inscrit le Maroc dans la

vague mouvement international de modernisation des finances publiques et traduit la volonté

de l’Etat de garantir les exigences de la bonne gouvernance.

En effet, La nouvelle loi organique s’inscrit dans la successivité des constitutions et des lois

organiques antérieures.

Figure n°1 : Historique sur la production des LOF au Maroc

Source : élaboré par nos soins

Le schéma ci-dessus traduit la notion d’évolution historique des réformes de la LOF qui se

varie dans le temps (Peters 2001 b) ou de générations (Jones 2004).

De ce fait, Peters considère que les réformes sont réparties en deux grandes parties :

First round of change (1960 et 1970) qui se caractérise principalement par des

changements structurels en matière de redistribution verticale et horizontale des

pouvoirs ; un gouvernement « dérégulateur » qui responsabilise les dirigeants et un

Etat « participatif » qui démocratise la répartition des ressources et la prise de

décision ;

Subsequent and current rounds of change (1980 et 1990) qui se particularise par le

contrôle de la performance, un gouvernement « régulateur », un gouvernement

cohérent et coordonnateur et une administration responsabilisée.

Alors que Jones (2004) considère trois générations de réformes à savoir :

La première génération qui est caractérisée par l’adoption de nouvelles politiques, des

changements budgétaires et l’introduction de nouveaux concepts de gestion ;

LOF 1963/Constitution 1962

LOF 1970/Constitution

1970

LOF 1972/Constitution

1972

LOF 1998/Constitution

1996

LOF 2015/Constitution

2011

4

La deuxième génération qui est marquée par la continuité et la permanence des

réformes introduites ;

La troisième génération qui est qualifié comme étant une phase pour évaluer et

critiquer les réformes appliquées.

A partir ces constats, nous pouvons retenir jusqu’à maintenant que la réforme de la finance

publique au Maroc se situe selon Jones (2004) et Schneider et Hereria (Réformes dans les

pays en voie de développement, 2003) dans la première génération.

1.1. les objectifs de la réforme de la LOF

Les objectifs de la nouvelle loi organique relative à loi de finances peuvent être résumés sur

les trois principaux éléments stratégiques à savoir :

Le renforcement de la performance de la gestion publique à travers l’introduction des

indicateurs de mesures (efficacité, efficience et la cohérence) des actions publiques,

ainsi que la responsabilisation des gestionnaires dans l’exécution et la réalisation

d’objectifs justifiant les ressources financières affectées à travers un nouveau concept

articulé autour de la logique de résultats ;

L’édiction des principes et règles financiers concernant l’équilibre financier de la loi

de finances et la mise en place d’un ensemble de règles visant l’amélioration de la

transparence des finances publiques ;

L’accroissement du rôle du parlement (chambre des représentants et de conseillers)

dans le débat budgétaire, dans le contrôle financier, dans l’évaluation des politiques

publiques.

2. La loi organique sur les finances publiques au Maroc et le concept du

« New Public Management »

La nouvelle loi organique sur les finances publiques s’inspire en matière de l’élaboration et du

contrôle des programmes budgétaires de l’aspect du NPM « New Public Management ».

Le NPM ou « le nouveau management public » est un concept apparu au Royaume Unis dans

les années 1970 sous la direction du premier ministre Margaret Thatcher qui a instauré des

nouvelles méthodes dans la politique de gestion publique (les méthodes d’organisation, la

fonction publique, la gestion budgétaire, l’audit…) afin de :

5

rationaliser les choix budgétaires (RCB) et les dépenses de l’Etat (Perret, 2006) ;

développer la planification l’évaluation des budgets (les budgets de programmes et les

indicateurs de performance).

Ensuite ce terme a connu à partir des années 1980 des inventions et des améliorations afin de

désigner un nouveau aspect sur l’importance de la gestion dans le management de la finance

publique (Hood 1989, Pollitt 1993).

Selon Hood, le NPM constitue un puzzle doctrinal visant à déployer dans les organisations du

secteur public un ensemble des techniques managériales relevant des pratiques et critères de

performance des établissements privés.

