linus pauling la dernière interview

8/8/2019 Linus Pauling la dernire interview

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VITAMINE C - ACIDE ASCORBIQUE - VITAMINE C LEVOGYRE - ACIDE L-ASCORBIQUE -

VITAMINE C POUDRE - VITAMINE C NATURELLE

LINUS PAULINGLA DERNIERE INTERVIEW

"Les vitamines ne m'intressent pas beaucoup d'un point de vue scientifique."Il y a 10 ans disparaissait Linus Pauling, seul homme rcompens deux reprises parle prix Nobel. Quelques semaines avant sa mort, il maccordait dans sa proprit deGorda (Californie) deux heures dentretien btons rompus - sa toute dernireinterview. Il est revenu cette occasion sur les annes noires du McCarthysme, lapolmique autour de la Vitamine C, et livrait sa nouvelle thorie sur les maladiescardio-vasculaires. Voici pour la premire fois dans son intgralit la dernireinterview de Linus Pauling.

Thierry Souccar : La revue scientifique britannique New Scientist a dit de vous quevous tes l'un des vingt plus grands scientifiques de tous les temps, de pair avecNewton, Darwin et Einstein. A quoi attribuez-vous votre succs en tant quescientifique ?

Linus Pauling:Ma russite est en grande partie due une connaissance plus vaste que cellede la plupart des scientifiques, en particulier une connaissance extensive de la chimieempirique, et aussi une bonne connaissance des mathmatiques et de la physique.Voyez-vous, aujourd'hui des tudiants me demandent quelles matires tudier pour se lancerdans la nutrithrapie. Je leur dis : n'tudiez pas la nutrition. Etudiez la physique et la chimie,la biochimie, assurez-vous une base solide. Les autres matires, vous pouvez les apprendredans les livres, mais la connaissance scientifique de base, vous ne l'apprendrez pas dans leslivres. Vous avez besoin des stimuli qu'apportent la classe et le professeur.

Vous avez grandi dans un petit village de l'Oregon. A quoi ressemblait le petit Linus


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Pauling ?

Je suis n dans un village de 500 habitants. Il y a toujours 500 habitants aujourd'hui, il estrest le mme... Ce qui m'intressait, c'tait les proprits des minraux. Pourquoi certainessubstances sont colores et d'autres pas ? Pourquoi certains minraux sont durs et d'autresmous ? Donc, j'ai accumul une sorte de savoir empirique, et en mme temps je posais ungrand nombre de questions, je lisais un grand nombre de livres. Quand j'avais neuf ans, monpre, un pharmacien, a crit une lettre au rdacteur en chef du journal local. Il disait : "Monfils a lu tous les livres alentour. Pourriez-vous suggrer quelques titres qui luiconviendraient ?"

C'est cette curiosit qu'on doit votre essai de 1931, The Nature of the ChemicalBond, qui fait toujours rfrence ?

Oui. J'ai obtenu un doctorat de chimie, mais mes deux premiers livres, The Structure of LineSpectra et Introduction to Quantum Mechanics, taient essentiellement des ouvrages dephysique, plutt que de chimie. En 1926, grce une bourse, j'ai eu la possibilit de merendre dans les grands laboratoires d'Europe, o l'on tentait de trouver des applications lathorie quantique. Cette anne-l, j'ai publi le premier article qui appliquait les mcaniques

quantiques aux systmes comportant plus d'un lectron. A la fin des annes 20, j'tais laseule personne au monde possder une bonne comprhension des mcaniques quantiques,et une connaissance tendue de la chimie. C'est ainsi que j'ai pu dvelopper la thoriequantique que j'ai appele "rsonance".

Pour la plupart des gens, votre nom est associ la nutrition et la mdecine. Maisvous n'avez jamais reu d'enseignement formel dans ces deux disciplines.

