mystiques franciscains - exultet

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MYSTIQUESFRANCISCAINS

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MYSTIQUESFRANCISCAINS

Florilège

TexteschoisisetprésentésparIvanGobry

EditionsArtège

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Tueslabeauté.Tueslapaix.Tuesnotreprotecteur.Tuesgardienetdéfenseur.Tueslaforce.Tueslerafraîchissement.Tuesnotreespérance.Tuesnotrefoi.Tuesnotregrandedouceur.Tuesnotrevieéternelle,grandetadmirableSeigneur,Dieutout-puissant,miséricordieuxSauveur.

Cantiquedescréatures

Très-Haut,tout-puissant,bonSeigneur,à toi sont les louanges, la gloire, l’honneur et toute

bénédiction;àtoiseul,Très-Haut,ceshommagessontdus,etnulhommen’estdignedetenommer.Louésois-tu,monSeigneur,avectoutestescréatures,spécialementmessirefrèresoleil,quifaitlejouretparquitunouséclaires;etilestbeauetrayonnant,avecgrandesplendeur;detoi,Très-Haut,ilportesignification.Louésois-tu,monSeigneur,poursœurluneetlesétoiles:dans les Cieux tu les as formées, claires, précieuses et

belles.Louésois-tu,monSeigneur,pourfrèreventetpourl’airetlenuage,etleCielclairettouttemps,parlesquelsàtescréaturestudonneslesoutien.Louésois-tu,monSeigneur,poursœureau,

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quiestfortutile,ethumble,etprécieuseetchaste.Louésois-tu,monSeigneur,pourfrèrefeu,parquituéclaireslanuit,etilestbeau,etjoyeux,etrobusteetfort.Loué sois-tu,monSeigneur, pour notrematernelle sœur la

terre,quinousporteetnousmène,etquiproduitlesfruitsdiversaveclesfleurscoloréesetl’herbe.Louésois-tu,monSeigneur,pourceuxquipardonnentpour

tonamour,etquisubissentinjusticeettribulation;etbienheureuxceuxquipersévèrentdanslapaix,carpartoi,Très-Haut,ilssontcouronnés!Loué sois-tu, mon Seigneur, pour notre sœur la mort

corporelle,àquinulhommevivantnepeutéchapper;malheureuxceux-làseulsquimeurentenpéchémortel;mais bienheureux ceux qui ont accompli tes très saintes

volontés,carlasecondemortnepourraleurnuire.LouezetbénissezmonSeigneur,etremerciez-leetservez-le

avecgrandehumilité.

Traduitdel’ombrienparIvanGobry

Testament

Le Seigneur m’a fait la grâce à moi, frère François, decommencerainsiàfairepénitence.Lorsquej’étaisdanslepéché,il m’était trop amer de voir les lépreux,mais le Seigneur lui-

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mêmeme conduisit parmi eux et je pratiquai lamiséricorde àleurégard.Etenlesquittant,cequim’avaitsembléamers’étaitchangé pour moi en douceur pour l’âme et pour le corps. Etensuite,j’attendispeuetjequittailemonde.

EtleSeigneurmedonnaunetellefoidansleséglises,quejel’yadoraisainsisimplementendisant:«Noust’adorons,ôtrèssaintSeigneurJésus-Christ,danstoutesteséglisesquisontdanslemonde entier, et nous te bénissons parce que, par ta saintecroix, tuasracheté lemonde».Ensuite, leSeigneurmedonnatantdefoidanslesprêtresquiviventselonlaformedelasainteÉglise Romaine, à cause de leur sacerdoce, que s’ils mepersécutaient, je veux avoir recours à eux. Et quand j’auraisautantdesagessequeSalomon,si je trouvaisdans lesiècledepauvrespetitsprêtres,jeneveuxpascontreleurvolontéprêcherdanslesparoissesoùilsdemeurent.Cesmêmesprêtres,ettousles autres, je veux les craindre, les aimer, les honorer commemesseigneurs.EtjeneveuxpointtenircomptedeleurspéchésparcequejediscerneeneuxleFilsdeDieu,etqu’ilssontmesseigneurs.Et voici pourquoi j’agis de la sorte : c’est qu’en cemonde jenevois riende sensibledumêmeFilsdeDieuTrès-Haut, que son très saint corps et son très saint sang, qu’ilsreçoiventetqu’euxseulsadministrentauxautres.Cestrèssaintsmystères,jeveuxpar-dessustoutleshonoreretlesvénéreretlesplacer dans des lieux précieux.Quant aux très saints noms etaux paroles de l’Écriture, partout où je les trouverai dans deslieux inconvenants, je veux les recueillir et je prie qu’on lesrecueille et qu’on les place en un lieu convenable. Tous lesthéologiens et dispensateurs des très saintes paroles de Dieu,nous devons les honorer et les vénérer comme étant ceux quinouscommuniquentl’espritetlavie.

Aprèsque leSeigneurm’eutdonnédesfrères,personnenememontraitcequejedevaisfaire;maisleTrès-Hautlui-même

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ademeilleurenchaquechose,tedonneradanssabienveillancebeaucoupdefruitsdeconsolation,quandserontvenusletempsetlasaison».

UnfrèreinterrogealefrèreGillesenluidisant:«Père,quelremèdedois-jeprendrepourpouvoirm’adonneràlaprièreplusvolontiers,avecplusdedésiretplusdeferveur?Carquandjeveuxm’adonnerà laprière, jesuisendurci,paresseux,arideetsansdévotion».FrèreGilles lui réponditences termes :«Unroiadeuxserviteurs,l’unadesarmespourpouvoircombattreetl’autren’aaucunearmure;touslesdeuxveulententrerdanslabataillepourcombattrecontrelesennemisduroi.Celuiquiestarméentredanslabatailleetcombatvaillamment;maisl’autrequiestdésarméditàsonSeigneur:«MonSeigneur,tuvoisquejesuisnuetsansarmes,maisparamourpourtoi,jeveuxentrervolontiers dans la bataille et combattre, désarmé comme je lesuis».Alors,lebonroi,voyantl’amourdesonfidèleserviteur,ditàsesministres :«Allezavecmonserviteuret revêtez-ledetoutes ces armes qui lui sont nécessaires pour pouvoircombattre,afinqu’ilpuisseentrerensécuritédanslabataille,etmarquez toutes les armes de mon sceau royal, afin qu’on lereconnaisse pour mon fidèle chevalier ». Et c’est ainsi qu’ilarrivesouventàl’hommequandilvaprier,c’est-à-direqu’ilsetrouve sans dévotion, paresseux et l’âme endurcie ; maispourtantilfaiteffortet,pourl’amourduSeigneur,ilentredanslabataillede laprière,etalorsnotreRoietSeigneur,pleindebénignité, voyant l’effort de son chevalier, lui donne, par lesmains de ses ministres les anges, la dévotion, la ferveur et labonnevolonté.

Traductiond’A.Masseron

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BienheureuxJeanParenti†1232

Le Sacrum Commercium, ou Mariage mystique, est unopusculeécriten1227,doncpendantl’annéequisuivitlamortdesaintFrançois,c’estdirequ’ils’agitlàd’unmonumenttoutàfait primitif de la spiritualité franciscaine. Il célèbre, dans lestyle galant des troubadours – rehaussé par l’interprétationallégorique de l’Écriture – l’union contractée entre saintFrançois et Dame Pauvreté. Il exerça une influence sur denombreux écrivains postérieurs, parmi lesquels Hubertin deCasale.

On ne sait pas exactement qui rédigea cet ouvrage.On l’aattribué tantôt à saint Antoine de Padoue, tantôt à tel ou telgénéraldel’Ordre.L’opinionlaplusvraisemblableestcelledusavantP.Édouardd’Alençon,quiestimequel’auteurduSacrumCommercium est Jean Parenti. Celui-ci, juriste florentin,gouverna l’ordre de 1227 à 1232, c’est-à-dire entre les deuxgénéralatsd’Élie.Ilfutunhommepieuxetardemmentzélépourl’espritdesaintFrançois.

PrièredesfrèresmineursàDamePauvreté

Nousvenonsàtoi,ônotreSouveraine,etnoustesupplionsde nous recevoir dans la paix. Nous aspirons à devenir lesserviteurs du Seigneur des vertus, car il est le Roi de Gloire.Nous avons ouï dire que tu es la Reine des vertus, et nousl’avons apprispar expérience.C’est pourquoi, prosternés à tes

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pieds, nous t’implorons humblement, pour que tu daignes êtreavecnousetquetusoispournous,lavoiequiconduitauRoideGloire;tuasétépourluicettevoielorsqu’ilaconsentiàvisiter,venant d’en haut, ceux qui sont assis dans les ténèbres et àl’ombredelamort.Nouslesavons,àtoiestlapuissance,àtoila royauté ; au-dessus de toutes les vertus, tu es établie par leRoi des rois,Reine et souveraine.Fais seulement la paix avecnousetnousseronssauvés:partoi,nousrecevraceluiquipartoi nous a achetés. Si tu décrètes notre salut, nous seronsaussitôtdélivrés.

CarleRoidesrois,lui-même,leSeigneurdesseigneurs,lecréateurduCieletdelaterre,s’estéprisdetabeautéetdetoncharme.AlorsqueceRoiétaitdanssapropreintimité,richeetglorieuxdanssonRoyaume,ilalaissésademeureetabandonnésonhéritage:carlagloireetlesrichessessontdanssamaison;maisquittantsontrôneroyal,il t’arecherchéedanstoutl’éclatdesadignité.

Ta propre dignité est donc grande et ton élévationincomparable puisque, délaissant tous les ordres des anges etl’immensitédesvertusdontlafouleremplissaitleCiel,ilvinttechercherdans la région laplusvilede la terre, làoù tugisais,danslaboueetl’ordure,danslesténèbresetl’ombredelamort.Tuétaisuneabjectionparmitouslesvivants;toustefuyaientet,autant qu’il leur était possible, ils t’échappaient. Sans doutecertainsnepouvaientcomplètementtefuir,maistuneleurétaispas moins odieuse et haïssable. Mais quand le souveraindominateurfutvenu,ett’eutassumée,ilexaltatonvisageparmiles tribuset lespeuples, teceignitd’unecouronnecommesonépouseet t’élevaàunehauteur supérieureauxnuages…Ainsidevenu amoureux de ta beauté, le Fils du Père Très-Haut,s’unissantàtoiseuleencemonde,tetrouvafidèleentretoutes.