Pour cela Hood a identifié sept doctrines constituantes les principales bases du NPM :

Tableau n°1 : Composantes doctrinales du New Public Management (livre sur le secteur

public)1

Doctrine Justification

Management professionnel de proximité La redevabilité requiert une attribution claire de

la responsabilité pour l’action, pas la diffusion

d’un pouvoir

Standards explicites et mesures de

performances

La redevabilité requiert un exposé clair des

buts ; l’efficience demande un examen précis

des objectifs

Insistance marquée sur les outputs de

contrôle

Besoin de souligner les résultats plus que les

procédures

Désagrégation des unités dans le secteur

public

Besoin de créer des unités « gérables », gai,

d’efficacité par l’utilisation de contrats à

l’intérieur ou l’extérieur du secteur public

Compétition accrue au sein du secteur

public

La concurrence, clé pour réduire les coûts et

améliorer les standards

Pratiques de management issues du

secteur privé

Besoin d’utiliser les outils « qui ont fait leurs

preuves » dans le privé

Volonté de parcimonie dans l’utilisation Besoin de maitriser les demandes de ressources

1 « Contrôle de gestion sur mesure : Industrie, Grande distribution, Banque, Secteur public, Culture » ; Simon

Alcouffe, Marie Boitier, Anne Rivière, Fabienne Villesèque-Dubus ; P.166, édition dunod, 2013

6

des ressources « faire plus avec moins »

Source : d’après le livre le contrôle de gestion sur mesure, p.166

Les sept éléments présentés dans le tableau ci-dessus introduisent des nouveaux concepts de

gestion issus des pratiques des entreprises privées : la gestion de résultat, le contrôle et l’audit,

centre d’analyse de coûts, efficience, les indicateurs, et la performance.

3. La LOF et la comptabilité comme outil d’information et de décision

Au Maroc, la comptabilité est perçue généralement comme une obligation légale mais elle

constitue aussi une source d’information qui vise à aider les utilisateurs internes et externes de

prendre des décisions.

Avant la réforme, la comptabilité publique est une technique d’enregistrement qui se focalise

juste sur l’aspect de la trésorerie (encaissement des recettes et décaissement des dépenses).

Cet aspect ne reflète pas une image réelle et fidèle sur les engagements pris par les

établissements publics, pour cela la nouvelle LOF 2 vient pour améliorer la comptabilité

publique à travers l’introduction des nouveaux outils comptables à savoir :

3.1. la comptabilité budgétaire

C’est une comptabilité qui est tenue pour gérer selon une enveloppe budgétaire :

les recettes qui sont encaissées au titre de chaque année budgétaire ;

et les dépenses qui sont prises en compte au titre de l'année budgétaire au cours de

laquelle les paiements sont visés par les comptables assignataires.

3.2. la comptabilité générale

C’est une comptabilité patrimoniale fondée sur le principe des droits et obligations, c’est-à-

dire que les opérations sont enregistrées au titre de leur exercice auquel ils se rattachent, quel

que soient leur date d’encaissement ou de paiement afin de respecter le principe de régularité

et sincérité des opérations comptables.

2 Chapitre IV : les comptes de l’Etat de la LOF

7

3.3.la comptabilité d’analyse des coûts

Selon la LOF, la comptabilité d’analyse des coûts est une comptabilité facultative, qui sert à

analyser les coûts des différents projets engagés dans le cadre des programmes définis par

chaque organisation publique en vue :

d'éclairer les décisions d'organisation et de gestion ;

et de déterminer le coût de revient pour chaque projet.

Tableau n°2 : comparaison entre les trois différents types de comptabilité

Comptabilité

Budgétaire

Comptabilité

Générale

Comptabilité

d’Analyse des Coûts

Objectifs et

finalités

un outil de pilotage,

de prévision et

d’analyse pour

mener à bien les

projets et activités

de l’organisme

Retrace les

opérations affectant

le patrimoine, la

situation financière

et le résultat.

un outil d’analyse et

d’aide à la décision.

Faire apparaître les

éléments de calcul du

coût des services rendus

ou du coût de revient

des biens et

programmes (projets ou

actions) réalisés.

Permettre le contrôle du

rendement des services.

Règles de

fonctionnement

Comptabilité des

engagements (crédit

d’engagement)

Comptabilité de

caisse et des

émissions (crédit de

paiement)

Constatation des

droits (charges) et

obligations

(produits)

Cette comptabilité est

fondée sur la

comptabilité générale

Elle est tenue par les

ordonnateurs ou le cas

échéant par les

comptables.