C'est vrai. Je n'ai jamais suivi un cours de biologie, ni mme de biochimie. Lorsque j'aipubli La Vitamine Cet le rhumeen 1971, un nutritionniste a crit que je n'avais pas eu unseul cours de nutrition, et que j'chouerais probablement l'examen de premire anne

(Rires.) La biochimie ne m'a jamais beaucoup intress.

La parution de ce livre, dans lequel vous souteniez que des mga doses de Vitamine Cpeuvent prvenir le rhume, a dclench une polmique considrable avec lacommunautmdicale.Vousyattendiez-vous?

Non, je croyais que tout le monde apprcierait mon livre. Les gens seraient heureux, ilssouffriraient moins ; les mdecins seraient satisfaits, on les drangerait moins pour unemaladie aussi banale. J'ai donc t trs surpris que lestablishment mdical me tombe dessus! Bien sr, les scientifiques se sont dits : "Je ne connais rien aux vitamines, mais LinusPauling a eu tant de fois raison dans le pass qu'il a probablement raison cette fois encore".

Mais les mdecins et les autorits mdicales ne le savaient pas, ils ne connaissaient ni marputation, ni mes contributions. Et ils furent visiblement de mauvaise foi. C'est une idequ'il leur tait difficile d'accepter.

Pour quelle raison ?

Je me suis souvent pos cette question. Lorsqu'on a commenc d'utiliser des molculesmdicamenteuses en mdecine, les mdecins se sont demand : "Si nous avons une substanceintressante pour traiter une maladie, quelle quantit faut-il donner ?" Ils se sont dits : "Lesagents chimio thrapeutiques peuvent sauver la vie de quelqu'un, mais ils sont aussitoxiques. On ne peut pas augmenter sans cesse les doses. Alors, ils se sont mis d'accord surles doses qui sont habituellement efficaces. Ensuite, ils sont arrivs la Vitamine C. Ils sesont pos la mme question : "Qu'est-ce qu'elle contrle ? Le scorbut ! Donc, nous allonsdterminer les doses ncessaires pour prvenir le scorbut". C'est ce qu'ils ont fait, et on adepuis les doses admises pour la Vitamine C. Il ne leur est pas venu l'esprit que des doses


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massives de Vitamine Cpouvaient avoir un intrt supplmentaire contre d'autres maladies,et qu'elles amliorent la sant en gnral. Ou a leur est venu l'esprit, et ils l'ont rejet.Voil ce qui s'est pass, mme si de nombreux docteurs ont observ les bnfices pour leurspatients de mga doses de Vitamine C. Quoi qu'il en soit, la profession mdicale taitbraque contre les vitamines hautes doses. Et elle l'est toujours.

Prenez-vous toujours 18.000 mg de Vitamine Cpar jour ?

Qui, oui. Oh..., parfois j'oublie. Je rpartis les doses au long de la journe, et parfois a mesort de l'esprit. Mais oui, oui, je prends peu prs cette quantit. Et bien sr d'autresvitamines aussi. De la vitamine E. Essentiellement ce que le docteur Hoffer (voir encadr)donne ses patients : 800 mg de vitamine E, 1.000 2.000 mg de niacine [vitamine B3 ouPP] et du slnium. Hoffer prescrit ce traitement orthomolculaire ses patients depuis desannes.

Vous ne cachez pas tre atteint dun cancer. Nest-ce pas paradoxal chez un hommequi a fait la promotion de la Vitamine Ccomme agent anti-cancer ?

Cest exact, jai un cancer de la prostate. Ce type de cancer survient gnralement avant

70-75 ans, et comme jen ai 93, je pense que les hautes doses de Vitamine Cque je prendsmont fait gagner une vingtaine dannes. En 1966, jai donn une confrence sur lamdecine orthomolculaire et jy ai manifest le dsir de vivre 20 ans de plus. A la suite dela confrence, jai reu une lettre dun biochimiste, Irwin Stone, qui me souhaitait de vivrenon pas 20 ans, mais 50 ans de plus. Il ajoutait quun rgime riche en Vitamine C meprocurerait longtemps une bonne sant, et il joignait une srie dtudes lappui de sonhypothse. Je les ai trouves convaincantes et cest ainsi que jai commenc avec monpouse prendre des doses leves de Vitamine C.