Avant sa venue de sa lumineuse patrie à la terre, tu lui as

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parellenousavonsobtenumiséricorde.Plaçantenelle,aprèsleChrist,saconfiance,illachoisitcommepatronnepourluietlessienset,ensonhonneur,iljeûnaitavecgrandeferveurdelafêtedes apôtres Pierre et Paul jusqu’à l’Assomption. Un liend’amour indissoluble l’attachait aux anges dont l’ardeurmerveilleuse les jette en extase devant Dieu et enflamme lesélus;pardévotionpoureux,ilmenaituncarêmedejeûneetdeprièredurant lesquarante joursquisuivent l’Assomptionde laglorieuse Vierge ; saint Michel surtout, dont le rôle estd’introduire les âmes en paradis, était l’objet d’une dévotionspéciale,àcausedugranddésirqu’avaitlesaintdevoirsauvéstouslesprédestinés.

Lesouvenirdessaints,cespierresdefeu,intensifiaitencorel’incendied’amourdont ilbrûlaitpourDieu ; ilaimait surtoutlesapôtres,enparticulierPierreetPaul,àcausedeleurferventamour du Christ ; en leur honneur il offrait au Seigneur uncarêmespécial.CepauvreduChristnepossédaitquesoncorpsetsonâme,lesseulesobolesqu’ilputdonnerdanssonamour,mais il les offrait à chaque instant, par amour du Christ, ilimmolaitcontinuellementsoncorpsen jeûnesrigoureuxetsonâme en désirs passionnés, offrant ainsi l’holocauste dans lesparvis extérieurs et faisant brûler l’encens à l’intérieur dutemple.

Mais l’ardeur de cet amour sans limite qui le portait versDieu eut pour résultat d’augmenter aussi sa tendresseaffectueusepourtousceuxquiparticipaientavecluidelanatureet de la grâce. Les sentiments tout naturels de son cœursuffisaientdéjà à le rendre fraternelpour toute créature ; il nefautpass’étonnerquesonamourduChristl’aitrendudavantageencore le frèredeceuxquiportent l’imageduCréateuretsontrachetésdesonsang.IlneseconsidéraitcommeamiduChristques’ilprenaitsoindesâmesrachetéesparlui.

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L’incendie d’amour qui le dévorait le rendit jaloux dutriomphe glorieux des saints martyrs dont personne ne putéteindrelaflammed’amourniabattrelecourage.Ilauraitvoululuiaussi,embrasédumêmeparfaitamourquibannitlacrainte,s’offrir au Seigneur comme une hostie vivante immolée par lemartyre,afinderevaloirauChristlamortqu’ilsubitpournousetdeprovoquerleshommesàl’amourdeDieu.

EnamiduChrist,ilpoursuivitpourlui,detoutessesforces,sa recherche de lamort, sans cependant la trouver ; il gardaitainsilemérited’unmartyre,etnéanmoinsconservaitlaviepourrecevoirplustard,decemartyre,lesceauetlesymbole:unfeudivin si dévorant brûla son cœur qu’il finit par marquervisiblementsachair.Ôvraimentheureuxtoidontlachair,sanspasserparleferd’untyran,n’enfutpaspourautantprivéedelaressemblanceavecl’Agneauimmolé!Ôvraimentetpleinementheureux,« toidont leglaivedupersécuteurn’apasôté lavie,maisquin’aspasétéfrustrépourtantdelapalmedumartyre!»

TraduitdulatinparleP.DamienVorreux

L’amourduSacré-Cœur

Ilspercèrentettranspercèrentnonseulementsesmains,maissespieds;aveclalancedelafureurilstranspercèrentsonflancet lesprofondeursdesoncœurtrèssaintdéjàtranspercéparlalancedel’amour.«Tuasblessémoncœur,dit-il,masœur,monépouse, tu as blessémon cœur ».Ô Jésus tout amoureux, tonépouse, ta sœur, ton amie a déjà blessé ton cœur : était-ilnécessairequ’illefûtencorepartesennemis?S’ilestblessé,le cœur du très doux Jésus, ou plutôt puisqu’il est blessé,pourquoilemeurtrird’unesecondeblessure?Ignorez-vousqu’il

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suffit d’une seule blessure pour que le cœur meure, et qu’ildevientalorscommeinsensible?

Il estmortde sablessure, le cœurde Jésusmon trèsdouxSeigneur, une blessure d’amour a ravi le cœur de Jésus monÉpoux,unemortd’amourl’aemporté.Commentuneautremortentrera-t-elle?«L’amourestfortcommelamort»;envérité,ilestmêmeplusfortquelamort.Iln’estpaspossibled’expulserdelamaisondesoncœurlapremièremort,c’est-à-direl’amourdeceuxquisontmorts,car ilse l’estacquiseparuneblessureinguérissable…

Puisqu’unefoisnoussommesvenusauprèsducœurdutrèsdouxSeigneurJésus,etqu’ilfaitsibond’êtrelà,nousnenoussépareronspasfacilementdeceluidontilestécrit:«Lesnomsdeceuxquitefuientserontécritssurlaterre».Qu’ensera-t-ildoncdeceuxqui t’approcheront?»«Allonsà toi,est-ildit ;alors nous exulterons et nous nous réjouirons en toi, en noussouvenant de ton cœur ».Oh, comme il est bon et réjouissantd’habiter en ce cœur ! Ton cœur, ô parfait Jésus, est le bontrésor,laperleprécieusequenousavonstrouvéedanslechamplabouré de ton corps. Qui donc rejetterait cette perle ? Jedonneraiplutôttoutesmesperles,j’échangeraicontreelletoutesmes pensées etmes affections et jeme l’achèterai, jetant toutsoucidanslecœurdubonJésusquisanstromperiemenourrira.

C’est dans ce temple, dans ce Saint des Saints, dans cettearche d’alliance, que j’adorerai et que je louerai le nom duSeigneur,endisantavecDavid:«J’aitrouvéuncœurpourprierDieu».Etmoi j’ai trouvé lecœurduRoi,monSeigneur,monfrère etmon ami, le très tendre Jésus : comment ne prierais-jepas?Jenecesseraiplusdeprier.Carsoncœurestàmoi,jeledisavecaudace.SileChristestmonchef,ouplutôtparcequ’ill’est,commentcequiestàmonchefneserait-ilpasàmoi?Demêmeque les yeuxdema tête corporelle sont vraiment àmoi,

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engrandeurdedignitédansleshommes,engrandeurdemalignitédanslesdémons,car lesAngesontpermisqueleurSeigneurfutcrucifié, les

hommessontestimésàceprixquepoureuxleFilsdeDieufutcrucifié,maisàlasuggestiondesdémons.

3.–Lemonde,esclavedessens,parcequ’ilestun lieuoùrègnent:

la cécité, puisqu’il n’a pas connu la vraie et suprêmelumière,

la stérilité, puisqu’il a méprisé Jésus-Christ commeinfécond,

l’iniquité, puisqu’il a condamnéetmis àmort sonDieu etSeigneuramoureuxetinnocent,

4.–leparadisàjamaisdésirable,puisqu’enluisevoient:lefaîtedetoutegloire,ledéploiementdetouteallégresse,l’amasdetouteopulence;car Dieu, pour nous restituer cette habitation, s’est fait

hommevil,miséreuxetpauvre:etlàlahauteuracceptal’abjection,lajusticesubitlacondamnation,l’opulenceassumal’indigence:LeTrès-Hautempereureneffetacceptal’abjecteservitude,pourquenousfussionssublimésengloire:le très juste jugesubit lacondamnationlaplussévèrepour

quenousfussionsjustifiésdetoutecoulpe;letrèsopulentSeigneurassumal’extrêmepauvretépourque

nousfussionsenrichisdesonabondance.5. – L’enfer toujours horrible étant un lieu rempli

d’indigence, de bassesse, d’ignominie, de calamité et de toutemisère.

S’il fut nécessaire que le Christ souffrit pour relever

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l’hommedupéchéetysatisfaire,combienplusfortementsera-t-il nécessaire que les damnés subissent tous ces maux pour lajusterétributiondeleurdetteetsacompensation!

6. – La vertu véritablement louable, savoir selon son prix,selonsonéclat,selonsonfruit:

selon son prix, car le Christ donna sa vie plutôt que decontredireàlavertu;

selon son éclat, car il resplendissait au milieu même desoutrages;

selonsonfruit,parcequ’unseulexerciceparfaitdelavertuspolial’enfer,rouvritleCiel,restauralaterre.

7. – Le péché individuellement imputable et combiendétestable,puisqu’àsarançonestexigé:

unprixsilourd,uneexpiationsigrande,unremèdesiamer;tantettantqu’ilafalluqu’àysatisfaire,sevouâtDieuuni

enunitédepersonneàl’hommeleplusnoble,par le plus abject abaissement, à cause de l’arrogance, car

nullen’estplussuperbe;par la plus dépouillée pauvreté, à cause de la cupidité, car

nullen’estplusavide;par la plus âpre acerbité, à cause de la lascivité, car nulle

n’estplusdissolue.Voilà donc comment toutes choses en la croix se

manifestent;touteschoseseneffetàcesSeptseréduisent.D’oùlacroixest laclé, laporte, lavoieet lasplendeurde lavérité.Celui qui la prend et la suit de la manière assignée ici, nemarchepasdanslesténèbres,maisilauralaLumièredevie.

IIILadouceurdelacharité

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Lesdegrésd’accèsàladouceurdecharitéparlaconceptiondel’EspritSaintsontlessuivants:

lavigilancesoucieuse,laconfianceconfortante,ledésirenflammé,l’ardeursoulevante,lacomplaisanceaccroissante,laliessedélectable,l’adhésionunissante;etdanscetordretudoislesparcourir,toiquiveuxatteindre

parlacharitéàlaperfectionetàl’amourdel’EspritSaint.Ilestnécessaireeneffet:

1.–quelavigilancetesoucieàcausedelacéléritédelavenuede l’Épouxde sorteque tupuisses faire tiennes cesparolesdupsalmiste:

« Dieu, mon Dieu, dès le matin je veille et t’attends, et cesautresduCantique:jedorsetmoncœurveille,etcelles-ciduProphète:monâmet’adésirédanslanuitetmonespritdansmesentraillesdèslematinaveillépourtoi.»

2.–quelaconfianceteréconforteàcausedelacertitudedelavenue de l’Époux ; en sorte que tu puisses dire : « En toi,Seigneur, j’ai espéré, je ne serai jamais confondu, et avecJob:alorsqu’ilmetuerait,j’espéreraisencoreenlui».