8

Référentiels Enveloppes

budgétaires

Plan comptable Manuel de la

comptabilité d’analyse

des coûts

Résultat Solde budgétaire Résultat de

l’exercice

Résultat analytique

Source : élaboré par nos soins

Les outils comptables proposés par la LOF, vont permettre pour chaque établissement public

d’accomplir trois rôles principaux (Mintzberg, 1989) :

informationnel à travers la traduction en information chiffrée de toutes les transactions

et événements réalisées par une organisation ;

décisionnel grâce à l’’information comptable qui permet de convertir en unité de

mesure les conséquences des alternatives décisionnelles ;

et relationnel avec son environnement (selon Herbert Simon, 1969) qui est exprimé

par le langage communiqué (des symboles selon Wouters et Verdaasdonk, 2002) avec

les parties prenantes (citoyens, parlement, bailleurs de fond…).

Aussi, cette panoplie comptable va permettre aux responsables des entités publiques

(Secrétaire Général, Directeur financier,…) de :

consentir un constat (scorekeeping) : « les choses vont-elles bien ou mal ? » ;

attirer l’attention (attention directing) : « à quels problèmes faut-il s’intéresser ? » ;

aider à la résolution des problèmes (problem solving) : « parmi les différentes

solutions, quelle est la meilleure ? ».(Bouquin, 2000, p.14).

4. La LOF et la recherche de la performance

Au Maroc, la conception budgétaire de l’action publique correspond aux crédits accordés pour

la réalisation des plans d’actions (stratégique ou opérationnel) définie par une entité publique,

cette conception ne répond pas aux attentes des décideurs en matière de prise de décision à

cause de la lourdeur, la complexité, la longueur du processus budgétaire (Schmidt, 1992 ;

Jordan, 1998 ; Hope et Fraser, 1999), et aussi à cause de l’insuffisance des outils d’analyse et

d’évaluation.

De ce fait, la nouvelle LOF est venu pour combler les défaillances du système budgétaire à

travers la traduction des programmes, des projets et actions en indicateurs de performance.

9

4.1. la programmation budgétaire pluriannuelle :

Selon l’article 5 de la LOLF « la loi de finance de l’année est élaborée par référence à une

programmation budgétaire triennale actualisée chaque année en vue de l’adapter à

l’évolution de la conjoncture financière, économique et sociale du pays », et que cette

programmation vise notamment à identifier l’ensemble des ressources et des charges de l’Etat

sur une période de trois ans, en fonction d’hypothèses économiques et financières réalistes et

justifiées.

La mise en place de la nouvelle programmation budgétaire triennale va permettre de :

améliorer la visibilité des stratégies gouvernementales à moyen terme pour atteindre

les objectifs du développement économique et social du pays ;

identifier les priorités des politiques publiques et veiller à sa cohérence ;

accroître les conditions de préparation de loi de finance ;

octroyer une meilleure visibilité aux gestionnaires pour gérer leurs programmes en

fournissant des méthodes pour le suivi de la performance des dépenses publiques en

termes d’efficacité, d’efficience et de qualité de service.

De ce fait, la structure de la morasse budgétaire a connu un changement dans le fond et dans

la forme qui est devenu comme suit :

Tableau n°3 : Passage de l’ancienne à la nouvelle programmation budgétaire

Nomenclature budgétaire actuelle Nomenclature

budgétaire de

préfiguration

Nomenclature

budgétaire

cible

Codification Taille du champ Codification Taille du

champ

Codification

Chapitre 10 caractères Chapitre 10 caractères Chapitre

Article 4 caractères : XY AB

AB représente la région :

01 à 16

XYAB :

Domaine/direction

centrale/région

Article (s) dont

l’intitulé sera

celui du

programme

4 caractères :

XYAB

Programme

10

- - - - Région

Paragraphe 2 caractères :

Programme/Projet/Action

Paragraphe (s)

dont l’intitulé

sera celui du

projet ou action

2 caractères :

Projet ou

action

Projet ou

action

Ligne 2 caractères Ligne 2 caractères Ligne

Source : Circulaire 4/2015 relative à la budgétisation par programme axée sur la performance

La nouvelle structuration de la morasse budgétaire est marquée par la réorganisation des

pouvoirs et l’identification des programmes vers les régions surtout avec l’introduction de la

stratégie de la régionalisation avancée (12 régions au lieu de 16 régions).