Aujourdhui, vous soutenez que la Vitamine Cpourrait prvenir lathrosclrose !

Oui. Mon dernier article sur ce sujet a t publi il y a deux ans dans le Journal ofOrthomolecular Medicine. Je lai crit avec le Dr Matthias Rath. Il sintitule : "Le dficit enVitamine Cest la cause des maladies cardio-vasculaires". Nous indiquons aussi que la lysinepeut prvenir ces maladies. Jai publi trois articles sur les effets de supplments quotidiensde 5 g de Vitamine Cet 5 g de lysine chez des malades cardiaques.

Sur quoi votre hypothse repose-t-elle ?

Eh bien, tout le monde est daccord pour dire que ces maladies commencent par une lsiondes parois vasculaires. Il y a quelques annes, je me suis demand pourquoi de telles lsionsapparaissent. Et la rponse est probablement que lorganisme manque de Vitamine C. LaVitamine C est indispensable la synthse de collagne et dlastine, les substances quirendent les vaisseaux forts et sains. Si vous manquez de Vitamine C, vous ne fabriquez pasassez de collagne, ou alors il est de mauvaise qualit. La plupart des animaux fabriquent dela Vitamine C, et ils nont pas le type de maladies cardio-vasculaires que nous avons. Il leurarrive davoir des problmes, mais pas dans les rgions de stress, o le pouls est fort, commeles artres coronaires ou le cerveau. La plupart des gens manquent de Vitamine C et ledficit en Vitamine Cest la premire cause des maladies cardio-vasculaires.

Quest-ce qui a motiv votre intrt pour les vitamines ? La science, la provocation, oule souci du bien commun ?

Il y a un psychiatre San Francisco qui crit en ce moment un livre. Il aura pour titre Linus

Pauling, lHumaniste. Il soutient que tout ce que jai accompli dans ma vie, je lai fait pourdes raisons humanistes. Je lui ai rpondu que je ne suis pas daccord. La plupart des chosesque jai faites, ctait pour satisfaire ma curiosit. Mais dans un certain sens, mon intrtpour les vitamines vient peut-tre du sentiment quelles peuvent contribuer de manire


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importante la sant des gens, plutt que dune curiosit purement scientifique. Lesvitamines ne mintressent pas beaucoup dun point de vue scientifique.

C'est tout de mme "Pauling l'Humaniste" qui a milit contre les essais nuclairesdans l'atmosphre.

Aprs la guerre, j'ai dcid qu'il tait important d'empcher une catastrophe nuclaire et queje ferais bien de prendre mes responsabilits. Jusqu'en 1945, il me semblait impossible quele monde arrive se dbarrasser de l'immoralit de la guerre. Javais l'impression que nousdevions nous en accommoder. Quand les bombes atomiques ont t cres, avec leur terriblepouvoir, il m'a sembl qu'il y avait l une chance d'en finir avec la guerre. Au dbut, j'aisimplement dit en quoi une guerre nuclaire serait terrible, et qu'il tait prfrable derechercher une coexistence pacifique avec l'Union sovitique, mais ensuite, il est devenuclair que les essais en eux-mmes taient dangereux.

A cette poque, vous avez t accus par le snateur Joseph McCarthy de sympathiescommunistes...