3.–queledésirt’enflamme,àcausedeladouceurdel’Époux,en sorte que tu répètes avec le psaume : « Comme le cerfdésire l’eaudes fontaines,ainsimonâmesoupirevers toi,ôDieu,ouavec leCantique : fortcomme lamortest l’amour,ouencore:jelanguisd’amour…»

4.–quel’ardeurtesoulèveàcausedelasublimitédel’Époux,et que tu dises : « Qu’ils sont aimés tes tabernacles, Dieupuissant,etavec l’épouse :entraîne-moi, jecourrai,ouavecJob:lamortm’estàdésir».

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continuelle méditation de la Passion du Christ élèvera tonintelligence ; ce que tu dois faire,méditer ou ressentir, elle tel’indiquera ; elle t’enflammerapour l’effort ; elle te feraaimerl’humiliation, le mépris et la peine ; elle réglera ta penséecommetaparoleettonaction.

Ô Passion désirable ! Ô mort admirable ! Quoi de plusétonnantquelamortdonnelavie,quelesblessuresguérissent,que le sang blanchisse et purifie, que la plus vive douleurapportelaplussuavedouceur,quelecôtéouvertunisselecœuraucœur!Necessepasd’êtrestupéfaitquandlesoleilobscurciillumineplusencore,quandlefeuéteintbrûledavantage,quandla Passion ignominieuse apporte la gloire. Fait vraimentmerveilleux:surlacroix,leChristassoifféenivre,leChristnupare de vêtements la vertu ; sesmains clouées à la croix nousdélivrent,sespiedstranspercésnousfontcourir;enexpirantilinsufflelavie,enmourantsurleboisilnousappelleauCiel.

ÔPassionaimable,quitransformeceluiquilamédite,etnele rend pas seulement angélique, mais divin ! Demeurant parcetteméditationdanslessouffrancesduChrist,ilneporteplusattention à lui-même, mais à Dieu seul ; toujours il voit sonSeigneur souffrant, et veut avec lui se charger de la croix ; ilporteensoncœurceluiquitientdanssamainleCieletlaterre,etpourlui,acceptetoutfardeaud’uncœurléger;ilveutavecluiêtrecouronnéd’épinesetreçoitpourcouronne,l’espérancedelagloire;ilveutavecluigrelottersansvêtementssurlebois,etilestbrûlédel’immenseardeurdel’amour;ilveutavecluigoûterlevinaigre,et ilboitunvind’uneinénarrabledouceur; ilveuts’étendre avec lui sur la croix et recevoir les outrages, et lesanges l’honorent, et la bienheureuseVierge l’adopte pour fils.AvecleChristilveuts’attrister,etlevoilàdanslajoie;avecluiil veut subir l’affliction : et il en reçoit d’abondantesconsolations;àsasouffranceilveutunirsasouffrance:etilest

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transportéd’allégresse;avecleChristilveutpendreàlacroix:etleChristl’embrasseavecunemerveilleusedouceur;avecluiilveutinclinersonvisagemarquéparl’épouvantedelamort;etleChrist,relevantlatête,lebaised’unsuavebaiser.

Ômortaimable,ômortdélicieuse!Oh,quen’ai-jeétéàlaplacedecettecroix,clouéauChristparmesmainsetparmespieds ! J’aurais sûrement dit à Joseph d’Arimathie : « Nemel’enlèvepas,maisensevelis-moiavecluidanslesépulcre;jeneveuxplusêtreséparédelui».Maispuisquejenepuisagirainsiavecmoncorps,aumoinsjeveuxlefaireavecmoncœur.Ilestbondedemeureravec lui ; en lui jeveuxdresser trois tentes :unedans sesmains,uneautredans sespiedsetune troisième,perpétuelle,danssoncôté:là,jeveuxreposeretdormir,mangeretboire,lireetprier.Làjeparleraiàsoncœuretj’obtiendraideluicequejevoudrai.Cefaisant,jesuivrailestracesdematrèsdouce Mère dont l’âme a été transpercée par le glaive de laPassiondesonFils.Blessé,jeluiparleraitoujourssûrement,etje l’inclinerai à mon vouloir. Et non seulement j’apparaîtraicrucifiéavecsonFils,maisrevenantàlacrèche,jeseraicouché,petit enfant, avec lui, et je pourrai ainsi avec sonFils boire lelaitdesonsein.MêlantlelaitdelamèreaveclesangduFils,jem’enferaiundélicieuxbreuvage.

ÔblessurestoutamoureusesdemonSeigneurJésus-Christ!Jepénétraiunjourenelleslesyeuxouverts,etmesyeuxfurentremplisdesang;n’yvoyantplus,jecommençaiàm’avancerentâtant des mains jusqu’à ce que je parvienne aux intimesentraillesdesacharité;j’enfusalorsentourédetoutesparts,etjenepusrevenir.C’estdonclàquej’habite;làjemenourrisdela nourriture dont il se nourrit, et là je m’enivre de sonbreuvage ; là j’abonde d’une telle douceur que je ne puis latraduire. Celui qui pour les pécheurs habitait dans le seinvirginal,daigneaujourd’huimeporter,moimisérable,dansses

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propres entrailles. Mais je redoute que vienne le jour del’enfantement qui me déposséderait des délices dont je jouis.Sans doute, s’il memet aumonde, il devra comme unemère,m’allaiterdesonsein,melaverdesesmains,meporterdanssesbras,meconsolerdesesbaisers,meréchauffersursapoitrine.Oh,jesaisbiencequejeferai:qu’ilmesortedeluiautantdefois qu’il le voudra, je sais que ses blessures sont toujoursouvertes;parellesjepénétreraiànouveaudanssonsein,etj’yretournerai chaque fois, jusqu’à ce que je lui soisinséparablementuni.

Ôaveuglementdesenfantsd’Adamquinesaventpasentrerdans leChristparsesblessures! Ils travaillentenvainau-delàde leurs forces, alors que sont ouvertes les portes du repos.Ignorez-vous que le Christ est la joie des bienheureux ?Pourquoi donc tardez-vous d’entrer dans cette joie par lesouverturesdesoncorps?Commentperdez-vouslaraison?Labéatitudedesangess’offreàvous,lemurd’enceinteestrompuet vous négligez d’entrer ? Peut-être attendez-vous que votrecorps tombe en poussière, vous figurant que l’âme ne peut encetteviereposerdansleChrist?Maiscrois-moi,ôhomme,situt’efforces de pénétrer en lui par ces ouvertures étroites, nonseulementtonâme,maistoncorpsaussitrouveralereposetunemerveilleuse douceur ; ce qui est charnel et tend vers la chairdeviendra,grâceàcettepénétrationdanslesblessures,spirituelàtelpoint,qu’ilcompterapourrientouslesplaisirs,saufceuxqu’ilgoûtelà.Ilpourramêmearriverquel’âme,parobéissanceouutilité,estimequ’ilfautseretirer,alorsquelachair,alléchéeparcettedouceur,soutiendraqu’ilfautrester.Or,nelecrois-tupas,silachairressentunetelledouceur,enquellesuavitél’âmenesera-t-ellepasplongée,ellequi,parcesouvertures,estunieaucœurduChrist? Jenepuiscertes te l’exprimer,mais tentel’expérience,ettulesauras.

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perte. Et en vérité, ne tremblais-tu pas ? Ton visage nerougissait-ilpasdehontesituvenaisàrencontrerquelquefrèredel’OrdredetonbienheureuxPère,soitàl’église,soitdanslesmaisons,soità travers lesrues?Tun’osais,ensaprésence,niconverser,nit’arrêterchezlesséculiers.

Souviens-toi qu’en préparant ton âme au mépris complet,absolu,detoutornementprofane,jet’aiapprisàm’aimerenteséquestrant avec douceur du commerce, même licite, despersonnesdumonde.

Souviens-toiqu’avec le secoursdemagrâce, tuas réussiàprivertoncorpsdesalimentslespluscommuns,alorsqu’ilétaitaccoutuméauxdélicesdelachair.

Souviens-toiquec’estencoreparmonsecoursquetuaseule courage de le macérer par des jeûnes continuels, que tu asfouléauxpiedsladélicatessedanstesvêtements,enchoisissantavec joie, pour couche, tantôt des sarments, tantôt du bois, etmême des pierres, et le plus souvent la terre nue, sans autreoreillerquelapierre.

Souviens-toi des faveurs signalées dont je t’ai comblée,grâcedecomponction,grâcedes larmes,grâcedecrainte, à telpoint que tu demandais aux frères mineurs, au milieu d’untorrentdelarmes,etplongéedansunocéandedouleur,simoi,toncréateurettonSauveur,jeterecevraisdansmamiséricordeet dansmon saint paradis après tous les crimesdont tu t’étaisrenduecoupable, et tu faisais lamêmequestionauxpersonnesdumonde, leurarrachantdeslarmesà lavuedessanglotsdonttu étais toi-même suffoquée.Rappelle-toi avec quelle douceur,quelle suavité alors, j’adoucis l’amertume de tes larmes en temontrantlesmystèresdemanativitévirginale,lasublimedignitédemaMère Immaculée, et la joie éternelle demes saints.Cesmotifsfurent leprincipedetaconversion,après lamortdetonséducteurquit’aretenue,pourainsidiremalgrétoi,etpendant

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neufans,enchaînéedanslecrimeetledéshonneur.Souviens-toi,pauvrefille,delatraverséedecetétang,seule,

aumilieude lanuit,où l’antiqueennemivoulait tenoyeravecton complice, aumoment où tu te préparais, par tes crimes, àrenouveler les supplices de ma Passion ! Mais ma clémencedivine t’a gardée et tu as été délivrée par une miséricordeinfinie!

Souviens-toiégalementqu’alorsque tu tecomplaisaisdanslemonde,etquetumenaisuneviepleinedeténèbres,deviceset de péchés, je me fis moi-même ton maître, ton guide, ett’inspirai une véritable compassion pour les pauvres et lesaffligés.Je tefisalorsgoûterunesigrandejoiedelasolitude,que tu t’écriaisdansunaccèsdedévotion :«Oh !qu’il feraitbonicipourygoûterlesdélicesdel’oraison!Oh!commeonchanteraitbien ici les louangesdeDieu !Avecquelle sécurité,avecquellepaixonpasseraiticisesjoursdanslapénitence!»