Lors de l’élaboration des programmes, les établissements publics sont tenus de respecter les

principes et les règles définies par la circulaire N°4/2015 à savoir :

la structure des programmes doit être stable dans un contexte de recomposition du

gouvernement ;

la dénomination des programmes doit être limitée (2 à 6) pour éviter toute

fragmentation excessive du budget de l’Etat ;

la taille du programme doit assurer le compromis entre la fongibilité des crédits, la

cohérence et la lisibilité des projets ou actions constituant ledit programme ;

l’identification claire d’une chaîne de responsabilité pour la mise en en œuvre efficace

du programme ;

la nécessité d’établir un tableau de passage pour la transcription intégrale du budget

dans la nouvelle architecture budgétaire autour des programmes.

4.2. Une programmation Budgétaire axée sur la performance

La Loi et le décret de la LOF consacrent un chapitre entier et une série des articles au concept

de la performance publique qui est définie comme étant la réalisation dans chaque programme

des objectifs stratégiques ou opérationnels en terme :

d’efficacité socio-économique (les citoyens) qui ont pour but d’améliorer les

conditions de vie des citoyens dans les différents domaines (économiques,

sociales, culturelles, sanitaire….) ;

11

d’efficience dans la gestion (les contribuables) qui ont pour objectif d’optimiser

moyens employées conformément au rapport entre les produits obtenus et les

ressources consommées ;

et de qualité de service (les usagers) qui visent à améliorer et accroître la qualité

de service offert à l’usager.

Figure 2 : Triangle du contrôle de gestion

Source : d’après le livre le contrôle de gestion sur mesure, p.171

Ces objectifs nécessitent l’obligation de prendre en considération lors de la fixation des

objectifs et des indicateurs de performance la variable de « l’aspect genre »3 et tout autre

critère social jugé nécessaire et pertinent (la situation de handicap, l’âge,…).

Afin de réussir la définition des objectifs et des indicateurs de performance, chaque

responsable du programme, du projet ou action, est tenu de respecter les règles suivantes :

Les objectifs et les indicateurs fournis au parlement doivent traduire de manière

équilibrée les trois facteurs de la performance (efficacité, efficience et qualité de

service)

Chaque programme doit respecter un nombre limité d’objectifs et des indicateurs de

performance mesurables (quantitativement ou qualitativement) spécifique à chaque

objectif (3 maximum) ;

La sélection d’indicateurs de performance doit privilégier les résultats tout en veillant

à ce que les valeurs cibles soient réalistes et réalisables

Les intitulés des indicateurs doivent être cohérents avec leurs unités de mesure ;

La date de renseignement doit être précisée pour les indicateurs non renseignés et qui

sont en cours d’élaboration ;

3 Article 39 de la LOF

12

La transformation des indicateurs d’activité ou de moyens en indicateurs de

performance (corrélation avec les moyens engagés) ;

La généralisation des indicateurs transversaux portant sur certaines fonction support

(fonction gestion des ressources humaines et fonction bureautique)

Les indicateurs de performance doivent être pertinents, compréhensibles et fiables…

Nous pouvons constater que les budgets et les indicateurs de mesures de performance sont

deux variables complémentaires qui donnent la naissance d’un nouveau système de contrôle

de gestion fondé sur quatre points (Flamholtz 1979, 1983):

un système de planification qui identifie les objectifs en relation avec la stratégie ;

une structure qui fixe les responsabilités opérationnelles ;

un système de mesure de la performance qui sertà suivre le degré de réalisation des

objectifs et de prendre d’éventuelles mesures correctives,

et enfin un système d’évaluation et de récompenses en liaison avec les résultats

obtenus.

5. La LOF et le contrôle de la performance des politiques publiques

Le contrôle de la performance des politiques publiques constitue un axe primordial dans la

nouvelle loi organique relative à la loi de finance

Ce contrôle a pour but de répondre d’une part à l’approfondissement de la transparence, et

d’autre part au renforcement de la bonne gouvernance des politiques et stratégies publiques à

travers la production et la présentation des différents rapports au parlement tels que :

5.1. Le Projet de Performance

Afin de concrétiser la transparence de la préparation et la mise en place des politiques

publiques vis-à-vis des parties prenantes, chaque département ministériel ou organisme public

est tenu d’établir des Projets de Performance (PdP) qui seront examinés et validés par la

direction du Budget relevant du ministère de l’Economie et des Finances avant leur

présentation aux commissions du parlement.

Le Projet de Performance est un rapport qui décrit les données stratégiques et les crédits

budgétaires accordés sur une période triennale à une entité publique.