Oui. Les membres du Congrs m'ont demand si j'tais communiste, ou si je l'avais t. Je

leur ai rpondu que je me tenais l'cart des doctrines. Je leur ai dit ceci : "Personne ne medit ce que je dois penser, sauf madame Pauling". On a demand ma femme pourquoi jem'tais mis dans une telle situation de conflit avec le gouvernement, et pourquoi j'avaiscontinu mon action en dpit des problmes que cela me posait, et que cela posait mafemme et mes enfants. Elle a rpondu : "C'est qu'il est ttu. Il n'est pas prt changerd'opinion, mme sous la pression". Ava disait que j'tais entt, mais je ne voulaissimplement pas tre rduit au silence par McCarthy. J'ai continu par respect pourmoi-mme. A cette poque, mon passeport m'a t retir. La responsable du bureau despasseports a dit que mes dclarations anti-communistes n'avaient pas t suffisammentconvaincantes ! (Rire.) Finalement, le ministre des Affaires trangres m'a rendu monpasseport en 1954 ; ils n'ont pas eu assez de tripes pour m'empcher d'aller en Sude

recevoir mon prix Nobel. Au mme moment, j'tais attaqu par l'Union sovitique. LesSovitiques disaient que mes thories en matire de chimie taient incompatibles avec lematrialisme dialectique, et qu'aucun scientifique sovitique bon patriote ne devait lesutiliser. En fait, quand je me suis rendu en URSS, j'ai constat qu'ils continuaientd'appliquer mes ides, mais sous des artifices. Finalement, au bout de 5 ans, les autorits ontpubli un nouveau rapport sur l'tat de la chimie et ont dclar qu'on pouvait utiliser lesides du professeur Pauling, mais pas sous le nom de "thorie de rsonance". On devait lesutiliser sous le nom de "thorie des tats intermdiaires". Bref, il leur avait fallu 5 ans pourreconnatre que c'tait une erreur que d'attaquer mes thories. Elles taient trop bonnes(Rire.).

Vous avez des convictions politiques ?

Oh, oui. Eh bien, on pourrait dire que je suis une sorte de socialiste modr, d'obdienceprogressiste. En gnral, jai soutenu des candidats dmocrates.

Ca ne vous a pas empch de manifester contre John Kennedy, dont vous tiezpourtant proche. Il circule dailleurs une anecdote savoureuse propos de votreparticipation une manifestation devant la Maison-Blanche en 1962. Cest unelgende ou la ralit ?

Vous faites srement rfrence la journe du 28 avril. Voil ce qui sest pass. Ava et moi

avions reu deux invitations pour se rendre Washington ce jour-l. La premire manaitdopposants la bombe atomique, qui nous demandait de nous joindre la manifestationprvue devant la Maison-Blanche, en raison de la dcision du Prsident Kennedy dereprendre les essais nuclaires dans latmosphre. La seconde invitation venait justement du


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couple Kennedy, qui nous priait dassister une rception donne en lhonneur descientifiques.

Quavez-vous fait ?

Eh bien nous avons dfil devant la Maison-Blanche avec des pancartes rclamant la fin desessais nuclaires. A la fin de la journe, nous avons rang nos pancartes et nous avonstravers la pelouse pour assister la rception. Lorsque nous sommes arrivs, JackieKennedy sest penche vers moi et ma dit : "Croyez-vous quil est bien raisonnable dedfiler comme vous le faites devant la Maison-Blanche ? Chaque fois que Caroline [la filledu Prsident, alors ge de 5 ans] vous voit dans une manifestation, elle me demande,Quest ce que papa a fait de mal ?". A ce moment, John Kennedy sest approch et ma dit voix basse : "Jespre que vous continuerez longtemps exprimer vos opinions."

Votre bureau est encombr darticles et de livres. Sur quoi travailliez-vous avant monarrive ?

Sur des questions de physique nuclaire, la structure du noyau atomique. Je ne suis passatisfait de ce que les spcialistes de physique nuclaire disent sur la structure du noyau, les

niveaux dnergie. Et jai dvelopp une hypothse alternative ma thorie personnelle dela structure nuclaire. Jai publi 3 ou 4 articles dans Proceedings of the National Academyof Sciences et jai mme russi en placer 1 ou 2 dans des revues de physique. Mais lesphysiciens les ignorent, ils ne sy intressent pas. Un peu comme les mdecins ignorent lesvitamines !

Propos recueillis Gorda (Californie), le 14 avril 1994.

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