Souviens-toique,malgrélesténèbresquienveloppaienttonâme, tu déplorais ta chute et tu disais à ceux qui te saluaientque,s’ilsconnaissaienttaviehonteuse,nonseulementilsnetesalueraientpas,maisqu’ilsnevoudraientmêmepasteparler.

Souviens-toi qu’après ta conversion, par une faveur toutegratuitedemapart, je t’aiplacée sous laprotectionetdans lacompagnie de deux nobles et pieuses femmes, Marinaria etRanaria.

Souviens-toi qu’alors tu commenças à détester, à méprisercette beauté que tu étais autrefois si habile, si industrieuse àconserver au détriment de ton âme, t’étudiant maintenant à lamépriseretàlarendreméprisableauxautresparlecilice,parlesjeûnes, les pénitences, jusqu’à l’effusion du sang, désirant ladétruireautantqu’ilétaitentonpouvoir.

Souviens-toi enfin que le feu de mon amour t’a tellementtransfiguréeque tuas suppliéavec instance,avec larmes,etde

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toute manière le gardien des frères mineurs de te donner leslivréesdelapénitenceafindet’approcherdemoient’éloignantdusiècle.

LapromesseduChrist

Mafille,demêmequepourlesalutdumondej’aiformémaMère,laTrèsSainteViergeMarie,demême,toutesproportionsgardées, je te choisis pour miroir et mère des pécheurs. Etpuisque, parma grâce, je te destine à êtremagnifique dans leCiel,jeferaidetoiunesaintesurlaterre.Jenedevraispasdire:jeteferai,car,parmoninfiniemiséricorde,tul’esdéjà!Tudisque tu es privée de toute vertu, etmoi, je te dis que tu en esornée.Tudisquetuespauvreparcequejetemanque,etmoijetedisquetupossèdesenmoiuntrésorinfini.Mafille,danslecœurdelaquellejetrouvelerepos,jenetenommepaslelysdemonjardin,maisbiendemonchamp,carleparfumdetesvertuspénétrera ceux mêmes qui sont pourris de vices, et ceux quin’ontpourmoiaucunsentimentsesentirontattirésàl’odeurdetasainteté.Etdemêmequelabriseporteauloinl’odeurdeslys,moi je porterai partout l’odeur de tes vertus… Cesse det’étonnersijemedonneàtoitellequejetetrouve.Tonâmeestdistraite, et tiède en beaucoup de travaux. Contemple sainteMadeleineauprèsdujardindusépulcre : jemesuisprésentéàelle sous la formequ’elle avait demoi dans son esprit. Je t’aifait l’échelledespécheursafinqu’ilsmontentversmoipar lesexemplesdetavie.Ilsimiteronttesabstinences,tesjeûnes,tonhumilité, tesprières, tes tribulationsque tuas supportéespourmoi avec tant d’empressement. Ils imiteront la douceur de tessaintes conversations, lamansuétude qui a été le cachet de tavie.Ilsimiterontl’honnêtetédetesmœursdepuistaconversion,

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etdeMadamelaPauvreté,carl’amourquej’aipourelleestdansl’angoisse, et jenepuisgoûterde repos sanselle.Vous savez,Seigneur, si je l’aime ; or voici qu’elle est assise tristement,repousséedetous,semblableàuneveuve.Lasouverainedetouslespeuplesesttenuepourvileetméprisable;lareinedetouteslesvertusestassisesurlefumieretseplaintdecequetoussesamis l’ont dédaignée et se sont rendus ses ennemis, de cequeceux-làmêmesquil’ontépouséeviolentdepuislongtempslafoijurée.

Souvenez-vous,Seigneur Jésus,quevousêtesdescenduduséjourdesangesici-baspourfairedecettereinevotreépouseetpouravoird’elle,enelleetparelle,desfilsquifussentparfaits.Souvenez-vous de la fidélité de son attachement : votre âmevenaitàpeinedes’uniràvotrecorpsdansleseindelaViergeetdéjà commençaient ses tendres soins. À votre naissance, ellevousreçutdansl’étableetdanslacrècheet,vousaccompagnanttoutau longde lavie, ellevouspriva sibiende touteschosesqu’elleprit soinquevousn’ayezpasmêmeoù reposer la tête.Quandvousavezcommencélaguerredenotrerédemption,ellevints’attacheràvouscommeunécuyerfidèle,ellesetintàvoscôtés au plus fort du combat et ne se retira point quand vosdisciplesprenaientlafuiteoureniaientvotrenom.Enfin,tandisquevotremère,quidumoinsvoussuivitjusqu’auboutetpritsapartdetoutesvosdouleurs,tandisqu’unetellemèreàcausedelahauteurdelacroixnepouvaitplusatteindrejusqu’àvous;encemomentMadamelaPauvretévousembrassaplusétroitementquejamaisets’associaàvotrecrucifiementavecuneâpreardeur.Ellenevoulutpointquevotrecroixsoittravailléeavecsoin,nique les clous soient en nombre suffisant, travaillés et polis ;maisellen’enpréparaquetrois,ellelesfitdursetgrossierspourmieuxaggravervotresupplice.Etpendantquevousmourriezdesoif,cettefidèleépouseeutsoinqu’onvousrefuseunpeud’eau

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et, aidée de satellites impies, elle vous prépara un breuvage siamerquevousavezdûvousborneràenhumectervoslèvres.

Cefutdoncdanslesétroitsembrassementsdecetteépouseque vous avez expiré, et c’est elle encore qui vous rendit lesderniersdevoirs,veillantjalousementàcequevousn’ayezrienàvous,nisépulcre,nionguent,nimêmelinceul,sibienqu’onduttout emprunter. Elle se retrouva à votre résurrection et, tandisqu’au milieu de ses embrassements, vous repreniezglorieusement vie, elle eut soin de vous faire laisser dans lesépulcretoutcequivousavaitétéprêté.ElleestmontéeauCielavec vous, et vous lui avez confié le sceau du Royaume desCieux,dontdoiventêtremarquéslesélusdésireuxdesuivrelessentiersdelaperfection.Oh!quidoncn’aimeraitpasMadamela Pauvreté par-dessus toutes choses ! C’est pourquoi je vousdemandeenvotrenom,ô trèspauvreJésus,à titredeprivilègespécial et perpétuel, de nous donner, à moi et aux miens, lagrâcedene rienposséderenpropresous leCiel,etden’avoirjamais, tant que nous serons sous cette chairmisérable, qu’unusagepauvredubiend’autrui.

TraduitdulatinparMauriceBeaufreton

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JeandeCalvoli

DébutduXIVesiècle

Ce frèremineur,natifdeCalvoli, village situéprèsdeSanGimignao,enToscaneet,peut-être, (maisrienn’estmoinssûr)discipledesaintBonaventure,n’estguèreconnuquedenom.enrevanche, son ouvrage a acquis une célébrité que seulel’Imitation de Jésus-Christ pourrait lui disputer. Il s’agit desMéditations sur laVie duChrist, écrites pour une clarisse, etattribuées jusqu’à la fin du siècle dernier au DocteurSéraphique. Or, seule l’inspiration, c’est-à-dire la dévotion àl’humanité du Christ, pouvait permettre une telle attribution ;car les critères externes ne peuvent l’autoriser, et les critèresinterness’yopposent:lestylefamilierdesMéditationsn’ariendelanoblesse–oudel’emphase–desaintBonaventure,et ledéséquilibre des parties ne ressemble nullement à la rigueurscolastiquedesacomposition.Nousavonslàunauteurquiestplusunimaginatifqu’unintellectuel,etplusundirecteurqu’unprofesseur.

C’est sans doute cette simplicité qui a permis auxMéditations une aussi large diffusion. Elle inspire toute lalittératurespirituelledesdeuxsièclessuivantsetnotamment lafameuseVieduChristdeLudolpheleChartreux,dontlalecturedonnalegoûtdelaconversionàIgnacedeLoyola.

L’ouvrage se réfère constamment à saintBernard, auquel ilempruntesouventdespagesentières.

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vraimentuneautreMagdeleine,etildisaitdévotement:«Jeteprie,monSeigneur,denepasregarderàmespéchés,maispartatrès sainte Passion et par l’effusion de ton précieux Sang, deressuscitermonâmedans lagrâcede tonamour,puisquec’esttoncommandementquenoust’aimionsdetoutnotrecœuretdetoute notre affection, commandement que personne ne peutaccomplir sans ton aide. Aide-moi donc, très aimant Fils deDieu, afin que je t’aime de tout mon cœur et de toutes mesforces».

Et comme frère Jean demeurait ainsi aux pieds de Jésus,prononçantcesparoles,ilfutexaucéparluietrecouvradeluilapremièregrâce,c’est-à-direcelledelaflammedudivinamour,etilsesentittoutrenouveléetconsolé;etsentantqueledondeladivinegrâceétait revenuen lui, ilcommençaà rendregrâceauChristbénietàbaiserdévotementsespieds.Etpuis,commeilse redressait pour regarder le Sauveur en face, le Christ luitenditet luioffritsesmains trèssaintesàbaiser ;etaprèsquefrère Jean les eut baisées, il s’approcha à le toucher de lapoitrinedeJésus,etilétreignitetbaisacettepoitrinetrèssacrée,et pareillement le Christ l’étreignit et le baisa. Et dans cetteétreinteetsesbaisers,frèreJeansentituneodeursidivinequesitous les aromates et toutes les choses odoriférantes dumondeavaient été réunis ensemble, ils eussent paru une puanteur encomparaisondecetteodeur;etfrèreJeanfutalorstoutravienelle,etconsolé,et illuminé,etcetteodeurduraplusieursmoisdanssonâme.

Et dorénavant de sa bouche, abreuvée à la fontaine de ladivinesagessedanslapoitrinesacréeduSauveur,sortaientdesparolesmerveilleuses et célestes, qui transformaient les cœursde qui les entendait et faisaient grand fruit dans les âmes. Etdanslesentierdubois,oùseposèrentlespiedsbénisduChrist,etloinalentour,frèreJeansentaittoujourscetteodeuretvoyait

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cettesplendeur,quandilyallaitlongtempsaprès.Frère Jean, revenant ensuite à lui après ce ravissement, et

alorsquelaprésencecorporelleduChristavaitdisparu,demeurasiilluminédansl’âme,siabîmédanssadivinitéque,bienqu’ilne fût pas un homme lettré par l’étude humaine, il savaitnéanmoinsrésoudreetexpliquerlesquestionslesplussubtilesetlesplushautessurLaTrinitédivine,etlesprofondsmystèresde la sainte Écriture. Et bien des fois ensuite, parlant enprésence du Pape et des cardinaux, des rois, des barons, desmaîtresetdesdocteurs,illesmettaittousengrandestupeurparleshautesparolesetlesprofondessentencesqu’ildisait.