13

En fait, il retrace tous les objectifs indiqués dans chaque programme, les indicateurs retenus et

les méthodes utilisés pour mesurer leurs performances.

Pour cela chaque responsable du programme est tenu d’établir le dit rapport en collaboration

avec la direction des affaires financières et la direction des ressources humaines qui valident

la programmation des budgets, et qui jouent aussi un rôle de conseil et d’assistance auprès de

chaque responsable de programme.

5.2. Le rapport de performance ministériel et le rapport annuel de performance

Le rapport de performance ministériel est qualifié comme un tableau de bord de gestion qui

mesure l’écart entre les résultats réalisés et les objectifs fixés (y compris les prévisions) dans

le projet de performance au titre d’une programmation budgétaire triennale.

Chaque établissement public est tenu de transmettre son rapport de performance au Ministère

d’Economie et des Finances au plus tard à la fin du mois de Juillet4 afin d’établir le rapport

annuel de performance qui est présenté au parlement à l’occasion de la préparation du projet

de loi de règlement.

5.3. Le Rapport d’Audit de Performance (RAD)

Le rapport d’audit de Performance est un rapport établi sous la direction de l’inspection

générale relevant du ministère de finances qui sert principalement d’une part à analyser,

examiner, et évaluer les résultats escomptés, et d’autre part de s’assurer le bon

fonctionnement des programmes prévus.

Selon la norme ISSAI 300 5 , l’audit de performance consiste à examiner d’une manière

indépendante, objective et fiable le fonctionnement des programmes budgétaires, des projets

au niveau national/régional conformément aux principes :

d’économie qui consiste à réduire au minimum le coût des ressources ;

d’efficience qui consiste à obtenir le maximum à partir des ressources disponibles ;

et d’efficacité qui nécessite la réalisation des objectifs fixés et l’obtention des résultats

escomptés.

L’audit de performance suit l’une de trois approches essentielles à savoir :

4 Article 32 décret n° 2-15-426 du 28 ramadan 1436 (15 juillet 2015) relatif à l’élaboration et à l’exécution des

lois de finances 5Principes fondamentaux de l’audit de la performance

14

une approche axée sur les systèmes, qui réside à s’assurer du bon fonctionnement des

processus de gestion ;

une approche axée sur les résultats, qui consiste à évaluer les résultats réalisés par

rapport aux moyens et aux objectifs prévus (programmation budgétaire) ;

une approche axée sur les problèmes, qui repose à examiner, à vérifier et à analyser les

causes de problèmes particuliers ou d’écarts par rapport à des critères bien déterminés.

Dans le cadre du principe général de transparence, le rapport d’audit de performance fournit

des informations nécessaires sur la gestion et sur les effets des différentes stratégies publiques

qui seront destinés aux différents utilisateurs (le parlement, les citoyens, les bailleurs de

fonds….).

Conclusion

Certes que la réforme de loi organique relative à la loi de finance va contribuer à

l’amélioration du processus de gestion (programmation budgétaire triennale) et d’accroître le

système de gouvernance des établissements publics (mesure et audit de la performance) entre

les différents utilisateurs internes (secrétaire général, directeurs, syndicats….) et externes

(parlement, citoyens, bailleurs de fonds…), mais elle peut être qualifiée comme un tremplin

vers d’autres problèmes si :

le système d’information comptable, de gestion ou de contrôle ne sont pas fiables et ne

représentent pas la réalité ou une image fidèle d’une entité publique ;

les moyens financiers, techniques et humaines sont insuffisantes pour atteindre les

objectifs ;

les responsables des programmes, des projets et actions ne sont pas encore orientés à

la logique du résultat axé sur la performance ;

les pouvoirs de décision ne sont pas partagés ou délégués d’une manière rationnelle

permettant d’atteindre dans les bonnes conditions les objectifs stratégiques et

opérationnels.

les indicateurs de performance ne sont pas cohérents par rapport aux plans stratégiques

et opérationnels……

15

Bibliographie

Ann L. Watkins, C. Edward Arrington, «Accounting, New Public Management and American

Politics: Theoretical Insights into the National Performance Review», Critical Perspectives on

Accounting 18 (2007) 33–58

Christopher Hood, « the new public management in the 1980s: variations on a theme»,

Accountig organizations and society, Vol. 20, No. 2/3, pp. 93-109, 1995

Circulaire 4/2015 relative au lancement de la budgétisation par programme axée sur la

performance, Chef du gouvernement, Royaume du Maroc, 18 Juin 2015.