ÀlalouangeduChrist.Amen.

Traduitdel’italienparAlexandreMasseron

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XVe–XVIesiècles

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toninfiniemiséricordeetdetatendresse.ÔmondouxSeigneur,nepermetspasque jemenoiedansceport si sûrde la saintereligion,puisquetum’assuiviesilongtemps,puisquetuaspristant de souci pour m’arracher à la mer agitée de ce mondetrompeur.

Souviens-toi, mon Jésus, combien je t’ai coûté cher !Souviens-toi,Dieupitoyable,duprixquetuaspayé,pourmoipécheresse,aucomptoirdelacroixdouloureuse.Souviens-toi,ômonaimablerédempteur,decequej’aidésiréfaire,etnonpasdeceque j’ai fait. Je suis cepublicainqui,pleindehonte, setientàdistance,et jen’ose levermesyeuxvers leCiel : jemetiens la face contre terre, frappant ma poitrine et disant :« Seigneur, épargne le pécheur que je suis ». Ah, Seigneurpitoyable, reçois dans tes bras ouverts ce fils prodigue, quirevient de loin après avoir dissipé tous tes biens (et non lessiens)envivantdanslepéché:etvoiciquejenesuispasmêmedigne d’être appelé ton esclave ou ta servante, parce que j’aiblessélesâmesrachetéespartonsangprécieux.

Attire-moiàtoipartagrâce,Pèretrèsclément,embrasseetétreins mon âme affligée dans tes bras si doux, comme tu lefaisais aux jours anciens, et visite l’abandonnée. Donne-moi,mon Seigneur, le baiser de cette paix sainte qui excite mesdésirs, et apporte une fin à cette guerremortelle qui duredéjàdepuistroisans.Etsijeneleméritepasparuneautrevoie,quece soitparcellede lamort.MondouxSeigneur, retire-moidecetteviepleinedepérils;arrache-moi,monDieu,auxténèbresde ce monde ; sors-moi de la prison puante de ce misérablecorps.Attire-moiverstoi,ôDieupitoyable,attire-moiverstoi;nemelaisseplusséjournerdanscetexildusiècle: jenepeuxplusy tenir.Toutme repousse : les infirmités, lesdémons, lescréatures,lestribulationsintérieures;toutmerejetteendisant:«Va-t’en,va-t’en,iln’estplustempspourtoideséjournerici».

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Reçois-moi,monDieu,prèsdetoietentoi,carj’yvienssivolontiers,avecunsibonvouloir,quejenepuisl’exprimerpardesmots.Tu le vois, tu le sais,monSeigneurpitoyable.Fais-moi savoir où est ton plus grand honneur jusqu’au jour dujugement, afin que je ne me sépare pas de toi éternellement,véritable et souverain bien, comme je l’ai mérité. Je t’enimputerailagrâceetlamiséricorde,etjechanteraiteslouangeset ta gloire, ô Dieu pitoyable : toi qui vis et règnes dans lessièclesdessiècles.Amen,Amen,Amen.

Letempsdel’épreuve

Il s’en faut que vous puissiez comprendre clairement dansquelle paix et quelle tranquillité, dans quelle douceur et quelamour,dansquelleintimitéetquellefamiliaritéjefusàl’époquedecesaintjubiléspirituel:jemetrouvaisfréquemmentdansdedivins colloques, dans les doux bras du céleste Époux, dansl’amouretlafamiliaritédutendrePèreéternel.Ôtempspleindegrâce,desérénitéetd’attrait,voilàque tu t’es transformépourmoientempête,enobscuritéetenténèbres!Ôpaixinsondablequisurpassetouteexpériencesensible,voilàquetut’eschangéeen guerre meurtrière ! Ô douceur ineffable, voilà que tu esdevenue fiel et amertume !Ô amour quime ravis l’âme, voilàque tu t’es converti en haine cruelle ! Ô amitié, ô familiaritéimpensable,voilàquevousaveztournépourmoiàladiscordeetà l’inimitié ! Ô bras très tendres, vous m’avez laissé tomberd’unetellesublimitédanslesprofondeursdel’enfer!

Hélas !cecoupest troprude!Cen’estpasmerveillesi tut’esbrisée toutentière,ôâmemisérable !Maintenant,pleure ;maintenant,soupireetdis:«Elleestassisedanslatristesse,lareinedesnations,etleslarmescoulentsursesjoues,etiln’ya

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personnepourlaconsoler…»QuepleurentsurmonsortleCielet la terre ; que pleurent sur moi toutes les créaturesspirituelles!Pleurez,ômontrèsaiméPère,sivousn’avezpasun cœur de pierre, sur votre fille inconsolée : « Voyez, etconsidérez… s’il est une douleur semblable à ma douleur ».C’estlàcetteplaiesecrètequidepuissilongtempsmeblesselecœur ; désormais, je vous lamontrerai ; désormais, je vous ladécouvrirai,parcequejenepuispluslacacher,jenepuisplusladissimuler,guérissez-la,sivouslepouvez;sinon,offrez-moivotrecompassion:cemeseraunrafraîchissement.

La patience me devient impossible, la souffrance m’estinsupportable, je sensmesos se consumer de douleur ; j’ai lecœur saoulédepeine et d’amertume. Jeme tienshorsdemoi-même,commeunefolle;cequejemedis,cequejefais,jen’ensaisplusrien.Sipourtantmaparolevientàs’égarer,pardonnez-moi,carmadeviseestcelle-ci:«Autantellefutdanslesdélicesetlagloire,autantellerecevradetourmentsetdelarmes».

Textestraduitsdel’italienparIvanGobry

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SaintPascalBaylon1540–1592

Issu de paysans aragonais, Pascal s’initia à la viecontemplative en exerçant son métier de berger. Refusé unepremière fois par les frères mineurs alcantarins lorsqu’il avaitdix-huit ans, il persévéra dans son projet et fut définitivementadmispareuxsixansplustard.Frèreportierdesoncouvent,ilconnut toute sa vie une prodigieuse réputation de frère despauvres, de thaumaturge, de voyant, de fervent adorateur deJésus Hostie, devant lequel il passait chaque jour plusieursheuresenoraison.

Canoniséen1690,ilfutproclamé,parLéonXIII,patrondescongrèsetœuvreseucharistiques.

On a de lui quelques poèmes et prières, tous écrits enl’honneurduSaint-Sacrement.

Versdévots

Dis-moi,monDieu,pourquoit’envas-tudececœurquetuaimes?–Pécheur,tupourrasmefairerestersituveux.Dis,monDieu,puisquetum’ascrééetesvenumeracheter,etsousformedepaintedonnesàmanger,ett’esfaitl’hôtedemonâme,

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jesaisquetunechasseraspasceluiquetuasadmisàtatable.–Pécheur,tupourrasmefairerestersituveux.MonDieu,puisquejesuisunpetitpauvre,etunpèlerincouard,resteavecmoi,bienqu’ilsoittard.Jet’aireçuenmonmanoir.Net’envapas,tuécarterasdemoilespenséesmauvaises.–Pécheurtupourrasmefairerestersituveux.Net’envapas,lumièreetgloire,reste,Seigneur,resteavecmoipourquej’obtienneavectoimanourriture,mavictoire.Net’envapascartuesoùtunesemblespasquetues.–Pécheurtupourrasmefairerestersituveux.Puisquetumedonneslamain,avectoi,monDieu,jelutterai,jusqu’àcequejemanquedupied;l’amourfragiledumonde,nemelelaisseplusconserverquandtumeverrasdéfaillir.–Pécheurtupourrasmefairerestersituveux.Painvéritablementdivin,arrache-moiàmoi-même,reçois-moi,monDieu,entoi,carentoijevisetenmoijemeurs.

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Nemequittepas,cartumedonnesl’avoirdetesavoirs.–Pécheur,tupourrasmefairerestersituveux.

Prièreavantlacommunion

SeigneurmonDieu,Jésus-Christ,filsduDieuvivant,quiaujourdevotresainteCène,parl’infiniecharitéaveclaquellevousnous avez toujours aimés, avez institué et ordonné le saintSacrementdevotreprécieuxcorpsetdevotre sang trèspurenmémoire de votre très douloureuse Passion, et avez donné àmanger à vos saints apôtres votre chair sacrée et à boire votreprécieux sang ; je vous supplie, Seigneur, et vous demandehumblement de vouloir bien adoucir la dureté demon cœur etmedonnerdeslarmesdecomponction,aveclesquellesjelavedeses péchés mon âme pécheresse ; car j’ai péché jusqu’àaujourd’huidebeaucoupdemanières,c’est-à-direparpensées,parparoles,parregardsetparactions.C’estmafaute,Seigneur,ma grande faute ; mais vraiment je confesse et fermement jecrois en vous, Seigneur, vous pouvez me pardonner tous mespéchésparvotreinfiniebontéetmiséricorde.

Donc, mon doux Seigneur, pardonnez-les moi tous, parcequedetousjemerepens,etj’ailefermeproposdorénavantdemegarderdepécher.ÔmontrèscompatissantSeigneur,donnezàvotreserviteurunetelledévotionqu’ilvousreçoivedansvotregrâce.

Vousavezdit,Seigneur,devotrebouche:«JesuislepainvivantdescenduduCiel:siquelqu’unmangedecepain,ilvivraéternellement ». Ô pain très doux, guérissez le palais demoncœur,pourqu’ilsentelasuavitédevotreamour;guérissez-lede

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L’Âme–QuiaimeDieudemeuregaietjoyeux.L’Ange–QuiaimeDieusehaitlui-mêmeentout.L’Âme–QuiaimeDieusedonneàlui.L’Ange–Ôjubilationducœurquifaitchanterd’amour!L’Âme–Ôdouceurd’amourquiliquéfielecœur!L’Ange–Beausigned’amourquet’apportetonJésus!L’Âme–Ômonbon,mondouxJésus!Sijepuisletrouver,jeveuxétroitementl’embrasser.L’Ange – Oui, étreins-le bien fort, pour qu’il ne s’enfuie

pas!L’Âme – Oh, si je puis le prendre et le mettre dans mon

cœur,jeveuxflamberd’amour!L’Ange–IlestfaciledetenirlebonJésus,pourquilechercheseuletseulleconvoite.L’Âme–MonÉpouxm’appelle!L’Ange–Etquetedit-il?Dis-le,s’ilteplaît!L’Âme–Ilm’étreintlecœur,etnemelaissepasdireceque

je voudrais. C’est pourquoi, je t’en prie, Ange saint et beau,metsfinàl’entretien,sinontumefaismourir.Las!jemesenslanguir,etmoncœurseserre.Las!mavies’enfuit.

Àlaplaieducôté

Tues,ôplaie,larosevermeilleetbelleNéedansleseindemontendreSeigneur.LàtucroîscommedansunebellehumeurQuiestsonsang,ôscintillanteétoile.Jelesaisbien:lalancefutcelleQuidemondouxJésusperçalecœurEnprésencedesamère:ilmeurt,

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Pendantqu’ellelecontemple,laViergeaffligée.EtvraimenttumesemblesunevermeilleroseOuunrubisplusricheetplusbrillantQuientraînetouteâmeàteregarderfixement.Ôplaie,précieuseplusquetoutepierrePourenrichirtouteâmeettoutenationQuitecontempleauseinduCrucifié.

Laudesspirituelles

MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?MonJésus,mondouxAmour,MonJésusesttendreetbeau.IlestleseulquimebrûleEtquim’enflammelecœur.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?EnJésus,jeveuxespérer,Jésusseulementjeveuxsuivre,JésusseuljeveuxécouterSeulmonJésusjeveuxaimer.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?JeneveuxplusentendrepersonneS’ilneparledeJésus;Etdumondejeneveuxplus,Jeveuxêtreàjeundetout.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?Jedéverseraidemesyeux

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Fleuvesetfontaines,etjepleurerai.Toi,monJésus,jet’appelleraiPourdécouvriroùtutetrouves.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?Parlescampagnes,prèsdespasteurs,J’irai,cherchantmonJésus.J’iraipartout,poussantdescris,Exhalantdedoucesardeurs.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?Assisparmilesroncesetlesplantes,Jemetiendraidanslesboisetforêts;ParmilesbêtessauvagesetlesfauvesJ’appelleraiJésusmondouxamant.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?J’appelleraitouteslesbêtesPourlouermoncheramour;J’aimeraiJésusaveclarmes,Jel’appelleraiparmesprières.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?J’appellerailesangelotsgracieuxQui,avecleursgentillesrondes,Accompagnentmesparoles,Joyeux,tendresetmignons.MonJésus,monJésus,Quisuis-je,etquies-tu?J’appellerailesprésherbeuxEtlesfleurettesbleuesetjaunesQuipoussentaufonddesvallées,

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que j’en sois suffisamment reconnaissant. En brûlant d’uneardeur de charité que vous aviez empreinte dansmon cœur, jepoussaidehorscesparoles:«Biens,terre,vieettouteschosesnesontrien».

Toutes les considérations précédentes m’émurentpuissamment à quitter le monde, mais je ne pouvais m’yrésoudre totalement… Après avoir été occupé de laconsidérationducoursdemaviefuture,etcenonsansgrandeanxiété et perplexité d’esprit, après avoir eu recours à votrebonté par de continuelles prières, et finalement après avoirrésolu de faire célébrer trois messes en l’honneur de la trèsSainteTrinité,avecl’intentiondevoussupplierquevotregrâcedaigneme fortifier aupointdeme faire abandonner lemonde,vous,Seigneur,m’avezappelésiclairementàlaperfectiondelavie religieusequenuldouten’endemeuraenmonesprit.Vousm’avez appelé, Seigneur, avec une voix si claire, manifeste etrésonnante, que les fonctions de mon corps et de mon âmecessant d’opérer, je ne pus aucunement résister à une sipuissante et si efficace vocation. Car environ la minuit, étanttoutseuldansmachambreetélevantmonespritversvous…,jeme sentis attiré par vous, etmon esprit si rempli d’une subitelumièresurnaturelleetmavolontéembraséed’unsigrandfeudecharité, qu’étant tout hors de moi, transporté en vous, jedemeurai comme ayant perdu tout sentiment de moi et dumonde, tout ravi par-dessus moi. Auquel ravissement etaberrationdes sens, jeconnusd’unemanière si indiciblevotrevolonté touchant ma vocation, que même si un ange m’étaitapparu visiblement pour me le déclarer, je n’aurais pas su lacomprendre plus parfaitement, ni la croire plus fermement ;tellementqu’avecungrandétonnement,m’émerveillantdevotrebontéetmetrouvanttoutenflammédufeudevotreamour,jenepusme contenir, avec les bras élevés vers le Ciel, de crier en

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proférantcesparoles:«ÔSeigneur,quiestsemblableàvous?Tousmesosdisent:quiestsemblableàvousSeigneur?»

VousavezdistillésiabondammentdevotremainlibéralelaroséeduCieljusqu’aufonddemonâme,queparcemoyen,jepassai presque toute la nuit à penser à vos suavités. Et, metrouvantétonnéetvaincuparl’excèsdevotrebonté,jeprotestai,devantvousettoutevotrecourcéleste,d’abandonnertotalementcemonde, etdedistribuerauxpauvres,qui sontvosmembres,toutcequejepossédais.Delaquellepromessenonseulementjenemerepentisjamais,maisdeplusétantfavoriséparvotregrâcespéciale…,jeneressentisjamaisaucunetentationcontraire.

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JosephduTremblay

1577–1638

Fils d’un Président de la Chambre des Requêtes auParlementdeParis,FrançoisleClercduTremblaysedistinguad’aborddanslacarrièredesarmes.Entréen1599chezlesfrèresmineurs capucins, il devint provincial de Touraine, ce qui luidonnal’occasiond’êtrel’agentderéconciliationentreMariedeMédicis et les Princes. C’est de là que date sa carrièrepolitique:conseillerpersonneldeRichelieu,auquelilauraitdûsuccéder, il eut une influence prépondérante sur la politiqueétrangèredeLouisXIII.

Un tel rôle n’était pas fait pour lui concilier l’esprit desenvieux ni des huguenots, et la réputation de celui qu’onappelaitl’Éminencegriseeutàensouffrir.Maislesbiographess’accordentàluireconnaîtreunevertuéminenteetuneprofondepiété ; prédicateur écouté et confesseur éclairé, plein de zèlepourlaconversiondeshérétiquesetdesinfidèles,ilsedépensaavec autant d’ardeur au service de Dieu qu’au service de sapatrie.

On luidoitnotammentdeux traités : Introductionà laViespirituelle et La Perfection séraphique. Fondateur de lacongrégation du Calvaire, il écrivit pour ces religieuses uneRetraite de dix jours. La doctrine est parfois obscure et lalangueaquelquepeuvieilli.

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épouse,belleàmesyeux,belleauxyeuxde touscesdivinsetséraphiques esprits, belle de grâce et demérite, belle de touteperfectionetincomparableenvertu:cariln’yarienaumonde,nidansleCieldesanges,quipuisseégalertabeauté»;l’éclatet lebrillantqui jaillissentdecebeauvisage,venantà frapperdoucementlesyeux,leséblouissentetlesfontéclipser.«Tuesmabelle,disait ce saint amant, terriblecommeunescadrondesoldatsbienordonnéouunearméebienrangée».Tedirais-jeicique cet épithalame d’amour endure plusieurs sens et souffregrandnombred’explicationsfortdifférentes?Situsuislesenslittéral,tutrouverasqueSalomon,éperdumentamoureux,parleàla fille de Pharaon, sa chère maîtresse, pour les beautés delaquelle il mourait mille fois le jour, lui remettant devant lesyeuxletableaudesesattraitsetlestraitsdesespluscharmantesperfections,pouraucunautredesseinquepourluiravirlecœuretattireraprèsluisesplusamoureuxsoupirs.Situpercesplusavantetquel’envieteprennederomprel’écorcedelalettre,tuconnaîtrasquec’estlechéridenoscœurs,lecœurdeDieu,cechaste Époux de nos âmes, qui dépeint et crayonne au vif lesraresexcellencesdesesépouses.

Ce que l’Époux attribue à son épouse avec mille traitsamoureuxqu’illuijettedanslecœur,pourl’obligeràl’aimer,etles mêmes paranymphes qu’il fait à sa louange, je puis lesattribueretleschanteràlacroixdeJésus,quiestl’épousedesmartyrsd’amouretdetouteslesâmessouffrantes;surhaussantlavoixetredoublantmescrisencettesorte:«Ha!chèrecroix,épouse de mon âme, l’amie de mon cœur, l’unique de mesdésirs,quetuesbelle,etquetuasdereliefpar-dessus toutcequiestdeplusexcellent;belleauxyeuxdeDieu,puisqu’ilestmort entre tesbras ; belle auxyeuxdeshommesetdes anges,puisquepartoiilsontméritélagrâceetlagloire;belleentesfeuillesmaisplusbelleencoreentesfruits,portantsurtonsacré

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branchagelefruitdevieetlesdélicesdetoutleparadis;croixadmirablequi soutient leCiel,qui régit etgouverne lemonde,quipercejusqu’aupluscreuxdel’enfer,croixquigermeledouxfruit des vertus, qui donne la vie auxmorts et le paradis auxâmes criminelles et coupables de l’enfer ; croix bienheureusequi porte le prix et la récompense des âmes souffrantes et quileur sert de miroir pour bien souffrir ; croix honorable etsuradorable,quisertd’ornementàtouteslescréaturesetnes’entrouve une seule qui ne soit enrichie de cette noble marquedepuislamortdeJésus…

Pour la croix de Jésus, tu la portes en plusieurs façons etmanières.La première, lorsque tu le suis et l’accompagnes, deJérusalem auCalvaire, non comme les Juifs qui ne respiraientquecruauté,maiscommeunautreSimon(lequelobéissaitàleurvouloir, partiepar forceetpartiepeut-êtreparpitié) semet endevoir de soulager Jésus-Christ, qu’il voyait presque expirersous lacharged’unsipesant fardeauqueceluide lacroix.LasecondefaçondeporterlacroixdeJésus,c’estlorsquetun’asplusd’yeuxquepourcontemplersesdouleurs,plusdebrasquepourl’étreindreamoureusementencettecroix,plusdecœurquepourl’uniràcecœurcrucifié,plusdemémoirequepourpenserà la douloureuse Passion, ainsi que le pratiquait cette sainteamanteduCantiquequi n’avait desyeuxquepour contemplerson Jésus mourant, des bras que pour l’étreindreamoureusement,decœurnid’affectionquepoursonbien-aiméet pour lui témoigner l’excès de ses plus intimes cordialités :écoute-la parler, et vois si tu as les yeux, les caresses etmignardises qu’elle lui fait. «Mon bien aimé demeurera dansmonseincommeunvaisseauoubouquetdemyrrhe.»