Dahir n° 1-15-62 du 14 chaabane 1436 (2 juin 2015) portant promulgation de la loi organique

N° 130-13 relative à la loi de finances, BULLETIN OFFICIEL, N° 6370 - 1er ramadan 1436

(18-6-2015)

Décret n° 2-15-426 du 28 ramadan 1436 (15 juillet 2015) relatif à l’élaboration et à

l’exécution des lois de finances, Bulletin Officiel, Nº 6378 – 29 ramadan 1436 (16-7-2015)

François Chouvel, «L'essentiel des finances publiques 2014, GUALINO EDITIONS»; 15e

édition (4 février 2014)

Frédéric Marty et al., « Les enjeux liés à l'adoption d'une comptabilité patrimoniale par les

administrations centrales », Revue Internationale des Sciences Administratives 2006/2 (Vol.

72), p. 213-232.

Frédéric Marty, « Réglementation et commande publique : Analyses économique et

juridique », Sciences de l'Homme et Société, Université Nice Sophia Antipolis, 2007.

Frédérique Letort, «La comptabilité de gestion dans les communes : entre pressions

institutionnelles et jeu des acteurs», mémoire de recherche pour l’obtention du master II

comptabilité contrôle audit voie recherche, année universitaire 2011-2012.

Garry D. Carnegie, Brian P. West, « Critical Making accounting accountable in the public

sector», Perspectives on Accounting 16 (2005) 905–928.

Johan A. M. de Kruijf, Nico P. Mol, « Réforme de la comptabilité et mesure de la

performance des agences du gouvernement des Pays-Bas », Revue française d'administration

publique 2007/3 (n° 123), p. 301-321.

Loi Organique n° 130-13 relative à la loi de Finances (LOF) promulguée par le dahir n°1-15-

62 du 14 Chaâbane 1436 (2 juin 2015)

M. Calvi-Reveyron « L'adaptation de la comptabilité publique à l'exigence de sincérité »,

Cahier de recherche n° 2010-12 E2. 2010.

16

Marcel GUENOUN, « le management de la performance publique locale : étude de

l’utilisation des outils de gestion dans deux organisations intercommunales » thèse pour

l’obtention du doctorat es sciences de gestion, université Paul Cezanne, présentée et soutenue

publiquement le mercredi 25 mars 2009.

Michel Cotten, Sylvie Trosa, « 1 : Les réformes comptables dans les pays de l'OCDE et en

France : des outils pour la performance et la transparence », Revue française d'administration

publique 2007/3 (n° 123), p. 293-300.

Ministère de la fonction publique, de la réforme de l’État et de l’aménagement du territoire,

France « Le contrôle de gestion dans les administrations de l’État. Éléments de

méthodologie », juin 2002.

Rapport préparé par Mr Saïd TOUNSI, Professeur à l’Université Mohamed V pour le compte

du Haut-Commissariat au Plan « prospective Maroc 2030 : les finances publiques », 30 avril

2006.

Rapport sur le Budget Axé sur les Résultats tenant compte de l’Aspect Genre 2016, Ministère

de l’Economie et des Finances, Maroc, 2016

Revue de l’OCDE sur la gestion budgétaire, volume 2 – n°1, les éditions de L'OCDE, 2002.

Revue Internationale des Sciences Administratives, « L’administration publique en Asie de

l’Est : les héritages, les expériences et les trajectoires des réformes », 2012/2 (Vol. 78).

Simon Alcouffe, et al. « Contrôle de gestion sur mesure », Edition Dunod, 2013.

Stéphanie Chatelain-Ponroy, François Cellier. « Les objectifs de performance et l'objectivité

de la notion de performance ». 1er Workshop Ville-Management « La performance publique

locale : composants et mesures », Décembre 2005, Paris, France.

Stéphanie Chatelain-Ponroy, Samuel Sponem. Culture du résultat et pilotage par les

indicateurs dans le secteur public. Bernard Pras (coord.), Management: enjeux de demain,

Vuibert, pp.163-171, 2009.

Tony Bovaird, «Public Sector Performance» University of the West of England, Bristol,

United Kingdom

Yuri Biondi, Stéphanie Chatelain-Ponroy, Samuel Sponem. De la quantification comptable et

financière dans le secteur public : promesses et usages de la gestion par les résultats.

Politiques et Management public, Institut de management public, 2008, 26 (3), pp.113-125.