C’est de quoi, cher souffrant, tu dois faire plus d’état,suivant les vestiges de cette sainte épouse et de ces grandsamateurs de la croix, n’ayant rien de plus cher aumonde que

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d’avoiruncontinuelressouvenirdesesdouleursetdeportercevaisseaudemyrrhede la croixde Jésusdans le plus secret detoncœur,soitquetuboives,soitquetumanges,soitquetutereposesettravailles,penseetrepenseàtonamourexpirantsouslepesantfardeaudelacroix…

Puisqu’ilfautmourirdansladouleur,permets,ôâme,avantque jemeure,que je te fassevoirceque lesCieuxnepeuventvoirqu’endeuilet lecrêpesur lesyeux.AllonsmaintenantdecompagnieetmontonsavecJésuslamontagneduCalvaire,pourlàêtrecrucifiéaveclui.Susdonc,chersouffrant,ilesttemps,desuivretonJésusetdefrayerlecheminquelepremierilt’afrayé.Jesais,etilesttrèscertain,quejamaistun’arriverasaprèsluisitunelesuisàlapiste.Hélas!quelenombreestpetitdeceuxqui veulent marcher sur vos pas, et cependant il ne se trouvepersonnequinedésirejouirdevous.

Chacunsaitquedansladextredevotrebéatitudeilyadesplaisirssansnombreetdesjoiessansfin;etpourcetteraisoniln’yapersonnequinedemandelajouissancedevotrebonheur,maispeuetpresquepersonnequiparledevoussuivreouimiterdanslechemindevosdouleurs.Quejenesois,s’ilvousplaît,de ce nombre, et que je vous suive en la vie et en la mort.Maintenantque jesuisarrivéauCalvaireavecvous, faitesquej’ydemeurepourvotreamour;aussibienlaviem’estennuyeuseet,vousvoyantmourirencelieudecharogneetdepuanteur,jene désire plus vivre. Et il faut que je meure avec vous. Maisauparavantqued’expireravecvousencelieu,permettezquej’yfasse ma demeure, pour y voir et contempler le dernier acted’amour,mais le plus excellent que jamais vous ayez pratiquépour le salut des humains. Vous le dites vous-même, quepersonnenepeutproduireaucunacteplusexcellentd’amouretdecharitéqueceluiquidonnesonâmeetsaviepoursesamis;vousdonnezici,monSauveur,etl’âmeetlavie,nonseulement

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lâchetésetmesdoutes,etdeconfieruniquementàlavolontéduSeigneurcequejen’osaisentreprendreenvuedemafaiblesse.

Touscesmotifsm’obligèrentàmesoumettreàcettegrandevertud’obéissance,etjerésolusaunomduTrès-Hautetdemonauguste Reine et Maîtresse de vaincre mes répugnances.J’appellecettevertugrande,nonseulementparcequ’elleoffreàDieucommeunsacrificed’holocaustecequ’ilyadeplusnobledanslacréature,c’est-à-direl’entendement,lepropresentimentetlavolonté,maisaussiparcequ’iln’enestpointquiconduiseplussûrementauvéritablebut,puisqu’enobéissant, lacréaturen’opère plus par elle-même, mais qu’elle opère commel’instrumentdeceluiquilaconduitetladirige…

Jevousglorifieetjevousloue,ôRoideGloire,deceque,paruneffetdevotreadorableprovidence,votremajestéinfinieacachéauxsagesetauxsavantstantdesublimesmystères,etlesarévélésàvotrehumbleservante,quelqueinutilequ’ellesoitàvotreÉglise.Certes,onvous reconnaîtrapour leTout-Puissantetpourl’auteurdecetouvrageavecuneadmirationd’autantplusjustequevousvous serez servid’unpluspauvreetplus faibleinstrument.

Traduitdel’espagnolparlePèreThomasCroset

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BrancatideLauria1612–1693

Né à Lauria en Lucanie, ce célèbre conventuel futsuccessivementmaîtreenthéologie,professeuràl’Universitédela Sapience, consulteur de cinq Congrégations romaines,examinateurduclergéetdesévêques,cardinaletbibliothécairedelasainteÉglise.

Théologienéminent,sonœuvrecapitaleestunCommentairedeladoctrinescotiste,enhuitvolumesin-folio.Maislàoùilsemontre un véritable maître spirituel, c’est dans son traitéintitulé : Huit Opuscules sur l’Oraison chrétienne, dont lasûretédeladoctrineafaitunguideenlamatière.

Àquiestaccordéelacontemplationinfuse?

Cette question est débattue pour la consolation des pieuxfidèles, pour qu’ils ne pensent pas que ceux-là seuls sontparfaitsdans l’Égliseauxquels ilsvoientDieuaccordercedon(delacontemplation),tandisqu’ilsnetrouventpaslaperfectionchezceuxdontilsconstatentl’absencedecedon.

D’autrepart,quoiquelaviecontemplative,autémoignageduSauveur, soit la meilleure – et donc plus parfaite que la vieactive – ce n’est pas pour cela que la perfection chrétienneconsisteenelleseule.Trèsrareseneffetsontceuxquivaquentàlacontemplation,etplusencoreàlacontemplationinfuse,alorsque ceux qui recourent à la méditation sont innombrables. Etpourtant, nous constatons que beaucoup sont canonisés, bien

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que,àleurprocès, ilnesoitpasfaitmentiondecontemplationinfuse : on y trouve toujours leurs vertus héroïques et leursmiracles.

La contemplation infuse est accordée tantôt aux parfaits,tantôtauxnon-parfaits.Aussi,saprésencechezquelqu’unn’estpasunsignedeperfectioncertaine,pasplusquesonabsencenesoitunsignecertaindenonperfectionoud’imperfection.

Lapremièrepreuveenestl’autoritédesaintGrégoire.Voicice qu’il déclare : « La grâce de la contemplation n’est pasdonnée aux plus élevés et refusée aux plus petits. Les plusélevéslareçoiventsouvent,lespluspetitssouvent,plussouventencore les solitaires, et même quelquefois les gens mariés. Sidonc il n’existe pour les fidèles aucun office dont on puisseexclure lagrâcede lacontemplation,n’importequipossèdeaufonddesoncœurlapossibilitéd’êtreilluminéparlalumièredela contemplation… » Si donc cette grâce n’est pas donnéeseulement auxplus élevés, c’est-à-dire auxparfaits,mais aussiauxmoyens, auxpetits et encoreauxÉpoux, ellen’estpasunsigne de perfection chez celui qui la possède, ni un signed’imperfectionchezceluiquinelapossèdepas…

L’un des signes certains de la perfection est celui que leChristnousaindiqué.«Situveuxêtreparfait,va,vendscequetuas,etdonne-leauxpauvres…:puisviens,suis-moi!»C’estcequebeaucoupontfaitetilsfurentparfaits…Riend’étonnantpourpersonnequeDieun’accordepaslacontemplationinfuseàtous ses amis et bien-aimés, quoiqu’ils soient parfaits danstoutes les Vertus ; rien d’étonnant non plus qu’il l’accorde àd’autresmoinsparfaits,etmêmeàceuxquidébutentdanslaviespirituelle, mais que tous admirent ses incompréhensiblesjugements et ses voies inaccessibles, comme lorsque l’Apôtres’écrie:«ÔaltitudedesrichessesdelasagesseetdelasciencedeDieu!»

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fitcomprendreetvoirtouslesbienfaitsetlesgrâcesqu’ilavaitaccordés à mon âme ; et de plus, il me fit connaître que jen’avais encore rien fait de ce que j’avais projeté ; mais qu’ilvoulaitmevoir,paruneœuvredecoopération,collaboreràsespropresactions.Ainsilevoulait-iletensignedecettevolonté,ilvoulaitmêmemesignerdusceaudesessaintesplaies,ensortequejesoissavéritableépouse.

Ànouveaumevintuneimmensedouleurdemesfautes,avecunelumièreparticulièresurl’amourinfinideDieu.Jemetenaisentre la douleur et l’amour, et je voyais, sans voiles, dans lesairs, Jésus crucifié. Je ne puis dire à peu près rien, avec laplume, de ce que j’éprouvai et de ce qui se produisit en cetinstant.Monuniquesouvenir, c’estque jevis sortirdesplaiesdeJésuscinqrayonsardents.Ilss’élancèrentversmoi;l’unseposasurmoncœur,lesautressurmesmainsetsurmespieds.Jeressentis une vive douleur et il me sembla qu’on m’avaittranspercélecœuravecunelanceacérée,lesmainsetlespiedsavec de gros clous. À ce moment j’acquis de plus grandeslumières,maiscomme jenem’ensouviensplusbien, jene lesécrispas.Jésusmeconfirmaencoredansmontitred’épouse,etilmedéclaraque,quellequesoitlagrâcequejeluidemanderaispar l’invocation de ses cinq plaies, je l’obtiendrais. Puis ildisparutsubitement.

Je revins à moi, anxieuse de souffrir, avec une nouvelleconnaissance de moi-même et le désir de la conversion despécheurs.Enmeregardant, jem’aperçus lesbrasétendus,et lacelluleétaitremplied’unegrandelumière.Lablessureducœurétaitouverteetproduisaitunegrandeabondancedesang: j’enressentaisunevivedouleur.Jenepouvaismemouvoirenaucunefaçon,àcausede la souffranceetde ladouleurque j’enduraisauxmainsetauxpieds.Enleurmilieu,tantdessusquedessous,il y avait unepustulegrosse commeunpois.Quand jevis ces

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stigmatesextérieurs,jepleuraibeaucoupet,dufondducœur,jepriai le Seigneur de bien vouloir les cacher aux yeux de tous.MonDieu!quelchagrinmefittoutcela!Dumieuxquejepus,j’essuyai la blessure du cœur et j’effaçai le sang du sol ainsiqu’auxendroitsoùilavaitjailli.

Il me souvient que, subitement, je tombai de nouveau enextase:jevisJésuscrucifié,etilmeditdenepasmechagrinerà causede cela, parceque c’était sa volontéque ces stigmatesrestent exposés à la vue de tous ; ainsi serait confirmé qu’ilétendait ses bienfaits aux ingrats eux-mêmes – dont j’étais –pourvu qu’ils soient disposés de tout leur cœur à sa saintevolonté.

Textestraduitsdel’italienparIvanGobry

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Gaétan-MariedeBergame1672–1753

MarcMigliorini,aprèsdebrillantesétudes juridiques,puisthéologiques, entra dans l’Ordre des frères mineurs capucins,dontilfut l’undesgrandsprédicateurs;cetteexpériencedelaparole lui inspiraunouvragequidevint rapidementclassique :L’Hommeapostoliqueenchaire.

Il avait alors cinquante ans et semblait promis à prolongeravecsuccèsunesibrillantecarrièreoratoire,maisilobtintdeseretirerdansunecelluleetdeconsacreràlaviecontemplativelerestedesavie.Sasolitudeluiinspiradenombreuxouvragesdedévotion, dont Les Pensées et Affections sur la Passion deNotreSeigneurJésus-Christ.

LasouffrancedeJésus

L’intérieur de Jésus-Christ est un sanctuaire fermé,inaccessible à la faiblessedenotre entendement.Que son âmepuisse souffrir quoique intimement unie à la divinité ; que ladivinité ne se contente pas de laisser souffrir son humanitésainte;qu’elleconcouremêmeàaccroîtresessouffrances;queJésus-Christ puisse survivre à des peines si excessives ; qu’ilsoitinfinimentheureuxparlavisiondeDieuetlapossessiondesagloireetenmêmetempssouverainementaffligéàlavued’uneinfinitédetristesobjetsquilepénètrentetl’accablededouleur:ce sont là autant de prodiges et de mystères bien propres àédifiernotrefoi,àaugmenternotreadmiration.Ilestcertainque

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soientparticulièrementrenferméesdanscevœu): l’humilité, lapatience, la charité, l’oraison continuelle, la douceur, lamodestie,laferveurdanslesdivineslouanges,unemortificationgénéraleentoutescirconstances,lafuitedetoutsoulagementetlarecherchedetoutepuresouffrance,lesilence,laprésencedeDieu, l’abnégation perpétuelle de la volonté, qui à l’avenir neseraplusenmonpouvoir,l’ayantlivréeparcevœusigrandqu’ilrenfermetouslesvœux.Voilàl’offrandesansretourquejefaisde tout moi-même à votre divinemajesté, voilàmon sacrifice,acceptez-le, ô mon Dieu, et communiquez-moi la force de lemettre à exécution avec une entière fidélité. Désormais, je neseraipluslibreenquoiquecesoit,maispourtoujoursl’esclavede votre divine majesté. Toutefois, comme je crains que manature cherche parfois à être débarrassée et déliée de cettechaîne d’or, je fais vœu, ô mon Dieu, de ne jamais me fairereleverd’unengagementsidouxetenmêmetempssidifficile.Àgenoux devant votre infinie majesté, je vous conjure par lesmérites infinis du Sang très précieux de Jésus-Christ, notrerédempteur, de me communiquer les forces pour l’observerinviolablement,etlapersévérancepourm’ymaintenirsanstachejusqu’à la fin. « In te Domine speravi, non confundar inaeternum».

Amen.

Textestraduitsdel’italienparleP.LadislasdeVannes

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AmbroisedeLombez1708–1778

Ambroise de Lombez est, avec Benoît de Canfeld, le plusgrandnomparmilesmaîtresspirituelscapucins.Sansdouten’a-t-ilpastrouvéautantdelecteursdesonvivant,etnepeut-ilfairefiguredechefdefile;maisalorsqueCanfeldetsonécolenousapparaissent aujourd’hui bien surannés, Lombez nous offre,après deux siècles, une langue rayonnante de fraîcheur et dejeunesse,quin’endonnequeplusdereliefàlaplénitudedesadoctrine.Cettedoubleactualitédumessageetdustyleluiassureaujourd’huimaintlecteurquirenonceauxsubtilitésfleuriesdetantd’ouvragescontemporainsouantérieurs.

DesonnomAmbroisedeLapeyrie, ilnaquitàLombez,enArmagnac,le20mars1708,entrachezlescapucinsàseizeanset,malgrélesdifférenteschargesqu’ilremplitdanssonOrdre:maître des novices, commissaire, définiteur, visiteur, rayonnasurtout par le ministère de la confession et de la direction. Ilmourutenodeurdesaintetéle25octobre1778.

IlpublianotammentdesLettresspirituelles,unTraitédelaJoie de l’Âme chrétienne, une Explication sur lesCommandements de Dieu, unDiscours sur l’État religieux ;maissonouvragelepluscélèbreest,sanscontredit,leTraitédelaPaixintérieure,parlequeliltentedeconduirelesâmesàunesérénitéàlafoisfranciscaineetsalésienne.

Prièredansl’ariditéspirituelle

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Seigneur, me voici devant vous sans réflexion, sanssentiment, comme un animal stupide ; et cependant je ne merebute pas, puisque vous ne me rebutez point vous-même. Jeveux persévérer dans l’oraison et, si je ne puis faire beaucouppour vous, du moins je me tiendrai devant vous. Je vousglorifieraiparmessouffrances, si jene lepuisparune ferveursensible. Je hais de toutmon cœur les péchés, les négligencesquivouséloignentdemoi;maisj’enreçoisvolontierslapeine.Quand je ne serais point coupable, je voudrais toujours êtresoumis. Votre volonté toujours adorable me rendra précieusesjusqu’àvosrigueurs.J’adoreraivotresouveraineté,sijenepuisgoûtervosmiséricordes;maisjenedésespèrepasd’enressentirenfinlesdouceseffusions.Vousavezbeaumemontrerunvisagesévère,quandvousmefrapperiezduderniercoup,monderniersoupir serait unmouvement dema confiance ; quand je seraiscette vigne que vous avez abandonnée, que vous avez défenduauxnuéesd’arroser, et quevous avez changée enune solitudeinculte, j’espère que dans votre plus grand éloignement vousvous tournerez versmoi, que du haut duCiel vous jetterez unregardfavorablesurcettevignequevotredroiteaplantée,etquevouslavisiterezparlesinfluencesdevotreamour,queletempsviendra où le désert le plus affreux sera changé en un champfertileetriant,oùvousvousplairezàfaireéclatervotregloireetàpeindrevotrebeauté.Vousaimez,Seigneur,àtravaillersurlenéant : me voici, et si je suis encore quelque chose à mespropresyeux,hâtezmonanéantissementpourcommencervotreouvrage.

L’humbleméditation

Travaillons à notre sanctification courageusement,

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d’oraison et je ne me souviens pas que Dieu m’ait autantfavorisédudondeslarmesquedanscesmatières.Àl’oraison,jen’aurais pas pu m’en défendre ; c’était comme une douceviolence à laquelle il m’était impossible de résister. Quoiquej’étais dans un endroit retiré, où les religieuses ne pouvaientmême me voir en face, il survint que quelques-unes s’enaperçurent. Ilyenavaitdecurieusesqui,à la finde l’oraison,venaient me regarder en face pour voir si j’avais pleuré, puiselles s’en retournaient en souriant. Elles allèrent trouver mamaîtresse et lui dirent qui j’avais des tentations et des peinesd’esprit, et que je ne faisais que pleurer à l’oraison, et qu’ilfallait qu’elle me dirige. Une fois en sortant de l’oraison, mamaîtressevintmeparler,etmedit:«Masœur,qu’avez-vousàpleurer tant ? quelles peines avez-vous ? » Je répondis que jen’avais point d’autres peines que celles de mes péchés, et enparticulierdemonorgueil.Elleneputsavoirautrechose,sinonquejepleuraismespéchés.

Notre Seigneur me fit continuer cette manière d’oraisonpendant quelque temps.Quelquefois, particulièrement dans lesgrandesfêtesdel’année,NotreSeigneurchangeaitmonoraison,etmefaisaitordinairementméditersurlesmystèresquecesfêtesreprésentent.Depuis ce temps-là, jeme suis abandonnée entresesmains,particulièrementpour l’oraison, je l’écoutaiscommeles autres. Quand je me mettais à l’oraison, dans le momentNotre Seigneurm’attirait à lui sur un autre sujet, dans lequel,autantque jepouvais, jemerendaisfidèleàsuivresesattraits,sansavoir reçuaucunconseilniavisdepersonnequedeDieusurmonoraison.

Quelquefoisilmevenaitàlapenséequejem’étaistrompée,parceque jemedisais :«Les religieuses font toutes l’oraisonsur lemême point d’oraison, etmoi je la fais sur un autre. Ilsemblequejenesuispointdelacommunauté».SurcelaNotre

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Seigneur me fit connaître qu’il n’était pas nécessaire de fairetoute l’oraison sur unmême sujet ; qu’on n’avait pas tous lesmêmesbesoins,etquetousn’étaientpasappelésaumêmedegréde grâce ; que pourmoi j’avais à le suivre ; que quand il luiplairait, ilme ferait faire l’oraison sur la lecture, et qu’à cettemarque je connaîtrais que l’attrait de la grâce tomberait sur lepointcommund’oraison.Jeprisdonclafermerésolutiondenepointm’écarter,dansmonoraison,desconseilsetdesavisqueDieum’avaitdonnés,quelquespeinesetquelquestentationsquipuissentm’enarriver.

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XIXe–XXesiècles

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Àquiestaccordéelacontemplationinfuse?

VictorinAubertin

L’unionàJésus-Christ

BonifaceMaes

L’ivressespirituelle

SainteVéroniqueGiuliani

PremièresrévélationsLecouronnementd’épinesLastigmatisation

Gaétan-MariedeBergame

LasouffrancedeJésus

SaintLéonarddePort-Maurice

Acted’amour

BienheureuseMarie-CrescenceHöss

CantiqueSensdelasouffrance

BienheureuseMarie-MadeleineMartinengo

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Lemartyredel’amourParticipationàlaPassionLevœuduplusparfait

AmbroisedeLombez

Prièredansl’ariditéspirituelleL’humbleméditationOraisonetEucharistie

HubertHayer

CommentseplaindreàDieu?

MariedelaNativité

Conduitedansl’ariditéspirituelleL’apprentissagedel’oraison

XIXe–XXesiècles

LudovicdeBesse

L’oraisondefoi

ÈveLavallière

Lettred’amouràJésusPrière

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Valentin-M.Breton

Plandeviespirituelle

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Achevéd’imprimerparJOUVE1rueduDocteurSauvé

53100Mayenneenoctobre2013

Dépôtlégaloctobre2013

ImpriméenFrance